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culture et histoire - Page 1368

  • C’était un 7 mai… 1954 : la chute de Diên Biên Phu

    « Nous sommes ces soldats qui grognaient par le monde
    Mais qui marchaient toujours et n’ont jamais plié…

    Nous sommes cette église et ce faisceau lié
    Nous sommes cette race éternelle et profonde…

    Nos fidélités sont des citadelles »

    Charles Péguy

    Attaque du piton 781 par le 1er BEP (installation du camp et premiers combats) :

    Images sur la chanson de Jean-Pax Méfret :

    Suite à cette bataille, 10 000 Français sont faits prisonniers. En 4 mois, 70% de ces prisonniers du Viet Minh mourront…

    Livres sur « l’Indo » ici.
    On rappellera notamment l’ouvrage illustré, publié par Roger Holeindrel’année dernière.

    http://www.contre-info.com/

  • 8 mai 1945, un autre monde

    Il y a tout juste  59 ans, le 7 mai 1954,  les troupes françaises encerclées dans la cuvette de  de Dien Bien Phu cessaient  leur  combat héroïque  sur ordre du commandement militaire de Hanoï.  Une défaite signant la victoire finale du  Viet Minh en ce qu’elle ouvrait la voie aux concessions décidées lors des accords de Genève assurant la mainmise communiste sur le nord de l’Indochine.  Les généreux  gains territoriaux accordés aux partisans rouges  ont alors surpris Khrouchtchev  et Ho chi Minh eux mêmes qui n’en  espéraient pas tant… et furent le signal de l’exil d’au moins un million d’Indochinois. Une préfiguration du drame des boat people fuyant la victoire totale du Nord Vietnam sur le Sud en 1975 après la chute de Saïgon.  Il y a soixante ans, il faut le rappeler car  la désinformation est tenace,  les troupes françaises ne se  battaient  pas  pour le maintien du statu quo ante, de  la mainmise coloniale sur l’Indochine, mais contre le totalitarisme communiste. Il était en effet établi que l’Indochine, une fois éradiquée la guérilla communiste, serait indépendante  et avait vocation à  rejoindre « l’Union Française » sur le modèle des relations  unissant le Royaume-Uni à ses anciennes colonies et dominions au sein du Commonwealth. Mais ce 7 mai est aussi l’anniversaire  de la capitulation en 1945  des armées allemandes du front de l’ouest  à Reims, en présence du  Maréchal Jodl et l’amiral Von Friedeburg. Certes, cette date a été effacée de notre mémoire collective par   la  seconde cérémonie, beaucoup moins « confidentielle »,  organisée   le 8 mai, à Berlin, pour complaire à Staline.  Ce  qui n’était pas non plus  pour déplaire à De Gaulle puisque la capitulation signée le 7 mai l’avait été par la France en tant que simple témoin  et non comme acteur de cette victoire contre l’Allemagne…

     Ce soixante-dixième anniversaire  de  la défaite  de l’Allemagne hitlérienne, prend aujourd’hui un sens particulier puisque les tensions entre les puissances victorieuses en 45  se matérialisent aujourd’hui en une  nouvelle guerre froide, voire tiède… Ce n’est pas anodin dans le climat actuel de Russophobie note Bruno Gollnisch, le résultat de l’étude historique réalisée par l‘Ifop pour metronews souligne un changement assez net des perceptions du principal vainqueur du nazisme.

     En mai 1945, au sortir d’une guerre qui a tué 567 000 Français – dont 350 000 civils -  et  selon le sondage réalisé déjà à l’époque par l’Ifop,   57% de nos compatriotes  interrogés citaient alors   l’URSS comme le principal acteur de la défaite allemande et 20% seulement les Etats-Unis. La puissance qui était celle du Parti communiste du déserteur Maurice Thorez,  premier parti de France, son influence  idéologique et intellectuelle, la méfiance  voire l’hostilité de De Gaulle vis-à-vis du monde anglo-saxon en général et de l’Amérique en particulier,  expliquaient certainement  ce résultat.

     Il est aussi  évident et factuellement exact  que  les sacrifices immenses, la résistance extraordinaire du peuple russe au cours de la « grande guerre patriotique » ont été déterminants dans cette victoire des alliés. Certainement  plus que le débarquement  de  Normandie, lequel  n’aurait  pas été possible sans la fixation sur le front de l’Est du gros des troupes  allemandes.

     Enfin, tous théâtres d’opérations  confondus, les pertes américaines entre 1941 et 1945 se sont élevées   à un peu  moins de 420 000 morts, assez loin  derrière, à titre de comparaison, avec  les 620 000  morts militaires de la guerre de sécession (1861-1865).

     Le plus lourd tribut, devant l’Allemagne, au second conflit mondial, fut payé par le peuple russe.  Selon les  estimations,   8 800 000  à 11 700 000 militaires furent  tués  en URSS au cours des combats contre l’armée allemande,  auxquels il faut ajouter 13 500 000 à 15 700 000 pertes civiles.  Soit le total effrayant d’environ   27 millions de tués en URSS entre juin 1941 et mai 1945.

     Mais aujourd’hui à cette même question, « Quelle est, selon vous, la nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne en 1945 ? », 54% des sondés  répondent  « Les Etats-Unis » – et même 59% des moins de 35 ans -  et 23% seulement « l’URSS ».

     Ce basculement  l’opinion  doit autant  à la marginalisation politique du PC qu’à l’inféodation toujours plus poussée de la France aux Etats-Unis,  à l’atlantisme, à l’assomption plus générale d’un empire américain qui s’est construit largement sur les ruines et l’affaiblissement des grandes nations européennes depuis 70 ans. Jérôme Fourquet, le directeur du département opinion de l’Ifop souligne que « le jugement s’est complètement inversé »  « dans les années 90 ».

     Quant à Virginie Sansico, « historienne spécialiste de la Seconde Guerre mondiale », interrogé dans metronews, elle «  voit dans ces résultats une certaine logique : Sous De Gaulle, qui était anti-atlantiste, on n’était pas prompt à entretenir la mémoire du Débarquement. De plus, le Parti communiste a longtemps contribué à valoriser les Soviétiques, du temps où il avait une forte influence. Les premières commémorations du Débarquement appuyées par l’Etat ont eu lieu seulement en 1984, organisées par Mitterrand : elles marquent une rupture dans l’opinion. »

     A fortiori chez  « les jeunes (qui)  ont grandi dans un monde où la mémoire du Débarquement est très présente et où, surtout, l’influence culturelle des Etats-Unis n’est plus à démontrer ».  Influence culturelle ?  Oui, ou autrement dit,  l’effet d’une  propagande véhiculée largement sous le masque de l’entertainment   par l’industrie cinématographique et télévisuelle hollywoodienne qui  contribue puissamment à modeler les esprits et susciter des réflexes pavloviens.

     Si le Russe garde, plus que jamais depuis la chute du communisme,  sa place de grand méchant-mafieu-fascistoïde dans les productions américaines,   dans des proportions peut-être plus importante encore  que le Serbe fourbe,  l’arabe-musulman-fanatique et  l’Iranien malfaisant, cela ne doit rien au hasard mais tout à la géopolitique.

     La volonté de Vladimir Poutine de redonner à la Russie une place de tout premier plan sur la scène internationale;  les intérêts souvent  divergents  de Moscou et de Washington au Moyen-Orient ;   le soutien notamment  à la Syrie ;  la résistance du Kremlin  à  la déstabilisation  de l’Ukraine ;  sa lutte pied  à pied contre les menées états-uniennes  en Asie centrale ;  les alliances diplomatiques nouées pour briser le carcan unipolaire ;  la défense résolue  sur le plan intérieur des valeurs traditionnelles et patriotiques, bref  l’opposition   frontale de la Russie de Poutine au  nouvel ordre  mondial,  aux dogmes libertaires sur le plan sociétal, forment les vraies raisons de la diabolisation de ce pays  par « nos » faiseurs d’opinion.

     On se souvient du temps ou Laurent  Fabius, alors dans l’opposition, décrivait Nicolas Sarkozy  comme  un « caniche des Américains ». C’était avant   qu’il endosse le costume de ministre des Affaires étrangères et  qu’il fasse l’éloge  des djihadistes  massacreurs du front  al-nosra « qui font du bon boulot  en Syrie ».    Car  aujourd’hui, M Fabius est le représentant d’un gouvernement tout aussi atlantiste que le précédent et prend bien soin de  ne pas trop tirer sur   sa laisse.

     Il sera donc présent à Moscou pour commémorer la victoire du  8 mai 1945 mais n’assistera pas à l’instar des  dirigeants des États-Unis, de la Grande-Bretagne, des pays membres de l’Otan,  et de la France à la traditionnelle parade militaire du 9 mai sur la Place rouge.  Un boycott qui se veut  la manifestation du soutien français  à l’opposition pro-américaine en Ukraine.  Mais qui matérialise surtout l’effacement programmé de la voix (voie)  d’une France libre,  indépendante, singulière dans le concert des nations. 

    http://gollnisch.com/2015/05/07/8-mai-1945-un-autre-monde/

  • Un ancien franc-maçon dévoile le pouvoir des loges

    Serge Abad-Gallardo, architecte français âgé aujourd'hui de 60 ans, a passé 24 ans au sein de l'obédience du Droit Humain, une émanation du Grand Orient de France. Il a publié Pourquoi j'ai cessé d'être franc-maçon (Éd. Pierre Téqui), après sa conversion au christianisme. Il déclare à Aleteia :

    "Au début, certaines paroles du rituel maçonnique (rite écossais ancien et accepté) m'ont fait reconnaître des liens entre la franc-maçonnerie et l'Église. À titre d'exemple, dans le rituel d'initiation on retrouve des phrases comme : « Cherchez et vous trouverez » ou « Frappez, et l'on vous ouvrira » qui sont dans les Évangiles. Petit à petit, je me suis rendu compte que le sens n'était pas le même. J'ai entendu aussi des expressions très anticléricales. Cela ne m'a pas plu, mais je me suis adapté car  j'étais éloigné de la foi, et surtout de l'Église. En outre, dans la franc-maçonnerie on parlait beaucoup de fraternité, mais j'ai pris conscience que derrière cette fraternité apparente il y avait quelques arrangements et des luttes pour le pouvoir au sein même de la franc-maçonnerie. Enfin, quand je suis revenu à la foi, j'ai compris  que le catholicisme et la franc-maçonnerie étaient incompatibles. [...]

    En 2012, j'ai expérimenté ce que l'on pourrait appeler « le Mal ». Je me suis trouvé face à la noirceur de l'âme humaine et face à la présence du diable dans nos vies avec la sorcellerie et magie. Cela peut paraître incroyable, mais je n'ai pas d'autre choix que de raconter les choses telles qu'elles se sont passées. Le monde s'est fermé pour moi. En quelques mois, j'ai perdu mon emploi, mon bon salaire, la maison où nous habitions, mon voilier de 12 mètres, ma voiture de sport, mes amis… Je me sentais totalement perdu et ne trouvais pas de réponses dans la franc-maçonnerie, qui ne pouvait pas répondre à la question de l'existence du mal dans le monde. L'idée m'est venue de faire une retraite quelques jours dans l'abbaye de Lagrasse ; et là, devant le Christ en croix, je me suis mis à pleurer et me suis rendu compte que ce Christ pleurait avec moi. Cet Amour fut comme une lumière. J'ai passé une semaine avec les moines, et mon cœur s'est ouvert totalement à l'Amour du Christ. [...]

    A-t-elle réellement le pouvoir que lui prête sa légende ?

    Oui, ce pouvoir, elle l'a ! En France, depuis 2012, de nombreux ministres sont maçons. Et les grands maîtres du Grand Orient, du Droit Humain ou de la Grande Loge veulent changer la société. Des lois comme l'avortement, l'euthanasie ou le mariage homosexuel sont des idées maçonniques. Un grand maître de la Grande Loge de France, Pierre Simon, a avoué que toutes ces lois étaient déjà pensées et mûries en loges avant d'être votées par les députés.

    Et elle conspire ?

    La franc-maçonnerie croit en l’« utopie » : autrement dit, tout ce qui est possible à un être humain, il doit et peut se le permettre. Il n'y a pas de limite dans une loi naturelle qui vienne de Dieu ; la morale provient du pacte social. Il n'y a donc pas d'autre mode de vie que l'hédonisme : le plaisir et le bonheur sont l'unique but, le Salut éternel n'existe pas, il faut jouir de la vie. La franc-maçonnerie conspire, alors, contre toute façon de penser qui n'est pas la sienne."

    Ce conflit entre la loi, dite naturelle, et la liberté est typique de l'erreur du monde moderne, héritée de la pensée cartésienne et kantienne. On croit que la loi limite notre liberté, et même certains dans l'Eglise pensent que ce strict attachement à la loi est sclérosant (pilule contraceptive, non communion aux adultères...). Cette fausse liberté s'affranchit ainsi de la réalité naturelle et décide que l'enfant dans le sein de sa mère est considéré ainsi car il est un projet parental. Sinon il est une chose avortable. De même, chacun peut vouloir choisir son sexe, en dépit de sa nature. Cette erreur a été dénoncée et corrigée par les derniers papes, notamment Jean-Paul II dans Veritatis Splendor :

    "Le prétendu conflit entre la liberté et la loi se présente à nouveau aujourd'hui avec une intensité particulière en ce qui concerne la loi naturelle, spécialement au sujet de la nature. En réalité, les débats sur la nature et la liberté ont toujours accompagné l'histoire de la réflexion morale, prenant un tour aigu au temps de la Renaissance et de la Réforme, comme on peut le remarquer dans les enseignements du Concile de Trente. L'époque contemporaine est marquée par une tension analogue, bien que dans un sens différent : le goût de l'observation empirique, les processus de l'objectivité scientifique, le progrès technique, certaines formes de libéralisme ont amené à opposer les deux termes, comme si la dialectique — sinon même le conflit — entre la liberté et la nature était une caractéristique qui structure l'histoire humaine. En d'autres temps, il semblait que la « nature » soumettait totalement l'homme à ses dynamismes et même à ses déterminismes. [...]

    La confrontation de la position de l'Eglise avec la situation sociale et culturelle actuelle met immédiatement en évidence l'urgence qu'il y a, pour l'Eglise elle-même, de mener un intense travail pastoral précisément sur cette question fondamentale : « Ce lien essentiel entre vérité-bien-liberté a été perdu en grande partie par la culture contemporaine ; aussi, amener l'homme à le redécouvrir est aujourd'hui une des exigences propres de la mission de l'Eglise, pour le salut du monde. La question de Pilate " qu'est-ce que la vérité ? ", jaillit aujourd'hui aussi de la perplexité désolée d'un homme qui ne sait plus qui il est, d'où il vient et où il va. Et alors nous assistons souvent à la chute effrayante de la personne humaine dans des situations d'autodestruction progressive. A vouloir écouter certaines voix, il semblerait que l'on ne doive plus reconnaître le caractère absolu et indestructible d'aucune valeur morale. Tous ont sous les yeux le mépris pour la vie humaine déjà conçue et non encore née ; la violation permanente de droits fondamentaux de la personne ; l'injuste destruction des biens nécessaires à une vie simplement humaine. Et même, il est arrivé quelque chose de plus grave : l'homme n'est plus convaincu que c'est seulement dans la vérité qu'il peut trouver le salut. La force salvifique du vrai est contestée et l'on confie à la seule liberté, déracinée de toute objectivité, la tâche de décider de manière autonome de ce qui est bien et de ce qui est mal. Ce relativisme devient, dans le domaine théologique, un manque de confiance dans la sagesse de Dieu qui guide l'homme par la loi morale. A ce que la loi morale prescrit, on oppose ce que l'on appelle des situations concrètes, en ne croyant plus, au fond, que la Loi de Dieu soit toujours l'unique vrai bien de l'homme »."

    Michel Janva http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html

  • Les Bourbon-Parme, quelle famille ! par Georges FELTIN-TRACOL

    Descendants du duc de Parme Philippe Ier, fils cadet de Philippe V d’Espagne, lui-même deuxième petit-fils du « Roi-Soleil », les Bourbon-Parme sont devenus des Capétiens européens. « Un réseau presque invisible est en suspens au-dessus de l’Europe des États-nations depuis son origine, réseau de familles qui, à partir d’un locus déterminé, a fait souche un peu partout. Ce sont les Capétiens en France, en Espagne, en Italie, au Portugal et ailleurs. Par le biais des alliances, des contrats, des mariages et parfois aussi des guerres aboutissant à de nouveaux consensus, ce réseau s’est allié à d’autres, constituant ainsi, lentement l’anima de l’Europe (p. 13) », écrit la princesse Maria Teresa, deuxième fille et troisième enfant du prince Xavier de Bourbon-Parme.

     

    Les Bourbon-Parme. Une famille engagée dans l’histoire est particulier dans sa réalisation puisqu’il relève tout autant du registre des mémoires et autres souvenirs que de l’(auto-)analyse historique, politique et sociologique. Tantôt l’auteur emploie le nous collectif, voire la troisième personne du singulier, tantôt la première personne du singulier, ce qui est déroutant. Par ailleurs, sur le plan formel, une relecture attentive aurait pu éviter non pas quelques inévitables coquilles (« Lichtenstein » p. 78), mais de regrettables erreurs sur les patronymes, les lieux, les dates sans omettre l’anachronisme. Par exemple, l’un des deux cahiers photographiques présente une photographie du roi carliste espagnol Alfonso-Carlos légendée en 1939 (p. XII) alors qu’il meurt trois ans plus tôt ! Le militant nationaliste radical italien Stefano Delle Chiaie est écrit « Della Ciae (p. 161) ». Quand le frère aîné de l’auteur est présenté aux carlistes à Montejurra en 1957, il est fait mention de « 1997 (p. 127) ». On a aussi l’impression que le premier président du Sénégal, Léopold Sédar Senghor, est déjà à l’Académie française : il n’y entre qu’en 1983 ! On peut croire que le socialiste Charles Hernu était en 1976 « le ministre français de la Défense (p. 230) » alors qu’il ne le sera qu’entre 1981 et 1985. Plus édifiant encore, Maria Teresa de Bourbon-Parme a rencontré quelques fois François Mitterrand. La dernière fois, ce fut à l’occasion de l’enterrement du roi des Belges Baudoin en 1993. Or on lit que Mitterrand « mourut une semaine plus tard (p. 238) ». En réalité, ce sera trois années après…

     

    Des caractères rebelles

     

    Le 24 juillet 2014, le portrait quotidien en dernière page de Libération s’ouvre à Maria Teresa de Bourbon-Parme. Stupeur et tremblement chez les ultimes lecteurs du journal trotsko-bancaire ! Et pourtant ! Qualifiée de « princesse rouge », Maria Teresa de Bourbon-Parme s’affirme progressiste. Outre Mitterrand, elle discuta avec le  président anti-gaulliste du Sénat Gaston Monnerville (1958 – 1968) et Jacques Attali. Cette fervente sympathisante de la cause palestinienne rencontra en 2000 le président bolivarien du Venezuela, Hugo Chavez. Elle fut aussi une amie de Roger Garaudy (p. 229). L’a-t-elle encore revu après son incroyable condamnation à propos de son essai, Les mythes fondateurs de la politique israélienne ?

     

    Le livre apparaît comme le plaidoyer pro domo pour son engagement à gauche tout en se voulant fidèle à l’héritage des siens. Plusieurs chapitres saluent ainsi des figures familiales marquantes : sa mère, Madeleine de Bourbon-Busset, sa sœur aînée, Françoise, qui se porta volontaire en 1956 dans des services caritatifs en faveur des réfugiés hongrois. Si sa sœur cadette, Marie des Neiges, défend l’environnement, les animaux sauvages et l’écologie, une autre sœur, Cécile, œuvra au service de l’Ordre de Malte en tant qu’infirmière au Biafra rebelle entre 1969 et 1971. Elle parle aussi de deux aïeules : Marie des Neiges de Bragance (1852 – 1941) et la duchesse régente de Parme, Marie-Caroline de Berry, la sœur aînée du dernier roi légitime de France, Henri V, qui se montra fine politique. En revanche, la princesse se montre injuste envers le roi Charles X qu’elle dépeint en reprenant les vieilles antiennes historiographiques républicaines.

     

    Elle célèbre en outre la mémoire de sa tante et marraine, l’impératrice-reine Zita d’Autriche-Hongrie. Ses souvenirs personnels interfèrent cependant avec les faits historiques précis. Elle paraît méconnaître qu’en 1914, l’Italie se voulait encore neutre et que Londres entrait en guerre contre l’Allemagne après la violation de la neutralité belge. Plus grave, elle parle de « l’Italie de Charles-Albert (p. 19) » en 1833 alors qu’il régnait sur le Piémont-Sardaigne, l’unité italienne n’étant pas encore réalisée…

     

    Si Maria Teresa revient sur les tentatives de paix de son père et de son oncle Sixte en 1917 avec leur beau-frère l’empereur Charles, elle évacue les sévères contentieux qui déchirèrent sa famille. Son grand-père, Robert Ier, dernier duc de Parme, conclut trois mariages successifs. Ses deux premiers mariages lui donnèrent de nombreux enfants déficients si bien qu’Élie devînt de facto le chef de famille. En 1914, si deux de ses demi-frères, les princes Xavier et Sixte, revêtent l’uniforme belge, Élie sert dans l’armée austro-hongroise. En représailles, la République française lui confisque ses biens en 1915 et place sous séquestre le château de Chambord. Leur liquidation effective commence en 1919 en application du traité de Saint-Germain-en-Laye. C’est alors que Sixte et Xavier décident de poursuivre le prince Élie devant la justice française afin de réclamer une plus grande part de leur héritage. Le prince Élie doit finalement vendre l’ensemble de ses biens français et garde envers ses demi-frères une tenace rancune.

     

    Maria Teresa de Bourbon-Parme exalte bien sûr son père, Xavier, et de son frère aîné, Charles-Hugues. En revanche, hormis trois – quatre mentions fugaces, elle passe rapidement sur son benjamin, le prince Sixte-Henri qu’elle appelle Sixte. D’importantes divergences politiques ont rompu les liens entre frères et sœurs à propos de la question carliste en Espagne.

     

    Le carlisme en héritage

     

    En 1936, Xavier/Javier de Bourbon-Parme est désigné par le dernier roi carliste comme régent du mouvement. Il s’oppose rapidement aux menées autoritaires de Franco. Résistant en France, il est déporté à Dachau où il se lie d’amitié avec Léon Blum. Libéré en 1945, il reprend à son compte les prétentions carlistes et en relance le mouvement. Cette prétention se justifie parce que « la branche de Parme est l’unique branche qui soit restée fidèle à la branche aînée de France d’abord et d’Espagne ensuite (pp. 24 – 25) ». Très vite, Javier Ier est affectueusement surnommé « le vieux roi ».

     

    En 1833, contre la Pragmatique Sanction du roi Ferdinand VII d’Espagne qui fait de sa jeune fille Isabelle sa seule héritière au mépris de la loi semi-salique, le frère du roi, Don Carlos, inaugure le carlisme, ce légitimisme espagnol qui « milite pour la légitimité monarchique (la loi semi-salique) en faveur de la dynastie carliste, et pour la légitimité populaire (les fueros : les droits régionaux) (p. 95) ». Trois guerres civiles déchirent l’Espagne au XIXe siècle. Adversaires du libéralisme et du parlementarisme et proches des puissances conservatrices terriennes (Prusse, Autriche, Russie), les rois carlistes, véritables souverains espagnols, incarnent un esprit conservateur-révolutionnaire méconnu. Carlos VII déclarera ainsi : « Je veux être le roi des républiques espagnoles (p. 21). » Son fils, Jaime III, sera officier du tsar, puis militant de la C.G.T. à Paris !

     

    Adversaire du Caudillo, Xavier/Javier appelle ses partisans à s’opposer au franquisme. Si Charles-Hugues/Carlos-Hugo travaille un temps incognito dans les mines des Asturies, son frère Sixte-Henri s’engage dans la Légion étrangère espagnole avant d’être tous deux démasqués et expulsés ! Dès lors, Charles-Hugues et ses sœurs, en particulier Maria Teresa, se rapprochent de l’opposition démocratique et font évoluer le carlisme. Dans le prolongement de Mai 1968, ils invitent les « peuples d’Espagne, [à réclamer] à la fois une avancée sociale, le respect de leurs droits régionaux, de leurs lois traditionnelles, de leur gouvernement autonome, tout en restant dans le cadre de la nation espagnole (p. 36) ». Le Mouvement ouvrier traditionaliste se transforme en un Front ouvrier qui coopère avec les syndicats clandestins socialistes et communistes. Le carlisme devient vite le fer de lance de l’opposition anti-franquiste. « Pour les classes populaires, surtout dans certaines régions d’Espagne (Catalogne, Baléares, Valence, Pays Basque, Galice…) ce sont les libertés régionales (fueros) qui apparaissent comme plus réelles, plus immédiates. Celles qu’on appellerait aujourd’hui “ libertés sociales ”, “ libertés collectives ”, tandis que les libertés individuelles, dans ce contexte d’extrême injustice sociale, demeurent le fait de privilégiés et les libertés politiques l’instrument de “ partis de cadres ”, contrôlés justement par ces derniers (la liberté du renard dans un poulailler) (p. 17). »

     

    En se débarrassant de son caractère traditionnel, le carlisme adopte des positions fédéralistes, prône l’autogestion et se réclame du socialisme ! Ces Bourbon-Parme-là visitent la Chine de Mao en 1975, séjournent à Cuba et sont accueillis en Yougoslavie par Tito en 1972. Il s’agit d’« une expérience intéressante pour un homme politique qui voit dans l’autogestion une solution d’avenir possible, point culminant des aspirations forales (p. 147) ». L’auteur parle de « l’utopie carliste (p. 233) » avant de préciser que « notre “ Utopie ” répond à un enracinement multiple, utopie “ aveugle ”, non pas aux difficultés, mais aux échecs qui ne sont qu’épisodiques; ce qu’elle proposait à l’époque est aujourd’hui à l’ordre du jour (p. 240) ». Ce tournant autogestionnaire et socialiste entraîne la rupture avec Sixte-Henri qui maintient, lui, la tradition carliste sans verser dans un conservatisme délétère. Le néo-carlisme, désormais trop marxiste-léniniste, aurait mieux fait de s’inspirer du socialisme organique ainsi que des idées de Proudhon et des « socialismes de troisième voie » promouvant le créditisme ou le distributivisme cher à Jacques Duboin (1).

     

    Des princes d’avant-hier pour après-demain

     

    La transition démocratique de l’Espagne se fit sans l’apport du carlisme qui n’obtint que de maigres résultats électoraux. C’est regrettable, car un carlisme sainement pensé aurait pu (ou pourrait) en tout cas résoudre les brûlantes tensions nationalitaires basques et catalanes inhérentes à la conflictualité propre de l’Espagne. En défendant les fueros, les carlistes anticipaient le principe de subsidiarité ! « Le pacte des nationalités avec le roi permettant […] une unité plus flexible et plus forte que le rigide schéma jacobin (p. 68). » Mieux, la pensée carliste prévoit sans crainte l’effacement programmé de la structure stato-nationale. « L’État-nation est un […] problème auquel s’intéresse Charles-Hugues. Condamné comme État à perdre une partie de ses attributions par une “ résorption interne ” (puisqu’il y a récupération par les municipalités et les entités locales d’une partie des fonctions remplies par l’État) il est aussi victime d’une “ résorption externe ”. Ainsi, dans le cadre de la nouvelle Europe, la défense, l’économie, la diplomatie, la politique extérieure sont de moins en moins nationales et chaque fois plus européennes. Un jour, elles seront du ressort européen, voire mondial. L’État-nation garde cependant de l’importance comme gardien de la personnalité, de l’identité et de la culture des vieilles nations européennes et support d’un “ supra-État ” permettant de construire une véritable “ maison Europe ” (pp. 174 – 175) ». De tels propos changent des considérations strictement nationales des Orléans…

     

    Maria Teresa de Bourbon-Parme considère que son frère Charles-Hugues fut un précurseur, voire un visionnaire même si sa démarche recoupe parfois certaines visées mondialistes… Afin d’expliquer l’impossible (?) synthèse entre les fueros d’antan et l’idée fédéraliste contemporaine, elle recourt à la figure du « gatekeeper (le garde-barrière), celui qui, s’appuyant sur le prestige que lui donnent l’histoire et le fait d’en avoir hérité, puisse lever la barrière ou la baisser. Quelle barrière ? Celle du licite, de ce qui est considéré comme tel si l’on veut rester fidèle aux règles et traditions qui conforment notre sens du devoir et notre vision de la vie. Le gatekeeper est revêtu de l’aura de la tradition, et de ce qui lui permet de l’interpréter. C’est là que réside son pouvoir qu’il peut exercer dans un sens positif ou au contraire dans un sens négatif. Dans un sens positif s’il réveille cette tradition en l’incorporant à la vie de la société, à la vie de la société en mouvement, et surtout s’il parvient à faire que ceux qui le suivent soient à leur tour capable de faire de même. Dans un sens négatif s’il ferme la barrière, c’est-à-dire s’il prétend être l’unique interprète du patrimoine historique, d’un patrimoine historique figé ! (p. 94) ». Ne s’agit-il pas d’une attitude propre à un esprit proprement révolutionnaire-conservateur, d’une forme particulière du katéchon cher à Carl Schmitt (2) ? « Le terme, qui date de la Deuxième Épître aux Thessaloniciens (2, 6 sq.), indique la Puissance qui fait obstacle à la pleine épiphanie de l’Anomos, de l’Adversaire, écrit le philosophe italien Massimo Cacciari. Hippolyte, déjà, interprétait le katéchon en termes politiques, comme image de l’Empire, et Schmitt reprend cette interprétation : pour lui le katéchon est également l’Empire médiéval, dont la fonction consisterait à “ maintenir ” le Siècle sous sa “ forme ”, en attente de sa Fin, à l’abri des “ séductions ” diaboliques (3) ».

     

    Il serait cependant vain d’espérer dans une quelconque et hypothétique restauration monarchique présente ou à venir. L’ancien monde a laissé la place à un monde moderne qui s’efface devant un univers ultra-moderne en décrépitude. Le sacrifice et l’abnégation du carlisme resteront toutefois comme des exemples fidèles de résistance aux impostures du moment au même titre que les Vendéens, les chouans, les Communards parisiens, les mutins de Cronstadt ou les commandos tiercéristes du « Commandant Zéro » Eden Pastora dans la décennie 1980 au Nicaragua ! De bien trop rares preuves historiques de fidélité à leur Idée constitutive.

     

    Georges Feltin-Tracol

     

    Notes

     

    1 : Le socialisme distributiste. Jacques Duboin 1878 – 1976, présentation et choix de textes par Jean-Paul Lambert, L’Harmattan, préface d’Alain Caillé, 1998.

     

    2 : Sur le katéchon, cf. aussi Théodore Paléologue, Sous l’œil du Grand Inquisiteur. Carl Schmitt et l’héritage de la théologie politique, Cerf, coll. « Passages », 2004.

     

    3 : Massimo Cacciari, Déclinaison de l’Europe, Éditions de l’Éclat, coll. « Philosophie imaginaire », 1998, p. 121.

     

    • S.A.R. Maria Teresa de Bourbon-Parme, Les Bourbon-Parme. Une famille engagée dans l’histoire, Éditions Michel de Maule, coll. « Histoire » (41, rue de Richelieu, 75001 Paris), 2014, 251 p., 22 €.

    http://www.europemaxima.com/?p=4116

  • Communautarisme : l’analyse de la revue d’Eléments

    Retrouvez la Chronique de la vieille Europe de Radio Courtoisie avec François Bousquet et Olivier François qui analysent le phénomène communautaire, dans le cadre du dossier de la revue Eléments.

    Les communautés, qu’elles soient anciennes ou récentes, de nature ethnoculturelle, linguistique, religieuse, sexuelle ou autre, sont des dimensions naturelles d’appartenance. Pourtant de la droite à la gauche, en passant par toutes les nuances politiques intermédiaires, le « communautarisme » semble aujourd’hui faire l’unanimité contre lui, pourquoi ? La réponse de la revue Eléments…

    http://fr.novopress.info/

  • Hommage à Jeanne d’Arc – A quoi ressemblera le défilé du 10 mai ?

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    A travers des vidéos réalisées par MPI TV, de nombreuses personnalités ont, ces jours-ci, chacune à leur façon, parlé de leur admiration pour Sainte Jeanne d’Arc et encouragé à venir lui rendre hommage ce dimanche 10 mai 2015, lors du défilé organisé par Civitas.

    MPI – A quoi ressemblera ce défilé ?

    Alain Escada – Depuis 2010, Civitas organise chaque deuxième dimanche du mois de mai un hommage à Sainte Jeanne d’Arc. Et, dès le début, la question s’est posée de savoir quelle forme donner à ce défilé très particulier qui n’est ni une procession religieuse ni une manifestation tumultueuse et désordonnée. Il y a quelques jours, j’ai providentiellement pu découvrir des numéros de L’Illustration et du Figaro des années vingt et trente qui, au mois de mai, dressaient un compte-rendu détaillé du cortège traditionnel de Sainte Jeanne d’Arc à Paris.

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    Le cortège démarrait avec les fanfares envoyées par des écoles catholiques. Ensuite prenait place la Fédération Nationale Catholique du général de Castelnau. Les Scouts de France en uniforme et tous leurs étendards défilaient avec à leur tête le général Guyot de Salins, le chanoine Cornette et le R.P. Doncœur. Il y avait là aussi les Guides de France. Et puis défilaient les anciens combattants de la première guerre mondiale, et notamment les Croix de Feu ovationnés par le public.
    Suivaient toutes les organisations de la droite nationale et nationaliste,  ensuite des groupes de jeunes filles en costumes provinciaux, des  associations d’étudiants et, bien sûr, l’Action française conduite par Charles Maurras, Léon Daudet et l’Amiral Schwerer, et enfin les Camelots du roi qui fermaient la marche.

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