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culture et histoire - Page 1620

  • François 1er (1494 - 1547) Le dernier roi-chevalier

    François, comte d'Angoulême, cousin et gendre du roi Louis XII, succède à celui-ci sur le trône de France le 1er janvier 1515, sous le nom de François 1er.

    Le nouveau roi est grand (plus de deux mètres), affligé d'un visage ingrat, mais élégant et «portant beau». Cultivé et brave mais fantasque et moyennement intelligent, il engage le pays dans de folles aventures militaires contre son rival Charles Quint. Il conserve néanmoins à la France les acquis de ses prédécesseurs, la Picardie, la Bourgogne et le nord de la Navarre.

    Peu affecté par ses déboires militaires, il développe une vie de cour brillante, inspirée des fastes de l'Italie. Sous son long règne de 32 ans s'épanouit la première Renaissance française. Mais il laisse à sa mort un royaume agité par de nombreux ferments de révolte (religion, impôts...). Marie Desclaux.

    Triple bonheur

    Jean d'Angoulême, grand-père du futur roi, est le fils cadet de Louis d'Orléans et Valentine Visconti. La famille de celle-ci sera plus tard évincée de la direction de Milan, en Lombardie, par la famille rivale des Sforza, ce qui offrira au roi de France un motif d'intervention en Italie.

    Jean d'Angoulême est détenu en Angleterre ainsi que son frère, le poète Charles d'Orléans, pendant 32 ans, à la suite de la défaite d'Azincourt. Enfin libre, il s'entoure à Cognac de poètes et d'érudits. Son fils Charles de Valois-Orléans, comte d'Angoulême, participe à la «Guerre folle» en 1485 contre le roi Charles VIII et la régente Anne de Beaujeu. Il rentre dans le rang suite à son mariage avec Louise de Savoie, nièce de la régente. Il a 38 ans et son épouse 12 à peine.

    Le couple a une fille, Marguerite, future reine de Navarre et grand-mère d'Henri IV, le 11 avril 1492, puis François, le 12 septembre 1494. Sa mère lui donne le jour sous un arbre de son parc, dans son château de Cognac. Son prénom lui vient de son parrain, François de La Rochefoucauld (dans cette seigneurie de l'Angoumois, l'aîné porte encore et toujours le même prénom).

    L'inconstant Charles d'Angoulême est d'autant plus heureux que le même jour, ses deux maîtresses habituelles donnent également naissance à un enfant ! Mais son bonheur est de courte durée car il meurt un an plus tard.

    Veuve à 19 ans, Louise prend le parti de rester chaste pour se consacrer à l'éducation de ses enfants et en particulier de son fils, qu'elle idolâtre. Le trio restera jusqu'à la fin passionnément uni.

    En 1498, l'accession au trône de Louis XII, qui n'a pas d'enfant mâle, rapproche François du trône. Pour consolider ses chances, Louise négocie son mariage avec Claude de France, la fille aînée du roi et d'Anne de Bretagne malgré l'hostilité de cette dernière au mariage.

    La mort d'Anne, le 9 janvier 1514, lève le dernier obstacle au mariage qui est célébré avec discrétion dès le 18 mai suivant. Boîteuse et sans grâce, Claude donnera sept enfants à son royal époux mais ne saura guère le séduire. Sa bonté lui vaudra toutefois l'affection du peuple et une prune, la reine-claude, perpétue son souvenir.

    Louis XII, qui n'a pas renoncé à avoir un fils, se remarie peu après avec une sœur du roi d'Angleterre Henri VIII mais la mort le surprend le 1er janvier 1515, faisant ipso facto de François d'Angoulême le nouveau roi de France.

    Il a 19 ans. Il est sacré à Reims le 25 janvier suivant, le jour de la Saint Paul, et fait son entrée solennelle à Paris le 15 février de la même année, arborant son emblème, la salamandre, et sa devise : Nutrisco et extinguo («Je nourris et j'éteins»).

    Un début de règne triomphal

    François 1er inaugure son règne en confiant l'amirauté de Guyenne et de Bretagne à La Trémoille, fidèle de Louis XII, et en octroyant le maréchalat aux sires de Lautrec et de La Palice. Comme connétable et chef des armées, il désigne le duc Charles III de Bourbon, cousin de sa mère et puissant féodal, au demeurant excellent capitaine.

    Il confie par ailleurs la charge de chancelier (chef du gouvernement) à un proche de sa mère, Antoine Duprat, premier président du parlement de Paris. Devenu veuf, il entrera dans les ordres, deviendra archevêque de Sens et obtiendra la barrette de cardinal en 1527.

    D'emblée, le jeune et fougueux souverain relance les guerres d'Italie en faisant valoir ses droits sur le Milanais, hérités de Valentine Visconti. Le duché de Milan est tombé entre les mains de Maximilien Sforza, fils du condottiere (chef de guerre) Ludovic le More. Le duc est allié au pape Léon X, à l'empereur Maximilien de Habsbourg et aux cantons suisses représentés par le cardinal de Sion, Mathias Schiner.

    Le 13 septembre 1515, il écrase les Suisses dans la plaine du Pô, à Marignan. Cette bataille se solde par 16000 morts, ce qui fait d’elle la plus meurtrière depuis l’Antiquité. Le soir de la victoire, le jeune roi, amoureux des romans de chevalerie, se serait fait adouber selon l'ancienne coutume par le chevalier Bayard, l'un des héros de la journée.

    Le retentissement de la bataille est immense dans l'opinion. Il conduit le pape Léon X à reconnaître en François 1er le légitime duc de Milan, de Parme et de Plaisance ! Les deux signataires concluent par ailleurs un concordat important à Bologne le 18 août 1516. Il régira les relations entre la France et le Saint-Siège jusqu'en 1790.

    Par le traité de Noyon, le même mois, Charles d'Espagne, petit-fils de l'empereur Maximilien de Habsbourg, obtient de conserver le royaume de Naples en échange d'un tribut à la France. Le 29 novembre 1516, à Fribourg, les cantons suisses et la France concluent une «paix perpétuelle». Ces derniers se mettent même au service des rois de France jusqu'à la Révolution française. Enfin, par le traité de Cambrai, le 11 mars 1517, la France et les Habsbourg concluent une alliance défensive contre les Turcs.

    Après d'aussi bons débuts, le roi entame, province par province, le traditionnel «tour de France» avec la Cour, au total 3 à 4.000 personnes. Chaque ville organise une entrée solennelle. Entre deux voyages, le roi réside dans l'un ou l'autre de ses châteaux du Val de Loire, avec une préférence pour Amboise. Le 28 février 1518, à Amboise justement, la reine Claude met au monde son premier enfant, un garçon prénommé François.

    Un roi amoureux de la guerre

    La situation se corse avec la mort de l'empereur allemand Maximilien 1er de Habsbourg, le 12 janvier 1519. Le choix de son successeur dépend des sept Grands Électeurs de la Diète de Francfort. Grisé par ses premiers succès, François 1er se porte candidat à l’empire d’Allemagne contre le favori, Charles, petit-fils de Maximilien 1er de Habsbourg. Les deux rivaux dépensent de l’argent sans compter pour séduire les grands électeurs allemands.

    Au final, le 28 juin 1519, Charles est élu à l'unanimité et devient pour l'Histoire Charles V ou Charles-Quint. Par le biais de mirobolants héritages, il se trouve être le souverain des États autrichiens, bourguignons et espagnols, ainsi que des colonies espagnoles d’outre-mer, en plein essor depuis l’exploration du Nouveau Monde par Christophe Colomb un quart de siècle plus tôt.

    La guerre ne tarde pas à éclater entre l’empereur et le roi de France. Elle se corse de querelles religieuses car, pendant que les deux souverains s'occupaient de leur élection, Martin Luther diffusait en Allemagne et au-delà une nouvelle religion, le protestantisme. Charles-Quint et François 1er rêvent d’asseoir leur domination sur l’Italie, riche, belle et divisée.

    Désireux de nouer une coalition contre l’empereur, François 1er rencontre près de Calais, le 7 juin 1520, le roi d’Angleterre Henri VIII. Malgré le faste de ce «Camp du Drap d'Or», la rencontre tourne au fiasco et Henri VIII s’allie finalement avec l’empereur et le pape contre le roi de France.

    La guerre menace à nouveau entre l'empereur et le roi de France. Le premier revendique la Bourgogne et conteste la souveraineté de François 1er sur le Milanais. Celui-ci est placé sous la garde du maréchal Odet de Foix, seigneur de Lautrec, médiocre capitaine qui ne doit sa promotion qu'à la protection de Françoise de Châteaubriant, maîtresse du roi. Lautrec pénètre avec ses troupes sur les territoires pontificaux, ce qui permet au pape Léon X de rendre publique son alliance avec Charles Quint ! Le 19 août 1521, les Milanais chassent la garnison française...

    À l'ouest, en Navarre, une offensive d'Henri d'Albret, désireux de récupérer sa couronne de Navarre, est repoussée par les Espagnols. Enfin, au nord, l'offensive de Robert de la Marck, seigneur de Sedan, sur le Luxembourg est de même repoussée par les Impériaux qui menacent d'envahir la France. Et le roi d'Angleterre conclut l'alliance de Bruges avec l'empereur le 23 août 1521.

    Pour ne rien arranger, le roi est trahi par le connétable Charles III de Bourbon dont il a malencontreusement saisi les immenses domaines. Charles, ayant rejoint Charles Quint, va devenir le meilleur de ses capitaines.

    L'armée royale se concentre à Lyon au printemps 1523, puis passe les Alpes sous le commandement de l'amiral de Bonnivet et vient mettre le siège devant Milan au moment, en septembre 1523, où le connétable Charles de Bourbon fait défection. Le siège s'éternise et au printemps suivant, les Français doivent se replier dans la confusion. Bayard trouve la mort sur le chemin...

    En juillet 1524, l'invasion menace plus que jamais. Tandis que les Anglais menacent d'entrer en Normandie et Charles Quint en Bourgogne, Charles de Bourbon envahit la Provence. Le roi est par ailleurs affecté par la mort de la reine Claude, à Blois, le 26 juillet 1524.

    Mais une révolte des paysans inspirée par la Réforme luthérienne oblige Charles Quint à revenir en Allemagne cependant que Charles de Bourbon piétine devant Marseille et, harcelé par l'armée d'Anne de Montmorency, doit se retirer.

    Plutôt que de se satisfaire de cette heureuse issue, François 1er décide de reprendre l'offensive dans le Milanais. Il met le siège devant Pavie, la «bien remparée». Dans la nuit du 23 au 24 février 1525, une attaque du connétable de Bourbon et des Impériaux aboutit à un désastre total. Le roi lui-même est capturé et ses meilleurs capitaines tués. Ainsi le maréchal de La Palice, l'amiral de Bonnivet, son oncle René de Savoie, Bussy d'Amboise ou encore Louis de La Trémoille. «De toutes choses ne m'est demeuré que l'honneur, et la vie qui est sauve», écrit François 1er à sa mère Louise de Savoie, qui va gouverner en son absence.

    En captivité à Madrid, il se voit réclamer par l'empereur l'Artois, la Flandre et la Bourgogne. Henri VIII veut pour sa part rien moins que les anciens fiefs des Plantagenêts et Charles de Bourbon la Provence érigée en royaume indépendant ! Le roi, bien sûr, refuse. Sa mère, installée à Lyon et assistée par le chancelier Duprat, assure tant bien que mal la régence. Elle arrive à détacher Henri VIII de l'alliance avec Charles Quint, lequel voit ressurgir en Hongrie la menace turque.

    À l'intérieur, le mécontentement gronde. Les parlementaires manifestent leur opposition au concordat de Bologne et s'en prennent également à quelques penseurs proches de la Réforme, qu'ils menacent de procès, tels Lefèvre d'Étaples et Guillaume de Briçonnet, évêque de Meaux. Le roi tente mais en vain de ramener le calme de sa prison de Madrid.

    La paix est enfin signée le 14 janvier 1526. François 1er concède la cession de la Bourgogne, promesse qu'il se hâtera de renier sitôt sa liberté assurée, et le renoncement à ses droits sur le Milanais. Charles de Bourbon est rétabli dans ses droits mais cette promesse aussi ne sera pas tenue. En gage de bonne exécution du traité, les deux fils aînés du roi, François (10 ans) et Henri, (8 ans, futur Henri II), sont livrés en otage à l'empereur. L'échange a lieu sur la Bidassoa, dans le pays basque. Par ailleurs, François 1er obtient la main d'Éléonore d'Autriche, sœur de Charles Quint.

    Mûri par les échecs et les malheurs, François 1er hisse Anne de Montmorency à la fonction de grand maître de l'armée. Philippe Chabot, seigneur de Brion, devient Amiral de France.

    En juin 1526, les états de Bourgogne refusent d'être cédés à l'empereur et François 1er saute sur l'occasion pour contester le traité de Madrid. Peaufinant sa riposte, il noue une nouvelle coalition, la ligue de Cognac, avec Milan, Venise et le pape. Mais il ne fait rien pour empêcher l'invasion des États pontificaux et la mise à sac de Rome par les lansquenets du connétable de Bourbon.

    Le roi d'Angleterre Henri VIII a besoin d'aide pour divorcer de Catherine d'Aragon, tante de Charles Quint, et épouser sa maîtresse Anne Boleyn. Il se rapproche de François 1er. Ce dernier en profite pour relancer la guerre en Italie. C'est un nouveau désastre. Le maréchal de Lautrec meurt avec les deux tiers de ses troupes, du fait du choléra, en tentant de marcher sur Naples. Le comte de Saint-Pol est capturé le 21 juin 1529 en tentant de reprendre Gênes. Mais Charles Quint n'est pas plus heureux. Il est menacé sur ses arrières par les princes luthériens mais aussi par les Turcs qui assaillent Vienne.

    La paix s'impose à tous. Elle est négociée par Louise de Savoie et Marguerite d'Autriche à Cambrai, enfin signée le 5 août 1529, et pour cela appelée «paix des Dames».

    Elle permet à François 1er de retrouver enfin ses deux fils. Ceux-ci franchissent les Pyrénées le 1er juillet 1530. Ils ne sont pas seuls mais accompagnés par Éléonore d'Autriche, veuve du roi du Portugal Manuel 1er et promise en secondes noces à leur royal père. Celui-ci, il est vrai, porte davantage d'intérêt à sa nouvelle favorite, Anne d'Heilly, demoiselle de Pisseleu, qui a succédé dans son cœur à Françoise de Châteaubriant et restera à ses côtés jusqu'à sa mort.

    Le difficile chemin de la paix

    En 1531, les frères du Bellay négocient une alliance entre le roi de France et les protestants allemands de la Ligue de Smalkade.

    Très tôt, François 1er songe à une entente avec le sultan Soliman le Magnifique pour prendre en tenaille l'empire de Charles Quint. Il mène les négociations par l'intermédiaire d'un transfuge espagnol, Antonio Rincon. Dans le même temps, il prend langue avec le pacha d'Alger.

    Une ambassade turque reçue à Châtellerault en 1535 négocie les «capitulations» avec Jean de La Forêt, lequel se rend aussi à Constantinople et à Alger où il demande au sultan et au pacha de monter des expéditions contre les alliés italiens de Charles Quint, Gênes et Naples. Les Capitulations offrent aux navires français le monopole du commerce avec les Ottomans et confient au roi la protection des Lieux Saints et des chrétiens d’Orient. Elles resteront en vigueur jusqu’à la fin du XIXe siècle.

    La mort du dernier duc de Milan, François-Marie Sforza, en novembre 1535, convainc François 1er de reprendre les hostilités en Italie. Mais il a désormais du mal à trouver des alliés sur place. L'amiral Philippe Chabot envahit la Savoie. Charles Quint riposte en mettant à sac la Provence.

    La mort suspecte du dauphin

    Le 10 août 1536, le dauphin François meurt subitement, sans doute pour avoir bu glacé après une partie de jeu de paume endiablée. On soupçonne un empoisonnement par un espion à la solde de Charles Quint. Un serviteur italien, Sebastiano de Montecuculli, est jugé, condamné et exécuté dans un déchaînement de violence populaire en octobre 1536.

    Le cadet Henri devient le nouveau dauphin. Avec lui monte l'étoile d'Anne de Montmorency, qui l'a initié à l'art militaire et est devenu son ami mais endure l'hostilité de la duchesse d'Étampes, maîtresse du roi. Il devient connétable en 1538 et évince son rival l'amiral Philippe Chabot, seigneur de Brion. Celui-ci est condamné pour malversation le 8 février 1541, privé de ses biens et emprisonné à Vincennes.

    Le nouveau connétable Anne de Montmorency convainc le roi de se rapprocher de son rival, Charles Quint. On en vient à une nouvelle trêve, conclue à Nice en juin 1538 sous l'égide du pape Paul III. Le 14 juillet 1538, à Aigues-Mortes, François 1er et Charles Quint jouent la réconciliation. Celle-ci paraît complète quand, durant l'hiver 1539-1540, l'empereur débarque à Bayonne et traverse la France en vue d'aller réprimer une rébellion à Gand.

    Mais François 1er, qui n'a pas renoncé au Milanais, ne tarde pas à reprendre les hostilités. Le 4 juillet 1541, son ambassadeur Rincon, en route pour Constantinople, est assassiné par des soldats impériaux près de Pavie. À la suite de quoi le roi déclare la guerre le 12 juillet 1542. Ce revirement consacre la disgrâce de Montmorency, privé de ses charges à la grande satisfaction de la duchesse d'Étampes, et le retour de l'amiral Chabot. Le chancelier Poyet, homme-lige de Montmorency (et rédacteur de l'ordonnance de Villers-Cotterets) va à son tour en prison, victime de la vindicte du roi.

    Charles Quint s'allie avec Henri VIII contre François 1er. Tandis que Charles Quint intervient en Champagne, l'armée française pénètre en Italie et vainc les Impériaux à Cérisoles le 11 avril 1544. Les combattants, épuisés, consentent à la paix de Crépy-en-Laonnois le 18 septembre 1544.

    Le 7 juin 1546, quelques mois avant sa mort, François 1er fait également la paix avec l'Anglais Henri VIII à Ardres. Il laisse le royaume dans une paix précaire.

    La France au XVIe siècle

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    Cette carte montre l'extension territoriale de la France sous les règnes de François 1er, Henri II et Henri IV.

    La Couronne récupère la Bretagne et les apanages du connétable, Calais et les Trois-Évêchés, ainsi que le Béarn...

    Un État moderne et centralisé

    François 1er, quand il n'est pas à la guerre, aime prendre du bon temps au milieu de sa cour et des belles femmes, de château en château. Avec lui, la Renaissance, mouvement artistique et intellectuel né en Italie, prend son essor en France.

    Mais le roi, poussé par les nécessités financières et administratives, réforme aussi les institutions nationales et renforce l'État. Avec le concours de sa mère, Louise de Savoie, le roi réduit à merci ses derniers grands vassaux, dont le connétable de Bourbon. Il amorce dès lors la centralisation administrative du royaume. Le centre en est la Cour, autrement dit l'ensemble des personnes qui vivent dans l'intimité du souverain : serviteurs, vassaux, officiers... Au total 5000 à 6000 personnes qui accompagnent le souverain dans ses incessants voyages de château en château.

    «Empereur en son royaume», François 1er renforce son autorité sur l'administration. «Ci veut le roi, ci veut la loi» et «Car tel est notre bon plaisir» sont des formules inédites qui en attestent. Délaissant la noblesse d'épée, il s'appuie pour gouverner sur la noblesse de robe, des magistrats anoblis. François 1er multiplie les fonctions de service et les offices, tous confiés à des nobles : Grand Écuyer, Grand Chambellan, Connétable, Grand Amiral.... Ces serviteurs et officiers constituent la Maison du roi et le servent avec dévouement, ce qui n'exclut pas (au contraire) la corruption et les détournements de fonds. En manière d'avertissement, le roi fait juger et pendre son ancien intendant des finances, Jacques de Beaune, baron de Semblançay.

    Soucieux de son confort et du prestige de la couronne, François 1er fait embellir ou construire une bonne douzaine de châteaux, dont Blois et surtout Chambord. Il modernise aussi son administration et subdivise son Conseil en services spécialisés avec à leur tête des ministres et des Secrétaires d’État.

    Toujours à l'initiative du chancelier Duprat, le roi, en manque d'argent, recourt à des expédients financiers. Il inaugure en 1522 les premiers emprunts publics et commence à vendre les charges d’officiers ou fonctionnaires, d’où l’attrait que conserve jusqu’à nos jours, en France, la fonction publique.

    François 1er invente la dette publique... et la loterie

    Menacé sur plusieurs fronts, François 1er a besoin en premier lieu d'argent. En septembre 1522, pour financer la guerre à venir, il instaure le système de la dette publique. Il lance un emprunt de 200.000 livres auprès des Parisiens, garanti sur les recettes de l'Hôtel de ville et rémunéré par une rente perpétuelle (très avantageuse) de 8,33% par an.

    Quelques années plus tard, le 21 mai 1539, encore une fois à court d'argent, il introduit dans son royaume la loterie, une invention florentine. Ce sont des innovations dont ses successeurs, jusqu'à nos jours, sauront se souvenir.

    De retour de sa captivité de Madrid, en 1526, le roi découvre un peuple appauvri et des finances publiques en déficit.

    Ses financiers font tout ce qu'ils peuvent pour collecter les sommes requises par les guerres et les dépenses de la cour. Comme ils sont responsables sur leurs deniers de la levée des impôts, ils ne se privent pas pour en détourner une partie au passage. L'indignation grandit dans le peuple contre ces financiers compétents mais prévaricateurs. François 1er décide de faire un exemple. Jacques de Beaune, seigneur de Semblançay et vicomte de Tours, passe donc en procès le 9 août 1527. Il est pendu trois jours plus tard à Montfaucon, comme un vulgaire roturier, et ses biens sont confisqués.

    À Lyon, sa ville de résidence favorite, dont il a songé à faire sa capitale, la paix de Cambrai réduit beaucoup de monde au chômage, en conséquence de quoi une grande révolte (la «Grande Rebeyne») éclate le 25 avril 1529.

    Le roi entreprend un nouveau voyage à travers le pays, avec la cour, pour se sortir de ses soucis. Il prépare l'intégration de la Bretagne au domaine royal. Il se passionne aussi pour les explorations ultramarines, avec son ami, l'amateur dieppois Jean Ango. C'est ainsi que Jacques Cartier découvre le Canada.

    François 1er accueille à Marseille, le 8 octobre 1533, la petite Catherine de Médicis, nièce du pape Clément VII, promise à son fils Henri, futur Henri II. Il met la main au passage sur le comté de Montbéliard.

    Mais la fin de son voyage est gâchée par «l'affaire des placards», à Blois, point culminant des premières tensions entre calvinistes et catholiques.

    Le français, langue de l'administration

    Parmi les grandes réformes à l'actif du roi figure l’ordonnance de Villers-Cotterêts, signée le 10 août 1539. Elle institue l'état civil (enregistrement obligatoire des naissances, mariages et décès par les curés) ; elle exige par ailleurs que tous les actes légaux et notariés soient désormais rédigés en français et non plus seulement en latin, la langue des élites.

    Tensions religieuses

    Dans les années qui ont suivi la prédication de Luther, les idées de la Réforme se sont introduites en France, sans toutefois déboucher systématiquement sur une rupture avec l'Église catholique.

    C'est ainsi que l'évêque de Meaux Guillaume II Briçonnet, neveu du financier Semblançay, préconise le retour à une conduite plus évangélique.

    Un «cercle de Meaux» se forme autour de lui, pour discuter de l'Évangile et moraliser le clergé. Il a les encouragements de Marguerite de Navarre, la propre sœur du roi, qui accueille dans son château de Nérac les membres du Cercle, parmi lesquels Lefèvre d'Étaples. En 1533, Marguerite, qui a aussi un réel talent littéraire, publie anonymement un poème mystique : Le miroir de l'âme pécheresse. Au plus fort de la crise ouverte par Luther, toutes ces bonnes intentions sentent le soufre.

    François 1er freine autant qu'il le peut les attaques du Parlement et de la Sorbonne, mais sa patience est mise à l'épreuve par la mutilation d'une statue de la Vierge, à Paris, rue du Roi-de-Sicile, le 31 mai 1528, par un fanatique.

    Marguerite de Navarre fuit la cour et s'établit à Pau et Nérac en 1542. Elle écrit un pendant au Décaméron de Boccace : L'Heptaméron, qui est publié anonymement en 1559.

    Triste fin de règne

    Dans ses dernières années, François 1er, malade, a la douleur de voir le Dauphin Henri s'éloigner de lui. Dans le royaume, répression, révoltes et massacres témoignent des malheurs du peuple.

    En 1544, L'Institution de la religion chrétienne de Jean Calvin est brûlée publiquement sur ordre de la Sorbonne. La répression s'accentue : 40 bûchers à La Rochelle et 5 à Meaux en 1546, 18 en 1547...

    Le cardinal Guillaume du Bellay étant mort en 1543, les Vaudois, adeptes d'une innocente secte évangélique des Alpes, ne bénéficient plus de sa protection. Le baron d'Oppède Jean Maynier, premier président du parlement de Provence, attaque ces «Pauvres du Christ» dont les terres jouxtent opportunément les siennes. Entre le 13 et le 23 avril 1545, 2700 personnes sont massacrées.

    La répression frappe également l'imprimeur Étienne Dolet qui s'était réfugié à Lyon. Il est brûlé place Maubert le 3 août 1546. Le groupe de Meaux est quant à lui liquidé le 8 septembre 1546 avec l'arrestation de 60 de membres. 14 sont condamnés au bûcher.

    La révolte gronde qui plus est dans le royaume accablé d'impôts. L'Ouest se rebelle en 1542 contre un édit sur la gabelle. Le roi lui-même se rend à La Rochelle le 31 décembre 1542 pour recueillir la reddition des rebelles.

    En 1548, dans l'année qui suit la mort de François 1er, la révolte s'étend à Bordeaux, qui est durement châtiée par l'armée de Montmorency.

    Bibliographie

    Pour qui s'intéresse à ce règne charnière de l'Histoire de France, je recommande la biographie complète et passionnante de Sylvie Le Clech : François 1er (Tallandier, 2006).http://www.herodote.net/Francois_1er_1494_1547_-synthese-198.php

  • Myret Zaki répond à nos questions en vue d'une potentielle nouvelle conférence avec Etienne Chouard

  • «Français de souche» : Denis Tillinac répond à Aymeric Caron

    FIGAROVOX - Invité dans l'émission On n'est pas couché pour présenter son livre, Du bonheur d'être réac, l'écrivain Denis Tillinac a été traité de «vieux con» par Laurent Ruquier et violemment pris à partie par le chroniqueur Aymeric Caron. Il lui répond en exclusivité pour FigaroVox.
    FIGAROVOX. - Invité dans l'émission de Laurent Ruquier ce samedi pour présenter votre nouvel essai, Du bonheur d'être réac, vous vous êtes heurté à un Aymeric Caron particulièrement agressif. Avez-vous été surpris par l'hostilité du plateau à votre égard ?
    Denis Tillinac. - Un écrivain classé à droite ne peut s'attendre à de la bienveillance sur une chaîne publique surtout lorsque la gauche est au pouvoir. Passe encore d'être traité de «vieux con» par l'animateur pour un passage de mon livre où j'ironise sur l'obligation de parité des listes aux municipales. Mais la haine d'un intervenant, ces amalgames vicieux, son manichéisme brutal, le choix même des mots visant à occulter le sens et l'esprit de mon livre trahissent une accointance avec les procédés de la propagande des régimes totalitaires. Ça fait un peu froid dans le dos. On n'aimerait pas que cet idéologue ait des pouvoirs de justice ou de police.

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  • Conférence de Renaud Camus, le 8 mars à Colmar, sur le Grand Remplacement à l’invitation du cercle Eugène Ricklin

    Dans le cadre du cycle de conférences du Cercle Eugène Ricklin, nous aurons le plaisir de recevoir, pour la troisième édition, Renaud Camus le Samedi 8 Mars 2014.
L’auteur du “Changement de Peuple" abordera les aspects du Grand Remplacement et donc du changement de peuple, de civilisation qui est en train de se produire sous nos yeux.

La conférence aura lieu à Colmar à 20 heures dans le quartier de la Gare.
PAF : 5 euros.
Renseignements et inscriptions : alsace@bloc-identitaire.com

Comme Renaud Camus le dit si bien "Révoltez-vous, nom de Dieu !"

  • Faits & Documents n°372 du 1er au 15 mars 2014 – Portrait : Pierre Bergé

     

    Le nouveau numéro de Faits & Documents du 1er au 15 mars 2014 vient de paraître, avec (entre autres) le portrait de l’homme d’affaires Pierre Bergé.

     

    À 82 ans, le cofondateur de la maison Yves Saint Laurent est l’archétype français de la « gauche caviar ». Producteur d’ailleurs de caviar, propriétaire d’une maison de vente aux enchères, actionnaire du Monde et bientôt du Nouvel observateur, fondateur du mensuel homosexuel Têtu, président du Sidaction, cet homosexuel plus que militant n’est classé pourtant qu’à la 349e place des grandes fortunes françaises, avec « seulement » 120 millions d’euros (classement Challenges 2013). Une aimable plaisanterie lorsqu’on sait que la seule vente d’une partie de ses collections d’objets d’art (non inclus dans l’assiette de l’ISF) a rapporté à ce mitterrandien de stricte observance la bagatelle de 373,5 millions (habilement reversés à la Fondation PB-YSL). Le 13 janvier, il était interrogé au Supplément de Canal + : « La sexualité a une place très importante dans votre vie. Vous dites à l’envie que vous avez construit la maison Saint Laurent autour de votre… bite. Vous confirmez ? » L’intéressé répondit, avec un éclat de rire typique de la morgue des parvenus : « Je ne confirme pas. Je ne suis pas sûr que ce soit autour… » Tout dans la finesse…

     

     

     

    Faits & Documents n°372 du 1er au 15 décembre 2013 - Portrait : Pierre Bergé

    Faits & Documents n°372 du 1er au 15 décembre 2013 – Portrait : Pierre Bergé

     

    « Comment décrire la nomenklatura homosexuelle sans évoquer Pierre Bergé, giscardien dans l’année 70, puis barriste, mitterrandien et, enfin, chiraquien. Cet homme à l’affût de toutes les occasions rêvait dans sa jeunesse de conquérir Paris. »
    Sophie Coignard et Marie-Thérèse Guichard, Les Bonnes fréquentations (1997).

     

    « Je suis un « mafieux ». Et je ne crois qu’à ça. Je ne crois qu’aux amis dont on est sûr, qu’on s’est choisi et c’est fini. C’est pour toujours. Et on les défend, bien sûr. […] Être « clanique », cela ne veut pas dire faire des mauvais coups ensemble, cela ne veut pas dire passer des armes ici ou du fric là. Cela veut tout simplement dire que les gens se sont retrouvés. Alors, comme toujours dans les « clans », tout le monde n’est pas blanc-bleu : certains peuvent avoir une bonne influence et d’autres une mauvaise – pas toujours, mais cela peut arriver. »
    Pierre Bergé dans François Mitterrand et ses proches (1996).

     

    « Fais en sorte que l’idée d’humanité excède en toi celle de toute autre communauté. Fais-toi citoyen du monde autant qu’il est possible. Les États, en d’autres termes, comptent moins que le destin de l’humanité. Lorsqu’ils deviennent des obstacles au progrès de la paix, les États doivent s’effacer devant la loi commune […] ou bien la défense invétérée, obscurantiste des « nations ». Ou bien la décision résolue d’assumer des paris raisonnables dont pourrait sortir le progrès de l’humanité. […] Non à ce qui nous enracine, oui à ce qui nous libère de nos racines ; non à ce qui nous rend tributaire d’une concrète, trop concrète communauté, oui à ce qui nous inscrit dans un espace symbolique plus abstrait. L’Europe est un de ces espaces. Si je suis européen, c’est parce que l’Europe nous éloigne de l’obscure magie des racines, des terroirs et des appartenances trop simples. »
    Pierre Bergé, Liberté, j’écris ton nom (1991).

     

    « Les racines, dit Pierre Bergé, ont de l’importance dans son amitié avec l’ancien président [NDA : Mitterrand] : « Il était charentais comme moi, nous étions tous deux du même pays, moi d’Oléron et lui de Jarnac. Nous sommes saintongeais. »
    Pierre Bergé, rapporté par Stéphane Trano dans Mitterrand, Les amis d’abord.

     

    « Ses colères carabinées sont aussi spectaculaires que les soufflés du Récamier, dont il est client. En 1962 déjà, lorsque William Klein filme les débuts de la maison de couture, il montre un jeune Pierre bourré d’impatience et de tics, croisement de Rascar Capac (la momie du temple du soleil de Tintin) et de Louis De Funès. »
    Libération (25 février 2009).

     

    « Les morsures de ce natif du Scorpion sont très venimeuses. »
    Challenges (2 octobre 2008).

     

    « Le dimanche a des relents étranges. Ce fut pendant des siècles le « jour du seigneur ». Il ne fallait pas travailler pour mieux se consacrer à Dieu et mieux prier ? En un mot, la conception même du dimanche (…)

     

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  • Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes

    Ce matin, il y avait marché dans le centre-ville. Comme nous approchons des élections municipales, les abords et la grande allée étaient encombrés par les militants des différentes listes en lice. Le cru 2014 des municipales semble riche de suspens avec moult crocs-en-jambe et retournements. C’est ainsi que j’ai appris la fureur de François Lamy, ex député-maire, qui malgré sa bonne volonté et les efforts déployés n’a pas réussi à faire plier les écolos locaux qui présentent donc une liste. Autre événement rigolo, le MoDem qui précédemment s’était allié au PS vient de retourner sa veste pour faire cause commune avec la liste UMP-UDI. Le motif officiel serait l’alignement des représentants locaux sur la stratégie nationale du micro parti centriste. Pour ma part, je soupçonne fort le MoDem du cru d’avoir conservé une certaine rancune pour n’avoir pas été servi à la hauteur de ses appétits durant le précédent mandat.

     

    Mais avant d’aborder le sujet de mon billet, révisons notre histoire politique locale. Palaiseau a fait partie de ces villes dites de la "banlieue rouge", les maires étant communistes ou apparentés depuis 1945. Cependant, lassés de voir la fiscalité locale grimper, comme d’entendre de vilaines rumeurs autour d’une société d’économie mixte vraisemblablement responsable du délabrement des finances, les Palaisiens votent en 1991 pour un candidat RPR. Le gauchiste étant un électeur festif, les six années de vaches maigres en termes de réjouissances municipales, ne plaisent que modérément. C’est donc naturellement qu’en 2001 ils se donnent à François Lamy (PS) qui ambitionnait depuis longtemps le cumul  de l’édilat à son mandat de député. Assez rapidement, l’extrême gauche et le PCF rejoignent les rangs de l’opposition municipale, la politique de rationalisation des dépenses n’étant pas à leur goût. Pourtant, des dépenses il y en a. La ville crée un festival, "Jours de fête", qui accueille, chaque avant-dernier week-end du mois de juin, des artistes de renom, sans parler des troupes "d’art de la rue". Festival qui croit d’année en année, les têtes d’affiche étant de plus en plus prestigieuses.

     

    En 2008 François Lamy fait campagne en promettant un développement urbain raisonné, un accroissement du pourcentage des logements sociaux qui tournerait actuellement autour de 25% du parc total alors que la loi impose un minimum de 20%. Pourcentage qui va croître encore compte tenu de la part de logements sociaux imposés par la mairie dans tous les programmes en cours de réalisation ou à venir. Il fait également campagne autour de la mixité sociale et autres fadaises socialeuses. Bien évidemment, il est réélu. En fait de développement raisonné, la ville est prise d’une frénésie de construction, plus de 20 programmes en cours ou à réaliser, le nombre des habitants croît, et c’est donc mécaniquement que le nombre des conseillers municipaux passe cette année de 35 à 39. De nombreux programmes n’étant pas achevés, d’autres devant encore sortir de terre, dont deux nouveaux quartiers, le nombre de sièges va donc encore augmenter. Pour les prochaines élections municipales de 2020, la population devrait passer de 32000 à plus de 40000 habitants. 

     

    Tout pourrait aller pour le mieux dans le meilleur des mondes socialistes. Seulement voilà, les premiers effets de cette politique commencent à se faire sentir. Les Palaisiens font partie, pour une part non négligeable d’entre eux, de ce que l’on appelle les "cadres et professions intellectuelles supérieures" (34%), et des "professions intermédiaires" (27%). Beaucoup travaillent dans l’enseignement supérieur et la recherche. S’ils sont venus à Palaiseau c’est parce qu’ils souhaitaient se rapprocher de leur lieu de travail tout en bénéficiant du cadre d’une petite ville rurbaine tout ce qu’il y a de plus tranquille, ayant conservé cette ambiance des villages d’antan. Or, leur bonne conscience de gauche a, comme toute chose en ce bas monde, ses limites. La mixité sociale, ethnique en vérité mais ce n’est pas politiquement correct, c’est bel et bon sur le papier, mais nettement moins lorsqu’elle commence à se présenter aux abords du quartier où l’on réside. Surtout lorsque les cambriolages connaissent année après année une hausse régulière, que les attaques à main armée, les vols divers, agressions, dégradations commencent également à faire leur apparition. Bien sûr, nous sommes loin des chiffres du 9-3 et des autres départements cosmopolites et interlopes, mais cela inquiète fort le bourgeois bohème qui se tourne vers la mairie pour demander le rétablissement de l’ancienne quiétude. Ajoutez à cela la présence d’un nouveau camp rom, installé depuis un an et demi, qui abrite environ 230 âmes et qui génère pas mal de désagréments (excréments, rats, vols, etc.), l’installation régulière et illégale de caravanes de gens du voyage, une fiscalité qui figure en bonne place dans le palmarès des villes du département les plus chères, une dette qui n’est pas loin d’être égale au montant du budget annuel de la ville, et vous aurez un tableau assez juste des motifs de crispation de l’électorat local. Crispation bien comprise par le PS local qui va axer une partie de sa campagne sur la sécurité. Lol comme disent les ados. Ce serait la droite qui se livrerait à cet exercice qu’on hurlerait au fascisme.

     

    Tous ces braves électeurs auraient pu s’épargner une partie de ces désagréments s’ils n’avaient pas voté socialiste. D’où le titre de mon billet. Bien évidemment, rares ceux qui assument leur vote passé, préférant porter tous ces désagréments au compte de la crise, de la politique sécuritaire de l’Etat, etc. Ce qui est loin d’être complètement faux, mais qui non nuancé, ressemble fort à une pitoyable tentative pour se dédouaner de toute responsabilité, et bien sûr de faire l’économie d’un examen de conscience qui pourrait avoir pour conséquence la remise en question de ses convictions politiques.

    http://koltchak91120.wordpress.com/

  • Chronique de livre: Eric Dardel et L’homme et la terre, 1952

    Eric Dardel et L’homme et la terre, 1952

    http://www.thbz.org/images/divers/lhommeetlaterre.jpg

    Attention, géographe non conforme.

    Eric Dardel peut être présenté comme un mal aimé pour son temps, ou devrions-nous plutôt dire "un ignoré". Né en 1899, mort en 1967, Eric Dardel fut un professeur d'histoire géographie qui appréciait la philosophie, mais fut également un homme de foi, vivant "authentiquement" son protestantisme. C'est donc tout naturellement qu'il édifia un ouvrage géographique imprégné de philosophie et d'humanité.

    Paru et aussitôt oublié en 1952, L'homme et la terre présente « des courants de pensée novateurs de la géographie contemporaine, celui de la phénoménologie, des perceptions et des représentations par les hommes de leur environnement terrestre » (7ème de couverture).

    Pourquoi cet auteur fut-il oublié et en quoi est-il au final une des clefs de voute de la pensée géographique actuelle ?

    La question peut se poser, compte tenu du fond et de la forme de ce livre.

    I-      Un ouvrage de géographie ou de philosophie ?

    A vrai dire, pour y répondre, il faut admettre le fait qu'Eric Dardel se place, dans ce livre, autant en géographe qu'en philosophe et en expérimentateur d'existence.

    A ce sujet, on pourra noter que la géographie n'est absolument pas incompatible avec la philosophie.

    Kant en fut la preuve vivante puisqu’avant d’être le philosophe réputé que l’on connaît et que l’on étudie encore beaucoup aujourd’hui, il fut professeur de géographie physique (Physische Geographie, 1802, – condensé des 49 cycles de cours à la géographie physique qu’il a a donné entre 1756 et 1796).

    Par ailleurs, faut-il rappeler toutes les réflexions philosophiques qu’entoure la question de l’espace, notamment à travers les travaux de Leibniz pour qui « l’espace est quelque chose d’uniforme absolument ; et sans les choses y placées, un point de l’espace ne diffère absolument en rien d’un autre point de l’espace »[1] (pour résumer : l’espace est un tout immuable qui existe indépendamment des choses et des hommes (et de leur point de vue)) et de Kant pour qui « l’espace n’est rien autre chose que la forme de tous les phénomènes des sens extérieurs, c’est-à-dire la condition subjective de la sensibilité sous laquelle seule nous est possible une intuition extérieure […] Nous ne pouvons donc parler de l’espace, de l’être étendu, etc., qu’au point de vue de l’homme »[2] (pour résumer : l’espace est construit subjectivement par l’homme, il est à travers le point de vue de l’homme).
    Dardel a un parcours philosophique fidèle aux grandes évolutions philosophiques de son temps. Il est à ce point héritier de Kant, et très proche de la pensée existentialiste et phénoménologique d’Heidegger surtout et de Merleau-Ponty.

    Les questions entre autre posées par ces philosophes sont les suivantes : comment se place l'homme dans l'inventaire fait de toutes les choses du monde ? Comment est-on soi-même ?
    En phénoménologie, l'homme n'est pas un spectateur extérieur du monde. L'homme est dedans, et ce dès qu'il le perçoit – la perception entrainant alors tout le registre de la sensibilité (que l'on retrouve beaucoup dans le style employé par Dardel dans son ouvrage).

    Eric Dardel, suivant ces préceptes, semble l’un des premiers à voir ce que la géographie peut tirer de la phénoménologie et de l’existentialisme, à entrevoir le lien qui noue toute personne avec son environnement, sur les relations existentielles que nouent l'homme et la terre.
    Cette approche permet à Dardel d’apporter une vision totalement novatrice, mais ignorée à l’époque, sur la géographie.

    La structure même de son livre permet d’entrevoir les grandes lignes de son approche, à savoir d'abord les différents types d'espace, puis le fait que la géographie n'est pas la nature, mais la relation entre l'homme et la nature, ce qui entraine une relation à la fois théorique, pratique et affective (du terrestre dans l'humain, et non de l'humain au terrestre). C’est cette seconde partie qui est réellement le cœur de cette nouvelle approche géographique.

    Avec ce livre, Eric Dardel a posé les bases de la géographie des perceptions. Il se place comme le porte flambeau de la "géographie de plein vent", expression inventée par Lucien Febvre et qui s'oppose à la "géographie de cabinet", celle qui se fait dans les bureaux grâce à des statistiques, des comptes rendus de voyage, des cartes, etc.

    Cette géographie peut être aussi assimilée aux cours en plein air, la "géographie de terrain", du spécialiste de la géographie régionale André Cholley (1886-1968).

     En outre, pour reprendre un passage très percutant du géographe Claude Raffestin – auteur d’une étude toute en finesse de Dardel, de son œuvre et aussi et surtout du Pourquoi n’avons-nous pas lu Eric Dardel ?[3], – on peut dire que Dardel fut un véritable avant-gardiste victime de sa clairvoyance :

     « Le drame de Dardel est d'avoir été en avance d'un paradigme sur ses contemporains. Formé au paradigme du «voir», il a écrit au moment où triomphait celui de l'« organiser» alors qu'il postulait celui de l'« exister ». Dardel n'assure aucune transition, il n'est pas à une charnière, il anticipe... et il est seul ou presque. Il est même d'autant plus seul que ses références géographiques le desservent en partie auprès des jeunes géographes et que paradoxalement celles de nature historique, philosophique et littéraire appartiennent dans les années cinquante à un courant qui s'estompe... mais qui réapparaîtra un quart de siècle plus tard, juste hier et aujourd'hui. »[4]

     II-   Quelle géographie ressort de l’œuvre de Dardel ?

     Et bien ce n’est pas à proprement parlé une géographie, mais des géographies.

    Ce qui importe le plus à Dardel, c’est « de suivre l’éveil d’une conscience géographique, à travers les différents éclairages sous lesquels est apparue à l’homme le visage de la Terre. Il s’agit donc moins de périodes chronologiques que d’attitudes durables de l’esprit humain vis-à-vis de la réalité environnante et quotidienne, en corrélation avec les formes dominantes de la sensibilité, de la pensée et de la croyance d’une époque ou d’une civilisation. Ces « géographies » se rattachent chaque fois à une certaine conception  globale du monde, à une inquiétude centrale, à une lutte effective avec le « fond obscur » de la nature environnante. »[5]

     Au fond donc, ce qui anime le projet de Dardel, c’est de montrer les relations multiples et complexes, mais hautement colorées, qui existent entre des peuples, des hommes, ou une personne, avec son environnement. Et cette relation est de l’ordre de l’affectif.

    Ainsi, lorsqu’il parle de « géographie mythique », il évoque une « relation existentielle [qui] commande quantité de rites et d’attitudes mentales. »[6]

    Pour cette géographie mythique, il emprunte beaucoup à Mircéa Eliade et notamment son ouvrage Traité d’histoire des religions. Concrètement, donc, la terre, la mer, l’air, le feu, pour reprendre des thèmes chers à Gaston Bachelard, sont au cœur du processus d’échange et de coexistence entre la terre en sens large et les hommes. D’ailleurs notons que les « hommes » pris en exemple sont souvent des peuplades aux rapports très privilégiés avec leur environnement, qui est souvent peu maniable (nordicité, aridité, forêt sempervirente).

     « Puisque la Terre est la mère de tout ce qui vit, de de tout ce qui est, un lien de parenté unit l’homme à tout ce qui l’entoure, aux arbres, aux animaux, aux pierres même. La montagne, la vallée, la forêt, ne sont pas simplement un cadre, un « extérieur », même familier. Elles sont l’homme lui-même. C’est là qu’il se réalise et qu’il se connaît.[7] »

     Le mythe joue un rôle primordial dans l’élaboration d’un dialogue entre cette nature, cet environnement, et les hommes. Ces mythes permettent d’ailleurs de faire le lien entre une Terre « berceau » ou « origine », et une Terre qui est présence actuelle.

    « La Terre se manifeste comme actualisation sans cesse renouvelée en vertu de la fonction éternisante du mythe.[8] »

    Il n’y a donc pas de rupture, pas de discontinuité entre le mythe et le discours, entre le religieux et la logique (Raffestin, page 476), mais bien une « totalité ». Dardel parle du mythe comme d’un absolu, absout du temps comme date et moment[9].

     III-             Quel usage faire de ces propos avec la géographie ? Que peut en retenir la géographie ?

     L’aspect novateur des idées développées par Dardel est de mettre en avant la tension qui existe entre le vécu et le connu. Il amène dans la géographie l’importance, non pas du décryptage de la Terre, mais du décryptage des relations mutuelles entre la Terre et les hommes.

    Dardel oscille donc « entre géographie de plein vent et géographie scientifique ». Ici, la géographie de plein vent serait cette perception de la Terre et ses relations avec et en l’homme. La géographie scientifique serait surtout fondée sur une méthodologie et une problématique.

     On le sait bien aujourd’hui que la géographie est le fruit des évolutions épistémologiques de ce dernier gros siècle et demi (depuis le milieu du XIXe siècle).

    Dardel, qui fut redécouvert dans les années 70-80 par les géographes sensibilisés par les nouvelles thèses philosophiques, sociologiques et anthropologiques (pensons à Levi-Strauss et le structuralisme, Morin et l’approche systémique, Foucault et Derrida et le déconstructionnisme), a apporté le subjectivisme dans l’approche géographique. Cette dernière n’en était pas totalement à son premier coup d’essai puisque le géographe Armand Frémont avait déjà initié la géographie à l’« espace vécu » (La région, espace vécu, 1976). Mais, Dardel reste clairement en avance de 25 ans, soit une génération.

    Cette subjectivité permet à la géographie d’aborder aujourd’hui les questions de l’exister dans un espace donné, d’habiter un territoire, et de saisir les liens et les relations multiples qui existent entre les acteurs ou actants, et ces espaces donnés (et cela à toutes les échelles d’analyse).

     Enfin, il faut reconnaître à Dardel une plume qui se fait rare dans le monde de la géographie, et même de façon générale dans le monde scientifique. A croire que la rigueur scientifique ne peut s’exprimer que par une austérité du style.

     En somme donc, le plaisir de lire Dardel va de pair avec la richesse conceptuelle qu’il ressort de son livre.

     A lire. Aristide pour le Cercle Non Conforme

    Notes et ouvrages:

    [1] G. W. LEIBNIZ, Troisième écrit, ou Réponse ou seconde réplique de M. Clarke, in Œuvres, Paris, Ed. Aubier-Montaigne, 1972, p. 416.

    [2] E. KANT, Critique de la raison pure, Paris, Ed. PUF, 1944, pp. 58-59.

    [3] RAFFESTIN Claude, « Pourquoi n’avons-nous pas lu Eric Dardel ? », Cahiers de géographie du Québec, 1987, vol. 31, n° 84, pp. 471-481. Disponible sur http://archive-ouverte.unige.ch/unige:4356 .

    [4] Ibid, page 473.

    [5] L’homme et la terre, page 63.

    [6] Ibid, page 65.

    [7] Ibid, page 66.

    [8] Ibid, page 69.

  • Levi-Strauss, contre-révolutionnaire

    Tiré du blog de l’Abbé de Tanoüarn, cet extrait de Claude Levi-Strauss
    La Révolution a mis en circulation des idées et des valeurs qui ont fasciné l’Europe puis le monde, et qui procurèrent à la France, pendant plus d’un siècle, un prestige et un rayonnement exceptionnels. On peut toutefois se demander si les catastrophes qui se sont abattues sur l’Occident n’ont pas aussi là leur origine.
    LEVI-STRAUSS_Claude
    En quel sens ?
    Parce qu’on a mis dans la tête des gens que la société relevait de la pensée abstraite alors qu’elle est faite d’habitudes, d’usages, et qu’en broyant ceux-ci sous les meules de la raison, on pulvérise des genres de vie fondés sur une longue tradition, on réduit les individus à l’état d’atomes interchangeables et anonymes. La liberté véritable ne peut avoir qu’un contenu concret : elle est faite d’équilibres entre des petites appartenances, des menues solidarités : ce contre quoi les idées théoriques qu’on proclame rationnelles s’acharnent; quand elles sont parvenues à leurs fins, il ne leur reste plus qu’à s’entre-détruire. Nous observons aujourd’hui le résultat.

    Claude Lévi-Strauss - De près et de loin (1988).

    A rapprocher de l’excellente analyse sur L’éclipse des Lumières, écrite par un jeune abbé.
  • La démocratie d'apparence - 3

    III - A quelles conditions la démocratie fonctionne-t-elle ?

    Les deux premières parties de cet exposé sont de nature à surprendre le lecteur car elles conduisent à une vision paradoxale ou en tout cas inhabituelle des faits sociaux. Il en ressort que la démocratie conçue comme un projet révolutionnaire destiné à changer le monde et la société est une utopie impraticable et néfaste qui n’a d’ailleurs aucune existence tangible. Mais il en ressort aussi que la technique démocratique qui consiste à prendre en compte les courants sociaux, à reconnaître leur existence et à développer l’autonomie des individus et des collectivités est indiscutablement utile. Et le paradoxe continue lorsque nous constatons que cette pratique ne peut fonctionner convenablement qu’à des conditions précises tout à fait contraire au messianisme démocratique « grand public».

    Première condition : un cadre strict :
    La pratique de la démocratie suppose, on l’a déjà dit, une petite structure politique à taille humaine afin que le rôle de l’individu y soit effectif. Dans de petits Etats comme la Suisse, cette condition peut être remplie, mais dans les grands Etats, peuplés de plusieurs dizaines ou centaines de millions de personnes ce n’est plus le cas. Il faut alors l’implanter à l’échelle locale grâce à un système décentralisé qui favorise les libertés locales et l’autonomie des petites entités, ce qui pose la question du contrôle de l’Etat sur cette mosaïque politique. Un autre cadre possible aux pratiques démocratiques peut être fourni par une structure aristocratique et inégalitaire. A ce moment là, des autorités arbitrales liées à la tradition, à la compétence ou à l’hérédité peuvent prévenir les éternelles dérives du système démocratique, à savoir l’anarchie, le clientélisme et la démagogie. C’est l’idée du régime mixte que nous avons déjà évoquée précédemment. L’idée n’est pas nouvelle puisque Aristote la développait déjà et l’un des succès de la Monarchie française à son apogée fut sans doute de savoir concilier l’autorité du Roi avec les innombrables libertés locales. On oublie un peu vite que sous l’Ancien Régime les fonctions étaient électives chaque fois qu’elles n’étaient pas réservées à certaines catégories de personnes en raison de leur naissance ou de leur compétence... A l’inverse, il n’y a rien de plus défavorable au développement de la démocratie que les vastes Etats aux contours flous et mal délimités ou l’homme se sent perdu et dépassé par les événements.

    Deuxième condition : une population unie et cohérente :
    La démocratie implique que les électeurs qui vont tenter de concourir à une volonté commune aient un certain nombre de choses en commun et ne constituent pas des communautés hostiles qui cherchent à imposer leur point de vue par la loi du plus fort. Pendant très longtemps cette condition était remplie dans les nations européennes, et c’est encore le cas en Suisse en raison de l’histoire à part de ce petit pays à la population homogène en dépit des différences linguistiques et religieuses. Mais dans les autres pays d’Europe ouverts à toutes les religions, les ethnies et les cultures, où les mouvements de population sont de plus en plus importants et où l’individualisme est prédominant, ce fond commun a disparu en grande partie. On dit que Rousseau avait conçu son système politique et sa théorie de la volonté générale en pensant à la République de Genève telle qu’il l’avait connu dans son enfance. Est-il sérieusement envisageable de transposer un tel système à un empire cosmopolite et multinational comme l’Union Européenne ? C’est la grande interrogation de notre collègue Pierre Manent, Professeur à l’Institut d’Etude Politique de Paris, qui se demande si la démocratie est possible sans le cadre de la nation traditionnelle.

    Troisième condition : un contrôle effectif par l’électeur :
    La démocratie n’est intéressante que si l’électeur a l’impression qu’il a un pouvoir véritable et que les dés ne sont pas truqués. C’est une évidence, mais il est bon de la répéter lorsque l’on voit certaines dérives de la Veme République en France. Dès lors, moins il y a d’intermédiaires entre l’électeur et le pouvoir, mieux la démocratie fonctionne. A l’inverse, plus il y a d’intermédiaires, plus elle court le risque de dégénérer. La démocratie directe présente donc des avantages indiscutables par rapport à la démocratie représentative qui déforme la volonté des électeurs et crée des oligarchies parasites qui prétendent exprimer la volonté du Peuple mieux que le Peuple lui-même. C’est ainsi que des pratiques telles que le référendum d’initiative populaire, le mandat impératif donné aux représentants, ou le droit pour la population de contrôler directement l’emploi des fonds publics pourrait être utilement introduits dans les institutions. Or la plupart des hommes politiques y sont hostiles car ils redoutent à tort ou à raison de tomber dans l’anarchie et le « populisme ». En réalité, la crainte qu’inspire la démocratie directe n’est légitime que lorsque l’on prétend tirer toute la légitimité politique de la volonté populaire, ce qui nous ramène une fois de plus au caractère dangereux de l’idéologie démocratique. Car avec la démocratie directe l’Etat risque en effet de devenir ingouvernable. En revanche, si des éléments de démocratie directe sont insérés dans un système politique qui reconnaît l’existence d’autres formes de légitimités politique, le risque est bien moindre du fait de ces contrepouvoirs. Montesquieu ne se serait pas exprimé différemment, lui qui voulait que « le pouvoir arrête le pouvoir ».

    Conclusion :

    La démocratie telle qu’elle est entendue dans les grands Etats occidentaux est en grande partie un système fictif, une construction intellectuelle artificielle qui repose sur le mythe de la «volonté générale». Force est de constater en pratique que la volonté majoritaire du corps électoral est très souvent méconnue ou trahie par ceux qui ont pourtant pour mission de la servir ; que cette volonté majoritaire est improprement appelée « volonté générale » et qu’elle est en outre éminemment changeante et manipulable comme le révèlent les innombrables alternances qui jalonnent l’histoire des démocraties occidentales. Le succès de ce système fictif n’est pas dû à son efficacité et à sa vertu mais seulement au fait qu’il est parvenu à incarner, à la suite de toutes sortes de circonstances historiques et de guerres, une tendance fondamentale des sociétés modernes qui est le besoin d’émancipation des individus lorsque ceux-ci commencent à se développer économiquement. Bertrand de Jouvenel remarquait que la volonté d’échapper à sa condition est l’un des grands moteurs de l’humanité. Mais, et c’est là le formidable paradoxe des temps modernes, cette émancipation s’est vite avérée illusoire et utopique, de telle sorte que les oligarchies ont rapidement compris comment contrôler ce mouvement et même comment l’instrumentaliser. Ainsi, le succès du régime démocratique tel que nous le connaissons est dû aussi, et pour une large part, au ralliement des élites occidentales qui ont vu tout le parti qu’elles pourraient tirer d’un système qui permettait de diriger le peuple en lui donnant l’illusion qu’il commande. Et d’un système qui de surcroît leur assure l’irresponsabilité puisque c’est la collectivité qui est censé avoir pris les décisions...

    En fin de compte, et un peu comme dans le cas du marxisme, autre illusion de l’homme occidental et autre système erroné, les résultats n’ont pas été à la hauteur des espérances. Le suffrage universel n’a pas eu la vertu miraculeuse d’établir le paradis sur terre, pas plus en France qu’en Irak. Le seul résultat tangible est l’apparition d’une oligarchie politique, médiatique et financière qui refuse de se reconnaître comme telle parce qu’il lui est devenu commode de se camoufler derrière le paravent de la volonté populaire. Si l’on veut sortir des dialectiques absurdes et des faux semblants, il faut d’abord essayer de voir la réalité des relations humaines. La loi n’est pas l’expression de la volonté générale, la loi est l’expression du pouvoir. Or ce pouvoir doit être légitime. Toute la question est donc de savoir comment dégager le pouvoir légitime. Ce sera une des grandes questions du XXIeme siècle. Il faut aussi savoir comment obtenir le consentement des individus, puisque pour reprendre la formule de Sieyès, « l’autorité vient d’en haut et la confiance vient d’en bas». Il faut enfin tenter d’articuler le pouvoir des individus et des collectivités face aux élites qui contrôlent l’Etat pour leur permettre de participer utilement à la vie politique.

    On pourra à cette fin recourir à des pratiques démocratiques dont nous avons évoqué l’utilité. En ce qui nous concerne, nous avons fréquemment exprimé notre préférence pour le régime mixte préconisé par Aristote qui pourrait trouver sa traduction contemporaine dans une monarchie institutionnelle : autrement dit un monarque, une élite, un peuple. C’est une conception traditionaliste, inégalitaire et dans laquelle l’homme ne naît pas libre, mais peut le devenir s’il le veut. Elle est donc délibérément anti-moderne, à contre courant de la pensée contemporaine et hostile au fondamentalisme démocratique, c’est à dire à cette philosophie qui idolâtre le nombre comme nouvelle religion universelle. Car la démocratie entendue de cette manière excessive et utopique risque fort d’être la dernière illusion de l’homme moderne et les abus que sa passion fanatique et déraisonnée engendreront auront raison de la nation, de la cohésion sociale et au passage de la liberté individuelle. En revanche il y a de fortes chances pour que la voie du développement véritable réside dans la complémentarité entre les formes traditionnelles du pouvoir, la compétence et l’élection, autrement dit dans un Etat qui valorise son passé pour construire l’avenir. Enfin après ces considérations socio-politiques, un peu de droit privé pour finir, puisque ces mélanges sont dédiés à un illustre privatiste. Le pouvoir aujourd’hui est étroitement lié à la création de la règle de droit ; celui qui est en mesure d’imposer une norme juridique dispose d’une fraction du pouvoir, ce qui constitue en même temps pour lui un espace de liberté : or on sait que les systèmes juridiques sont le résultat de quatre sources en état d’interaction permanente : le pouvoir politique qui édicte des lois ; le juge qui rend des décisions qui finissent à la longue par former une jurisprudence ; les jurisconsultes dont les avis et réflexions constituent la doctrine ; enfin les sujets de droit eux-mêmes dont les usages constitue les coutumes. Rippert les a appelées les « forces créatrices du droit ».

    Dès lors le poids respectif des ces quatre sources de droit dans l’ordre juridique est directement en rapport avec les rapports de forces sociaux-économiques et les libertés dont disposent tant les personnes physiques que les entreprises, quelque soit par ailleurs la forme politique du gouvernement, démocratique ou non. Ainsi un Etat aristocratique dans lequel le droit est coutumier et jurisprudentiel peut donner bien plus de liberté aux sujets de droit qu’un Etat démocratique qui ne reconnaît que la loi comme source de droit, surtout si cette loi est elle-même à la discrétion d’un parti majoritaire tout puissant. Or l’invocation permanente, obsessionnelle et incantatoire de la «démocratie » dans nos sociétés moderne est précisément un écran de fumée qui permet d’occulter commodément cet aspect fondamental des choses.

    Olivier Tournafond Professeur à l’Université de Paris XII

    http://www.actionroyaliste.com/articles/republique-et-democratie/1327-la-democratie-dapparence-3

  • Allemagne : aurait-on retrouvé le fabuleux trésor des Nibelungen ?

    « Un trésor antique a été découvert dans une forêt de Rhénanie-Palatinat, en Allemagne. Le type d’objets, le lieu et la valeur rappellent la légende du trésor caché des Nibelungen [pour se procurer le récit, voir ici].

    Wagner l’a mis en musique mais les prémices remontent au XIIIe siècle et cette légende puise son origine au plus profond de l’Antiquité : le trésor des Nibelungen, ou l’or du Rhin. Ce magot fantastique gardé par les ondines et fruit d’un conflit entre les divinités, les héros et les créatures diverses de la mythologie germanique et scandinave existe-t-il ? Pour l’immense majorité des historiens et des archéologues, il s’agit d’une légende magnifiée par des conteurs et sublimée par le génie de Richard Wagner.

     

    Et si la légende reposait sur un fond de vérité ? Si les nains de la légende, ces fameux Nibelungen, avaient réellement existé et enterré un fabuleux pactole dans les forêts rhénanes ? Un Allemand muni d’un détecteur de métaux a mis au jour une impressionnante collection d’objets anciens en or qu’il a tenté de revendre sur le marché noir. C’est alors que les forces de l’ordre l’ont interpellé, ont saisi le trésor et ont ouvert une enquête.

    Pour les spécialistes immédiatement appelés à la rescousse par les enquêteurs afin de déterminer l’origine des objets découverts, des bijoux d’or et d’argent, la nature des pièces découvertes, leur style, le lieu de leur mise au jour, l’époque à laquelle ils renvoient a immédiatement fait penser au trésor de la légende.

    «En termes de datation et de localisation, la découverte correspond à l’époque évoquée par la légende des Nibelungen. Mais nous ne pouvons pas dire dès maintenant avec certitude que ces objets appartiennent au trésor de la mythologie», explique Axel von Berg, archéologue en chef du Land de Rhénanie-Palatinat.

    Evalué à plus d’un million d’euros, le trésor aurait dû être signalé par son découvreur aux autorités avant qu’une part de celui-ci ne lui soit remise ou qu’une récompense ne lui soit attribuée. La découverte a donc été saisie et les archéologues vont donc désormais tenter de savoir d’où venaient ces dizaines d’objets d’or et d’argent. »

    Lu sur Bilan

    http://www.contre-info.com/allemagne-aurait-on-retrouve-le-fabuleux-tresor-des-nibelungen#more-31708