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culture et histoire - Page 1618

  • L’archipel Humain (3/3) : ce qui est en haut est comme ce qui est en bas

    "Personne n'est tombé tant qu'un seul est debout.
    Le vieux sang des aïeux qui s'indigne et qui bout,
    La vertu, la fierté, la justice, l'histoire,
    Toute une nation avec toute sa gloire
    Vit dans le dernier front qui ne veut pas plier.
    Pour soutenir le temple, il suffit d'un pilier ;
    Un Français, c'est la France ; un Romain contient Rome,
    Et ce qui brise un peuple avorte aux pieds d'un homme. "
               Victor Hugo, Les châtiments, 1853.

    Nous avons vu qu’augmenter la résilience de l’espèce humaine, c’est maximiser sa diversité, ce qui est favorisé par l’autonomie et la décentralisation. Cependant, ceci améliore la résilience de l’Humanité, non pas une Nation en elle. Les deux ne vont plus ensemble, dès lors que ces dernières veulent rester compétitives. Ici, nous proposons quelques directions théoriques, des approches politiques tendant vers une révolution écologique. A situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles : il est temps de redéfinir radicalement notre mode de vie en faisant de la nature un socle de la politique, et de donner une assise spirituelle aux préoccupations environnementales, enjeu de notre époque. Et l’écologie propose des lois dont nous pouvons nous inspirer.

    7. Refondre la Nation : autarcie versus progrès ?

    La frontière comme peau : entre échange et protection. Cette dégradation de la diversité pourrait n’être après tout qu’un problème d’énergie, la révolution industrielle ayant accéléré la rencontre entre des sociétés, initialement séparées en un archipel humain. Mais nous pouvons opposer à ce phénomène une discipline, canalisant le progrès permis par l’énergie, conservant ainsi les styles de chaque culture. Alors que la mondialisation tend à ne créer qu’une seule société rendue fragile du fait de son interdépendance, un système pluri-civilisationnel, diversifié et communicatif, maximise le nombre de solutions adaptatives. La rencontre entre deux entités sociales n’est donc souhaitable que dans un cadre bien précis, lorsque les deux partis y sont préparés et que chacun a à apprendre de l’autre. Ainsi il y a progrès mutuel et progrès du système les englobant. En revanche, si ces conditions ne sont pas réunies, la rencontre devient destructrice, c’est à dire affaiblissante en attirant vers le bas. On ne devient créatif dans un domaine que lorsque l’on en maîtrise les bases. Seule une civilisation sûre de sa culture peut apprendre d’une autre.

    Une éthique de la séparation. Il s’agit de se rendre suffisamment perméable pour favoriser le progrès humain, tout en protégeant ce qui fait la spécificité, l’originalité d’une culture.  Nous pensons que l’ « archipel humain » est davantage favorisé lorsque la partie productive d’une civilisation est relativement isolée de l’extérieur par une forme de protectionnisme. Il nous faut donc développer, comme le propose Régis Debray, une nouvelle éthique de la séparation 1. Ce qui en pratique, signifie réinstaurer un système de taxes aux frontières, ainsi que contrôler l’immigration.  Les communautés, lorsqu’elles sont minoritaires, s’adaptent à la structure d’accueil. Mais lorsqu’elles deviennent importantes, elles cherchent à imposer leur culture, donc à féoder la structure d’accueil, changeant du même coup la substance spirituelle du peuple, lui faisant perdre sa cohésion. A l’intérieur même du pays, une relocalisation de la production ainsi qu’une autonomie plus complète  des zones à l’échelle des communautés est nécessaire.

    Membrane perméable et jeux de représentations. Deux traits facilitant l’innovation semblent s’opposer : d’une part l’ouverture à l’expérience, de l’autre, la pensée divergente. Sont-ils inconciliables ? La pensée janusienne, la conception simultanée d’oppositions, est un trait créatif indispensable. Mais pour concevoir une opposition, il faut déjà bien connaître sa propre culture et rechercher chez l’autre des solutions. L’exercice est très révélateur et montre à la fois l’importance des représentations et celle de la diversité des incarnations où celle-ci se cristallise. Un des principes de la programmation-neuro-linguistique stipule que la flexibilité de la structure doit évoluer avec le niveau de complexité du système pilote. C’est la loi de la variété requise : la partie la plus adaptable doit être le système pilote, qui doit maintenir un niveau de complexité supérieur à ce qui est piloté. La partie pensante d’une société doit donc être particulièrement ouverte et flexible, quand la masse est préservée. Ceci, quel que soit le domaine considéré, nécessite une richesse culturelle suffisante pour se rendre capable de jeux de représentations avec bénéfice. Car c’est par leur friction que l’on est le plus susceptible d’être créatif, en variant les angles d’approche, favorisant une restructuration cognitive d’un problème (l’insight).

    8. Du milieu au substrat, l’esprit des lois.

    Tout est dans tout. L’un des buts premiers de l’Etat doit être de veiller à faire de ses citoyens des individus complets et non de repérer les futurs talents par une méritocratie impitoyable et en faire des « animaux productifs » spécialisés et consommateurs. Le taylorisme augmente peut être la productivité, mais il rend les ouvriers fragiles, donc l’entreprise de la même manière. Ce que nous pourrions appeler « tout est dans tout », nous semble le résumé d’une doctrine visant à rendre un pays, et l’humanité en général, plus résilient. Chacun, individu ou nation, doit être assez généraliste pour se rendre autonome au maximum et avoir une spécialité pour se rendre utile, donc attractif, pour la communauté. Ce qui correspond en fait, dans la Spirale de Don-Beck, au niveau jaune de l’état d’avancement d’une société, succédant au vert des actuels pays développés.

    Flux physiques... Il nous faudra redéfinir notre stratégie d’exploitation de la matière première. De la même manière, si « tout est dans tout », le type d’énergie à développer doit dépendre de l’échelle et être géré par toutes les parties concernées sur l’ensemble de la chaîne, de la communauté à la tête de l’Etat 2-4. Mais il faudra aussi réduire l’empreinte énergétique, en minimisant les flux physiques: financiers, marchandises, humains. L’écologie industrielle est, dans cette voie, un domaine en pleine expansion. L’un de ses grands principes est le rebouclage : relier le cycle économique d’un produit aux cycles biogéochimiques de ses composants.  A l’intérieur même du pays, il faut favoriser la localisation et l’autonomie 5,6. Par le blindage d’abord, c’est à dire en introduisant une taxation en bordure du système, par le compartimentage ensuite, en poussant à l’autonomie des sous-systèmes et par le recuit constant enfin, en cassant les habitudes et en favorisant la fluidification aux interstices.

    ... et flux d’informations. Les dernières décennies ont, surtout par le développement des technologies des télécommunications, mis en contact les civilisations. Mais nous observons également une recrudescence de la tribu. Les gens se rassemblent selon leurs centres d’intérêts, plutôt que de surfer en solitaire dans cet océan de données. Discipliner notre usage de l’information n’a rien à voir avec de la censure, mais pourra plutôt être désigné comme « l’augmentation du rapport signal/bruit ». Alors que le flux d’information, par internet en particulier, pourrait permettre de faire l’économie de déplacements, en ne transportant que la donnée utile, en la sélectionnant, en la travaillant, avec un coût minime, nous observons au contraire une vulgarisation de son utilisation. Comme la télévision à ses débuts, on imaginait pouvoir faire de la toile un outil d’éducation, permettant à chacun d’évoluer. En réalité le web favorise toutes les pulsions. En faisant reculer le sur-moi intimidant et en flattant l’animalité des utilisateurs, on pourrait dire qu’internet  est aujourd’hui une anti-religion. Et de dans ce concerto de couleurs, les populations sont induites chaque jour différemment, comme de la limaille de fer dans un champ magnétique. On l’observe bien dans la communication au sujet du changement climatique : les médias polarisent, les positions se crispent et cristallisent. Les populations attendent une « solution », alors que l’adaptation nécessaire à ce phénomène serait plutôt une façon de nous redéfinir nous-mêmes 7.

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  • Le mythe de la liberté

    Jeune homme au Quartier Latin, je fus très intrigué par une inscription sur le mur noir et triste de la prison devant laquelle je passais parfois. Avec une joyeuse inconscience de la propriété des termes, les peintres avaient tracé, au-dessus du portail et sur les grands murs sinistres, la devise de la République : Liberté, Egalité, Fraternité. Le mot Liberté me choqua en un tel lieu, et je commençais à formuler des doutes à son égard. Pourtant, il exerce un effet magique sur les esprits qui n’ont pas atteint leur maturité. Au lieu de l’inviter, selon le mot de Dante, à perdre l’espérance en entrant dans ces lieux, on demandait au malheureux criminel à menottes de méditer sur l’illusoire promesse de Liberté qui l’avait expédié dans cette prison, ainsi que sur les plaisirs qu’il allait connaître dans l’étroite Liberté de sa cellule. Je suis certain qu’il n’y avait là aucune intention ironique. On est si bien habitué à ce mot qu’on ne voit pas pourquoi il ne servirait pas à orner le mur d’une prison. Les “immortels principes de 89” sont excellents dans les péroraisons; ils n’ont jamais été mis en pratique – ils ne peuvent pas l’être. Le chimiste Lavoisier, le poète Chénier, l’homme d’État Malesherbes, le philosophe Condorcet, pour ne pas parler des politiciens et de la racaille de la Révolution, purent lire sur leur mandat d’arrêt le mot magnifiquement inscrit de Liberté. Lavoisier mendia quelques jours de survie pour terminer sa dernière grande expérience. Ainsi que le sait chaque écolier, il reçut l’ “immortelle” réponse que la République n’avait besoin ni de savants, ni de chimistes. Le vrai symbole de la Liberté, c’est la guillotine, et je voudrais qu’à l’entrée du port de New-York, à la place de la déesse à la torche, on mît l’échafaud où ont fini toutes les revendications humaines au nom de la Liberté.
    Sisley Huddleston *
    Le Mythe de la Liberté entretiens en temps de guerre, Lyon, Lardanchet, 1943
    Le point de départ ironique de cette réflexion politique est particulièrement ingénieux : le mot Liberté écrit sur les murs des prisons de la République ! Étudiant à Paris, Sisley Huddleston fréquentait alors des milieux “avancés”. Un jour qu’il s’indignait de l’arrestation de quelques manifestants de gauche pour lesquels il éprouvait de la sympathie, un camarade lui dit : « Quand nous serons au pouvoir, nous mettrons les autres en prison. Chacun son tour ! »
    Les illusions s’évanouirent. Le jeune Anglais étudiant en France comprit ce jour comment les partisans de la “Liberté” la conçoivent pour les autres. Il se rappela que les socialistes, partisans ombrageux de la “Liberté”, lui sont hostiles dans les questions économiques, qu’ils dénoncent la “liberté du travail” et veulent imposer leurs grèves par la violence à ceux qui ne partagent pas leurs idées. Il se rappela que le libéralisme économique est souvent pour l’ouvrier la liberté de mourir de faim.
    Il se rappela que dans la France républicaine, la devise “Liberté” était mise au service des formes les plus intolérantes de l’anticléricalisme, que la démocratie détruit la liberté des personnes en les soumettant à la loi du nombre et que le terrorisme révolutionnaire était son ultima ratio, son ultime argument pour assurer le Bonheur et la Liberté : « La Liberté ou la Mort », on ne sort pas de ce dilemme dans une logique démocratique.
    On parlera de l’hypocrisie du mythe de la Liberté car la civilisation est essentiellement une renonciation à la liberté au sens vague et absolu du mot. Bonald observait, par exemple, que la liberté de la presse ne concernait que les hommes qui écrivent : « Qu’est-ce qu’une liberté publique qu’il faut entourer de tant de précautions et dont l’exercice doit être l’objet d’une surveillance continuelle, tant l’abus est voisin de l’usage ? »
    Dans un État sain, la liberté de la presse est inconcevable car une presse “libre” peut empoisonner une nation et mettre le monde à feu et à sang. Les pharmaciens ont-ils le droit de vendre n’importe quel poison à n’importe qui dans n’importe quelle condition ? La seule liberté du clerc c’est d’élever le public et non de flatter ses instincts les plus bas, de nourrir ses curiosités malsaines, d’entretenir son ignorance et ses idées erronées. Il n’existe donc pas de “Liberté’, en politique, mais des libertés concrètes, précises, hiérarchisées, ayant pour corollaires des devoirs. Une société saine, dirigée par un État sain accorde des libertés bien définies, bien limitées pour éviter à la fois l’anarchie et la dictature.
    Gérard Baudin L’Action Française 2000 n° 2738 – du 20 décembre 2007 au 2 janvier 2008
    * Sisley Huddleston (1883-1952) était un journaliste et écrivain britannique. Après avoir travaillé à un journal des forces britanniques pendant la Première Guerre mondiale, il s’installa à Paris après la guerre jusque dans les années 1930. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il prit la nationalité française. Il publia un entretien avec le maréchal Pétain. Il fut emprisonné par les Alliés en 1944. Il laisse une oeuvre variée de réflexions sur les lettres, l’histoire et l’époque où il a vécu.

  • L’archipel Humain (2/3) : la Grandeur des petits

    "Mon engagement en faveur des peuples autochtones, les peuples premiers, ou peuples-racines, est philosophique, politique et personnel. Je suis convaincu que la mondialisation, l'internationalisation des peuples, est un malheur, une punition des dieux, et que le pluralisme culturel - à l'égal de la biodiversité - est la condition sine qua non du progrès de l'humanité."

    Jean Malaurie, Hummocks

    La mondialisation a accéléré et amplifié les perturbations de l’homme sur son milieu de vie, en épuisant les ressources naturelles à un rythme soutenu. Elle a également favorisé l’accroissement des inégalités entre et à l’intérieur des nations. En homogénéisant les civilisations, elle appauvrit la richesse de l’humanité, donc diminue le spectre des adaptions dont notre espèce pourrait disposer, c’est à dire la résilience de notre espèce face aux crises. A ce phénomène, nous pouvons appliquer une contrainte opposée, une éthique de la séparation, alliant richesse culturelle à l’échelle de l’Humanité et puissance de  cohésion à l’échelle de la Nation : un archipel humain.

    4.   Biodiversité et multiculturalisme: éloge de la pluralité.

    L’éventail du vivant.  Il semble que la « Vie »  ne tend pas vers une complexification de chaque organisme, mais vers une complexification de l’ensemble formé par tous les organismes. Le point oméga n’est pas spécifique, mais holiste. Ce potentiel de diversité, c’est une aptitude au progrès et c’est cela qui est maintenu,  comme l’a fait remarquer Stephen Jay Gould 1. Car la Vie s’incarne dans un éventail de formes assez grand, en conservant par ailleurs ses formes les plus élémentaires, pour conserver au maximum ce potentiel. Le but ce n’est pas l’homme, c’est Gaïa. En ce sens l’évolution tend vers un maintien du plus grand nombre de possibilités, et en cela rend  la biosphère plus résiliente face aux crises.  L’homme peut donc être la créature la plus aboutie de la Création, sans en être sa finalité.

    L’évolution et le mythe du progrès. Rendre l’Humanité plus résiliente, c’est, de la même manière, maintenir un jeu de solutions adaptatives. La biodiversité a été la plus importante lorsque les continents étaient les plus fragmentés et vice versa, lors des supercontinents, on constate un appauvrissement en diversité 2. La mondialisation a certes permis de grands progrès dans l’échange d’informations, en regroupant et spécialisant les talents, et en permettant une amélioration des conditions matérielles ainsi qu’une augmentation généralisée de l’espérance de vie. Néanmoins ce regroupement des civilisations s’accompagne d’une perte de richesse culturelle.

    Compétition et adaptation. Car il y a une échelle au delà de laquelle la cohésion, le sens de la responsabilité, la démocratie enfin, ne sont plus favorisées. Et quand nous partageons tous la même assiette, cracher dedans devient un moyen de se l’approprier 3 : ainsi commence la course aux dernières ressources et les guerres pour elles 4 afin ne rien perdre de notre compétitivité, ainsi que les pieds qui trainent lorsqu’il s’agit de traiter une pollution. De Jean Malaurie à Lévi Strauss, ceux qui se sont fait les spécialistes des sociétés les plus primitives ont bien remarqué que celles-ci avaient toujours trouvé un moyen, par des voies différentes, de s’adapter à leur milieu avant l’arrivée de l’étranger 5,6. Certains organismes choisissent les milieux les plus confortables, avec la compétition la plus forte, et d’autres l’inverse. Au final, chaque voie est explorée, testée.

    5.   « Là où croît le danger, croît aussi ce qui sauve. » Hölderlin.

    Une éthique de la conservation. Les éthiques reconsidérant la place de l’homme au sein de la nature sont légion 7. L’approche gradualiste, attribuée à Aristote, met en avant une hiérarchie des valeurs ontologiques intrinsèques, allant des minéraux aux humains. Néanmoins, plus récemment, l’approche écocentriste, ou l’écologie profonde d’Arne Naess, proposent quelque chose de nouveau en matière d’éthique : la valeur est donnée par l’interrelation entre les individus 8 et non par les individus eux-mêmes 9. En revanche, dans l’idée de préservation d’aires protégées 10, l’humain est « mis en dehors », ce qui implique une séparation entre l’Homme et la Nature. Que doit-on donc préserver : le caractère sauvage (ce que l’homme n’a pas touché) ou la biodiversité ? La réponse est simple : il faut préserver le caractère structurant de la Nature.

    Politique cristallisante et révolution permanente. Quelle que soit l’approche adoptée, celle-ci devra tenir compte de la profondeur des relations entre besoins humains et des ressources à disposition. C’est à dire déterminer et hiérarchiser la valeur esthétique, économique, culturelle de la ressource. L’approche centralisée, favorisant une bureaucratie lourde, est malvenue en matière de rapidité de prise de décision. Il est avéré que la communication est bien plus efficace dans une communauté restreinte, où la responsabilité de chacun est de plus grandie par appropriation des problèmes environnementaux 11.  L’approche communautaire ne peut cependant pas se passer des bienfaits de la centralisation, en particulier pour les ressources financières et intellectuelles, ainsi que pour l’adoption d’une législation uniforme 12.

    Tombeau tabou, totem toutou. Les citoyens, même sensibilisés à l’écologie, réagissent surtout dans l’affect et n’en ont que rarement une vision globale et cohérente. Par exemple la chasse, par la régulation de la population animale, montre son utilité si elle reste alliée à une responsabilité. Elle est pourtant reprise comme « argument écologique » à la fois par les chasseurs et leurs opposants. La proximité de la violence, dans la chasse ou la pêche, humanise le consommateur : s’impliquer dans un processus naturel donne une conscience écologique aussi ancrée que celle de l’intellectuel. Avant d’être des sapiens, nous étions des faber, et ce que la recherche théorique apporte en information, certains l’obtiennent par l’expérience.  Le monde est donc à ré-inventer : il faut redéfinir nos valeurs, donc spiritualiser la Nature d’une nouvelle manière. Le sacré n’est plus là on l’on croit. Si une fertilisation des océans par la matière organique de nos cadavres s’avérait utile, la plupart des religions s’y opposeraient quand même. Aussi ce qui est bénéfique pour la Nature, donc pour nous, doit devenir sacré 13.

     6.  Endémisme contre entropie.

    L’endémisme, c’est l’isolement, plus le temps. C’est ce qui permet le développement des formes les plus originales, en s’écartant des zones les plus compétitives. On peut penser aux indiens d’Amazonie, ou aux indigènes de Tahiti, décimés par les maladies inconnues jusqu’à l’arrivée des Européens. L’endémisme, dans une formule d’ensemble, c’est donc ce qui permet de travailler son style. Ce que fait une civilisation en s’isolant. Ce qui génère de la biodiversité c’est l’isolement plus le temps. C’est ainsi dans les archipels que la biodiversité est la plus importante. Les styles individuels peuvent alors s’épanouir, et l’imagination de la Nature prend forme dans les essais les plus improbables. Et plus les matériels génétiques sont éloignés, plus leur rencontre dégage de l’énergie, donc soit des opportunités, soit des dégâts.

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  • Le choix de la contestation du pouvoir ukrainien à l'aune de l'histoire de France

    Le fait ukrainien a séparé la mouvance en deux parties, non égales d'ailleurs.
    Si certains, majoritaires au demeurant, ont cru bon - on peut les qualifier d'identitaires et ils se recrutent bien au delà du Bloc - de soutenir les nationalistes ukrainiens agissant contre le pouvoir le pouvoir en place, d'autres ont préféré effectué le choix inverse. Leur choix fut la conséquence de leur appartenance identitaire, mais aussi de leur sympathie bien naturelle pour les croix celtiques arborées et portées par leurs camarades ukrainiens, présents sur place et d'opposition au pouvoir en place.
    Les seconds, quant à eux, se refusèrent à soutenir les porteurs de croix celtiques ukrainiennes, non au motif qu'elles leur déplaisaient, mais sûrement en raison d'un choix d'ordre géopolitique.
    Si à l'évidence les premiers se prononcent pour – la croix celtique en l'occurrence - les seconds ont effectué un choix qui presque toujours n'est pas d'approbation mais de répulsion : c'est ainsi que ceux qui ont opté pour Kiev et/ou pour Moscou, le plus souvent, n'apprécient pas particulièrement les deux capitales ou plus exactement, les deux modèles sociétaux qu'elle représentent.
    C'est parce qu'il n'a duré que fort peu – les trois quarts d'un siècle normal - que les grands historiens, de façon presque consensuelle, ont décidé d'appeler le dernier siècle précédent « le court vingtième siècle » : 1914 -1989 . Il n'est pas certain que la valeur historique de ce dernier ait été véritablement comprise puisqu'il ne faudrait pas omettre que pendant environ les huit mille ans de l'histoire qui ont précédé, les hommes très majoritairement, élevèrent et cueillirent. Si cela ne signifie pas que dans les grands pays, l'industrie n'existait pas avant 1914, il n'en reste pas moins que la quasi-totalité des contrées furent encore à l'époque campagnardes. En tant que tel, le vingtième siècle marque une évolution-révolution dans l'histoire humaine.
    De ce « court vingtième siècle », il n'est pas impossible et c'est même même probable que la seconde guerre mondiale en fut l'événement le plus marquant : les trois grandes idéologies de l'époque s'y affrontèrent avec à leur tête trois personnages historiques phares : Rossevelt pour la démocratie libérale, Staline pour le communisme, et enfin Hitler pour le fascisme, ce dernier considéré au sens générique du terme. Il faut bien évidemment prendre garde aux nuances : tous les démocrates ne se reconnurent pas dans l'action, les choix politiques de Roosevelt ; pas plus que Staline ne fit l'unanimité chez les communistes ou Hitler pour les nationalistes de toute obédience. Cependant, à la tête de puissances aussi majeures que les Etats-Unis, L'Union soviétique et l'Allemagne, ces trois hommes d'Etat furent historiquement incontournables, ce au point qu'il fallait en choisir un, malgré toutes les objections de type idéologique que l'on pouvait émettre, au sujet des uns comme des autres...
    Vivants aux 21 ème siècle depuis environ vingt-cinq ans, même si la donne a bien changé, les choix à effectuer de nos jours sont tout aussi nécessaires qu'ils le furent à l'époque. Plus exactement, à l'échelle planétaire, il n'existe plus de personnage histoirique majeur incarnant aujourd'hui le mode de pensée de Hitler ou Mussolini. Quelque part aussi, alors que nous nous avions annoncé « la fin de l'histoire », celle-ci s'est, peu de temps après la levée du rideau de fer, remise en route : nous voici à nouveau en présence de deux blocs – le troisième a disparu en 1945 – même si contrairement à naguère, ils n'ont plus la cohérence interne qui fut auparavant la leur. Si, côté libéral, les sociétés se ressemblent par tant, tel n'est plus le cas pour celles qui s'opposent au nouvel ordre mondial ; d'une part, parmi les deux cents pays qui composent le monde, elles sont anormalement peu nombreuses, d'autre part, elles sont radicalement différentes, d'un point de vue idéologique : mis à part en effet, leur opposition au nouvel ordre mondial, quoi de commun d'un point de vue idéologique entre la Chine, la Russie, la Corée du nord, l'Iran ou la Syrie ?
    Voilà pourquoi, sachant ces deux facteurs majeurs, on ne peut plus se permettre un choix confortable qui soit tout simplement conforme aux intérêts bien particuliers des uns et des autres. De surcroît, j'ai eu l'occasion de lire que l'Ukraine n'était pas la Russie. C'est omettre qu'elle en est beaucoup plus proche que la Tchéchénie.
    Et même dans le cadre de l'histoire française, il n'est pas bien difficile d'imaginer le choix de ceux qui défendent aujourd'hui l'Ukraine : qu'eurent-ils donc fait entre 1946 et 1954 en Indochine ? Ou entre 1954 et 1962 durant la guerre d'Algérie ? Quel camp eut été choisi au motif du respect des identités locales ?
    Et ce malgré tous les sacrifices des Anciens ...

    Alain Rebours

    http://www.voxnr.com/cc/a_la_une/EFAFlVkApuuWnyzhVY.shtml

  • L’archipel Humain (1/3) : Titans et effondrements

    « Chaque chose et chacun, âme, être, objet ou nombre,
    Suivra son cours, sa loi, son but, sa passion,
    Portant sa pierre à l'œuvre indéfinie et sombre
    Qu'avec le genre humain fait la création ! »
       Victor HUGO, Les Rayons et les Ombres, 1839.

    A l’horizon du prochain siècle se profilent d’inquiétants nuages noirs: pénurie énergétique ou minérale, crise démographique et agricole, changements climatiques, acidification des océans, déforestation, menaces sur les écosystèmes et les réserves halieutiques. Dans le même temps, le monde occidental subit, depuis bientôt un siècle, une crise idéologique et sociale, à laquelle s’ajoutent des crises économiques à répétition, qui ne vont qu’en s’aggravant. Il apparaît donc que notre situation ressemble en certains points à celle de civilisations antiques disparues, atteignant une démographie trop importante pour prospérer dans leur environnement, et faisant face à des conflits potentiels pour s’approprier les dernières richesses. A ceci près que l’échelle concernée n’est plus régionale mais planétaire, compte tenu de l’interconnexion entre les sociétés humaines, et de la globalisation des problèmes environnementaux. Nous ne pouvons donc pas nous permettre simplement de migrer pour changer de milieu de vie.

     1.   Anthropocène: le réveil des Titans.

    Homo sapiens, rules the world.L’Anthropocène, c’est ce terme désignant une nouvelle époque géologique1. Ce qui signifie que nous ne sommes plus dans la continuité de la précédente et que l’écosystème global a été perturbé dans sa globalité, par notre espèce devenue dominante à l’échelle de la planète2-6. On peut aussi bien en situer l’origine au début de l’ère industrielle, ou au moment de la maîtrise du feu.

    Les Titans approchent. Le problème de notre époque, le défi de ce siècle, n’est pas simplement climatique, énergétique, ou démographique : il est systémique. Des chasseurs cueilleurs, nous sommes passés aux organismes génétiquement modifiés et peut être demain à la géoingénierie. En l’espace de quelques millénaires, notre espèce a obtenu un pouvoir fabuleux, qui, associé à une conscience, nous donne aussi des devoirs. L’adaptation à une catastrophe sera d’autant plus douloureuse que moins préparée. Entre les couches sédimentaires, les changements les plus abrupts sont associés aux crises du vivant. Ainsi, les titans prédits par Jünger approchent,  s’incarnant en des avatars menaçants : la faim, la sécheresse, les guerres, enfin la nuit, par pénurie d’énergie.

    Le paradigme de la main invisible. C’est une erreur de croire que l’évolution est toujours positive. La queue du paon est peut-être un avantage adaptatif en séduction, mais complètement inutile, voire néfaste du strict point de vue de ses capacités de survie.  Ainsi en est-il également de notre progrès technologique. Croire au progrès technologique comme solution à tous nos défis est une erreur fondamentale dans un monde globalisé, avec des ressources limitées. Car pour obtenir de l'innovation il faut investir dans la recherche, et pour investir, il faut un capital qui, en dernière analyse, est issu des ressources naturelles. Ce qui signifie que toute l'activité économique se fait en puisant dans le capital naturel. Donc une pénurie impliquerait non seulement un ralentissement de la croissance, mais aussi de l’innovation, menant à une spirale de dépression. Le développement des technologies doit évoluer avec la connaissance que nous avons de notre propre écologie, afin de mieux faire la part des choses, et de distinguer le vain de l’utile, rendant l’exploitation des ressources souhaitable. Il ne suffit pas de tendre notre effort vers l’adaptation, mais il faut également connaître une direction. En ce sens, il s’agit de privilégier l’information et de ralentir la consommation.

    2.     Effondrements et adaptations.

    De l’Expérience... L’étude croisée des sciences naturelles et de l’archéologie donne des exemples de civilisations soumises à des défis, ayant réussi ou non à s’adapter et à perdurer. La civilisation Maya, après avoir atteint son apogée autour de l'an mil, s'effondra entre 750 et 900. En moins d’un siècle, la population régionale passa de trois millions d'habitants à environ quatre cent cinquante mille. Différentes hypothèses sur cet effondrement ont été avancées: guerres, mauvaise gestion des sols ou appauvrissement des ressources agricoles et hydriques 7. Ce sont les causes internes. Le climat, cause externe, pourrait en être la cause primaire 8, influant sur toutes les autres, en menant à une réaction en chaîne, causant des difficultés dans l’approvisionnement et la gestion de l’eau 9. Dans un tel contexte, les conflits entre Cités-Etats, donc les guerres pour les ultimes ressources, étaient  favorisées.

     

    ...à la Conscience. On peut ainsi faire un lien direct entre stress environnemental et désordres politiques. Nous apprenons, à travers l’exemple des Mayas, que l’exploitation maximale du milieu naturel et la dépendance des ressources ont conduit leur civilisation à une grande fragilité. En reprenant l’exemple des Mayas, accompagné, entre autres, de celui des Anasazis, des Vikings du Groenland, des sociétés polynésiennes et de l’île de Pâques 10, auquel nous pourrions rajouter ceux, plus actuels, de Nauru et Kiribati,  Jared Diamond (« Effondrement ») présente une liste de cinq facteurs entrant en compte dans ces effondrements ou sauvegardes de société : (i) les dommages environnementaux, (ii) les changements climatiques, (iii) les voisins hostiles, (iv) le rapport de dépendance avec les partenaires économiques, et (v) les réponses apportées par la société à ces problèmes, selon ses valeurs culturelles 11. Ainsi l’approche top-down peut s’avérer aussi efficace (comme le montre l’exemple du Japon sous l’ère Tokugawa) que nuisible (dans le cas des Vikings, voulant conserver un lien avec la « base européenne », déconnectée des problèmes du Groenland).

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  • 2014 : 800e ANNIVERSAIRE DE LA NAISSANCE DE SAINT LOUIS !

    Saint-Louis

    Plus d’information des activités de l’association Oriflamme ICI

  • « I-Media » spécial Bobards d’Or: avec Jean-Yves Le Gallou

  • L’Action francaise chez Radio Courtoisie

    L’Action francaise est invité lors de la prochaine émission d’Albert Salon sur Radio Courtoisie, le lundi 24 mars 2014 de 10h45 à 11h45 sur le thème du "français en partage"

    Prochaine émission à Radio Courtoisie (95,6 Mhz) : Le français en partage dirigée par Albert SALON, docteur d’Etat ès lettres, ancien Ambassadeur, prix Jean Ferré 2008 des auditeurs de Radio Courtoisie, Président d’Avenir de la langue française ; avec l’assistance de Mme Lydie CASSARIN-GRAND :

    Lundi 24 mars 2014 : « L’Action française, les royalistes et les langues du royaume » avec MM. Olivier PERCEVAL, Secrétaire général de l’Action française, François MARCILHAC essayiste et directeur éditorial de l’AF 2000, et Joël BROQUET, président du Carrefour des Acteurs sociaux, ancien président de l’Agence de la Langue française créée par Philippe de Saint Robert.

    Lundi 24 mars 2014 de 10h45 à 11h45 ; puis rediffusions la même semaine : lundi 24 à 14h, mardi 25 à 6h, samedi 29 mars à 10h45.

  • Les nouveaux bien-pensants

    Le 04 mars, Patrick Péhèle et Pascal Eysseric recevaient sur Radio Courtoisie, Michel Maffesoli et Hélène Strohl pour leur livre “Les nouveaux bien-pensants” éditions du moment. Un pamphlet virulent et acerbe.

    Avant d’être économique, la crise actuelle est morale. Aujourd’hui, les élites – ceux qui ont le pouvoir de faire et de dire – semblent de plus en plus déconnectées de la vie de tous les jours. Le bavardage des journalistes, politiques, hauts fonctionnaires et « experts » n’intéresse plus grand monde. La dévaluation de la parole publique est inquiétante, car c’est elle qui suscite l’émergence des discours démagogiques, ceux des extrêmes, gauche ou droite. À partir de quelques exemples précis et emblématiques (Attali, Minc, Badiou, Plénel…), il s’agit d’analyser et de dénoncer les racines du conformisme propre au dangereux « entre-soi » caractérisant la pensée « officielle ». Il faut chercher les sources de ce décalage et montrer en quoi les « nouveaux bien-pensants », dont le moralisme conforte le politiquement ou le théoriquement « correct », suscitent les multiples incivilités sociales.

    Michel Maffesoli, membre de l’Institut universitaire de France, Professeur à la Sorbonne est le théoricien, internationalement reconnu, de la postmodernité. Il est l’auteur d’une trentaine d’ouvrages, traduits en de nombreuses langues, parmi lesquels : L’Ombre de Dionysos (1982), Le Temps des tribus (1988), Du Nomadisme (1997), Sarkologies ( 2011).

    Hélène Strohl, ancienne élève de l’ENA, Inspectrice générale des affaires sociales honoraires, a publié L’État social ne fonctionne plus (2010) et deux romans.

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