Éloge de la différence, droit à la différence, ce propos est d'actualité comme les débats qu'il suscite. Mais cette altérité est elle-même gangrenée : les cultures qui provoquaient l'émerveillement des premiers explorateurs « ne sont plus que des corps malades et des formes mutilées »(11).
Mais revenons à l'œuvre de Lévi-Strauss, c'est-à-dire à sa méthode. Son nom est indissolublement associé à ce qu'on a appelé l'anthropologie structurale. Il s'agit, dans cette perspective, d'étudier non plus les phénomènes conscients, mais leur infrastructure inconsciente : « Reconnaître aux éléments d'un système non pas une valeur d'entités indépendantes, mais un sens de position, c'est-à-dire dépendant des relations qui les unissent et les opposent, et prendre celles-ci comme base de l'analyse. Reconnaître de même que ces relations n'ont elles aussi qu'un sens de position au sein d'un système de corrélation dont il s'agit de dégager la structure » (12). Le problème était de savoir si la méthode structurale ne valait que pour les structures de parenté. L'examen du totémisme a démontré comment cette méthode s'appliquait avec autant de succès aux systèmes symboliques à l'aide desquels l'homme organise ses représentations du monde. L'anthropologue est confronté à des questions que ne se posent pas seulement les sociétés primitives, du genre : quelle est la meilleure alliance ? faut-il se chercher une épouse proche ou lointaine ? Claude Lévi-Strauss a cherché ses exemples chez Saint-Simon, dans le monde paysan, au Japon, à Madagascar, chez Blanche de Castille…