France et politique française - Page 2717
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Législatives : regardons les faits
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Agression policière contre Richard Roudier à Montpellier : ce qu'il faut savoir
Violences policières au Palais de Justice de Montpellier : ne faisons pas d’amalgame !
Il fût un temps où l’honneur de la France était d’assurer la liberté d’expression et de cantonner son appareil répressif au maintien de l’ordre républicain... Et non pas de mobiliser ses forces de répression contre les lanceurs d’alertes.
Il se trouve que Richard Roudier est le Président d’une Association, La Ligue du Midi, régulièrement enregistrée auprès de la Préfecture, et qui a pour objet de défendre les intérêts des autochtones face à une déferlante migratoire sans précédent qui remet en question l’existence même de notre civilisation dans ce qu’elle a de plus sacré : la condition de la femme, la neutralité de l’espace public, la soumission à des dogmes venus du moyen-âge, la délinquance de rue qui pourrit la vie de nos concitoyens, le refus de partager les valeurs de la République, notamment l’enseignement de son histoire, etc, etc.
Richard Roudier et son fils Olivier ont eu le tort de visiter une association grassement subventionnée par des fonds publics et dont l’objet est de soutenir activement les enfants des clandestins illégalement présents sur notre territoire. C’est vrai aussi que leur visite a été quelque peu traumatisante pour le personnel salarié de cette association, puisque deux tasses à café ont été cassées...
Convoqués par la Justice pour s’expliquer, ce qui semble tout-à-fait normal, Richard Roudier et son fils Olivier ont été placés en Garde à Vue, entendus par le Procureur auprès duquel ils ont répondu courtoisement aux questions (plusieurs griefs contre eux ont été abandonnés). Et c’est au “dépôt”, au sous-sol du Palais de justice, que Richard Roudier a subi une violence inouïe : refus de médicaments, détournement de nourriture, refus de le laisser aller uriner de la part de deux policiers névrosés. Non contents de cela, nos deux “bourreaux”, ont refermé la lourde porte barreaudée d’acier sur ses doigts coincés dans le chambranle. Malgré ses cris de souffrance, il est resté ainsi les doigts écrasés pendant plusieurs minutes, le sol inondé de son sang. Les deux petits chefs refusant d’appeler les pompiers. Richard Roudier est âgé de 70 ans ! ...
La Juge de la Détention et des Libertés est descendue elle-même avec son équipe pour entendre le Président de la Ligue du Midi dans le fourgon des pompiers et lui signifier sa remise en liberté avant d’être dirigé vers l’hôpital de La Peyronie.
Que nous dit cette sauvagerie sur l’état de la France ? Qu’une forme de soft-totalitarisme se met peu à peu en place au pays des Lumières et qu’il devient pratiquement impossible de dénoncer ce que pourtant tout le monde constate jour après jour sur notre territoire : le Grand Remplacement. Et ce ne sont pas les commémorations de l’assassinat de masse de Nice et de l’égorgement du Père Jacques Hamel qui vont changer quoique que se soit à cette politique suicidaire qui menace l’existence même de notre civilisation.
On peut, certes, contester la forme que prennent certaines manifestations de la Ligue du Midi. Nous sommes désolés que les associations de type RAIH qui vivent de la misère des illégaux pour les mettre au service de la mondialisation qui va les exploiter sans vergogne, aient du procéder au remplacement de deux tasses à café et au rangement de quelques dossiers éparpillés. (Des dossiers d’illégaux qui violent la loi française par leur présence non souhaitée sur le territoire national).
Nous ne ferons ici aucun commentaire sur les suites judicaires qui seront données à cette bien triste affaire. Nul doute que cette sauvagerie inexcusable fera l’objet de lourdes sanctions dans l’administration de la police et que les deux cadres de la Ligue du Midi en sortiront la tête haute. Richard Roudier qui a assumé en permanence l’action au RAIH (local ouvert au public) déclarait, lors de sa sortie de l’hôpital, qu’il ne fallait pas faire d’amalgame entre quelques brebis galeuses et la grande majorité des fonctionnaires de police et ne regrette pas sa présence lors des manifestations de policiers au printemps.
Lorsque dans quelques années nous constaterons tous et toutes que la situation nous aura définitivement échappée et que l’Europe sera sous contrôle étranger, l’avertissement que Churchill lança aux démocraties en apprenant la signature des accords de Munich résonnera bien étrangement :
« Entre le déshonneur et la guerre, vous avez choisi le déshonneur, et vous aurez la guerre »
NDLR SN : Depuis quelques jours, nombreux sont les patriotes qui veulent manifester leur émotion et leur soutien à Richard Roudier. Ils peuvent le faire ne écrivant à liguedumidi@orange.fr
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APL: T’as pas cinq balles?
Ne vous demandez pas ce que vous pouvez faire pour votre pays, demandez-vous combien votre pays vous doit – et braillez-le sur tous les tons. Ainsi pourrait-on résumer la nouvelle philosophie, sinon des Français, de ceux qui se targuent de parler pour eux, élus et médias, sans oublier les inévitables associations devenues les arbitres des élégances sociales.
17 centimes par jour
Encore que, soyons honnêtes, pas mal de mes concitoyens semblent prêts à se dire opprimés, victimisés et bien sûr discriminés, parce qu’on leur sucre cinq balles d’allocs par mois, soit 17 centimes par jour. Sur je ne sais quelle chaîne, Virginie, ou peut-être bien Prune, étudiante en je ne sais pas quoi mais déjà docteur en comptes ménagers explique que, si on soustrait 5 euros de son budget de 377 euros, c’est la vie qu’on lui enlève. C’est certainement dur de vivre avec 377 euros par mois, mais ce qui est encore plus dur, c’est de penser de cette façon à 20 ans, et même à 50. Quand bien même Virginie ou Prune devrait sauter un repas dans le mois pour contribuer à l’effort national, cela signifierait-il que nous sommes revenus aux heures les plus noires de la révolution industrielle ?
Et le tabac dans tout ça?
Du reste, ceux qui en font des caisses sur le sort des étudiants ont la larme à l’œil quand ils écoutent La Bohême – « Nous ne mangions qu’un jour sur deux ».
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La nouvelle Assemblée ou la philosophie du foutoir
Par André Bercoff
Dans cette humeur selon son style si personnel et si sympathique [Figarovox 28.07] André Bercoff exprime un fort point de vue. Derrière l'amateurisme des députés LREM, les amendements antiracistes liés à la loi de moralisation montrent une volonté de réduire au silence tous ceux qui ne rentrent pas dans les clous de la « police novlangue ». André Bercoff a raison. LFAR
En politique comme ailleurs, il est peut-être bon de ne rien savoir, mais il ne faut point en abuser. Ils furent nombreux à se réjouir, et légitimement, de l'éruption des jeunes pousses de la société civile dans la République en Marche. Le Monde Nouveau surgissait enfin sur les bancs du Palais Bourbon, balayant les caciques fatigués, les septuagénaires blasés, et les vieilles formations gouvernementales en déroute. Reste qu'être député exige un certain nombre de connaissances quant au fonctionnement de l'appareil législatif : faire la différence entre article et amendement, savoir formuler sa question de façon à ce qu'elle n'apparaisse pas comme un sabir au goût étrange venu d'ailleurs ; de ce point de vue, le présent spectacle apparaît, selon que l'on appartienne à la majorité sonore ou à l'opposition indignée, réjouissant ou navrant.
Force est de reconnaître qu'une dimension quasi zoologique vient d'être atteinte avec des députés qui votent contre un article de la loi de « confiance dans l'action publique » qu'ils avaient pourtant ratifié en commission. Ce qu'on appelle peut-être en psychanalyse la schizophrénie heureuse ; en réalité ici, l'envers d'un amateurisme appelé sans doute à s'estomper quand les néophytes apprendront à la fois la base du métier et la maîtrise de leurs affects. Pour le moment, ils semblent fonctionner à l'aveugle en attendant les instructions de messieurs Ferrand et Castaner, et la baguette du chef d'orchestre de Rugy : en l'absence de ceux-ci, tous les désespoirs sont permis, ce qui laisse aux aimables comédiens de la France Insoumise le loisir de se livrer aux jeux de rôles dont ils sont, faute de vrai pouvoir, si friands.
Mais tout cela n'est que billevesées à côté d'amendements qui viennent d'être votés et qui rendent définitivement inéligibles tout candidat qui se serait livré à des déclarations discriminatoires, injures publiques, provocations à la haine raciale: tout le vocabulaire des associations « droitsdelhommistes » à sens unique, anti-racistes deux poids deux mesures, qui consiste en fait à censurer et à paralyser toute personne qui oserait s'exprimer en dehors des passages cloutés de la police novlangue. Soyons clairs : il ne s'agit en aucun cas ici de cautionner ni d'admettre le racisme d'où qu'il vienne et la haine d'où qu'elle jaillisse. Mais comme la parole dominante et la pensée toujours unique s'attachent à ne culpabiliser et à ne condamner que ceux qui ne pensent pas comme elles, on s'aperçoit que le curseur est mis de façon à ne frapper que d'un côté. Aujourd'hui, cela vise les politiques et déjà les intellectuels, demain les humoristes et bientôt - pourquoi pas - les citoyens. Je relisais récemment une collection du magazine Hara Kiri des années 60-70 ; j'écoutais les monologues de Pierre Desproges, de Coluche et d'autres : ils seraient tous aujourd'hui dans le collimateur de la nouvelle Inquisition. Sous les pavés des faux débats parlementaires, la plage de Big Brother s'étend. Régressivement. Dangereusement.
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Forces armées : « Donnez-leur les moyens de nous défendre ! »
En France, en Syrie, en Libye, au Mali, nos soldats risquent leur vie et, parfois, meurent par devoir.
En ce 14 juillet, Boulevard Voltaire leur rend hommage.
http://www.bvoltaire.fr/forces-armees-donnez-moyens-de-defendre/
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A Bras Ouverts : accueillir nos différences et nos limites
Tugdual Derville est le fondateur de l’association « À Bras Ouverts », grâce à laquelle depuis trente ans des milliers de bénévoles et d’enfants ou de jeunes touchés par le handicap partent ensemble en week-end ou en vacances. Dans L'Aventure à bras ouverts, un voyage en humanité, Tugdual Derville raconte la création et l'histoire de cette association. Alors qu’il a vingt ans, une rencontre fait basculer la vie du jeune Tugdual : celle de Cédric, enfant porteur d’une infirmité motrice cérébrale, qui l’entraîne dans « un voyage en humanité ». Une aventure parfois difficile mais transfigurée par la présence des personnes porteuses d’un handicap. Elles apprennent à Tugdual, et au lecteur à sa suite, à entrer dans « la spiritualité du pauvre » chère à Jean Vanier : accueillir à bras ouverts nos différences et nos limites. Pour s’émerveiller de ce qui est révélé aux travers de nos fragilités. Extraits :
"Nous sommes conscients que notre société, qui a laissé se développer une forme d'eugénisme anténatal, envoie aux personnes concernées par le handicap une injonction paradoxale : "Prenez toute votre place dans la société, mais, si on avait su, on ne vous aurait pas laissé naître." La réponse d'A Bras Ouverts ne se situe pas sur le plan de la revendication, mais plutôt sur celui de la prise de conscience humanitaire, de l'intention de prière, de l'expérience et, si nécessaire, du témoignage porté par ses responsables."
"Une phrase de Jésus me revient, comme une assurance universelle au milieu des vicissitudes et des vanités du monde : "Des pauvres, vous en aurez toujours avec vous !" (Jn 12,8). Je comprends que cette parole nous dit aussi que nous aurons toujours la consolation des pauvres. Ils ont la clef de Dieu."
"Les porteurs d'initiatives humanitaires et sociales ont intérêt à conserver - surtout dans les premiers temps - une distance par rapport au monde politico-administratif. Ce dernier a tendance, en forçant l'entrée des innovations dans ses cadres, soit à les récupérer, au risque d'une fossilisation technocratique précoce, soit à les tuer dans l'oeuf, par méfiance ou excès de prudence. Un critère simple permet à chaque responsable associatif de vérifier s'il n'est pas allé trop loin : la liberté. Demeure-t-il libre de s'exprimer sur ses convictions ? Libre d'agir selon sa conscience ? J'ai entendu un jour un député regretter que ce soit le monde associatif, par ses actions, qui oriente une bonne part de la politique de soutien aux personnes handicapées. Comme si l'Etat pouvait remplacer sa créativité et devait tout maîtriser..."
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Zoom d’été : A la rencontre de Nicolas Gardères
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En marche vers le collimateur : Macron avait décidé de virer le général de Villiers avant le « coup de gueule » du 12 juillet
Narcissime, ego et despotisme :
"Le jeu de bascule s’apparente aussi à la «revanche de Bercy», après trois années durant lesquelles la Défense a somme toute tenu la dragée haute aux argentiers de l’État. Il n’est guère étonnant que les questions de budget aient été au cœur du maelström des dernières semaines. À deux jours de la Fête nationale, «Bercy a joué ses cartes à toute vitesse, pour faire passer ce qui n’aurait pas été possible sous Le Drian», raconte une source gouvernementale. Un haut fonctionnaire a joué un rôle clé dans l’ombre du chef de l’État: celui qui fut son directeur de cabinet lorsqu’il était ministre des Finances, Alexis Kohler, actuellement secrétaire général de l’Élysée.
Une bonne source raconte ainsi comment se serait «noué le sort» du général de Villiers, ce 12 juillet au matin. Non pas lors de l’audition parlementaire à huis clos, tant commentée, qui se déroule en fin de matinée et à l’issue de laquelle le chef d’état-major des armées (CEMA) a fait part de son exaspération en des termes plutôt crus. Mais un peu plus tôt, lors du conseil restreint de défense qui se tient à 9 heures à l’Élysée. La veille, Gérald Darmanin, le ministre de l’Action et des Comptes publics, a évoqué les économies à réaliser dans une interview au Parisien, que nombreux au gouvernement, Défense en tête, jugent intempestive. Parce qu’il faut trouver 4,5 milliards d’euros au second semestre et qu’on veut baisser les prélèvements, il faut «taper tout de suite» dans le budget de l’État.
Lors de la réunion à l’Élysée, le premier ministre, Édouard Philippe, confirme la réduction de 850 millions d’euros imputée au budget de la Défense en 2017. La ministre des Armées, Florence Parly, exprime alors son désaccord, soutenue par Jean-Yves Le Drian, le nouveau patron du Quai d’Orsay. Enfin, le général de Villiers prend lui aussi la parole. «Alexis Kohler en a été extrêmement mécontent», indique une bonne source. Aucune déclaration n’a filtré de ce conseil restreint couvert par le secret de la défense nationale. Il n’en ira pas de même lors de la commission parlementaire, quelques heures plus tard, d’où «fuite» la colère du CEMA. Un enchaînement d’événements retentissants est enclenché.
«Ce qui a déplu à Alexis Kohler, c’est l’idée qu’on puisse imaginer revenir sur un arbitrage du président de la République en organisant la pression. On n’est plus sous Hollande», souligne une source proche de l’affaire. «Ce qui l’a excédé, c’est la contestation de l’autorité. L’argument selon lequel le CEMA aurait contrevenu au devoir de réserve (évoqué par Emmanuel Macron dans son discours à l’Hôtel de Brienne, NDLR) ne tient pas. Faire passer cette affaire pour une histoire de discipline, c’est de l’habillage médiatique», estime cette source. Selon celle-ci, la «fuite» des propos du CEMA devant les parlementaires a été «exploitée pour en faire une démonstration d’autorité». Le message aux 220 directeurs d’administration centrale et principaux responsables de l’administration est clair: «Attention, seuls les plus loyaux resteront.»"
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Une praxis révolutionnaire et conservatrice est-elle encore possible...?
Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Jure Vujic, cueilli sur Polémia et dans lequel il s'interroge sur les conditions de l'efficacité d'une action conservatrice-révolutionnaire visant à abattre le système dominant. Il rappelle notamment la nécessité de penser politiquement le « système des objets » qui enserre nos vies et conditionne nos façons de penser...
Une praxis révolutionnaire et conservatrice est-elle encore possible ?...
Trop souvent on oublie que la reconduction au pouvoir du Système dominant et de la classe gouvernementale tient plus à l’internalisation et la reproduction des modes de pensée dominants au niveau social, culturel, sur le plan individuel comme sur le plan collectif.
On se souvient que la praxis, notion philosophique théorisée par Aristote dans l’Ethique à Nicomaque et qui initialement renvoyait à l’idée d’une pratique ou une action qui, transformant le sujet, a été plus tard reprise par les marxistes, par Antonio Gramsci et les situationnistes pour lesquels la philosophie de la praxisdésignait la pratique qui se reconnaît elle-même par la théorie qui découle de son action, mais qui, de par sa fonction révolutionnaire, devait transformer les esprits.
Force est de constater que depuis Mai 68, le discours libertaro-marxiste a fait bon ménage avec le capitalisme libéral qui se traduit aujourd’hui par une praxissociétale parfois schizophrène d’hyper-individualisme festif et de domination capitaliste marchande que l’on accepte comme une fatalité irréversible. Promouvoir une politique de gauche et des valeurs de droite, employer un discours à la fois révolutionnaire et conservateur impliquerait au préalable de reconnaître, en dépit des avancées les plus fines sur le plan social et politique, l’absence d’une praxis adéquate, susceptible de transformer les rapports sociaux, les façons de sentir, de penser. En effet, face à la praxis bien rodée du marché déstructurant du social, il faudra jeter les bases d’une praxis de restructuration des valeurs. D’autre part, on oublie souvent que la technique, les gadgets omniprésents dans notre société hightech constituent de puissants vecteurs d’individuation et de socialisation et trop souvent d’aliénation plus que les principes de l’éducation familiale et scolaire. Il s’agit ici de ce que Jean Francois Dufour appelle les percipiens (le principe de sentir), l’idée de forces mécaniques pesant sur notre pensée et notre entendement et qui préexistent et façonnent notre comportement, notre agir, notre praxis. Jean Baudrillard parle de « système des objets » pour rendre compte de cette mutation dans nos sociétés postmodernes du sens et du rȏle des objets de l’utilité vers la matérialité autonome (qui annule le symbolique), indéfiniment modulables et constituant un ensemble systémique cohérent de signes.
Notre rapport au monde se réduit le plus souvent au rapport aux objets quotidiens avec lesquels nous nouons une complicité profonde entre les investissements psychologiques, souvent induits et extorqués, et les impératifs sociaux de prestige, entre les mécanismes projectifs et le jeu complexe des modèles et des séries. Pier Paolo Pasolini parlait du vrai visage du fascisme qu’il voyait dans la société de consommation, mais non plus celle d’une mécanique d’exploitation extérieure à nous-mêmes, mais d’un système de pensée et de comportement internalisé par nos sens et notre mental.
Introduire une nouvelle praxis réellement révolutionnaire et non purement expérimentale sur le plan social et culturel suppose alors de dégager un nouveau sens du social, de produire de nouvelles formes de vivre-ensemble qui remettraient en cause de façon profonde la praxis dominante de la « valeur marché », le « fonctionnement » dont parle Gilbert Simondon, qui réside, non plus dans l’usage, mais « dans sa dimension anthropologique », dans le marché en tant que valeur et mode de reproduction des rapports sociaux.
Même si les résultats des dernières élections parlementaires et présidentielles dans de nombreux pays européens confirment la poussée de mouvements anti-Système populistes de gauche comme de droite, on est loin d’une remise en cause générale et massive du Système libéral marchand dominant, susceptible de menacer l’ordre établi. Le conditionnement médiatique, la manipulation mentale et politique des masses semblent encore marcher à merveille en tant que mécanique à discréditer et à démoniser les alternatives politiques potentielles. La victoire de Macron en France, qui l’opposait au second tour de la présidentielle à Marine Le Pen, en est une parfaite illustration. L’abrutissement politico-médiatique et la production de la peur sociale principalement dans les classes moyennes déclassées permet encore de reproduire les schémas de domination et de gouvernance oligarchique. On se rappellera à ce titre du Prince de Machiavel qui renvoie à l’emploi de la ruse, de la fraude et de la corruption, les armes de la ruse du «renard », afin d’empêcher la violence de masse et les soulèvements révolutionnaires, un softpower qui constitue le moyen de domination principal de la classe gouvernante.
Pourtant ce constat d’échec nous permet de nous interroger sur l’avenir du discours anti-Système qui articule à raison le fossé grandissant qui se creuse entre l’oligarchie et le peuple, et plus précisément sur la question de l’existence et l’efficacité d’une praxis réellement révolutionnaire et son adéquation avec ce que l’on peut appeler les valeurs, le discours, le narratif conservateur. Car si une infime minorité se reconnaît dans le discours et les valeurs anti-Système, lesquelles circulent par les réseaux d’informations alternatifs, on est encore loin de l’assentiment de larges masses de citoyens qui baignent dans le breuvage quotidien des médias officiels et se contentent très bien de ce déni de vérité. « L’esprit » d’une époque dépend de l’ensemble de ses faits sociaux, y compris le développement technique. Dans ce sens, les objets techniques qui s’autonomisent de plus en plus portent avec eux un impact considérable sur la manière dont nous nous représentons le monde, même des notions très abstraites comme le temps ou l’espace. Bien sûr, le rȏle des idées et le combat des idées tiennent encore une place importante dans la transformation des esprits, mais le changement de paradigme dans la praxis sociale comme cela été le cas pour le rȏle de la technique dans les révolutions scientifiques étudiées par T. Kuhn (dans La Structure des révolutions scientifiques) sera déterminant.
Le mérite de Kuhn a été celui de développer la thèse selon laquelle une science progresse de manière fondamentalement discontinue, c’est-à-dire non par accumulation mais par ruptures. Ces ruptures, appelées révolutions scientifiques, sont selon Kuhn analogues à un renversement des représentations (ce que les psychologues de la perception appellent un gestalt switch). Appliqué à la sphère sociale et politique, ce renversement des valeurs, qui correspondrait à une rupture épistémologique de paradigmes, aboutirait donc à l’issue de cette crise de légitimation à l’avènement d’un nouveau paradigme de système de valeurs. Pourtant, nul ne sait à quel moment, dans quelle situation de crise survient ce facteur d’anomalie perturbateur qui préside à la naissance d’un nouveau paradigme révolutionnaire, processus cyclique de gestation qui peut très bien perpétuer une longue agonie avant sa pleine reconnaissance et son adoption sociale.
Alors que les grands systèmes d’idées ne mobilisent plus, il faudra s’interroger sur quelles bases praxistes et idéologiques reconstruire. Alors que l’on dit volontiers que la révolution est une nostalgie de la gauche, force est de constater que la contre-révolution, voire les nombreux mythes de la « renaissance » de la « restauration », de l’ordre, constituent aussi une certaine forme de mélancolie de la droite, dont il est difficile de faire le deuil. A ces mythes sotériologiques et holistes se sont substitués, de façon indolore, des mythes technicistes consuméristes : le mythe de l’ouverture, le mythe de la communication, le présentisme, comme celui d’une mythologie du portable beaucoup plus attrayant pour les jeunes générations que celui des grandes luttes politiques et sociales ou du mythe Sorelien de la grève générale.
Cette praxis du marché est celle de l’ostensible, du conditionnement opérant que génèrent les concepteurs de produits par la dissémination de besoins artificiels vérifiables dans le domaine numérique de la communication. Un conditionnement basé sur une stratégie de dépendance qu’on dissimule derrière le leurre d’une utilisation agréable et supposée enrichissante, pouvant préparer le terrain de l’addiction. Le facteur du libre choix et de la personnalité diminue considérablement, alors que l’emprise manipulatrice et l’autorégulation des comportements sociaux neutralisent la capacité réactive de résistance au stress social à mesure que s’amoindrissent les facultés de concentration et de l’intelligence émotionnelle. Il s’agit bien d’une praxis de la narcomanie sociétale qui fonctionne sur un mode de dépendance-approvisionnement marché/dealeur et junkies/consommateur, une oniomanie organisée et généralisée, qui se traduit par de nombreuses pathologies sociales. Cette consommation compulsive est surtout visible sur le marché du smartphone par une hausse constante de la dépendance ou l’addiction au smartphone, une cyberaddiction (dépendance à Internet), pathologie s’exprimant par un curieux mélange d’anxiété phobique, d’euphorie hystérique et de dépression.
A l’administration des choses il faudra pourtant, tout comme le soutient Bruno Latour, re-politiser le « système des objets » et substituer le gouvernement des hommes, dire que tous les objets, la technique, ne sont pas neutres et même nocifs. En effet, alors que l’on a dépolitisé les questions de nature, il conviendra de re-politiser la question de l’impact sociétal des objets Il faudra se réapproprier l’utilité et la finalité des choses et dénoncer les stratégies de l’ostensible du marché. L’homme occidental n’est plus « mobilisable » au sens de l’ « Homme-masse », il est un agent-réseau autoconstitué connectable à l’infini, volontairement soumis à une discipline de dé-virilisation, du féminisable et de l’infantilisation à outrance. En un mot, c’est un objecteur de dé-conscience né, récalcitrant à toute forme d’engagement, de conscientisation, à la fois un nomade-déserteur. Lorsque Salvador Dali parlait de la télévision comme « instrument de crétinisation universelle », il annonçait déjà l’ouverture vers une humanité « homononcule » en voie de trollisation.
Jure Georges Vujic (Polémia, 7 juillet 2017)
Notes
– Jean Baudrillard, Le Système des objets, Gallimard, 1968 [1978].
– Gilbert Simondon, Du mode d’existence des objets techniques, Aubier, Paris 1958 ; dernière réédition corrigée et augmentée, Flammarion, Paris 2012.
– Thomas Kuhn, La Structure des révolutions scientifiques, Coll. « Champs/791 », Flammarion, Paris 2008.
– Bruno Latour, Enquête sur les modes d’existence : Une anthropologie des modernes, La Découverte, Paris 2012. -
SORTIE AUJOURD'HUI DU N°46 (ÉTÉ 2017) DE LA REVUE SYNTHÈSE NATIONALE
Au sommaire :
ÉDITORIAL Roland Hélie
LE MOMENT MACRON Patrick Parment
MERCI MACRON Pierre Vial
LES CAPRICES DE MACRON Jean-Claude Rolinat
LA CHRONIQUE Philippe Randa
DU CHANGEMENT AU FN ? Marc Rousset
QUI PAYERA LA CASSE ? Pieter Kerstens
DE L’INCOMPÉTENCE DE LA FONCTION PUBLIQUE Bernard Plouvier
ASSEZ DE REPENTANCE Nicolas Gauthier
IL Y A 60 ANS : L’INDÉPENDANCE AFRICAINE Pieter Kerstens
LE CLIMAT, LES MOUCHES ET LES ABEILLES Aristide Leucate
LE BASTION SOCIAL Arnaud Menu
LES PAGES DU MARQUIS Jean-Paul Chayrigues de Olmetta
HOMMAGE À ROLAND GAUCHER Jean-François Touzé
PIERRE LAVAL LE MAUDIT Bernard Plouvier
LES LIVRES AU CRIBLE Georges Feltin-Tracol
LES BIOGRAPHIES LITTÉRAIRES Daniel Cologne
LES ENFANTS DE MAASTRICHT Un entretien avec Charles-Henri d’Elloy
LES VALEURS DE LA RÉPUBLIQUE La chronique de Charles-Henri d’Elloy
LES BOUQUINS DE SYNTHÈSE NATIONALE
LA VIE DE L’ASSOCIATION SYNTHÈSE NATIONALE
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