Du père Danziec dans Valeurs Actuelles :
La crise conjuguée de l’Eglise et de l’école est passée par là et, depuis, l’habitude s’est perdue : finie l’époque où les hommes publics, et les politiques en particulier, faisaient leurs classes chez les « bons pères ». Finies ces humanités qui savaient infuser dans l’intelligence des élèves, tout un écosystème judéo-chrétien où l’engagement était honoré, le mensonge défendu et la parole d’homme considérée. Que ce soit chez les jésuites ou avec les frères des écoles chrétiennes, toutes les petites têtes blondes de la génération Mitterrand (s’il est encore permis d’utiliser l’expression « têtes blondes ») ont eu l’occasion de recevoir un enseignement moral sérieusement mâtiné de christianisme. Du reste, des hussard noirs de la République aux curés ensoutanés, de la laïque aux écoles religieuses, les petits écoliers français avaient pour point commun de recopier dans leur cahier en dessous de la date, dès la première heure du matin, la leçon de morale du jour résumée par le maître en une courte sentence inscrite au tableau. « On s’assure des jours heureux en honorant ses parents », « Savoir remercier est vraie noblesse », « Le menteur n’est jamais écouté, même quand il dit la vérité ». De l’Evangile au décalogue, des fables de La Fontaine aux fabliaux du Moyen-Âge, il s’agissait de méditer ou d’intégrer une leçon de vie. Ainsi par exemple, on pouvait narrer aux élèves l’aventure tragique d’un pauvre ivrogne qui avait promis-juré de ne jamais boire une seule goutte d’eau. Hélas, l’histoire raconte que le brave homme, à l’issue d’une soirée particulièrement arrosée, revint chez lui dans un état si critique que le malheureux chuta dans une fontaine sur la place du village… au point de s’y noyer. Dans ce petit fabliau, la morale à enregistrer, d’une simplicité enfantine, est bien connue : « Il ne faut jamais dire : ‘Fontaine, je ne boirai pas de ton eau’ ».