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  • Attentat musulman en Isère : un homme égorgé et décapité [Add]

    Une personne est morte et plusieurs ont été blessées dans un attentat commis ce matin vers 10 heures contre une usine de gaz industriels à Saint-Quentin-Fallavier, dans le nord de l'Isère.

    Le corps décapité d'une personne a été retrouvé à proximité de l'usine. La tête de la victime a été retrouvée accrochée au grillage de l'enceinte de la société le long de la RD311.

    Un drapeau avec des inscriptions en arabe retrouvé sur place.

    Le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, se rend immédiatement sur place.

    Un suspect d'une trentaine d'années connu des services la DGSI a été interpellé.

    Addendum 13h36 :

    • une seconde personne a été interpellée. Il s'agit du conducteur aperçu ce matin en train de faire les allers retours devant la société à bord d'une Ford Fusion peu avant l'attentat.
    • Yacine Sali faisait "l'objet d'une fiche S éditée en 2006 non renouvelée" auprès des services secrets" mais "n'était pas fiché comme ayant voyagé en Syrie ou en Iraq". Il "résiderait  à Saint-Priest et n'a pas de casier judiciaire" selon le ministre de l'Intérieur et est "en relation avec la mouvance salafiste".

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    Michel Janva

    http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html

  • Le socialisme populaire de Georges Orwell et de Simone Weil...

    Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Kévin Victoire cueilli sur le site du Comptoir et consacré au socialisme populaire de Georges Orwell et de Simone Weil...

    Avec Simone Weil et George Orwell, pour un socialisme vraiment populaire

    L’écrivain britannique George Orwell et la philosophe française Simone Weil connaissent tous deux depuis quelques années un regain d’intérêt. Alors que la gauche, notamment la gauche radicale — c’est-à-dire celle qui se donne pour objectif de trouver une alternative au capitalisme —, est en crise idéologique et perd peu à peu les classes populaires, on pense qu’elle aurait tout intérêt à se pencher sur ces deux penseurs révolutionnaires.

    Comme le note la philosophe Alice Holt dans un article publié en France dans la revue Esprit[i], « les convergences qui rapprochent Orwell et Weil sont frappantes, pas seulement en ce qui concerne leurs biographies hors du commun, mais aussi en ce qui concerne leurs conceptions politiques dissidentes, fondées sur une expérience directe et caractérisées par la reprise et le remodelage de thèmes traditionnellement de droite, ou encore en ce qui concerne leur critique originale des régimes totalitaires ». Les similitudes en effet sont nombreuses entre les deux contemporains, qui ne se sont jamais croisés et probablement jamais lus, mais qui sont aujourd’hui enterrés à quelques kilomètres l’un de l’autre, dans le sud de l’Angleterre.

    Sur le plan biographique d’abord, tous deux ont fréquenté des écoles très prestigieuses — Henri IV, puis l’École normale supérieure pour Weil, le Collège d’Eton pour Orwell — et en ont gardé de mauvais souvenirs ; sont issus de la classe moyenne éduquée — Orwell parle de « basse classe moyenne supérieure »— ; ont eu à cœur de partager les conditions de vie des prolétaires ; ont participé à la guerre d’Espagne — chez les anarcho-syndicalistes de la CNT pour la Française, chez les marxistes non-staliniens du POUM pour l’Anglais[ii] — ; ont contracté la tuberculose — bien que la privation intentionnelle de nourriture semble être la véritable cause de la mort de la philosophe. Mais la proximité est encore plus forte sur le terrain idéologique entre Orwell, socialiste difficilement classable — et parfois qualifié d’« anarchiste conservateur » qui n’hésite jamais à citer des écrivains libéraux ou conservateurs sans pour autant partager leurs conceptions politiques[iii] —, et Simone Weil, anarchiste chrétienne et mystique, capable d’exprimer sa « vive admiration » à l’écrivain monarchiste Georges Bernanos. Pour les libertaires des éditions de l’Échappée, les deux révolutionnaires préfigurent « à la fois la dénonciation de l’idéologie du progrès, l’attachement romantique à l’épaisseur historique, la critique totalisante du capitalisme sous tous ses aspects, la méfiance envers la technoscience »[iv]. Sans oublier que ces deux sont en premier lieu les défenseurs d’un socialisme original, qui accorde une importance particulière aux classes populaires et à leurs traditions.

    Aimer, connaître, devenir l’oppressé

    Selon le philosophe Bruce Bégout, « chaque ligne écrite par Orwell peut donc être lue comme une apologie des gens ordinaires ».[v] L’attachement politique d’Orwell aux « gens ordinaires » fait écho à leur définition en tant qu’ensemble majoritaire de personnes menant leur vie sans se préoccuper de leur position sociale ou du pouvoir — contrairement aux « gens totalitaires ». Le socialisme est la version ultime de l’abolition de « toute forme de domination de l’homme par l’homme ». Il doit donc être radicalement démocratique et se présenter comme « une ligue des opprimés contre les oppresseurs » qui rassemble « tous ceux qui courbent l’échine devant un patron ou frissonnent à l’idée du prochain loyer à payer » (Le Quai de Wigan, The Road to Wigan Pier). Une coalition des classes populaires qui irait des prolétaires aux classes moyennes — des petits boutiquiers aux fonctionnaires — en passant par les paysans. Pour aboutir, le socialisme doit s’appuyer sur des mots d’ordre simples et rassembleurs, conformes au bon sens des gens ordinaires — comme la nationalisation des terres, des mines, des chemins de fer, des banques et des grandes industries, de la limitation des revenus sur une échelle de un à dix, ou encore de la démocratisation de l’éducation.

    Parallèlement, Simone Weil considère, dans Réflexions sur les causes de la liberté et de l’oppression sociale — seul ouvrage publié de son vivant, en 1934 — que l’objectif du socialisme doit être la réalisation de la « démocratie ouvrière » et « l’abolition de l’oppression sociale ». Celle qui était surnommée « la Vierge rouge » — comme Louise Michel avant elle — étend son analyse de l’aliénation des travailleurs par la société industrielle à la classe paysanne. Ces travailleurs ont aussi été réduits à la « même condition misérable » que celle des prolétaires : ils sont tout autant soumis à l’échange marchand, en tant qu’ »ils ne peuvent atteindre la plupart des choses qu’ils consomment que par l’intermédiaire de la société et contre de l’argent ». Ne pas saisir dans sa propre chair le poids de cette aliénation est, pour la philosophe, la raison de l’échec des marxistes et de leur « socialisme scientifique », qui a mené à l’appropriation du mouvement ouvrier par une caste d’intellectuels.

    Pour Simone Weil, les disciples de Karl Marx — qui « rend admirablement compte des mécanismes de l’oppression capitaliste » —, et notamment les léninistes, n’ont pas compris l’oppression que supportent les ouvriers en usine car « tant qu’on ne s’est pas mis du côté des opprimés pour sentir avec eux, on ne peut pas se rendre compte ». Et la philosophe de regretter : « Quand je pense que les grands chefs bolcheviks prétendaient créer une classe ouvrière libre et qu’aucun d’eux — Trotski sûrement pas, Lénine je ne crois pas non plus — n’avait sans doute mis le pied dans une usine et par suite n’avait la plus faible idée des conditions réelles qui déterminent la servitude ou la liberté des ouvriers, la politique m’apparaît comme une sinistre rigolade. »

    C’est pourquoi elle choisit d’abandonner provisoirement sa carrière d’enseignante en 1934 et 1935, pour devenir ouvrière chez Alsthom (actuel Alstom), avant de travailler à la chaîne aux établissements JJ Carnaud et Forges de Basse-Indre, puis chez Renault à Boulogne-Billancourt. Elle note ses impressions dans son Journal d’usine — publié aujourd’hui sous le titre La condition ouvrière — et conclut de ses expériences, à rebours de l’orthodoxie socialiste, que « la complète subordination de l’ouvrier à l’entreprise et à ceux qui la dirigent repose sur la structure de l’usine et non sur le régime de la propriété » (Réflexions sur les causes de la liberté et de l’oppression sociale).

    Similairement, George Orwell déplore, dans Le Quai de Wigan, que « le petit-bourgeois inscrit au Parti travailliste indépendant et le barbu buveur de jus de fruits [soient] tous deux pour une société sans classe, tant qu’il leur est loisible d’observer le prolétariat par le petit bout de la lorgnette ». Il poursuit : « Offrez-leur l’occasion d’un contact réel avec le prolétariat […] et vous les verrez se retrancher dans le snobisme de classe moyenne le plus conventionnel. » Comme Weil, le Britannique se rapproche des opprimés, notamment en partageant plusieurs fois les conditions de vie des vagabonds. Dans Dans la dèche à Paris et à Londres (Down and Out in London and Paris), roman publié en 1933 qui s’inspire de ces expériences, il explique qu’il voulait « [s]’ immerger, descendre complètement parmi les opprimés, être l’un des leurs, dans leur camp contre les tyrans. » Par la suite, il se plonge dans l’univers des mineurs des régions industrielles, ce qui lui inspirera la première partie du Quai de Wigan et surtout le convertira définitivement au socialisme.

    Ces expériences ont très fortement influencé les deux auteurs. Alice Holt note d’ailleurs à ce propos que « c’est parce qu’Orwell et Weil ont tous deux fait l’expérience de la souffrance psychologique et physique qu’occasionne la pauvreté, qu’ils mirent autant l’accent sur le potentiel destructeur de l’humiliation, et la nécessité de préserver la dignité des plus pauvres ».

    Weil et Orwell : des socialistes conservateurs ?

    Le contact de Weil et d’Orwell avec le monde ouvrier leur a permis de comprendre la souffrance des travailleurs et l’impératif subséquent à préserver « ce qu’il leur reste ». C’est ainsi qu’ils ont tous les deux évolué politiquement vers une forme de conservatisme (ou à du moins à ce qui lui est apparenté aujourd’hui), par respect pour la culture populaire et pour la défense de la dignité des opprimés. Tout en étant profondément révolutionnaires, ils considèrent que la défense des traditions et de la mémoire populaire est un devoir formel. Ainsi, Simone Weil explique, notamment dansL’Enracinement, que : « l’amour du passé n’a rien à voir avec une orientation politique réactionnaire. Comme toutes les activités humaines, la révolution puise toute sa sève dans une tradition. » La common decency (traduit par « décence commune » ou « décence ordinaire ») d’Orwell et l’enracinement de Weil forment le pivot de leur philosophie.

    Bruce Bégout, qui a consacré un ouvrage au sujet (De la décence ordinaire), définit la common decency comme « la faculté instinctive de percevoir le bien et le mal ». « Plus qu’une simple perception, car elle est réellement affectée par le bien et le mal », elle correspond « à un sentiment spontané de bonté qui est, à la fois, la capacité affective de ressentir dans sa chair le juste et l’injuste et une inclination naturelle à faire le bien ». D’après Orwell, ces vertus, qu’il certifie avoir rencontrées au contact des « gens ordinaires », proviennent de la pratique quotidienne de l’entraide, de la confiance mutuelle et des liens sociaux minimaux mais fondamentaux. À l’inverse, elles seraient moins présentes chez les élites, notamment chez les intellectuels, à cause de la pratique du pouvoir et de la domination.

    Pour Simone Weil, l’enracinement — titre de son ouvrage testament, sorte de réponse aux Déracinésdu nationaliste d’extrême droite Maurice Barrès – est « le besoin le plus important et le plus méconnu de l’âme humaine ». Il est le processus grâce auquel les hommes s’intègrent à une communauté par le biais « [du] lieu, la naissance, la profession, l’entourage ». Pour la Française, « un être humain a une racine par sa participation réelle, active et naturelle à l’existence d’une collectivité qui conserve vivants certains trésors du passé et certains pressentiments d’avenir. Participation naturelle, c’est-à-dire amenée automatiquement par le lieu, la naissance, la profession, l’entourage. Chaque être humain a besoin de recevoir la presque totalité de sa vie morale, intellectuelle, spirituelle par l’intermédiaire des milieux dont il fait naturellement partie. » Cet enracinement est la base d’obligations mutuelles entre les hommes – L’Enracinement a d’ailleurs pour sous-titre « prélude d’une déclaration des devoirs envers l’être humain ».

    Ainsi, Weil estime que « le déracinement est de loin la plus dangereuse maladie des sociétés humaines, car il se multiplie lui-même ». Ce mécanisme passe notamment par la destruction du passé, déplorant que « la destruction du passé [soit] peut-être le plus grand crime. Aujourd’hui, la conservation du peu qui reste devrait devenir presque une idée fixe ». C’est parce que le capitalisme déracine les classes populaires, comme le colonialisme déracine les indigènes, qu’il faut lutter contre ce système. Si le mot « enracinement » est absent de l’œuvre de George Orwell, il est probable qu’il y aurait largement adhéré. Le philosophe Jean-Claude Michéa relève ainsi que chez l’Anglais, « le désir d’être libre ne procède pas de l’insatisfaction ou du ressentiment, mais d’abord de la capacité d’affirmer et d’aimer, c’est-à-dire de s’attacher à des êtres, à des lieux, à des objets, à des manières devivre. »[vi]

    L’enracinement, la common decency et l’attachement aux lieux, traditions et à la communauté qui en émane, conduisent Weil et Orwell vers un patriotisme socialiste, qui s’exprimera dans le cadre de la Seconde Guerre mondiale. La philosophe explique alors dans L’Enracinement qu’« il serait désastreux de [s]e déclarer contraire au patriotisme. Dans la détresse, le désarroi, la solitude, le déracinement où se trouvent les Français, toutes les fidélités, tous les attachements sont à conserver comme des trésors trop rares et infiniment précieux, à arroser comme des plantes malades. » Quant au Britannique, il lie patriotisme et socialisme dans Le Lion et la licorne : socialisme et génie anglaispublié en 1940 – que l’un de ses principaux biographes, Simon Leys, considère comme « son manifeste politique le plus complet et le plus explicite »[vii] – afin de théoriser un « patriotisme révolutionnaire« [viii]. Orwell explique : « La théorie selon laquelle « les prolétaires n’ont pas de patrie » […] finit toujours par être absurde dans la pratique. » Dans l’article De droite ou de gauche, c’est mon pays, il ajoute : « Aucun révolutionnaire authentique n’a jamais été internationaliste. »

    Pourtant, Orwell et Weil resteront tous deux fidèles à la tradition socialiste et à la solidarité internationale sans jamais tomber dans un nationalisme maurrassien. Orwell, que son service pour l’Empire britannique en Birmanie a converti à l’anti-colonialisme, considère dans ses Notes sur le nationalisme que le patriotisme est un « attachement à un mode de vie particulier que l’on n’a […] pas envie d’imposer à d’autres peuples », tandis que le nationalisme est « indissociable de la soif de pouvoir ». De son côté, Simone Weil écrit à Bernanos à propos du Traité de Versailles : « Les humiliations infligées par mon pays me sont plus douloureuses que celles qu’il peut subir. » Mais c’est surtout leur engagement en Espagne, motivé par l’envie de combattre le fascisme et de défendre le socialisme, qui prouve que la solidarité internationale n’est pas un simple concept pour eux, mais bien une réalité. À l’image de leur patriotisme, leur conservatisme populaire ne s’oppose jamais à leur socialisme, il en est au contraire un fondement.

    Un socialisme populaire et antibureaucratique

    Pour Orwell et Weil, le socialisme ne doit pas être l’émancipation forcée des prolétaires, mais leur affirmation, à travers leur enracinement.En ce sens, ils peuvent être tous deux rattachés à la famille du socialisme libertaire, qui s’oppose au socialisme autoritaire depuis l’exclusion de Bakounine et ses partisans de la Ire Internationale, en 1872. À rebours des révolutionnaires, notamment marxistes-léninistes, qui veulent créer un « homme nouveau », les deux auteurs prônent un socialisme qui prend racine dans les valeurs défendues par les classes populaires. Ainsi, Simone Weil exprime dansL’Enracinement son souhait d’une révolution qui « consiste à transformer la société de manière que les ouvriers puissent y avoir des racines » , et s’oppose à ceux qui entendent avec le même mot « étendre à toute la société la maladie du déracinement qui a été infligée aux ouvriers ».

    À l’identique, le romancier anglais estime que « l’ouvrier ordinaire […] est plus purement socialiste qu’un marxiste orthodoxe, parce qu’il sait ce dont l’autre ne parvient pas à se souvenir, à savoir que socialisme est justice et simple bonté » (Le Quai de Wigan). Il déplore : « Les petites gens ont eu à subir depuis si longtemps les injustices qu’elles éprouvent une aversion quasi instinctive pour toute domination de l’homme sur l’homme. » À ce titre, le socialisme doit reposer sur la common decency, qui constitue chez lui d’après Bruce Bégout « une base anthropologique sur laquelle s’édifie la vie sociale ». Pour ce dernier, la « décence ordinaire est politiquement anarchiste : elle inclut en elle la critique de tout pouvoir constitué ». La confiance d’Orwell dans les gens ordinaires s’accompagne d’une défiance à l’égard des intellectuels qui souhaiteraient prendre la direction du mouvement socialiste. Car selon lui, « les intellectuels sont portés au totalitarisme bien plus que les gens ordinaires ». Une critique du pouvoir constitué également très présente chez Simone Weil. Fidèle à la tradition anarchiste, l’ex-combattante de la CNT invite dans La pesanteur et la grâce à « considérer toujours les hommes au pouvoir comme des choses dangereuses ».

    Cette méfiance à l’égard du pouvoir les conduit à critiquer la bureaucratie et la centralisation, incarnées par l’URSS. Pour George Orwell, « rien n’a plus contribué à corrompre l’idéal originel du socialisme que cette croyance que la Russie serait un pays socialiste ». L’écrivain arrive même à la conclusion que « la destruction du mythe soviétique est essentielle […] pour relancer le mouvement socialiste ». Outre la dissolution des liens communautaires induit par le totalitarisme, qui a pour caractéristique le contrôle de l’histoire – et donc du passé –, George Orwell déplore « les perversions auxquelles sont sujettes les économies centralisées » et la prise de pouvoir d’une « nouvelle aristocratie ». Dans son célèbre roman 1984, il décrit celle-ci comme « composée pour la plus grande part de bureaucrates, de scientifiques, de techniciens, [et] d’experts », issus pour la plupart « de la classe moyenne salariée et des rangs plus élevés de la classe ouvrière ». Pour Simone Weil, qui considère qu’un État centralisé a nécessairement pour but de concentrer toujours plus de pouvoir entre ses mains, l’URSS possède « une structure sociale définie par la dictature d’une caste bureaucratique ». Sur la critique de la centralisation, elle va même plus loin et se distingue radicalement du marxisme, auquel elle a appartenu dans sa jeunesse. Alors que pour Lénine et les bolcheviks, le parti communiste est le véritable créateur de la lutte des classes et l’instrument qui doit permettre au prolétariat de conquérir le pouvoir afin de libérer la société, Simone Weil propose de détruire toutes organisations partisanes (Notes sur la suppression générale des partis politiques). La Française voit dans le parti « une organisation construite de manière à exercer une pression collective sur la pensée de chacun des êtres humains qui en sont membres », qui a pour fin « sa propre croissance et cela sans aucune limite » et estime donc que « tout parti est totalitaire en germe et en aspiration ».

    Les pensées de ces deux auteurs difficilement classables convergent ainsi sur des points essentiels – dont certains n’ont pu être approfondis ici, comme leur critique du Progrès ou de la technique –, parfois ignorés par les socialistes, et terriblement actuels. Selon Albert Camus, à qui nous devons la publication posthume de L’Enracinement, « il paraît impossible d’imaginer pour l’Europe une renaissance qui ne tienne pas compte des exigences que Simone Weil a définies ». Alors que la gauche n’a jamais semblé aussi éloignée du peuple qu’aujourd’hui, nous pourrions, pour commencer, dire qu’il paraît impossible d’imaginer une renaissance du mouvement socialiste qui se passerait des écrits de Simone Weil et de George Orwell. À travers leur œuvre, ces deux contemporains se sont efforcés de nous rappeler l’importance pour un révolutionnaire d’être en accord avec les aspirations des classes populaires, tout en nous mettant en garde contre certaines dérives, telles que l’autoritarisme.

    Kévin Victoire (Le Comptoir, 22 juin 2015)

    Notes :

    [i] Holt Alice et Zoulim Clarisse, « À la recherche du socialisme démocratique » La pensée politique de George Orwell et de Simone Weil, Esprit, 2012/8 Août. En ligne ici (payant)

    [ii] Il est intéressant de noter que George Orwell écrit dans Hommage à la Catalogne (Homage to Catalonia, 1938) : « Si je n’avais tenu compte que de mes préférences personnelles, j’eusse choisi de rejoindre les anarchistes. »

    [iii] Pour George Orwell, « le péché mortel c’est de dire “X est un ennemi politique, donc c’est un mauvais écrivain” ».

    [iv] Cédric Biagini, Guillaume Carnino et Patrick Marcolini, Radicalité : 20 penseurs vraiment critiques, L’Échappée, 2013

    [v] Bruce Bégout, De la décence ordinaire. Court essai sur une idée fondamentale de la pensée fondamentale de George Orwell, Allia, 2008

    [vi] Jean-Claude Michéa, Orwell, anarchiste tory, Castelneau-Le-Lez, Éditions Climats, 1995

    [vii] Simon Leys, Orwell ou l’horreur de la politique, Hermann, 1984 ; Plon, 2006

    [viii] Il oppose cependant ce « patriotisme révolutionnaire » au conservatisme. Il écrit notamment dans Le lion et la licorne : « Le patriotisme n’a rien à voir avec le conservatisme. Bien au contraire, il s’y oppose, puisqu’il est essentiellement une fidélité à une réalité sans cesse changeante et que l’on sent pourtant mystiquement identique à elle-même. »

    http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2015/06/25/le-socialisme-populaire-de-georges-orwell-et-de-simone-weil.html

  • Non messieurs Hollande et Sarkozy, les américains ne sont pas nos amis…

    Aux Etats-Unis, nous explique avec malice M6 info, il n’y a pas que Mickey qui a des grandes oreilles, la NSA (National Security Agency) aussi.

    En effet, selon des documents de WikiLeaks rendus publics mardi 23 juin par Libération et Médiapart, l’agence de renseignements américaine aurait écouté pendant des années les téléphones des présidents Chirac, Sarkozy et Hollande, ainsi que leurs entourages respectifs. Les documents de WiliLeaks ne dévoilent pas de notes d’écoutes relevant du secret d’Etat. Le procédé fait néanmoins « désordre » de la part d’un pays censé être un allié.

    Un conseil de défense

    En réaction à cette affaire, un conseil de défense se réunit ce mercredi matin en urgence à l’Elysée, « pour évaluer sur tous les plans la totalité des informations » publiées dans la presse sur l’espionnage des présidents français par les services américains. Il réunit autour du président de la République, le Premier ministre, Manuel Valls, le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, celui de la Défense, Jean-Yves Le Drian, et le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve.

    On va voir ce qu’on va voir. Cela va se terminer par un communiqué viril sans doutes, mais de là à changer nos orientations géopolitiques suicidaires, vous n’y pensez pas…

    Des réactions en chaîne

    Depuis ce matin, les réactions se multiplient dans la classe politique française. Pour Stéphane Le Foll, porte-parole du gouvernement, les écoutes américaines de présidents français sont « inacceptables entre alliés ». Claude Guéant, ancien secrétaire général de l’Elysée sous Nicolas Sarkozy, qui aurait lui aussi été écouté, a jugé cette affaire particulièrement « choquante et regrettable ». « Compte tenu des relations extrêmement proches que nous avons avec les Etats-Unis, compte tenu que nous sommes des alliés extrêmement fidèles, et bien je trouve qu’il y a là une rupture du pacte de confiance », a-t-il dit sur RTL [....]

    Olivier Dejouy

    La suite sur Le Réveil Français

    Pendant ce temps là, L’Assemblée vote définitivement la loi sur le renseignement !!!

  • L’Europe vassale des US : panorama et perspectives

    En suivant servilement la politique de Washington face à la Russie, les dirigeants européens sont surtout en train de planter des aiguilles dans des poupées vaudous à leur propre effigie. Je veux dire que leurs actes sont aussi inutiles que ridicules.

    Si les États Unis choisissaient eux-mêmes les dirigeants européens, on peut douter qu’ils les choisiraient aussi obséquieux que ceux qui dominent actuellement l’Europe. On n’y voit personne de la trempe d’un Charles De Gaulle ou d’un Willy Brandt. En fait on n’y voit même pas un Jacques Chirac. La situation est telle qu’on en viendrait à désirer une Thatcher de second rang. Cela ferait au moins quelques feux d’artifice.
    A la place, nous avons plutôt une Angela Merkel, un David Cameron et un François Hollande en première ligne. A la moindre suggestion de la Maison Blanche, ils sautent en l’air et la seule question qu’ils posent à Washington est «Ai-je sauté assez haut ?». Et maintenant leurs sauts sont si impressionnants que ceux du légendaire sauteur à la perche ukrainien, Sergey Bubka, paraissent minables.
    La dernière fois que les dirigeants européens ont sérieusement fait preuve d’indépendance envers les États-Unis fut en 2002 lorsque Gerhard Schroeder et Chirac firent campagne contre l’invasion illégale de l’Irak par George W Bush. Leur courageuse prise de position fut compromise par celle de Tony Blair qui s’est plié en quatre pour jouer le rôle du caniche de son maitre américain. Les Polonais, que l’on pensait moins serviles, ont aussi participé à cette campagne militaire illégale. A la suite de ce premier refus, d’autres petits États européens comme l’Estonie ou l’Albanie, cherchant désespérément à attirer l’attention de Washington, y ont participé. L’Italie et l’Espagne aussi y ont brièvement participé avant de retirer leurs troupes.
    Depuis cette dernière prise de position par Schröder et Chirac, l’indépendance européenne s’est dissoute. L’Allemagne est entre les mains du CDU/CSU pro-américain et la France gaulliste a ouvert le chemin à l’insipide socialiste François Hollande. Hollande a montré quelques signes qu’il voulait remettre en question le diktat américain, mais semble incapable d’incarner cette arrogance typiquement française.
    Les agneaux ont remplacé les loups.
    L’ancien premier ministre français, François Fillon, a fait part, la semaine dernière, de son désespoir face à cette mansuétude française. L’ancien bras droit de Nicolas Sarkozy a déclaré que les États-Unis entraînaient l’Europe dans une croisade contre la Russie, ce qui va à l’encontre des intérêts propres de l’Europe. Même si Fillon déclare une évidence, le fait qu’une personne dans sa position le dise publiquement montre le niveau de désespoir en Europe. D’autres politiciens et diplomates expérimentés, mais plus âgés, comme Henri Kissinger ou Helmut Schmidt ont déjà critiqué l’attitude occidentale actuelle envers la Russie, mais le fait que Fillon soit un contemporain rend sa déclaration plus significative.
    Schmidt est resté actif dans la vie publique allemande, il est directeur de publication de Die Zeit, et est souvent invité à la télé, cigarette à la main, alors qu’il a 96 ans. Il a fait remarquer, l’année dernière, que la réunification de la Crimée à la Russie était totalement compréhensible et que les sanctions imposées sous la contrainte américaine étaient un non-sens. Il a ajouté qu’elles étaient surtout symboliques et qu’elles affecteraient autant l’Europe que la Russie.
    En dépit du fait que Schmidt a sûrement plus oublié en diplomatie que Merkel, Hollande ou Cameron n’en sauront jamais, ils ont choisi d’ignorer ses conseils. Par contre, les yeux de Fillon sont grands ouverts. «Aujourd’hui l’Europe n’est pas indépendante… Les États-Unis nous entraînent dans une croisade contre la Russie qui contredit les intérêts européens», a-t-il déclaré sur BFMTV.
    Un monde dangereux.
    Fillon n’a pas restreint ses critiques envers l’attitude contre la Russie. Le gaulliste s’est aussi penché plus avant sur les activités américaines. Il a fait remarquer que Washington appliquait une stratégie extrêmement dangereuse au Moyen Orient, à laquelle l’Union Européenne et ses États membres étaient obligés d’acquiescer. L’ancien premier ministre a, de plus, accusé les services de renseignements allemands d’espionner la France, «non pas dans l’intérêt de l’Allemagne mais dans celui des États-Unis».
    Pendant que Fillon parlait à Paris, Sergey Ivanov, le chef de l’administration présidentielle russe, avertissait que le jeu des sanctions entre la Russie et l’Europe, mutuellement dommageable, était parti pour continuer. «Pour ce que nous en savons, le récent sommet du G7 a prolongé les sanctions contre la Russie. Il est donc logique que la Russie prolonge ses contre sanctions», a-t-il déclaré. Bien sur, la Russie a été exclue du G8 l’année dernière, ce qui a ôté à la Russie et à l’Occident une plate-forme valable pour discuter de leurs différences.
    Ce qu’il ressort de tout cela est une chute sans fin. L’Europe et la Russie se déchirent tout en mettant en danger des dizaines d’années de relations diplomatiques patiemment construites, pendant que les marionnettistes de Washington ne souffrent pas du tout. La tension actuelle, inutile, ne fait que détruire des emplois et des entreprises en Europe et en Russie, et aucune des deux parties n’en tire le moindre bénéfice.
    Peut-on différencier les danseurs de la danse ?
    Pendant ce temps, les États Unis sont les grands gagnants. En lançant une grande campagne médiatique faite pour exagérer une menace russe inexistante, ils ont apeuré les États d’Europe de l’Est à un tel point que ceux-ci sont prêts à ouvrir leurs territoires aux militaires américains sans poser de questions. Paradoxalement, les nations des bords de l’Europe voient leur économie naissante touchée de plein fouet par les sanctions, sans vouloir rien faire contre.
    La grande question du jour est de savoir s’il est possible que l’Europe puisse un jour retrouver son indépendance dans sa politique contre Moscou. Mais les prévisions sont sombres. Cameron, même s’il est distrait par l’Écosse et l’adhésion de son pays à l’Union Européenne, vient d’être réélu pour cinq ans, ce qui lui donne l’espace suffisant pour continuer à représenter les intérêts américains en Europe. Merkel est à mi-chemin de son mandat de quatre ans et, à moins que le CDU la remplace (improbable) ou qu’elle démissionne (pas impossible), la chancelière sera sûrement réélue pour un quatrième mandat dans deux ans.
    Évidemment, un jour quelqu’un sortira du rang. Probablement la France, où Hollande sera presque certainement viré de son fauteuil en 2017. Cela laisse cependant encore deux bonnes années à Washington pour foutre la merde en Europe. D’ici là, des dommages irréparables risquent d’être faits à l’économie européenne et aux relations du continent avec son géant voisin eurasien. Et les États-Unis, tout en tirant les ficelles, s’en sortiront sans heurts.
    Vers la fin de sa vie, De Gaulle a remarqué : «J’ai essayé de sortir la France de la merde. Mais elle va y retourner en vomissant. Je ne peux empêcher les Français d’être français. » S’il était encore là, il aurait sûrement dit: « Je te l’avais dit ».

    Notes : 

    Traduction Wayan, relu par jj et Diane-le Saker Francophone
    Ex: http://zejournal.mobi 
    Bryan MacDonald est un écrivain et commentateur irlandais qui s’intéresse à la Russie et son pré-carré ainsi qu’à la géo-politique internationale

    http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2015/06/21/l-europe-vassale-des-us-panorama-et-perspectives.html

  • « DE L'INÉGALITÉ PARMI LES SOCIÉTÉS » de Jared DIAMOND

    par Pierre MARCOWICH

    ex: http://www.oswald-spengler-le-retour.net/

    Dans son ouvrage, « DE L’INÉGALITÉ PARMI LES SOCIÉTÉS », Jared DIAMOND se donne pour ambition de nous faire découvrir les facteurs permanents qui auraient, selon lui, déterminé, comme une loi d’airain, l’évolution des sociétés humaines depuis la fin de la dernière glaciation jusqu’à nos jours, ce qui représente une période de 13.000 ans. (1) 

    Je précise tout d’abord qu’en utilisant l’expression de « loi d’airain » qui aurait pesé sur l’évolution des sociétés humaines depuis la Néolithique, je suis fidèle à l’esprit de l’auteur qui a d’ailleurs voulu affirmer sa thèse dans le titre même de son ouvrage. 

    En effet, le titre de l’ouvrage en anglais est nettement plus explicite que celui en français : « GUNS, GERMS, AND STEEL, THE FATES OF HUMANS SOCIETIES », titre qui se traduit en français de la façon suivante :

    Canons, microbes, et acier, les Parques des Sociétés humaines. Selon le WEBSTER’S DICTIONARY, le mot "The Fates", repris du latin, signifie en anglais "Les Parques", divinités romaines qui décident de manière inflexible et impitoyable le destin de chaque homme. (2)

    L'analogie est évidente, puisque l'auteur évoque trois phénomènes bruts désignés par l'auteur comme agents implacables du destin des sociétés depuis 13.000 ans. 

    C’est un titre à la Jean-Jacques ROUSSEAU avec son "Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes" (1755) que le traducteur (ou l’éditeur) a préféré octroyer à l’ouvrage de Jared DIAMOND dont le titre est devenu « De l’inégalité des sociétés », Est-ce dans le but d’atteindre, avec le maximum d’efficacité, un public portée sur les questions philosophiques ?

    Comme il le confie lui-même, dans son ouvrage, Jared DIAMOND, docteur en physiologie, est un spécialiste de l’évolution biologiques des oiseaux qu’il a étudiés en Papouasie-Nouvelle-Guinée, en Australie et en Amérique du sud. Dans le même temps, ses séjours lui permirent de se familiariser avec « maintes sociétés humaines technologiquement primitives » (page 34).  

    La problématique telle que la pose Jared DIAMOND 

    Jared DIAMOND formule la problématique de l’évolution historique des sociétés humaines depuis la fin du dernier âge glaciaire, il y a 13.000 ans, par l’énonciation suivante : 

    « Certaines parties du monde ont créé des sociétés développées fondées sur l’alphabétisation et l’usage d’outil métalliques, d’autres ont formé des sociétés uniquement agricoles et non alphabétisées, et d’autres encore sont restées des sociétés de chasseurs et de cueilleurs avec des outils de pierre. » (page 11) 

    De cette situation, affirme Jared DIAMOND, découle, depuis 13.000 ans, une inégalité entre les sociétés humaines, qui fait que les premières ont conquis ou exterminés les deux autres. 

    Il convient de remarquer qu’il ressort de l’énoncé de Jared DIAMOND, que, selon lui, ce ne sont pas les hommes qui « créent » les « sociétés », mais certaines « parties du monde », c’est à dire des zones géographiques, autrement dit la nature (la terre, l’eau, le climat, les montagnes, la mer). Il découle de l’énoncé de Jared DIAMOND que la nature aurait la « volonté » de prendre la décision de créer les sociétés. On croit lire l’entrée en matière d’une sorte de nouvelle Génèse, matérialiste, où la nature remplacerait le Dieu de l’ancienne Bible.  

    Bien sûr, le lecteur comprend ce que, malgré la faiblesse de son expression, Jared DIAMOND veut dire : selon lui, la matière, comprise uniquement comme phénomène concret, palpable, visible, se trouve être à l’origine de toute formation sociale. 

    De plus, prétendre que d’autres parties du monde ont formé « des sociétés uniquement agricoles » est tout aussi aberrant, car toutes les « sociétés développées » sont passées, elles aussi, par le stade agricole pour s’urbaniser par la suite, outre qu’il paraît hasardeux de qualifier de « société » un clan de la préhistoire (biologiquement homogène) vivant de chasse et de cueillette. 

    Ce manque de rigueur est frappant chez une personne qui se présente comme un scientifique de haut niveau. 

    Quant à la prétendue « alphabétisation » des sociétés développées, ce n’est qu’un phénomène relativement récent dans les sociétés développées. Je préfère y voir une erreur du traducteur qui a confondu alphabétisme (système d’écriture composé de lettres) avec alphabétisation (enseigner la lecture et l’écriture aux analphabètes).

    En réalité, la vraie question que se pose Jared DIAMOND tout au long de son ouvrage, de la première page jusqu’à la dernière page, est celle-ci : 

    « Pourquoi, (..), ce sont les sociétés européennes, plutôt que celle du Croissant fertile, de la Chine qui ont colonisé l’Amérique et l’Australie ? ». (page 614) 

    Lire la suite 

  • Des personnes âgées miséreuses privées de nourriture à cause des migrants

    Selon Charlie Hebdo :

    VNtD2YS

    Michel Janva

  • Plus que jamais, faire front

    En plein concert de fulminations  hypocrites suite aux révélations de wikileaks sur les écoutes de dirigeants français opérées par la NSA–voir notre article publié mercredi- Marion Maréchal-Le Pen et Gilbert Collard  sont au nombre des 106 députés (LR-Verts-UDI-MoDem) qui ont décidé  de saisir le conseil constitutionnel sur la loi sur le renseignement. Celle-ci a été adoptée définitivement avant-hier soir  par le Parlement.  Comme l’a affirmé Laure de La Raudière (LR)  qui s’est chargée de rassembler les signatures « on ne peut pas d’un côté s’indigner de ce que font les Etats-Unis et voter ce qui est un peu l’équivalent du Patriot Act américain dans la loi française »; « un texte attentatoire à nos libertés » a précisé Me Collard. Cette mise en lumière des pratiques de l’Oncle Sam à l’égard de son ami et allié  français a déclenché quelques mâles réactions comme celle de l’avocat (socialiste) du site Mediapart et très proche  de François Hollande, Jean-Pierre Mignard. Invité hier matin de Thomas Sotto  sur Europe 1, Me Mignard a repris à son compte le vœu  formulé voici plus de deux  ans par Bruno Gollnisch dans l’hémicycle du parlement européen, par  Marine et même d’ailleurs par Jean-Luc Mélenchon, d’accorder l’asile politique au fondateur de Wikileaks  Julian Assange (réfugié à l’ambassade d’Equateur à Londres),  et à celui qui a révélé lesdistes écoutes massives,  Edward Snowden (réfugié en Russie).

    « La loi française autorise la République à donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté » a rappelé  Jean-Pierre Mignard pour appuyer son souhait.  Avec une naïveté ( ?)  toute aussi touchante  quand on connaît la réalité de la  soumission de nos « élites » européistes  à l’imperium yankee,  il a même été plus loin :  « Pourquoi est-ce que l’Europe ne demanderait pas l’insertion dans (le traité (le traité transatlantique, TAFTA, NDLR) d’une clause disant notamment que l’espionnage n’est pas autorisé ? C’est à l’Europe de taper du poing sur la table et peut-être à la France de prendre la direction du mouvement. »  Pour cela il faudrait à la tête de notre pays une figure d’une épaisseur, d’un courage et  d’un patriotisme dont ne peuvent se prévaloir, au vu de leur bilan,  un Hollande, un Juppé, un Valls ou un Sarkozy.

    Et puisque l’on parle de liberté et de souveraineté, soulignons que  le procureur de la République, Anne Coquet,  a requis mercredi  5000 euros d’amende contre  Eric Zemmour -et 3000 euros avec sursis contre le directeur de la rédaction de RTL. Il  comparaissait  devant tribunal correctionnel de Paris, jugé pour incitation à la haine raciale. L’essayiste était poursuivi, suite à l’action intentée par les habituelles  officines dites antiracistes  après sa chronique du 6 mai 2014 sur  RTL. Il  y expliquait que « les grandes invasions d’après la chute de Rome sont désormais remplacées par des bandes de Tchétchènes, de Roms, de Kosovars, de Maghrébins, d’Africains qui dévalisent, violentent ou dépouillent ».

    Mme Coquet, rappelant que M. Zemmour avait été condamné il y a quatre ans  pour les mêmes chefs,  a dénoncé les propos «sans nuances» qui seraient ceux du chroniqueur de RTL,  «stigmatisant ces populations immigrées ou issues de l’immigration». L’auteur du suicide français a fait valoir qu’il appuyait ses observations  sur «les documents que lui transmettent les services de police et de gendarmerie», ses «lectures», les témoignages «d’agriculteurs dépouillés par des bandes de roms» ou de «touristes chinois dévalisés à Paris.»  «Je ne dis pas que tous les Roms ou tous les Maghrébins qui habitent en France sont des délinquants. Mais ils se regroupent selon les critères ethniques».  Il a eu beau jeu d’en appeler à  la liberté d’expression, et de fustiger un  «procès profondément politique» dont l’intention première était de le «faire taire».

    D’immigration il était encore question cette nuit  avec la réunion, dans une ambiance tendue,  des  Etats membres de l’Union européenne qui,  relate  une dépêche de l’agence Reuters,  ont «décidé d’organiser la répartition de l’accueil des réfugiés arrivés en Grèce et en Italie sur la base du volontariat, la Commission n’ayant pas réussi à imposer une logique de quotas obligatoires (…)». «Le chef du gouvernement italien (Mattéo Renzi)  a tancé ses collègues sur leur peu d’entrain à soutenir un plan censé répondre à l’urgence de la tragédie des migrants en Méditerranée (…)». C’était un débat très intense, a déclaré Angela Merkel à la presse, qualifiant la crise des migrants de plus grand défi que j’ai connu dans les affaires européennes en tant que chancelière (…). La question d’instaurer des clés de répartition obligatoire pour faire face à l’afflux des demandeurs d’asile, fuyant la guerre en Syrie ou la dictature en Erythrée, a déclenché une forte opposition, notamment de la part de la Slovaquie, la Hongrie, la République tchèque ou encore la Pologne.»

    «Afin d’aider (l’Italie et la Grèce)   à faire face à cette crise, les dirigeants de l’UE ont décidé de leur accorder des moyens financiers pour mettre en œuvre des centres pour distinguer les réfugiés politiques des réfugiés économiques et rapatrier ces derniers vers leur pays d’origine» précise encore Reuters. Une Grèce qui,  au-delà de la question de l’afflux de clandestins à laquelle elle doit faire face, est aujourd’hui l’otage  de la troïka BCE-Commission européennee-FMI. Un  trio  qui  doit «cesser d’entretenir un psychodrame» et «d’imposer l‘eurostérité» affirme Bernard Monot, député européen du FN et membre de la commission ECON (Affaires économiques et monétaires) au parlement européen, dont les propos sont  rapportés sur le site du  Figaro. 

    Le stratégiste économique du FN  souligne que «la sortie de la Grèce de l’euro avec passage à la drachme, est souhaitable et permettra d’éviter l’augmentation de la facture du sauvetage de l’euro monnaie unique. Un sauvetage dont le frontiste évalue le coût pour la France à 70 milliards d’euros. À ceci, il ajoute 455 milliards d’euros de garanties financières de l’État accordées aux différents plans de soutien de la zone euro et aux pays (Grèce, Portugal, Espagne, Italie, Irlande…). L’enveloppe globale atteindrait alors 525 milliards d’euros. Quand on nous dit que garder l’euro ne coûte rien, c’est totalement faux et la catastrophe financière est déjà là. La prochaine étape sera la banqueroute! (…). «Si le problème grec inquiète tant au sein de la zone euro, c’est précisément parce que tout le monde redoute que la Grèce soit le premier domino de cette fin programmée de l’euro. Mais la Grèce survivra à l’euro, pas l’inverse!»,

    Si le FN, comme d’autres partis en Europe, catalogués comme  populistes, de droite comme de gauche,  campe sur une position clivante par son rejet de  la doxa eurobruxelloise,  c’est bien cependant la défense de notre identité nationale, dans toute l’acception du terme , qui fonde sa spécificité première, sa raison d’être,  son ADN.

    D’une lecture toujours stimulante, Jean-Yves Le Gallou a publié cette semaine  sur son site Polemia la conférence prononcée  le 11 juin dernier au   Club de l’Horloge –Le Front National au risque de l’histoire, entre dédiabolisation et neutralisation. Bien sûr,  libre à chacun d’en  contester éventuellement  tel ou tel énoncé, d’en nuancer les analyses.

    Pour autant, comment ne pas souscrire à ce qu’affirme M. Le Gallou lorsqu’il note  que «de toute manière, il faut être conscient qu’au-delà des sujets historiques ou périphériques dont il faut éviter l’évocation, le cœur sur lequel repose la diabolisation est l’immigration. Si des formations politiques comme Syriza ou Podemos ne font pas l’objet du même rejet que d’autres partis en opposition avec le Système dominant, c’est qu’ils sont favorables à l’immigration (…). Le Front National ne sera donc pas réellement dédiabolisé tant qu’il ne renoncera pas à sa critique de l’immigration (…)».

    A charge pour le FN, dans sa marche vers le pouvoir dit-il, de ne pas se couper du « mouvement qui émerge des profondeurs de la société et qui est en complète dissonance avec la pensée dominante».  Une Réaction populaire mais que l’on voit aussi à l’oeuvre chez un nombre croissant d‘intellectuels,   qui  exprime «une volonté de rupture avec l’esprit né de Mai 1968 et un réveil identitaire» et «le rejet du Grand Remplacement» ou, pour utiliser un terme moins polémique (?), d’une  immigration de peuplement  engendrée dans les flancs  du mondialisme...

    http://gollnisch.com/2015/06/26/plus-que-jamais-faire-front/

  • Clandestins : L’UE abandonne les quotas obligatoires

    Au terme de négociations marathon, les Etats membres ont abandonné les quotas obligatoires pour les remplacer par des quotas volontaires.

    Demi-victoire des anti-immigrationnistes : c’est sur la base du volontariat et non de quotas obligatoires que se fera la répartition des clandestins au sein des États membres de l’Union européenne.
    Le sommet de Bruxelles consacré à l’accueil de 40.000 demandeurs d’asile actuellement en Grèce et en Italie et de 20.000 autres clandestins réfugiées hors des frontières de l’UE s’est clos ce matin après sept heures de négociation très tendues. La Hongrie, qui avait qualifié le plan d’absurde, la Bulgarie, l’un des États membres les plus pauvres, sont d’ores et déjà exemptés de ce dispositif. Pour les autres, les clefs de répartition volontaire en fonction de l’économie ou de la population de chaque État seront finalisées d’ici juillet.

    Un dispositif volontaire ne peut pas être une excuse pour ne rien faire a averti le président du Conseil européen Donald Tusk.

    Le camp des immigrationnistes affiche sa déception, à l’instar du président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, qui a regretté un plan à « l’ambition modeste » ou du chef du gouvernement italien Matteo Renzi qui a tancé ses collègues : Ou vous êtes solidaires, ou vous ne nous faites pas perdre notre temps

    Bien sûr, il n’a guère été question de traiter le problème à la source, hormis par le lancement d’une opération navale destinée à combattre les réseaux de passeurs en mer Méditerranée, qui se limitera pour le moment à une mission d’observation. On prédit déjà qu’elle servira d’appel d’air aux candidats à l’immigration clandestine, le surcroît de forces navales au large de la Libye forcée de secourir les naufragés ne pouvant qu’inciter les passeurs à leur jeter dans les bras plus d’embarcations.

    Pour autant, nous ne boudons pas notre satisfaction de voir qu’à l’occasion de cette crise, les sacro-saints principes de Schengen ont pris du plomb dans l’aile. La Slovaquie, la Hongrie, la République tchèque ou encore la Pologne ont été particulièrement virulentes dans leur opposition aux propositions immigrationnistes de la Commission. « C’était un débat très intense », a déclaré Angela Merkel à la presse, qualifiant la crise des migrants de : Plus grand défi que j’ai connu dans les affaires européennes en tant que chancelière

    En effet, jamais l’Europe « portes et fenêtres ouvertes » n’a été aussi contestée. L’Autriche a menacé cette semaine d’imposer des contrôles aux frontières de la Hongrie, qui avait cessé d’accueillir des demandeurs d’asile en provenance d’autres États membres, ce qui constitue une infraction aux règles communautaires, avant de faire machine arrière. Hongrie qui a par ailleurs décidé d’ériger une clôture le long de sa frontière avec la Serbie et qui a enregistré depuis le début de l’année un tiers des demandes d’asile, soit plus que l’Italie a souligné Donald Tusk.

    Même la France, dont le gouvernement affiche son adhésion aux thèses « d’ouverture », tente de réguler l’arrivée de clandestins à sa frontière avec l’Italie : le refoulement de quelques « migrants » côté italien a été source d’échanges musclés avec Rome.
    Afin d’aider cette dernière et Athènes à faire face à la crise, les dirigeants de l’UE ont décidé de leur accorder des moyens financiers pour mettre en œuvre des centres pour distinguer les réfugiés politiques des réfugiés économiques et rapatrier ces derniers vers leur pays d’origine.
    Il ne reste plus qu’à espérer qu’il ne s’agisse pas d’un nième vœu pieux.

    http://fr.novopress.info/189803/clandestins-lue-abandonne-les-quotas-obligatoires/#more-189803

  • Comment une si petite bulle peut-elle avoir un effet aussi dévastateur ?

    Par
    Ce n’était pas une très grosse bulle. Entre 2002 et 2006, la part de l’économie américaine consacrée à la construction résidentielle a augmenté de 1,2 points de pourcentage du PIB au-dessus de sa valeur tendancielle antérieure, avant de plonger au moment où les USA sont entrés dans leur plus grande crise économique depuis prés d’un siècle. Selon mes calculs, on peut chiffrer l’excès d’investissement dans le secteur de l’immobilier résidentiel durant cette époque à environ 500 milliards de dollars – une part minuscule de l’économie mondiale au moment où la crise a éclaté.

    Pourtant les dégâts furent énormes. Du fait de la crise, le niveau des économies des USA et de l’Europe est 6% plus bas que prévu. Autrement dit, un faible surinvestissement a entraîné une perte de production de 1.800 milliards de dollars par an, et rien n’indique que cet écart soit en voie de diminution.

    Tenant compte du taux de croissance qui était prévu et de la rentabilité de la Bourse qui était attendue, j’estime la perte totale de production à presque 3 millions de milliards de dollars! Chaque dollar surinvesti dans l’immobilier a provoqué une perte de 6.000 dollars dans l’économie mondiale. Comment est-ce possible ?

    Toutes les récessions ne sont pas aussi douloureuses. Les crises financières de 1987, 1991, 1997, 1998 et 2001 (au cours de laquelle  quelques 4 000 milliards de surinvestissement ont été perdus au moment où la bulle internet a explosé) n’ont eu qu’une faible incidence sur l’économie réelle au sens large.

    Un récent article d’Oscar Jorda, Moritz Schularick et Alan M. Taylor explique pourquoi cette fois-ci les choses ne se sont pas passées ainsi ; il montre qu’un boom du crédit peut démultiplier considérablement les dégâts causés par l’éclatement d’une bulle.

    Historiquement, hors boom du crédit, quand l’éclatement d’une bulle des actifs entraîne une récession, 5 ans après le début de la crise le niveau de l’économie est de 1 à 1,5% inférieur à ce qu’il aurait été en l’absence de crise. Mais s’il y a boom du crédit, les dégâts sont beaucoup plus considérables.

    Quand il s’agit d’une bulle boursière, après 5 ans les résultats de l’économie sont inférieurs de 4% en moyenne – et jusqu’à 9% quand il s’agit d’une bulle immobilière. Compte tenu de ces éléments, il est clair que les problèmes engendrés par la crise actuelle sont proches de ceux que l’on a observés lors des crises précédentes.

    Beaucoup d’économistes considèrent que les récessions sont part intégrante du cycle des affaires, la conséquence inévitable d’un boom. Mais ce n’était pas l’avis de Keynes. “Il paraît d’une extraordinaire imbécillité que cette merveilleuse explosion d’énergie productive soit le prélude à l’appauvrissement et à la dépression“, écrivait-il en 1931 après le boom des années 1920 qui avait ouvert la voie à la Grande dépression.

    “Je trouve que l’explication de la diminution du chiffre d’affaires des entreprises, de la réduction de la production et du chômage qui suivent obligatoirement ne réside pas dans le haut niveau d’investissement qui continua jusqu’au printemps 1929, mais dans l’arrêt de l’investissement dans la période suivante“.

    Quelques années plus tard, Keynes a proposé une solution. Dans sa Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie, il explique que les booms se produisent quand des investissements qui vont rapporter 2% suscitent l’attente d’un rendement de 6% par exemple et sont évalués selon. Dans une récession, c’est l’inverse, “on évalue à moins que rien” le rendement d’investissements qui pourraient rapporter 6%.

    Il en résulte une prophétie autoréalisatrice dans laquelle un chômage massif réduit à moins que rien le rendement de ces investissements.  “Nous atteignons un point dans lequel le logement est insuffisant“, écrit Keynes, “mais où néanmoins personne n’a les moyens de vivre dans les maisons existantes”.

    Sa solution est simple: “Il ne faut pas corriger le problème du cycle des affaires en supprimant les booms et en restant de ce fait dans un semi-ralentissement permanent, mais en abolissant les ralentissements de manière à rester dans un état d’essor permanent“.

    Pour lui, le problème sous-jacent tient à un dysfonctionnement des canaux de crédit au sein de l’économie. La réaction financière à l’éclatement d’une bulle et la vague de faillites qui en résulte conduit les taux d’intérêt en dessous de zéro, alors qu’il existe encore bien des manières de mettre les gens au travail de manière productive.

    Aujourd’hui on reconnaît que le dysfonctionnement du crédit peut provoquer un ralentissement économique. Face à cette situation il existe trois solutions classiques. La première est une politique budgétaire expansionniste, l’État compensant la faiblesse de l’investissement privé.

    La seconde est de choisir une cible d’inflation plus élevée, ce qui permet aux banques centrales de réagir plus facilement aux crises financières. Et la troisième consiste à adopter des mesures drastiques pour réduire l’endettement et le crédit, notamment dans l’immobilier, pour éviter la formation d’une bulle des prix alimentés par le crédit.

    A ces trois solutions, Keynes aurait sans doute ajouté une quatrième, ce que l’on appelle aujourd’hui le “Greenspan put” – c’est à dire le recours à des mesures monétaires pour valider le prix maximum des actifs atteint lors du boom.

    Malheureusement, dans un monde dans lequel les responsables politiques semblent hypnotisés par l’austérité, et avec une inflation cible de 2% qui semble gravée dans le marbre, les choix sont très limités. C’est pourquoi l’explosion d’une petite bulle peut avoir un effet dévastateur.

    Project Syndicate

    http://fortune.fdesouche.com/385747-comment-une-si-petite-bulle-peut-elle-avoir-un-effet-aussi-devastateur

  • Francfort, le 18 mars 2015

    À la longue, on a fini par comprendre que l’objection contre les contre-sommets fait elle-même partie du rituel des contre-sommets : « Bah, pourquoi aller précisément là où la police vous attend ? Pourquoi ne pas lancer le même jour des actions décentralisées contre les banques plutôt que vous concentrer tous à Francfort ? Pourquoi ne pas agir directement là où nous vivons ? » Eh bien, peut-être que s’il y a là tant de policiers, c’est qu’il y a aussi beaucoup de manifestants, et que cela peut être intéressant, pour une fois, de s’éprouver aux côtés de tout un tas de gens d’autres pays, que l’on ne connaît pas et que l’on pourrait, qui sait ?, rencontrer. Un peu plus, et l’on vous explique que c’est une concession au « Spectacle » que de mener une offensive franchement osée en plein terrain adverse. Déjà, avant Gênes, en 2001, des anarchistes plus ou moins anti-industriels, ou vaguement insurrectionnalistes, s’étaient ridiculisés en avançant ce genre d’arguments. Pour preuve qu’il s’agissait bien là d’arguments dictés par la peur, et non d’authentiques considérations stratégiques : on n’a jamais entendu parler de leur série d’« actions décentralisées » ; elles poussèrent la lutte contre « l’existant » jusqu’à être elles-mêmes à peu près inexistantes.
    Il faut dire que l’adversaire a instillé la peur si profondément dans nos cœurs que l’idée même de faire, comme cela tombait sous le sens il y a quinze ans, une tournée de présentations publiques autour des manifestations et blocages qui se préparaient pour perturber l’inauguration du nouveau siège de la BCE, n’est manifestement venue à l’esprit de personne en France. L’antiterrorisme est passé par là : chacun anticipe déjà la conspiration terroriste internationale à quoi la DCRI l’accusera d’oeuvrer, et les témoignages fantaisistes du prochain Mark Kennedy, délirant sous X comme d’autres sous acide
    La réussite de Francfort se situe sur ce terrain-là : celui de la confiance en soi, de l’épreuve de notre propre puissance. Pour ce qui est du « spectacle », l’attentat du Bardo à Tunis le même jour l’a emporté haut la main. Il a même totalement éclipsé, de ce point de vue, l’événement de Francfort.
    Il faut bien admettre que le théâtre des opérations ne se présentait pas au mieux : les deux derniers Blockupy avaient été des désastres en 2012 et 2013, la police avait littéralement écrasé les manifestants de son omniprésence, se jouant de toute restriction légale à son action. Souveraine, décomplexée, elle avait placé au-dessus de toute loi l’accord passé entre l’État allemand et la BCE qui stipule que le premier s’engage à garantir l’indépendance et l’intégrité physique de la seconde, à la rendre en quelque sorte inatteignable depuis ses hauteurs abstraites. Cette fois, la police avait d’abord annoncé une mobilisation de 8 000 hommes, puis de 9 000 ; les comptes étaient à 9 800 à l’approche du jour J, et toute la ville avait été décrétée « zone de danger », c’est-à-dire : zone de souveraineté policière. Il y allait dans cette arithmétique de la répression d’une subtile guerre psychologique, visant à dissuader les manifestants potentiels de faire le voyage. Dans le même esprit, la mairie se refusa, chose exceptionnelle en pareille circonstance, à concéder le moindre lieu où des manifestants pourraient être hébergés. Même pas un stade, ou une école, permettant de les surveiller, ou de les passer à tabac le cas échéant. La mairie de Francfort est particulièrement mal fondée, à présent, à se scandaliser de l’outrage que lui ont fait subir les émeutiers ; et elle le sait.
    Dans un premier temps, à la fin des années 1990, les contre-sommets ont surpris les dominants. Passé leur premier désemparement face à cette étrange forme de surgissement politique, ils rodèrent leurs stratégies. D’un côté, l’Union Européenne pilota une infiltration massive des milieux concernés ; de l’autre, on déroba toute cible aux manifestants en se réunissant dans les lieux les plus reculés, voire en ne se réunissant plus du tout, du moins pas publiquement. Ainsi en juillet dernier, un sommet européen sur « l’emploi des jeunes » devait se tenir à Turin où devait être présentées le genre de « solutions innovantes » qui divisent votre salaire par deux ; il fut décommandé et déplacé, au vu de l’ampleur des manifestations qui s’auguraient. Draghi ayant eu l’idée stupide de faire de l’inauguration du nouveau siège de la BCE à Francfort une « grande fête populaire », il était devenu impossible de simplement renoncer à l’événement, sauf à concéder l’étendue de son impopularité. Il crut tout aussi bêtement qu’il désarçonnerait la contestation en se contentant d’inviter, à défaut de « grande fête populaire » en présence des chefs d’État de l’Union tout entière, les seuls banquiers centraux. Il n’en fut rien. Ce recul enhardit plutôt ses opposants.
    Depuis qu’elle a dû faire face à un mouvement autonome peu commode, la police allemande a pris l’habitude de gérer les foules par écrasement. Elle s’attache, par la concentration de ses effectifs comme par l’omniprésence de ses dispositifs (hélicoptères, caméras, etc.), à dominer la situation de telle façon qu’elle n’a même plus à craindre de lancer parmi les manifestants de petites escouades mobiles d’agents qui interdisent toute prise en masse de la foule, celle-ci ne parvenant jamais à devenir compacte face à l’adversaire. Elle s’attaque à la possibilité même du geste émeutier, faisant anticiper à chacun son extraction de la foule et son arrestation au moment même où il en conçoit l’idée. Elle a ainsi réussi, par endroits, à induire une véritable culture de l’impuissance parmi leslinksradikalen.
    Le contre-coup de cette habitude de dominer est que lorsqu’elle est débordée, elle ne sait plus du tout à quel ordre se vouer. Elle se prend les pieds dans ses chaînes hiérarchiques. Elle manque de réactivité. Elle ne comprend plus rien. Elle improvise, et mal. C’est ce qui s’est passé à Francfort ce 18 mars. La lourde machine de la police allemande a perdu le contrôle de la situation parce qu’un groupe de quelques centaines de gens en noir se sont levés un peu plus tôt que prévu et n’ont pas respecté le plan de bataille. Partant de l’université vers 5h30 du matin, une flèche de destruction salutaire s’est enfoncée dans la métropole d’ouest en est, suivant une trajectoire incurvée, attaquant systématiquement toutes les forces de police qu’elle croisait sur son chemin, saccageant les sièges des multinationales comme les magasins attachés à ce genre de population, détruisant le « mobilier urbain » comme les succursales des banques, brûlant les voitures de police non moins que les barricades qu’elle dressait sur son chemin pour bloquer et la ville et la mobilité des forces adverses, s’attaquant pour finir à un commissariat avant de s’évanouir. Ce qui caractérisa ce cristal de masse tout le temps de sa brève existence fut son extrême mobilité tactique et son audace : il n’est pas courant, lorsque cinq fourgons de police anti-émeutes se positionnent afin de déverser des robocops et de bloquer une rue aux émeutiers, que ceux-ci se précipitent sur eux et les fassent fuir, plutôt que le contraire. À 7 heures du matin, cette menée sans visage avait fait toute son œuvre. Mais elle posa l’ambiance de la journée, comme un message de bienvenue disant à tous ceux qui étaient en train de confluer vers Francfort : « Mettez-vous à l’aise. Faites comme chez vous. La ville est à nous. ». Elle ne fut qu’un des « doigts » qui vint fondre ou rebondir sur la « zone rouge » cernée de barbelés derrière quoi la BCE se trouvait retranchée. Il est impossible de rendre compte de tous les autres coups d’audace qui ponctuèrent cette matinée et qui répandirent la plus grande confusion dans les plans policiers. Il est difficile de décrire autrement que par images comment la normalité capitaliste fut suspendue, une journée entière, dans ce cœur pulsant de la finance mondiale qu’est Francfort. Des curieux déambulant entre barricades de pneus fumants et trottoirs dépavés. Un attroupement composé à part égale de masqués vêtus de noir et de manifestants portant des cagoules arc-en-ciel. Un jet de pierre sur un camion de police d’où émane une voix de femme rappelant opportunément que « jeter une pierre sur un véhicule de police est un délit ». Le soleil se levant sur le gratte-ciel de la BCE avec en premier plan une voiture sérigraphiée en train de se consumer. Ce tag « economy is stupid » ou cet autre « Guccio siempre con noi » ou cet autre « Fradin nique la BCE ». La nuit, une masse d’ombres noires se projetant sur un immeuble bancaire illuminé de l’intérieur, avec tout au fond de l’immense hall un gardien derrière un immense comptoir, et le verre de la façade qui tombe sous les coups, lentement, comme pris de lassitude, sur une lumière blanchâtre. L’asymétrie appartient à ceux qui se lèvent tôt.
    Au rayon « statistiques », les journaux disent qu’il y aurait 90 policiers blessés dont 8 par jet de pierre, une dizaine de voitures de police incendiées, 2 camions de pompiers attaqués, 6 000 manifestants lors des blocages, 17 000 dans la manifestation de l’après-midi. Certains représentants de Blockupy ont regretté la tournure des événements, d’autres se sont réjoui « que la résistance ait enfin trouvé le chemin de Francfort ». Tous les partis ont fermement condamné la violence et l’ensauvagement (Verrohung) des manifestants. Les Verts ont dénoncé le « cynisme insupportable » des organisateurs qui ne les condamnent qu’à moitié et leur témoignent de la compréhension. Le président du principal syndicat de policiers du Land a déclaré qu’il n’a pas le souvenir d’affrontements aussi durs en Allemagne depuis qu’il est dans le métier, que les attaques ont atteint là un niveau « presque insupportable » ; il s’est étonné de la bonne organisation des opposants au capitalisme : « En 38 ans de carrière, je n’ai jamais vu une aussi bonne logistique », a-t-il ajouté. En vérité, une fois mise de côté l’hypocrisie générale, chacun sait que Francfort méritait les coups qu’elle a pris ; et qu’au vu de ce que la BCE a fait en Grèce et ailleurs, elle ne fait que commencer à payer. Quant à la police allemande, les témoignages larmoyants de ses jeunes recrues décrivant en pleine page dans les journaux la peur qu’ils ont éprouvée à lire tant d’incompréhensible haine dans les yeux des manifestants, alors qu’ils sont eux aussi des humains, avec une femme, un chien et des enfants, ne feront oublier à personne les Blockupy précédents et la brutalité usuelle de l’institution. «
    La fécondité de l’action véritable réside à l’intérieur d’elle-même », observait Benjamin, c’est-à-dire que le succès de Francfort réside dans la façon dont nous l’avons éprouvé et vécu, dans les complicités qui s’y sont trouvées ou renforcées, dans les possibles que cela nous a fait entrevoir, dans le regain de courage que nous y trouvons, ou pas. Francfort se comprend comme la première étape d’un plan d’attaque contre des « cibles logiques ». Un bref article sur Internet introduisait Francfort en ces termes : « Dans le contexte de contre-révolution massive que nous subissons depuis janvier en France, il faut contre-attaquer. Contre-attaquer non pas là où on nous attend, ni surtout dans le cadre que l’on nous fixe – le cadre national. Il faut frapper au niveau même où l’attaque est pensée et coordonnée : le niveau européen. » Il faut absolument faire en sorte de ne pas réinitier un nouveau cycle de contre-sommets. Il faut que le temps qui s’écoule entre deux dates de retrouvailles offensives soit un temps plein, plein de rencontres, de discussions, d’élaborations, de circulations, de constructions. Aussi parce qu’une offensive ne peut consister dans la répétition de la même tactique, contre quoi l’ennemi finit toujours par s’immuniser. Et il faut bien se retrouver ailleurs que dans les moments critiques pour penser des tactiques inédites. À nous de réussir ce qui a été raté dans le mouvement anti-globalisation – à nous d’en faire le tiqqun.