Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

culture et histoire - Page 1201

  • Drieu: le Jeune Européen

    2495303368.jpgJuste avant la débâcle de 1940, à un moment dramatique où il se penche sur son passé, il éprouve le besoin de faire le point sur ses premières œuvres et de publier un recueil de ses Écrits de Jeunesse : deux recueils de poèmes de guerre, Interrogation (1917) et Fond de cantine (1920) ; et deux recueils d’essais et de textes divers, La Suite dans les idées (1927) et Le Jeune Européen (1927). Mais, toujours insatisfait de lui-même, il croit nécessaire d’en retravailler la formulation, perdant ainsi au passage la fraîcheur de ses premières sensations ; cela nuit particulièrement à la nouvelle version de ses poèmes.

    Notre nouvelle édition des Écrits de jeunesse reste fidèle au projet de l’écrivain, mais c’est un nouveau livre, puisque nous avons préféré sauvegarder la verdeur des textes originaux, plutôt que de nous ranger aux corrections a priori discutables de l’âge mûr.

    Bouleversés par leur expérience atroce de la « Grande Guerre », déçus par le morne immobilisme du vieux monde qu’ils voient retomber dans l’ornière de ses petites habitudes, les jeunes écrivains de cette génération espèrent encore pouvoir donner un sens à une modernité emportée par un perpétuel mouvement d’accélération dans le vide.

    Malgré quelques incertitudes juvéniles, ces courts textes de Drieu incarnent avec vigueur cet esprit d’invention et cette sincérité, réalisant une subtile combinaison entre excentricités dadaïstes, enthousiasme futuriste pour l’innovation technique et révolte surréaliste, tout en maintenant vivace le souvenir de la tradition classique.

    Professeur littérature comparée, Julien Hervier a notamment édité et présenté le Journal 1939-1945 de Drieu la Rochelle (Gallimard, 2012) et la correspondance de ce dernier avec Victoria Ocampo : Lettres d’un amour défunt (Bartillat, 2009, Prix Sévigné 2010).

    Source: http://zentropa.info

  • Maurice Barrès, immortel

    Un sympathisant nous invite à relire Colette Baudoche, un poignant roman de Maurice Barrès, dont la lecture prouve, selon lui, que son auteur est plus que jamais immortel.

    Bien sûr, la guerre de 1870, pour ceux qui savent encore de quoi il s'agit, n'a plus guère d'influence sur la société actuelle... Bien sûr, l'occupation prussienne de l'Alsace et de la Lorraine n'est plus qu'un souvenir poussiéreux... Bien sûr, à l'heure de l'Europe sans frontières, la figure de l'Allemand colonisateur et arrogant n'est plus qu'un grotesque anachronisme... Colette Baudoche, poignant roman de Maurice Barrès, n'en demeure pas moins d'une actualité brûlante pour tous ceux qui considèrent que la France, d'une manière ou d'une autre, est sous occupation étrangère.

    Ranimer la flamme

    En écrivant sa trilogie des Bastions de l'Est, Barrès souhaitait ranimer chez ses contemporains la flamme du patriotisme pour résister à la germanisation des provinces occupées. À travers son héroïne Colette, jeune fille de Metz qui finira par refuser la demande en mariage de son locataire allemand, c'est le portrait de tout un peuple courageux et déterminé qu'il a dressé, avec un style à la fois pur, riche et simple, comme les paysages de sa Lorraine natale.

    L'"invasion" à laquelle nous devons aujourd'hui faire face ne s'est pas faite par les armes, mais au nom de soi-disant principes humanitaires, qui n'étaient bien souvent que le masque de la rapacité du grand capital ou de différentes associations gauchistes prospérant sur le terreau de cette nouvelle France. Cependant, les mécanismes de défense doivent demeurer les mêmes que ceux adoptés par les humbles populations d'autrefois : méfiance envers les cultures d'importation, refus d'être le complice, stipendié ou non, de l'UE et des lobbies délétères de tous bords, unité indéfectible autour de la terre et des morts, qui restent les inébranlables piliers de toute pensée nationaliste digne de ce nom.

    Sauvegarder notre fierté d'opprimé

    Si un espoir de sursaut à grande échelle s'amenuise de jour en jour (armée en déliquescence, mouvements politiques divisés, etc.), tâchons au moins, tout comme Colette Baudoche, de sauvegarder individuellement notre fierté d'opprimé dans notre propre demeure et n'oublions pas les sacrifices de nos pères.

    Aujourd'hui, la France pleure toujours ses provinces perdues, livrées aux consignes de Bruxelles ou à l'immigration de masse. De Barbès à Villiers-le-Bel, de Marseille à la Seine-Saint-Denis, sachons au moins remettre dans le coeur des Français l'esprit d'une résistance, pour que s'accomplisse un jour la prophétie de Maurice Barrès : « C'est l'alouette gauloise qui surgit des champs où la moisson a recouvert les ossuaires. [...] Vous n'avez pris au malheur que ce qui pouvait vous donner plus de profondeur et de dignité. » (Discours à Metz du 15 août 1911).

    Olivier Eggs L’ACTION FRANÇAISE 2000 du 15 au 28 juillet 2010

  • Sur Numero Zéro d'Umberto Eco, en hommage /Théories du complot : l'inutile découverte

    par François-Bernard Huyghe
    Ex: http://www.huyghe.fr
    Dans son dernier roman Numéro zéroUmberto Eco décrit la rédaction d'un futur quotidien au début des années 90. On y bidonne tout, des horoscopes aux avis mortuaires, et le journal, aux rédacteurs ringards et aux moyens restreints, et il n'est en réalité pas destiné à paraître. Il servira plutôt d'instrument de chantage à un capitaine d'industrie : il menacera ceux qui lui font obstacle de lancer des révélations scandaleuses ou des campagnes de presse. 
    Cette histoire, et cette critique un peu convenue des médias "classsiques" se croise avec la naissance d'une théorie que l'on dirait aujourd'hui conspirationniste : un des journalistes commence à se persuader que ce n'est pas Mussolini qui a été exécuté et dont on a vu le cadavre pendu par les pieds à la Piazzale Loreto en 1945, mais un sosie. Partant de détails du récit des derniers jours ou de l'autopsie qui ne colleraient pas, le journaliste ne cesse de trouver des bizarreries dans l'histoire de ce cadavre. Par ailleurs, le vrai cadavre du Duce, enterré secrètement  a été effectivement enlevé par un commando de jeunes néo fascistes pour finir remis à sa famille en 1957. Un essai de Sergio Luzzato, récemment traduit, "le corps du Duce" analyse d'ailleurs cette histoire vraiment très romanesque de cadavre caché, enlevé, encombrant, honoré, retrouvé, etc.
    Et Eco de décrire la construction d'une théorie par le journaliste qui part du postulat que les partisans n'ont pas tué le bon Mussolini. Dans un pays  où l'on pratique beaucoup le "dietrismo" (l'art d'imaginer de tortueuses manœuvres derrière -dietro- la version "officielle" de l'Histoire), cela marche bien. Tous les ingrédients qui nourrissent les bonnes conversations de table en Italie - Vatican, affaire Gelli, organisation Gladio chargée de faire du "stay behind" en cas d'invasion soviétique, tentative de putsch du prince Borghese bizarrement annulée, inévitable attentat de la Piazza Fontana et autres massacres d'innocents qui le suivront, autres "coïncidences", contradictions et affaires jamais expliquées sur fond de manipulations et stratégie de tension... Évidemment le journaliste se fait assassiner. 
    Et c'est à ce moment que le livre, par ailleurs astucieux et entraînant, pose une hypothèse intéressante qui pourrait être que trop de complot tue le complot. 
    Dans "Le pendule de Foucault", bien des années avant "Da Vinci Code", Eco imaginait un délirant qui, partant d'éléments faux, construisait une explication de l'Histoire par des manœuvres secrètes, Templiers, groupes ésotériques et tutti quanti. À la fin du livre, l'enquêteur se faisait également tuer, et l'auteur nous révélait à la fois que les constructions mentales sur une histoire occulte, qu'il avait fort ingénieusement illustrée pendant les neuf dixièmes du livre, étaient fausses, mais qu'il y avait aussi des dingues pour les prendre au sérieux. Et tuer en leur nom. 
    Ici, dans "Numéro zéro", il se passe presque l'inverse. Le lecteur (qui n'a pas pu échapper aux nombreux livres et articles sur les théories du complot  ne croit pas une seconde aux hypothèses du journaliste. Quand il est assassiné, son collègue (l'auteur parlant à la première personne) se sent menacé. Mais, coup de théâtre, à ce moment est diffusée une émission de la BBC "Opération Gladio" (authentique : on peut voir sur You Tube ce documentaire de près de deux heures et demi. présenté pour la première fois en 1992, année où est sensé se dérouler le livre). Or, le documentaire, truffé d'interviews des acteurs, révèle d'effroyables histoires sur une supposée armée secrète d'extrême droite, en rapport avec la CIA, le MI6, l'État italien et autre, exécute secrètement crimes et massacres, y compris en tentant de les faire attribuer leurs méfaits à l'extrême gauche. Ce qui, soit dit en passant, devrait nous rappeler que la théorie du complot n'est pas un monopole des populistes de droite.
    "Numéro zéro" se termine un peu en queue de poisson, du moins du point de vue narratif : puisque toutes ces histoires de complot sont notoires, plus personne n'a de raison de tuer personne, et l'histoire se finit bien.
    Mais le paradoxe soulevé mérite l'attention. Il y a des dizaines de théories sur l'assassinat de Kennedy, à peu près autant sur les massacres des années de plomb. Parmi toutes ces théories, il y en a forcément une qui doit être vraie mais nous ne saurons sans doute jamais laquelle.
    En revanche, l'inflation des révélations et pseudo-révélations a produit quelque chose qui ressemble à une incrédulité résignée de masse. Il faut s'habituer à l'idée qu'une vaste partie de la population puisse simultanément se persuader d'être abusée par les mensonges fabriqués par des appareils politiques et médiatiques et ne pas se révolter, ou du moins accepter de continuer à subir un système qu'ils croient profondément perverti et néanmoins indépassable. Comme si Eco nous suggérait que, quand tout le monde sait qu'il y a secret, ce que cache le secret n'a plus aucune importance.

  • Jeux de rôles par Xavier ÉMAN

    Ils se pourlèchent les babines de leur propre conversation. Cette intelligence mâtinée d’humour, le tout tellement subtilement distancié, quelle saveur, quel délice !

    Ils sont catholiques mais « cools ». C’est d’ailleurs désormais le devoir principal, sinon unique, des bourgeois catholiques. Non pas respecter les commandements des Évangiles, ni les préceptes du Vatican, mais ne pas être « ringards ». Telle est leur mission, leur rôle sur cette terre. Alors ils tapent de la coke et partouzent un peu. Gentiment, entre gens bien nés et bien élevés, vouvoiement avant la sodomie et citation de Bernanos ou de Péguy entre la pipe et le shooter de vodka-red bull. Merci de ne pas s’essuyer la bite sur la toile de Jouy.

    Ils vont à l’église le dimanche (soir) parce qu’ils trouvent ça « décalé », « original », « rebelle », « dadaïste » quelque part… Car ils ont l’âme artiste, se rêvent écrivains et sont poussivement journalistes en attendant la révélation au grand monde de leur sublime talent. Ils forment la « jeune droite décomplexée », c’est-à-dire débarrassée de ces deux boulets d’un autre âge que sont la décence et l’humilité. Malgré leur frénésie de « coolitude », ils arborent cependant toujours les mêmes faciès de fins de race que leurs prédécesseurs corsetés, les mêmes gueules d’animateurs de patronages et de Scouts d’Europe virés de la patrouille pour priapisme ou insuffisance cardiaque. Même les strings de leurs femelles ont des allures de serre-têtes Cyrillus.

    Ils rêvent d’une « France éternelle » que leurs parents ont vendu à l’encan et regrettent surtout le temps où leur classe dominait sans partage et dirigeait sans gêne. Remplacés par plus avides et plus efficaces qu’eux, les orphelins à particules plus ou moins vérolées pleurent le latin et le grec, la poésie parnassienne et l’imparfait du subjonctif, toutes ces élégances oiseuses qui accompagnaient si bien le règne des maîtres des forges.

    Héritiers dépouillés et penauds, ils feignent de regretter une « méritocratie républicaine », largement fantasmée, que leur caste a toujours cherché à contenir sinon à éradiquer. Pour choquer Bon Papa et animer les fins de soirées dans le Lubéron, ils parlent d’écologie, de justice sociale et de décroissance… Cela les fait frétiller. Le temps d’un « cercle » ou d’un cocktail-dînatoire, les petits-enfants de Thiers se prennent pour Louise Michel. Frisson garanti ! Marie-Adélaïde en a encore les cuisses trempées !

    Ils sont tellement intrinsèquement, ontologiquement, de droite, jusqu’à l’ultime centimètre carré de leurs chèches immaculés, que leurs efforts désespérés pour paraître « anarchos-bolchéviques » sont parfois touchants, émouvants même, un peu comme ces enfants de gendarmes qui veulent à tout prix jouer les voleurs dans la cour de récréation de l’école primaire…

    Xavier Éman

    • D’abord mis en ligne sur A moy que chault !, le 9 janvier 2016.

    http://www.europemaxima.com/

  • Géopolitique du système des banques centrales

    Intéressante analyse rédigée par Valérie Bugault (source).

    Géopolitique du système des banques centrales


    Genèse de l’ordre bancaire oligarchique : du système des banques centrales aux institutions financières internationales

    Mayer Amschel Bauer, fondateur de la dynastie Rothschild : «Donnez-moi le contrôle de la monnaie d’une nation, et je n’aurai pas à m’occuper de ceux qui font les lois

    Par Valérie Bugault – le 21 février 2016

    La notion de banque centrale suppose une centralisation des questions monétaires entre les mains de banquiers centraux contrôlés par des banquiers privés. Le règlement des questions monétaires est donc, par construction, dévoué à la satisfaction des intérêts bien compris des propriétaires majoritaires des principales banques privées 1.

    L’existence d’une banque centralisée aux mains d’acteurs financiers privés, qui régit la monnaie dite d’État et qui réglemente plus ou moins directement le secteur des banques privées est le cœur nucléaire de la question monétaire. Les banques centrales 2 sont le centre névralgique de l’organisation du système financier actuel.

    Ce concept dit de banque centrale s’est volontiers paré des vertus de l’orthodoxie financière pour s’imposer de façon définitive aux yeux du public. Ainsi, s’est répandue l’idée générale selon laquelle le concept de banque centrale indépendante est justifié par la nécessité de lutter contre un excès d’utilisation, par les hommes politiques, de ce qu’il est convenu d’appeler la planche à billets. Deux constats factuels s’opposent de façon rédhibitoire à l’adoption d’une telle justification.

    Le premier constat est que le concept même de banque centrale véhicule une illusion d’indépendance développée et entretenue par des acteurs bancaires. Les banques centrales ont en effet toujours été indépendantes des élus politiques, mais elles n’ont jamais été indépendantes des banquiers qui les contrôlent. Dit autrement, le système actuel des banques centrales est, par construction, indépendant de tout contrôle populaire de type politique, mais au contraire sous la totale dépendance du contrôle capitalistique initial. D’un point de vue conceptuel logique, la recherche d’une orthodoxie financière de l’État peut passer par bien d’autres moyens que celui de remettre les clefs du coffre à un groupe homogène de personnes.

    La recherche de l’orthodoxie budgétaire serait, par exemple, bien mieux atteinte par l’organisation de contre-pouvoirs assortie d’une indépendance statutaire réelle des contrôleurs. Les gardiens du coffre public, qui manient l’argent du public, devraient ainsi rendre régulièrement des comptes sur l’impact de leur politique sur la masse des individus constituant l’État. Cet organisme de contrôle pourrait être composé de représentants de la société civile, hors banquiers. Cet organisme aurait les pouvoirs juridiques et politiques de sanctionner les gardiens du coffre lorsque les effets des politiques monétaires suivies seraient durablement et/ou diamétralement contraires aux intérêts économiques des individus auxquels elles s’imposent et à la fluidité du commerce bien compris – c’est-à-dire dans le sens où le commerce profite à tous les acteurs, et non aux seuls propriétaires des plus grands cartels.

    Lire la suite

  • La Révolution de l’imaginaire

    Par Georges Gondinet pour Totalité n°12, été 1981.

     L’œuvre de John Ronald Reuel Tolkien a suscité, dans les pays industrialisés, un nombre remarquable d’enthousiasmes. L’importance de ces derniers n’a plus besoin, depuis longtemps, de démonstration : elle se constate. Tolkien a certainement dépassé le chiffre incroyable de cinquante millions de lecteurs dans le monde entier. Traduite en plus d’une dizaine de langues, de l’Extrême-Orient à l’Amérique latine, souvent publiée sous forme de livres de poche, son œuvre gagne un public de plus en plus étendu(1). Son cas littéraire, nous explique Marco Tarchi, « dépasse-les dimensions horizontales de la génération, impliquant enfants et adultes, et les dimensions verticales de la classe ou de la profession, touchant les étudiants, les ménagères, les professions libérales, les employés». Cet engouement prodigieux a bien sûr été accompagné d’une commercialisation particulièrement efficace et, devons-nous ajouter, rentable. Dans un pays extrêmement apte à récupérer et soumettre aux lois dumarketing et du profit les événements culturels (nous voulons évidemment parler des États-Unis), le « mythe » Tolkien a donné naissance à des calendriers, des badges, des cartes postales et même des tee-shirts(2). Comme le souligne pertinemment le critique italien Servadio, il ne manque que « les foulards de soie et les cravates Tolkien ».

    Pourtant, cette utilisation mercantile d’une œuvre riche en potentialités ne doit pas laisser place au soupçon. En effet, d’une part, le contenu des livres de ce délicieux conteur a reçu, en France tout du moins (et le présent dossier de Totalité voudrait commencer à combler cette lacune), peu de commentaires véritablement attentifs et enrichissants(3). Or, seule une lecture clairvoyante et débarrassée de certains préjugés peut permettre d’appréhender le monde créé par Tolkien comme porteur d’une vision traditionnelle du monde : toute interprétation « profane » ou conformiste d’un livre aussi puissant que Le Seigneur des Anneaux relève du détournement de texte et de l’obscurantisme rationaliste(4). D’autre part, s’il n’est pas nécessaire d’être un marginal pour lire Tolkien, il faut reconnaître que l’audience du Seigneur des Anneaux ne saurait s’expliquer sans les événements de mai 1968, les désillusions profondes de certains révoltés. Incontestablement, la perte de crédibilité du marxisme-léninisme a donné de fervents lecteurs à celui que l’on a appelé « le Seigneur des Légendes ». Du reste, si le lecteur ordinaire s’amuse en prenant connaissance des aventures de Bilbon et de Frodon, seuls les rebelles et les désespérés savent y trouver la capacité d’affirmation d’un monde différent, d’un univers excluant les pseudovaleurs de la société de consommation. Plus qu’un divertissement, ils en tirent une émotion réelle :

     « Déçus par les contradictions du progrès, jeunes de droite et de gauche, anarchistes de toute couleur, contestataires, y trouvent une profonde aspiration idéale au changement, à la construction d’un monde différent. » Marco Tarchi.

    Ainsi, la condition préalable pour recevoir le message tient dans le refus radical de la réalité dans laquelle nous vivons, la volonté de s’évader de la réalité officielle. Cette remarque explique le succès spectaculaire que Tolkien rencontre au sein de la droite radicale italienne, laquelle a déjà produit des interprétations originales et provoqué un mouvement culturel fructueux(5).

    « On peut même admettre que certains auteurs aient seulement voulu “faire de l’art”, et y soient parvenus, si bien que leurs productions semblent donner raison à ceux qui ne connaissent et n’admettent que le point de vue esthétique. Cela n’empêche cependant pas qu’en cherchant ainsi “à ne faire que de l’art”, et dans la mesure même où ils ont obéi à un élan spontané, c’est-à-dire à un processus imaginatif incontrôlé, ils aient aussi fait autre chose, qu’ils aient conservé ou transmis, ou fait agir, un contenu supérieur que l’œil expérimenté saura toujours reconnaître et dont certains auteurs seraient les premiers à s’étonner, s’il leur était clairement indiqué. » Julius Evola.

    Forgé jadis par Sauron de Mordor, Seigneur des Ténèbres, l’Anneau de Puissance doit lui permettre de dominer les possesseurs des autres anneaux magiques, d’imposer au monde sa loi :

    « Trois Anneaux pour les Rois Elfes sous le ciel,
    Sept pour les Seigneurs Nains dans leurs demeures de pierre,
    Neuf pour les Hommes Mortels destinés au trépas,
    Un pour le Seigneur des Ténèbres sur son sombre trône
    Dans le Pays de Mordor où s’étendent les Ombres
    Un Anneau pour les gouverner tous, un Anneau pour les trouver,
    Un Anneau pour les ramener tous et dans les ténèbres les lier
    Au Pays de Mordor où s’étendent les Ombres. »

    Mais l’Anneau Unique a disparu. Un Hobbit, Bilbon Sacquet, l’a retrouvé, emporté chez lui et confié à son cousin et fils adoptif Frodon. Ainsi commence l’une des œuvres les plus puissantes du siècle, Le Seigneur des Anneaux. La suite de la première partie, « La Communauté de l’Anneau », nous narre la décision que prend Frodon de quitter la Comté, sa patrie, pour faire échec à Sauron. Car si ce dernier s’empare à nouveau de l’Anneau, le règne de l’Ombre s’étendra partout à jamais. À travers des périls sans nom, menacés par les Cavaliers Noirs de Sauron, Frodon et ses compagnons parviennent, avec l’aide d’Aragorn le Rôdeur d’Eriador, à la Maison d’Elrond, à Fondcombe. Lors du grand Conseil d’Elrond, il est décidé de tenter la destruction de l’Anneau. Frodon se voit nommé Porteur de l’Anneau. Sa mission consiste à parvenir, coûte que coûte, à la Montagne de feu, en Mordor (pays de l’Ennemi), seul lieu où l’Anneau maléfique peut être anéanti. Il ne voyagera pas seul. Font partie de la Communauté de l’Anneau: Aragorn et Boromir, fils du Seigneur de Gondor, représentants les hommes ; Legolas fils du Roi des Elfes, pour les Elfes ; Gimli fils de Gloin du Mont Solitaire, pour les Nains ; Frodon avec son serviteur Samsagace et ses deux jeunes cousins Meriadoc et Peregrin, pour les Hobbits ; enfin, Gandalf le Gris(6). Mais après bien des aventures et un séjour dans le merveilleux pays elfique de la Lorien(7), la communauté est obligée de se diviser.

    Lire la suite