Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

culture et histoire - Page 1213

  • Archéologie de l'idée démocratique

    Le débat actuel sur la différence entre république et démocratie ne peut faire l'économie d'une réflexion sur l'origine de la démocratie, un système politique en soi surprenant, non naturel, multiforme. Qu'on le simplifie à l'extrême (pour l'étudier) à la prise d'une décision par le biais d'un accord commun, ou en fonction d'un bien général, ou encore par un affrontement ritualisé, et l'on découvre aussitôt que la décision s'inscrit dans un contexte pré-déterminé et imposant son orientation. La décision annoncée est plus dépendante de ce contexte qu'il n'y paraît. L'analyse la fait même disparaître au profit d'une substructure où se dissimulent les vraies décisions inavouées.

    Comment en faire le dévoilement ? Guy-R Vincent, l'auteur de l'ouvrage intituléDes Substitutions comme principe de la pensée - Etude de récits mythiques grecs et sanscrits – nous propose un parcours original : mythologue comparatiste, il ne consacre qu'un chapitre à cette question : chapitre IV, « Le pouvoir démocratique et ses substitutions » (p. 207-244). Il s'agit de l'extension d'une analyse portant des récits mythiques où un personnage (dieu ou humain) se fait remplacer (substitution) par un autre personnage réel (dieu ou humain) ou par un simulacre (statue, animal, …).

    Le récit mythique le plus célèbre (il reste une pièce d'Euripide sur ce thème) en Europe est celui-ci : le roi Admète doit mourir mais le dieu Apollon, pour services rendus, lui a accordé qu'il pourrait se faire remplacer dans la mort, le jour venu. Admète cherche donc une personne consentante : ses meilleurs amis refusent, ses vieux parents aussi, ne reste que son épouse Alceste pour accepter. Alceste lui demande toutefois de respecter les enfants qu'ils ont eus (au cas où Admète se remarierait) et s'enfonce dans les Enfers. Admète ressent le vide laissé par cette disparition et songe à faire fabriquer un « double » d'Alceste (un artefact : statue ou poupée) quand survient Héraclès. Les lois de l'hospitalité imposent qu'Admète taise son chagrin ; il reçoit donc dignement son hôte, qui finit par découvrir le deuil de toute la maisonnée. Héraclès a honte de son comportement bruyant et descend aux Enfers chercher Alceste. Il fait croire au roi qu'il lui a trouvé une nouvelle épouse (le roi n'en veut pas) mais en soulevant le voile de cette femme, il s'aperçoit de la vérité.

    Tout se termine donc bien et peut faire penser à un conte heureux. Le lecteur peut alors, pour marquer sa fascination ou son intérêt, facilement se fourvoyer vers des pistes psychologiques ou sociologiques : l'amour conjugal, la fidélité et l'hospitalité, le droit des enfants, l'égoïsme masculin, la solitude de chacun devant la mort… Mais ces solutions d'analyse ne sont jamais celles qu'envisage un mythe. Par exemple, dans ce cas précis, rien n'affirme qu'Alceste aime son époux (les mariages sont contractuels dans l'Antiquité) et ses motifs sont de cet ordre : l'obéissance est obligatoire ; sauvegarder le roi garant du monde est nécessaire ; il faut éliminer les risques d'une continuité rompue (en amont par les parents d'Admète ne voulant pas mourir à la place de leur fils et en aval par ses enfants qui pourraient être délaissés).

    Le recensement d'autres mythes empruntés au monde grec et indien permet de dégager un processus très particulier auquel l'auteur donne le nom de « substitution ». Il le pense universel (d'autres aires culturelles en rendent compte ; que l'on pense à Abraham remplaçant dans un sacrifice par un bouc son fils Isaac ) et antérieur à d'autres modes constitutifs de la pensée (comme le rapprochement par similitude ou contiguïté où ceci ressemble à cela, où ceci fait suite à cela, à la base de la métaphore, du signe mathématique « égal », des premières catégories construites sur des similitudes). Ce processus se fait en deux phases : a) une première phase où un mode d'existence (figuré dans le mythe par un personnage) se confronte à un autre mode et en conçoit la menace (répartition des rôles : prédateur/proie), puis fonde un double de soi (un leurre substitutif) et détourne l'attention du potentiel menaçant, au risque de s'affaiblir ou de se faire « doubler » par son leurre ; b) une seconde phase où le substitut se détache de sa source et s'implante dans un autre contexte qu'il perturbe et modifie (transfert sur un autre plan) : soit il maintient son attache avec son origine (il permet l'action modificatrice de ce nouveau milieu), soit il se détache et s'autonomise (il permet une ouverture caractérisant un autre aspect du réel).

    La substitution est ce processus complexe et créatif, processus qui engendre des perturbations nombreuses que l'on peut regrouper dans des classes de perturbation spécifiques à certains domaines (le livre en aborde d'autres, comme la peinture, le calcul, le langage...). Celui de la démocratie en est donc un parmi d'autres. Si l'on veut simplifier, on dira qu'une pièce de remplacement n'est jamais identique à celle qu'elle est censée remplacer et provoque des troubles en partie positifs. Inadéquation inventive. Pour illustration, donnons Ulysse se faisant appeler « Personne », selon un jeu de mots basé sur son nom (outis = personne /Odys = début de son nom), pour leurrer le Cyclope menaçant, et sauver ses compagnons en les faisant sortir de la grotte du Cyclope par un subterfuge (ils sont cachés sous le ventre des moutons). Scène pré-démocratique en soi : à une menace, répond un remplacement nominal (« Personne » est le délégué d'Ulysse) et la sauvegarde d'un groupe humain. Cette anecdote peut être placée sur d'autres plans : pourquoi pas celui de la lutte contre la tyrannie, mais aussi celui de la résistance des défenses immunitaires dont il faut baisser la garde en cas d'allergie ou de greffe ? Le mythe substitutif a cette vertu d'extrême plasticité.

    Venons-en donc à la démocratie. Le point de vue peut paraître iconoclaste : tout est remplacement. Le député, élu du Peuple, n'est qu'un substitut, rien de plus. La sacralité de sa fonction est, elle même, fondée sur le remplacement du droit divin par un droit venu d'en bas (le Peuple souverain remplace le Ciel pour fonder la légitimité). Il n'est plus l'émanation inspirée d'une volonté collective mais une pièce rapportée dont on sait qu'elle ne peut que provoquer des perturbations. Cela explique déjà que la démocratie soit un régime agité (cf. l'excitation des périodes électorales) et que les critiques alternent entre une constatation (on tient peu compte de la volonté populaire, si bien que l'on parle de déficit démocratique) et une hésitation (prendre l'avis de tous, surtout si les membres sont incultes, pour chaque opération, est infaisable et non souhaitable ; autant réduire la représentativité). Entre hyperdémocratisme et hypodémocratisme si l'on veut. Et il est vrai que l'histoire nous montre que dans certains cas, il a été heureux que l'on ne suive pas l'avis de la majorité (du Peuple) comme dans d'autres, l'inverse fut fatal : trop de pouvoirs entre les mains de quelques représentants malveillants ou bornés ont conduit à des catastrophes. Cela renvoie alors à la notion de « hasard » avec laquelle s'ouvre l'origine de la démocratie : et si les décisions démocratiques renvoyaient au hasard ? Il suffit de si peu, parfois, pour aller dans un sens ou l'autre. On est loin d'une prise de décision posée, rationnelle, intelligente, telle que le système tient à le faire croire.

    En effet, la mythologie grecque évoque des scènes de tirage au sort pour prendre une décision. Ce n'est plus la décision d'un seul (le roi des dieux, le patriarche) qui s'impose, mais on place entre ses mains un dispositif : dans l'Iliade (VII, 1-205), on met des jetons dans un casque, chacun étant donc à égalité et on retire un jeton ; ailleurs (XXII, 209-213), Zeus pèse sur une balance les destins des guerriers : le roi des dieux accepte de se voir destitué de son pouvoir d'aider l'un ou l'autre. C'est le destin qui commande. La démocratie, si elle tire son origine de ces dispositifs, doit en avoir conservé des traits que nous ne voyons plus mais toujours agissant. On se souvient que, devant l'afflux des inscriptions d'étudiants dans une université, un tirage au sort avait été proposé au grand dam des intéressés. Et pourtant n'était-il pas égalitaire ? Dispositif trop rudimentaire, même s'il demeure en fondement occulte de la démocratie.

    La démocratie s'est développée en inventant de nouveaux dispositifs plus complexes. Un parcours historique se fait alors de la Grèce, de Rome, du trust médiéval, vers la révolution industrielle, jusqu'à nos jours. Chaque fois, un dispositif de substitution est conçu dont les perturbations et les débordements sont admis pour permettre des solutions décisionnelles. C'est par la perturbation contrôlée progressivement que le système s'installe et se fait admettre. Système délicat à manier, instable, accentuant les inégalités mais permettant une permanence : on se confie paradoxalement à ce qui troublel'ordre public, pour développer et complexifier cette organisation politique. Situation très curieuse.

    Il n'y a pas tant de continuité entre Athènes, Rome, le féodalisme, etc. que des dispositifs nouveaux et orientés vers des objectifs différents. La démocratie est plurielle, elle ne sert pas les intérêts du Peuple, elle sert des projets qui préoccupent à un moment donné les hommes ou des groupes d'hommes. Au Moyen Age, au moment des croisades, les fiefs sont laissés vacants et confiés à des hommes de confiance (« trustee » agissant pour un « cestui que trust ») qui remplacent le chevalier parti au loin. L'orphelin et l'orpheline sont entre les mains du trustee qui se rémunère pour ses services, peut abuser de son pouvoir, faire en sorte que le réel propriétaire de retour ne retrouve rien de son bien (fait fréquent en politique où des remplaçants ne rendent pas le siège qu'ils devaient momentanément occuper), comme il peut préserver un patrimoine, l'augmenter, être un modèle de bonne gestion. C'est ce que narre Walter Scott dans Ivanhoé : le roi Richard-Coeur de lion a confié son royaume à son frère, le roi Jean ; tous deux des Normands ; Cédric, père d'Ivanhoé, est un saxon qui veut marier sa pupille Rowena à un descendant saxon de sang royal, au détriment de son propre fils Ivanhoé, amoureux de Rowena ; Ivanhoé se tourne alors vers Richard-Coeur de lion, lui aussi dépossédé par son frère le roi Jean. Un jeu complexe entre le tuteur (trustee), le tutorisé (cestui que trust), le propriétaire (ou constituant) est en cause, où les rôles peuvent s'échanger et se superposer. Par exemple : Cédric est à la fois le tuteur et le constituant en tant que responsable d'une pupille (à marier au mieux) et propriétaire voulant donner à un saxon l'héritage de la royauté et ainsi accroître son bien personnel par alliance. L'on a oublié que W. Scott était un homme de loi important en son temps, un juriste d'obédience libérale. La fiducie ou confiance est une superbe invention d'une grande souplesse : en déléguant le pouvoir à un ou plusieurs membres, en leur confiant un héritage à faire fructifier, en choisissant de récompenser le trustee, en surveillant les exactions ou en les favorisant, on voit combien ce système de délégation s'approche de la démocratie et possède des moyens étendus pour répondre à diverses situations (mort des bénéficiaires, accords multiples, prises de risque…). Le bien circule, n'est pas bloqué ou en jachère. Les montages actuels de sociétés-écrans sont des formes démocratiques d'une certaine manière : cascade décisionnelle, étages successifs d'intervention, camouflages qui aident à l'acceptation, commissions multiples nécessitant des spécialistes (technostructure).

    On lira les pages limpides consacrées à Athènes et à Rome mais si l'on arrive au XIXème siècle, c'est pour voir s'instaurer un autre dispositif qui gauchit à nouveau le système démocratique. Pour l'auteur, il est fortement lié à l'utilisation des machines et des rouages. Il faut canaliser une énergie (celle d'une nation), la répartir et l'amplifier, à la façon dont une machine est une force productive remplaçant la force humaine. Le mythe requis est d'une lucidité quelque peu effrayante : le taureau de Phalaris. Phalaris est un tyran de la Sicile antique auquel un ingénieur nommé Périlaos (nom symptomatique : « celui qui a le peuple autour de lui ») propose un instrument de torture : on introduit dans le ventre d'un taureau en bronze des condamnés, on fait chauffer le métal par un feu en dessous, les condamnés hurlent de douleur mais leurs cris sont transformés au niveau des cornes en un air de flûte agréable. Phalaris est outré et enferme l'inventeur dans son taureau avant de le précipiter du haut d'une falaise. Les cris et gémissements du Peuple ne sont-ils pas transformés ? Parfois on les rend indistincts, on les couvre de mélodies officielles, parfois on les soulage et l'on détruit les motifs de leur existence. Or la Révolution industrielle est liée à deux machines capitales : la machine à tisser et la machine à vapeur. Ce n'est donc plus un bien hérité à partager et à augmenter qui importe, mais la matérialisation d'une force pour le bien de tous (République) ou de quelques uns (une classe sociale), ou d'une Nation à visée impérialiste. Il n'empêche que la prise de décision imite la machinerie faite de rouages dans le but de créer un dynamisme, selon des engrenages distincts. La difficulté est de déterminer un centre pour organiser tous ces rouages : ce rôle est imparti au suffrage universel qui creuse momentanément un potentiel central, lequel se déplace (on est loin d'un modèle monarchique où le roi est le centre désigné pour tous et pour toujours) au gré des pressions. On peut vouloir que chacun ressemble à chacun (effort d'égalitarisation : compenser les inégalités, équilibrer les chances d'ascension sociale), que l'ordonnancement commun descende en cascade et se répète à différents niveaux (hiérarchisation), que l'on sépare le blé de l'ivraie, selon des vitesses d'évolution différentes (catégorisation : ville/campagne ; secteur industriel/ services...), que les rôles permutent (inter-échangéabilité, mixité, parité). C'est tout ce que peut proposer le système ainsi conçu : le regroupement des énergies selon quatre principes ou rouages latents. Autant de centrages momentanés.

    Or, un simple regard sur nos technologies, montre qu'au monde des machines à rouage a succédé le monde des systèmes miniaturisés où l'interconnexion se fait par des échanges électroniques incessants. Ce dernier modèle omniprésent exerce son influence sur ce que nous attendons de la démocratie actuellement : la prospérité généralisée au lieu de la mobilisation antérieure. Le système étant régi par un ancien paradigme, bien des pouvoirs prédominants échappent à un choix démocratique, ne serait-ce que le pouvoir médiatique, non élu, surveillé par le pouvoir politique et en même temps le concurrençant. L'élu (maire, député, sénateur, président…) tient moins son pouvoir des urnes que de son accès aux media. Le citoyen attend de son vote moins à consentir des efforts collectifs (ce que continue à proclamer l'impétrant politique, surtout s'il a conquis le pouvoir) qu'une interactivité rapide (des mesures aux effets immédiats, que l'on peut rapidement changer) et une sécurisation de ses échanges (déplacements et placements, contrats souples et parallèles). Autant dire combien le système démocratique fondé sur une représentation démodée où chacun (même le plus « imbécile » était réquisitionné) a besoin de s'inventer à nouveau.

    Mais s'adapter à ces demandes contemporaines est certainement pernicieux, trop lié à des avantages personnels antinomiques entre eux. C'est seulement en se rapprochant d'un modèle qualitatif (l'accumulation de besoins non satisfaits produisant un « saut » correcteur, à la manière dont une lame de scie pressée à chaque bout « flambe », c'est-à-dire adopte d'inverser sa courbure, de convexe devenant concave ou l'inverse) que la démocratie peut véritablement se modifier. Des inversions (le mot est curieusement à la mode : « inversion de la courbe du chômage », inversion dans les énergies à utiliser, transition en tous genres) sont souhaitées et souhaitables, pour orienter l'Humanité vers des finalités où elle se reconnaîtra mieux. « Infinitiser » est le mot employé : terme énigmatique car il ne désigne pas, dans cette analyse, le long terme mais un horizon interne reconstruit. Que faut-il entendre par là ? L'auteur s'en tire par une pirouette mythologique : Aphrodite anime la statue de Pygmalion ; le sculpteur Pygmalion aimait sa statue de façon narcissique, elle était son bien, il ne l'aimait pas pour l'image d'une altérité. Aphrodite la lui soustrait comme telle, et la rend vivante : elle en fait une femme réelle, substitut perturbant mais novateur. Il n'est pas certain que cette transformation ait été du goût de Pygamalion. La déesse a pu vouloir le récompenser comme lui jouer un tour et le punir de se désintéresser des autres femmes qu'il ignorait. On peut y voir une allégorie de la finance actuelle fascinée par ses montages et ses bulles (statues narcissiques), et qui manque la vie réelle. Quelle déesse saura transformer ces simulacres stériles en des réalités agissantes, liées à des besoins se manifestant dans nos sociétés ? Amusant aussi de penser que le nom modifié d'une seule lettre de Pygmalion a justement pu servir à une société écran pour une campagne électorale. Puissance du mythe en nos époques.

    D'autres réflexions parcourent ce livre atypique. Nous en retirons le jugement qu'il s'appuie sur des données non ressassées, sur un corpus de faits qui attendent des analyses encore à faire, ce dont l'auteur semble convaincu.

    L. T.

    Guy-R Vincent, Des Substitutions comme principe de la pensée - Etude de récits mythiques grecs et sanscrits – L'Harmattan 2011, coll. Ouvertures philosophiques, 33 €.

    http://www.leblancetlenoir.com via http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2016/02/02/archeologie-de-l-idee-democratique-5754005.html

  • L’extraordinaire destin de la plus ancienne reine de France

    Mis au jour dans la crypte de la basilique de St Denis il y a plus de 50 ans, le sarcophage d’Arégonde a récemment livré de nouveaux secrets. Un trésor perdu puis retrouvé en 2003.

    http://www.contre-info.com/

  • Le sens de l’existence : fidélité, liberté, honneur, excellence

    Ce sens est défini par les quatre mots-clés qui sont : les racines, la mission, la tenue et l’exploit. Hayek montre bien que nous n’avons créé ni notre langage, ni notre raison, ni note civilisation. Comment un individu pourrait-il créer ce qui le précède ? Nous avons donc, que cela plaise ou non, un héritage qui est constitutif de notre être. Sans cet héritage, comme on l’a vu avec les « enfants sauvages » perdus en forêt et élevés par des animaux, notre personnalité et notre raison même seraient inexistantes. — Par Ivan Blot, homme politique, philosophe, écrivain, essayiste.

    On peut considérer que puisque nous avons un héritage, nous devons en remercier nos ancêtres et notre nation et ne pas être ingrats. Qui dit héritage dit histoire et l’homme pleinement homme a une « conscience historique » à l’inverse de l’animal.

    Les racines de l’existence, la fidélité

    Qui dit héritage et histoire dit donc « fidélité ». Les mots « foi » et « fidélité » ont une commune origine. Un homme « sans foi ni loi » est un homme à qui l’on ne peut pas faire confiance. Du point de vue éthique, la fidélité est donc une vertu fondatrice.

    Mais il y a plus, car les traditions qui constituent notre héritage contiennent un savoir, une sagesse énorme sélectionnée par des siècles de pratique de millions d’hommes. Se priver de cet héritage en voulant faire table rase (tabula rasa) est donc un acte absurde et suicidaire. La sagesse des traditions est plus grande que celle de l’individu limité dans le temps et dans ses capacités rationnelles individuelles. L’orgueil individuel est donc stupidité. Les tentatives de tout refaire à nouveaux frais et d’éradiquer les traditions s’appellent historiquement des « révolutions ». Les révolutions permettent à la barbarie présente dans le cerveau primitif de l’homme de réapparaitre. C’est pourquoi elles mènent au sang et aux meurtres. L’homme a toujours le choix entre sauvagerie, barbarie et civilisation et la tâche de préserver et d’accroitre la civilisation n’est pas une tâche anodine, elle est vitale. Le rejet des traditions est en effet mortel, mort lente ou rapide selon les cas.

    Ce qui fait la différence entre l’animal et l’homme, ce sont donc les traditions, elles-mêmes évolutives par petites touches à travers les événements historiques. Au mot racine, on peut donc associer le mot FIDÉLITÉ, condition même de la pérennité de la vie et de l’apparition de l’existence comme mode de vie spécifiquement humain.

    La mission de l’existence, la liberté

    Comme tous les philosophes existentiels l’ont compris de Pascal à Kierkegaard, de Nietzsche à Heidegger, l’homme peut mener une vie sans existence authentique et se laisser balloter de plaisirs fugaces en plaisirs fugaces. Il peut aussi refuser cette vie limitée au « divertissement » (Pascal) et mener une existence éthique (Kierkegaard). Il peut, comme l’écrit Heidegger, être simplement jeté dans le monde (il l’est toujours d’ailleurs au départ) ou « missionné ». C’est la conscience et le sentiment d’avoir une mission à réaliser sur terre qui distingue le plus l’homme de l’animal. Pour choisir cette mission, l’homme peut tenir compte ou non de ses racines, voire les rejeter au prix d’une énorme perte d’information. C’est en cela que l’homme est doué de LIBERTÉ.

    Mais la liberté conduit, comme l’a écrit le tragédien grec Sophocle, sur le chemin du bien comme sur le chemin du mal. On peut choisir une mission de rebelle (Al Capone) ou de révolutionnaire (Pol Pot, Fouquier-Tinville). On peut aussi choisir une mission humanitaire et croire naïvement que le bien naît seulement du bien à l’encontre d’Héraclite qui proclamait l’unité des contraires. La réalité est que la paix créé la guerre et que la guerre créé la paix. C’est pour cela que le Christ dans Sa sagesse affirme ce qui peut paraitre scandaleux : « Je suis venu apporter non la paix mais l’épée ». On peut enfin estimer que la mission est de faire fructifier l’héritage de sa civilisation au lieu de la renier et s’engager sur la voie du dépassement de soi-même vers le bien, par des actes créateurs, où l’homme devient « co-créateur » du monde (Nicolas Berdiaeff). Le fait d’avoir une mission donne du sens à l’existence et la rend plus belle, ce qui n’exclue pas le tragique. Elle permet de s’élever sur le chemin qui va de la bête vers le héros. L’existence peut être comme disait De Gaulle : « sans caractère, morne tâche d’esclave, avec lui, jeu divin du héros ! »

    La tenue, l’honneur

    La mission, qui est liberté, vous contraint à la tenue, qui est devoir et discipline. La tenue est ce qui vous empêche de déchoir. Elle est associée au sens de L’HONNEUR. Le héros qui a le choix entre se planquer ou affronter un ennemi supérieur en nombre, a de la tenue, il est honorable. C’est pourquoi la condition militaire a toujours été honorée dans l’histoire. Il fallait autrefois faire le métier des armes pour pouvoir être anobli. Le proverbe « noblesse oblige » exprime ce sens de l’honneur. La noblesse ne mendie pas des « droits » mais revendique au contraire des devoirs. Elle permet ainsi à l’homme de sortir de lui-même, de cet égocentrisme de petit enfant car à l’intérieur de l’homme privé de lumière extérieure, il n’a que de la boue, comme l’a justement écrit feu le philosophe Jean-François Mattéi (si l’on entend par « boue » les pulsions incontrôlée du cerveau reptilien).

    Nietzsche a écrit : « l’homme est une corde tendue entre la bête et le surhomme » où le surhomme selon lui, devait remplacer Dieu, qu’il croyait mort dans la conscience des hommes. En effet, sans l’idéal apporté par la « mission », la tenue disparait et l’homme régresse vers l’animalité ou vers la barbarie. Mais il est difficile à l’individu isolé, très faible qu’on le veuille ou non, de tenir son poste et sa mission, et de conserver la tenue, sans institutions extérieures pour le pousser à s’élever. L’homme a besoin de traditions, et dans ces traditions, il y a les institutions. C’est pourquoi, lorsque un peuple est vaincu, le vainqueur retire souvent au vaincu ses institutions et traditions propres. Il lui brise ainsi les reins.

    L’exploit, l’excellence

    Pourvu d’une mission, marque de liberté, et d’une tenue, donc du sens de l’honneur, la personne est appelée à accomplir des exploits. Cela peut être des actes héroïques mais cela peut aussi être des actes créateurs (les symphonies de Beethoven). Les actes en question sont aussi des actes d’amour : l’amour créé du nouveau, des êtres ou des œuvres. Sans amour, l’homme est condamné à la stérilité, dans tous les sens du terme, stérilité biologique ou stérilité culturelle. Pour qu’il y ait exploit, il est nécessaire de rechercher l’excellence, vertu majeure des anciens Grecs. Tout se tient : pas d’excellence sans tenue, capacité de se dépasser. Pas d’excellence sans une mission inspiratrice. Pas d’excellence sans puiser dans l’héritage immense des racines, des traditions. Racines, mission, tenue et exploits forment le quadriparti de l’existence. L’existence est plus que la vie.

    Ivan Blot

    Source : Institut Iliade

    http://reconquetefrancaise.fr/le-sens-de-lexistence-fidelite-liberte-honneur-excellence/

  • Royalistes, AU TRAVAIL !

    LA CELLULE D’ÉTUDE, INSTRUMENT DE RECONQUÊTE

    Quelle action politique pour notre XXIe siècle ? Loin des solutions faciles et artificielles, l’UCLF prône le travail, la persévérance, l’exemple ; bref : l’effort sur soi. En effet, peut-on sérieusement désirer réformer la société ― donc les autres ― sans commencer par se réformer soi-même ? Effort dans l’étude de ce qu’est la monarchie traditionnelle, pour mieux la faire connaître. Effort dans la prise de responsabilités au sein de la Cité, pour donner l’exemple d’une bonne autorité et la faire aimer. Efforts qui sont autant de conditions à la reconquête des esprits et des cœurs.

    Quel est le programme politique des légitimistes ? Retour à la table des matières

    Avant de répondre il faut préciser deux points :

    Ni l’Union de Cercles Légitimistes de France, ni Vive le Roy (sa bibliothèque), ne constituent des partis politiques. Le mot même de parti est aberrant si l’on pense que l’objet de la politique est le bien communde la Cité et non celui de l’une de ses parties. Nous nous demandons toujours par quelle alchimie mystérieuse, au soir des élections, à 20h00 très précisément, le candidat d’un parti se transmute en un instant ― du moins l’assure-t-il ― en « président de tous les Français » !!! Est-ce crédible ?

    La démocratie fausse sournoisement les cartes car, avec son égalitarisme, tout un chacun est appelé à donner son avis sur des décisions politiques qui demanderaient à des experts des années de travail. La situation est analogue à celle d’un malade, qui au lieu de consulter un médecin, confierait sa santé à une assemblée égalitaire où la voix du spécialiste pèse autant que celles des ignorants ! En fait, c’est pire que cela : nous confions la santé de notre société à l’opinion, jouet de la propagande des idéologies et des féodalités financières. Si nous sommes royalistes, c’est justement pour ne plus faire de politique à un niveau qui n’est probablement pas le nôtre, pour que cet art difficile soit pris en main sérieusement par des ministres choisis par le roi pour leurs compétences, comme cela était le cas dans l’Ancienne France.

    Dans ces conditions, il nous est impossible de proposer un programme politique à la manière d’un parti : nous n’avons ni une connaissance exhaustive de la situation, ni forcément le ou les remèdes, et nous nous méfions des « ya qu’à ».

    En revanche, nous avons des principes d’action qui sont ceux de la monarchie traditionnelle. Entre autres :

    • Restauration de l’autorité (de Dieu par le sacre et autres manifestations publiques, du roi, et de ses représentants, du prêtre, du père de famille), et reconnaissance publique de la dignité de toute personne qui travaille pour le bien commun.
    • Promotion de la famille.
    • Décentralisation, toujours dans l’esprit de responsabiliser les hommes pour les faire participer au bien commun : autonomie des provinces qui la désirent, constitution de corporations pour les métiers qui le souhaitent...

    Mais alors, quelle action concrète proposez-vous ? Retour à la table des matières

    Tout d’abord soulignons que notre objectif n’est pas de faire une « contre-révolution », mais le contraire d’une révolution, autrement dit : partir de la situation actuelle et réformer progressivement la société, l’infléchir par le biais de lois, d’incitations, d’aides ...

    Cependant, soyons réalistes : nous n’en sommes pas encore là.
    Les sciences humaines nous révèlent l’instabilité d’un gouvernement qui n’a pas l’assentiment des élites du pays et celui d’une portion critique de population favorable.
    Or l’esprit égalitaire a tout infecté, pire ! la démocratie a entretenu les intelligences dans l’illusion que le “TOUT, TOUT DE SUITE” était possible par le vote, sans autre effort que des campagnes électorales bien menées.
    L’histoire montre qu’aucune lutte démocratique n’a jamais donné aux tenants du Droit naturel (catholiques, monarchistes... ) l’accès au gouvernement : nombreux sont ceux qui ont perdu leur âme et celles de leurs enfants pour ne l’avoir pas compris, et cela dans des conditions autrement plus favorables qu’elles ne le sont aujourd’hui (rappelons nous la triste affaire du Ralliement de l’Église à la République de Léon XIII).

    Aussi, est-il intéressant de nous pencher sur la façon dont la Révolution a triomphé en 1789.
    À cette date les esprits étaient mûrs : ils avaient été travaillés pendant tout le siècle par ce que Augustin Cochin appelle les « sociétés de pensée » qui avaient envahi tout le Royaume.
    Pendant un siècle nos adversaires avaient distillé sans relâche, au sein de petits groupes, la passion de l’égalité et l’horreur de l’autorité. Ce travail, s’il était secret ou au moins discret, fut titanesque tant par l’intensité que par la durée. Nombre de ceux qui l’avaient initié sont morts sans en avoir vu les fruits.

    C’est donc le chemin de la conquête des intelligences et des cœurs que les légitimistes proposent. Cette solution est certes austère, mais réaliste, honnête et s’impose comme un devoir :

    • À la passion de l’égalité opposons la raison, d’où la nécessité de l’étude.
    • À la haine de l’autorité opposons l’amour en commençant par nous réformer nous-mêmes : là où nous vivons, prenons des responsabilités, donnons l’exemple d’une autorité bienveillante, ferme mais humble, soucieuse du bien commun, et elle même soumise à son autorité immédiate.

    Pour utiliser la raison il faut apprendre ; pour aimer la monarchie et la faire aimer, il faut la connaître ; l’étude est donc incontournable.
    L’UCLF propose la multiplication de cellules d’étude sur tout le territoire.

    Il s’agit ni plus ni moins que de rendre la monarchie traditionnelle familière et désirable à nos contemporains, de leur en montrer l’harmonie, la beauté, la bonté, la nécessité par la raison et par l’exemple.

    Qu’est-ce qu’une cellule d’étude ? Retour à la table des matières

    Contrairement à une société de pensée dont l’objet est d’élaborer une vérité commune aux membres, la cellule d’étude a pour objet la soumission au réel par l’étude de ce qui est : le meilleur service que nous pouvons rendre à la vérité est de ne pas la travestir.

    Il s’agit de former des royalistes autonomes et responsables, capables d’apporter des réponses à des situations concrètes à la lumière de bons principes.

    Au début, deux ou trois personnes suffisent à former une cellule ; plus tard, on peut élargir le groupe par cooptation à six ou dix mais pas plus. Au delà, certaines personnes ont du mal à prendre la parole.

    Le responsable de la cellule est de préférence le fondateur (ou la fondatrice) ou l’autorité désignée par le président de cercle (quand celui-ci existe déjà).

    Lorsque les membres sont suffisamment formés (au moins 2 ans si les réunions sont régulières), ils quittent la cellule pour en former de nouvelles ou agir dans le cadre d’un cercle.

    En quoi consiste une réunion de cellule ? Retour à la table des matières

    Une fréquence d’au moins deux réunions par mois est nécessaire pour obtenir des résultats satisfaisants

    Une séance dure aux environs de 2 heures (bien essayer de s’en tenir à cette durée car des séances trop longues risquent de décourager certains membres).

    Même si plusieurs membres de la cellule ne sont pas croyants, il est bon de se reconnaître soumis au principe d’autorité, en commençant la réunion par une prière à Dieu, Source de l’autorité. De même, il est souhaitable de placer la cellule sous la protection d’un saint patron.

    En première partie (environ 15 à 20 min) on peut faire une petite revue de presse ou/et communiquer des informations, de préférence locales (Les membres de la cellule vivent dans un milieu bien concret).

    La seconde partie consiste à faire la lecture commentée d’un texte. Pour des débutants, on peut tout à fait se contenter d’une lecture simple.

    Le site viveleroy.fr rassemble des documents facilement imprimables à partir de votre navigateur et qui sont autant de supports à l’étude en cellule. Mieux ! l’UCLF propose un programme d’étude en trois cycles à cette page.

    S’efforcer d’entretenir une ambiance amicale et sereine : chasser l’orgueil, pas de compétition, mais le souci permanent d’expliquer ou de chercher si on n’a pas immédiatement la réponse. Quand cela est nécessaire, il ne faut pas hésiter à se reprendre mutuellement, tant sur la forme que sur le fond, en veillant à donner les explications avec tact et charité, et toujours en respectant l’autorité.

    La méthode est-elle efficace ? Retour à la table des matières

    Depuis vingt ans, cette méthode a fait ses preuves : si elle est peu valorisante dans un premier temps et demande de la persévérance, elle est formidablement efficace. Les progrès sont sensibles dès la première année. Elle permet en outre de nouer de solides amitiés.
    Plusieurs textes du site Vive le Roy ont ainsi été écrits par des membres de cellules.

    Les cellules d’étude légitimistes ont d’abord été cantonnées dans l’Ouest, berceau de leur fondation. L’outil internet permet maintenant leur essaimage à l’ensemble du pays. La multiplication des études augure donc des fruits abondants d’ici à quelques années...

    ... à la Grâce de Dieu.

    http://www.viveleroy.fr/Royalistes-AU-TRAVAIL,53

  • 1453 : Fin de la guerre de Cent ans

    Pas à pas, Charles VII force l'Anglais à rentrer chez lui. Tandis qu'il lui reste à reconquérir la Guyenne, la rencontre finale a lieu sur la Dordogne le 17 juillet.

    Sa victoire lui permettra de mettre fin à la guerre de Cent ans.

    Cette année-là, la trente et unième de son règne, Charles VII, cinquante ans, en reprenant la Guyenne, mettait fin à la guerre de Cent ans. On a trop souvent médit de ce roi, le taxant d'ingratitude à l'égard de sainte Jeanne d'Arc, laquelle, le retirant du fin fond du gouffre, lui avait permis d'être sacré à Reims le 17 juillet 1429 et de reprendre ainsi, fort de sa légitimité affirmée et affermie, la lutte contre les Anglais toujours trop présents sur le sol de France.

    L'oeuvre de Jeanne

    On ne saurait nier que l'arrestation de la Pucelle par les ennemis avait jeté dans les armées royales un découragement profond, d'autant plus cruel pour le roi que le procès qu'intentait à Jeanne une assemblée ecclésiastique, avec la complicité de l'évêque félon Cauchon et de l'université de Paris, donc avec les apparences de la légalité, le visait personnellement. À cela s'ajoutait le fait que Paris était toujours aux mains de Philippe le Bon, duc de Bourgogne, allié des Anglais.

    Charles VII avait peu de moyens pour mener la grande politique qu'il eût fallu. Il n'en continua pas moins l'oeuvre de Jeanne, laquelle n'avait pas apporté le salut mais seulement remis en place l'instrument du salut. Le reste devait encore être gagné : "Aide-toi, le Ciel t'aidera"...

    Le roi reconquit bientôt les territoires du Nord. Son rapprochement, tant souhaité par l'héroïne, avec le duc de Bourgogne, effaçant quelque peu dès 1435 (traité d'Arras) une animosité sanglante de trois générations entre descendants de Charles V, fut un succès pour l'unité nationale.

    Car tout en forçant pas à pas, mais prudemment, l'Anglais à rentrer chez lui, Charles VII s'appliquait à restaurer la France ruinée par la douloureuse incapacité de son père Charles VI. Les décennies d'après 1430 virent un remarquable redressement des finances grâce à l'aide avisée du financier berrichon Jacques Coeur, nommé grand argentier en 1440, puis membre du conseil du roi deux ans plus tard. On ne peut ici passer sous silence le rôle de la riche belle-famille du roi, son épouse Marie d'Anjou, sa belle-mère Yolande d'Aragon, ni celui d'Agnès Sorel, splendide maîtresse de Charles VII...

    Pour accomplir un véritable redressement il importait que fût rétablie l'intégrité du territoire national. Paris avait été repris sans trop de difficultés en 1436. Furent peu à peu libérés Dieppe, Eu, Aumale... Puis en 1449, Charles VII put commencer une grande offensive sur la Normandie qui aboutit à la victoire de Formigny (15 avril 1450). En vrai Capétien, entrant dans Rouen - c'était tout un symbole ! - il accorda des lettres de rémission et déclara maintenir les libertés et franchises des villes.

    Parvenu dans la ville même du procès et de l'immolation de 1431, il put enfin entreprendre de faire éclater la vérité sur Jeanne : il s'empressa alors de confier à Guillaume Bouillé, membre de l'université de Paris, le soin de faire interroger les témoins. Un procès de réhabilitation qui devait aboutir entièrement dès 1456.

    La bataille de Castillon

    Restait à reconquérir une province où les Anglais se croyaient chez eux depuis trop longtemps : la Guyenne. Le 17 juillet 1453 la rencontre finale eut lieu à Castillon sur la Dordogne entre 6 000 soldats français commandés par le maître de l'artillerie Jean Bureau et 4 000 soldats anglais commandés par John Talbot. Les Français perdirent une centaine d'hommes, les Anglais 4 000... Comme à Formigny, le canon joua un rôle décisif. Aussitôt après, les villes gasconnes se rendirent, dont Bordeaux le 17 octobre.

    C'en était fini pour longtemps des prétentions de la Maison anglaise de Lancastre au trône de France. La guerre dite de Cent ans était close. Crécy, Poitiers, Azincourt étaient effacés ! Seule la ville de Calais restait anglaise.

    Charles VII, la paix rétablie, entreprit avec une autorité non de contrainte mais d'attraction de limiter les pouvoirs des grands féodaux en créant les parlements locaux (cours de justice). Il créa les premiers offices, embryon de la fonction publique, soutint la prospérité économique et orienta le commerce extérieur en direction de la Méditerranée (la Renaissance n'était pas loin...). Comme l'écrit le duc de Lévis Mirepoix, Charles VII, qui devait mourir en 1461, « a rendu le sang libre aux veines de la France et rétabli dans ses destinées le beau royaume blessé que Jeanne d'Arc avait remis entre ses mains ». Le turbulent dauphin Louis allait hériter d'une heureuse situation quand il deviendrait Louis XI.

    L'Histoire n'est jamais de tout repos. 1453 vit la délivrance de la France, mais en même temps, de l'autre côté de l'Europe, la prise de Constantinople par les Turcs...

    Michel Fromentoux L’ACTION FRANÇAISE 2000 du 1er au 14 avril 2010

  • Pour le roi à venir | Par Pierre Hillard.

    "Le peuple qui a fait alliance avec Dieu aux fonts baptismaux de Reims se convertira et retournera à sa première vocation."

    L’assassinat du roi Louis XVI était une rupture nécessaire afin d’instaurer un contre-modèle au baptême de Clovis. En remplacement du lieutenant du Christ, intermédiaire entre le Ciel et ses sujets, le nouveau système issu de 1789 instaurait un paradigme rompant ce lien au profit d’un nouveau Décalogue – les droits de l’homme, fruit du maçonnisme -, principe inspiré du judaïsme talmudique dans le cadre d’un noachisme ou « catholicisme d’Israël » en formation, selon l’expression du rabbin Elie Benamozegh.

    Cette bascule fondamentale prit du temps. La Renaissance et la Réforme préparèrent les esprits en faveur de la promotion de l’homme appelé à être son propre maître, sa propre loi, son propre juge. Cet esprit naturaliste s’épanouit au siècle des Lumières, contaminant jusqu’au sommet du royaume les élites du pays. Louis XVI n’échappa pas à cette refonte des mentalités. Cet homme intelligent et cultivé, comme l’ont prouvé les travaux de Paul et Pierrette Girault de Coursac, était aussi le fruit de plusieurs générations d’esprits contaminés par un idéal philosophique d’inspiration maçonnique. Comme le rappelle Mgr Delassus dans La Conjuration antichrétienne, l’aumônier du roi Louis XVI, l’abbé de Vermondans, était officier du Grand Orient de France.

    De profondes réformes politiques s’avéraient nécessaires et le monarque en était parfaitement conscient. Cependant, le passé pesait lourd en la personne du père de Louis XVI, lui-même héritier des idéaux de Saint-Simon et de Fénelon. Ce dernier était d’ailleurs le précepteur du duc de Bourgogne, arrière-grand-père de Louis XVI. Ces personnages défendaient une monarchie idéalisée mettant à l’honneur une féodalité aristocratique toute-puissante encadrant et soumettant le pouvoir royal. Les Parlements, représentant cet idéal dont le pouvoir judiciaire et législatif avait bloqué une grande partie du règne de Louis XV, avaient finalement été cassés et réorganisés par ce roi quatre ans avant sa mort en 1774. Leur rappel par le jeune Louis XVI permit le retour d’une féodalité aristocratique toute-puissante et revancharde qui bloqua toute réforme souhaitée par le monarque. Dans sa préface accordée à Herbert Van Leisen, Mirabeau et la révolution royale, Jacques Bainville n’hésite pas à écrire : « […] On s’explique ainsi ce que la politique de Louis XVI eut de décousu et d’irritant, de déconcertant et de contradictoire. Ce fut aussi puérilement réactionnaire que puérilement progressif. »

    Outre ces principes contraires aux intérêts de la monarchie, Louis XVI était marqué psychologiquement par sa mère, Marie-Josèphe de Saxe. Celle-ci était la fille d’Auguste III de Pologne, qui fut le parrain de Jacob Frank, juif faussement converti au catholicisme, et dont l’idéal à la tête de sa communauté était la « rédemption par le péché » (le frankisme). Cette perversion de l’âme doublée de l’esprit des Lumières propre au XVIIIe siècle contamina la cour de Pologne dans laquelle baignait la mère de Louis XVI. Malgré sa droiture d’intention, cette femme transmit à ses enfants une mentalité libérale conduisant à un amoindrissement de l’idéal monarchique hérité du baptême de Clovis et rappelé par sainte Jeanne d’Arc lors de la fameuse « triple donation » (Christ vrai roi de France). Tout ce passif entrait en opposition avec les grâces accordées lors du sacre à Reims, provoquant une forme de court-circuit dans le psychisme et l’âme de Louis XVI.

    Le martyre du roi épura tout cet héritage toxique et, le 21 janvier 1793, ce fils de Saint Louis alla droit au Ciel. Alors que la France s’enfonce dans les tourments conduisant à la mort de sa civilisation, que les cœurs haut placés soient assurés du renouveau en se rappelant cette phrase d’espoir du pape saint Pie X, le 29 novembre 1911 : « Le peuple qui a fait alliance avec Dieu aux fonts baptismaux de Reims se convertira et retournera à sa première vocation. »

    Pierre Hillard
    19 janvier 2016
    Docteur en science politique et essayiste
    Billet initialement publié sur Boulevard Voltaire.

    http://www.scriptoblog.com/index.php/archives/billets-d-auteurs/41-histoire5/1858-pour-le-roi-a-venir-par-pierre-hillard