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entretiens et videos - Page 834

  • L’action de Christiane Taubira est demeurée somptueusement verbale !

    Entretien avec Philippe Bilger

    L’indépendance de la justice est un terme devenu mantra. Jusqu’à quel point cette même justice peut-elle être indépendante vis-à-vis du pouvoir politique ?

     

    Vaste question. Je crois néanmoins qu’il est possible d’avoir des magistrats indépendants du pouvoir politique. Et la plus élémentaire des honnêtetés intellectuelles me conduit à affirmer que cette situation s’est considérablement améliorée depuis l’élection de François Hollande. En tant que magistrat honoraire et citoyen que j’espère éclairé, je confirme que le suivi des affaires politico-judiciaires se fait de manière plus indépendante que sous le mandat de Nicolas Sarkozy. Les magistrats ont une plus grande liberté pour instruire les affaires sensibles. La magistrature est traitée également avec plus de courtoisie et de respect. C’est à mettre au crédit de Christiane Taubira. Après, reste l’éternel dilemme : faire la synthèse entre la loi de Créon et celle d’Antigone… Pour finir, je rappellerai juste que les juges ont à éviter ces deux écueils que sont la solitude arrogante et la soumission déplorable.

     

    Christiane Taubira exige que toutes les « affaires sensibles » remontent à la Chancellerie. Simple mesure administrative ou mise au pas des procureurs ?

    Cela signifie seulement que le garde des Sceaux s’intéresse aux affaires sensibles et tient à être informé des procédures en cours. Rien de neuf sous le soleil et rien qui n’ait été la règle sous les précédents gouvernements, de gauche comme de droite.

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  • Entretien avec Jean Bricmont: « La République des censeurs ».

    Dans « La République des censeurs », qui vient de paraître*, l’intellectuel belge, Jean Bricmont, se livre à un vigoureux plaidoyer pour la liberté d’expression. Il fait une analyse extrêmement instructive des lois qui, en France, ont limité cette liberté au cours des 40 dernières années, des procès auxquels ces lois ont conduit, et de leurs effets pervers.
    M. Bricmont démontre que la « loi Pleven » de 1972 réprimant l’incitation à la haine raciale, ainsi que la « loi Gayssot » de 1990 punissant ceux qui contestent l’existence d’un quelconque « crime contre l’humanité » jugé à Nuremberg, ont introduit le délit d’opinion, ouvert la porte à des appréciations arbitraires, au deux poids deux mesures, confié aux juges la charge de dire la vérité en histoire ; en fin de compte, attisé des sentiments d’injustice et alimenté ce contre quoi elles prétendaient lutter.

    Silvia Cattori : Votre essai « La République des censeurs » ouvre le débat. Vos arguments paraissent convaincants ; et pourtant on vous a vu dernièrement très seul à les défendre à propos de l’affaire Dieudonné [1]. Comment l’expliquez-vous ? Est-ce un biais propre aux médias ? Ou serait-ce qu’une majorité des Français s’est aujourd’hui laissé convaincre que la censure se justifie pour préserver la paix civile ?
    Jean Bricmont : Je ne sais pas ce que pense la majorité des Français ; sans doute a-t-elle d’autres chats à fouetter, vu que ce genre de censure touche certains intellectuels, ou tout au plus les « fans » de Dieudonné, mais pas le gros de la population. Cependant, je doute fort que, si l’on expliquait aux Français la situation réelle de la censure dans leur pays, ils l’approuveraient, vu que la plupart d’entre eux sont « républicains » et considèrent que la liberté d’expression fait partie des fondements de la République.
    Mais le problème n’est pas non plus simplement restreint aux médias. Il y a, comme l’explique Diana Johnstone [2], une sorte de religion de la Shoah en France. Mais il faut être précis ; utiliser le mot « religion » dans ce cas ne veut pas dire nier l’événement, mais caractériser la façon dont on en parle. Le simple fait qu’il existe une loi interdisant, sous peine de sanctions pénales, de le nier et que ce soit le seul événement historique qui « bénéficie » d’une telle loi est déjà une façon de le sacraliser. Il suffit par ailleurs de voir ce qui se dit ou s’écrit sur une série de sujets qui n’ont rien à voir directement avec la Shoah, comme la sécurité d’Israël, le nucléaire iranien, les guerres humanitaires, la construction européenne et d’autres sujets encore, pour voir que la Shoah joue un rôle central dans l’imaginaire contemporain de nos « élites ».
    Contrairement au christianisme ou à l’islam, cette « religion » n’a pas grande influence sur les masses, elle est essentiellement une religion d’intellectuels et n’a pas d’implications concernant la vie personnelle des gens ; elle en a néanmoins sur leur possibilité de s’exprimer et, indirectement, de penser. Il y a d’autres « religions » dans notre culture, la psychanalyse ou le postmodernisme, par exemple, et tout cela fait penser aux cultes du déclin de l’Empire romain ; notre époque, caractérisée par le déclin de la domination occidentale sur le reste du monde peut d’ailleurs être comparée, à certains égards, à celle du déclin de l’Empire romain.
    Mais la religion de la Shoah, contrairement à celles que je viens de mentionner, a des conséquences politiques sérieuses et, à mon sens, très néfastes. Tout d’abord, la politique occidentale par rapport à la Palestine est sans arrêt « contrôlée » par le rappel de la Shoah, à laquelle les Palestiniens n’ont évidemment pas pris part, mais, et cela on ne le souligne jamais, les Européens vivant actuellement non plus - à de très rares exceptions près. Je trouve toujours très curieux que, dans une culture soi-disant dominée par l’antiracisme, on accepte implicitement l’idée d’une responsabilité collective, celle des Européens pendant la guerre -en assimilant par ailleurs occupants et occupés-, qui en plus est transmissible aux descendants.
    Mais la même chose est vraie pour les guerres humanitaires et la politique d’ingérence en général. Lors de chaque guerre, on nous présente de nouvelles « victimes innocentes », comparées aux juifs pendant la guerre, menacées de génocide par un nouvel Hitler et tous ceux qui s’opposent à ces guerres sont immédiatement traités de « Munichois » ; si l’on cherche à mettre en question, ne serait-ce que faiblement, la propagande de guerre, on est assimilés aux « négationnistes ». Pourtant, avec le temps, on s’aperçoit que cette propagande s’avère presque toujours être mensongère, le dernier exemple en date étant l’attaque chimique en août 2013 près de Damas, dont une étude scientifique démontre qu’elle ne pouvait pas être le fait du gouvernement syrien [3].
    Mais, ne serait-ce que suggérer cela au moment où on était sur le point de déclencher une nouvelle guerre, dont les conséquences étaient imprévisibles, vu l’engagement de la Russie dans le conflit, vous mettait immédiatement, aux yeux du discours dominant, dans le camp des « négationnistes ».
    Finalement, il y a la question de la liberté d’expression. Quoiqu’on pense de Dieudonné, de son humour et de ses « dérapages », il est hallucinant de voir la campagne déclenchée contre lui par tout l’appareil d’Etat, appuyée par presque tous les médias, alors qu’il n’est après tout qu’un simple individu se produisant sur scène, sans aucun parti ou mouvement derrière lui : on peut tranquillement se réjouir sur une chaîne de radio publique en imaginant qu’il soit publiquement exécuté [4], des adolescents peuvent être renvoyés de leur école et accusés d’apologie de crimes contre l’humanité pour avoir fait le geste de la quenelle, on arrive à faire licencier des gens ayant fait ce geste, entre autres exemples d’hystérie.
    Une personne raisonnable ne peut-elle pas dire, au minimum : tout ce qui est excessif est insignifiant ? Mais que font la gauche, les démocrates, les gens qui « combattent le fascisme » ? Rien ou presque ; quand ils défendent timidement la liberté d’expression, ils commencent par se mettre à l’abri en condamnant Dieudonné ou en se plaignant que les poursuites engagées contre Dieudonné lui font de la publicité. Aucune attitude de principe, du genre de celles qu’ils prennent presque automatiquement lorsqu’il s’agit des violations des droits de l’homme dans des pays ennemis de l’Occident ou lorsqu’il s’agit d’entraves à leurs opinions ou à celles de leurs amis.
    A partir du moment où bon nombre de gens, qui se pensent souvent comme étant « de gauche », ont adhéré plus ou moins inconsciemment à la religion de la Shoah, ils voient le « combat » contre les mécréants, les antisémites et négationnistes, mais aussi, par extension, les racistes, sexistes et homophobes, comme une sorte de cause sacrée. Et une fois qu’une cause acquiert un caractère sacré plus aucune règle n’est respectée ; c’est la guerre sainte ! En particulier, la liberté d’expression passe à la trappe, mais aussi l’équité dans les débats ou le simple respect des droits de la défense des personnes accusées d’avoir de mauvaises pensées.
    C’est ainsi qu’on en est arrivé à une situation absurde, où la simple défense des principes les plus élémentaires de la démocratie devient « suspecte » et « extrémiste », ce qui explique le relatif isolement médiatique auquel vous faites allusion.
    Silvia Cattori : Ne pensez-vous pas que le racisme et l’antisémitisme sont des fléaux et qu’il faut les combattre ?
    Jean Bricmont : Avant de répondre, je voudrais qu’on précise ce qu’on appelle « racisme » et « combattre ». On peut penser, pour ce qui est du racisme, à des lois discriminatoires, fondées sur le sexe, le groupe ethnique ou la religion. Pour autant que je sache, ce genre de lois n’existent pas en France, même si elles ont existé dans le passé et existent ailleurs dans le monde. On peut aussi penser aux discriminations de fait dans l’accès à l’emploi et au logement. Je ne parle pas de cela dans le livre parce que ces discriminations de fait ne sont pas couvertes par la liberté d’expression et que je ne demanderais pas mieux que de les supprimer ; mais je n’ai rien d’original à dire à ce sujet. Finalement, il y a tout ce qu’on appelle les « préjugés », c’est-à-dire les opinions que les êtres humains ont à propos des groupes auxquels ils pensent appartenir par rapport aux autres. La plupart des gens voient « leur » groupe - ethnique, religieux, sexuel - comme ayant des qualités que les autres groupes n’ont pas.
    Et, bien sûr, ces « préjugés », combinés aux relations de pouvoir existant dans une société donnée, ont des effets sur les discriminations. A partir de ce constat, il est tentant de penser que la lutte contre les discriminations passe par la répression légale de l’expression, verbale ou écrite, des « préjugés ».
    C’est cette idée qui est à la base de la « lutte contre la haine » par des voies légales. Je comprends cette tentation, mais je pense aussi qu’il faut lui résister. Le problème est qu’en s’attaquant à l’expression d’idées, on rencontre au moins trois problèmes fondamentaux :
    - La pensée humaine étant très flexible, et vu qu’on ne peut pas tout censurer, on tombe inévitablement dans le « deux poids deux mesures » et toutes les personnes censurées trouveront aisément d’autres propos aussi scandaleux que les leurs et elles se considéreront donc victimes d’injustices.
    - On rencontre aussi le problème de la pente glissante : pour que la censure soit efficace, il faut non seulement interdire les propos jugés illégaux mais aussi ceux qui s’en rapprochent, ou qui les citent, ou qui les défendent indirectement etc. Je donne de nombreux exemples de telles dérives dans mon livre.
    - Finalement, et c’est sans doute le plus important, en empêchant d’exprimer des opinions racistes, sexistes etc., on s’empêche de les réfuter. Bien sûr, je ne suis pas opposé à la « lutte » contre le racisme si celle-ci consistait à donner des arguments, de préférence en débattant de façon contradictoire avec les gens supposés être racistes. J’insiste simplement sur le fait que la censure empêche de le faire et, en rendant toute confrontation impossible, affaiblit la pensée antiraciste.
    Le soutien à la censure est d’ailleurs souvent lié à l’irrationalisme généralisé qui caractérise notre culture : presque tout le monde est convaincu que les arguments rationnels n’ont aucun effet. C’est en tout cas ce que j’entends très souvent dire quand je critique les religions ; mais quelle est l’alternative à la discussion rationnelle ? Le terrorisme intellectuel ? L’enfermement des dissidents ?
    Quoi que l’on pense d’Obama, c’est un fait que son père était Africain et qu’il a été élu deux fois président des Etats-Unis. Comment les Américains ont-il fait pour l’élire, alors qu’ils ne « bénéficient » pas de ces magnifiques lois « réprimant la haine » et qu’effectivement toutes sortes d’horreurs peuvent être dites librement dans ce pays ?
    Finalement, je remarque que l’antiracisme consiste souvent à célébrer les « autres cultures », sur le plan artistique par exemple. Mais lorsqu’il s’agit des aspirations politiques des parties non occidentales du monde qui sont presque unanimement opposées à nos politiques d’ingérence et de guerres humanitaires, presque personne n’est prêt à les écouter. Et lorsque des Iraniens, des Cubains ou des Irakiens souffrent d’embargos dont les conséquences sont bien pires que de simples discriminations, je n’entends pas beaucoup de voix antiracistes protester.
    Silvia Cattori : Que diriez-vous aux personnes dont la famille a souffert des persécutions raciales au cours de la guerre et qui trouvent insupportables que l’on nie leurs souffrances ? Le souvenir de ces souffrances n’est-il pas plus important que le principe abstrait de la liberté d’expression ?
    Jean Bricmont : Tout d’abord, la loi Gayssot ne réprime pas la négation de souffrances passées en général, mais d’un cas particulier, à savoir certains crimes commis lors de la Seconde Guerre mondiale et jugés lors du procès de Nuremberg ; en pratique, la plupart des poursuites portent sur la négation de l’existence des chambres à gaz dans les camps allemands.
    La question ici n’est pas de savoir si l’on juge, à titre individuel, les persécutions nazies contre les juifs comme particulièrement monstrueuses, mais si l’on estime que c’est à l’Etat d’imposer à tous, non seulement une vérité historique, mais aussi le fait de considérer ces persécutions comme exceptionnelles - puisqu’elles seules « bénéficient » de ce genre de lois.
    Je ne pense pas que singulariser ainsi un type de souffrance rend service à ceux qui veulent en préserver la mémoire. En effet, cela provoque un ressentiment qui, en fait, attise l’animosité contre eux, en faisant croire que « les juifs » sont plus puissants que les autres communautés.
    Mais ce qui est encore plus préoccupant, c’est que, dès qu’on interdit une certaine pensée, on attire l’attention sur elle et on encourage le scepticisme par rapport à la thèse défendue par la censure.
    Pour illustrer cela, il suffit de comparer Faurisson -et ses disciples- et Arthur Butz, qui est américain et auteur d’un ouvrage, « La mystification du 20è siècle » qui nie l’existence des chambres à gaz et dont l’édition originale en anglais date de 1976, c’est-à-dire avant les premiers écrits de Faurisson.
    Qui connait Butz ? Pratiquement personne (en dehors des cercles négationnistes) ; en effet, il n’est pas poursuivi et, donc, est presque totalement inconnu. Faurisson est constamment poursuivi et est internationalement connu. La même chose est encore plus vraie pour Garaudy ; philosophe ex-communiste, il s’était converti à l’islam et a été condamné pour négationnisme à cause de son livre sur les « mythes fondateurs » d’Israël [5] Quelle meilleure publicité pouvait-on faire à ses thèses que de le condamner ? Et cela particulièrement dans le monde musulman, où l’idée que la France est dominée par le « lobby sioniste » est assez répandue, pour ne pas dire plus.
    Sans la loi Gayssot, le négationnisme n’existerait que dans des cercles très restreints et ceux qui disent souffrir de son existence n’en auraient jamais entendu parler. C’est en substance, une des choses que Chomsky a dites lors des premières poursuites contre Faurisson, en 1981-1983. Le seul résultat en a été que Chomsky est devenu impubliable pendant plus de quinze ans en France. Ceux qui n’ont pas voulu l’écouter à l’époque font face, à travers les affaires Dieudonné, au résultat de leur dogmatisme.
    Silvia Cattori : L’évolution que vous décrivez dans le troisième chapitre de La République des censeurs [6], est-elle spécifique à la France, et si oui, pourquoi à votre avis ? Ou bien retrouve-t-on des phénomènes analogues dans les autres démocraties occidentales ?
    Jean Bricmont : Je ne peux pas répondre pour tous les pays, que je connais moins bien que la France ou la Belgique. Mais déjà en Belgique, surtout du côté néerlandophone, la situation est très différente. Bien sûr, sur le plan socio-économique, la situation est similaire, et il y a les débats habituels autour de l’immigration et du « multiculturalisme », mais il n’y a pas l’espèce de fanatisme qu’on rencontre en France, lié à l’idée qu’on « lutte » contre le mal absolu, à savoir le fascisme. Dans votre pays, la Suisse, pour autant que je puisse voir, les débats sont aussi plus apaisés qu’en France et Dieudonné n’y est pas interdit. Je n’ai néanmoins pas l’impression que cela soit dû au fait que la Suisse est dirigée par des antisémites ou qu’elle va verser bientôt dans le fascisme...
    En fait, malgré l’idée qu’elle se fait d’elle-même, la France n’est pas un pays très libéral en matière de débat d’idées et cela ne date pas d’hier : Descartes et Voltaire ont choisi de séjourner à l’étranger, où ils étaient souvent plus libres qu’en France. Beaucoup d’écrits de Diderot furent publiés après sa mort. Marx et Hugo sont venus en Belgique. Rimbaud et Verlaine ont aussi fui la France. Bref, contrairement à ce que certains croient peut-être, la censure en France n’est pas une invention sioniste.
    Mais il y a un autre facteur spécifique à la France, à savoir la « destruction de la raison » opérée par la pensée des années 1960. Je veux dire par là qu’une partie de l’intelligentsia a accepté l’idée que la vérité n’est jamais qu’un effet du pouvoir ou que les discours sont « socialement construits », sans aucune contrainte venant du monde extérieur. La formulation donnée ici est plus radicale que ce que pensaient la plupart des gens à cette époque, mais l’idéologie des années 1960 allait dans cette direction. A partir du moment où des notions comme vérité ou objectivité sont dévalorisées, il est assez tentant de faire reposer l’entièreté des discours sur des « valeurs », coupées de toute analyse du réel, et c’est ce qu’on entend sans cesse à gauche : « nous » sommes les défenseurs de « valeurs » antiracistes, féministes, de tolérance etc.
    Mais une étude même superficielle de l’histoire des religions montre qu’il est plus facile et donc plus fréquent de bomber le torse en prétendant adhérer à certaines valeurs que de faire les sacrifices nécessaires pour les mettre en application.
    Ce qui est plus grave, c’est que la mise en avant de valeurs et l’abandon de la notion d’objectivité a un impact catastrophique sur le droit. En effet, celui-ci, même s’il est fondé sur une certaine conception du bien commun, ne doit pas être confondu avec la morale. En particulier, il cherche avant tout à limiter les abus de pouvoir, dont sont trop souvent coupables ceux qui croient faire partie du camp du Bien. Dans les débats auxquels j’ai pris part sur la liberté d’expression, j’ai été frappé par l’absence totale de respect pour celle-ci précisément chez ceux qui se drapent dans leurs « valeurs », que « nous » sommes tous sommés de partager. C’est oublier que l’ordre social repose sur des règles, relativement bien définies, et non sur des valeurs dont la signification précise, quand elle existe, dépend du bon vouloir de ceux qui s’en réclament.
    Ce qui paraît a priori curieux, c’est que ce remplacement des faits et des règles par les valeurs est typique de la pensée totalitaire, alors que notre époque ne jure que par son opposition au totalitarisme. Mais si on pense à l’histoire des religions et à l’hypocrisie qui les accompagne en général, ce n’est peut-être pas si étonnant que cela.
    Silvia Cattori : La « loi Gayssot » a été adoptée en 1990 malgré l’opposition de nombreuses personnalités politiques de droite. Mais, revenue aux affaires, la droite s’est gardée de l’abolir. On ne voit pas s’esquisser d’évolution à gauche. Dès lors, d’où pourrait venir la remise en cause de ce genre de loi ? Quelles conditions devrait-on réunir ? Quel espoir peut-on entretenir à ce sujet ?
    Jean Bricmont : Je n’imagine pas, grâce à un modeste livre, changer une situation qui est le résultat de décennies d’endoctrinement à la « lutte » -par la censure ou la diabolisation- contre le fascisme, le racisme etc. J’espère, sans trop y croire, ouvrir le débat. Mais il me semble que dans l’avenir proche, les associations antiracistes vont continuer leurs poursuites et que les conflits entre « communautés », qui ont bien sûr des causes multiples, vont s’aggraver, chaque communauté considérant que “son” sacré, “sa” mémoire ou “ses” souffrances ne sont pas suffisamment respectés ou que les outrages qu’elle subit ne sont pas assez réprimés.
    Comme j’essaie de l’expliquer, la mentalité dominante à gauche, qui consiste à se voir à la fois comme représentant du Bien sur Terre et comme étant, par là même, autorisé à faire taire ses adversaires, mène à un appauvrissement considérable de la pensée. Face à toutes les contestations populaires qui se développent, bonnets rouges, manifs pour tous, jour de colère, retraits de l’école contre la théorie du genre, succès de Dieudonné, la réponse de la gauche, même « radicale », est toujours « extrême droite, extrême droite ! ». Ils ne pensent jamais à se remettre en question ou à se demander si ce n’est pas leur façon de procéder qui provoque en partie ces réactions.
    De nouveau, comparons avec la Belgique : c’est un pays qui était encore très catholique il y a quelques décennies et où le mariage homosexuel existe depuis plus longtemps qu’en France (sans mener à l’effondrement de la civilisation...), où le Premier Ministre est homosexuel et où l’euthanasie est légale ; rien de cela ne provoque les réactions furieuses auxquelles on assiste en France, où aujourd’hui l’hystérie « de droite » répond à l’hystérie « de gauche ».
    Bien sûr, je souhaite défendre les acquis des années 1960 en matière de droits des femmes, des homosexuels ou des minorités. Mais je ne crois pas qu’on y arrivera tant qu’on continuera à faire comme si l’analyse rationnelle était une sorte d’étrange passe-temps, comme le dit ironiquement Chomsky à propos de la vie intellectuelle française.
    Mon seul espoir réside chez les jeunes, où je perçois un changement de mentalité et une ouverture au débat que je n’imaginerais pas parmi les gens de ma génération, celle de 1968, qui a complété le slogan « il est interdit d’interdire » par « sauf les opinions qui ne nous plaisent pas ». Ma génération était marquée par le souvenir de la guerre et, d’une certaine façon, a voulu revivre la guerre, mais dans le fantasme plutôt que dans le réel. Il y avait aussi, dans cette génération, une sorte de révolte contre la génération précédente dont une bonne partie avait soutenu ou avait été passive à l’époque du fascisme - tout en oubliant que « combattre le fascisme » après son effondrement était considérablement plus facile qu’entre 1940 et 1945.
    Mais les jeunes d’aujourd’hui sont nés longtemps après la fin de la guerre, font face à une économie ruinée et à un enseignement à la dérive, n’ont pratiquement aucune perspective d’avenir et n’ont pas le goût de s’amuser à combattre des fantômes ou de vivre dans des fantasmes.

    Propos recueillis par Silvia Cattori

    http://www.voxnr.com/cc/dt_autres/EFAEZuFAkuterluKoj.shtml

    Source: URL : http://www.silviacattori.net/article5390.html

    (*) La République des censeurs. Editions de l’Herne, 2014.

    Professeur de physique théorique et mathématique, Université de Louvain, Belgique. Auteur de plusieurs articles sur Chomsky, co-directeur du Cahier de L’Herne n° 88 consacré à Noam Chomsky. Il a publié notamment avec Alan Sokal Impostures intellectuelles (1997), À l’ombre des Lumières avec Régis Debray (2003) et Impérialisme humanitaire (2005)
    [1] Voir :
    - Dieudonné, Taddeï, la LICRA : le jour où la liberté de pensée vacilla (17 janvier 2014)
    http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/dieudonne-taddei-la-licra-le-jour-146344
    - Jean Bricmont sur Dieudonné, Caroline Fourest et Taddéi (Vidéo) (18 JANVIER 2014)
    http://www.silviacattori.net/article5308.html
    - Quand Jean Bricmont parle de Dieudonné sans se faire couper la parole http://www.youtube.com/watch ?v=2lbpqdiTq3s
    [2] La Shoah : Religion d’Etat ? par Diana Johnstone (28 JANVIER 2014)
    http://www.silviacattori.net/article5366.html
    [3] Possible Implications of Faulty US Technical Intelligence in the Damascus Nerve Agent Attack of August 21, 2013
    https://www.documentcloud.org/documents/1006045-possible-implications-of-bad-intelligence.html
    [4] Le journaliste Philippe Tesson s’exclama sur Radio Classique : « Ce type, sa mort par un peloton de soldat me réjouirait profondément ! », avant d’ajouter que « c’est une bête immonde, donc on le supprime. C’est tout ! »
    [5] « Les Mythes fondateurs de la politique israélienne ». Publié en 1995 par les éditions La Vieille Taupe, réédité en 1996 à compte d’auteur « Samizdat Roger Garaudy » lui a valu d’être condamné, en 1998, pour « contestation de crimes contre l’humanité, diffamation raciale et provocation à la haine raciale ».
    [6] Jean Bricmont écrit page 125-126 : « Pendant longtemps, la censure a été « de droite », en ce sens qu’elle était exercée par l’Église, l’armée ou des chefs d’États plus ou moins autoritaires. […] Ce n’est qu’à partir des années 1980, avec l’arrivée de la gauche au pouvoir, la naissance de la « lutte contre le racisme » et les procès contre les négationnistes, que la censure a changé de camp et est devenue « de gauche », tout en étant acceptée, même si c’est sans enthousiasme, par la droite « démocratique ». À partir du moment où ce basculement a eu lieu, la défense de la liberté d’expression est devenue « suspecte » de sympathies pour l’extrême droite. » M. Bricmont attribue ce basculement à l’abandon par la gauche de son ambition de transformation du capitalisme, de sa défense de la souveraineté nationale, et sur le plan international de sa lutte pour la paix et contre l’impérialisme. Pour justifier ces abandons, la gauche, a dit-il « inventé la gauche morale », et s’est lancée dans un combat imaginaire en prétendant se mettre à « lutter contre le fascisme » plusieurs décennies après la fin de la guerre.

  • Le dogme islamique est difficilement compatible avec l’État de droit

    Entretien avec Oskar Freysinger

    Dimanche 9 février, les Suisses devront se prononcer « contre l’immigration de masse ». Votre parti, l’UDC, demande que la Suisse limite l’immigration en revenant au système des contingents et renégocie la libre circulation des personnes avec l’Union européenne. Le scrutin s’annonce serré… Pourquoi cette volonté de limiter l’immigration ?

    Parce que le déplacement en masse de nomades du travail met en concurrence les plus faibles d’un pays contre plus faible qu’eux. Les classe moyennes fondent, les prix explosent et le pouvoir d’achat diminue. Un pays souverain doit pouvoir disposer d’un moyen de régulation des flux migratoires.

    Une plainte a été déposée contre l’affiche que vous avez réalisée en vue des votations. « Bientôt 1 million de musulmans ? Par conséquent : stop à l’immigration de masse », peut-on y lire. Le texte est illustré par une courbe en hausse exponentielle et une silhouette en burqa. Pour Matthias Bertschinger (Vert), « cette affiche dépasse non seulement les limites du bon goût, mais constitue aussi une discrimination raciale. On suggère dans cette affiche que les musulmans sont un danger pour la Suisse. Ceux-ci sont donc stigmatisés et blessés dans leur dignité », a-t-il estimé.

    Le dogme islamique est difficilement compatible avec l’État de droit en bien des points. Il faut donc éviter le communautarisme et l’établissement de sociétés parallèles. En régulant l’immigration, on peut augmenter la qualité de l’intégration. C’est une question de survie pour notre culture occidentale.

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  • Une résistance qui annonce le réveil de la France

    Le Salon Beige a interrogé Geneviève Esquier, qui vient de publier un ouvrage « Ce qu’annonce le chant du coq. On se rendort ou on se réveille ?»   (en lien dans notre colonne de gauche).

    Geneviève Esquier vous êtes journaliste de métier et essayiste. Vous avez publié, entre autres livres, aux éditions F.X. de Guibert (Paris), une « Lettre aux Chrétiens de France sur le baptême de Clovis » où vous évoquiez la vocation de la France. Etant donné l’état actuel du pays, y croyez-vous toujours ?

    Plus que jamais ! La mobilisation de 2013 l’a prouvé. Ce livre veut justement montrer que nous sommes à la veille - ­en tout cas à l’avant-veille - d’une grande aurore métaphysique qui d’ores et déjà devrait nous emplir le cœur d’une immense et joyeuse espérance !

    La machine politique était bien huilée. Tout était en place pour faire changer la France de civilisation sans que l’on s’en aperçoive. Mais un grain de sable est entré dans les rouages…

    De toutes les provinces le pays s’est levé pour rejoindre Paris par trois fois, entre le 13 janvier et le 26 mai 2013… Mobilisation incroyable, inattendue, révélatrice d’une force vive qui couvait malgré le mensonge de medias aux ordres ! La France profonde s’est réveillée !

    CC’est ce que suggère le titre de votre nouveau livre: « Ce qu’annonce le chant du coq » ? 

    Oui, tout-à-fait ! Le coq, sa particularité est d’annoncer l’aurore, dressé sur un tas de fumier dans la nuit encore noire.  Est-ce que ce n’est pas notre situation actuellement ? Nous qui avons entamé une résistance qui ne lâchera rien, le coq gaulois n’est-il pas notre emblème ? l’emblème d’une espérance contre toute espérance ! Une espérance qui a déjà gagné la partie : l’aurore est inéluctable !

    Vous rappelez dans votre livre, le conseil du pape François aux Chrétiens que nous sommes : « les laïcs ont le devoir de s’engager en politique » et vous appelez à incarner  la résistance sur le terrain du Bien commun, en entrant en politique…

    Oui : pourquoi et comment incarner notre résistance dans l’action sur le terrain, en vue du Bien Commun politique ? Ce livre veut répondre à cette interrogation et montrer que pour refonder la politique, les élections municipales qui approchent sont une opportunité providentielle !

    http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html

  • Marion Sigaut: « L’attaque contre le bon sens commun et la morale publique me semble absolument sans précédent dans l’Histoire »

    Bonjour Marion Sigaut

    Vous êtes historienne, spécialisée dans le XVIIIème siècle. Vous vous êtes fait connaître en donnant de nombreuses conférences sur le thème des Lumières  en donnant un éclairage différent de celui qui est communément admis en révélant les véritables origines de ce mouvement qui influa sur la révolution de 1789.

    C’est dans cette perspective révolutionnaire que nous voudrions aujourd’hui nous entretenir avec vous pour comprendre dans quel terreau ont pris racine les événements des révoltes passées pour tenter de percevoir si des similitudes peuvent apparaître dans la situation actuelle.

    MPI :Vous avez participé à la manifestation « Jour de Colère » qui agrégeait de nombreuses organisations et causes disparates, (religieuses, fiscales, sociales…) qui en temps habituel auraient peu de chances de se retrouver à défiler ensemble et qui pourtant ont trouvé suffisamment de motifs pour se regrouper contre la politique gouvernementale. Peut-on trouver dans l’histoire un ou des exemples similaires à ce à quoi nous assistons aujourd’hui où divers mouvements et communautés ont pris soin de s’unir contre un pouvoir ou s’agit-il d’un phénomène nouveau qui n’a jamais eu cours dans le passé ?

     Marion Sigaut : Il est très difficile de répondre à une question de ce type. Je me suis spécialisée dans une période très circonscrite et ne peux guère parler pour les autres.

    En revanche, je peux dire que, dans l’affaire des enlèvements d’enfants (sujet de La Marche rouge), on voit une unanimité de la population pour empêcher les enlèvements. Le domestique, l’artisan, monsieur le duc, l’avocat, le boulanger, le portier, le cocher, l’huissier, la poissonnière, y compris même certains des policiers recrutés pour la chose, absolument tout le monde a pris le parti de la défense des enfants et des parents affolés. Les « collabos » des enlèvements sont des gens recrutés pour leur vilenie, qui n’a pas de métier ni de classe sociale.

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  • J.O. de Sotchi : un enjeu géopolitique ?

    Entretien accordé par Arnaud Leclercq à La Voix de la Russie le 28 janvier 2014 sur le sujet des J.O. de Sotchi.

    Je crois comprendre que quoi que fasse la Russie, elle sera toujours considérée comme coupable. Si elle n’était pas candidate et si elle n’avait pas remporté l’organisation de ces Jeux, on lui reprocherait très probablement de ne pas prendre d’initiative, et maintenant qu’elle l’a fait et qu’elle l’a bien réussi, on lui reproche de trop en faire.

    La Voix de la Russie : Qu’est-ce qu’en fait que ces Jeux ? Un enjeu politique ou juste de la chronique sportive ?

    Arnaud Leclercq : L’enjeu est avant tout sportif mais déborde sur la géopolitique. Tout d’abord, pour noter ce que l’on vous reproche très souvent et ce que l’on entend dans les journaux occidentaux, je crois comprendre que quoi que fasse la Russie, elle sera toujours considérée comme coupable. Si elle n’était pas candidate et si elle n’avait pas remporté l’organisation de ces Jeux, on lui reprocherait très probablement de ne pas prendre d’initiative, et maintenant qu’elle l’a fait et qu’elle l’a bien réussi, on lui reproche de trop en faire. C’est une première remarque préliminaire pour relativiser certaines critiques que l’on entend. Ensuite on peut quand même aussi rappeler que la Russie participe aux Sports d’hiver depuis 1956, époque de l’URSS, et qu’elle est probablement le pays qui a remporté le plus de médailles avec la Norvège et le Canada. Il est donc assez légitime que ce pays du Nord – même si les Jeux se passent à Sotchi – remporte ces JO d’hiver pour y avoir participé depuis longtemps et avoir gagné beaucoup de médailles.

    Ensuite le choix de Sotchi peut paraître étonnant, mais il n’y a pas énormément d’endroits où aller faire ces Jeux en Russie… entre l’Altaï, par trop éloigné des régions développées et l’Oural qui est trop bas. Il faudra peut-être rappeler aussi quelques leçons de géographie de base à ceux qui font cette critique aux organisateurs. Enfin concernant cette remarque préliminaire sur toute l’organisation et l’infrastructure réalisée, je crois que la Russie, comme la Chine avant elle et d’autres pays, a d’abord répondu aux règles qui lui ont été imposées par le Comité Olympique. Cet organisme a des critères extrêmement élevés aussi bien qualitatifs que quantitatifs.

    Alors je crois que la Russie, comme n’importe quel pays qui a gagné, a tout simplement tenu ses engagements vis-à-vis du Comité Olympique afin de construire tout ce qu’il fallait. Je l’ai dit pour remettre l’église au milieu du village et il n’y a là rien d’extraordinaire.

    Est-ce que cela déborde sur la géopolitique ? Je crois que – tout d’abord – cela déborde sur la Russie elle-même. À l’intérieur, cela déborde bien au-delà de Sotchi : c’est très important pour les Russes, parce qu’ils sont très fiers de ces Jeux, et à juste titre, comme un Français l’aurait été si cela se passait à Albertville. Je pense que cela contribue – et c’est bien ce que l’on voit actuellement sur la scène internationale – à mettre la Russie à nouveau à une place importante et c’est celle qui très probablement lui revient, sur la scène internationale. Même si c’est un événement sportif, cela n’en reste pas moins un symbole. Et l’on sait que le grand événement sportif de ce type – prenons de façon beaucoup plus caricaturale la future Coupe du Monde au Qatar – est toujours un symbole du rôle que souhaite prendre un pays organisateur dans le monde actuel.

    Je pense qu’il faut regarder sur ce plan-là. Et l’important n’est pas seulement de participer, comme disait Coubertin, mais c’est aussi en l’occurrence, d’organiser et de le faire bien ! Le Président Poutine en a fait un enjeu personnel avec des infrastructures particulièrement spectaculaires. Cependant ce que l’on peut regretter dans tout cela, c’est plutôt la méthode. Je pense que les intentions de départ étaient très bien. Et on sait que ce chantier gigantesque a été assez difficile. Dès le départ, il y a eu un certain nombre de responsables de ce grand projet qui ont été remplacés au fur et à mesure régulièrement sans parler d’une loi spéciale qui a été faite pour toute la région de manière à finir ce chantier dans les temps. Donc, il y a, malheureusement, toute la méthode qui a dérivé contrairement aux bonnes intentions de départ. On parle aussi beaucoup de corruption plus que des résultats… Une fois encore, on mélange toujours ce résultat que je trouve vraiment remarquable et légitime et une méthode qui, pour faire tout cela est sans doute plus discutable, en tout cas, d’après ce que l’on peut deviner.

    La Voix de la Russie : Certaines compagnies financières internationales entendent investir dans le Caucase… Comme Vinci, par exemple, qui serait prête, de source non confirmée, mettre jusqu’à 1,5 milliard d’euros dans l’escarcelle. Comment trouvez-vous ces plans : est-ce un bon investissement avec un résultat garanti à la clé ?

    Arnaud Leclercq : Je crois qu’il faut toujours se méfier un petit peu des effets d’annonce. D’une part, soit ils interviennent sur commande c’est-à-dire qu’ils interviennent comme constructeurs pour réaliser un certain nombre de travaux avec un grand partenaire local avec lequel cette organisation partage l’investissement : là ce serait parfaitement quelque chose de faisable… Pourquoi pas ? Cela peut être aussi un Etat ou une région qui garantit comme les autoroutes, si vous voulez, qui se paient sur la durée.

    Mais maintenant si les grandes sociétés – et je ne peux parler bien sûr au nom de la société que vous venez d’évoquer – décident elles-mêmes d’investir des sommes très importantes pour conduire des projets avec des dimensions que l’on connaît, ça me surprend beaucoup. D’abord je ne sais pas non plus si les organismes d’assurance-exports accepteront d’assurer des projets de cette dimension, particulièrement dans une zone connue pour être politiquement encore instable, à évoquer le drame de Volgograd survenu encore récemment. J’en doute un petit peu. Mais tout dépend de la casquette que ladite société mettra pour intervenir. Maintenant le fait que ces infrastructures très impressionnantes soient construites à Sotchi est un fait positif. Je crois qu’il faut finalement s’en réjouir. Je n’ai pas de jugement à porter sur le budget de l’Etat : était-ce trop cher ? Je ne suis pas citoyen russe. J’ai la modestie de rester à ma place. Il faut voir aussi que n’importe quel autre pays a des investissements importants à réaliser. En France, quand on voit certaines mairies, certains bâtiments qui sont construits… Certes, c’est à moindre échelle ! S’il n’y en avait eu, il n’y aurait probablement aucun grand bâtiment ou grande construction dans ce monde ! Il faut également espérer que le tourisme y aille de toute la CEI pour faire vivre ces magnifiques installations et peut- être même au-delà ! Je crois qu’il faut être juste à l’égard de la Russie, pas complaisant, mais juste.

    Cadre dirigeant reconnu dans le monde de la gestion de fortune, plus particulièrement avec les marchés émergents, Arnaud Leclercq est à titre privé un spécialiste en géopolitique de la Russie. Il a publié chez Ellipses l’ouvrage La Russie puissance d’Eurasie. Histoire géopolitique des origines à Poutine.

    http://www.realpolitik.tv/2014/02/j-o-de-sotchi-un-enjeux-geopolitique/

  • François Falletti : une pierre dans le jardin de Christiane Taubira…

    Entretien avec Philippe Bilger

    Le procureur François Falletti a dénoncé dans une lettre adressée à Christiane Taubira le fait d’avoir été poussé à quitter son poste contre son gré. Un « scandale », comme le prétend l’UMP ?

    Il ne s’agit pas du procureur Falletti mais du procureur général Falletti : c’est important. C’est celui qui dirige le parquet général de la cour d’appel de Paris. Plusieurs observations. Il faut noter que du temps a passé depuis le mois de mai 2012, date de l’élection de François Hollande et de la nomination de madame Taubira au poste de garde des Sceaux, et il est très rare qu’un pouvoir politique – de droite ou de gauche – laisse si longtemps en place le procureur général de Paris et le procureur de Paris (actuellement François Molins), qui sont à la fois des postes judiciaires mais surtout des fonctions à forte tonalité politique. Sur ce plan-là, Christiane Taubira a été très habile puisqu’elle a considéré que les serviteurs judiciaires du quinquennat de Sarkozy pouvaient demeurer en place sans risque. De fait, ils n’ont pas démérité aux yeux de la gauche. Cette affaire est donc plutôt révélatrice d’un progrès au regard des postes les plus politiques dans la magistrature.

    Par ailleurs, il est quand même surprenant qu’à quelques mois de sa retraite (juin 2015), on ait décidé de prendre acte d’une différence de sensibilité politique entre Falletti et la gauche judiciaire car cette incompatibilité, à supposer qu’elle soit réelle, existe depuis le mois de mai 2012… Ça n’était donc pas une nouveauté.

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  • Nina Issakova : »La presse russe est depuis longtemps libre du contrôle des partis politiques »

    Nina Issakova est journaliste russe  à Berëzovski Rabotchii, journal régional de la région de Sverdlovsk.  Elle a répondu à nos questions sur l’état général de la presse russe aujourd’hui sous l’ère de Poutine.

    Bonjour à vous, tout d’abord voudriez-vous vous présentez, vous êtes journaliste, vous êtes russe, qui êtes-vous ?

    Mon nom est Nina Issakova. J’ai 52 ans et oui je suis Russe, j’ai effectué deux parcours universitaires, le premier comme professeure, le second comme journaliste. Je travaille comme rédactrice en chef adjointe pour le journal de ma ville Берёзовский рабочий. C’est une importante localité minière de l’Oural près d’Ekaterinbourg. Autrefois j’ai travaillé comme rédactrice dans le journal destiné aux jeunes de la ville « Фишка ». Voilà 35 ans que je travaille.

    En France et en Europe les médias expliquent en boucle à longueur de journée que les journalistes russes ne sont pas libres d’écrire ce qu’ils veulent, qu’en pensez-vous ?

    Ils n’ont pas raison. Le journalisme russe est depuis longtemps libre et indépendant. Nous sommes libres d’exprimer notre opinion, nous avons le droit de critiquer le gouvernement et le président de notre pays sans aucune crainte de poursuites. Oui dans le passé, pendant la période soviétique tout était différent : il y avait des relectures des articles des journalistes par des représentants du gouvernement, du Parti communiste au pouvoir. Il y avait même des instructions qui étaient données afin de définir ce que nous devions écrire et comment l’écrire. Mais la Russie est depuis longtemps un Etat démocratique, à cet égard beaucoup de choses ont changé, notamment dans les médias. Lors de la conférence annuelle de presse, le président Poutine répond aux questions des journalistes, ouvertement, nous pouvons lui poser n’importe quelle question. Par ailleurs, nous pouvons également obtenir de n’importe quel fonctionnaire des informations que nous pouvons diffuser à nos lecteurs.

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  • Quand Libé nous annonce une excellente nouvelle : « C’est une France maurrassienne, même sans le savoir »

    Bien sûr, l’analyse, un peu langue de bois, laisse à désirer, ...il ne faut tout de même pas en demander trop à Libé... [édition du 5 février).

    INTERVIEW de Danielle Tartakowsky, historienne spécialiste de la droite et présidente de l’université Paris-VIII, vient de publier : les Droites et la Rue. Elle juge que le recul du gouvernement au lendemain de la Manif pour tous est « sans précédent depuis le CPE » et que cela va galvaniser la France conservatrice.

    Libération - La Marche pour la vie le 19 janvier, Jour de colère le 26 janvier et la Manif pour tous dimanche sont-ils autant de symptômes d’une France radicalisée ?

    Danielle Tartakowsky - Il existe toujours une France catholique conservatrice. Il s’agit d’une France maurrassienne, même sans le savoir : on a bien vu ...

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  • Les Grands Entretiens de Novopress – Lionel Baland “Une réussite populiste, l’exemple de Jörg Haider” (3/3)

    BRUXELLES (NOVOpress) - Polyglotte, Lionel Baland, spécialiste des droites européennes, réalise depuis de nombreuses années un travail minutieux de veille et d’analyse des partis populistes en Europe. Son blog lionelbaland.hautetfort.com propose de nombreuses traductions, souvent inédites pour le public francophone. Il est l’auteur de “Jörg Haider, le phénix” paru en 2012 aux Éditions des Cimes. La première partie de cet entretien est disponible ici. La seconde partie, . Pour la troisième et dernière partie, Lionel Baland revient sur la figure de Jörg Haider. Propos recueillis par Pierre Saint-Servant.

    Lionel Baland, vous étudiez les populismes européens depuis de nombreuses années, pourquoi avoir choisi de traiter dans votre dernier ouvrage de sa dimension autrichienne, c’est à dire du FPÖ et de son leader charismatique Jorg Haider ?

    Lorsque j’étais adolescent, Jörg Haider faisait de temps à autre, lors de ses victoires électorales, la « Une » de la presse. À l’époque, peu de partis patriotiques en Europe engrangeaient des succès. J’ai suivi au fil du temps les exploits électoraux de Jorg Haider. Le samedi 11 octobre 2008, étant sorti en discothèque la veille, je me suis levé tard. J’ai alors appris le décès de cet homme extraordinaire qui a profondément modifié le paysage politique de son pays. Disposant d’un blog consacré à l’actualité des partis patriotiques en Europe, j’avais suivi au cours des semaines précédentes sa campagne électorale pour les élections législatives de 2008. J’ai relaté son décès et les événements politiques qui y ont fait suite.

    Je me suis rendu quelques mois plus tard en Carinthie, le bastion de Jörg Haider dont il a été durant de nombreuses années le gouverneur. Visitant les bureaux de celui qui à l’époque lui avait succédé et qui appartenait à la même famille politique, j’ai été enchanté par l’accueil reçu et la visite des lieux que j’ai pu réaliser avec une des proches collaboratrices de Jörg Haider. Ayant constaté qu’il n’existait pas d’ouvrage en français sur la vie de Jörg Haider, j’ai décidé d’en écrire un. Le fait que je parle le français, néerlandais, allemand et anglais m’a permis de traiter de nombreuses sources. J’ai étendu le sujet de l’ouvrage à l’ensemble de l’histoire de la famille patriotique en Autriche. Au fil de l’écriture, je me suis rendu compte que la presse francophone raconte de nombreuses inepties sur Jörg Haider.

    Le FPÖ n’est pas historiquement un parti de contestation, il a participé à plusieurs gouvernements de coalition, que ce soit avec les socialistes du SPÖ ou avec les conservateurs de l’ÖVP, ce qui est assez rare pour un parti populiste, comment l’expliquer ?

     Le FPÖ est un parti libéral qui a été membre de l’Internationale libérale. Lors de la révolution (allemande) libérale de 1848, les libéraux réclament des mesures libérales (droit d’association, de réunion,..) mais également des mesures sociales. Ils sont anticléricaux. Ils désirent unifier l’ensemble des germanophones au sein d’un État et s’opposent à l’Allemagne des princes, composée de nombreux États. La révolution libérale de 1848 échoue. Pourtant, ce sont les conservateurs, ennemis des libéraux, qui vont réaliser l’unification du pays : Otto von Bismarck forge l’Allemagne.

    Si en Allemagne, le parti libéral FDP n’est plus nationaliste, en Autriche, le parti libéral FPÖ est toujours nationaliste grand-allemand. Au sein du FPÖ, les deux ailes, la libérale et la conservatrice, ont cohabité difficilement.

    En 1986, le FPÖ est au bord de l’anéantissement électoral. Le 13 septembre 1986, lors du congrès d’Innsbruck, Jörg Haider, soutenu par la tendance nationaliste du parti, est élu à la tête du FPÖ face à Norbert Steger qui est défait. Dès la prise du pouvoir au sein du parti par Jörg Haider, le FPÖ commence son ascension électorale qui va durer 15 ans. Lors des élections législatives de 1999, le FPÖ obtient 26,9 % des voix et devient le deuxième parti d’Autriche. Au début de l’année 2000, le FPÖ et le Parti conservateur ÖVP forment un gouvernement. La pression internationale qui pèse alors sur le gouvernement est énorme. Les patriotes participent durant sept années, avec les conservateurs, à la direction du pays.

    En 2008, lors des élections législatives anticipées, les deux partis nationalistes, le FPÖ dirigé par Heinz-Christian Strache et le BZÖ fondé en 2005 par Jörg Haider, gagnent. La formation d’un gouvernement regroupant les deux partis nationalistes et le Parti conservateur est envisagée. Jörg Haider décède dans un accident de voiture. Suite à cet événement, le Parti conservateur et le Parti social-démocrate forment un gouvernement.

    Le début des années 1990 voit un véritable tournant idéologique du FPÖ sous l’influence de Jörg Haider, pouvez-vous nous en expliquer le contexte et sa concrétisation dans le programme du parti ?

    Jörg Haider attaque frontalement les deux partis du système, le SPÖ et l’ÖVP. Il réclame plus de démocratie directe. Jörg Haider exige la fin des privilèges, de la politisation et de la lotisation. Il s’érige contre la mauvaise utilisation de l’industrie étatique et en faveur d’une fiscalité plus juste, ainsi que d’une politique proche du citoyen. Il instrumentalise la question de l’immigration.

    Jörg Haider a très tôt souhaité s’ancrer localement – en Carinthie – avant de conquérir les sièges du pouvoir national, cette stratégie était-elle nouvelle en Autriche ?

    Tout homme politique qui joue un rôle au niveau national sait qu’il doit travailler le terrain au sein de sa circonscription électorale. Jörg Haider est allé beaucoup plus loin dans ce domaine. Lorsqu’il n’était pas actif au niveau national, il quadrillait le terrain en Carinthie. C’est ce qui lui a permis de jouer sur les deux tableaux. Il s’est servi au niveau national de la Carinthie, dont il a été gouverneur, en tant que vitrine de ses réussites. D’autre part, cette situation lui a permis de se retirer, quand il le désirait, de la politique nationale pour ensuite y revenir.

    Des parallèles peuvent-ils être établis entre la stratégie de conquête du pouvoir de Jörg Haider dans les années 1990 et celle conduite par Marine Le Pen actuellement en France ?

    Le FPÖ, dirigé par Heinz-Christian Strache, et le Front National entretiennent des relations. Les deux partis échangent des informations à propos de leurs actions politiques. Le FPÖ bénéficie d’une longue expérience du pouvoir au niveau local, régional et national alors que le Front national a été privé, à l’exception de la gestion de quelques mairies, de tout accès à des exécutifs. Cependant, le système politique et la société sont totalement différents au sein des deux pays et la situation, tant du point de vue du chômage, de l’exclusion sociale, de l’immigration et de la délinquance, est nettement moins grave en Autriche. Jörg Haider en tant que gouverneur de Carinthie était le dirigeant d’un Land, c’est-à-dire d’un État. Il n’existe pas de situation comparable au sein de la France centralisée.

    Si des parallèles peuvent être établis entre l’action politique de Jörg Haider et celle de Jean-Marie Le Pen, il n’y a pas, par contre, vraiment de points communs avec celle de Marine Le Pen. La personne à laquelle Marine Le Pen peut être comparée est Pim Fortuyn, personnage peu connu en France mais qui a joué un rôle au sein de la politique néerlandaise avant d’être assassiné en 2002. Curieusement, le nationalisme aux Pays-Bas a connu un développement similaire à celui de la France.

    Le 11 octobre 2008, Jörg Haider se tue en pleine nuit au volant de sa voiture. Le pouvoir judiciaire et les médias autrichiens invoquent une forte consommation d’alcool et une vitesse excessive. De nombreuses zones sombres entourent cet accident, vous faites partie de ceux qui contestent la thèse officielle, pourquoi ?

    Jörg Haider décède alors que les deux partis nationalistes viennent de gagner les élections et qu’un gouvernement regroupant les conservateurs et les nationalistes peut voir le jour. La Volkswagen Phaeton conduite par Jörg Haider est une des voitures les plus sûres du marché, prévue pour que le conducteur puisse survivre lorsque la voiture heurte un pilier en béton. Or, près de l’endroit de l’accident il n’y a pas d’élément en béton ou en pierre. Les dégâts occasionnés à la voiture ne correspondent pas au lieu de l’accident. Jörg Haider, qui était un homme politique hors du commun et dont toute l’existence a été orientée vers cette activité, savait que s’il était contrôlé par la police avec un fort taux d’alcoolémie, cela signifiait la fin de sa carrière politique. C’est ce qui était d’ailleurs arrivé à un de ses plus proches amis politique, Reinhart Gaugg.

    L’influence politique de Jörg Haider au niveau national et ses relations politiques internationales, la sophistication des méthodes d’attentat, la probable future formation d’un gouvernement englobant les deux partis patriotiques et le Parti conservateur,… sont des éléments qui auraient dû conduire à une enquête poussée. Le parquet de Klagenfurt a très rapidement refermé le dossier et conclu à un accident de la route.

    Quelle est la situation actuelle du populisme autrichien ? A-t-il retrouvé son unité après les scissions qui l’ont secoué dans les années 2000 ?

    Jörg Haider a fondé le BZÖ en 2005. Heinz-Christian Strache a alors pris le contrôle du FPÖ. Les deux partis ont coexisté, le BZÖ occupant une position plus centriste sur l’échiquier politique que le FPÖ. Après le décès de Jörg Haider, une partie importante des membres du BZÖ de Carinthie, le bastion du parti, ont rejoint l’orbite du FPÖ. Le BZÖ existe toujours, mais ne représente plus rien au niveau électoral. Les électeurs du BZÖ ont rejoint massivement le FPÖ. Le président du FPÖ Heinz-Christian Strache, bien qu’ayant été en dispute avec Jörg Haider, est clairement son successeur. Sa méthode consiste à faire du « Haider sans Haider », bien qu’il développe de plus en plus son style propre.

    Le Front National et le FPÖ ont toujours conservé une certaine distance, voire fait preuve de défiance, qu’en est-il aujourd’hui ?

    Jörg Haider et Jean-Marie Le Pen ont évité de se fréquenter. La probable raison de cette situation est le fait que la presse « extrémise » les partis patriotiques étrangers et que Jörg Haider a été présenté d’une manière erronée par les médias francophone. Jean-Marie Le Pen a lui aussi été victime sur le plan international de cette pratique.

    De nos jours, le FPÖ et le Front national entretiennent des relations publiques. Le président du FPÖ s’est rendu à Paris et Marine Le Pen à Vienne.

    Ces deux partis ne pourraient-ils pas grâce à leurs résultats lors des prochaines élections européennes constituer le navire amiral d’une armada populiste en construction ? Que disent les sondages ?

    Le FPÖ et le Front national ont le vent en poupe dans les sondages. Ils sont donnés premier ou deuxième parti de leur pays respectif. Une future alliance est en voie de constitution. Outre le FPÖ et le Front national, le PVV de Geert Wilders (Pays-Bas), le Vlaams Belang (Flandre-Belgique), la Ligue du Nord (Italie), les Démocrates suédois doivent en faire partie. Le Parti du Peuple danois et l’UKIP (Royaume-Uni) ont par contre décliné, pour le moment, l’offre. Ils pourraient peut-être changer d’avis après les élections. Afin de former un groupe au Parlement européen à l’issue du scrutin de mai 2014, les patriotes doivent rassembler 25 députés européens issus de 7 États membres différents. D’autres élus européens pourraient rejoindre ce groupe.

    Lionel Baland, merci.

    http://fr.novopress.info/155512/les-grands-entretiens-novopress-lionel-baland-reussite-populiste-lexemple-jorg-haider-33/#more-155512