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  • Appel pour la paix en Syrie

    Appel pour la paix en Syrie Voici bientôt deux ans que les pouvoirs publics et les médias occidentaux dirigent un concert d’accusations contre le Chef légal et légitime de l’Etat syrien, contre son gouvernement et contre l’armée de son pays. Ils cherchent ainsi à faire passer la victime pour le coupable, comme ils l’ont fait en Libye, comme il l’avaient fait précédemment pour d’autres Etats libres et indépendants. Car des bandes armées illégales, plus ou moins organisées, venues pour certaines de l’étranger, sèment la terreur en Syrie. Quoi de plus normal, pour le régime légal d’un pays, que de combattre une rébellion avec sa police et son armée ? Au regard des principes élémentaires du droit public, seuls garants d’une paix relative entre les nations, ceux qui sont à la tête d’un Etat n’ont-ils pas précisément pour premier devoir de protéger leur population des agressions intérieures et extérieures ? Le maintien de l’ordre n’est-il pas la première mission de l’Etat ? Que feraient les gouvernements de nos pays, si une partie de leur population prenaient les armes pour combattre leur gouvernement légitime avec l’aide de pays et de mercenaires étrangers ? Ne feraient-ils pas intervenir leur police et leur armée ? Et démissionneraient-ils sans rien dire comme ils le demandent au gouvernement légitime syrien ?

    En vérité la Syrie n’est pas seulement victime d’une agression armée, mais également, de manière évidemment concertée, sur la scène internationale, d’une vaste opération de propagande médiatique d’agitation, de désinformation systématique (certaines images sur la prétendue répression de l’armée régulière n’étant même pas prises en Syrie) et de provocation. Le but de cette propagande est, au mépris le plus éclatant du droit international, d’encourager l’insurrection, de nourrir une guerre civile, de dénier, par la diabolisation, toute légitimité au pouvoir légal, et de se poser en juge et en bourreau.

    Car ce sont bien les mêmes Etats, leurs serviteurs et leurs alliés (comme les régimes de l’Arabie Saoudite et du Qatar, monarchies absolutistes, sanguinaires et intolérants pour leurs propres populations autochtones), qui d’un côté se posent en Juges du gouvernement syrien et de l’armée régulière syrienne, et qui de l’autre encouragent, financent et arment les mercenaires, souvent étrangers, qui se livrent aux destructions et aux violences contre la population civile et contre lesquels lutte l’armée régulière syrienne. Les vrais criminels sont ainsi ces gouvernements occidentaux et leurs fantoches d’Arabie Saoudite et du Qatar. Ils ont déclenché, entretiennent et perpétuent cette guerre fratricide. Sans leur intervention et leur aide aux groupes rebelles et mercenaires il y a longtemps que l’ordre aurait été rétabli en Syrie et que les médias occidentaux ne pourraient plus se livrer à leur propagande et à son macabre décompte quotidien.

    Les pouvoirs occidentaux ont profité des vents de révolte qui soufflaient dans certains pays musulmans pour provoquer une rébellion armée dans d’autres pays dont les dirigeants avaient le seul tort de leur déplaire politiquement pour n’être pas leurs obligés. Ces gouvernements occidentaux, avec certains médias serviles, entendent profiter des situations conflictuelles et difficiles qu’ils ont générées, pour dénoncer les pouvoirs légitimes de ces pays, les discréditer et finalement les combattre militairement. Ils n’hésitent pas pour cela à utiliser le mensonge et la désinformation, rendant systématiquement les pouvoirs en place et leur armée responsables d’exactions commises par les agresseurs extérieurs eux-mêmes.

    Ignorants, lâches ou sans scrupules, participent de cette propagande insidieuse, en Europe, au Moyen-Orient et ailleurs, sous la bienveillante attention des Etats-Unis, des politiciens, des journalistes, des intellectuels, des juristes, tous croyant pouvoir impunément parler au nom du bon droit et du combat du Bien contre le Mal, avec l’arrogante certitude de l’unanimité.

    Certitude erronée. Les signataires de la présente, avocats de différentes nationalités, ne prétendent pas s’immiscer dans les affaires intérieures syriennes, mais entendent exprimer, au nom de la seule raison et de l’honneur de l’esprit humain, leur honte et leur réprobation de tels procédés. Nous apportons notre soutien au gouvernement syrien dans sa juste lutte contre l’agression intérieure et extérieure dont il est victime. Nous dénonçons toutes les aides et soutiens extérieurs à ces vauriens, semeurs de troubles et de morts que l’Occident nous présente comme « armée syrienne libre ». Nous nous engageons à tout mettre en œuvre pour aider le gouvernement Syrien à défendre la légitimité de son autorité et à faire la vérité sur cette vaste agression dont la seule victime est son peuple dont, comme il l’a fait précédemment en Irak, en Afghanistan, en Lybie, l’impérialisme occidental ose dénoncer la souffrance alors que c’est lui qui en est la cause.

    1er Mars 2013

    Liste des signataires

    A ce jour l’appel a été signé par 10 avocats de 4 pays occidentaux.

    Bruno BARDECHE, avocat au Barreau de Paris, André CHAMY, avocat au Barreau de Mulhouse, Fabrice DELINDE, avocat au Barreau des Hauts de Seine, Eric DELCROIX, ancien avocat au Barreau de Paris, Pascal JUNOD, avocat au Barreau de Genève, Henri LAQUAY, avocat au Barreau de Bruxelles, Philippe MISSAMOU, avocat au Barreau des Hauts de Seine, Bernard RIPERT, avocat au Barreau de Grenoble, Stefano SUTTI, avocat au Barreau de Milan, Damien VIGUIER, avocat au Barreau de l’Ain.

    CONTACT : appeldu1ermars2013@outlook.com

    http://www.voxnr.com

  • Armes de destruction massive : Colin Powell accuse la CIA de l’avoir trompé

    Il y a dix ans, le secrétaire d’État américain prononçait à l’ONU son discours sur les armes de destruction massive en Irak . Les « preuves » qu’il avancait se sont révélées fausses pour la plupart. À l’occasion de la publication de son livre J’ai eu de la chance aux éditions Odile Jacob, il revient sur cet épisode et sur la politique étrangère de son pays. Entretien exclusif avec Colin Powell.

    Le Nouvel Observateur : Le 5 février 2003, vous avez prononcé à l’ONU votre « célèbre » discours sur les armes de destruction massive en Irak, dans lequel vous énonciez des « preuves » qui, pour la plupart, se sont révélées inexactes. Dix ans plus tard, vous écrivez dans votre nouveau livre que ce discours restera une « tache » dans votre carrière et que vous vous souvenez de ce 5 février aussi « profondément » que du jour de votre naissance. Pourquoi ?

    Colin Powell : Il est très dur d’oublier un tel moment surtout quand on vous en parle chaque jour pendant dix ans ! Depuis que j’ai découvert qu’un grand nombre d’informations que l’on m’avait fournies étaient inexactes, je ne cesse de me demander : qu’aurais-je dû faire pour éviter cela ? Pour ma défense, je dirais que je n’ai eu que trois jours pour préparer cette présentation et que nous avions un très grand nombre de documents à analyser.

    Pourquoi seulement trois jours ?

    Le problème était le suivant : le président Bush m’a demandé de présenter nos preuves à l’ONU à partir d’un texte rédigé par un conseiller du vice-président Cheney. Or, quand j’ai demandé aux services de renseignement des éléments concrets pour étayer certaines parties de ce document, ils m’ont répondu qu’ils n’avaient jamais vu ces informations-là ! Il fallait donc repartir de zéro et écrire un autre discours. J’ai dit au président que j’avais besoin de plus de trois jours, mais il m’a répondu qu’il avait déjà annoncé au monde la date de ce discours à l’ONU, qu’il ne pouvait pas la reculer.

    Le fait que le texte écrit par le bureau du vice-président était si étrange ne vous a-t-il pas alerté ? Ne vous êtes-vous pas dit : on essaie de me manipuler ?

    Non, pas vraiment. J’étais déçu mais je ne paniquais pas : la CIA allait m’aider. Je suis allé au siège de l’Agence, et grâce aux informations fournies par son patron, George Tenet, j’ai pu bâtir le discours. Remarquez que j’y ai mis moins d’éléments controversés que le président, Condi Rice ou Rumsfeld avaient déjà utilisés publiquement et à plusieurs reprises. Le bureau de Cheney, par exemple, insistait pour que je parle des liens supposés entre Saddam Hussein et Al-Qaida, que le vice-président avait souvent évoqués. Mais, comme les éléments n’étaient pas probants, je ne l’ai pas fait. J’ai également très peu parlé du programme nucléaire.

    Mais sur le reste aussi, le chimique et le biologique, les « preuves » étaient fausses.

    Oui, mais ce n’était pas un mensonge délibéré de ma part. Je croyais à ce que je disais. Tout le monde, le président, les membres du gouvernement et le Congrès y croyaient. Le président m’a choisi parce que j’étais le plus crédible vis-à-vis de la communauté internationale, mais, encore une fois, je ne faisais que transmettre ce que les seize agences de renseignement disaient. Et je pense que si vous aviez été à ma place et que vous aviez vu les documents que l’on m’a présentés vous auriez cru à tout cela, vous aussi. Évidemment je pensais que la CIA avait vérifié ses informations. Aussi, quand, quelques semaines plus tard, l’Agence nous a dit que l’« information » sur les laboratoires biologiques ambulants venait d’Allemagne et qu’aucun agent américain n’avait interrogé la source principale de ce canular, j’ai été stupéfait.

    George Tenet, le patron de la CIA, vous avait-il dit que les Allemands l’avaient prévenu du manque de fiabilité de cette source ?

    Non et je ne sais toujours pas ce qu’il savait en réalité. Plus tard, il est apparu qu’un certain nombre de personnes dans les services de renseignement étaient au courant de cette alerte des Allemands et d’autres mises en garde. Ils ont dit : « Nous sommes allés voir Tenet mais il ne voulait pas nous écouter. » Est-ce vrai ? Je ne sais pas. En tout cas, lors de ma présentation à l’ONU, je voulais qu’il soit à mes côtés, que la présence du patron de la CIA signifie au monde que ce que je disais reflétait ses conclusions. Dix ans plus tard, Tenet n’a toujours pas reconnu que celles-ci étaient fausses ! Pas une fois, il a expliqué pourquoi ses services avaient écrit, par exemple, que Saddam Hussein avait des centaines de tonnes d’armes chimiques, « dont la plupart avaient été fabriquées l’année passée » alors qu’il n’en possédait pas un gramme !

    Il y a quelques années, vous avez dit qu’une commission du Congrès devrait enquêter sur tout cela.

    Passons à un autre sujet, voulez-vous ?

    Propos recueillis à Washington par Vincent Jauvert-Le Nouvel Observateur

    Article publié dans Le Nouvel Observateur du 28 février

    Pour approfondir :

  • Syrie : les américains aux côtés des islamistes…

    Le gouvernement des États-Unis vient de décréter une nouvelle aide financière aux rebelles syriens. Le nouveau secrétaire d’État, John Kerry, vient d’annoncer en effet une aide financière complémentaire de 60 millions de $ pour soutenir une opposition désormais aux mains des milices islamistes : car ce sont plus de 60 000 djihadistes qui combattent sur le sol syrien !

    Pendant ce temps là, la communauté chrétienne de Syrie, menacée et persécutés par les rebelles syriens, est désormais l’objet d’un « grand exil qui se déroule en silence », selon le mot d’un patriarche libanais. Les chrétiens sont présents sur le sol syrien depuis 2000 ans : actuellement deux millions, ils sont en train de fuir une terre devenue hostile, où les leurs sont martyrisés par les fanatiques musulmans. Ces chrétiens syriens affluent donc, par centaines chaque semaine, au Liban, terre voisine, qui accueille aujourd’hui plus de 920000 Syriens.

    Ce sont aujourd’hui des villages entiers de chrétiens qui ont été vidés de leurs habitants. Les uns massacrés, les autres chassés par l’islam. D’autres encore qui fuient, anticipant la répression..

    Il est amusant d’entendre certains nous expliquer que des « intégristes », il y en a dans toutes les religions… La rhétorique est commode pour éviter d’entrer dans le sujet. Faut-il conclure du discours de ces bien-pensants, qui ne veulent surtout pas « stigmatiser » une religion, que les fidèles de saint Nicolas du Chardonnay sont comparables aux kamikazes musulmans ? Car lorsqu’ils parlent des « intégristes » catholiques, en voulant les mettre sur le même plan que les « intégristes » musulmans, qui visent-ils exactement ?

    http://www.contre-info.com/

  • Lech Walesa et les homosexuels : «Qu’ils nous laissent, moi et mes petits-enfants, tranquilles»

    Déclaration choc. Lech Walesa, ancien Président de Pologne, figure de proue du syndicat anti-communiste Solidarność et prix Nobel de la paix, a déclaré que les députés homosexuels devaient siéger « à l’extérieur » du Parlement polonais.

    Dans la Pologne qui résiste encore et toujours aux pressions des lobbies LGBT, Lech Walesa, symbole de la résistance pacifique au communisme, a déclaré vendredi soir à la chaîne de télévision TVN, que les députés homosexuels devrait siéger « près du mur (du Parlement, ndlr) et même derrière le mur ». La raison ? L’ancien président polonais estime que « dans tous les domaines », il «  leur donne proportionnellement à ce qu’ils représentent » et qu’ils représentent aujourd’hui « une minorité marche sur la tête de la majorité.  » Et d’ajouter : « Je ne veux que pas cette minorité, avec laquelle je ne suis pas d’accord, mais que je tolère et que je comprends, manifeste dans la rue et fasse tourner la tête à mes enfants et mes petits-enfants. »

    Si le dirigeant historique du premier syndicat libre du monde communiste « comprend qu’il y ait des gens différents, différentes orientations et qu’ils ont droit à leur identité », il estime qu’il faut « qu’ils ne changent pas l’ordre établi depuis des siècles ». « Je ne veux même pas en entendre parler. Qu’ils le fassent entre eux, et qu’ils nous laissent, moi et mes petits-enfants, tranquilles  », a-t-il conclu.

    Cette déclaration intervient après l’échec, en janvier dernier, malgré les pressions des lobbies homosexuels, de la tentative du gouvernement du libéral Donald Tusk de créer en Pologne une union civile destinée aux homosexuels.

    Nouvelles de France

    http://www.actionfrancaise.net

  • Percée des eurosceptiques dans une législative partielle en Angleterre

     

    Les libéraux-démocrates ont conservé leur siège de député d’Eastleigh, dans le sud de l’Angleterre, infligeant une défaite cinglante au premier ministre David Cameron, dont le Parti conservateur n’est arrivé qu’en troisième position derrière les eurosceptiques de l’UKIP.

     

    Le chef de l’UKIP, Nigel Farage, a estimé que la focalisation de Cameron sur

    "les éoliennes et le mariage gay au lieu de s’occuper de la libre entreprise et des affaires, l’avait privé d’une partie de ses soutiens dans les fiefs du parti".

    Une remarque qui s’applique tout autant à la France, à l’approche des élections de 2014.

    Le Salon Beige

    http://www.actionfrancaise.net

  • Quand la Russie montre sa puissance… douce

    EXCLUSIVITÉ FORTUNE : Tribune libre de Vassily, l’un de nos lecteurs.

    Un plus large recours aux méthodes dénommées “soft power” devrait contribuer à améliorer l’efficacité de notre travail- Sergueï Lavrov, chef de la diplomatie russe, 23 janvier 2013.

    Pour modifier son image de pays agressif rongé par des instincts totalitaires, la Russie a décidé de passer à la vitesse supérieure en matière de “soft power” ou puissance douce: une série d’efforts visant à modifier l’image du pays directement au sein de l’opinion publique internationale, en défendant sa politique, ses valeurs et sa culture via des moyens non coercitifs. Un concept élaboré par le professeur américain Joseph Nye, mais qui trouve en réalité ses racines dans les efforts déployés par les États-Unis depuis l’après-guerre afin d’uniformiser les cultures et les modes de pensée.
    Pour redorer son blason, la Russie a du pain sur la planche: le pays est systématiquement dépeint dans les médias dominants comme un État autoritaire ayant hérité des tendances dominatrices de son prédécesseur, l’URSS. La guerre d’août 2008 contre la Géorgie autour de deux régions indépendantistes a aggravé son cas: Moscou donnait l’image d’une immense puissance “agressant”, alors qu’elle contre-attaquait après des mois de mises en garde, son petit voisin de quatre millions d’habitants. Le régime de Tbilissi se trouvait être un allié de l’Otan, circonstance qui a fortement conditionné l’offensive diplomatico-médiatique qui s’est ensuite abattue sur Moscou.

    La position de la diplomatie russe s’avère d’une remarquable cohérence sur le long terme: que l’on songe à la prudence justifiée du pays dès le début du “printemps arabe”, à son opposition intangible à l’indépendance du Kosovo ou à sa détermination sur le dossier syrien. Son image figée et son langage très formel peinent toutefois à conquérir les cœurs et à faire valoir les intérêts du pays sur la scène internationale. Face à un Obama monopolisant la “cool-attitude”, la Russie risque d’être perçue comme un pays glacial et glaçant. Elle doit donc mettre en place une stratégie efficace pour séduire au niveau mondial.

    La puissance douce “à la russe” comprend un éventail diffus d’initiatives, comme des forums de jeunesse et des associations (Dialogue franco-russe) et des manifestations culturelles dont nous ne souhaitons pas dresser un catalogue exhaustif ici. Nous avons décidé de nous focaliser sur la bataille médiatique menée par la Russie en France et dans le monde.

    I. Le cas de la France

    La France est en première ligne des efforts de Moscou. Rien d’étonnant à cela, car historiquement l’Hexagone est un référent traditionnel: que l’on songe à l’aristocratie russe dont la langue était le français, ou à la première page de Guerre et paix écrite dans notre langue. Aux yeux des Russes, la France est l’alter ego, un État où naissent des tendances historiques qui parcourent ensuite l’Europe et le monde. Une nation qui passionne la population russe et ses dirigeants. Un pays frère, qui désormais inquiète.

    Car les Russes, peuple conservateur paradoxalement protégé des évolutions occidentales par 70 ans de communisme et très largement épargné par les ravages du politiquement correct, ne se reconnaissent plus dans un Hexagone défiguré par l’immigration massive et le relativisme des mœurs. En témoigne l’adoption de la loi sur le “mariage pour tous”, à l’heure où les députés russes adoptent un texte condamnant le prosélytisme homosexuel auprès des mineurs.

    La France, pays qui a pendant des siècles donné le ton et inspiré le cousin russe, devient peu à peu l’Afrance. Les touristes russes rentrent généralement dépités de Paris, leurs images d’Épinal éventées par les effluves des environs de Montmartre. En filigrane, la crainte que le même sort ne les attende alors que l’immigration s’intensifie dans leur pays. Face à une Europe qui a déjà basculé dans la sphère d’influence de l’Otan, ennemi juré de l’aïeul soviétique, alors que la décadence des mœurs est érigée en norme, la Russie risque à terme de se retrouver isolée sur la scène politique.

    L’Hexagone est une priorité car il possède en outre une des classes médiatiques les plus fondamentalement hostiles à la Russie et à ses dirigeants. La nomination de Natalie Nougayrède, porte-voix officieux des indépendantistes tchétchènes durant la guerre, à la tête du Monde, constitue un symbole de plus de la posture antirusse du “quotidien de référence”. Un journal dont la rubrique “Russie” se résumait auparavant aux billets d’humeur au vitriol de Marie Jégo, à mille lieues de toute rigueur journalistique. De son côté, le correspondant du Figaro relaie fébrilement les griefs d’une opposition pro-occidentale ultra-minoritaire, tout en déplorant l’insuffisance du nombre de mosquées à Moscou.

    De ce fait, la France a toujours été une des cibles de premier plan des efforts de communication de la Russie. On peut citer l’agence RIA Novosti, qui fournit des dépêches en neuf langues en plus du russe, à la Voix de la Russie, ou plus récemment au quotidien en ligne La Russie d’Aujourd’hui. Cependant, tous ces projets, destinés à parler de la Russie en court-circuitant les médias locaux, sont dans différentes langues, celle de Voltaire n’étant que l’une d’entre elles.

    Un nouveau projet chapeauté par la Voix de la Russie constitue pourtant un virage, de par sa tonalité radicalement nouvelle, et parce qu’il ne s’adresse qu’à la France. Les lecteurs de Fortune sont déjà familiarisés avec Sylvie Collet de Prorussia.tv et son “rentre-dedans”, qui n’hésite plus à démonter les manipulations des médiamensonges (la scène de Poutine “abattant” un tigre) et à rappeler aux spectateurs que les journalistes, non contents de leur “faire les poches“, les “prennent pour des cons“.

    En délivrant un discours musclé à destination des patriotes français, en insistant sans langue de bois sur la trahison de leurs élites, Radio Moscou se place dans le sillage direct de Radio Londres. Un remarquable retournement historique, qui prépare le terrain pour des bouleversements politiques susceptibles d’advenir dans un futur proche.

    La France est une tête de pont essentielle pour remporter la bataille des opinions. De ce fait, l’épisode de Gérard Depardieu, devenu russe sur décret de Vladimir Poutine, avant de déclarer dans un pied de nez éclatant à la pensée dominante que “la Russie était une grande démocratie“, constitue une victoire symbolique de Moscou dans ses efforts en direction de la France et de l’Europe en général.

    II. Russia Today

    Nous avons évoqué les projets médiatiques “multilingues” menés par la Russie dans le domaine de la presse écrite (RIA Novosti) et de la radio (Voix de la Russie). Un projet crucial à mentionner est la chaîne satellitaire Russia Today qui émet elle aussi dans plusieurs langues. Le projet est néanmoins axé en premier lieu sur le monde anglo-saxon, auquel il transmet une vision différente, voire dissidente, de l’actualité internationale et américaine.

    Caractérisé par un grand professionnalisme et des moyens importants, Russia Today n’hésite pas à se démarquer de la couverture médiatique traditionnelle, par exemple en diffusant une émission où Julian Assange interroge le leader du Hezbollah. La chaîne a abondamment relayé les revendications et les actions du mouvement anti-Wall Street aux États-Unis, en mettant l’accent sur les violences perpétrées par la police à l’encontre des manifestants.

    La chaîne est régulièrement dans le viseur des autorités de différents pays, et gênée dans ses activités. Elle sera notamment brouillée en Libye durant la révolution (Moscou avait critiqué le fait que les alliés s’ingèrent dans la crise aux côtés des rebelles). Aux États-Unis, une équipe de tournage a été arrêtée en couvrant une action de protestation. La chaîne a même été qualifiée d’”ennemi de Washington” par Walter Isaacson, membre de la direction du Conseil de télédiffusion des États-Uni, le CSA local. Coïncidence? Le bureau de la chaîne à Gaza a été détruit par un missile israélien pendant le conflit de novembre 2012.

    En osant offrir un autre son de cloche, Russia Today réalise un pari risqué qui s’avère néanmoins payant: sur fond de crise de confiance entre les Américains et les médias officiels, la chaîne est entrée sur le podium des trois chaînes d’informations les plus vues au Royaume-Uni, derrière BBC News et Sky News de Rupert Murdoch. A la mi 2012, Russia Today a indiqué avoir doublé son auditoire aux États-Unis.

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    Le tournant du “soft power” mentionné par Sergueï Lavrov a en réalité été opéré il y a plusieurs années. Consciente de son isolement, la Russie sait qu’il est temps pour elle de prendre les devants afin d’anticiper des bouleversements mondiaux imminents, qui risquent de tourner en sa défaveur.

    Alors que la bataille des valeurs s’intensifie à l’échelle planétaire, la Russie moderne cherche à se poser en alternative politique au niveau mondial. Chantre de la souveraineté des nations et de l’identité européenne, la Russie de Poutine chercherait-elle à nous dire: “Patriotes de tous les pays, unissez-vous“?

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  • Relations Russie – Union Européenne

    par Arnaud Leclerc

    « La crise de l’Euro est bien plus profonde qu’une simple crise de la dette. L’Euro a été créé pour des raisons politiques et sans prendre en compte le niveau de technologie des pays, l’harmonisation du marché du travail, l’intégration politique et une langue commune. On aurait dû être davantage pragmatique. Quand la crise est survenue, les réponses ont été inadaptées. L’Union Européenne n’est pas une vraie Fédération et en a tous les inconvénients sans en avoir les avantages. »

    Cette déclaration cassante de Vladimir Poutine le 25 octobre 2012 lors du Club Valdaï résume bien le sentiment russe vis-à-vis de l’Union Européenne : vous n’êtes pas un modèle pour la Russie. En d’autres termes, la monnaie est construite sur du sable,  les disparités économiques et territoriales ont été négligées, vous ne disposez pas d’un socle identitaire solide et votre gouvernance est bancale. Qui êtes-vous pour nous donner des leçons ?

    En cherchant à mieux comprendre ce désamour, l’on retrouve malheureusement beaucoup de qualificatifs émotionnels de part et d’autre: absence de respect mutuel, ambiguïté, incompréhension, divergences, méfiance, malentendus, concurrence. Comme dans un vieux couple, les reproches fusent et se répondent sans que l’on saisisse véritablement qui a eu tort le premier.

    Ainsi, quand l’Europe parle à la Russie de liberté et de démocratie, cette dernière y voit hypocrisie et leçons de morale à géométrie variable. L’UE ne soutient-elle pas depuis longtemps des régimes notoirement corrompus et peu démocratiques comme celui de l’Algérie et la France n’a-t-elle pas reçu en grande pompe l’ubuesque Colonel Kadhafi, avec sa tente installée sur les Champs Élysées, avant de décider de le bombarder sans ménagement ?

    Une Histoire européenne commune… Oubliant un peu vite le dépeçage de la Pologne, qui a tout de même marqué les esprits libéraux européens, et ses conquêtes aussi bien impériales que staliniennes vers la Baltique, la mer Noire, l’Asie Centrale et l’Extrême Orient, la Russie se souvient surtout des agressions militaires multiples qui se sont succédé au fil des siècles en provenance des Polono-Lithuaniens, des Suédois, des Allemands, des Français et des Anglo-saxons, lesquelles ont développé un sentiment de citadelle assiégée.

    Abus de pouvoir énergétique envers l’Ukraine et l’Europe Centrale ? Un instrument d’influence qui vaut bien celui des multinationales, de la puissance de l’argent et des médias occidentaux. Une divergence sur les valeurs fondamentales ? Vu du côté russe, quelles sont les valeurs de cette Union Européenne qui ne reconnaît pas ses racines judéo-chrétiennes dans sa Constitution alors que l’orthodoxie fait partie intégrante de la nouvelle société russe ? Corruption des élites : certes, mais n’y a-t-il jamais eu de politiciens corrompus en Europe et, chose à peine croyable, l’un de ses pays membre n’est-il pas allé jusqu’à escroquer les autres en falsifiant à grande échelle sa comptabilité publique, engendrant ainsi des dizaines de milliards d’euros de pertes pour les banques, les sociétés et les citoyens européens? Et encore, le décompte de ce qui sera probablement la facture la plus salée de l’Histoire n’est pas définitif…

    La brutalité de la répression en Tchétchénie ? Sans aucun doute mais les guerres coloniales, le Vietnam ou le déclenchement d’une invasion pour des armes de destruction massive jamais découvertes répondent en échos. La position du Kremlin est qu’aucune n’est propre : « pas plus la nôtre que les vôtres ». Cette affirmation n’est pas très morale mais elle a le mérite de ne pas la mettre systématiquement du même côté, comme dans les films hollywoodiens. Enfin, si le soutien à la Syrie de Bachar El Assad apparaît à raison injustifiable à la communauté internationale, les Russes demandent néanmoins pourquoi ce dernier était l’invité d’honneur au défilé du 14 juillet 2008 et pourquoi il était encore chouchouté par les capitales européennes il y a à peine plus de deux ans. La France et l’Europe pouvaient-elles alors feindre d’ignorer que, tout comme son père avant lui, il était déjà un dictateur implacable, ou alors ont-t-elle fait preuve d’un cynisme au moins équivalent à celui de la Russie et de la Chine aujourd’hui ? Vu du Kremlin, les Européens et les Américains font semblant d’oublier que la dernière base navale russe sur la Méditerranée est précisément située à Tartous, en Syrie, à quelques encablures d’Israël.

    Ce jeu de ping-pong avec l’Europe et plus généralement entre l’Occident et la Russie pourrait être sans fin. Malgré sa culture profondément européenne (Cf ouvrages du Prof. Martin Malia, Berkeley University), notamment en tant qu’héritier de Byzance pour la chrétienté et d’une forte communauté juive l’ancrant également dans la tradition biblique occidentale, malgré une aristocratie qui fût francophone et germanophone, malgré le romantisme de l’amitié communiste entre les peuples ou bien la Maison européenne chère à Gorbatchev… la Russie n’a en fait jamais vraiment été une puissance géopolitique de nature européenne (Cf. ouvrage A. Leclercq : La Russie, puissance d’Eurasie – Histoire géopolitique des origines à nos jours, Ellipses décembre 2012) .

    Il n’empêche que les relations existantes avec l’UE et leur potentiel à tous niveaux demeurent vitales aux deux parties. A cet égard, certains se demandent si ces relations doivent désormais reposer sur une logique de valeurs ou bien sur une logique d’intérêts. Là réside sans doute un premier élément de réponse pour comprendre la stérilité des relations entre la Russie et l’UE. En effet, nous ne nous posons pas vraiment la question en ces termes et avec la même acuité avec la Chine, l’Inde ou l’Afrique, civilisations bien éloignées de nos paradigmes occidentaux. Tout ne nous y plaît pas, mais l’on accepte cependant, résignés peut-être, que ce n’est pas tout à fait la même chose là-bas. En revanche, si on la pose de cette façon avec la Russie, c’est sans doute en raison de sa proximité culturelle et historique qui voudrait qu’elle soit très proche, voire en quelque sorte assimilable.

    Or, la Russie est eurasiatique, elle n’est pas européenne. Au mieux, elle est perçue comme « entre-deux » mais n’est pas comprise par l’Occident comme une civilisation à part entière, d’où des malentendus car les Russes ne le voient pas de cette façon.

    Les États-Unis, pourtant jeune nation, sont parvenus de façon remarquable à incarner un système de valeurs, que l’on apprécie ou pas, mais que l’on comprend et en général respecte. Si l’on considère que la Russie est « Autre », que la proximité avec l’Europe n’a été que conjoncturelle et fondée sur des malentendus, si notre regard occidental s’accorde une grille de lecture au moins équivalente à celle que l’on accepte naturellement pour des pays et civilisations nous apparaissant différents de façon plus immédiatement évidente, alors l’on évitera de se poser la question de notre relation en termes de logique de valeurs versus d’intérêts car il n’y a pas de meilleure façon pour stigmatiser des différences de l’Autre et lui imposer a priori un système qui n’est pas vraiment le sien.

    A partir de là, le niveau d’attente et d’exigences de chacun envers l’Autre ne devient certes pas moindre et ne doit pas se transformer en complaisance, mais il se déplace sous un autre angle et donne davantage d’ouverture d’esprit pour accepter les différences, même choquantes au premier abord. Ainsi, les Russes pourront par exemple accepter que l’évolution des mœurs (mariage pour tous) n’est pas nécessairement synonyme de décadence, ou que la bureaucratie bruxelloise, malgré ses lourdeurs, a néanmoins contribué à construire une œuvre unique dans l’Histoire des peuples.

    Les Européens pourront de même essayer de mieux comprendre la pensée russe qu’ils connaissent si mal, ainsi que la géographie de cet espace aussi vaste qu’un continent où l’on se fait une représentation mentale bien différente du chef de l’État, de la religion, de l’armée, des fonctionnaires, de l’argent et du territoire. Une approche moins émotionnelle montrera alors qu’aucun des deux systèmes n’est transposable in extenso, même si des points communs existent.

    A l’instar de Winston Churchill, notre système de démocratie occidentale et d’Union Européenne sont peut-être les pires de tous les régimes à l’exception de tous les autres, et il est compréhensible que nous, Européens, les défendions jusqu’au messianisme. Si l’on veut sortir du « je t’aime, moi non plus » qui préside aux relations UE-Russie, il est indispensable que cette dernière mette davantage en évidence son système de valeurs et son fonctionnement qui lui sont propres.

    La Russie n’est plus « l’empire du mal » (Cf discours de Ronald Reagan, 8 mars 1983) et a perdu en 1991 les stygmates soviétiques qui la caractérisaient si particulièrement. Pour être à nouveau acceptée comme une entité, voire comme une civilisation à part entière, par l’Occident, par la Chine ou par d’autres, la Russie doit mettre en évidence les fondements de son idéologie et donner des exemples de valeurs identifiables par les autres systèmes et civilisations.

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  • Histoire d’un conflit ignoré

     Il y a quelques mois, Sylvain Roussillon publiait un ouvrage novateur consacré aux volontaires étrangers du camp franquiste pendant la Guerre d’Espagne (1936 – 1939). Il récidive aujourd’hui en publiant une remarquable étude sur la Seconde Guerre d’Indépendance des États-Unis d’Amérique entre 1812 et 1814.

     

    Si le XXe siècle fut clément pour les États-Unis qui ne connurent aucun conflit sur leur sol, le XIXe siècle vit au contraire leur territoire américain atteint par des guerres. Outre les nombreux conflits amérindiens, on pense bien sûr à la Guerre de Sécession (1861 – 1865), mais on ne doit pas oublier la guerre d’agression contre le Mexique (1846 – 1848) et cette seconde Guerre d’Indépendance. « La guerre de 1812 – 1814, appelée aussi “ Seconde guerre d’Indépendance américaine ”, fait partie des conflits oubliées de l’Histoire (p. 13). » C’est exact en France d’autant que, assez curieusement, Hollywood n’a guère exploité cette épisode belliqueux. Aux États-Unis, ce conflit est mieux connu, surtout quand on lit l’abondante bibliographie fournie par l’auteur : 83 livres et 21 articles de revues spécialisées dont seulement huit en français ! La méconnaissance en France de cet affrontement anglo-américain s’explique aussi par la chronologie, car en même temps que la Grande-Bretagne luttait contre les États-Unis, elle affrontait toujours Napoléon Ier.

     

    Cette Seconde Guerre d’Indépendance marque vraiment l’avènement d’un ensemble plus cohérent dénommé les États-Unis d’Amérique. C’est pendant cette guerre que fut composé leur futur hymne national. C’est à la suite de ce conflit que, craignant les représailles de Londres alliée pour la circonstance à la Sainte-Alliance que s’affirma la doctrine Monroe dédiée à un exclusivisme pan-américain qui allait faire de l’Amérique latine et des Antilles l’arrière-cour de Washington. « En moins d’un siècle, les États-Unis sont passés du slogan “ l’Amérique aux Américains ” au mot d’ordre “ L’Amérique aux États-Unis ” (p. 181). » Mieux encore, « les principaux initiateurs de cet impérialisme, qu’il s’agisse d’Alfred Thayer Mahan ou de Theodor Roosevelt, ont débuté leurs réflexions stratégiques, militaires et géopolitiques dans l’étude de cette guerre de 1812 (p. 181) ».

     

    Une guerre fondatrice

     

    Cette guerre fut donc déterminante dans le destin de la jeune république issue du traité de Versailles de 1783. Elle contraignit le gouvernement fédéral à maintenir et à développer une armée permanente digne de ce nom. Au moment de l’Indépendance, les soldats réguliers étaient au nombre de… 87. La défense du nouvel État reposait entièrement sur des milices civiques dans chaque entité fédérée, d’où la liberté de porter des armes. Cette situation particulière s’inscrivait dans la politique isolationniste souhaitée par George Washington. Dans une belle préface, Nicole Bacharan rappelle son discours d’adieu en 1796 : « L’Europe a des intérêts fondamentaux qui ne nous concernent pas, ou à peine. » Dans ces conditions, à quoi bon d’avoir des forces terrestres et une marine de guerre ?

     

    Le problème est que les États-Unis grandissent aux temps des guerres européennes de la Révolution et de l’Empire. Nonobstant l’éloignement géographique, le conflit européen a des répercussions économiques en Amérique. « Les liens diplomatiques sont inexistants, ou presque, avec bon nombre de pays européens, et teintés d’ambiguïté avec les Britanniques qui reconnaissent du but des lèvres l’existence de ces treize colonies rebelles prétendant constituer un État souverain (p. 17). » La Grande-Bretagne ne se focalise pas que sur le danger français, révolutionnaire puis napoléonien. Elle pense déjà à l’échelle du monde et s’exaspère de l’existence même des États-Unis qu’elle perçoit comme une insolence permanente à sa puissance.

     

    Les Britanniques s’ingénient donc à vexer à la moindre occasion les Américains. « Depuis le début du XIXe siècle, la Royal Navy affecte de ne pas reconnaître les eaux territoriales américaines, ni la qualité des navires battant pavillon américain. Par conséquent, sous couvent de lutter contre la contrebande à destination de la France, les bâtiments de la Royal Navy ont pris la dommageable habitude d’arraisonner les navires marchands américains, de confisquer les cargaisons et, chose plus grave, d’enrôler de force sur leurs navires de guerre des citoyens américains, considérés pour l’occasion comme les ressortissants britanniques de colonies au statut juridique mal défini ! C’est ainsi que près de 10 000 marins et citoyens américains se trouvent obligés de servir contre leur gré, sur les navires de la Royal Navy durant les dix premières années du XIXe siècle, sans que les protestations américaines n’y changent rien (pp. 30 – 31). » Par ailleurs, depuis leur colonie du Canada, les Britanniques incitent les tribus amérindiennes à chasser les colons venus des États-Unis. À partir de 1810, Londres multiplie les provocations envers Washington qui devient la victime collatérale du féroce contentieux franco-britannique.

     

    En 1800, les États-Unis ont participé à la Ligue des Neutres organisée par Paul Ier de Russie, ce qui lui vaudra son assassinat en 1801 par des agents anglophiles. Avec la montée des tensions navales, Sylvain Roussillon rappelle que « la marine de guerre, dissoute dès la fin de la guerre d’Indépendance, est précipitamment réorganisée en 1797, devant la menace d’un conflit entre la France révolutionnaire et les attaques incessantes des corsaires barbaresques en Méditerranée (pp. 16 – 17) ». Or il y eut vraiment conflit naval officieux et circonscrit à la marine et au commerce entre la France et les États-Unis : la Quasi-Guerre (1798 – 1800). Son déclenchement incombe au Directoire qui, « en proie à d’inextricables problèmes financiers, exigeait des États-Unis le remboursement immédiat des dettes de guerre et des sommes engagés par Louis XVI pour être venue en aide aux insurgés américains (p. 17) ». Cette guerre océanique permit à la jeune U.S. Navy de s’entraîner au combat face à une marine corsaire française bien mal en point. La guerre en Europe eut aussi une autre répercussion, économique celle-là. En fermant les frontières aux produits européens en 1807 par l’Embargo Act, le président Jefferson voulait préserver la neutralité de son pays. Il n’eut pas conscience que « cet isolement commercial est un énorme coup de fouet donné à l’industrie et à l’économie manufacturière américaine (p. 24) » comme l’observera quarante plus tard Friedrich List.

     

    Les ambitions oubliées des États-Unis

     

    Sylvain Roussillon insiste aussi sur la jeunesse territoriale et les divisions politiques profondes des États-Unis. Ils doivent gérer le doublement de leur superficie avec l’acquisition en 1804 de la Louisiane francophone. Ils doivent prendre en compte l’affaiblissement à leur frontière méridionale de l’Empire colonial espagnol et la présence, au Nord, du Canada britannique où vivent environ 700 000 Américains loyalistes à George III et leurs familles. Mais « entre 450 000 et 500 000 loyalistes demeurent aux États-Unis. Ils constitueront l’aile dure du futur Parti fédéraliste (p. 29) ». Les luttes politiques sont implacables entre les fédéralistes, tenants d’un État central fort, d’une économie industrielle et commerciale dynamique, et d’un conservatisme culturel qui les rapproche de la Grande-Bretagne, et les démocrates-républicains, favorables au droit des États, des minorités religieuses, d’une économie agraire et d’une vision plus progressiste. Leurs chefs de file, Thomas Jefferson et James Madison, sont accusés de s’inspirer de la France et de son jacobinisme sanguinaire.

     

    Excédés par les provocations britanniques, les États-Unis déclarent la guerre à son ancien colonisateur en juin 1812. James Madison prévoit une guerre rapide et victorieuse, car il n’imagine pas capable les « Tuniques rouges » mener deux guerres simultanées ! Or les généraux étatsuniens sont surtout des militaires de salon, habitués de la bouteille et promus non d’après leurs compétences militaires nullissimes mais selon leurs inclinations politiques. Ils minorent la présence de « 5 200 combattants britanniques, soldats aguerris (p. 43) » au Canada, et ne comprennent pas que le Bas-Canada francophone et le Haut-Canada anglophone « sont en grande partie peuplées de loyalistes américains et leurs descendants, prêts et impatients d’en découdre avec ceux qu’ils considèrent comme de dangereux révolutionnaires et spoliateurs de leurs biens, tandis que les populations francophones, conservatrices et catholiques, ne paraissent pas mieux disposées à l’égard des Américains soupçonnés de vouloir imposer le protestantisme, abolir la propriété et interdire la pratique du français (p. 44) ». La méfiance des Canadiens-Français envers la jeune République étoilée est ancienne. Nicole Bacharan a raison de faire appel à la longue durée et aux suites des Guerres de Sept Ans (1756 – 1763) et d’Indépendance.

     

    À rebours d’une opinion communément admise dans l’Hexagone, George Washington n’était pas du tout un ami de la France. Vétéran de la Guerre de Sept Ans contre les Français et leurs alliés amérindiens, ce francophobe notoire se définissait résolument anti-catholique. L’anti-catholicisme est consubstantiel aux États-Unis puisqu’on fit grief de sa foi à John Fitzgerald Kennedy en 1960. Auparavant, les W.A.S.P. n’appréciaient guère les Italiens et les Irlandais pour cette même raison. George Washington accepta l’alliance française par pragmatisme politico-militaire. On oublie cependant que Washington et les siens souhaitaient rejeter les Anglais de toute l’Amérique du Nord. Dès 1775, les Insurgents lancent des raids contre les forces anglaises installées au Canada. L’action prend une nouvelle ampleur l’année suivante quand des rebelles américains s’emparent de Montréal avant de reculer devant les murs de Québec. Frustré par cette entreprise de conquête ratée, en janvier 1778, le Congrès continental américain nomme La Fayette commandant en chef d’une armée d’invasion du Canada britannique. L’intention officielle est de soulever les Canadiens-Français et de faire du Canada le 14e État de l’Union. En réalité, le Congrès, protestant et maçonnique, entend à la fois laver l’affront de 1776 et abolir le Quebec Act qui allie deux puissances conservatrices, l’Église catholique canadienne-française et la Couronne anglaise. Les futurs Étatsuniens veulent aussi l’arrêt des conversions amérindiennes au catholicisme et s’horrifient à l’idée de voir des réformés obéir à des papistes ! Toutefois, faute de moyens et d’aides réelles, La Fayette renonce. Les États-Unis n’oublient pas oublié cet objectif et, en déclarant la guerre en 1812, ils espèrent enfin « conquérir le Canada pour chasser définitivement les Britanniques du continent d’une part, infliger une telle défaite à leurs alliés indiens qu’il deviendra facile de les soumettre durablement, d’autre part (p. 37) ».

     

    Sylvain Roussillon dépeint avec un brio certain les différentes phases de la guerre. Celle-ci se déroule sur plusieurs fronts, d’abord au Nord-Est, dans la région des Grands Lacs avec des batailles navales et lacustres, et au Nord-Ouest. Puis, ensuite, dans le Sud, dans le Golfe du Mexique et sur le Mississippi. La guerre est aussi navale et se passe tant le long de la Côte Est qu’au large des Bermudes et du Venezuela, près des littoraux européens et même dans le Pacifique. « En effet, Américains comme Britanniques vont s’aventurer durant ce conflit dans ces vastes étendues, encore à l’époque mal connues : les premiers, pour tenter d’entraver, avec un succès mitigé, le commerce entre les Indes britanniques et le sous-continent américain, et les seconds, pour y défendre leurs intérêts économiques (p. 99) ». Des marins étatsuniens s’installent à Nuku Hiva, une île des Marquises en 1813. Ils y pacifient les tribus locales et en commencent la colonisation…

     

    Un conflit polymorphe complexe

     

    L’ouvrage de Sylvain Roussillon est riche en détails et en anecdotes et il retrace avec une minutieuse précision, parfois cartographique, offensives, batailles et embuscades. Il évoque par exemple le blocus étatsunien de la forteresse espagnole de Pensacola, la prise par les États-Unis de la ville espagnole de Mobile ou l’occupation britannique d’une ville du Maine. Si les Cherokees combattent pour leur malheur aux côtés des États-Unis comme d’ailleurs 200 volontaires européens anti-britanniques venus du Haut-Canada, la plupart des Amérindiens sont les alliés des Britanniques. Cette entente est due au chef de guerre des Shawnees, Tecumseh, qui sera fait général de Sa Gracieuse Majesté ! Accompagné de son frère, Tenskwatawa, qui prophétise l’unité peau-rouge, Tecumseh envisage une confédération amérindienne et obtient de Londres le droit d’avoir un État au Sud des Grands Lacs, ce qui arrêterait l’expansion occidentale des États-Unis. Ceux-ci se retrouveraient coincés entre cet État, le Canada britannique, le Mexique espagnol qui commence près des berges du Mississippi et une Floride espagnole, britannique ou indépendante. Mais cette nouvelle géographie politique de l’Amérique du Nord repose sur le sort des armes.

     

    Si l’armée étatsunienne franchit le Saint-Laurent et tente d’occuper le Bas-Canada en hiver 1812 – 1813, l’invasion rate encore face à la farouche détermination des Canadiens-Français. En réponse, en 1814, les Britanniques incitent les Creeks à se soulever dans le Sud, occupent la Floride et débarquent en Louisiane. Toutes ces manœuvres tactiques neutralisent les deux belligérants. En revanche, « la petite marine des États-Unis va surprendre par son esprit résolument offensif (p. 59) ». L’U.S. Navy naissante montre même une supériorité certaine sur la Royal Navy ! Sylvain Roussillon relève « la terrible incapacité des Britanniques à utiliser correctement leurs vaisseaux corsaires (p. 169) », à la différence des Étatsuniens.

     

    En 1814, les Britanniques tentent deux actions décisives. Après avoir débarqué dans la baie de Chesapeake, les Britanniques marchent sur Washington. « Les troupes américains, mal disposées, mal organisées, mal commandées se débandent sous les assauts des vétérans anglais (pp. 123 – 124). » Le 24 août 1814, la Maison Blanche et les édifices publics (Congrès, ministères…) sont incendiés. En revanche, les domiciles privés ne sont ni pillés ni brûlés. La destruction de la capitale fédérale suscite un grand élan de patriotisme étatsunien. Deux généraux étatsuniens, Jacob Brown et Winfield Scott, commencent à instruire les troupes des États-Unis à l’européenne. Toutefois, l’improvisation demeure, surtout à La Nouvelle-Orléans où, menacée par les Britanniques, le général U.S. Andrew Jackson se résigne à solliciter l’appui des francophones et des Baratariens, les flibustiers des frères Lafitte. La contre-attaque qu’il mène contraint les Britanniques à rembarquer et lui assurera en 1828 la présidence des États-Unis !

     

    Une paix blanche entérinant le statu quo est accepté à Gand, alors dans le Royaume-Uni des Pays-Bas, le 2 décembre 1814. « Les Britanniques s’engagent à cesser leur politique de provocation maritime, à relâcher tous les Américains enrôlés de force sur les navires de Sa Gracieuse Majesté, et à restituer l’ensemble des bâtiments américains confisqués (p. 146). » La frontière avec le Canada est quelque peu rectifiée et Mobile rattachée à l’Union, mais Londres refuse de rendre les 3 à 4 000 esclaves étatsuniens ralliés. Affranchis, ils seront envoyés en Afrique au Sierra Leone.

     

    Grâce à Sylvain Roussillon, le lecteur français dispose enfin d’une étude roborative traitant de cette guerre anglo-américaine méconnue pour laquelle il faut, pour une fois, regretter la défaite britannique.

     

    Georges Feltin-Tracol http://www.europemaxima.com/

    • Sylvain Roussillon, L’autre 1812. La seconde Guerre de l’Indépendance américaine, préface de Nicole Bacharan, Bernard Giovanangeli Éditeur, Paris, 2012, 191 p., 18 €.