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C’est un précepte évangélique que l’on reconnaît un arbre à ses fruits. Nos républicains sincèrement amoureux de la France devraient en prendre graine, car il n’est pas certain que leur position fasse montre d’une cohérence à toute épreuve. La République a plus d’un siècle maintenant, et un retour sur expérience est non seulement possible, mais sans doute bienvenu. Or, que montre un simple regard rapide ? Deux guerres mondiales, dont la première a connu une paix boiteuse, et dont la seconde a été perdue en trois semaines ; une décolonisation bâclée et entachée de crimes, dont nous payons encore aujourd’hui les conséquences en ce qui concerne l’Algérie et l’Afrique noire ; un large mensonge sur les « conquêtes sociales », dont les plus significatives ont été le fait des catholiques sociaux antirépublicains au XIXe siècle, avant l’avènement de la République, et contre la gauche, qui craignait que cela fasse mentir son dogme de la lutte des classes ; une pérennisation de la division des Français par l’anticléricalisme ; une contradiction mortelle entre la prétention de maintenir une morale chrétienne et l’effort constant pour détruire la religion qui la justifiait ; enfin, une double soumission, après 1945, au pouvoir américain et à l’idéologie marxiste, qui a conduit à faire de la France la couveuse de beaucoup des grands criminels du XXe siècle, de Hô Chi Minh à Khomeiny – et rappelons que le Parti communiste chinois a été fondé dans la Concession Française de Shanghaï. Sur le plan institutionnel, cinq républiques en cent cinquante ans, pour une monarchie en huit cents ans ; sur le plan international, le passage du premier rang parmi les pays, disputé avec l’Angleterre, au cinquième ou sixième. La République a dilapidé en quelques décennies le patient acquis de la Monarchie. Si l’on est honnête, il n’y a franchement pas de quoi pavoiser !
Oui, mais voilà, nous avons la Cinquième, la République gaullienne avec ses institutions stables et solides, des institutions à toute épreuve, aptes à répondre à toutes les crises.
Parlons-en. On peut faire remarquer tout d’abord aux chantres de la Cinquième que, née de la crise algérienne qui a emporté la Quatrième, elle-même n’a été confrontée jusqu’ici qu’à une crise majeure, mai 68, alors qu’elle n’avait que dix ans d’âge et que son fondateur était toujours au pouvoir. La preuve de sa solidité est donc mince.
Quant à sa stabilité, rappelons que la Constitution a connu depuis 1958 une vingtaine de modifications : les lois fondamentales de la Monarchie étaient autrement plus stables. A ceci, on répond communément que la plupart des modifications sont dues à l’intégration européenne, et c’est vrai, et que cette intégration a été initiée sous la Quatrième, et c’est encore vrai. Mais si la stabilité des institutions républicaines est incompatible avec l’Union Européenne, il ne fallait pas entrer dans l’Union, ou plutôt, puisque c’était fait, en sortir ; si on accepte cette Union en perpétuelle construction, on accepte le principe d’une instabilité chronique de la constitution. Or, si la constitution définit les institutions, son instabilité rend celles-ci instables, et la République avec elle.
Qui plus est, le passage du septennat au quinquennat, pour le mandat du Président, n’a pas été, que l’on sache, commandé par l’Union Européenne.
De surcroît, l’instabilité institutionnelle s’est toujours doublée d’une forte instabilité juridique : la République, de quelque numéro qu’elle soit, a toujours été en insurrection permanente contre sa propre légalité, et elle ne peut pas ne pas l’être étant donné qu’elle repose sur un principe révolutionnaire, c’est-à-dire un principe de changement permanent. Or, qu’on n’aille pas nous dire qu’il en va autrement avec la Cinquième : sa constitution l’inscrit ouvertement dans l’héritage de 1789. Il arrive un temps où il faut assumer ses choix : 89, ou la stabilité, mais on ne peut pas avoir l’un sans l’autre.
Tout ceci n’a pas échappé au regard des plus sagaces, ou des moins prévenus. Mais on entend souvent dire alors que la Cinquième souffre du fait qu’elle a été faite sur mesure pour le général de Gaulle. A la bonne heure ! Imagine-t-on une Monarchie taillée, telle une cotte de mailles, pour le seul Louis XIV, ou pour son aïeul saint Louis ? Un régime serait donc fait pour une personne ? Si telle a été la pensée de de Gaulle, c’est assurément la plus grande injure qu’il ait faite aux Français. Nous laissons les historiens éclaircir ce point.
Mais cette histoire de République couturière va loin, car ne faut-il pas voir l’origine du mythe de la stabilité de la Cinquième dans le fait qu’elle a survécu… à son fondateur ?! Quel exploit en vérité, quelle gloire pour des institutions que de perdurer plus que dix ou quinze ans ! Le père Ubu n’est pas loin.
Il ne faut pas oublier, enfin, que, sur un plan politique et social, la Cinquième, c’est celle qui a vu la plongée à vitesse accélérée de la France dans le matérialisme le plus effréné – c’était l’heure du Concorde. Le terrain était préparé, certes, l’emprise de la société de consommation à l’américaine a joué pleinement, c’est vrai. Mais à tout le moins faut-il constater que la Cinquième a été impuissante à s’y opposer, si elle ne l’a pas encouragée positivement. Et le grand homme lui-même, pourtant adversaire farouche des américains, qu’a-t-il fait, sinon assimiler le progrès à la machine à laver et au frigidaire, et l’ordre au fait de ne pas bambocher et de se tenir bien à table ? Quelle grandeur en effet, quelle hauteur de vue !
De manière plus grave encore, peut-être, de Gaulle et la Cinquième, c’est le maintien du pouvoir communiste sur les esprits, à travers le monde de l’éducation et de l’édition. On pourra une nouvelle fois trouver des excuses : cette fois, c’était l’URSS qui était puissante…
De quelque manière qu’on l’envisage, cette « monarchie républicaine » n’est en réalité qu’une République monarchique, c’est-à-dire un régime qui concentre, et de plus en plus, le pouvoir entre les mains du Président, avec charge à lui de prendre en main la Révolution. La Cinquième République, c’est la Révolution par le monarque – quand la Troisième, c’était la Révolution par le Parlement, comme à la belle époque, la guillotine sur la place publique en moins ; les autres ne comptent pas.
En définitive, la Cinquième est bien l’achèvement de l’idée républicaine : c’est la Révolution installée dans les dorures des palais. Son triomphe.
Peut-on être amoureux de la France et être républicain ? Oui, si l’on ne sait pas ce que l’on dit, d’un côté ou de l’autre. Ou, ce qui revient au même, si l’on confond, une fois de plus, le réel avec une idée. Comme le dit si bien de nos jours un certain locataire, « on ne bâtit rien sur des mensonges. » Sur des illusions non plus.



Invité dimanche du « Grand-Rendez vous » Europe 1-CNews- Les Echos, le ministre de l’Economie Bruno Lemaire a rappelé qu’il était hors de question de rétablir l’ISF, mais que le gouvernement privilégiait la piste d’un matraquage des classes moyennes qualifiées de «supérieures». Ainsi, l’exécutif renoncerait finalement à la suppression de la taxe d’habitation pour les 20 % des ménages dits les plus aisés, prévue initialement pour 2021. Une mesure imaginée pour calmer la colère des Gilets Jaunes, lesquels seraient sensibles si on l’en croit nos dirigeants, à ce genre de tour de passe-passe démagogique consistant à toujours taper sur les mêmes. Ils n’ont décidemment rien compris. Le 4 janvier, Ingrid Feuerstein soulignait dans 
Cependant, même si le mouvement est susceptible d’avoir des conséquences sur, voire contre, le système, ceux qui pensent pouvoir le récupérer au moins en partie se font sans doute des illusions car il est essentiellement hors système. Les tentatives politiciennes sont grossières (M. Philippot qui dépose l’appellation « gilets jaunes »), ridicules (M. Mélenchon qui croit voir en M. Drouet la réincarnation du terroriste robespierriste de Varennes), ou simplement bien naïves (MM. Jardin ou Lalanne qui sont tentés par l’aventure électorale). Ceux-là n’ont pas compris l’essentiel d’un mouvement dont le surgissement incongru et les manifestations a-politiques sont plutôt le signe d’une réaction salutaire du fameux, mais bien mal en point, « pays réel » et dont le mot d’ordre, pour reprendre la formule de M. Zemmour, serait : « On ne veut pas mourir ! » M. Berger, secrétaire général de la CFDT, ne s’y trompe d’ailleurs pas lorsqu’il déclare sur les ondes de France Inter (6 janvier), que le mouvement est essentiellement « réactionnaire ».
, délégué général de La République en marche, qui justifie son hostilité au RIC par le refus de voir les Français décider par exemple de rétablir la peine de mort (BFMTV, 17 décembre).