Les multiples possibles du futur
On y relève une grande variété de thèmes qui constituent, par leur traitement, une vue du monde. Il n'y a en effet pas de vue du monde si on n'aborde que des enjeux économiques ou géopolitiques, ou épistémologiques, ce qui ne serait déjà pas si mal. Il faut de l'esthétique, et de l'histoire, et de la littérature, et du style. Sans le moins du monde annexer les écrivains, il faut les entendre, et les donner à comprendre comme des créateurs de sens, et non pas de simples amuseurs pour « temps de loisirs ». Au temps des idéologies « à la mode » est en ce sens la suite indispensable de Vu de droite. Il y avait bien sûr des points de vue contestables chez AdB : réduire le complexe Merleau-Ponty, le subtil Henri Lefebvre, le foisonnant Deleuze, aux « enfants de Marx et Freud » (dans le premier article du «Figaro-Dimanche» en 1977)étaitun peu court. (Cela eût été confortable d'en rester là, ce qui dispensait de les lire tout aussi bien que de lire Marx et Freud). Mais si AdB était parfois rapide, il n'était ni malhonnête ni figé, ainsi que ses évolutions ultérieures l'ont montré. Et il y avait toujours chez lui une grande capacité d'interroger les généalogies des idées et donc les multiples possibles du futur.