Europe et Union européenne - Page 854
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"Le 'non' grec est une vraie défaite pour l'Allemagne", décrypte Éric Zemmour
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Jacques Sapir : le vote grec ou la revanche du non au référendum de 2005
Jacques Sapir analyse les conséquences du non grec. Pour lui, ce vote est un point de basculement qui va influencer tout l’avenir de l’Europe.
La place Syntagma en liesse au soir du référendum du 5 juillet
La victoire du « Non » au référendum organisé en Grèce ce 5 juillet est un événement historique. En dépit des pressions nombreuses pour un vote « Oui » tant de la part des médias grecs que de celui des dirigeants de l’Union européenne, en dépit de l’organisation par la BCE des conditions d’une panique bancaire, le peuple grec a fait entendre sa voix. Il l’a fait avec une force inaccoutumée, puisque contrairement à ce que laissaient penser les sondages réalisés à la sortie des urnes, la victoire du « Non » est obtenue avec un écart important, par près de 60%. Cela renforce bien évidemment le gouvernement d’Alexis Tsipras et devrait faire réfléchir ses interlocuteurs. Nous verrons rapidement ce qu’il en sera.
Cette victoire du « Non » n’est pas non plus sans réveiller des souvenirs amers en France. Elle a lieu quasiment dix ans après une autre victoire du « Non », cette fois dans notre pays (ainsi qu’au Pays-Bas). Il s’agissait alors, en 2005, du projet de Traité constitutionnel européen. Ce projet fut rejeté dans notre pays par plus de 54% des suffrages. Pourtant, après des manœuvres multiples, un texte presque similaire, le « Traité de Lisbonne », fut adopté au « congrès » quelques années après par le biais d’une alliance sans principe entre l’UMP et le PS. De là date certainement la rupture que l’on constate entre les élites politiques et médiatiques et les électeurs. Ce déni de la démocratie, ce vol d’un vote souverain, est une blessure profonde chez de nombreux français. La large victoire du « Non » grec vient réactiver cette blessure et pourrait pousser les électeurs à demander des comptes pour un passé qui décidément ne passe pas. [....]
La suite sur Le Figaro.vox
http://www.actionfrancaise.net/craf/?Jacques-Sapir-le-vote-grec-ou-la
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Jean-Philippe Chauvin : Le référendum, déni de la démocratie représentative ? Ma réponse à Jean-Marie Colombani (2)
Décidément, le référendum agace ou fait peur, au moins à une partie de la « classe dominante », et M. Colombani ne manque pas à la liste des dénonciateurs de ce mode d'appel au peuple souvent mal considéré dans la plupart des pays européens. Ainsi, dans son article de Direct-Matin du lundi 6 juillet, le deuxième argument de Jean-Marie Colombani contre le Grec Tsipras est donc un grand classique : « Deuxième illusion : le référendum serait le triomphe de la démocratie. Il s'agit pourtant d'abord d'un déni de la démocratie représentative, de la part d'un gouvernement qui, fuyant ses responsabilités de peur d'avoir à assumer des mesures impopulaires, trouve un dérivatif. » Un déni de la démocratie représentative ? Cela mérite examen, mais rappelle furieusement l'argumentaire des parlementaires socialistes et républicains de tous les bords contre le recours au référendum (« au plébiscite », disaient alors certains, reprenant le terme employé par les pouvoirs napoléoniens, premier et second, au XIXe siècle) par le général de Gaulle qui avait ainsi, à la grande fureur des députés dépossédés et impuissants, fait avaliser par le peuple électoral français l'élection du président de la République au suffrage universel direct, en 1962.
En fait, la réalité est moins simpliste que le propos de M. Colombani : le référendum s'apparente effectivement à une forme de démocratie directe plus « immédiate » et qui appelle une réponse claire, concise et, d'une certaine façon, qui tranche quand la démocratie représentative incite plus à la négociation, à la manœuvre ou au compromis (voire à la compromission) : c'est peut-être ce côté « tranchant » du référendum qui déplaît tant aux appareils politiques et partisans qui n'y retrouvent pas vraiment leur compte car un référendum « divise » souvent les partis eux-mêmes. C'est aussi sans doute ce court-circuitage des assemblées, « doublées » par l'appel direct aux électeurs, sans intermédiaires représentatifs, et qui rend ces derniers et leurs institutions apparemment inutiles : d'ailleurs, il m’apparaît très significatif que le corps électoral se soit plus mobilisé à l'occasion du référendum de mai 2005 sur le Traité constitutionnel européen que lors des consultations électorales suivantes pour la désignation des députés européens, ces dernières battant des records d'abstention, symbole d'une certaine fatigue démocratique ou d'un désaveu non moins démocratique...
En somme, le désamour démocratique actuel n'est-il pas, aussi, la marque d'une moindre efficacité ou popularité (ou les deux à la fois) d'un système parlementaire qui souffre d'un éloignement de sa base citoyenne et de l'accélération du temps (en fait d’une perception différente de celui-ci, renforcée par les moyens modernes de l'information et par les réseaux sociaux d'origine technologique qui « écrasent » le temps, et donc imposent une sorte d'impatience permanente) ?
Mais, pour autant, le référendum est-il un « déni de la démocratie représentative » à tout coup ? Dans le cas grec, cela serait plutôt, et au moins pour la Grèce elle-même, le contraire ! Effectivement, c'est le gouvernement issu des urnes de janvier dernier, qui dispose d'une majorité au parlement, qui en appelle à tous les électeurs au lieu de s'en remettre uniquement aux siens, à sa majorité parlementaire (qui lui aurait, de toute façon, donné son aval face aux créanciers) ou au lieu, comme cela se peut en France (mais pas en Grèce, me semble-t-il), d'appliquer un « 49-3 » qui aurait tous les aspects d'une défiance du Pouvoir à l'égard de sa propre majorité, ce qui n'est visiblement pas le cas à Athènes... Ainsi, M. Colombani me semble bien mal fondé à parler comme il le fait du référendum hellène, car ce dernier me semble plutôt « doublement » démocratique, d'autant plus que M. Tsipras n'avait pas d'obligation constitutionnelle à le convoquer : c'est plutôt un moyen de légitimer à nouveau, et même de « sacraliser démocratiquement » sa politique face à ses partenaires internationaux. La réaction de M. Colombani, a contrario, montre sa propre peur du corps électoral, et des peuples en général, à qui il semble ne vouloir accorder que le droit de désigner épisodiquement des représentants qui, ensuite, pourront faire ce qu'ils veulent ou ce que veulent ou exigent d'autres, au-delà des instances démocratiques, y compris à rebours des programmes ou des promesses qui leur ont permis de se faire élire...
Est-ce « fuir ses responsabilités de peur d'avoir à assumer des mesures impopulaires », comme le prétend encore M. Colombani ? N'est-ce pas, au contraire, associer les électeurs à la prise de décision et de direction, les responsabiliser au risque d'en assumer les conséquences, quelles qu'elles soient ? Dans une situation difficile, cette forme de mobilisation électorale peut se défendre et me semble audacieuse : à défaut de résoudre le problème de la dette grecque, elle engage concrètement les citoyens qui, justement, ne peuvent plus se défausser sur le parlement, trop souvent dénoncé (et souvent à raison dans nos démocraties représentatives contemporaines assimilées de plus en plus à des oligarchies « illégitimes » si elles peuvent être légales) comme « le tombeau des espoirs du peuple »... Les réactions des partisans du « Oxi » grec insistent d'ailleurs sur ce point : reprendre en main leur destin, même si celui s'annonce bien incertain et, peut-être même, cruel, est le plus important : en somme, rompre avec le sentiment de dépossession qui, trop souvent, prévaut en démocratie représentative !
M. Colombani, faute de s'extraire du mode de pensée oligarchique d'une certaine « classe discutante » (selon l'expression de Max Weber), ne peut pas vraiment saisir cette sorte de « révolution politique » qui, pourtant, n'en est une que parce que les démocraties et les institutions européennes comme internationales ont négligé ce qui fait le fondement de toute véritable légitimité : non le peuple (au sens du corps civique « unique » de la nation) en lui-même, mais le service de celui-ci, de son présent comme de son avenir, et de ses différentes composantes, aussi diverses et hétérogènes soient-elles, sa « satisfaction » (qui se doit d’éviter d’être une flatterie démagogique, mais doit valoriser le meilleur de lui-même en tant que peuple « communauté de destin ») par le service de sa structure d'accueil et de vie, éminemment politique, et que les anciens Grecs nommaient la Polis, ou « Cité », en attendant qu'elle devienne Etat.
Si l’on s’extrait du contexte hellène, et que l’on se penche sur le cas de la France, il n’est pas inutile de se rappeler des propos de Pierre Boutang : ce philosophe monarchiste considérait que, dans notre pays et au regard de son histoire politique, la République était incapable de mener cette révolution civique, et que la Monarchie, si elle revenait, ne devrait pas, elle, oublier cette source de la légitimité politique : « le droit du Prince naît du besoin du peuple »... Et ce droit comme ce besoin peuvent s’accorder, sans doute, par le moyen du référendum (qui n’est pas une fin, juste un outil), ce moyen qui fait si peur à notre cher M. Colombani ! Une leçon à méditer, en somme, au-delà de la seule Grèce qui, comme dans l’Antiquité, nous donne peut-être quelques nouvelles occasions de (re)penser la politique…
(à suivre, ce soir ou demain : encore quelques réponses aux arguments de M. Colombani…)
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Poutine cristallise la haine occidentale envers la Russie
Nos dirigeants ne sont plus que des boules de haine prêtes à fondre sur n’importe quel individu ou nation. Ne supportant plus le débat, ils cherchent à imposer les dogmes atlantistes par la contrainte ou la force.
« La haine rend non seulement aveugle et sourd mais incroyablement bête » (Konrad Lorenz).
Comment ne pas voir les désastres économiques qui se profilent en poussant la Russie à se tourner vers l’est ? La Russie aurait pu permettre de tisser des liens avec les pays du BRICS 1 et de l’OCS 2. À la vitalité extérieure, nos dirigeants préfèrent s’enfermer dans le cercueil bruxellois.
Ils ont été sourds aux cris d’un peuple grec ravagé par une austérité venant principalement d’un endettement lié à des dépenses militaires ordonnées par l’OTAN pour faire prospérer le complexe militaro-industriel occidental. Combien de retraites ou d’emplois sacrifiés pour un F-16 américain financé par la dette ?
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Les USA orchestrent la politique de Kiev: la preuve dans le texte
Source : Sputnik
L’ancien ministre ukrainien des Affaires étrangères Leonid Kozhara a publié le 3 juillet sur sa page Facebook un extrait de la lettre du sénateur américain Dick Durbin au premier ministre ukrainien Arseni Iatseniouk, dans laquelle il donne des conseils sur la gestion des ressources humaines au sein du groupe dirigeant en Ukraine.
Cher Monsieur le Premier Ministre Iatseniouk,
Je vous écris afin de vous assurer que le Sénat continue d’avoir confiance en vous et partage vos préoccupations concernant le licenciement imminent du président Piotr Porochenko, l’une des figures clés du gouvernement ukrainien, entièrement dévoué à la promotion de la démocratie dans votre pays. Je suis d’accord qu’il est nécessaire de faire tous les efforts pour garder Alexeï Pavlenko à son poste de ministre de la politique agraire de l’Ukraine. Son licenciement créerait des obstacles supplémentaires à l’expansion de la coopération entre les entreprises agricoles des Etats-Unis et l’Ukraine. Je crois aussi qu’il est crucial de s’assurer que Yuri Nedashkovsky restera président de la société Energoatom (Compagnie nationale de production d’énergie nucléaire d’Ukraine, ndlr).
On peut déduire de la lettre que M. Durbin et M. Iatseniouk ont négocié sur des remaniements au sein du gouvernement ukrainien à différents moments. Le sénateur écrit notamment que ses collègues se sont mis d’accord et partagent entièrement son point de vue selon lequel ni Vladimir Demchishin, le ministre ukrainien de l’énergie, ni Sergueï Kostiuk, directeur de Ukrgazvydobuvannya, une entreprise spécialisée dans l’exploration et la gestion pétrolière et gazière, ne répondent aux exigences de leurs fonctions. Pourtant, pour le moment, il n’existe aucune solution claire s’agissant du ministre de l’Intérieur Arsen Avakov.
“Les voilà, de vrais marionnettistes de la politique ukrainienne moderne”, déplore Leonid Kozhara
Crédit photo : Sénateur Dick Durbin via Flickr (CC) = Center for American Progress Action Fund
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Entretien avec Michel Drac sur l’actualité économique et financière
Entretien avec Michel Drac sur l’actualité économique et financière, réalisé le 23 mai 2015 par E&R Reims.
Questions de la partie 1 :
Sommes-nous sortis de la crise de 2008 ?
7min05 : Quels sont les impacts économiques de la récente chute du cours du pétrole ?
14min20 : Pouvons-nous prédire un krach obligataire à venir prochainement ?
18min35 : Dans la situation financière actuelle, où placer son argent ? L’or et l’argent sont-ils de bonnes options ?
25min : Pensez-vous que la Grèce va prochainement sortir de la zone euro et la faire exploser ?
Questions de la partie 2 :
La Chine peut-elle amener le yuan à remplacer le dollar ?
3min15 : Une révolution énergétique relancerait-elle l’économie ? Le nucléaire au thorium est-il prometteur en ce sens ?
9min05 : Concernant le concept de BAD (Base autonome durable), quel est votre objectif ? Quel bilan en faites-vous aujourd’hui ?
13min : Selon votre expérience, quels sont les schémas de BAD qui fonctionnent et ceux qui ne fonctionnent pas ?
18min25 : Quelles sont vos impressions sur le dernier livre d’Emmanuel Todd,Qui est Charlie ?
Question bonus :
Pouvez-vous détailler ce qui nous a amenés à cette crise de la dette ?
Note du C.N.C. : Michel Drac interviendra à Lille avec Maurice Gendre sur le Traité transatlantique à l'occasion de notre conférence de rentrée au mois de septembre.
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Au pied du mur
Il jubilait, le rédacteur de "L'Humanité" dans son espèce d'éditorial du 6 juillet. Il l'intitulait en effet "La lutte des classes jusqu’au fond des urnes". Le camarade Thomas Lemahieu allait même plus loin, qui développait, non sans une pointe de triomphalisme : "En Grèce, les nantis, enragés pour beaucoup, ont, par tous les moyens, cherché à sortir de l’Histoire le peuple qui, lui, veut en finir avec l’austérité et avec leurs privilèges."
"L'Huma" a donc ainsi trouvé un filon à exploiter. Et, dès le lendemain, 7 juillet le quotidien communiste publie un entretien avec Giorgos Katrougalos, ministre de la réforme administrative. Celui-ci développe la même idée, la même ligne, la même doctrine. "Le non au référendum a été un vote de classe". Et, membre de Syriza il se veut formel : "ce sont les plus modestes qui ont relevé la tête et ouvert une alternative en Europe en rejetant massivement l'austérité imposée".
Si de telles perspectives devaient se développer ce n'est pas Syriza, mais la bonne vieille matrice nourricière de ce mouvement, c'est-à-dire le parti communiste grec, ce KKE qu'on appelait parti "de l'extérieur" parce que, vaincu de la guerre civile en 1948 il s'était retrouvé dans les camps d'Europe centrale et du bloc soviétique, qui serait appelé à sortir de son pourcentage considéré, à tort malheureusement, de dérisoire soit encore 5,5 % en janvier.
Or, la nouvelle "majorité" de 61 %, a encore été obtenue sur un mensonge renouvelé. C'est l'affirmation selon laquelle un État pourrait à la fois demeure dans l'union monétaire tout en refusant les disciplines qu'elle impose, qui a permis aux 36 % de Syriza de s'adjoindre, comme je l’ai écrit le 6 juillet, en me basant sur les scores respectifs de janvier les 5,5 % des staliniens, les 8,8 % d'Aube dorée, mouvement effectivement prolétarien, lui, mais mal connoté je crois par la rédaction de "L'Huma" et les petits courants souverainistes comme celui du ministre actuel de la Défense, le très incertain Kammenos dont le parti "Anel" rassemble 4,6 % plus quelques broutilles.
Le vote européen "rationnel" de janvier, celui sur lequel Antonis Samaras appelait à constituer un front "rationnel" en vue de futures élections, qu'il estimait ou qu'il espérait proches, retrouve son pourcentage de 39 %, couvrant par conséquent, à la fois, les conservateurs de la Nouvelle Démocratie, sociaux démocrates du "Pasok" et réformateurs de gauche de "Potami" et surtout les forces de la société civile.
J'entends ici par "rationnel" le point de vue, ayant mesuré tout le bénéfice que la Grèce a, depuis 30 ans, effectivement retiré de son appartenance à l'Europe institutionnelle, qui consiste à en accepter certaines contreparties.
Contrairement à ce que leurs admirateurs sincères ou laudateurs intéressés croient ou laissent croire le tandem Tsipras-Varoufakis a développé une rhétorique "irrationnelle" : ils avaient affirmé en janvier, et répété en juillet, vouloir continuer à appartenir à la zone euro, tout en traitant leurs partenaires de "terroristes".
Ce "nationalisme" de façade, irrationnel et démagogique, a marqué un point le 5 juillet. En cela Tsipras s'est montré un vrai professionnel de l'agitation, ce dont il ne fallait pas douter. Il lui reste à démontrer qu'il sait gouverner à l'intérieur et négocier à l'extérieur. Je demeure dans l'attente de l'administration du premier indice d'une telle hypothèse, possible certes, mais entièrement indémontrée à ce jour.
Jouer sur les deux tableaux ne pourra plus durer.
La jour même où s'ouvrent des négociations cruciales, tant pour l'avenir du peuple grec, que pour l'ensemble de la famille européenne, mais aussi, ne l'oublions pas, pour notre système de défense face au terrorisme et aux flux migratoires massifs, on ne peut que souhaiter que, par d'intelligentes et nécessaires concessions, M. Tsipras démente ma forte tendance au scepticisme.
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La Grèce dans l'Alliance
Quelque soit le résultat du référendum grec - que nul ne peut prédire avant comptage des bulletins - il est un nouveau chapitre qui va s'ouvrir et ajouter au désordre, c'est celui de la géopolitique. Par sa position centrale et avancée au sud, la thalassocratie gouverne toute la Méditerranée orientale, zone de conflits ouverts (Syrie, Libye) et de conflits latents (Liban, Palestine, Egypte). Elle contrôle aussi le débouché des Détroits.
S'il n'est pas admissible pour les acteurs majeurs (USA et OTAN) que les armées grecques puissent s'effondrer derrière l'économie voire la société grecque, se posera néanmoins la question des soldes, des soutes, des vivres et munitions et de la maintenance. Qui paiera en se substituant à l'Etat cachexique ? Les Etats-Unis n'y comptent pas venir et poussent l'Union européenne à mettre un mouchoir sur la trésorerie de la dette grecque, les enjeux stratégiques dépassant pour eux la mort de quelques créanciers imprudents. Car le loup est aux portes de la Thrace : la Russie surveille !
Eh oui ! Le rêve éveillé du Kremlin n'est-il pas de faire aux Etats-Unis le coup du berger à la bergère ? Cerné de partout, à son tour de passer dans le dos de l'Alliance, en obtenant par exemple en Thessalie une station navale en remplacement de la base de Tartous menacée par l'issue fatale du conflit syrien. Et plus si affinités. Affinités ? Elles existent ! La Grèce et la Russie ont la même religion d'Etat, constitutionnelle ici, simplement pratiquée par le pouvoir là-bas. Des alphabets cousins. Une imprégnation communiste indéniable (qui avait déclenché en Grèce le coup d'Etat des colonels du 21 avril 1967). Et, dit en passant, c'est pareil avec la Serbie.- Le croiseur russe Pietr Veliki - La Grèce a déjà des intérêts alternatifs, sans même prendre en compte sa marine marchande - la première du monde¹ qui contrôle 16% du tonnage mondial - et sa diaspora commerçante établie partout en relais. Les apôtres de la rupture le savent bien, qui surestiment quand même le ressort ethnique de la nation, le virus de l'Etat-providence a fait d'irréparables dégâts : donnons en esprit le pays des six mille îles aux Chinois pour observer la différence de développement en seulement vingt ans ! Le petit laboratoire du Pirée est éclairant.
On ne peut laisser dans l'ombre le handicap historique de productions commerciales insuffisantes qui obèrent l'émergence d'une véritable économie, qui vend surtout... du soleil et de la pierre ponce² !- Mykonos - Tout ceci pour dire que les calculs d'actuaires ne décideront rien aujourd'hui ni demain quant au sort réservé à la Grèce, même si le référendum emportait un gouvernement de petit pied, impuissant à jamais créer l'Etat que le pays attend depuis... 190 ans et (nous sommes sur Royal-Artillerie) que la monarchie fut incapable de construire ! On pardonnera au tandem Tsipras-Varoufakis de n'avoir pu y atteindre, seuls. On ne leur pardonnera pas d'avoir jeté les administrateurs étrangers qui s'y attelèrent avec un début de succès.
C'est le défi géostratégique qui va commander la suite des événements. On va beaucoup parler de tout ça dans les bureaux de l'Alliance, à Bruxelles, Norfolk, et au Pentagone d'abord. Poutine fera-t-il escaler demain un de ses beaux croiseurs dans le Golfe de Salonique ? Juste pour voir l'effet produit ?OTAN - frégates grecque et turque de conserve - Incapables de régler la question par eux-mêmes, comme dans la Guerre de Yougoslavie, les trois pays majeurs de l'Eurogroupe (Al, Fr et It) vont recevoir incessamment sous peu l'ordre du jour de nos parrains américains : « Absorbez votre problème à vos frais ! La vieille Europe nous gonfle.» Sauf que deux d'entre-nous sont en phase ultime de gangrène gazeuse.
(1) Selon Clarksons, classement en tonnage armé par le pays quelque soit le pavillon en poupe. En nombre de navires, seul le Japon est devant.
(2) L'article très bien fait de la Wikipedia nous économise un paragraphe fastidieux mais il ignore quand même les armateurs. -
Couverture médiatique du référendum en Grèce : le meilleur du pire
Quand la désinformation côtoie le ridicule... C'est à découvrir ici pour ceux qui auraient encore un doute sur l'objectivité des "médias encadrants".
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Les démagogues marquent un point
Déroutante par son ampleur la victoire de Tspiras dans le référendum qu'il a provoqué devrait appeler autre chose que des lamentations à droite et des trépignements joyeusement impulsifs à gauche. On peut malheureusement interroger l'Histoire, celle du peuple grec autant que celle de l'Europe pour trouver d'autres exemples mais aussi de contre-exemples, la psychologie de la guerre découlant de la psychologie des foules.
Visiblement en effet les dirigeants européens actuels ne jouent pas tous la même partition. Mais plus grave encore, ils ne jouent pas dans la même cour que les deux dirigeants grecs. On nous assure que Mme Lagarde, juriste brillante, disposait de toutes les qualités pour diriger une haute technocratie comme le FMI. J'observe cependant qu'elle n'a jamais livré un combat politique. À sa façon elle a parfaitement exprimé son agacement de ne pas parler le même langage que ses interlocuteurs en demandant de réserver la négociation de Bruxelles à ce qu'elle appelle des personnes adultes.
Or, face au désespoir des peuples, les équations de la technocratie, les artifices des juristes et les raisons des diplomates ne tiennent pas.
La décision de fermer les banques, techniquement inévitable, si elle n'a pas provoqué les paniques violentes redoutées, a sans doute puissamment contribué, par l'humiliation répétée, à rendre aux gens le sentiment, peut-être illusoire mais objectivement mobilisateur, que leur dignité dépendait du "non" de leur chef.
Le même mot avait résumé la réponse du général Metaxas en octobre 1940, auquel se rallia tout un pays, victorieusement rassemblé contre l'ultimatum.
Tous ces souvenirs se sont emparés des moteurs irrationnels pour renverser une situation initialement défavorable au gouvernement. Ne perdons pas de vue qu'il a bénéficié de l'apport de trois partis extrêmement différents de Syriza.
Si l'on se base sur les élections de janvier, derniers chiffres disponibles, on retrouve en effet un rapport de forces arithmétiques inchangées. Le parti communiste avec ses 5,5 % de voix a voté non comme un seul homme. S'y ajoutent l'Anel des Grecs indépendants, l'équivalent de nos villiéristes (4,8 %) l'Aube dorée (8,8 %). C'est avec de telles composantes, pour le moins disparates que M. Tsipras peut se prévaloir d'une majorité provisoirement écrasante.
Les 3 partis proeuropéens n'avaient obtenu alors que 27,8 % pour nouvelle Démocratie, en progression de 5 points, le PASOK 4,7 % et 6,1 % pour le parti réformiste de centre gauche To Potami (1) : additionnés c'est à peu près exactement le pourcentage de 39 % que l'on retrouve pour le oui, auquel appelaient pourtant toutes les forces raisonnables et constructives de la société civile. Saluons la décision très digne d'Antonis Samaras qui, prenait acte de ce qu'il considère comme sa défaite à su démissionner de la présidence de son parti. Et disons au revoir à l'un des très rares hommes d'État grec digne de ce nom.
Les petits hommes gris et les grands roublards qui nous dirigent disposeront des cartes les plus fortes dans les jours qui viennent. Se montreront-ils capables de maîtriser un processus qu'ils n'ont pas appris dans leur cursus de temps calme ? cela dépendra de l'habileté, et de la capacité de modération, dont fera preuve, de son côté, le gouvernement d'Athènes. Dès son discours enregistré hier soir, Tsipras s'est essayé à ce registre, nouveau pour lui, mais certainement préparé, calculé, peut-être même téléguidé. Annoncé ce matin, le départ de son complice Varoufakis, présenté comme 'le' provocateur le confirme.
C'est au pied du mur qu'on voit le maçon.
Rappelons que jusqu'ici, en presque six mois, ce gouvernement n'a accompli aucune réforme, n'a fait voter aucune loi nécessaire pour redresser l'administration publique, faire mieux fonctionner la justice, adapter l'université aux besoins du pays, redonner l'espoir et le sens de l'entreprise, etc.
Que l'Histoire recommence toujours reste ma conviction (2) : on ne jugera pas cette réalité nécessairement rassurante.
JG Malliarakis
Apostilles
- lire l'entretien de son président Stavros Theodorakis publié par Le Monde le 5 juin : il considère que "Syriza fait partie de l’ancien système politique" ⇑
- J'ai accepté de faire une conférence sur la situation grecque ce soir à 20 h dans le cadre toujours amical du Café Liberté, au "Coup d'État" (c'est le nom de la salle !) 164 rue Saint-Honoré 75002 Paris. Vous y êtes les bienvenus …⇑
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