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plus ou moins philo - Page 23

  • L'animal

    Depuis Aristote et le christianisme, notre société n'a fait que rabaisser, exclure l'animal de la communauté des hommes. Et pourtant, cela ne l'a pas empêché de le faire travailler, le faire participer à la guerre, s'en servir comme compagnon de jeu ou de solitude, de l'utiliser pour sa sécurité, tout cela pour finir parfois comme nourriture pour l'homme. Ce mépris ou sentiment de supériorité a été ambivalent car l'homme a toujours en même temps ressenti sa proximité avec l'animal.

    L'animal inférieur à l'homme

    Pour Aristote, l'homme est un animal qui parle, donc doué de raison ce qui sous-entend que l'animal n'a pas de raison. L'animal ne pense pas. Le christianisme aggravera cette déchéance puisqu'il n'accordera pas d'âme à l'animal. Dans le christianisme, il y a une coupure totale entre l'homme et l'animal. L'homme a été créé à l'image de Dieu. La zoophilie devient péché mortel et même un crime contre-nature.

    Plus philosophiquement, Descartes comparera l'animal à une machine (ce qu'on peut interpréter comme la vision du mécanisme s'opposant au vitalisme). Les animaux n'ont pas de pensée car ils n'ont pas de langage. L'animal n'est donc qu'un corps.

    Pour reprendre l'expression de Pascal, ce n'est pas un « roseau pensant ».

    Malebranche extrémisera cette vision : « Les bêtes mangent sans plaisir, crient sans douleur, croissent sans le savoir, elles ne désirent rien, elles ne craignent rien, elles ne connaissent rien ».

    La Mettrie inversera cette pensée pour l'appliquer à l'homme. Il n'y a pas de différence entre l'homme et l'animal si ce n'est un degré supérieur de perfection.

    Rousseau ne situera pas la différence sur la pensée mais pour lui, l'homme est libre à la différence de l'animal qui obéit à la nature.

    L'homme et l'animal ont souvent été comparés dans leurs aptitudes. Si de nombreux animaux sont supérieurs à l'homme dans un ou plusieurs domaines (vitesse, instinct, force, combat, faculté de voler chez les oiseaux, ...) l'homme est multifonctionnel. Son potentiel physique (celui du singe) lui permet de pratiquement tout faire. Il suffit de regarder la gymnastique aux Jeux Olympiques. Son intelligence lui a même permis de voler et de voyager sous l'eau.

    Condillac a publié « Le Traité des Animaux » (1755). Il s'oppose à Descartes. L'animal peut juger, penser, avoir de la mémoire ... L'homme a pu dépasser l'animal grâce au langage. Il y a donc continuité entre l'homme et l'animal, idée que l'on retrouvera dans la théorie de l'évolution. On n'oppose plus l'homme à l'animal. On accorde à l'animal le fait de souffrir.

    L'anthropologue Claude Lévi-Strauss défendra fortement la cause animale. Semblable à Rousseau, il fait l'éloge de la pitié vis-à-vis de tout ce qui est vivant. Les animaux sont des êtres sensibles.

    « Jamais mieux qu'au terme des quatre derniers siècles de son histoire, l'homme occidental ne put-il comprendre qu'en s'arrogeant le droit de séparer radicalement l'humanité de l'animalité en accordant à l'une tout ce qu'il retirait à l'autre, il ouvrait un cycle maudit, et que la même frontière, constamment reculée, servirait à écarter les hommes d'autres hommes, et à revendiquer, au profit des minorités toujours plus restreintes, le privilège d'un humanisme, corrompu aussitôt né, pour avoir emprunté à l'amour-propre son principe et sa notion » (Lévi-Strauss)

    Plus globalement, Lévi-Strauss critique la séparation entre l'homme et la nature.

    « En isolant l'homme du reste de la création, en définissant trop étroitement les limites qui l'en séparent, l'humanisme occidental hérité de l'Antiquité et de la Renaissance l'a privé d'un glacis protecteur ». (Lévi-Strauss)

    L'anthropologue a été considéré comme un antihumaniste. L'humanisme occidental est selon lui une synthèse du christianisme (unité du genre humain) et de la pensée de Descartes (l'homme maître et possesseur de la nature).

    « Toutes les tragédies que nous avons vécues, d'abord le colonialisme, puis avec le fascisme, enfin les camps d'extermination, cela s'inscrit non en opposition ou en contradiction avec le prétendu humanisme sous la forme où nous le pratiquons depuis plusieurs siècles, mais, disais-je, presque dans son prolongement naturel ». Cet anti-cartésianisme rappelle Heidegger.

    Différences homme-animal

    Si l'on récapitule les différences les plus manifestes entre l'homme et l'animal, il y a tout d'abord le langage qui n'est pas du même ordre de complexité et de plasticité chez l'homme.

    Il y a aussi la conscience : « Ce qui élève l'homme par rapport à l'animal, c'est la conscience qu 'il a d'être animal. Du fait qu 'il sait qu 'il est un animal, il cesse de l'être ». (Hegel)

    Si l'instinct est un atout et une force, il n'a pas la vertu créative de l'intelligence. Il ne fait que répéter. L'homme a une histoire, alors que les sociétés animales ne font que se répéter, du moins à notre échelle.

    La politisation de l'éthologie

    En observant le monde animal, l'homme n'a pu s'empêcher d'en tirer des conclusions pour lui-même.

    Dans le film « Mon oncle d'Amérique », Laborit veut montrer que face à une agression, l'homme (ou l'animal) n'avait que deux choix : le combat ou la fuite. S'il ne peut faire l’un des deux, il subit l'inhibition. Il s'est appuyé sur des études avec l'animal. Le réflexe conditionné du chien chez Pavlov peut s'appliquer à l'homme. L'Autrichien Konrad Lorenz observa pendant de longues années les animaux pour y découvrir l'agressivité innée. Les hommes vont voir chez les animaux ce qu'ils veulent y trouver. Gide, pour justifier son orientation homosexuelle, répertoriait les cas d'homosexualité chez les animaux.

    On a souvent dit que les animaux ne tuaient que pour se nourrir, ce qui est faux. Chez les animaux existent la monogamie ou la polygamie, la fidélité ou le vagabondage.

    La somme la plus accomplie sur l'application du monde animal à l'homme fut la sociobiologie. Elle fut accusée d'être raciste, sexiste, fasciste ... Demande-t-on à une théorie qui se veut « scientifique » d'être humaniste ? Le clivage entre les humanistes et les antihumanistes sur cette théorie fut parfois violent et pouvait détruire une carrière. On retrouvait toutes les vieilles questions entre l'inné et l'acquis, l'hérédité de l'intelligence, la justification de la hiérarchie. La sociobiologie voulait même expliquer des comportements comme le racisme, le sexisme, la xénophobie au-delà des jugements moraux.

    La grande critique vis-à-vis de la sociobiologie fut qu'elle niait ou minimisait le fait culturel. Il faut reconnaître que le débat sur ce courant de pensée fut viscéral dans les deux camps.

    Au sentiment de supériorité de l'homme vis-à-vis de l'animal a succédé une inflation d'amour envers lui de la part de certains. Cela s'est accompagné parfois de misanthropie comme chez Schopenhauer qui disait mieux aimer son chien que Spinoza. On a créé les droits de l'animal. Chaque être vivant a le droit de vivre. Des hommes ont été condamnés pour cruauté envers les animaux. Obligera-t-on les hommes à devenir végétariens et cela les rendra-t-il meilleurs ? (Hitler aimait les animaux et était végétarien).

    Patrice GROS-SUAUDEAU

  • De Leibniz à Herder et de Herder au romantisme

    Archives 1985

    Chers amis, ce texte constitue les trois premiers sous-chapitres d'un livre en projet dans les années 80. Il est resté inachevé.

    1.1 Notions philosophiques de base.

    1.1.1 La leçon de Leibniz; les monades:

    Prédécesseur de Leibniz, Christian Thomasius (1655-1728), fondateur de l'Université de Halle, développe un sys­tème éthique/philosophique, selon lequel nos croyances doivent être sanctionnées à partir de notre seule intério­rité et non à partir d'une autorité extérieure. L'individu, dans ce système fondé par Thomasius, doit être capable (et donc s'efforcer) de suivre sa propre lumière, sa propre "raison". De cette vision de la nature et de l'agir humains, dé­coule automatiquement un relativisme, donc une acception des différences qui constituent la trame du monde, une acception inconditionnelle du pluriel, de la diversité. Pour Thomasius, son système et ses retombées, comme tout autre espèce de savoir, doit déboucher sur des applications pratiques in vita civilis . Cette figure de l'histoire des idées philosophiques, dont la personne constitue le lien entre la Renaissance et les Lumières, nous lègue ici des principes clairs, une éthique de l'action: la diversité est telle et l'on ne saurait la contourner. De ce fait, nos juge­ments doivent se laisser diriger par une approche relativiste, non mutilante et non réductionniste du monde et des hommes. Ce relativisme doit déboucher ensuite sur un agir respectueux de ces différences qui font le monde. Indubitablement, notre volonté de donner un autre visage à l'Europe, s'inspire de cette démarche vieille de presque trois siècles. Dans notre optique, les Lumières ne constituent nullement un programme rigide, un catéchisme stéré­lisateur, une religion sèche de la Raison (comme avaient voulu l'instaurer les Jacobins français) mais bien plutôt l'attention au monde, le respect des créations spontanées de l'esprit et de l'histoire, la sagesse du jardinier qui har­monise, dans ses parterres, les fleurs les plus diverses... Mais cette attention doit être couplée à une vigilance, une milice spirituelle qui veille à ce que les mutilateurs de toutes obédiences, les réductionnistes de tous acabits ne viennent troubler cette splendide harmonie du monde.

    Avec Leibniz, les intuitions de Thomasius, les prolégomènes que ce fondateur de l'Université de Halle a posés, s'affineront. L'orientation rationaliste de sa pensée ne l'a nullement empêché de jeter les bases de la grande syn­thèse organiciste que furent le Sturm und Drang  et le Romantisme. Le rationalsime cartésien et spinozien descen­dent, chez Leibniz, au niveau des monades. Celles-ci sont chacune différente: il n'y en a pas deux d'identiques. Et chacune de ces monades acquiert continuellement un "état" nouveau. Leibniz découvre ainsi un devenir  constant, un développement incessant de forces et d'énergies intérieures, une continuité ininterrompue. L'état présent d'une monade est le résultat d'un état antérieur et, par suite, tout état présent est gros de son avenir. L'univers de Leibniz, contrairement à celui de Descartes, n'est plus une somme de parties, mais un tout qui déploie ses divers aspects .  Le concert international, pour nous, est également une globalité politique qui déploie, sous l'impulsion d'agirs hu­mains, des perspectives, des possibles divers. Cette variété infinie constitue une richesse et notre humanisme veillera à ce que cette richesse ne s'épuise pas. C'est là que s'inscrit la liberté: dans la capacité de déployer collecti­vement un possible original, d'inscrire dans l'histoire une geste unique à côté d'autres gestes uniques. In vita civi­lis , pour reprendre l'expression latine de Thomasius, cette vision implique l'organisation fédéraliste des grands ensembles civilisationnels (chaque monade peut ainsi assumer son devenir sans contraintes extérieures) et le dia­logue fraternel entre les diverses civilisations du globe. Dialogue d'attention et non de prosélytisme mutilant...

    1.1.2. Herder: des monades aux peuples

    Herder va dépasser Leibniz. De l'œuvre de ce dernier, Herder avait retenu l'énergie interne des monades, génératrice de devenirs spécifiques. Mais, pour Leibniz, chaque monade, activée de l'intérieur, n'avait aucune "fenêtre" exté­rieure, aucune ouverture sur le monde. Leibniz dépassait certes l'atomisme qui voyait des particules sans énergie in­térieure, mais ne concevait pas encore des monades en interaction les unes avec les autres. Cet isolement des mo­nades disparaît chez Herder. Dans sa vision philosophique, chaque unité (un individu ou un peuple) entre en interac­tion avec d'autres unités. Toute individualité singulière ou collective, loin d'être renfermée sur elle-même, dérive la conscience intérieure qu'elle possède d'elle-même de l'extérieur, c'est-à-dire du contact d'avec le monde qui l'entoure. Si ce monde était absent, cette conscience ne pourrait jamais s'éveiller. Herder nous propose ainsi une image du monde où les diverses parties constituantes sont toutes activement liées les unes aux autres au sein d'un réseau dynamique de réciprocité. Cela signifie qu'aucune individualité ne peut, dans l'univers, ni exister indépen­demment du contexte de ses inter-relations ni être comprise comme en dehors de celles-ci. En restant au niveau de développement conceptuel de Leibniz, on risquait de concevoir le concert international comme un ensemble de na­tions repliées sur elles-mêmes et jalouses de leurs petites particularités. On risquait l'albanisation ou, pire, l'incompréhension réciproque. On risquait d'asseoir une image du monde justifiant les nationalismes ou les particu­larismes d'exclusion, les réflexes identitaires de rejet. Et, donc, les bellicismes stériles... Avec Herder, ce risque s'évanouit, dans le sens où la diversité est production hétérogène et incessante d'un fond de monde, rationnelle­ment indéfinissable. Les éléments divers ont pour tâche de mettre en exergue le maximum de possibles, de "colorier" sans relâche le monde, d'échapper sans cesse à la grisaille de l'uniformité. Le respect des identités pos­tule la solidarité et la réciprocité. En termes politiques actualisés, nous dirions que la défense des identités régio­nales, nationales, culturelles, civilisationnelles, etc. exige comme indispensable corollaire la solidarité inter-ré­gionale, internationale, inter-culturelle, inter-civilisationnelle, etc.

    L'objectif d'une Europe alternative serait donc de valoriser les peuples avec les productions littéraires, culturelles et politiques qu'ils forgent et de lutter contre l'arasement des spécificités qu'entament automatiquement les sys­tèmes niveleurs, en tout temps et en tout lieu, quelle que soient d'ailleurs leurs orgines et leurs référentiels philo­sophiques ou idéologiques.

    1.1.2.1. La tradition romantique

    Le système philosophique de Herder constitue indubitablement une réaction à l'encontre d'un certain despotisme éclairé, qui ne se donnait plus pour objet, comme dans le chef d'un Frédéric II, de défendre un pays en tant que havre de liberté religieuse par tous les moyens militaires modernes, mais un despotisme éclairé, transformé par l'érosion du temps en fonctionnarisme uniformisant, en praxis de mise au pas des libertés locales. Ce despotisme, perçu sous l'angle d'une praxis générale et définitive et non plus comme praxis postulée par l'Ernstfall permanent que vit une société contestataire (la Prusse de Frédéric était le havre des Huguenots et des Protestants de Salzbourg, de bon nombre de "non conformists" britanniques et d'Israëlites, de piétistes) menacée par ses voisines conservatrices, renforce l'autocratie au lieu de l'assouplir et la justifie, en dernière instance, au nom du progrès ou de la raison, se donnant, dans la foulée, l'aura d'un "humanisme". La vision organique de Herder génère, elle, un humanisme radica­lement autre. Le peuple, la population, le paysannat, chez Herder, n'est pas le "cheptel" taillable et corvéable à merci d'une machine étatique, d'un appareil de pouvoir, qui justifie son fonctionnement par référence à la raison mécaniste. L'humanisme herdérien ne nie pas la vie intérieure, le devenir créatif, de cette population, de ce peuple. La substance populaire n'est pas déterminée, dans cette optique, par des ukases venus d'en-haut, promulgués par le pouvoir de l'autocrate ou d'une oligarchie détachée du gros de la population, mais se justifie d'en-bas, c'est-à-dire au départ des phénomènes de créativité littéraire ou scientifique, économique ou religieux que suscite la collectivité, le peuple. En un mot: c'est le Travail global du peuple qui justifie, doit ou devrait justifier, son existence politique ainsi que le mode de fonctionnement qui régirait cette même existence politique.

    La tradition romantique procède donc d'un recentrement ontologique, écrit le grand spécialiste français du roman­tisme allemand, Georges Gusdorf. Ce recentrement, Thomasius l'avait déjà tenté, en réfutant toute détermination venue de l'extérieur. Le message démocratique et identitaire du romantisme postule ipso facto un système de repré­sentation impliquant, comme en Suisse, le référendum, la participation directe des citoyens à la défense de la Cité, l'autonomie locale (cantonale, en l'occurrence) et la neutralité armée. Ces pratiques politiques et administratives éliminent les despotismes autocratiques, oligarchiques et partitocratiques, tout en tarissant à la source les vélléités impérialistes, les visées hégémoniques et les chimères conquérantes. En outre, le recentrement ontologique ro­mantique, in vita civilis et à l'âge de l'économisme, signifie une protection du travail local, national (au sens de confédéral) contre les manipulations et les fluctuations des marchés extérieurs. La tradition romantique nous lègue un réflexe d'auto-défense serein et harmonieux qu'oublient, nient et boycottent les idéologies missionnaires et prosélytes qui régentent le monde d'aujourd'hui et colonisent les médias, dans l'espoir d'uniformiser le monde sous prétexte de l'humaniser selon les critères de l'humanisme mécanique. La soif d'alternative passe inmanquablement par un nouveau choix d'humanisme qui, à l'absence de sens observable à notre époque de désenchantement post-moderne (c'est-à-dire postérieur aux séductions actives de l'humanisme mécaniste), reconférera au monde une sura­bondance de sens. Au niveau des individus comme au niveau des individualités collectives que sont les peuples, l'existence n'a de sens que si elle permet le déploiement d'une spécificité ou, mieux, une participation active, con­crète et tangible à la geste humaine totale. 

    http://robertsteuckers.blogspot.fr/2014/06/de-leibniz-herder-et-de-herder-au.html

  • La philosophie est-elle destinée à tous ? Entretien avec Jean de Rouen

    Jean de Rouen est l’auteur d’Apprendre à penser à l’école du réel, initiation à la philosophie (que nous avions évoqué ici, et qui est disponible ici).

    Nous reproduisons ci-dessous l’entretien qu’il a donné au site NDF :

    Jean de Rouen, pensez-vous, en écrivant une initiation à la philosophie, que la philosophie soit destinée à tous ?

    La philosophie est un exercice naturel à l’intelligence humaine. « Tous les hommes désirent naturellement savoir », observe Aristote en exergue de sa Métaphysique. N’est-ce pas ce dont témoigne le questionnement intarrissable de l’enfant ? L’homme est en effet un « animal raisonnable » : il est donc fondamentalement en quête de sens. Or, c’est précisément la philosophie qui portera à son aboutissement la réflexion qui se trouve en tout homme. D’ailleurs, notre manière de vivre, à elle seule, induit une philosophie : c’est dire à quel point il est difficile d’y échapper.

    Si la philosophie est naturelle à l’intelligence humaine, pourquoi a-t-on souvent l’impression qu’elle est réservée à une élite ?

    Pour chaque réalité naturelle, la philosophie recherche l’explication la plus ultime. En ce sens, la philosophie est la plus élevée des sciences. Elle aborde des vérités universelles, non sensibles, qui ne nous sont pas familières parce qu’elles sont les plus éloignées de notre expérience. Aristote nous avise, dans la Métaphysique, que notre esprit se tient, devant les objets les plus élevés de la philosophie, aveuglés comme les yeux d’une chouette devant le soleil.

     

    Cela explique le découragement que peut ressentir l’intelligence devant une science aussi exigente. Un découragement souvent accru car l’on entend trop souvent affirmer, au regard des contradictions qui subsistent dans le domaine des idées, que l’intelligence n’est finalement pas faite pour atteindre des vérités certaines et définitives. Mais affirmer qu’il n’y a pas de vérité, n’est-ce pas déjà affirmer une vérité ?

    Ne faut-il pas adopter une certaine attitude intellectuelle pour entrer en philosophie ?

    La relation que l’intelligence entretient avec le monde extérieur est le creuset d’où jaillit son questionnement. Lorsque l’intelligence affronte le réel, les interrogations qu’elle formule supposent et révèlent son étonnement face à des réalités qui semblent d’abord lui échapper. Ces réalités sont de tous ordres : anthropolgique, éthique, politique, métaphysique, artistique. Il reste que les choses ne répondent qu’aux questions qu’on leur pose : si ces réalités n’éveillent pas d’abord notre curiosité et ne provoquent pas notre questionnement, nous ne progresserons jamais dans leur connaissance. Il faut donc apprendre à s’émerveiller face au réel ! Cette admiration que nous portons sur les choses maintient l’intelligence en éveil. Ensuite, la philosophie s’emploiera à apporter à nos interrogations la plus haute explication susceptible d’étancher notre soif de connaître.

    N’est-ce pas orgueilleux de se prétendre philosophe ?

    Au contraire ! Etymlogiquement, la philosophie signifie l’amour de la sagesse : or, on est toujours privé de ce à quoi l’on aspire. C’est Pythagore qui sera le premier à utiliser le terme de philosophie : alors que ses contemporains le qualifiaient de sage, il récusa lui-même cette appellation, se présentant plus modestement comme un ami de la sagesse.

    Socrate lui-même, lorsqu’il affirme « Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien », est parfaitement philosophe ! Car il affirme par là qu’il est à la recherche de la vérité : il ne prétend pas la posséder. En ce sens, il est davantage philosophe, c’est-à-dire amoureux de la vérité, que sophiste, c’est-à-dire possesseur du savoir.

    En même temps, pas davantage le savant qui sait déjà ne recherche le savoir, pas davantage l’ignorant qui ignore ce dont il est privé ne le recherche… Le philosophe est donc tout à la fois savant et ignorant : car il ignore et il sait qu’il ignore. Cette prise de conscience est le point de départ de toute recherche philosophique loyale et désintéressée.

    Vous consacrez également, dans votre ouvrage, une partie à la logique et à la méthodologie ? Sont-elles réservées aux étudiants ?

    Non. Pour entamer une démarche philosophique honnête, l’intelligence doit d’abord adopter certaines dispositions dont se font notamment l’écho les exigences méthodologiques auxquelles un étudiant doit faire face.

    Ainsi, pour obtenir les bonnes réponses, il faut d’abord poser les bonnes questions : c’est tout l’art de la problématisation. Celle-ci traduit l’étonnement du philosophe face à un aspect du réel mis en lumière dans le sujet : une bonne problématique suscite une curiosité pour le sujet et rend intellectuellement disponible l’interlocuteur ou le lecteur. Poser un problème, c’est finalement provoquer l’intelligence afin de lui arracher une délibération : lorsqu’elle se heurte à une difficulté et qu’elle s’emploie à la surmonter, elle est alors excitée à développer un discours qui fait progresser la connaissance.

    Une autre exigence dans l’art de penser consiste à conceptualiser, c’est-à-dire définir ce dont on parle avant d’en parler ! Il n’est pas rare, dans une discussion, d’employer les même mots sans leur faire recouvrir la même signification : on ne parle plus alors de la même chose. Dans l’Antiquité grecque, les sophistes tiraient profit des mots mal définis, les vidaient de leur signification intellectuelle, et pouvaient alors affirmer tout et le contraire de tout… Socrate, en réhabilitant le sens de la définition, réhabilitera le sens de la vérité : face aux sophistes, il apparaîtra comme le médecin des intelligences malades et rongées par le scepticisme. La philosophie est sauvée.

    http://www.contre-info.com/la-philosophie-est-elle-destinee-a-tous-entretien-avec-jean-de-rouen#more-32963

  • Spinoza

    Spinoza fut avant tout un solitaire. Juif exclu de sa communauté, il ne devint pas chrétien pour autant. Cependant, son œuvre appartient totalement à la philosophie occidentale puisqu'il est dans le prolongement de la pensée platonicienne à la recherche de « La Vérité » et en identifiant le vrai et le bien. Ayant été nourri au cartésianisme, en restant un rationaliste et même en faisant l'apologie de la raison, il s'en distingue sur certains points. À la différence du Français, il a mis en place une doctrine morale et politique influencée par la société dans laquelle il vivait, c'est-à-dire la Hollande du XVIIeme siècle. Dans ce pays existait une cohabitation de religions différentes. Il n'y avait pas de religion officielle, si ce n'est dans les faits celle de l'argent et du commerce. À la différence de Pascal son contemporain, sa philosophie célébrera la joie.

    L'Ethique

    C'est le livre le plus important de Spinoza. Le livre est divisé en cinq parties.

    La première partie concerne Dieu. Celui-ci est substance qui est constituée par les attributs (propriétés perçues par l'entendement). Dieu est infini.

    « Tout ce qui est est en Dieu et rien ne peut sans Dieu être ni être conçu ». Dieu s'identifie à la Nature. « Deus sive Natura ». C'est-à-dire que Dieu est la Nature qui crée et tout ce qui existe vient de lui. « Natura naturans et natura naturata ».

    D'une façon similaire à Platon qui distingua la doxa et l'épistémè ou plus tard Hegel qui distinguera plusieurs étapes de la connaissance, Spinoza distingue trois sortes de connaissance :

    • l'opinion par ouï-dire ou l'imagination, qui engendrent des idées confuses,
    • la raison qui opère de façon déductive,
    • la science intuitive qui connaît à partir de l'idée de Dieu.

    Dans la troisième partie de l'Ethique, Spinoza traite des affects de façon iconoclaste comme le désir, la joie et la tristesse ...

    La conception du bien et du mal qui accroit ou diminue la puissance inspirera Nietzsche.

    La liberté consiste dans la connaissance de la nécessité. Connaître nous libère des affects. L'activité de l'homme doit donc être la connaissance vraie et même la connaissance de Dieu.

    La morale, la politique

    Rationaliste, Spinoza le sera aussi dans sa conception de la morale et de la politique. La conception du désir par exemple se différencie de Platon pour qui le désir était un manque. « Le désir est l'essence même de l'homme, en tant qu 'on la conçoit comme déterminée, par la suite d'une quelconque affectation d'elle-même, à faire quelque chose ». (Ethique)

    Nous désirons ce que nous sommes. Le désir nous réalise. Cette conception spinoziste s'oppose aussi à la vision chrétienne pour qui le désir était péché.

    Le désir chez Spinoza devient puissance.

    La liberté sera aussi réinterprétée d'une façon différente de Descartes. Chez le Français, l'âme était le siège d'une volonté, le « libre-arbitre ». Pour Spinoza, il n'y a là qu'illusion.

    Les hommes ignorent les causes qui les déterminent à agir. « Les hommes se trompent en ce qu 'ils se pensent libres, opinion qui consiste seulement en ceci, qu 'ils sont conscients de leurs actions, et ignorants des causes qui les déterminent. Donc cette idée qu 'ils ont de leur liberté

    vient de ce qu 'ils ne connaissent aucune cause de leurs actions. Car ce qu 'ils disent, que les actions humaines dépendent de leur volonté, ce sont des mots dont ils n 'ont aucune idée ». (Ethique)

    Lorsque les hommes sont indécis, c'est que des forces contraires les font hésiter.

    La conception spinoziste sur le mal influencera en partie Nietzsche. Aucune chose n'est mauvaise en soi. Elle sera interprétée comme mauvaise car elle nuira ou détruira une autre.

    De même, le bien est relatif ou subjectif. « La musique est bonne pour le mélancolique, mauvaise pour le désespéré et ni bonne ni mauvaise pour le sourd ».

    Comme le disaient déjà Socrate et Platon, le mal est lié à notre ignorance. L'ignorant peut croire au bien et au mal. « La connaissance du mal est une connaissance inadéquate ». (Ethique).

    Quant au mal absolu, la mort, Spinoza a une position similaire à celle que prendra Sartre. Philosopher ne consiste pas à méditer sur la mort. « L'homme libre ne pense à rien moins qu 'à la mort, et la sagesse est une méditation non de la mort, mais de la vie ». (Ethique).

    À la différence de Descartes, très prudent sur les questions politiques, Spinoza défendra la liberté et le refus de la tyrannie. Il prône la communauté des hommes libres : l'Etat doit organiser la sécurité et la liberté des individus. « La fin de l'Etat n'est pas de faire passer les hommes de la condition des êtres responsables à celle de bêtes brutes ou d'automates, mais au contraire il est institué pour que leur âme et leur corps s'acquittent en sûreté de toutes leurs fonctions, pour qu'eux-mêmes usent d'une Raison libre ». (Traité théologico-politique).

    « L'homme est un Dieu pour l'homme ». Les hommes doivent vivre sous la conduite de la raison.

    On retrouve aussi chez Spinoza des idées qui seront reprises par les économistes classiques anglais. L'égoïsme de chacun est utile pour tous. « C'est quand chaque homme recherche au plus haut point ce qui lui est utile que les hommes sont le plus utiles les uns aux autres ». On rejoint à la fois à la fois le libéralisme et l'individualisme.

    De la même façon, plus on est joyeux, plus on transmet sa joie aux autres.

    Le philosophe prône donc la joie opposée à la tristesse qui ne nous apprend rien, et l'amour face à la haine.

    Une autre façon d'unir les hommes est la recherche de la Vérité puisqu'elle est commune à tous les hommes, à la différence des opinions qui les divisent.

    Spinoza condamnait l'Utopie, mais il y avait dans sa doctrine une « croyance » en la Raison.

    Pour lui, connaître ses passions permet de les maîtriser. Fidèle à la tradition philosophique, la connaissance libère l'homme et lui fait acquérir la sagesse.

    Patrice GROS-SUAUDEAU

  • La pensée de Pascal

    Pascal a toujours pensé entre deux extrêmes. Sa philosophie se trouve aussi entre un prolongement de la philosophie médiévale où s'entremêlaient religion et philosophie, ainsi que le dilemme foi-raison, et l'anticipation d'une pensée moderne avec sa critique de la raison.

    Les anti-Lumières sont venus après les Lumières et pourtant Pascal pourrait être considéré comme un anti-Lumières avant l'heure avec non seulement sa vision aigüe des limites de la raison, mais aussi sa défense de la coutume et surtout de la religion chrétienne. Pour lui, la foi prime la raison.

    Il a été avant tout un apologiste de la foi chrétienne. Et comme tous les croyants, il a utilisé tous les moyens pour la faire partager comme le fameux pari de Pascal pour convaincre les esprits forts. Il a été aussi un anti-cartésien puisque le cœur est au-dessus de la raison. « Le cœur a ses raisons que la raison ignore ». « Nous connaissons la vérité non seulement par la raison mais encore par le cœur ». (Pensées)

    Pour Russel, Pascal a gâché son génie mathématique. Il est vrai que sa fièvre mystique est difficile à comprendre pour un esprit « rationnel ». Il faut peut-être l'expliquer par un corps malade qui a connu la souffrance comme un état second. Pascal s'est aussi imposé la mortification (il a porté une ceinture de cuir avec des clous). Il a pratiqué avec beaucoup de complaisance la haine de soi tout en se sachant grand, la jouissance à se sentir rien ou misérable. L'homme est un néant entre deux infinis, mais il avait conscience que sa grandeur résidait dans le fait qu'il était le seul vivant à penser. « L'homme est un roseau pensant ».

    Le jansénisme

    Pascal est devenu janséniste. Il faut donc expliquer cette doctrine. Ce courant se situe entre la théologie et la philosophie. Il vient du théologien hollandais Jansenius (XVIIeme siècle), qui veut revenir à Saint Augustin. La grâce n'est pas donnée à tous les hommes, idée qui s'oppose au libre-arbitre défendu par l'Eglise. Evidemment, cette interprétation janséniste sent le souffre protestant. Pascal s'attaquera aux Jésuites qui défendent la thèse officielle et sont donc du côté du Roi et du Pape. À travers cette querelle, l'augustinisme imprègne à nouveau la pensée philosophique et religieuse.

    Le jansénisme prône un rigorisme et s'oppose à une société qui veut être maîtresse de son destin comme le prône lecartésianisme.

    La raison est synonyme d'orgueil.

    La casuistique

    La casuistique est l'étude des cas de conscience. On cherche à appliquer à des cas particuliers les règles générales de la morale chrétienne. Ceci revient aux confesseurs. La plupart des casuistes étaient jésuites et minimisaient les fautes commises en trouvant une explication favorable à celui qui voulait se faire pardonner. Evidemment, cela ne pouvait que s'opposer au rigorisme janséniste.

    Pascal va attaquer les casuistes et les jésuites. Ces derniers confessaient les souverains et les puissants et pour ne pas les rejeter hors de l'Eglise, ils trouvaient des accommodements avec la morale.

    Le genre d'argument utilisé pour masquer un mensonge était « On peut jurer qu'on n'a pas fait une chose, quoiqu'on l'ait faite effectivement, en entendant soi-même qu'on ne l'a pas faite un certain jour, ou avant qu'on fut né... sans que les paroles dont on se sert aient aucun sens qui le puisse faire connaître »

    L'esprit de finesse et l'esprit de géométrie

    L'esprit de finesse chez Pascal est l'intuition. L'esprit de géométrie est celui qui raisonne. Alors que Bergson donnera plus d'importance à l'intuition qu'à la raison, pour Pascal l'esprit de finesse et l'esprit de géométrie sont les deux moyens d'accéder à la vérité. Les hommes la plupart du temps possèdent l'un ou l'autre à des degrés divers ou ni l'un ni l'autre. Les génies possèdent les deux de façon très développée.

    « Tous les géomètres seraient donc fins s'ils avaient la vue bonne, car ils ne raisonnent pas faux sur les principes qu'ils connaissent ; et les esprits fins seraient géomètres s'ils pouvaient plier leur vue vers les principes inaccoutumés de géométrie. ».

    Le cœur pour Pascal est aussi une intelligence intuitive.

    Le divertissement

    L'homme veut oublier qu'il est face au néant. Il doit donc s'abandonner dans le divertissement. Avec d'autres mots, Heidegger dira aussi que l'homme est inauthentique pour ne pas penser qu'il est un être-pour-la-mort.

    « Rien n'est si insupportable à l'homme que d'être dans un plein repos, sans passions, sans affaire, sans divertissement, sans application. Il sent alors son néant, son abandon, son insuffisance, sa dépendance, son impuissance, son vide. Incontinent, il sentira du fond de son âme l'ennui, la noirceur, la tristesse, le chagrin, le dépit, le désespoir ».

    Il faut s'étourdir de peur d'avoir à penser, ce que dira aussi Baudelaire dans son poème « Enivrez-vous ». L'homme ne veut pas découvrit son néant.

    « La seule chose qui nous console de nos misères est le divertissement et cependant c 'est la plus grande de nos misères ». (Pensée 411).

    Le pari de Pascal

    C'est un argument qui peut choquer certains chrétiens mais Pascal cherchait à convaincre les esprits forts. On peut difficilement considérer un calcul d'épicier pareil comme relevant de la foi. Ce pari est le calcul d'une espérance mathématique. Pascal a été avec Fermât le créateur de la théorie des probabilités.

    Si je parie que Dieu existe et qu'il existe je gagne tout, c'est-à-dire la félicité éternelle. Si je parie que Dieu existe et qu'il n'existe pas, je n'ai perdu qu'une existence finie.

    Dans l'autre cas, si je parie que Dieu n'existe pas et qu'il existe, je perds mon salut, la félicité éternelle. Si je parie qu'il n'existe pas et qu'il n'existe pas, je n'ai gagné qu'une existence finie.

    On a donc tout intérêt à parier sur l'existence de Dieu.

    Cet argument se veut donc rationnel, mais Pascal savait parfaitement que la foi n'est pas affaire de raison. Il s'adressait aux hommes qui calculent.

    Foi et raison

    On ne peut pas dire qu'il y a eu un conflit chez Pascal entre la foi et la raison. Il y a une humiliation de la raison par la foi. La raison n'est qu'une chimère. L'homme veut croire qu'il est maître de lui-même. Il doit se soumettre à Dieu.

    Chez Descartes, il y avait un optimisme de la nature humaine alors que Pascal ne voit qu'un homme misérable et dépendant par rapport à Dieu. Le pessimisme chrétien (l'homme est pêcheur) est poussé au paroxysme chez-Pascal.

    « Il ne faut aimer que Dieu et ne haïr que soi ». « Le moi est haïssable ».

    Les Pensées

    Ce livre devait se nommer « Apologie de la religion chrétienne ». On trouve des aphorismes et des développements où existe l'idée de démonstration « rationnelle ». La Vérité n'est pas unique et il n'existe pas de certitude. La vérité peut même se nier elle-même.

    « Tous errent d'autant plus dangereusement qu'ils suivent chacun une vérité ». Nietzsche qui éprouvait une attirance et une répulsion pour Pascal aura une position similaire sur la Vérité, même s'il exprimait son dégoût pour l'apologie pascalienne de l'homme misérable. Rien n'est vrai, rien n'est certain.

    L'homme ne peut comprendre ni lui-même, ni autrui. On retrouve Saint Augustin « Nesquio quid, ego ipse sum » « On n'aime personne que pour des qualités empruntées ».

    Pour Pascal, Descartes est « inutile et incertain ». Le philosophe janséniste sort de la démarche philosophique platonicienne à la recherche de « La Vérité ». Les vérités, comme plus tard chez Foucault, sont multiples et parfois contraires.

    Dans « Les Pensées », Pascal revient sans cesse sur la condition humaine. « En un sens, l'homme connaît qu'il est misérable puisqu'il l'est mais il est bien grand puisqu'il le connaît » (Pensée 112).

    « Toute notre dignité consiste en la pensée ».

    L'auto-flagellation permanente, la culpabilité que s'impose l'Occident n'est-elle pas qu'un bégaiement de cette forme de pensée chrétienne comme par exemple le propos très pascalien : « La France est grande à reconnaître ses fautes passées ».

    Au final, les réflexions de Pascal sur l'existence en feront un pré-existentialiste avant le très chrétien aussi mais venant du Nord, Kierkegaard.

    Patrice GROS-SUAUDEAU