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  • Le drame des migrants, fruit de la lâcheté des dirigeants européens – par Gilles Ardinat

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    Volontairement passée sous silence le temps de la séquence électorale (présidentielle et législative), la crise migratoire fait son retour dans les grands médias  : squat de la porte de la Chapelle, Calais, Vintimille… les reportages quotidiens rappellent la gravité de la situation. En 2016, la France a accueilli près de 100.000 « migrants » qui s’ajoutent aux 230.000 immigrés légaux bénéficiant d’un titre de séjour. Ce flux sera sans doute encore plus élevé en 2017.

    Cependant, la cause réelle et profonde de ce flot considérable n’est jamais soulignée par les journalistes. Ceux-ci invoquent « la guerre » ou « la misère » pour justifier ces déplacements massifs de population en direction de l’Europe. En réalité, ces « migrants » prennent la route de l’exil car ils y sont incités par nos dirigeants. Disons-le sans ambages : ce sont la politique d’accueil (très généreuse) et le laxisme de la classe politique européenne qui génèrent le chaos migratoire.

    La preuve nous en est donnée par de nombreux pays très développés qui ne connaissent aucun problème d’immigration. Par exemple, le Japon, malgré sa richesse, n’attire aucun « migrant » car il applique une politique très stricte basée sur le droit du sang et la tolérance zéro vis-à-vis des clandestins. La Corée du Sud et Taïwan suivent la même méthode avec succès alors que des millions de malheureux et d’opprimés vivent à proximité de ces îlots de prospérité (Philippines, Corée du Nord, Indonésie…). Ni la Russie ni les richissimes pays du Golfe ne voient arriver ces « migrants ». Par exemple, les Érythréens préfèrent faire 5.000 kilomètres pour venir en France (où ils seront généreusement pris en charge) plutôt que de traverser la mer Rouge pour atteindre l’Arabie saoudite voisine. En dépit de ses milliards de pétrodollars, l’État saoudien ne donne aucun avantage aux clandestins. Avec la même fermeté, l’Australie a mis fin en 2013 à une crise migratoire majeure grâce à son programme « frontières souveraines ». L’État australien a repoussé systématiquement les embarcations et diffusé des messages dissuasifs à destination des pays de départ. Le nombre de boat-people est ainsi passé de plus de 20.000 (2012) à zéro et les morts par noyade ont cessé.

    La France et l’Europe paient les conséquences, non pas de la guerre et de la misère du tiers-monde, mais de l’aveuglement criminel de leurs dirigeants. Lorsque Édouard Philippe annonce, le 12 juillet, la création de 12.500 places d’accueil supplémentaires, il envoie un message aux candidats à l’exil : la France va continuer, malgré sa situation identitaire, sécuritaire et économique alarmante, à accueillir des immigrés. Ces signaux, relayés par nos collectivités locales et le monde associatif subventionné, aggravent donc le problème. Nos politiques incitent clairement les « migrants » à venir en France, puisque notre pays leur accorde de nombreux avantages (que la plupart des pays du monde leur refusent). Tout laxisme dans l’accueil, la prise en charge ou le financement des « migrants », toute régularisation génèrent immédiatement de nouveaux départs. Lorsqu’un clandestin est logé, formé ou financé, ses proches restés au pays le savent et veulent légitimement bénéficier des mêmes largesses. Ce cercle vicieux, aggravé par le droit au regroupement familial, crée une situation que le géopolitologue Alexandre del Valle qualifie justement de « conquête humanitaire » de l’Europe.

    Accueillir des « migrants » avec l’argent du contribuable n’est en rien humaniste. Cela relève au contraire d’un aveuglement désastreux. En outre, cette immigration profite aux réseaux de passeurs et aux mafias, au patronat sans scrupule qui exploite les étrangers et aux islamistes qui voient dans ces cohortes d’immigrés un cheval de Troie pour investir l’Europe. Loin d’être « généreux », nos dirigeants sont en définitive responsables d’une erreur d’appréciation criminelle.

    Gilles Ardinat

    Texte repris du site  Boulevard Voltaire

    https://fr.novopress.info/

  • L’échec d’une politique

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    Alors que le G-20 de Hambourg se termine, et après les deux discours d’Emmanuel Macron et d’Edouard Philippe, le premier au Congrès et le second devant l’Assemblée Nationale, l’ampleur de l’échec à venir de la Présidence Macron se dessine. Ce n’est pas un point anecdotique, et il ne peut s’agir d’un constat réjouissant, mais c’est un fait : ce Président, élu sur un malentendu et appuyé sur une majorité elle-même probablement la plus mal élue de la République, va plonger la France dans une crise profonde.

    Une diplomatie ingénieuse mais perdante

    Reprenons la chronologie. A Hambourg, Emmanuel Macron, et avec lui la France, a été inaudible. Bien entendu, la première rencontre personnelle entre Donald Trump et Vladimir Poutine a concentré l’attention. Mais, au-delà, la France n’a pu faire entendre sa voix. Cela confirme un constat que l’on pouvait déjà tirer après l’échec personnel pour Emmanuel Macron qu’avait représenté le sommet européen des 22 et 23 juin. Il y avait été incapable de faire prendre en compte des revendications, que l’on peut trouver restreintes et qui constituaient le socle minimal des demandes françaises, à ses collègues de l’Union européenne.

    La stratégie d’Emmanuel Macron se déploie en deux temps. Dans le temps diplomatique, il entend jouer les intermédiaires, les « go between » pour reprendre le titre d’un grand film de Joseph Losey, entre Donald Trump et Angela Merkel, afin de bâtir un rapport de force vis-à-vis de l’Allemagne. C’est le sens de l’invitation qu’il a adressée au Président des Etats-Unis, invitation que ce dernier a acceptée, à venir assister avec lui au défilé du 14 juillet. Ce n’est pas une mauvaise idée, n’en déplaise à Jean-Luc Mélenchon sur ce point mal inspiré, mais il est clair que cela n’aura que peu d’effets. Donald Trump, dont on dit souvent que le comportement est erratique, poursuit en réalité une politique claire de défense des intérêts de son pays. Et cette politique est aujourd’hui contradictoire avec celle de l’Allemagne. Ce n’est pas une place dans la tribune d’honneur qui y changera quelque chose, quoi qu’en dise certains journalistes. Angela Merkel, qui affronte avec sérénité des élections au mois de septembre prochain, n’a nullement l’intention, ni la volonté, de faire la moindre concession que ce soit à Donald Trump ou, indirectement, à Emmanuel Macron. En effet, aujourd’hui le cadre de l’UE de la zone Euro fonctionne à plein pour les intérêts des entreprises allemandes. Elle n’acceptera des changements que contrainte et forcée.

    Quand Macron imite la « force des forts »

    Sans doute inquiet de la tournure prise par le volet diplomatique de sa stratégie, Emmanuel Macron a décidé de mettre en œuvre un volet interne. C’est le sens du discours d’Edouard Philippe,mardi 4 juillet, devant l’Assemblée Nationale. Prenant prétexte de la « découverte » par la Cour des Comptes d’un trou de 9 milliards dans les estimations budgétaires, il a décrété un tournant austéritaire, un de plus, pour l’économie française. On peut certes s’étonner de la « découverte », quand on se rappelle qu’Emmanuel Macron fut le Ministre de l’économie jusqu’à l’été 2016. Il s’agit bien évidemment d’un prétexte.

    En annonçant des coupes importantes dans les dépenses publiques (80 milliards sur 5 ans), le gel du point d’indice des fonctionnaires qui ont pourtant perdu largement en pouvoir d’achat depuis dix ans, et diverses autres mesures dont bien entendu la fameuse réforme du Code du Travail dont les conséquences en matière de pouvoir d’achat serons considérables, Edouard Philippe assume ce tournant austéritaire. Mais, il n’en dit pas la véritable raison.

    En fait, ce tournant n’est nullement lié au problème relevé par la Cour des Comptes. Emmanuel Macron est persuadé, et sur ce point on peut lui faire crédit de sa sincérité, que c’est en appliquant cette politique, et en remettant la France dans une orthodoxie comptable (avec le respect strict de la règle des 3% du déficit), qu’il va construire sa crédibilité face à l’Allemagne et à Mme Angela Merkel. Cela revient à croire que c’est en s’imposant une purge amère que l’on peut être pris au sérieux. C’est un raisonnement d’enfant de 10 ans qui se dit, devant cette purge : « les adultes la prennent bien, si j’en suis capable, ils me prendront au sérieux ». Cette logique fut magnifiquement décrite il y a 100 ans par Jack London dans un de ses nouvelles, La Force des Forts[1]. Sauf que la politique internationale n’obéit nullement à ces règles enfantines. Elle implique des logiques d’alliances, avec des pays connaissant les mêmes problèmes que nous, et surtout elle implique que l’on nous croit capable de « casser la vaisselle ».

    L’impact d’une purge austéritaire

    Cette purge austéritaire va plonger la France dans un nouvel épisode de récession. Il suffit pour le comprendre de lire attentivement les statistiques économiques. Nous vivons aujourd’hui sur un « plateau », lié à l’amélioration du pouvoir d’achat qui s’est manifestée depuis l’hiver 2016. Mais, et les statistiques de l’INSEE l’indiquent clairement, la contraction relative des revenus nominaux associée à une (très petite) poussée d’inflation, va provoquer une détérioration du pouvoir d’achat à partir de la fin de l’année 2017. Si, en 2018, viennent se combiner à cette détérioration les effets des mesures d’austérité décidées par Edouard Philippe et les effets des mesures structurelles, dont celles concernant le Code du Travail, alors la consommation et le revenu disponible des ménages se verront amputés. Cela conduira à une nouvelle période de baisse de l’activité, tout comme la politique de François Fillon, ou le choc fiscal de François Hollande avaient eux-aussi conduit à des baisses d’activités, autrement dit à des hausses, plus ou moins importantes du chômage.

    On comprend que les français, dans leur grande majorité, soient plus que circonspects quand aux mesures promises et annoncées par Emmanuel Macron et Edouard Philippe. Mais, cette circonspection peut très vite se tourner en mécontentement de fond. Or, il faut toujours le rappeler, le Président Macron a été élu sur un malentendu, par défaut, et sa majorité a réuni la plus faible proportion des inscrits par rapport à son nombre effectif de députés. Dans ces conditions, le contexte d’une crise politique grave, d’une crise politique qui pourrait déboucher sur une crise de régime, est d’ores et déjà en place.

    L’accumulation de poudre dans la Sainte-Barbe du navire France n’implique pas, évidemment, que tout va sauter. Mais, danser dans cette Sainte-Barbe avec une torche à la main, ce qui est métaphoriquement ce que font tant Emmanuel Macron qu’Edouard Philippe, et La République en Marche, dont l’attitude à l’Assemblée nationale par son refus du pluralisme mais aussi de par l’inexpérience de nombreux de ses députés, pose un véritable problème à la démocratie, est une attitude profondément malsaine et irresponsable.

    Le problème posé aux pays de la Zone Euro et de l’Union européenne par la politique allemande est une réalité. Plutôt que d’imaginer que ce soit par l’imitation, voire par l’apaisement – oh mânes de Daladier et Chamberlain à Munich – que l’on pourra faire modifier le cadre politique qui étrangle tant la France que l’Italie et de nombreux pays d’Europe, il faudrait comprendre que c’est par l’affrontement et le démantèlement volontaire d’une bonne partie de ce cadre que l’on pourra faire changer les choses. C’est là que se situe la cohérence des politiques. Si l’on veut éviter que cela se fasse dans le chaos, il faut mettre en place de manière délibérée et réfléchie ce démantèlement avant que la crise n’éclate. Et l’on sent bien qu’elle couve, que ce soit en France ou en Italie.

    Mais, il faut aussi que les oppositions à la politique d’Emmanuel Macron et d’Edouard Philippe comprennent que, au-delà de divergences et d’oppositions qui peuvent être légitimes, elles ont aussi une responsabilité dans la situation actuelle. Car, la force du pouvoir d’Emmanuel Macron tient bien plus à la faiblesse et à l’impuissance politique de ses opposants qu’à une quelconque adhésion de la part des Français.

    Notes

    [1] London J. : Les Temps Maudits, publié en français par 10-18 / UGE, Paris ; la nouvelle La Force des Forts ouvre ce recueil.

    http://www.voxnr.com/11782/lechec-dune-politique

  • JEUDI PROCHAIN, 20 JUILLET, LIONEL BALAND, LE SPÉCIALISTE DES DROITES POPULISTES EN EUROPE, INVITÉ DE L'ÉMISSION "SYNTHÈSE" SUR RADIO LIBERTÉS

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  • Le général de Villiers démissionne - Journal du mercredi 19 juillet 2017

  • Patrick Buisson : « Emmanuel Macron ne peut pas être en même temps Jeanne d'Arc et Steve Jobs »

    Est-il possible d'analyser le système Macron en profondeur, sérieusement, sans a priori excessif, systématiquement pro ou anti ? Puis d'élargir l'analyse à la nouvelle situation politique de la France ? C'est ce que Patrick Buisson fait ici dans cet important entretien pour le Figaro magazine[9.06], réalisé par Alexandre Devecchio. Ce dernier ajoute le commentaire suivant : « Patrick Buisson a scruté le paysage politique avec la hauteur et la distance de l'historien. Il restitue ici l'élection de Macron et la défaite de la droite dans le temps long de l'Histoire ». De notre côté, nous avons commenté ainsi ce remarquable entretien : « tout fondé sur un soubassement d’esprit monarchique et de droite légitimiste – où (Buisson) synthétise en une formule lapidaire ce que Maurras eût peut-être appelé le dilemme d’Emmanuel Macron : " On ne peut pas être à la fois Jeanne d’Arc et Steve Jobs ". Tout est dit ! ».   Lafautearousseau

    1741146342.jpgDepuis son entrée en fonction, Emmanuel Macron a fait preuve d'une gravité et d'une verticalité inattendues. Vous a-t-il surpris positivement ?

    La fonction présidentielle est en crise depuis que ses derniers titulaires ont refusé d'incarner la place du sacré dans la société française. Sarkozy, au nom de la modernité, et Hollande, au nom de la « normalité », n'ont eu de cesse de vouloir dépouiller la fonction de son armature symbolique, protocolaire et rituelle. Emmanuel Macron a parfaitement analysé le vide émotionnel et imaginaire que la disparition de la figure du roi a creusé dans l'inconscient politique des Français. En France, pays de tradition chrétienne, le pouvoir ne s'exerce pas par délégation mais par incarnation. C'est, selon la formule de Marcel Gauchet, « un concentré de religion à visage politique ».

    L'élection constate l'émergence d'une autorité mais celle-ci ne peut s'imposer dans la durée qu'à condition de donner corps à la transcendance du pouvoir et de conférer une épaisseur charnelle à une institution immatérielle. Il faut savoir gré à Macron de l'avoir compris jusqu'à faire in vivo la démonstration que la République ne peut se survivre qu'en cherchant à reproduire la monarchie et en lui concédant au bout du compte une sorte de supériorité existentielle. Voilà qui est pour le moins paradoxal pour le leader d'un mouvement qui s'appelle La République en marche.

    De la cérémonie d'intronisation à la réception de Poutine à Versailles, les médias ne tarissent pas d'éloges au sujet de ses premières apparitions publiques…

    Oui, même quand le nouveau président leur tourne ostensiblement le dos et n'hésite pas à remettre en cause les fondements de la démocratie médiatique : la tyrannie de l'instant, la connexion permanente, l'accélération comme valeur optimale. Le soin qu'il apporte à la mise en scène de sa parole, de sa gestuelle, de ses déplacements montre à quel point il a intégré la mystique du double corps du roi, qui fait coïncider à travers la même personne un corps sacré et un corps profane, un corps politique et un corps physique. Accomplir des gestes et des rites qui ne vous appartiennent pas, qui viennent de plus loin que soi, c'est s'inscrire dans une continuité historique, affirmer une permanence qui transcende sa propre personne. À ce propos, le spectacle du nouveau président réglant son pas sur la Marche de la garde consulaire et faisant s'impatienter le petit homme rondouillard qui l'attendait au bout du tapis rouge aura offert à des millions de Français le plaisir de se revancher de l'humiliation que fut la présidence Hollande, combinaison inédite jusque-là de bassesse et de médiocrité. Quel beau congédiement !

    Mais n'est-ce pas simplement, de la part d'un homme de culture, une opération de communication bien maîtrisée ?

    Toute la question est de savoir si, avec la présidence Macron, on sera en présence, pour le dire avec les mots de son maître Paul Ricœur, d'une « identité narrative » ou d'une « identité substantielle ». Reconstituer le corps politique du chef de l'État, lui redonner la faculté d'incarner la communauté exige que s'opère à travers sa personne la symbiose entre la nation et la fonction. Emmanuel Macron récuse le postmodernisme et veut réhabiliter les « grands récits ». Fort bien. Mais de quels « grands récits » parle-t-il ? Le roman national ou lessuccess-stories à l'américaine ? Jeanne d'Arc ou Steve Jobs ? Honoré d'Estienne d'Orves ou Bill Gates ? Les vertus communautaires et sacrificielles ou le démiurgisme technologique de la Silicon Valley ?

    C'est là où l'artifice dialectique du « en même temps » cher à Macron touche ses limites. Il y a des « valeurs » qui sont inconciliables tant elles renvoient à des visions diamétralement opposées de l'homme et du monde. Les peuples qui ont l'initiative du mouvement historique sont portés par des mythes puissants et le sentiment d'une destinée commune fondée sur un système de croyances et un patrimoine collectif. Pour recréer le lien communautaire à travers sa personne, le président Macron doit répudier le candidat Macron : mobiliser l'histoire non comme une culpabilité ou une nostalgie mais comme une ressource productrice de sens.

    Outre la verticalité, Macron assume également une certaine autorité…

    Toute la question est de savoir de quelle autorité il s'agit. Depuis Mai 68, les classes dirigeantes se sont employées à délégitimer la représentation transcendante des anciennes figures de l'autorité comme autant de formes surannées du contrôle social. Mais, si elles ont récusé l'autorité comme principe, elles n'y ont pas pour autant renoncé en tant que fonctionnalité. Autrement dit, comme technologie du pouvoir indispensable à l'induction du consentement, de l'obéissance, voire de la soumission chez les gouvernés. A l'ère de la communication, ainsi que l'avait pressenti Gramsci, la relation de domination ne repose plus sur la propriété des moyens de production. Elle dépend de l'aliénation culturelle que le pouvoir est en mesure d'imposer via la représentation des événements produite par le système politico-médiatique dont le rôle est de fabriquer de la pensée conforme et des comportements appropriés. On en a encore eu une éclatante démonstration avec la campagne présidentielle qui vient de s'achever.

    Si Macron est le produit de ce système-là, est-il pour autant condamné à en rester indéfiniment captif ?

    L'intention qui est la sienne de réintroduire de l'autorité dans le processus de décision politique est louable. Ce qui légitime l'autorité c'est, disait saint Thomas d'Aquin, le service rendu au bien commun. Mais pourquoi s'arrêter en si bon chemin ? Pourquoi ne pas chercher à restaurer l'autorité-principe là où sa disparition a été la plus dommageable ? A l'école, par exemple, où notre appareil éducatif s'est acharné à disqualifier la transmission et à la dénoncer dans le sillage de Bourdieu comme volonté de répétition et de reproduction du même. La transmission est par excellence l'acte vertical intergénérationnel qui consiste à choisir ce qui mérite d'être transporté à travers le temps quand la communication obéit à une logique horizontale et démocratique de diffusion non critique et non sélective dans l'espace. De ce point de vue, le profil du nouveau ministre de l'Education nationale, Jean-Michel Blanquer, est sans doute le seul vrai signe encourageant.

    Régis Debray dit que Macron est un « Gallo-ricain », le produit d'un écosystème mental américanisé où l'instance économique commande à toutes les autres. N'est ce pas excessif ?

    Je crains qu'il n'ait raison. Emmanuel Macron apparaît comme la figure emblématique de cette nouvelle classe dominante qui aspire à substituer à tous ceux qui proposent un salut hors de l'économie - religion ou politique - la seule vérité de l'économie. Tout ce qui n'est pas de l'ordre de l'avoir, toutes les visions non utilitaristes de la vie en société relèvent pour elle de l'angle mort. Le parti de l'économisme, c'est celui de l'interchangeabilité qui cherche à réduire en l'homme tous les particularismes et toutes les appartenances (nation, famille, religion) susceptibles de faire obstacle à son exploitation en tant que producteur ou comme consommateur. C'est le parti des « citoyens du monde », des « forces du flux d'information, de l'échange et de l'immigration » célébrés par Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook lors de son discours aux diplômés d'Harvard le 25 mai dernier.

    Le cycle dominé par l'économie, que l'on croyait sur le point de s'achever, a connu un spectaculaire regain à l'occasion de la campagne présidentielle. Le retour des nations, de l'histoire et de l'organisation de sociétés autour des thèmes de l'identité et de la souveraineté n'aura-t-il été qu'une fugitive illusion ?

    Je n'en crois rien. Un système où l'économie commande l'organisation de la société est incapable de produire du sens. Sous couvert d'émancipation des individus, l'économisme a surtout œuvré à leur soumission croissante au règne de la marchandise et de l'ego consacrant, selon la formule d'Emmanuel Mounier, la « dissolution de la personne dans la matière ». La crise morale que nous traversons montre que l'homme réduit à l'économie ne souffre pas simplement d'un mal-être mais d'un manque à être. Elle est le fruit amer d'une malsociété, excroissance maligne de l'incomplétude d'une société exclusivement consumériste et marchande. « On ne tombe pas amoureux d'une courbe de croissance », proclamait l'un des rares slogans pertinents de 68. N'en déplaise aux médiagogues, il y a de moins en moins de monde pour croire que l'identité d'un pays se ramène à son PIB et que la croissance peut opérer le réenchantement du monde.

    L'élection présidentielle que nous venons de vivre a-t-elle été un coup pour rien ?

    Au contraire, elle aura été l'occasion d'une magistrale, et peut-être décisive, leçon de choses. La droite républicaine et le Front national ont fait la démonstration chacun à leur tour - François Fillon au premier et Marine Le Pen au second - qu'ils étaient l'un et l'autre, sur la base de leurs seules forces électorales, dans l'incapacité de reconquérir ou de conquérir le pouvoir. L'élimination de Fillon dès le premier tour fut tout sauf un accident, indépendamment des affaires dont on l'a accablé. Elle s'inscrit dans un lent et inexorable processus de déclin qui a vu la droite de gouvernement passer de 49 % au premier tour de la présidentielle de 1981 à 27 % en 2012 et à 20 % le 23 avril dernier. Faute d'avoir su opérer, comme ce fut le cas en 2007, une nécessaire clarification idéologique, la droite ne peut plus se prévaloir du bénéfice automatique de l'alternance. Elle a perdu l'élection imperdable. On ne voit pas pourquoi ni comment elle pourrait ne pas perdre les élections qui viennent. Faute d'avoir su construire une offre politique crédible, le FN est, lui aussi, dans l'impasse. Il reste ce qu'il a toujours été : un épouvantail, le meilleur allié du système qu'il prétend combattre, son assurance-vie. C'est à partir de ce double constat partagé qu'une refondation est possible.

    Qu'attendez-vous de la décomposition-recomposition qui s'amorce ?

    Je crois, comme Marcel Gauchet, qu'un grand mouvement conservateur est naturellement désigné pour être, selon sa formule, « l'alternative au moment libéral économiste » que nous vivons. Emmanuel Macron a choisi de se faire le champion du camp des progressistes au moment où la promesse fondatrice du progrès-croyance - à savoir l'assurance absolue d'une amélioration inéluctable, générale et universelle - a échoué sur la question du bonheur. L'indicateur de cet échec, on le trouve dans l'explosion de la production, du trafic et de la consommation de drogue comme dans la croissance exponentielle de la consommation de psychotropes qui représente en France, selon une récente étude de la Cnam, 13% des soins remboursés par l'Assurance-maladie. Ces chiffres expriment le décalage entre le bonheur promis et le bonheur réel dans notre société. Le seul vrai progrès est aujourd'hui de pouvoir douter du progrès. Le conservatisme est l'outil intellectuel qui permet d'échapper à ce processus de décivilisation. Je n'en connais pas de meilleure définition que celle qu'en a donné Ernst-Erich Noth : « Nous avons à concilier la tâche temporaire de la politique qui passe et la mission éternelle de l'intelligence ; mais cela n'est possible que par une subordination de la matière à l'esprit, de l'actualité à la continuité.»

    La situation présente aurait donc, selon vous, le mérite de dissiper un long malentendu historique…

    En effet. S'il était encore possible au milieu du siècle dernier d'accoler les deux vocables de libéral et de conservateur, leur accouplement relève aujourd'hui de l'oxymore, tant la fracturation intervenue depuis est d'ordre à la fois métaphysique et anthropologique. La Manif pour tous a fait apparaître, en 2013, une césure radicale entre une droite conservatrice - ce que j'ai appelé un populisme chrétien -, qui proclamait le primat du sacré sur le marché, et une droite libérale-progressiste, acquise au principe d'illimitation et à l'abaissement du politique au niveau de la gouvernance économique. Cette droite-là est en marche vers Emmanuel Macron, qui est en train de réussir à la fois la reconstitution de l'unité philosophique du libéralisme en illustrant à la perfection la complémentarité dialectique du libéralisme économique et du libéralisme culturel, mais aussi la réunification des libéraux des deux rives, comme le fit au XIXe siècle l'orléanisme, déjà soucieux de constituer un bloc central en coupant, selon la recette réactualisée par Alain Juppé, « les deux bouts de l'omelette ».

    Soyons reconnaissants à Macron de son concours bénévole, même s'il n'est pas franchement désintéressé. De grâce, que personne ne retienne les Républicains « constructifs » qui se bousculent déjà pour le rejoindre. Rien ne sera possible sans cette rupture fondatrice. Il y a des décantations qui sont des clarifications. Il est des divorces qui sont des délivrances pour ceux qui restent.   

    « Emmanuel Macron a parfaitement analysé le vide émotionnel et imaginaire que la disparition de la figure du roi a creusé dans l'inconscient politique des Français » 

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    La Cause du peuple de Patrick Buisson, Perrin, 21,90€. 

    Alexandre Devecchio

    http://lafautearousseau.hautetfort.com/

  • Pour en finir avec les mensonges : Les prisonniers de la Bastille...

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    Le 14 juillet, une date choisie comme fête nationale par la République française, commémorant, même si c'est indirectement1, la prise de la Bastille le 14 juillet 1789 ; on pourrait d'ailleurs discuter de la validité de ce choix2.  Autour d'un événement parmi d'autres qui marquent les débuts de la Révolution, toute une légende s'est progressivement construite, dans laquelle il n'est pas toujours si aisé de démêler le vrai du faux. La Bastille serait ainsi le symbole de l'absolutisme et de l'arbitraire monarchique, comme nous l'avons tous appris à l'école depuis notre plus jeune âge ; avec des captifs par dizaines retenus dans des cachots sordides et des conditions épouvantables. La réalité historique est toute autre, et cette prison d'Etat n'a finalement accueilli que bien peu de prisonniers, et encore pas dans les conditions que l'on a évoquées par la suite3. C'est précisément aux derniers de ces prisonniers que cet article va plus particulièrement s'intéresser. De grands noms ont été au cours de l'histoire " embastillés ", selon l'expression consacrée4. Mais qui étaient ceux de ces prisonniers que l'émeute libéra le 14 juillet 1789 ?

    Lorsque la foule parisienne se lance à l'assaut de la vieille forteresse médiévale, celle-ci ne compte à vrai dire plus que sept prisonniers, dont les cellules ne sont même pas fermées. Le marquis de Launay, gouverneur de la Bastille, les laisse aller à leur guise. Louis XVI et son ministre prévoyaient d'ailleurs la fermeture de cette prison devenue superflue5, depuis que des restrictions avaient été émises sur les fameuses lettres de cachet6 qui ont tant alimenté l'imaginaire collectif.
    Parmi ces sept derniers pensionnaires de la Bastille, quatre sont de simples escrocs, qui ont été condamnés à la prison pour avoir falsifié des lettres de change. Emprisonnés depuis janvier 1787, ils se nomment Jean Antoine Pujade, Bernard Laroche, Jean Béchade et Jean La Corrège. Le Parlement de Paris avait en effet dans sa juridiction le pouvoir de condamner à l'embastillement certains délinquants. Rien à voir donc, les concernant, avec l'arbitraire royal. Ils ne goûteront d'ailleurs pas très longtemps à cette liberté, puisqu'ils sont repris et à nouveau incarcérés quelques jours plus tard.
    Celui qui, à l'été 1789, a sans doute passé le plus de temps à la Bastille est un certain Auguste Tavernier, qui aurait été complice de la tentative d'assassinat contre Louis XV par Damiens, en 1757. Souvenez-vous, Damiens est le dernier en France à avoir été condamné à l'atroce supplice de l'écartèlement. Louis XV, qui avait fort bien compris qu'il ne s'agissait que de l'acte isolé d'un déséquilibré, aurait volontiers fait preuve de clémence à l'égard de Damiens ; mais c'est le Parlement de Paris qui exigea sa condamnation... Quant au présumé complice, il ne fut pas libéré en 1789, mais transféré vers Charenton7, où on internait alors les malades mentaux.
    Les deux derniers sont des aristocrates, emprisonnés non pas selon le bon vouloir du roi, mais à la demande de leur propre famille8. Le premier est le comte Hubert de Solages9, embastillé à la demande de son père en 1784 pour ses " actes de débauche " dit la légende, mais " crimes atroces " et "action monstrueuse " disent les documents de l'époque, sans plus de précisions. Le second se nomme le comte de Whyte de Malleville, interné lui aussi à la demande de sa famille, semble-t-il en raison de sa démence. Tous deux ne seront pas non plus libérés, mais également transférés vers Charenton.

    Contrairement à une légende tenace, le célèbre marquis de Sade ne fut pas au nombre des prisonniers de la Bastille libérés en juillet 1789. Le gouverneur avait obtenu peu auparavant son transfert vers Charenton, dont il ne sera libéré qu'un peu plus tard ; il connaîtra par la suite les geôles de la Terreur en 1794, ne devra son salut qu'à la chute de Robespierre, puis sera à nouveau interné à Charenton en 1803...

    Sur les sept derniers prisonniers de la célèbre Bastille, aucun ne recouvrera donc la liberté après le 14 juillet 1789. Aucun n'était condamné à vivre dans un cachot sinistre, à la grande surprise des émeutiers eux-mêmes. On inventa donc un autre personnage, le comte de Lorges, qui aurait été emprisonné depuis plus de trente ans dans un cachot sordide ; la foule l'aurait délivré et porté en triomphe : il n'en est rien, tout a été inventé pour alimenter la légende populaire.
    Les noms de ces prisonniers sont dans la mémoire collective tombés dans l'oubli total, de même que les motivations réelles de l'insurrection ; l'histoire officielle a construit le mythe fondateur, l'imagination faisant le reste... Mais il n'était pas inintéressant, en ce jour, pour l'anecdote, de se souvenir un instant des derniers embastillés de France.

    Horizon d'Aton

    Notes :
    1- En principe, et on l'ignore souvent, le 14 juillet commémore la fête de la Fédération, qui eut lieu à Paris le 14 juillet 1790, symbolisant l'union du peuple français. Si la fête de la Fédération célèbre en 1790 le premier anniversaire de la prise de la Bastille, ce n'est que la IIIe République, en 1880, qui choisira cette date comme fête nationale. Pourtant, dans l'imaginaire collectif, c'est bien à la prise de la Bastille elle-même que la fête nationale est associée.
    2- Entre temps, les historiens romantiques et ultra-républicains, comme Jules Michelet, ont habilement noirci le tableau et développé la légende de ce qui n'est au fond que l'un des événements des débuts de la Révolution ; on aurait très bien pu en choisir un autre, comme par exemple la proclamation de la République ( 21 septembre 1792 ). La prise de la Bastille n'était pas motivée, à l'été 1789, par la volonté d'abattre un symbole de la monarchie absolue. En réalité, la foule voulait tout simplement s'emparer de la poudre et des munitions que l'on disait contenues dans la forteresse, après avoir pillé les Invalides à la recherche d'armes. Comme toujours, l'histoire prend souvent la signification qu'on veut bien lui donner.
    3- En réalité, la forteresse n'a jamais accueilli guère plus d'une quarantaine de prisonniers à la fois, puisque le nombre de cellules y était tout compte fait limité. C'était pour l'essentiel une prison dans laquelle on s'installait relativement confortablement pour peu qu'on en ait les moyens et dans laquelle on pouvait amener son mobilier et ses domestiques. Un peu comme le quartier de l'actuelle prison de la Santé destiné aux détenus qu'on ne saurait traiter comme le commun des mortels...
    4- Parmi lesquels bien entendu Voltaire et Sade, mais aussi le maréchal-duc Louis de Richelieu, petit-neveu du célèbre cardinal qui avait transformé la Bastille en prison d'Etat... Sous Louis XVI, les plus célèbres prisonniers de la forteresse furent les acteurs de la fameuse " affaire du collier de la reine ", de 1785 à 1786, dans l'attente de leur procès : l'escroc Guiseppe Balsamo, dit comte de Cagliostro (finalement expulsé de France en 1786 ), Jeanne de la Motte-Valois ( elle sera par la suite emprisonnée à la Salpêtrière ) et le cardinal Louis de Rohan, Grand Aumônier de France ( acquitté, mais déchu de son office et exilé en province ). 
    5- Dès 1784, Necker, qui a fait fermer la prison du donjon de Vincennes, préconise également de fermer la Bastille et le roi y est a priori disposé. Cela explique d'ailleurs que certains prisonniers soient transférés en 1784 de Vincennes à la Bastille.
    6- Les lettres de cachet ordonnant l'emprisonnement émanaient directement du roi, ou le plus souvent de ses ministres et représentants, et permettaient d'incarcérer une personne sans jugement ou dans l'attente de son jugement ; pour des faits certes politiques, mais il faut l'avouer le plus souvent pour des affaires de famille ou de moeurs. L'injustice des lettres de cachet réside plus dans le fait qu'elle permettait aux familles notables de se soustraire à la honte d'un procès, qu'à un véritable arbitraire royal.
    7- Hospice destiné aux malades mentaux tenu par les frères de la Charité, créé au XVIIe s. et qui sera fermé en 1792, au moment de la dissolution des ordres religieux, et ré-ouvert en 1797 sous le Directoire.
    8- C'était là une chose très courante ; comme nous le disions plus haut, cela permettait à certaines familles d'échapper à l'humiliation d'un procès. C'est ainsi que Mirabeau fut frappé d'une lettre de cachet à la demande de sa famille, de même que le marquis de Sade à la demande de sa belle-mère. Dans ce cas, c'était à la famille d'assurer les frais liés à l'incarcération.
    9- En fait, Hubert de Solages est arrêté en 1765 en même temps que sa soeur, Pauline de Barrau, qu'il avait aidée à s'échapper de chez son époux ; ceci à la demande du père d'Hubert et Pauline, ainsi que du mari berné. Evadé de la prison lyonnaise dans laquelle il se trouve, le comte a été transféré en 1782 à Vincennes, puis en 1784 à la Bastille. Bien évidemment, la rumeur veut que le comte de Solages et sa soeur aient été coupables d'inceste... en réalité, comme souvent, des lettres de cachet obtenues dans le cadre d'une sombre histoire de famille bien née... 

    Reproduction article : http://horizons-d-aton.over-blog.fr/article-33801115.html

    http://www.vexilla-galliae.fr/civilisation/histoire/2506-pour-en-finir-avec-les-mensonges-les-prisonniers-de-la-bastille

  • M.LE PEN règle ses comptes et c'est le cas de le dire 19/07 et N.DUPONT-AIGNAN...

  • Migrants : la révolte des municipalités italiennes

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    8905-20170720.jpgSur 8 000 municipalités concernées par l’accord signé en décembre entre le ministère de l’Intérieur et l’Association nationale des communes italiennes (Anci), 5 500 ont décidé de fermer leurs portes aux « migrants ». Du coup, la promesse de ne dépasser nulle part un rapport de 2,5 immigrants pour mille habitants n’est pas tenue, puisque dans les 2 500 communes d’accueil la moyenne des centres d’accueil est déjà de trois immigrants pour mille habitants. Pour le délégué à l’immigration de l’Anci cité par le journal La Stampa, également maire de Prato, en Toscane, il faut faire pression sur les autres pays européens pour qu’ils prennent leur part d’immigrants, d’autant plus qu’on attend au bas mot 200 000 nouvelles arrivées illégales cette année.

    En attendant une hypothétique relocalisation qui ne concernerait de toute façon, si elle était pleinement mise en œuvre, que 120 000 demandeurs d’asile arrivés illégalement en Italie et en Grèce, la presse italienne regorge d’exemples de plus en plus nombreux de municipalités qui se révoltent ouvertement contre la politique « d’accueil diffus » mise en place l’année dernière par le gouvernement.

    De la Sicile à la Lombardie et de la Sardaigne à la Vénétie, les manifestations d’habitants se multiplient de même que les protestations de maires en colère :levée de boucliers dans la ville portuaire et touristique de Civitavecchia, près de Rome, quand le ministère de l’Intérieur a étudié dernièrement la possibilité d’y installer un « hotspot », centre d’accueil et de tri des immigrants arrivés illégalement, appel d’un maire de Sicile à ses administrés pour qu’ils bloquent avec leurs voitures la livraison d’un nouveau groupe électrogène pour un centre d’accueil qui avait été déclaré fermé un mois plus tôt, conflit à Pordenone, en Vénétie, entre la mairie et la Croix-Rouge qui ouvre un nouveau refuge pour clandestins avec 24 lits alors que la ville accueille déjà 400 de ces immigrants au lieu des 125 qui lui avaient été annoncés par le ministère, protestations en Sardaigne contre la réouverture de prisons désaffectées en vue d’y loger des « migrants », etc.

    Si le gouvernement de centre gauche de Paolo Gentiloni en appelle aussi désespérément à la solidarité européenne dans l’accueil des clandestins, c’est parce qu’il est coincé entre son refus idéologique de fermer ses ports aux bateaux chargés d’immigrants illégaux et le ras-le-bol croissant des Italiens qui se trouvent aujourd’hui en première ligne de ce qu’il faut bien appeler une immigration de colonisation.

    Olivier Bault

    Article paru dans Présent daté du 20 juillet 2017

    https://fr.novopress.info/

  • La guerre froide du gaz et les inacceptables sanctions des États-Unis contre l’Europe !

    Marc Rousset

    Que ne feraient pas les États-Unis pour exporter leur gaz de schiste nouveau et contrer la puissance stratégique de la Russie aussi bien en Europe qu’au Moyen-Orient !

    Le russe Gazprom (Газпро́м) veut construire un nouveau gazoduc (Nord Stream 2) de 9,5 milliards d’euros dans la Baltique, qui augmenterait d’un tiers en 2019, soit de 55 milliards de m3, le gazoduc sous-marin Nord Stream 1 déjà existant entre Vyborg (Выборг, Russie) et Greifswald (Allemagne).

    Suite à l’opposition de l’Ukraine et de la Pologne, dont les gazoducs continentaux Yamal et Brotherhood passant par leurs territoires sont court-circuités, Gazprom a été amené à être le seul actionnaire du projet. Le français Engie, les allemands Uniper (ex-E.ON) et Wintershall (BASF) ainsi que l’anglo-néerlandais Shell ont décidé d’être seulement des financiers à hauteur de 10 % chacun, et non plus des actionnaires, ce qui était initialement prévu. Nord Stream, passant sous la mer, échappe à la juridiction de Bruxelles ; les Allemands considèrent ce projet comme strictement commercial.

    Mais le 15 juin 2017, le Sénat américain a décidé, au grand dam de l’Europe, d’envisager des sanctions contre les entreprises européennes « du fait des effets préjudiciables de Nord Stream 2 sur la sécurité énergétique européenne ». Bref, l’Amérique est plus royaliste que le roi Europe, alors qu’il s’agirait bien au contraire de diminuer la sécurité énergétique de l’Europe et de nous obliger à acheter du gaz de schiste américain transporté sous forme liquéfiée à partir des États-Unis jusqu’à des ports terminaux européens. À noter qu’aux États-Unis mêmes, l’idée d’exporter du gaz de schiste est considérée par l’Industrial Energy Consumers of America comme stupide car contribuant à augmenter la cherté du gaz dans les industries manufacturières porteuses de valeur ajoutée.
    Selon Isabelle Kocher, directrice générale d’Engie, « il s’agit d’une ingérence spectaculaire et inacceptable dans les affaires européennes », après les sanctions financières des États-Unis contre BNP Paribas, Alstom et les contraintes imposées à Renault, PSA et Total pour investir en Iran. Cette implication est d’autant plus surréaliste, impérialiste et inacceptable que Nord Stream est un projet non américain avec des entreprises non américaines et un financement sans dollars américains.

    L’Europe ne peut, au contraire, que se réjouir de diversifier son approvisionnement en gaz naturel pour 40 % en provenance de la Russie, pays frère continental européen, d’autant plus que la production chute au Royaume-Uni (mer du Nord) et au Pays-Bas.

    La folle agressivité américaine se comprend d’autant mieux que la Russie, suite à son intervention victorieuse en Syrie, est devenue le maître du jeu au Moyen-Orient pour le gaz en provenance du Qatar et d’Iran. Le projet « Turkish Stream » prévoit la construction en Turquie par la Russie de deux conduites d’une capacité de 15,75 milliards de m3 par an chacune, qui formeront un gazoduc sous la mer Noire, évitant encore une fois l’Ukraine, pour fournir l’Europe. Le Qatar a dû passer sous les fourches caudines russes et renoncer au projet initial « sunnite » évitant l’Irak, passant par l’Arabie saoudite et une Syrie non Bachar el-Assad. La Russie devient le pivot central pour que le gaz tant iranien que qatari transite vers l’Europe sans déposséder Moscou via le futur gazoduc russo-turc « Turkish Stream ». À quand une Europe européenne et enfin libre ?

    Boulevard Voltaire cliquez ici

    http://synthesenationale.hautetfort.com/archive/2017/07/17/la-guerre-froide-du-gaz-et-les-inacceptables-sanctions-des-etats-unis-contr.html

  • Une praxis révolutionnaire et conservatrice est-elle encore possible ?

    Par Jure Georges Vujic, écrivain franco-croate, avocat et géopoliticien ♦ Trop souvent on oublie que la reconduction au pouvoir du Système dominant et de la classe gouvernementale tient plus à l’internalisation et la reproduction des modes de pensée dominants au niveau social, culturel, sur le plan individuel comme sur le plan collectif.

    On se souvient que la praxis, notion philosophique théorisée par Aristote dans l’Ethique à Nicomaque et qui initialement renvoyait à l’idée d’une pratique ou une action qui, transformant le sujet, a été plus tard reprise par les marxistes, par Antonio Gramsci et les situationnistes pour lesquels la philosophie de la praxis désignait la pratique qui se reconnaît elle-même par la théorie qui découle de son action, mais qui, de par sa fonction révolutionnaire, devait transformer les esprits.

    Force est de constater que depuis Mai 68, le discours libertaro-marxiste a fait bon ménage avec le capitalisme libéral qui se traduit aujourd’hui par une praxis sociétale parfois schizophrène d’hyper-individualisme festif et de domination capitaliste marchande que l’on accepte comme une fatalité irréversible. Promouvoir une politique de gauche et des valeurs de droite, employer un discours à la fois révolutionnaire et conservateur impliquerait au préalable de reconnaître, en dépit des avancées les plus fines sur le plan social et politique, l’absence d’une praxis adéquate, susceptible de transformer les rapports sociaux, les façons de sentir, de penser. En effet, face à la praxis bien rodée du marché déstructurant du social, il faudra jeter les bases d’une praxis de restructuration des valeurs. D’autre part, on oublie souvent que la technique, les gadgets omniprésents dans notre société hightech constituent de puissants vecteurs d’individuation et de socialisation et trop souvent d’aliénation plus que les principes de l’éducation familiale et scolaire. Il s’agit ici de ce que Jean Francois Dufour appelle les percipiens (le principe de sentir), l’idée de forces mécaniques pesant sur notre pensée et notre entendement et qui préexistent et façonnent notre comportement, notre agir, notre praxis. Jean Baudrillard parle de « système des objets » pour rendre compte de cette mutation dans nos sociétés postmodernes du sens et du rȏle des objets de l’utilité vers la matérialité autonome (qui annule le symbolique), indéfiniment modulables et constituant un ensemble systémique cohérent de signes.

    Notre rapport au monde se réduit le plus souvent au rapport aux objets quotidiens avec lesquels nous nouons une complicité profonde entre les investissements psychologiques, souvent induits et extorqués, et les impératifs sociaux de prestige, entre les mécanismes projectifs et le jeu complexe des modèles et des séries. Pier Paolo Pasolini parlait du vrai visage du fascisme qu’il voyait dans la société de consommation, mais non plus celle d’une mécanique d’exploitation extérieure à nous-mêmes, mais d’un système de pensée et de comportement internalisé par nos sens et notre mental.

    Introduire une nouvelle praxis réellement révolutionnaire et non purement expérimentale sur le plan social et culturel suppose alors de dégager un nouveau sens du social, de produire de nouvelles formes de vivre-ensemble qui remettraient en cause de façon profonde la praxis dominante de la « valeur marché », le « fonctionnement » dont parle Gilbert Simondon, qui réside, non plus dans l’usage, mais « dans sa dimension anthropologique », dans le marché en tant que valeur et mode de reproduction des rapports sociaux.

    Même si les résultats des dernières élections parlementaires et présidentielles dans de nombreux pays européens confirment la poussée de mouvements anti-Système populistes de gauche comme de droite, on est loin d’une remise en cause générale et massive du Système libéral marchand dominant, susceptible de menacer l’ordre établi. Le conditionnement médiatique, la manipulation mentale et politique des masses semblent encore marcher à merveille en tant que mécanique à discréditer et à démoniser les alternatives politiques potentielles. La victoire de Macron en France, qui l’opposait au second tour de la présidentielle à Marine Le Pen, en est une parfaite illustration. L’abrutissement politico-médiatique et la production de la peur sociale principalement dans les classes moyennes déclassées permet encore de reproduire les schémas de domination et de gouvernance oligarchique. On se rappellera à ce titre du Prince de Machiavel qui renvoie à l’emploi de la ruse, de la fraude et de la corruption, les armes de la ruse du «renard », afin d’empêcher la violence de masse et les soulèvements révolutionnaires, un softpower qui constitue le moyen de domination principal de la classe gouvernante.

    Pourtant ce constat d’échec nous permet de nous interroger sur l’avenir du discours anti-Système qui articule à raison le fossé grandissant qui se creuse entre l’oligarchie et le peuple, et plus précisément sur la question de l’existence et l’efficacité d’une praxis réellement révolutionnaire et son adéquation avec ce que l’on peut appeler les valeurs, le discours, le narratif conservateur. Car si une infime minorité se reconnaît dans le discours et les valeurs anti-Système, lesquelles circulent par les réseaux d’informations alternatifs, on est encore loin de l’assentiment de larges masses de citoyens qui baignent dans le breuvage quotidien des médias officiels et se contentent très bien de ce déni de vérité. « L’esprit » d’une époque dépend de l’ensemble de ses faits sociaux, y compris le développement technique. Dans ce sens, les objets techniques qui s’autonomisent de plus en plus portent avec eux un impact considérable sur la manière dont nous nous représentons le monde, même des notions très abstraites comme le temps ou l’espace. Bien sûr, le rȏle des idées et le combat des idées tiennent encore une place importante dans la transformation des esprits, mais le changement de paradigme dans la praxis sociale comme cela été le cas pour le rȏle de la technique dans les révolutions scientifiques étudiées par T. Kuhn (dans La Structure des révolutions scientifiques) sera déterminant.

    Le mérite de Kuhn a été celui de développer la thèse selon laquelle une science progresse de manière fondamentalement discontinue, c’est-à-dire non par accumulation mais par ruptures. Ces ruptures, appelées révolutions scientifiques, sont selon Kuhn analogues à un renversement des représentations (ce que les psychologues de la perception appellent un gestalt switch). Appliqué à la sphère sociale et politique, ce renversement des valeurs, qui correspondrait à une rupture épistémologique de paradigmes, aboutirait donc à l’issue de cette crise de légitimation à l’avènement d’un nouveau paradigme de système de valeurs. Pourtant, nul ne sait à quel moment, dans quelle situation de crise survient ce facteur d’anomalie perturbateur qui préside à la naissance d’un nouveau paradigme révolutionnaire, processus cyclique de gestation qui peut très bien perpétuer une longue agonie avant sa pleine reconnaissance et son adoption sociale.

    Alors que les grands systèmes d’idées ne mobilisent plus, il faudra s’interroger sur quelles bases praxistes et idéologiques reconstruire. Alors que l’on dit volontiers que la révolution est une nostalgie de la gauche, force est de constater que la contre-révolution, voire les nombreux mythes de la « renaissance » de la « restauration », de l’ordre, constituent aussi une certaine forme de mélancolie de la droite, dont il est difficile de faire le deuil. A ces mythes sotériologiques et holistes se sont substitués, de façon indolore, des mythes technicistes consuméristes : le mythe de l’ouverture, le mythe de la communication, le présentisme, comme celui d’une mythologie du portable beaucoup plus attrayant pour les jeunes générations que celui des grandes luttes politiques et sociales ou du mythe Sorelien de la grève générale.

    Cette praxis du marché est celle de l’ostensible, du conditionnement opérant que génèrent les concepteurs de produits par la dissémination de besoins artificiels vérifiables dans le domaine numérique de la communication. Un conditionnement   basé sur une stratégie de dépendance qu’on dissimule derrière le leurre d’une utilisation agréable et supposée enrichissante, pouvant préparer le terrain de l’addiction. Le facteur du libre choix et de la personnalité diminue considérablement, alors que l’emprise manipulatrice et l’autorégulation des comportements sociaux neutralisent la capacité réactive de résistance au stress social à mesure que s’amoindrissent les facultés de concentration et de l’intelligence émotionnelle. Il s’agit bien d’une praxis de la narcomanie sociétale   qui fonctionne sur un mode de dépendance-approvisionnement marché/dealeur et junkies/consommateur, une oniomanie organisée et généralisée, qui se traduit par de nombreuses pathologies sociales. Cette consommation compulsive est surtout visible sur le marché du smartphone par une hausse constante de la dépendance ou l’addiction au smartphone, une cyberaddiction (dépendance à Internet), pathologie s’exprimant par un curieux mélange d’anxiété phobique, d’euphorie hystérique et de dépression.

    A l’administration des choses il faudra pourtant, tout comme le soutient Bruno Latour, re-politiser le « système des objets » et substituer le gouvernement des hommes, dire que tous les objets, la technique, ne sont pas neutres et même nocifs. En effet, alors que l’on a dépolitisé les questions de nature, il conviendra de re-politiser la question de l’impact sociétal des objets Il faudra se réapproprier l’utilité et la finalité des choses et dénoncer les stratégies de l’ostensible du marché. L’homme occidental n’est plus « mobilisable » au sens de l’ « Homme-masse », il est un agent-réseau autoconstitué connectable à l’infini, volontairement soumis à une discipline de dé-virilisation, du féminisable et de l’infantilisation à outrance. En un mot, c’est un objecteur de dé-conscience né, récalcitrant à toute forme d’engagement, de conscientisation, à la fois un nomade-déserteur. Lorsque Salvador Dali parlait de la télévision comme « instrument de crétinisation universelle », il annonçait déjà l’ouverture vers une humanité « homononcule » en voie de trollisation.

    Jure Georges Vujic
    7/07/2017

    Notes

    –     Jean Baudrillard, Le Système des objets, Gallimard, 1968 [1978].
         Gilbert SimondonDu mode d’existence des objets techniques, Aubier, Paris 1958 ; dernière réédition corrigée et augmentée, Flammarion, Paris 2012.
    –     Thomas Kuhn, La Structure des révolutions scientifiques, Coll. « Champs/791 », Flammarion, Paris 2008.
    –     Bruno Latour, Enquête sur les modes d’existence : Une anthropologie des modernes, La Découverte, Paris 2012.

    https://www.polemia.com/une-praxis-revolutionnaire-et-conservatrice-est-elle-encore-possible/