Selon l’Insee qui publiait la semaine dernière ses données définitives, 21.700 postes ont encore été détruits dans le secteur marchand au premier trimestre, bilan qui intervient au moment même ou le Royaume-Uni annonçait son plus bas taux de chômage depuis 2008…L’emploi est-il la priorité des acteurs sociauxdans notre pays ? On peut en douter à la lecture du papier publié dans Marianne faisant état du congrès de la CFDT qui s’est tenu à Marseille au début du mois, au cours duquel son secrétaire général, Laurent Berger, et les militants « se sont interrogés sur le pacte de responsabilité signé par leur direction avec un Medef, prêt à le torpiller ». Mais dans les faits constate Marianne, « estomaqués par le raz-de-marée du FN aux européennes, (les militants) resserrent les rangs derrière leur secrétaire général » dont « le discours reflète (…), les états d’âme de ses militants, complètement sonnés par le score du FN et celui de l’abstention aux européennes ».
« Cette fois c’est bien plus grave que ne l’admet la direction du PS, met en garde René Briesch, un Lorrain, ancien président du Comité économique et social européen, les électeurs qui ont voté Front National, ne l’ont pas fait pour protester. 97% adhèrent à ses thèses nationalistes et sa dénonciation de l’immigration ! ».
«Bien sûr qu’en signant un pacte de responsabilité avec un patronat qui joue les chochottes, nous avons pris un risque, s’épanche (Laurent Berger) en conférence de presse. Je ne l’ai jamais caché. Mais dans deux ans, si l’on ne tente rien, qui sait si la démocratie ne sera pas menacée par un parti qui nie nos valeurs les plus chères ? » (sic).
Même catastrophisme sur le site de la revue de Bernard-Henry Lévy, La Règle du jeu. Le dénommé François Margolin y a pondu un papier dans lequel il s’inquiète de l’habileté diabolique d’un FN qui durant « cette dernière campagne électorale », « a si peu parlé d’immigration mais beaucoup plus de Bruxelles ou de la misère sociale ». Certes il tient à contenter ses lecteurs en quête de grands frissons d’épouvante et englués dans une grille de lecture aussi primaire, débile qu’obsolète : le FN est toujours le parti de la « haine » de l’étranger.
« Mais ajoute-t-il, rien ne dit que le Front National n’aura pas l’intelligence, si le mot a un sens en la matière, de se reconvertir sur un autre front : celui de la misère sociale. Comme ses ancêtres, les partis fascistes des années 30, ceux de Mussolini, de Jacques Doriot ou de Hitler. Un front – sans jeu de mots – qui a, malheureusement de beaux jours devant lui, si les partis politiques traditionnels n’en prennent pas la mesure. Raison de plus d’être vigilant ».
Sans oser proférer les mêmes énormités que M. Margolin, Manuel Valls a fait entendre un son de cloche similaire samedi devant le Conseil national du PS : « Le risque de voir Marine Le Pen au second tour de l’élection présidentielle existe». « Nous pourrions basculer dans une nouvelle ère. Une ère dans laquelle un des grands partis républicains - est sans que cela soit une surprise – peut être absent de grand rendez-vous électoral. Rien n’est fait, cela peut être la droite, ce peut être nous. » « Notre pays peut se défaire et se donner à Marine Le Pen », « Oui la gauche peut mourir ». « Il n’existe pas d’alternative à gauche », « l’échec électoral du PS ne renforcera pas la gauche de la gauche » a-t-il encore prévenu.
Ce qui est pour le coup une vérité toute simple énoncée par beaucoup, notamment dernièrement par Michel Onfray dans l’article qu’il a donné au Nouvel Obs, et que nous avons déjà cité, pointant les similitudes pouvant exister entre le FN et le Front de Gauche. « Ce qui réunit les deux fronts est important affirme-t-il : un même refus de l’Europe libérale, une même condamnation des logiques de Maastricht, une même franche suspicion pour l’euro, un même ras-le-bol des partis qui défendent l’Europe libérale, une même condamnation de la quasi-totalité de la presse et des médias qui, aux mains des banquiers, se font les courroies de transmission quotidiennes de l’idéologie libérale, un même souci du petit peuple, une même condamnation des élites qui ont failli, une même défense de l’Etat et, c’est nouveau au FN, un même éloge des services publics. (…). Seule la question de l’islam distingue le FN du FG : un danger pour l’une, une chance pour l’autre. Voilà pourquoi la première rassemble le double de voix du second. Pragmatique, Marine Le Pen pose les questions que tout le monde se pose ; idéologue, Mélenchon estime que ces questions ne sont pas légitimes — elles se posent pourtant ».
Pour être tout à fait précis, indiquons cependant que ce n’est pas tant la question de l’islam qui sépare le FN du FG et de ses autres adversaires, que celle de l’accueil à haut débit sur notre sol de flux migratoires. Le FN serait tout autant opposé à l’immigration de peuplement affirme Bruno Gollnisch, si celle-ci concernait non pas des Musulmans mais exclusivement des millions d’Africains animistes, des millions de Tamouls polythéistes ou des millions de Chinois confucianistes…
Il faut posséder, petite parenthèse, la mauvaise foi militante du journaliste de RTL et de Canal plus, le socialiste Jean-Michel Apathie, pour prendre comme exemple la victoire lors de ce Mondial de football de l’équipe des bleus dimanche soir face à la modeste formation du Honduras, afin de réaffirmer péremptoirement que l’immigration est une chance pour la France ! Les Français sont un peuple accueillant et nullement raciste mais la coupe est pleine depuis déjà longtemps, elle déborde même sur de nombreux points de notre territoire. Une évidence que les Français ont aussi tenu à signifier aux partis du Système par leur vote le 25 mai.
Autant dire que l’historien et militant antiraciste Pierre-André Taguieff n’a que très partiellement raison quand il écrit dans son dernier ouvrage Du Diable en politique, réflexions sur l’anti-lepénisme ordinaire (Marianne s’en fait l’écho) que « trente ans de rhétorique anti-fasciste et son processus de diabolisation ont contribué à installer le Front National au centre de la vie politique française ».
Un FN que droite et gauche ont tenté d’instrumentaliser à leur profit, or la créature leur échappe ! « Les chiraquiens et les sarkozystes ont liquidé le gaullisme. Les jospinistes et les hollandistes ont ruiné le socialisme et réduits le PS à une machine de pouvoir incapable de la moindre réflexion ». « L’auteur décrit la disparition de l’homme de gauche réduit à un hybride social-libéral-écolo-conservateur-progressiste-républicain avec désormais la poche à droite et un vague souci de préserver les acquis sociaux ».
« Le Front National se retrouve donc être aujourd’hui au centre de la vie politique française (…). Marine Le Pen séduit les déçus des deux rives. Le Front National est devenu un parti attrape-tout, une formation qui profite de toutes les crises, réussissant l’une des alliances les plus fortes dans le champ politique français actuel : celle de l’aspiration nationale et de l’aspiration sociale ».
Pourtant, « totalement dédiabolisé, le FN perdrait une grande partie de son attractivité parie d’ailleurs Taguieff qui, au front républicain , substitue l’image de l’ estomac qui digérerait le Front National, comme il a digéré autrefois les royalistes contre-révolutionnaires. Une digestion lente. Cet estomac existe. En démocratie, il a même un nom : le débat politique ».
Ecrire que le succès du FN s’explique en «grande partie» par sa diabolisation n’est pas vraiment original et ressuscite un vieux débat. Il est légitime de penser a contrario que c’est justement le processus de dédiabolisation, engendré par le travail pédagogique accru de Marine comme par les événements validant les invariants du discours du FN, les fondamentaux de son programme, qui explique le succès grandissant de l’opposition nationale.
Ce qui ne veut pas dire souligne Bruno Gollnisch, bien au contraire même, que le FN doit perdre son tranchant, manier la langue de bois ou de coton, abdiquer son franc-parler, accepter ou appeler de ses vœux un formatage qui précède bien souvent des reculs programmatiques.
Nos compatriotes attendent aussi du Front National qu’il continue de porter, sans outrances bien sûr, mais avec fermeté, le nécessaire combat en faveur du maintien de notre liberté d’expression, menacée par les pulsions totalitaires de la caste, les kapos du politiquement correct, les censeurs, les démagogues, les falsificateurs de l’histoire, les propagandistes d’une novlangue qui est un des instruments du contrôle des esprits.
Dans les faits, c’est bien le programme porté par le FN, de rupture avec les politiques euromondialistes de l’UMPS, qui séduit une large fraction de nos compatriotes. Et qui les séduiraient encore plus si celui-ci était réellement exposé, à parité avec celui des partis européistes. C’est-à-dire avec objectivité, bref « sans affect, sans émotion, sans fantasme, sans peur irrationnelle » pour parler le langage de M. Taguieff. Chiche ?
http://gollnisch.com/2014/06/17/chiche-2/