culture et histoire - Page 1163
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Documentaire - Le Canal de Suez
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Les Déracinés, de Maurice Barrès
Quand le traditionaliste séduit par la pensée royaliste a suffisamment parcouru l'œuvre de l'incontournable Charles Maurras, son arrêt suivant se situe généralement sur les sentiers du tout aussi grand Maurice Barrès. Présentons-le en quelques lignes hautes en couleur, pour les non-initiés : Barrès est un écrivain et homme politique français né en 1862, qualifiable de pendant mélancolique de Maurras, et autre figure de proue du nationalisme traditionaliste français. Orateur virulent, funestement antidreyfusard, boulangiste convaincu, nationaliste attaché un temps aux idées socialistes, ennemi absolu du marché absolu, figure fluctuante d'un patriotisme se cherchant un peu, tanguant entre la Ligue des Patriotes de Paul Déroulède (antiparlementaire et nationaliste) et le royalisme positif de son ami Maurras, dont il se distinguait par un rapport aux idées politiques bien plus distancié. Il ne cèdera jamais au monarchisme, ni au républicanisme, ni à aucun autre dogme que celui de la terre et du sang. Tout en tenant à l'"équilibre du Moi" en ces temps où moult idéologies veulent transformer la personne en individu, l'homme donne une importance capitale au respect de ce qui a précédé, les ancêtres et leur héritage, et à ce qui transcende les êtres, le sacré. "Nous sommes les instants d'une chose immortelle", dira-t-il vers la fin de sa vie.
Félix Croissant, pour le SOCLE
La critique positive des Déracinés au format .pdf
Alors que Barrès est surtout un essayiste, un chroniqueur et un journaliste, son livre le plus connu est un roman publié en 1897, Les Déracinés. Bien que la bibliographie du Socle tiennent également à distance la fiction, s'arrêter attentivement sur cet ouvrage n'aura pas manqué de nourrir notre pensée politique.
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Dissidence française #JEANNE2016 : NOTRE BILAN !
À l’appel de la Dissidence Française, 5 mouvements patriotes se sont rassemblés ce dimanche en hommage à Sainte Jeanne, Place des Pyramides à Paris : le Parti de la France, le Front de Défense de la France, Pegida France et la Ligue Patriotique.
Au total, plus d’une centaine de patriotes venus des quatre coins de la France firent le choix de l’unité autour de la Patronne de la Patrie à l’occasion d’un week-end militant aussi chargé que convivial.
Le samedi, Vincent Vauclin, accompagné de plusieurs militants du Mouvement, se rendit au 3ème Congrès du Parti de la France, en signe d’amitié et de fraternité patriote. Dans la soirée, un diner de cohésion rassembla nos militants et nos cadres à l’occasion de retrouvailles conviviales destinées notamment à finaliser les préparatifs pour l’évènement du lendemain.
Le dimanche, à 10h, notre rassemblement débuta sous une météo propice et au traditionnel chant des Lansquenets. Après les prises de paroles de Thomas Joly (Parti de la France), Marceau (Front de Défense de la France), et Vincent Vauclin (Dissidence Française), deux bouquets de roses furent déposés aux pieds de la statue équestre de Sainte Jeanne, au nom de l’ensemble des patriotes Français. La Dissidence Française adresse en particulier ses remerciements à Thomas et Marceau pour le soutien logistique qu’ils apportèrent et qui permit de faire de ce rassemblement une réussite.
Enfin, dans l’après midi, nos militants se joignirent au défilé traditionnel organisé par l’Institut Civitas, en compagnie de plusieurs autres mouvements, dans un esprit de cohésion. Une centaine de tracts de la Dissidence Française furent distribués aux manifestants à cette occasion.
https://la-dissidence.org/2016/05/10/jeanne2016-notre-bilan/
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Identité et existence enracinée
Claude Bourrinet
« Allez donc visiter le Mont-Saint-Michel ou le château de Versailles, cela vous donnera un début d'idée », a rétorqué Marion Maréchal-Le Pen à Cambadélis, qui avançait que la France n'existait pas, et que, seule, la république, avait la chance d'être, à ses yeux.
Je serais quand même étonné que Cambadélis, même ancien trotskiste, même franc-maçon, ne l'eût faite, un jour, cette visite. Au moins celle du château de Versailles, où des sauteries ont parfois lieu, pour les bobos parisiens de luxe, qui se voient bien dans le costume de Marie-Antoinette ou de Louis XVI...
Je reprends au bond la déclaration de Marion Maréchal Le Pen car elle me paraît emblématique d'un certain tour d'esprit des patriotes du moment. Il semblerait, en effet, que l'on découvrît actuellement, face à l'anxiété suscitée par notre possible disparition en tant que nation, à une sorte de « revival », comme disent nos « amis » américains (j'invoque les Yankees, car il se peut que nous soyons-là dans un mouvement de type néoconservateur). Nous voilà donc en quête de nos racines, que l'on croyait arrachées par la pelle de la modernité. Aussi a-t-on tendance à assimiler l'"identité" à des lieux chargés d'Histoire, ou à des périodes glorieuses de notre long passé.
Or, à mon sens, c'est une erreur, et un péril.
D'abord, même s'il est fort agréable de fréquenter les hauts lieux de notre civilisation, il n'en demeure pas moins que ce sont des souvenirs momifiés, pétrifiés, transformés en musées ou en cartes postales. On se satisfait de l'écume du temps. Mais a-t-on idée de ce qu'était la vraie pâte de l'Histoire ? Ne nous faisons pas une idée erronée de sa nature ? Ne sommes-nous pas comme ces amateurs de musique classique, qui ne goûtent que le Bolero de Ravel, les Quatre saisons de Vivaldi, sans connaître la véritable substance de ce continent immense qu'est la musique ? Le cliché qu'on a de notre Histoire ne saurait remplacer la vérité historique, bien plus complexe que les stéréotypes simplificateurs.
Nietzsche, souvenons-nous, avait attaqué violemment, dans ses « Considérations inactuelles », l'historiographie allemande, lourde et méthodique, qui pesait sur l'instinct de vie, et l'empêchait de se manifester. Il louait ainsi l'oubli, qui débarrasse l'être des oripeaux du passé, et lui octroie l'innocence violente de l'animal, capable de se ruer sur sa cible. L'homme trop savant ploie sous la connaissance, sous les scrupules, sous les « leçons » de l'Histoire, et, lorsqu'il se mêle d'action, veut absolument imiter. Or, Marx ne disait-il pas que toute imitation, dans l'Histoire, n'est que bouffonnerie ?
Il ne s'agit pas de cet « oubli » suscité par le libéralisme, l'utilitarisme économique, mais d'une libération des forces, qui s'inspireront de l'esprit, sans pour autant singer. Le dénuement actuel que la postmodernité nous impose, comme si nous étions des orphelins sans lieu ni feu, nous oblige à saisir ce qui est vital en nous, la lumière qui fait le monde, et non les ombres évaporées qui sont les reliquats de ce qui fut. Laissons les morts enterrer les morts.
C'est le même constat pour les signes, les images, que l'on prétend être nos "racines". Là aussi, on est dans le mythe, c'est-à-dire le conte, le "roman". Certes, un tel imaginaire peut être efficace pour l'action. George Sorel y voyait le moyen de mobiliser. Toutefois, attention au jeu pervers des retours de manivelle, des ruses de l'Histoire, comme disait Hegel. On croit oeuvrer dans un sens, mais on travaille dans l'autre, et, finalement, on est écrasé par les forces contraires à nos aspirations. La Révolution française se réclamais de Spartes et de Rome. On a vu le résultat, le triomphe de la bourgeoisie, du commerce, de l'économisme.
Il ne faut pas procéder par la périphérie, par ce fatras de signes, d'icônes, d'images, qui sont souvent le produit de la société du spectacle, et relèvent de fantasmes issus du ressentiment du dernier homme, qui se cherche pathétiquement des raisons d'exister. Il faut cherche le centre, le divin, et, par là, retrouver une vie authentique, qui se déploiera pour retrouver un monde où l'on soit de nouveau nous-mêmes. S'il n'y a pas conversion, transformation radicale de notre être, de nos façons intimes de voir, de sentir, et même de manger, d'être avec autrui, toute revendication devient une vaine incantation. Il s'agit de retrouver notre âme, notre cœur, au-delà des traces qu'il nous faut bien garder de suivre. L'essentiel est de capter ce que nous avons perdu, une source résurgente, si l'on veut, ou une centrale énergétique enfouie sous des couches de sédimentation.
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Jean-Philippe Chauvin - Quand l'Action Française m'invite...
Samedi dernier se tenait un colloque organisé par l'Action Française sur le thème évocateur « Je suis royaliste, pourquoi pas vous ? », et j'y ai participé, ce qui m'a valu quelques réactions, fort contrastées au demeurant, entre indignation et satisfaction... En fait, ma présence n'aurait pas suscité d'émoi si, parmi les intervenants, il n'y avait eu Marion Maréchal-Le Pen, député du Front National, véritable « vedette » de l'après-midi aux yeux des médias et d'un certain nombre d'auditeurs : d'ailleurs, les micros et les caméras n'étaient là que pour elle, et pour les mots qu'elle pouvait prononcer, certains journalistes y voyant l'occasion de faire apparaître les divisions au sein du parti de sa tante ou de diaboliser une femme politique « se commettant » avec les royalistes de l'Action Française, mouvement dont France-info et d'autres rappelèrent les travers idéologiques et historiques, jusqu'à Vichy...
Je connais bien l'histoire de l'Action Française, et je crois même y avoir, un temps qui n'est pas si lointain, participé : c'est par elle, en tant que mouvement et école de pensée, que je suis devenu militant royaliste, même si je dois aussi à Bertrand de Jouvenel, ce libéral fidèle du comte de Paris, une grande partie de mon chemin intellectuel vers la Monarchie, et je ne renie pas cet héritage d'A.F. ou cette partie de mon histoire personnelle, même si j'ai pris, depuis longtemps, d'autres voies et que je réserve ma seule fidélité politique à la Famille de France tandis que je ne revendique qu'une seule appartenance « partisane », celle du Groupe d'Action Royaliste (dont j'ai accepté la vice-présidence dès 2009), étant, encore, toujours et avant tout, royaliste tout simplement. Cela explique que je sois candidat aux élections européennes sous l'étiquette de l'Alliance Royale, que j'ai été le rédacteur en chef du Lys Rouge, la revue d'histoire du royalisme publiée par la Nouvelle Action Royaliste, et que je vais parler de temps en temps dans des réunions de l'Action Française, comme ce samedi-là. Quant aux textes de ce blogue, ils sont « libres de droits » et tout mouvement, journal ou site informatique, qui se revendique royaliste, peut les utiliser, pourvu qu'il en indique la provenance et l'auteur... Je suis royaliste, et je veux faire avancer la cause royale : j'ai l'habitude de dire que « je ne veux pas mourir royaliste, je veux vivre en Monarchie» !
Quelques uns me reprochent ma participation à un événement auquel participait Mme Maréchal-Le Pen et auquel avaient été invités MM. Mélenchon et Macron, qui ont décliné l'offre. J'ai écouté l'entretien que la parlementaire a accordé lors du colloque et j'y ai entendu quelques éléments intéressants, je ne peux le nier : à ceux qui y verraient une compromission de ma part avec « l'extrême-droite », je répondrai avec un sourire que, parfois, « le diable porte pierre »... Je combats au nom de valeurs et pour l'établissement d'un régime qui, lui, devra s'accommoder de toutes les diversités politiques de droite comme de gauche sans, pour autant, renier son identité propre et sa position d'arbitre suprême du pays. D'autre part, je sais faire la part des choses et je n'oublie ni l'histoire ni son poids, sans méconnaître non plus ses pièges et ses masques. Et je suis assez solide pour résister aux tentations politiciennes ou électorales quelles qu'elles soient...
Il me paraît d'ailleurs inquiétant d'avoir toujours à se justifier de vouloir discuter avec tout le monde, de « Nuit debout » aux « identitaires » (par exemple) : j'ai toujours voulu garder cette liberté d'expression et d'écoute, d'approche et de débat, ce qui ne m'empêche pas de descendre, quand il le faut, dans la rue et dans l'arène contre les uns ou les autres, sans m'interdire de tendre la main vers l'autre côté de la barricade.
Ce qui m'importe, c'est la liberté d'expression, la possibilité du débat et la nécessité de la Monarchie. Cette Monarchie qui n'est rien d'autre, en définitive, que la forme politique française de l'unité nationale (celle des peuples fédérés, des « provinces unies » de France), de l'écologie intégrale et de la justice sociale face au « consommatorisme » de la société de consommation, au règne multiforme de l'Argent et au globalitarisme mondial dévastateur des paysages comme des âmes. Philippe VI, le premier de la famille des Valois sur le trône de France, s'écriait, au cœur de la bataille, « Qui m'aime me suive ! »... Une proposition tout à fait honnête et éminemment politique, en fait, que je fais volontiers mienne !
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Ils sont monarchistes. Et vous ?
Le mouvement politique royaliste et nationaliste Action française organisait samedi 7 mai un colloque intitulé "Je suis monarchiste, pourquoi pas vous ?"
Colloque de l’Action française ce samedi 7 mai au Forum de Grenelle à Paris © AF
Le Forum de Grenelle a fait salle comble. Au moins 300 personnes se sont rendues au colloque organisé par l’association royaliste maurrassienne Action française (AF). Une foule se presse autour des quelques stands. Les vêtements patriotiques et cocardiers, les livres de Charles Maurras et de Léon Daudet côtoient ceux de Robert Brasillach et les CD de Jean-Pax Méfret. Les cravates à fleurs de lys foisonnent et les invités se succèdent à la tribune. Les royalistes croisent le fer avec des « républicains intelligents » et des experts : politologues, essayistes ou journalistes. Sympathisants, militants et curieux se pressent devant la scène. En quelques secondes le ton est donné : La France va mal. Pointant une crise politique, économique, identitaire et institutionnelle, les invités se succèdent pour dresser le constat d’un pays à la dérive. Tous unanimes sur le diagnostic, ils le seront moins sur le traitement.
Le point sur les problèmes migratoires
Marion Maréchal-Le Pen et Robert Ménard étaient les stars de ce rendez-vous. Avec Dominique Jamet et Roland Hureaux, ils ont représenté le camp républicain. Si l’AF se défend d’appartenir à l’extrême-droite, les invités issus de ce bord politique ont été pourtant bien accueillis. Devant un parterre très jeune acquis à sa cause, la députée frontiste a repris le thème de la crise migratoire sous les approbations et les applaudissements, martelant sa lassitude vis-à-vis de valeurs républicaines que personne ne saurait définir, déclarant que son monarque préféré est François 1er ou encore que « le FN est le plus monarchiste des partis politiques français ». Le discours télétransmis du maire de Béziers laissera les participants sur leur faim, haché par une connexion qui ne voulait pas lui laisser la parole ! [....]
Marc Eynaud de Faÿ
La suite sur Aleteia
http://www.actionfrancaise.net/craf/?Ils-sont-monarchistes-Et-vous
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L'Autre Tiers-mondisme des origines à l'islamisme radical
Fascistes, nationaux-socialistes, nationalistes-révolutionnaires entre « défense de la race » et « solidarité anti-impérialiste »
Philippe Baillet L'Autre Tiers-mondisme des origines à l'islamisme radical
Le fait de parler d’un « autre tiers-mondisme », différent du tiers-mondisme progressiste, peut dérouter mais se justifie. En effet, s’appuyant sur une documentation très variée – du modeste bulletin militant à l’ouvrage classique – et puisant à des sources francophones, allemandes, italiennes, britanniques et nord-américaines, cet ouvrage met au jour un important corpus de textes, qui va des lendemains de la Grande Guerre à nos jours.
À travers eux, l’ « autre tiers-mondisme », en cela bien antérieur à l’apparition de la formule « tiers-monde » en 1952, se dévoile comme inséparable d’une tentative de Troisième Voie européenne. Celle-ci s’affirme d’abord avec le préfascisme de D’Annunzio, se poursuit avec les nationaux-révolutionnaires allemands ou encore avec la gauche nationale-socialiste (des frères Strasser à Johann von Leers). Mais la « solidarité anti-impérialiste » ne passera jamais, aux yeux de Hitler et de Rosenberg, avant la « défense de la race ». Après 1945, l’ « autre tiers-mondisme » refait surface chez Maurice Bardèche admirateur de Nasser ou chez François Genoud soutien actif du fln. Il trouve son théoricien proprement politique avec Jean Thiriart, auprès duquel se forme Claudio Mutti, ensuite favorable à la révolution islamique d’Iran et converti à l’islam.
Ainsi se précisent les contours d’un « parti islamophile » présent en Europe de l’Ouest sous une forme « docte » et culturelle, qui doit beaucoup à l’influence de l’œuvre de René Guénon, et sous une forme « simple » et politique, dont les écrits d’Alain Soral sont la dernière expression en date.
À l’heure où l’islamisme radical incarne de plus en plus la forme agressive du flot montant des peuples de couleur contre la race blanche, cette somme, caractérisée par le sens de la profondeur historique, remet dans leurs vraies perspectives de nombreuses questions d’une brûlante actualité. -
Livres & Actualité • Éric Zemmour : Terrorisme et vieilles recettes
Un expert en stratégie dénonce avec pertinence les insuffisances dans la réponse des autorités. Mais son réquisitoire tourne vite à la sérénade bien-pensante. Tel est du moins le point de vue qu'expose Eric Zemmour dans cette excellente recension du livre que publie François Heisbourg. LFAR
Il faut se méfier des experts. Pas seulement pour le style, souvent ampoulé et pédant. Mais leur science, incontestable, dans leur domaine d'excellence, les persuade qu'ils ont la même légitimité sur un terrain plus politique. Ils confondent science et idéologie et croient qu'ils assènent des connaissances alors qu'ils ne font que défendre des convictions.
François Heisbourg n'est pas n'importe qui. Il est conseiller spécial à la Fondation pour la recherche stratégique; préside l'International Institute for Strategic Studies de Londres et le Centre de politique de sécurité de Genève. Il a participé à la rédaction des livres blancs sur la défense pour les trois derniers présidents de la République. Quand il aborde les attentats qui ont ensanglanté Paris en 2015, notre auteur sait de quoi il parle. La raison sans doute pour laquelle il parle aussi de ce qu'il ne veut pas savoir. François Heisbourg n'a pas l'habitude qu'on lui dise non. Il ne s'est visiblement pas remis du refus - par Manuel Valls - de convoquer une commission nationale - à l'exemple des Américains après le 11 septembre 2001 - pour tirer les leçons des attentats. Il a décidé de tenir sa convention nationale à lui tout seul. D'où ce livre.
Son texte est bref, concis, efficace. Découpé sur le modèle des dix commandements, transformés en dix erreurs à éviter. Erreurs dont on a déjà commis la plupart ! Erreurs d'anticipation et de réaction. Il reproche ainsi à Sarkozy la fusion de la DST et des RG, qui a dépouillé notre police de ses informateurs de proximité. Il oublie seulement qu'il est plus facile pour un policier français d'infiltrer un parti politique ou un groupuscule gauchiste qu'une mouvance islamique qui repose sur les liens des fratries et de la religion.
L'assaut à Saint-Denis qui a suivi l'attentat du 13 novembre lui paraît disproportionné. Cela a pourtant tué dans l'œuf un autre massacre prévu.
Et puis notre expert passe de la pratique à la théorie, des actes aux mots. Comment nommer l'ennemi ? Califat ou Daech. Heisbourg félicite Hollande de parler de Daech car « c'est le nom que Daech déteste ». Notre spécialiste ne se demande pas pourquoi on interdirait aux djihadistes - avec un mépris gourmet - l'autoproclamation d'un califat alors que notre propre Histoire regorge d'autoproclamations comme la déclaration d'indépendance américaine ou la République française de 1792. Dans la foulée, Heisbourg comme d'autres glosent sur le concept de « guerre » employé à foison par nos gouvernants. C'est alors que notre expert découvre ce qui est tu ou nié : « Bombarder Raqqa dans le cadre de la guerre contre Daech est une chose, mais quid de Molenbeek ou du « 93 » ? Y faire la guerre au sens militaire du terme - armée contre armée - serait absurde ; mais cela est pourtant implicite dans le discours non métaphorique sur la guerre à Daech puisque les forces que celui-ci lance contre nous sont « de chez nous » et frappent chez nous. La guerre serait donc aussi une guerre civile ? »
Le livre alors change d'âme. Affolé par sa découverte, l'expert se mue en prédicateur. Aucun poncif, aucun lieu commun sur la France des Lumières et des droits de l'homme ne nous seront épargnés. L'esprit du padamalgam règne en maître sur notre maître.
Heisbourg en appelle à l'esprit de la Résistance pour mieux renouer avec les réflexes pacifistes de la politique « d'apaisement » qui menèrent à la collaboration.
La déchéance de nationalité promise aux djihadistes binationaux (à laquelle Hollande a dû renoncer) provoque l'ire de notre auteur. Tous les habituels arguments de la bien-pensance sont ressassés. Il n'est pas venu à l'idée de notre expert que si l'égalité sacro-sainte était bien rompue, c'était au bénéfice des binationaux qui ont deux nationalités. Abondance de biens ne nuit pas. Si une égalité devait être rétablie en ces temps de nécessaire rassemblement national contre l'ennemi, ce serait plutôt par la suppression de la binationalité qui obligerait chacun à choisir : partager le destin français ou pas.
Heisbourg ridiculise l'éventuel rétablissement des frontières parce qu'on peut toujours les passer. Mais alors pourquoi interdire le vol et le meurtre puisqu'on peut toujours transgresser ces lois en volant ou en tuant ?
Il condamne la « dérive » de l'état d'urgence au nom de l'État de droit. Et si c'étaient les dérives laxistes de l'État de droit qui avaient conduit à notre tragique situation ?
Il reprend sans aucune distance l'antienne convenue sur « les discriminations au logement et à l'embauche » qui alimentent le « vivier de Daech ». Il est vrai que les millions de Français « de souche » qui végètent dans le périurbain deviennent tous trafiquants de drogue puis djihadistes, qu'Oussama Ben Laden était miséreux et que les frères Kouachi n'avaient pas bénéficié de tous les généreux bienfaits de la République sociale…
« Ce seront toujours les peaux mates qui appelleront les contrôles d'identité un peu virils, les portes des maisons mal situées qui seront forcées à coups de bélier. » On croit entendre le refrain de la chanson parodique de Coluche : « Misère, misère, pourquoi t'acharnes-tu toujours sur les pauvres gens ? »
Il nous explique avec des accents apocalyptiques que l'échec de Schengen serait un « retour à l'Europe d'avant l'Union européenne et une belle victoire pour les djihadistes qui ne rêvent que de nous voir renier nos valeurs et revenir sur nos réalisations ». On ignorait qu'Oussama Ben Laden avait fait campagne pour le non à Maastricht !
Il refuse de voir que l'Union européenne est un handicap dans la lutte contre nos ennemis puisqu'elle a laminé les souverainetés nationales sans forger une souveraineté européenne.
Mais il est temps de conclure, impérieux et grandiloquent : « L'Histoire jugera durement ceux qui choisiront de persister dans l'incompétence et le contresens. » François Heisbourg a raison : l'Histoire jugera durement ceux qui ont choisi de persister dans l'aveuglément et le déni de réalité… •
Comment perdre la guerre contre le terrorisme. François Heisbourg. Stock. 119p., 15 €.
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I-MEDIA S03E15
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La France n'a pas gagné la Première guerre mondiale grâce à l'Afrique et aux Africains
Suite à "l'affaire BlackM", Bernard Lugan analyse pour son blog la désinformation sur la Première guerre mondiale, qui voudrait que la France doive sa victoire et son salut à l'Afrique. Il n'en est rien :
"Dans la grande entreprise de réécriture de l’histoire de France entreprise par les partisans du « grand remplacement », la Première Guerre mondiale, et plus particulièrement la bataille de Verdun, constitue un argument de poids. Son résumé est clair : les Africains ayant permis la victoire française, leurs descendants ont donc des droits sur nous.
Voilà qui explique pourquoi ces ardents défenseurs du « vivre ensemble » que sont MM. Samuel Hazard, maire socialiste de Verdun, et Joseph Zimet, à la ville époux de Madame Rama Yade, et en charge de la Mission du centenaire de la Grande Guerre, ont voulu mettre le sacrifice de millions de Poilus au service de leur idéologie.
Laissons donc parler les chiffres[1] :
1) Effectifs français (métropolitains et coloniaux)
- Durant le premier conflit mondial, 7,8 millions de Français furent mobilisés, soit 20% de la population française totale.
- Parmi ces 7,8 millions de Français, figuraient 73.000 Français d’Algérie, soit environ 20% de la population « pied-noir ».
- Les pertes françaises furent de 1.300 000 morts, soit 16,67% des effectifs.
- Les pertes des Français d’Algérie furent de 12.000 morts, soit 16,44% des effectifs.
2) Effectifs africains
- L’Afrique fournit dans son ensemble 407.000 hommes, soit 5,22 % de l’effectif global de l’armée française.
- Sur ces 407.000 hommes, 218.000 étaient des « indigènes » originaires du Maroc, d’Algérie et de Tunisie, soit 2% de la population de ces trois pays.
- Sur ces 218.000 hommes, on comptait 178.000 Algériens, soit 2,28 % de tous les effectifs français.
- L’Afrique noire fournit quant à elle, 189.000 hommes, soit 1,6% de la population totale et 2,42% des effectifs français.
- Les pertes des unités nord africaines furent de 35.900 hommes, soit 16,47% des effectifs.
- Sur ces 35.900 morts, 23.000 étaient Algériens. Les pertes algériennes atteignirent donc 17.98 % des effectifs mobilisés ou engagés.
- Les chiffres des pertes au sein des unités composées d’Africains sud-sahariens sont imprécis. L’estimation haute est de 35.000 morts, soit 18,51% des effectifs ; l’estimation basse est de 30 000 morts, soit 15.87%.
Pour importants qu’ils soient, ces chiffres contredisent donc l’idée-reçue de « chair à canon » africaine. D’ailleurs, en 1917, aucune mutinerie ne se produisit dans les régiments coloniaux, qu’ils fussent composés d’Européens ou d’Africains.
Des Africains ont donc courageusement et même héroïquement participé aux combats de la « Grande Guerre ». Gloire à eux.
Cependant, compte tenu des effectifs engagés, il est faux de prétendre qu’ils ont permis à la France de remporter la victoire. Un seul exemple : le 2° Corps colonial engagé à Verdun en 1916 était composé de 16 régiments. Les 2/3 d’entre eux étaient formés de Français mobilisés, dont 10 régiments de Zouaves composés très majoritairement de Français d’Algérie, et du RICM (Régiment d’infanterie coloniale du Maroc), unité alors très majoritairement européenne.
Autre idée-reçue utilisée par l’idéologie dominante : ce serait grâce aux ressources de l’Afrique que la France fut capable de soutenir l’effort de guerre.
Cette affirmation est également fausse car, durant tout le conflit, si la France importa six millions de tonnes de marchandises diverses de son Empire, elle en importa 170 millions du reste du monde.
Conclusion : durant la guerre de 1914-1918, l’Afrique fournit à la France 3,5% de toutes ses importations et 5,22 % de ses soldats. Ces chiffres sont respectables et il n’est naturellement pas question de les négliger. Mais prétendre qu’ils furent déterminants est un mensonge doublé d’une manipulation." [1] Les références de ces chiffres sont données dans mon livre Histoire de l’Afrique du Nord des origines à nos jours. Le Rocher, en librairie le 2 juin 2016.
- Les chiffres des pertes au sein des unités composées d’Africains sud-sahariens sont imprécis. L’estimation haute est de 35.000 morts, soit 18,51% des effectifs ; l’estimation basse est de 30 000 morts, soit 15.87%.