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culture et histoire - Page 1561

  • La censure des propos sur Internet est contre-productive

    Dans un délire étatiste, Jean-Vincent Placé propose une loi pour contrôler internet. L'écrivain Christian Combaz met en garde contre cette volonté de censure :

    "[...] Les institutions ne gagneront jamais la bataille de la dérision. Elles ont toujours été terrassées par le camp des ricaneurs même à l'époque où Facebook et Youtube n'existaient pas. Sommer le Conseil d'Etat de se prononcer de manière préventive sur le spectacle d'un humoriste comme l'a fait naguère Manuel Valls, multiplier les déclarations compassées, appeler à la vigilance sur le ton «je ne plaisante pas», courir après les gestes, le vocabulaire, les déclarations fiscales de ceux qui vous agacent, mobiliser les ressources du ministère de l'Intérieur et réclamer le concours de la Culture et d'Aurélie Filippetti pour museler «une certaine parole» sur internet en partant à la chasse aux propos inadmissibles, c'est donner des ailes aux ennemis de l'état. Par conséquent cela nous concerne tous.

    [...] Imaginez une conjuration de citoyens qui choisissent un geste trivial de l'avant-bras, connu des pêcheurs et des scouts, comme signe de ralliement et qui appellent cela faire une quenelle. Dans un premier temps on interdit le geste en public, ensuite on analyse les photos de groupe sur internet pour remonter vers les auteurs du geste, ensuite on interdit l'emploi du mot quenelle dans les débats télévisés, puis dans les restaurants ce qui devient assez incommode. Les fabricants de quenelles font fortune. Les récalcitrants trouvent expédient de faire allusion à la ville de Nantua, afin d'y tenir un congrès, naturellement aussitôt interdit, puis de faire imprimer des Tshirts «I love Nantua». A la fin, on discute en haut lieu de la solution qui consisterait à débaptiser la ville de Nantua pour contrecarrer les plans de la sédition . Dans les réunions au ministère de l'Intérieur tout le monde trouve la solution difficile à mettre en oeuvre mais on est tellement embarqué dans la servilité à l'égard de la parole du premier ministre que personne ne trouve la situation grotesque. La preuve même le lecteur vient d'avoir une seconde de doute quand j'ai évoqué le congrès de Nantua. Les esprits sont si habitués à l'invraisemblable que rien ne les surprend plus.

    Jusqu'au moment où le ricanement de la population deviendra colère, où les gens monteront sur les lampadaires. Et le Premier ministre criera au complot anti-républicain ourdi par des forces venues des bas-fonds de l'histoire, alors qu'au départ il s'agissait simplement de donner une leçon à un pion qui se prend au sérieux.

    Il est temps de signifier à l'Etat qu'une partie non négligeable des citoyens français trouve ce risque inconsidéré. Si l'on voulait conjurer l'apparition de certaines idées dans les esprits, il fallait éduquer les enfants autrement que par la télévision où les feuilletons policiers américains considèrent explicitement autrui comme de la viande, éviter les prêchi-prêcha en CM2 avec présentation de diapositives, ne pas importer de guerres civiles étrangères, imposer la force de la culture avant celle du droit (qui n'a aucun effet sur les esprits). Courir après les mots impose à l'état de jouer le rôle du comte Almaviva dans le mariage de Figaro et précipite une tribulation de l'opinion dont la France a connu plusieurs exemples, tous assez fâcheux."

    Michel Janva

  • Europe : un travelo barbu comme Marianne. Mais jusqu’où descendront-ils ?

    Le concours de l’eurovision de la chanson est l’une des manifestations les plus ringardes qui soit. Voilà des années que cette manifestation est éclipsée par toutes les téléréalités autour des « Incroyables talents » et autres « Voice ». 

    Comment tout de même survivre et se maintenir ne serait-ce que pour engranger les bénéfices et la manne de la retransmission télévisée ? En en faisant des tonnes bien sûr. Il suffit de flatter l’idéologie dominante et les financiers des espaces publicitaires. Il y a bien longtemps que dans les grandes manifestations internationales, ce n’est plus le talent qui est récompensé mais le thème. Il suffit de traiter un sujet politiquement correct pour avoir une chance… tous ceux qui pensent comme nous aurons du talent, pas les autres.

    Voilà pourquoi Cannes consacre des films que personne ne va voir et on peut multiplier les exemples à l’infini dans l’art contemporain où un excrément dans un bocal présenté par un artiste du bout du monde est forcément une œuvre d’art. [...]

    La suite sur Novopress

    Lire également sur France Catholique l’article de Gérard Leclerc

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?Europe-un-travelo-barbu-comme

  • Vivre dans la vérité tel est le principe de la dissidence

    Intéressante tribune d'Aymeric Chauprade :

    "[...] Vivre dans la vérité tel est le principe de la dissidence, dissidence au totalitarisme, communiste à l’époque de Vaclav Havel, aujourd’hui couvert par d’apparentes libertés individuelles, mais non moins existant pour autant. L’Union européenne construit une Europe post-démocratique fondée sur le mensonge. Or la récolte du mensonge est toujours le malheur et «la défense de la vérité est la condition de la défense de la personne, de la morale, de la civilisation » comme le dit saint Jean-Paul II. Il est de notre responsabilité de chercher et de défendre à temps et à contretemps la vérité au cœur de la crise nihiliste que traverse notre époque.

    Le Parlement européen est l’un des foyers les plus actifs du relativisme anthropologique et culturel. En ayant délibérément refusé d’accueillir ses racines chrétiennes comme fondement de sa civilisation, l’Union européenne a révélé à tous son intention la plus chère : construire un homme et une société radicalement nouveaux. L’antique orgueil prométhéen inspire cette marche forcée, rythmée d’une multitude de normes édictées par les différentes institutions européennes.

    Marche vers quoi ? Vers un arasement des différences et des identités, vers la production d’individus artificiels et suffisamment lobotomisés pour devenir malléables à toutes les sollicitations.

    Repartir de la personne humaine

    Il est nécessaire de repartir de la personne humaine accueillie dans la richesse de son contenu et de ses liens. La personne se reçoit de différentes communautés dont les deux plus importantes sont la famille, fondée sur le mariage de l’homme et de la femme, et la nation. Ces communautés sont dites naturelles, non pas parce qu’elles existeraient indépendamment des choix humains mais parce qu’elles permettent à l’homme de se réaliser dans ses diverses capacités.

    Attaquer la famille et la nation comme s’y emploie avec un entêtement diabolique l’Union européenne, c’est créer un environnement culturel aliénant. Il n’est donc pas étonnant qu’un des principes de la construction européenne soit un contresens sur la notion de subsidiarité, clef de voûte de toute liberté véritable.

    Le respect dans la subsidiarité

    Comme Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir, tout le monde a en réalité une expérience pratique de ce qu’est la subsidiarité. Qui est fondé à agir sur tel ou tel sujet ? Voilà la question à laquelle répond la subsidiarité.

    La subsidiarité n’est rien d’autre que le respect et l’incitation par les autorités supérieures de la libre initiative des autorités inférieures, dans les domaines où elles sont compétentes, sauf si elles ne peuvent assumer seules une tâche et qu’elles ont besoin d’aide, l’aide n’étant en aucun cas la substitution. Ainsi une commune a la compétence de choisir où installer une piscine et ce n’est certes pas au ministère des Sports de le décider !

    La subsidiarité doit gouverner l’articulation famille/école/État, mais aussi la vie économique, notamment par un véritable accompagnement à la liberté d’entreprendre. Le contraire de la subsidiarité est non seulement le dirigisme mais aussi l’assistanat et l’infantilisation des personnes. C’est donc le rôle de l’État de protéger les droits fondamentaux inhérents à la dignité de la personne libre et responsable.

    On voit bien que depuis des années l’Union européenne se construit sur une inversion du principe de subsidiarité qu’elle comprend comme la délégation aux pays membres de missions qu’elle ne souhaite pas assumer elle-même ! Ce mouvement de haut vers le bas montre le mépris des technocrates bruxellois, pour la réalité humaine dans sa riche diversité. [...]"

    Michel Janva

  • Vivre dans la vérité tel est le principe de la dissidence

    Intéressante tribune d'Aymeric Chauprade :

    "[...] Vivre dans la vérité tel est le principe de la dissidence, dissidence au totalitarisme, communiste à l’époque de Vaclav Havel, aujourd’hui couvert par d’apparentes libertés individuelles, mais non moins existant pour autant. L’Union européenne construit une Europe post-démocratique fondée sur le mensonge. Or la récolte du mensonge est toujours le malheur et «la défense de la vérité est la condition de la défense de la personne, de la morale, de la civilisation » comme le dit saint Jean-Paul II. Il est de notre responsabilité de chercher et de défendre à temps et à contretemps la vérité au cœur de la crise nihiliste que traverse notre époque.

    Le Parlement européen est l’un des foyers les plus actifs du relativisme anthropologique et culturel. En ayant délibérément refusé d’accueillir ses racines chrétiennes comme fondement de sa civilisation, l’Union européenne a révélé à tous son intention la plus chère : construire un homme et une société radicalement nouveaux. L’antique orgueil prométhéen inspire cette marche forcée, rythmée d’une multitude de normes édictées par les différentes institutions européennes.

    Marche vers quoi ? Vers un arasement des différences et des identités, vers la production d’individus artificiels et suffisamment lobotomisés pour devenir malléables à toutes les sollicitations.

    Repartir de la personne humaine

    Il est nécessaire de repartir de la personne humaine accueillie dans la richesse de son contenu et de ses liens. La personne se reçoit de différentes communautés dont les deux plus importantes sont la famille, fondée sur le mariage de l’homme et de la femme, et la nation. Ces communautés sont dites naturelles, non pas parce qu’elles existeraient indépendamment des choix humains mais parce qu’elles permettent à l’homme de se réaliser dans ses diverses capacités.

    Attaquer la famille et la nation comme s’y emploie avec un entêtement diabolique l’Union européenne, c’est créer un environnement culturel aliénant. Il n’est donc pas étonnant qu’un des principes de la construction européenne soit un contresens sur la notion de subsidiarité, clef de voûte de toute liberté véritable.

    Le respect dans la subsidiarité

    Comme Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir, tout le monde a en réalité une expérience pratique de ce qu’est la subsidiarité. Qui est fondé à agir sur tel ou tel sujet ? Voilà la question à laquelle répond la subsidiarité.

    La subsidiarité n’est rien d’autre que le respect et l’incitation par les autorités supérieures de la libre initiative des autorités inférieures, dans les domaines où elles sont compétentes, sauf si elles ne peuvent assumer seules une tâche et qu’elles ont besoin d’aide, l’aide n’étant en aucun cas la substitution. Ainsi une commune a la compétence de choisir où installer une piscine et ce n’est certes pas au ministère des Sports de le décider !

    La subsidiarité doit gouverner l’articulation famille/école/État, mais aussi la vie économique, notamment par un véritable accompagnement à la liberté d’entreprendre. Le contraire de la subsidiarité est non seulement le dirigisme mais aussi l’assistanat et l’infantilisation des personnes. C’est donc le rôle de l’État de protéger les droits fondamentaux inhérents à la dignité de la personne libre et responsable.

    On voit bien que depuis des années l’Union européenne se construit sur une inversion du principe de subsidiarité qu’elle comprend comme la délégation aux pays membres de missions qu’elle ne souhaite pas assumer elle-même ! Ce mouvement de haut vers le bas montre le mépris des technocrates bruxellois, pour la réalité humaine dans sa riche diversité. [...]"

    Michel Janva

  • Michel Maffesoli, le troll de la sociologie française

    Pour le sociologue des «tribus», anar de droite en marge de la sociologie française, les élites ne comprennent plus le fonctionnement de la société et les aspirations communautaires de ses membres. Et «le bavardage des journalistes, politiques, hauts fonctionnaires et “experts” n’intéresse plus grand monde». Et le sien?

    «Ce n’est plus la société qui va dominer, ce sont les tribus. Non plus les grands ensembles, mais l’émergence de petits groupes réunis par des affinités électives: musicales, sexuelles, religieuses, sportives, etc.

    La postmodernité, c’est les tribus plus Internet. C’est une synthèse d’archaïsme et de développement technologique».

    C’est en tout cas ce que m’a expliqué Michel Maffesoli. A vrai dire c’est ce qu’il explique depuis une trentaine d’années. En rentrant de la rive gauche où il habite, mes collègues branchés Internet m’ont appris que sur la plateforme de partage d’images que l’on appelle Instagram, se nichait un petit hérisson américain du nom de Biddy qui, suivi par 342.514 fans, s’exhibait dans des positions désopilantes.

    Il paraît même que Biddy est une sorte d’animal totémique qui relie les membres de la communauté virtuelle entre eux. Alors j’ai pensé que Michel Maffesoli avait peut-être eu raison avec toute cette histoire de postmodernité et de néotribus.

    Dans Les nouveaux bien-pensants, paru en début d’année, livre cosigné avec sa femme Hélène Strohl, énarque qui consacre un chapitre à la «tribu» des hauts fonctionnaires, le sociologue écrit:

    «La pensée authentiquement en phase avec son époque […] est enracinée dans la vie courante. En ce sens, elle doit, parfois, penser contre elle-même. C’est ainsi qu’elle peut éviter l’abstraction, la sophisitication inutile, et être concrète.»

    Venant de quelqu’un qui utilise plus de locutions latines que le Pape à la minute et souvent critiqué pour son écriture hermétique, l’occasion était trop belle de demander de jouer le jeu de la concrétude.

    Car qu’est-ce donc que cette post-modernité, mis à part un terme qui en jette. La définition qu’en donne Maffesoli est là suivante. La modernité, «rationalisation généralisée de l’existence» selon Max Weber rappelle le sociologue, était définie par le tryptique raison, travail et progrès; elle s’efface et une nouvelle société se fonde sur des valeurs nouvelles:

    «Ce n’est plus simplement le travail qui est la grande valeur dominante, mais la création: “faire de sa vie une œuvre d’art“, et on voit bien comment le qualitatif chez les jeunes générations importe: “j’ai plus envie de perdre ma vie à la gagner”. Ce n’est plus la raison dominante. C’est à la fois la raison et les sens, le cerveau et le corps dans son entier, ainsi que les émotions collectives (sportives, musicales, consommatoires, etc.). Ce n’est plus demain / le progrès: c’est aussi le présent.»

    Michel Maffesoli, sociologue de l’imaginaire et du quotidien, a fondé des théories qui ont suscité de nombreux travaux de recherche sur la musique techno et ses rassemblements festifs, les amateurs de Heavy Metal, la communauté gay, sur les petites cultures urbaines en marge ou sur les fans de jeux vidéos en ligne… A Paris-V, où il enseignait à l’époque où votre serviteur étudiait, cet amour du bizarre et du marginal lui valait déjà d’être regardé de travers. Les Maffesoliens suscitaient à la fois curiosité et inquiétude. Mais Maffesoli n’aime pas qu’on traite ses sujets –et ses enquêtés– de marginaux.

    «Prenons la techno: ses amateurs disent en majeur ce que moi, peuple, je n’ose pas dire mais qui m’attire. Ils disent en majeur ce qui est vécu en mineur. Ce ne sont donc pas des marginaux mais une forme exacerbée […] c’est ce que ne veut pas voir l’opinion publiée.»

    Tribus partout, République nulle part?

    Ses tribus et son néotribalisme ont eu leurs heures de gloire. Tout comme le nomadisme, le retour de l’hédonisme, de l’affect. Maffesoli a fait indéniablement école dans les milieux attentifs aux tendances —à l’éphémère et à la mode, diront les sceptiques, c’est-à-dire souvent, ses confrères.

    «Dans l’université, j’étais un peu trop avant-gardiste, ça leur faisait peur… Et maintenant ils récupèrent mes idées! Par contre dans le monde de l’entreprise et de la pub, alors tout ce que j’ai dit sur les tribus ça marche».

    Lors de sa sortie, le Tatoo, sorte d’ancêtre condamné d’avance du téléphone portable, avait pour slogan «restez connecté avec votre tribu». En 2003, Ardisson lance même un prime time sur France 2, «Tribus», consacré à ces groupes affinitaires autour desquels les sociétés se reconfigureraient désormais. Mais ce sera un flop.

    Dans un article sur l’utilisation de la notion de tribu dans le marketing paru en 2002, Bernard Cova écrivait que la «tribu» était désormais utilisée dans la presse «pour désigner un groupe d’amis, un club de supporters, la garde rapprochée de Jacques Chirac, une corporation ou encore une mode (la tribu “techno”), un “look” ou un style de vie. Même les familles (re)deviennent des tribus en se recomposant après un divorce».

    Au tournant des XXe et XXIe siècles, les spécialistes du marketing se demandent comment s'adresser aux populations de leurs marchés, dont la culture et les attitudes leur semblent de plus en plus spécialisés: la tendance du «marketing tribal» est alors perçue comme une approche novatrice. Depuis, la référence est un peu passée de mode.

    La république une et indivisible est derrière nous

    Michel Maffesoli est persuadé que les évolutions de la société française valident les intuitions qu’il avait développées dans Le temps des tribus publié pour la première fois en 1988, avec cette métaphore empruntée à l’ethnologie: celle d’un désir de dépasser l’individualisme.

    «Ma métaphore de la tribu: c’est que je trouve une forme d’épanouissement dans la communauté, dans le groupe. Ça nous est difficile à penser parce que dans notre vieux système républicain le mot que les hommes politiques ou que les journalistes emploient c’est le “communautarisme”, et on trouve que c’est pas bien, parce que le communautarisme ça me rend prisonnier de fait d’un groupe.

    Plutôt que de parler de communautarisme, moi je propose l’idéal communautaire, c’est-à-dire que maintenant il faut prendre acte du fait qu’il y a une mosaïque, que la république n’est plus une et indivisible –chaque pièce garde sa configuration, sa couleur, sa structure, et pourtant ça tient ensemble, et c’est l’apprentissage qu’on est en train de faire actuellement».

    Biddy le hérisson, on vous dit.

    A présent, son dada semble être le couchsurfing, que son laboratoire, le CEAQ, étudie. C’est «une forme d’hospitalité du Moyen-âge, mais avec Internet. C’est-à-dire du vivre-ensemble. On a un filet à grosses mailles qui ne permet pas de le voir.» Il se passionne pour le préfixe co- qu’on sert en ce moment à toutes les sauces: coworking, cocréation, etc.

    «C’est le cum, “avec” en latin, et pour moi ça veut dire qu’il y a une autre manière de penser le partage, ce ne sont plus des services spécialisés venus du haut qui vont régler ça, mais plutôt quelque chose venant du bas; c’est ça les tribus.»

    Quand on mesure le poids médiatique qu'occupe la consommation dite collaborative depuis plusieurs années, difficile de ne pas voir en Maffesoli un précurseur de ce retour en vogue des «communautés».

    Les élites consanguines

    Mais son récent livre, Les nouveaux bien-pensants, ne parle pas tant de tribus que de l’écart grandissant entre les élites et ceux qu’ils sont censés représenter.

    Après l’affaire Dieudonné, qui a révélé une énième fois le gouffre qui existait entre des médias globalement scandalisés et une grande partie de l’opinion, on ne peut que prêter l’oreille à cette critique vigoureuse des discours qui sont censés faire l’opinion et qui, souvent, semblent tourner dans le vide, ou n’être prononcés que pour s’entre-rassurer.

    Maffesoli:

    «On ne sait plus dire les mots pertinents. On reste sur nos vieux mots des XVIIIe et XIXe: “République”, “contrat social”, “citoyen”, “démocratie”, c’est amusant de voir comment dans tous les discours on emploie tous ces mots à tire larigo; les ethnologues le montrent d’ailleurs: l’incantation dans les tribus primitives, c’est le fait de chanter des trucs dont on n’est pas convaincu. Ça ne marche plus, mais on le dit, on le dit, on le dit: et là c’est frappant d’entendre ces mots: “république”, “république”, “république”, “démocratie”, “démocratie”, “démocratie”, mais ce sont des incantations qui ne correspondent plus vraiment à ce qui est vécu».

    «Le bavardage des journalistes, politiques, hauts fonctionnaires et “experts” n’intéresse plus grand monde», écrit-il par ailleurs, marquant indéniablement un point.

    «C’est ce que dit Machiavel dans Le Prince: il y a une différence entre la pensée de la place publique et la pensée du Palais.»

    Entre «le peuple, enfin les gens qui vivent, l’homme sans qualité», et l’élite censée justement «dire» et «faire» en son nom.

    Pourquoi ce décalage, cet anachronisme, cet éloignement?

    «Ce qui est quand même frappant, si je le dis de manière savante, c’est qu’il y a de l’endogamie dans l’air.»

    Et de manière non savante? Ben, c’est un peu House of Cards sur la rive gauche –Maffesoli y réside lui-même.

    «Ça couche ensemble, voilà. Et dans les 5, 6, 7e arrondissements, vous avez le politique, qui est le petit ami du journaliste, qui a lui-même affaire avec tel énarque… Quand les ethnologues parlent d’endogamie, ils montrent que dans le fond ça appauvrit le sang et que ça produit une caste séparée, donc voilà ma réponse à votre question: ils ne voient pas, pour la bonne raison qu’ils sont ensembles. Que ça fricote.»

    Il prend l'exemple de François Hollande, qu’on avait pas forcément imaginé comme figure emblématique de cet entresoi sexuel.

    «On a là la caricature du politique qui est avec une journaliste, une énarque puis une comédienne, c’est en raccourci une coupe épistologique: avec un petit morceau de peau on lit tout le corps social… il n’est bien sûr pas le seul, je ne dis pas ça pour lui, mais ça crée une forme d’entresoi.»

    Maintenant je peux me lâcher

    Quand nous nous sommes rencontrés, fin janvier, Michel Maffesoli l’a admis: «Je prends ma retraite dans deux mois donc du coup je me lâche!» Certains passages à charge ont des airs de règlements de compte. Il s’en défend.

    «Non, un règlement de compte c’est quand il y a un contentieux avec la personne: j’ai voulu prendre des figures emblématiques. Ceux avec qui il y a contentieux ont été virés à la relecture…»

    Ce qui est certain, c’est que ses promotions contestées, comme à l’Institut universitaire de France avec le soutien de Valérie Pécresse, ont valu à Michel Maffesoli d’être progressivement entouré d’une très vaste tribu d’ennemis dans le monde universitaire. «Ah... le cas Maffesoli !», lâche par exemple l’un d’eux quand on le questionne sur ce qu’il pensait du chercheur.

    Il ne faut pas chercher longtemps pour trouver des profs ou chercheurs ne cachant pas leur rejet, parfois en termes durs, du personnage. Une pétition s’opposant à sa nomination au conseil d’administration du CNRS, le présentant comme «bien connu pour ses prises de position antirationnalistes et antiscientifiques», avait recueilli selon le site Liens-socio 3.000 signatures, dont une bonne part du Who’s Who de la discipline.

    Pourquoi tant de haine ?

    En 2001, le sociologue déjà marginalisé dans sa discipline se grille avec l’affaire Elisabeth Tessier: l’astrologue médiatique a réalisé sous sa direction une thèse de sociologie sur les rapports entre médias et astrologie —et non une thèse d’astrologie, justifie-t-il aujourd’hui, «d’ailleurs j’avais été prudent en mettant le matériel évoqué en annexes»… Une thèse «certes moyenne», admet-il volontiers, «mais comme il y en a des kilos».

    «Sa “sociologie” est un simple discours mêlant le genre littéraire et le genre de l'essai politique», écrivait le sociologue Laurent Mucchielli à l’époque de la parution de Sarkologies, pourquoi tant de haine(s)?, essai consacré aux raisons de la fascination-répulsion qu’exerçait alors le président des riches. Sur la scène sociologique française, l’accusation de faire dans le «genre littéraire» est évidemment à prendre comme une critique très virulente...

    «Ça embêtait ce que je disais sur le tribalisme, et comme on ne savait pas comment y faire, il y a eu à un moment l’affaire Tessier, on a pris Maffesoli la main dans le sac. A partir de là, on m’a fait les poches. En disant qu’il y avait indignité de Maffesoli.»

    Il est vrai que Michel Maffesoli, même et peut-être surtout quand il est isolé, n’est pas du genre à douter que la postérité lui donnera raison.

    «J’ai été attaqué, et ça m’a pas démolli hein! j’ai écrit des choses, je pense que ce que je fais durera, j’ai cette prétention».

    Le sociologue Jean-Claude Kaufmann, rencontré récemment à l’occasion de la publication d’un livre consacré aux questions identitaires, reste mesuré dans son jugement même si ses relations avec lui sont distantes: «un essayiste intuitif, flairant l’air du temps». Puis au fil des polémiques, «il s’est glissé dans une posture de martyr».

    «Intution», c’est aussi le terme qu’emploie Monique Dagnaud, sociologue spécialiste de la jeunesse et contributrice à Slate, à son sujet. «Il a des fulgurances, et beaucoup d’intuition, parfois plus que ceux qui travaillent sur de la statistique» même si, admet-elle également, l’affaire Tessier l’a «carbonisé».

    «Il a des afficionados, en Italie c’est une star. Mais il est un peu mal vu en Fance où il est considéré comme un original, voire un hérétique. S’il avait eu un langage plus accessible, il aurait pu configurer une école de pensée.»

    S’y mêle une autre accusation: celle d’être proche de la droite. «Anar», comme il se définit, qui n’a jamais voté, il est surtout perçu comme anar de droite –la nuance a son importance.

    Maffesoli est un type de droite dans un monde de gauche. Le «sociologue a en effet particulièrement été chouchouté par le pouvoir politique en place, Valérie Pécresse et Nicolas Sarkozy», écrivait en 2011 Syvestre Huet dans Libération.

    «Une des critiques qu’on me fait, c’est “Maffesoli, au fond il ne s’engage pas” parce que le pêché mignon de tous les intellectuels, qui sont de gauche, c’est tout de même de dire ce que devrait être le monde, alors que moi je m’en fous, je suis un vieil anar, j’ai pas envie de dire ce qui doit être…»

    Et d'ajouter:

    «c’est au nom de ce qui devrait être qu’il y a eu les pires camps de concentration.»

    Et hop! Un petit point Godwin pour la route!

    Jean-Laurent Cassely

    source : http://www.slate.fr/story/85967/michel-maffesoli-sociologie-troll

    http://www.voxnr.com/cc/dt_autres/EFAAylEElpYCoGxtQK.shtml

  • Alessandro Acquisti : La vie privée sur internet (VOSTFR)

    Alessandro Acquisti est chercheur au Carnegie Mellon University, il est spécialisé dans le domaine de la vie privée sur les réseaux sociaux ainsi que dans les aspects économiques liés aux données privées.

    http://fortune.fdesouche.com/