Que reste-t-il de Charlemagne ? Les ouvrages présentés ci-dessous confrontent le lecteur à la source du mythe et lui livrent des images contradictoires – le portrait d'un serviteur de l'église s'opposant à celui d'une brute opportuniste qui cache sous la façade religieuse ses exactions et ses vices.
Longtemps revendiqué comme une grande figure nationale par les historiens français et allemands, devenu, sous l'Occupation, parrain de la division française de la Waffen SS, l'empereur à la barbe fleurie tend aujourd'hui à incarner un précurseur de l'idée européenne supranationale. À travers ces divers avatars, que subsiste-t-il de l'homme et de son oeuvre ?
Portrait idéalisé
Force est d'admettre que la légende s'est tôt emparée du souverain et que, pour précieux que soit leur témoignage, ses premiers biographes ont contribué à troubler son image, pour léguer à la postérité un portrait idéalisé assez éloigné de la réalité. Éginhard en est un exemple. La réédition de sa Vie de Charlemagne dans la collection "Les classiques de l'histoire de France au Moyen Âge", laquelle a le grand mérite de proposer, en sus d'un appareil de notes et d'un index, l'original du texte latin en regard de la traduction, permet de saisir à la source la fabrication du mythe. Né en 775, Éginhard, appelé adolescent à la cour d'Aix-la-Chapelle, n'a connu Charles qu'au temps de la maturité et de la vieillesse. Au vrai, il est le commensal des fils de l'empereur, et d'abord du futur Louis le Pieux qui, monté sur le trône, assurera sa fortune tardive. C'est sans doute à sa demande qu'Éginhard, vers 830, une quinzaine d'années après la mort de Charles, disparu le 28 janvier 814, entreprend d'en rédiger une biographie officielle, en s'appuyant sur les sources palatines et les chroniques du règne.
Hélas, afin de ménager son héros, et le fils de celui-ci, Éginhard aura soin de gommer du récit, au demeurant fort bref, les accidents de parcours : revers militaires, représailles sanglantes, goût prononcé de l'empereur pour les femmes, aventures amoureuses des princesses que leur père se refusait à marier mais qui n'avaient point pour autant fait voeu de chasteté... En quoi Éginhard, qui prit modèle sur Suétone au point qu'on a dit de son texte qu'il est "un treizième César", se démarque de l'historien latin, qui, lui, n'épargna aucun ragot, fût-ce le plus douteux, à la mémoire des Julio-Claudiens. Reste qu'avec ses lacunes et ses flous artistiques, la Vita Karoli Magni imperatoris demeure un texte fondateur indispensable dans toute bibliothèque d'histoire.
S'il répond à un programme politique - ce rêve impérial qui ne cessa de hanter les puissants d'Europe après la chute de l'empire romain d'Occident en 476 -, le titre d'empereur, accordé à Charles le soir de la Noël 800 par le pape Léon III, revêt, aux yeux des contemporains, une autre dimension : celle du protecteur de la chrétienté. C'est parce qu'il se fait le défenseur de l'Église, devenant ainsi un nouveau Constantin, que le roi franc peut aspirer à la pourpre des Césars.
Le protecteur de la Chrétienté
Certains ont estimé que le souverain pontife avait forcé la main à Charlemagne, qui se trouva, de fait, lié aux intérêts de Rome. Peut-être. Il s'agissait cependant d'un rôle qu'il avait, de longue date, succédant en cela à ses père et grand-père, accepté d'assumer, tant sur les territoires traditionnels de la monarchie franque qu'au-delà. Même si sa "canonisation", accordée par un anti-pape à Frédéric Barberousse, est sujette à caution, la conscience catholique de Charles et le sens de sa mission ne sauraient être mis en doute.
Lorsqu'il titrait, il y a dix ans, un essai consacré à l'empereur, Charlemagne fondateur de l'Europe, Ivan Gobry ne se méprenait pas sur le sens qu'il donnait à ces mots. Charlemagne ne fut pas un précurseur du monstrueux machin bruxellois, mais d'une idée absolument contraire à celles des technocrates européistes : la mise en place de la Chrétienté en Europe. Jusqu'à un certain point, car de tels choix sont rarement tout à fait désintéressés et dénués d'arrière-pensées politiques, Charles travailla pour le règne de Dieu sur ses terres et ailleurs. Ses interventions en Italie contre les Lombards empiétant sur les droits du pape, en Espagne contre des musulmans menaçant les cités demeurées catholiques des Asturies, à l'Est contre des peuples, Saxons ou Avars, encore païens, tendent toutes à l'établissement en ce monde de la Cité de Dieu augustinienne, son livre de chevet. Cela est vrai également en ce qui concerne son oeuvre législative, ses interventions dans les affaires ecclésiastiques afin d'améliorer le clergé et mieux évangéliser le peuple, et même ses relations diplomatiques avec Byzance, son soutien à l'impératrice Irène allant à la pieuse orthodoxe capable de mettre un terme à la crise iconoclaste, dût-elle, pour cela, faire crever les yeux de son seul fils... Autres temps, autres moeurs... Le professeur Gobry propose à ses lecteurs un Charlemagne chrétien dont toute l'action fut régentée par cet objectif de la christianisation de la société. Il a certainement raison. Et, comme son livre, clair, concis, bien écrit, se lit avec plaisir, on lui emboîtera volontiers le pas.
Démythification
Ce que ne saurait faire Georges Minois, plus récent biographe de l'empereur. Quoique spécialiste d'histoire du catholicisme, Georges Minois n'aime ni l'Église ni ses dogmes et prend soin de différencier « le Jésus historique », un homme dont nous ne savons rien, du « Christ de la foi », inventé par les chrétiens. Sa biographie de Charlemagne s'inscrit dans la même optique : celle de la démythification. D'un personnage légendaire, il faut redescendre à l'homme véritable, démarche en soi louable, s'il ne s'acharnait à en diminuer talents, mérites, vertus jusqu'à ne laisser subsister qu'un assez vilain portrait. Bien entendu, une fois les scories enlevées, les sources criblées, connaissances et certitudes ont fondu comme neige au soleil.
Il faut admettre que nous ne savons pas grand-chose sur Charles et que le peu que nous en savons ne le rend pas sympathique. Or, à l'évidence, c'est bien sur le souverain catholique que l'historien s'acharne. Là où Gobry voit un chrétien fervent, Minois trouve un fourbe, un hypocrite, une brute opportuniste qui cache sous la façade religieuse ses exactions, ses vices, ses cruautés. Charles, soupçonné d'avoir aidé au décès prématuré de son jeune frère Carloman, dépouille la veuve et les orphelins. L'épisode espagnol n'est pas un prototype de la croisade mais une tentative d'annexion outre-monts qui n'interdit pas les meilleures relations avec le calife de Bagdad Haroun al Rachid. L'intervention italienne vise à détruire la puissance lombarde plus qu'à défendre la papauté, etc. Tout n'est évidemment pas faux dans ces affirmations. Encore convient-il de les remettre dans le contexte, de ne pas oublier que l'évangélisation forcée des Saxons, et le massacre des récalcitrants, survenus après quinze ans de guerre féroce, furent aussitôt dénoncés par le conseiller de Charles, Alcuin, qui lui reprocha ces méthodes, et se fit entendre. Non, Charlemagne ne fut pas exemplaire mais il semble ici que le procès est d'abord intenté contre l'empereur catholique, et essentiellement pour cette raison, ce qui rend le livre, somme toute, assez désagréable.
Anne Bernet L’ACTION FRANÇAISE 2000 du 21 octobre au 3 novembre 2010
✓ Éginhard : Vie de Charlemagne ; Les Belles Lettres, 128 p., 23 €.
✓ Ivan Gobry : Charlemagne fondateur de l'Europe ; éditions du Rocher ; 320 p., 19 €.
✓ Georges Minois : Charlemagne ; Perrin, 720 p., 26 €.
culture et histoire - Page 1890
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Charlemagne, symbole européen ?
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Conseil unique d’Alsace. Régionaliser ? Oui mais pas n’importe comment.
En Alsace, le 7 avril, un référendum va porter sur un projet de fusion des deux conseils généraux, du Haut Rhin et du Bas Rhin, avec le conseil régional d’Alsace. Il naitra ainsi, en cas de succés du oui au référendum dans les conditions requises, notamment en termes de pourcentage de votants, un conseil territorial d’Alsace, collectivité unique dotée des attributions auparavant dévolues aux autres. Une collectivité locale à la place de trois. Beaucoup de régionalistes sont pour, et d’antijacobins, ceux-ci employant un terme ambiguë mais consacré car en fait le jacobinisme désigne d’abord un centralisme politique plus qu’administratif, le centralisme à la fois politique et administratif ayant surtout été établi par Napoléon 1er.
Du côté opposé aux régionalistes (y compris ceux, nombreux, liés aux écologistes), les souverainistes et la direction du Front national ont fait connaître leur opposition à ce projet. Leur principal argument est que l’on ne réforme pas la France par morceaux de territoire. Or le regroupement prévu des conseils généraux et régionaux ne se ferait que dans la région Alsace. Marine Le Pen affirme à propos du projet de conseil territorial d’Alsace : « Par principe, je considère qu’on ne touche pas à l’administration d’un pays région par région – sinon, c’est le foutoir intégral ! Si jamais ce projet devait passer, ce serait un précédent dangereux. Ce serait le début du détricotage de la République, ainsi qu’une grande victoire pour l’Union européenne et les technocrates de Bruxelles, qui œuvrent sans cesse à la dissolution des nations.(…) ». Nicolas Dupont-Aignan parle de son côté de « décentralisation féodale », expression aussi utilisée par la présidente du F.N.
L’argument de la réforme qui ne se fait par au coup par coup, à la carte selon les régions est de fait très important. Que dirait-on de l’Allemagne si une partie d’entre elle était fédérale et une autre partie directement rattachée au pouvoir central ? C’était d’ailleurs le cas quand le roi de Prusse était en même temps Empereur d’Allemagne, de 1871 à 1918, et cela créait une situation largement faussée. L’argument des souverainistes est donc totalement recevable, pas seulement de leur point de vue, mais du simple point de vue de tous ceux qui souhaitent que la République française (car une République n’est pas de n’importe où, ou alors elle n’est rien) ait encore un sens (ce qui est mon cas). La question n’est aucunement : jacobinisme ou pas. Il peut y avoir un jacobinisme régional, et pas seulement national, et les deux peuvent avoir autant de défauts. La question n’est pas non plus exactement la déconstruction de la France par les régions, argument souvent avancé par les souverainistes (français, précisons, car il existe aussi un possible souverainisme européen). La question des rapports entre l’Europe de Bruxelles et les régions est en effet plus complexe que certains souverainistes ne l’avancent. En un sens, il n’est pas faux d’affirmer que les régions affaiblissent l’Etat central. C’est la fameuse thèse comme quoi la France se vide par en haut, par l’Europe, et par en bas, par les régions. Mais en un autre sens, on constate que l’Etat central est le meilleur relais de l’application des directives européennes, y compris les plus contestables. En d’autres termes, en France, l’Etat met son « savoir-faire » uniformisateur (ou caporalisant pour être plus polémique) au service de l’Europe de Bruxelles. Il n’est même pas exclu que, parfois, le régionalisme puisse être un point d’appui pour des résistances populaires face aux décrets des eurocrates.
La seule question qui vaille est donc de vouloir faire une réforme dans une région et pas ailleurs. S’il reste un droit français, un droit national, ce n’est pas acceptable. Cette réforme serait-elle d’ailleurs transposable dans son état actuel ? La décentralisation date des lois de 1982-83. Le problème français est qu’elle s’est faite avant tout au profit des départements qui concentrent la plus grande part des impôts locaux par habitant, à part les communes et leurs regroupements. Sur 100 euros d’impôts locaux, 10 vont aux régions, 60 aux communes, et 30 aux départements. Exemple : la région Bourgogne en 2012. Budget régional : environ 800 millions. Total des budgets des 4 départements qui composent la région : presque 2 milliards (Yonne 400 millions, Côte d’or 600, Nièvre 300, Saône et Loire 600. Total 1900 millions). C’est sans doute cette situation qu’il faudrait inverser au profit des régions. Mais faut-il aller jusqu’à supprimer les départements ? Le cas de l’Alsace ne peut-être extrapolé, à supposer d’ailleurs que même pour l’Alsace cette réforme n’amène pas à renforcer le centralisme autour de Strasbourg. L’Alsace n’a que deux départements. Il faut d’ailleurs remarquer qu’elle est amputée du Territoire de Belfort, historiquement alsacien. Dans les autres régions de France, plus étendues, avec plus de deux départements, la suppression de ces derniers supprimerait un échelon de proximité, une référence en termes d’identité et accentuerait l’abandon de certains territoires, à l’écart de tous projets. Reprenons notre exemple de la Bourgogne. A l’ouest de cette région se situe la Nièvre, dont la préfecture Nevers, qui en est aussi la plus grande ville, est aussi excentrée à l’extrême ouest. La Nièvre serait encore plus marginalisée dans le cas d’une suppression des départements. Tout se déciderait à Dijon, capitale de la région Bourgogne. Ce serait encore plus flagrant si les projets européistes de fusion de régions se faisaient. Il est ainsi proposé par certains technocrates de fusionner Franche-Comté et Bourgogne, ce qui excentrerait davantage encore la Nièvre, au rebours de toute politique d’aménagement du territoire, une ambition abandonnée et pourtant plus que jamais nécessaire.
Il faut donc raisonnablement conserver les départements et les élections départementales mais certainement supprimer la compétence générale donnée aux conseils dits « généraux », à renommer conseils départementaux. Cette compétence générale doit être réservée aux régions et aux groupements de communes. On voit que la vraie question du référendum d’Alsace n’est pas de choisir entre centralisme ou décentralisation, ni entre départements et régions, mais entre une cohérence nationale des réformes territoriales ou l’absence de cohérence. De même que la mauvaise Europe ne cesse de chasser la bonne (et de dégouter tout le monde de l’Europe), une mauvaise décentralisation peut chasser la bonne.Pierre Le Vigan http://www.voxnr.com/
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Le rendez-vous des civilisations (Y. Courbage et E. Todd)
Le propos d’Emmanuel Todd et Youssef Courbage est d’examiner l’islam dans son rapport à la modernité, plus particulièrement sous l’angle démographique. Leur conclusion est que le discours aujourd’hui largement véhiculé par les médias institutionnels correspond à une analyse superficielle, simple habillage d’un propos propagandiste : non, l’islam n’est pas réfractaire à la modernité. Et bien loin d’assister à un « choc des civilisations », nous assistons, selon Todd et Courbage, à leur convergence – le « rendez-vous des civilisations ».
A l’appui de leur thèse, Todd et Courbage font valoir que le nombre d’enfants par femme a fortement décru dans le monde musulman en trente ans : de 6,8 en 1975 à 3,7 en 2005. Fait complémentaire à prendre en compte : on observe une grande amplitude dans la situation actuelle des pays musulmans, de 7,6 enfants par femme au Niger à 1,7 en Azerbaïdjan. L’indice de fécondité de pays comme la Tunisie et l’Iran est égal à celui de la France, tandis que la zone sahélienne, qui n’a pas entamé sa transition démographique, reste « scotchée » sur des taux très élevés.
Ce qu’en déduisent en premier lieu Todd et Courbage, c’est qu’il ne faut pas prendre les prêches natalistes des théologiens wahhabites comme référence des attitudes musulmanes : le monde musulman est divers, et cette diversité ne doit pas être masquée par quelques cas extrêmes, souvent mis en avant dans les médias pour décrire « les musulmans », artificiellement amalgamés dans un tout réputé homogène.
L’analyse que propose Todd et Courbage, au rebours de la vision d’amalgame et d’essentialisme promu par le discours dominant, consiste fondamentalement à décortiquer cette diversité du monde musulman comme la traduction d’une période de transition – transition plus ou moins avancée selon les pays. Et jusque dans sa diversité, cette transition, ajoutent-ils, se déroule selon des modalités finalement comparables à celles expérimentées, avec quelques décennies d’avance, par des pays aujourd’hui entrée en stabilisation, voire en implosion démographique. Il y a eu historiquement, soulignent-ils, une grande hétérogénéité en la matière : l’alphabétisation a toujours provoqué, partout, une baisse des naissances – mais pas partout au même rythme. En Europe du Nord, par exemple, l’alphabétisation a été plus rapide que dans l’Europe latine, mais sa traduction en termes de natalité a été plus lente.
L’analyse des évolutions historiques des pays extérieurs au monde musulman indique que le délai de latence entre alphabétisation et révolution démographique peut avoir deux causes : d’une part le retard relatif de l’alphabétisation féminine, d’autre part l’interaction de l’alphabétisation avec d’autres variables – on observe, par exemple, que les populations minoritaires sur leur habitat, ou menacées d’invasion, ont tendance à « se défendre », dans un réflexe collectif, en différant leur transition démographique.
Le monde musulman expérimente aujourd’hui les mêmes mécanismes que le monde occidental et la Russie, il y a dix à quatre décennies. En ce qui concerne le « cœur » du monde musulman (Maghreb et Moyen-Orient), la plupart des grands pays marquent à peu près 40 ans de retard sur le monde russe, 80 ans sur le monde latin et un siècle sur l’Europe du Nord, tant pour la courbe de l’alphabétisation que pour celle de la natalité : c’est ce qu’on observe en Algérie, au Maroc, en Turquie. Des pays musulmans comme l’Iran, la Tunisie sont légèrement en avance sur ce « cœur ». D’autres sont légèrement en retard, comme l’Egypte ou la Syrie. Bien sûr, les évolutions sont complexes, et un pays légèrement en avance sur l’alphabétisation peut être légèrement en retard dans la stabilisation démographique : exactement comme ce fut, 80 ans plus tôt, le cas en Europe. Mais globalement, l’histoire démographique de l’Occident de la fin du XIX° siècle est reproduite par le « cœur » du monde musulman, aujourd’hui. La « conquête musulmane par les ventres » et le « Califat mondial » redouté par certains ne sont, pour ce qui concerne l’essentiel du monde arabe proprement dit, plus d’actualité.
C’est si l’on s’éloigne de ce « cœur » du monde musulman que l’on peut effectivement trouver des « bombes démographiques » encore à désamorcer. On en trouvera une, très médiatisée, dans la péninsule arabique – mais, si la démographie de la zone wahhabite reste explosive, les effectifs concernés sont en réalité assez faibles : « cœur » spirituel du monde musulman, la péninsule arabique est, sur le plan démographique, une périphérie secondaire.
Plus significatif, on trouvera des « bombes démographiques » surtout dans deux zones significatives démographiquement : le Pakistan et l’Afrique subsaharienne musulmane.
Ici, Todd et Courbage sont plus réservés sur la vitesse à laquelle les transitions démographiques vont se produire. Ils supposent qu’elles finiront par advenir, mais ils admettent que la transition, à peine entamée au mieux, sera beaucoup plus difficile que dans le « cœur » du monde musulman – et ils s’interrogent sur l’existence possible, dans ces zones, d’un « plancher » de natalité, aux environs de 4 enfants par femme.
Pourquoi ce retard ? Pourquoi ces incertitudes ?
Ce qui fait ici barrage à la transition n’est pas l’application de la Charia (laquelle, soit dit en passant, n’est appliquée quasiment nulle part en Dar-el-Islam), mais des donnes largement extérieures à l’islam, parfois solidifiées par lui – au Pakistan, une très forte endogamie ; en Afrique Noire, un très fort retard d’alphabétisation.
L’endogamie n’est pas en soi un obstacle à la transition démographique. Très forte historiquement en Tunisie, elle n’a dans ce pays nullement été un frein au recul de la natalité. Mais au Pakistan, expliquent Todd et Courbage, on a affaire à un cas particulier : une forme de « paranoïa démographique » contre le monde indien, au sein de laquelle l’endogamie fonctionne comme un marqueur identitaire. Dans ce monde-là, le modèle familial endogame est vu comme la clef de voûte d’un système très sécurisant pour les individus, assurant une forte armature sociale et une grande stabilité de la coutume. Ici, Todd et Courbage soulignent qu’il existe donc un véritable phénomène de retard dans la transition démographique, mais que ce retard n’a absolument pas les causes que les « islamophobes » de tous poils mettent généralement en avant : en réalité, le Pakistan, du fait de son système d’endogamie coutumière, est dominé majoritairement par un système faussement patriarcal, où l’autorité des oncles est souvent plus réelle que celle des pères (marqueur immanquable des systèmes matriarcaux). Le patriarcat islamique n’est donc pas la véritable cause du retard de transition de ce pays – au contraire, c’est l’existence d’un système finalement peu patriarcal, de type tribolinéaire, qui explique le retard.
L’autre bombe démographique est l’Afrique Noire. Bien sûr, une première spécificité de l’Afrique Noire est la réalité de la polygamie. Fait exceptionnel dans le reste du monde musulman (moins de 5 % des familles sont concernées), elle est une norme alternative au sud du Sahara (taux de polygamie : environ 35 %). Cependant, Todd et Courbage ne pensent pas que ce soit la cause première de la forte natalité africaine ; la cause principale est selon eux à rechercher dans le retard d’alphabétisation. Ils font remarquer, à ce propos, que toute l’Afrique est caractérisée par une forte natalité, indépendamment du poids de la polygamie et de celui de l’islam : l’Afrique centrale non-musulmane présente des indices de fécondité équivalents à ceux de l’Afrique musulmane. Dans les pays où cohabitent musulmans et chrétiens, il n’y a pas de règle générale : au Nigéria, les musulmans sont plus prolifiques, mais au Tchad, les chrétiens font plus d’enfants qu’eux.
Et, concernant l’Afrique Noire, Todd et Courbage de conclure par une sentence ambiguë, qu’il est amusant de reporter ici en toutes lettres : « La forte inertie des mouvements démographiques garantit qu’il surviendra, au cours du XXI° siècle, un déplacement du centre de gravité de l’islam vers le sud. Il n’est pas impossible qu’un jour la problématique fondamentale associée à l’islam ne concerne plus ses rapports avec le nord « chrétien » ou « post-chrétien », mais le basculement de ses équilibres internes. »
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Daube propagandiste et haineuse contre Drumont à la télévision
Ce mardi soir sur France 2, un « docu-fiction » sur Edouard Drumont. Cette propagande est bien sûr payée avec nos impôts.
Drumont est une figure de l’histoire du nationalisme français, et la critique de l’influence juive qu’il mena était à l’époque populaire, largement répandue par delà un clivage « droite-gauche » flou.
De celui qui est aujourd’hui vu avec des lunettes du 21e siècle comme un monstre, Charles Maurras disait :
« la formule nationaliste est ainsi née presque tout entière de lui ; et Daudet, Barrès, nous tous, avons commencé notre ouvrage dans sa lumière. » Plus loin dans son Dictionnaire politique et critique, Maurras ajoutait : « Chroniqueur merveilleux, historien voyant et prophète, cet esprit original et libre s’échappait aussi à lui-même. Il ne vit point tout son succès. »Denis Podalydès, l’acteur qui incarne de façon très partiale Drumont dans cette daube de la chaîne publique, raconte dans un entretien ce qu’il pense du personnage :
« ce personnage est passionnant. Pas tellement par lui-même – c’est vraiment une crevure –, mais par son époque, le succès invraisemblable de ses écrits infâmes, l’antisémitisme français dans toute sa puissance. [...] Tous les acteurs habitués à incarner des êtres sympathiques ne rêvent que d’une chose : jouer des ordures.[...] Finalement, elle [sa barbe] m’a aidé à trouver la virulence du personnage, son acrimonie, son regard torve. [...] C’est un homme de lettres, mais profondément raté et profondément petit. Il avait une expression toujours faussement grandiose, un vocabulaire excessif, une rhétorique ampoulée pour dire les choses les plus basses. Il s’enivrait de ça. C’était un poète raté [...] Comme il a échoué, il s’est reconverti dans la calomnie et l’antisémitisme.
Il y a des gens comme ça, qui ratent dans le chemin du bien et réussissent dans le chemin du mal. [...] Ce qui est hallucinant – et c’est là que le film pose les bonnes questions –, c’est que ce personnage, antipathique, médiocre, sûrement d’une intelligence très moyenne, ait pu remporter un tel succès avec le livre La France juive, une espèce de ramassis que j’ai essayé de lire, mais qui est illisible. Ce n’est qu’un répertoire de calomnies, de sinistres anecdotes et d’invectives. C’est fascinant que ce livre ait pu être vendu à 500 000 exemplaires [pas mal pour un raté - NDCI] et loué par les frères Goncourt par exemple, qui lui disent, à l’époque : « Vous dites tout haut ce que beaucoup de gens pensent tout bas. » [...] Il fait partie de ces petites boursouflures que le monde médiatique peut créer, et d’ailleurs après « J’accuse », il disparaît, il est fini. Zola l’a tué ! C’était presque un homme d’affaires, sauf que les affaires qu’il brassait étaient des affaires veules, minables. Il ne faut pas hésiter à l’enfoncer, ce personnage.
Vous ne lui trouvez aucune circonstance atténuante…
Non, il n’en a vraiment aucune. On pourrait peut-être en trouver sur le terrain de la psychanalyse, parce qu’il est frappé par la folie de son père. [...] »Lien permanent Catégories : actualité, culture et histoire, lobby, magouille et compagnie 0 commentaire -
Méridien Zéro - Abécédaire pour une jeunesse déracinée...
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Journal de bord de Jean-Marie Le Pen n°311
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Tea Party : L’Amérique à la reconquête de ses libertés
RENNES (NOVOpress Breizh) – À lire la presse française de ces dernières années, on s’étonne que Barack Obama n’ait pas été réélu avec 99 % des voix tant le président américain cumule les vertus et ses adversaires les défauts. À lire le livre Tea Party : L’Amérique à la reconquête de ses libertés, on comprend surtout que les commentaires usuels relèvent soit de la désinformation, soit de la nullité crasse. D’origines vendéennes et bretonnes, Évelyne Joslain connaît à fond les arcanes des idées politiques américaines et les expose ici avec passion.
Loin de la caricature présentée de ce côté-ci de l’Atlantique – front bas, intégrisme biblique et winchester en pogne – on découvre que le Tea Party est une « nébuleuse » où coexistent féministes conservatrices dégoûtées d’une « gent masculine à l’évidence dépassée par la situation », mâles blancs exaspérés par la discrimination à l’envers, et patriotes identitaires désireux de retrouver les valeurs fondatrices des États-Unis. De nombreuses idées infusent dans la théière du Tea Party : sur le plan intellectuel, le mouvement n’a rien à envier au clan « progressiste ».
Obama occupe une grande place dans ce livre, mais pas l’Obama sanctifié qu’on connaît en France. Évelyne Joslain s’étonne de « l’écart entre le mythe Obama et l’inquiétante personnalité de cet étrange président », élevé à Hawaï par des grands-parents maternels blancs et de gauche. Elle dénonce ses « mauvaises fréquentations » comme Jon Corzine, ancien trader de Goldman Sachs devenu gouverneur démocrate du New Jersey avant de diriger MF Global qui sera l’une des dix plus grosses faillites de l’histoire américaine suite à des spéculations financières malheureuses. Elle a des mots très durs sur le dilettantisme géopolitique d’Obama, son indulgence envers l’islamisme, sa gestion invraisemblable de la guerre d’Afghanistan (où la « guerre contre la terreur » s’accommode d’assassinats « ciblés » en territoire pakistanais) et son immigrationnisme qui, au-delà du simple calcul électoral, pourrait dénoter une haine viscérale de l’Amérique blanche. Impitoyable, elle conclut : « C’est bien aux névroses d’Obama que l’Amérique doit d’avoir vu en trois ans s’exacerber les tensions raciales et se créer des clivages sociaux tandis que s’aggravaient rapidement la politisation et la racialisation de toutes les questions, sans oublier le chaos géopolitique au Moyen-Orient ».
Si les dérives européennes (alliance entre universalisme et financiarisation, entre business et immigration, etc.) ressemblent fort à celles de l’Amérique, la France n’a rien produit d’analogue au Tea Party à ce jour. Ce livre très documenté est donc une exploration utile d’un puissant courant émergent encore très mal connu.
François Kernan http://fr.novopress.info
*** Évelyne Joslain, Tea Party : L’Amérique à la reconquête de ses libertés, éditions Jean Picollec, 298 p., 21 €.
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Un nouveau livre choc d’Anne Kling
On peut dire qu’Anne Kling frappe fort avec son cinquième et nouveau livre : Menteurs et affabulateurs de la Shoah.
Vaste sujet !
Le livre vient de sortir et personne chez Contre-info ne l’a encore lu : nous vous signalons simplement sa parution, et sa disponibilité ici.
256 p. 18 €.Anne Kling est l’auteur de divers livres à succès, dont le CRIF, un lobby au coeur de la République et Les révolutionnaires juifs, qui viennent d’être réédités pour l’occasion. Tous ses livres peuvent se trouver ici.