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culture et histoire - Page 1918

  • Nations et nationalismes (E. Hobsbawm)

    « Nations et nationalisme » est un recueil de conférences prononcées par l’historien Eric Hobsbawm en 1985.
    Pour Hobsbawm, la nation est un mystère. Tant qu’on ne nous demande pas ce que c’est, nous le savons. Dès qu’on nous le demande, ça devient beaucoup moins évident. Aucune définition de « la nation » n’est valable pour toutes les nations et à toutes les époques – et certaines nations n’ont même pas de définition spécifique à un instant « T » : elles existent, mais personne n’arrive à dire ce qu’elles sont. En fait, le seul moyen de vérifier qu’une nation existe, c’est de s’assurer qu’il existe des gens, assez nombreux, qui estiment lui appartenir.
    Le nationalisme paraît plus clair à Eric Hobsbawm. C’est une doctrine qui exige, en substance, que l’unité politique et l’unité nationale se recouvrent. En ce sens, la nation est, à ses yeux, indissociable au fond de l’Etat-nation (soit comme réalité, soit comme revendication). De fait, une nation se reconnaît au fait que des gens estiment lui appartenir et veulent défendre (ou instituer) un Etat qui la recouvre. Donc, pour dire les choses simplement, aux yeux d’Eric Hobsbawm, le nationalisme crée la nation – et non l’inverse. Et donc, puisque le nationalisme est un produit de la modernité, la nation (au sens où nous l’entendons aujourd’hui) est une notion moderne.
    Cette définition de la nation s’est constituée progressivement, par un glissement sémantique étalé sur plusieurs siècles. La nation est, au départ, formée par les gens issue de la même lignée. C’est une manière de classer les gens racialement – par un ancêtre commun, ou un groupe d’ancêtres communs. Le concept est moins éloigné qu’on pourrait le croire de celui de patrie : pendant longtemps, être né à un endroit impliquait presque systématiquement qu’on descendait de gens eux-mêmes nés à cet endroit. Au début du XVIII° siècle encore, la nation désigne, dans la plupart des pays européens, une « petite patrie » dont on est issu par le lieu de naissance et, généralement, par le sang.
    Au cours du XVIII° et surtout du XIX° siècle, progressivement, la nation émerge dans un sens nouveau : elle est une collectivité unifiée par l’Etat. Ce sens nouveau relègue  l’ancien signifié « nation » au signifiant « province ». Il y a déplacement du contenu des mots : le terme « nation » est en quelque sorte capturé par l’Etat, ce qui impose que, pour décrire l’ancien concept, on déplace insensiblement le périmètre d’un autre concept, « province », afin de lui donner un sens légèrement modifié. Amorcé sous la Révolution Française (très ambiguë sur la question nationale), ce jeu de translations conceptuelles est généralisé à l’Europe par les révolutions de 1830. La nation devient l’ensemble des membres d’une même nationalité, qui sont supposés désirer être dirigés par une partie d’eux-mêmes (Stuart Mill). Une assimilation non dite se constitue entre Etat, nation, peuple, et Peuple Souverain.
    Dans une très large mesure, comme le montre Hobsbawm, il s’agit là d’une ruse conceptuelle : on permet, en créant un champ sémantique peu ou mal balisé, l’enclenchement d’un processus flou, un peu comme une mécanique dont les pièces s’ajustent les unes aux autres grâce au jeu excessif qu’on a toléré initialement, et qu’on réduit ensuite peu à peu. En France, par exemple, la « nation » des révolutionnaires est d’abord un concept purement politique (le Peuple Souverain, incarné dans l’Assemblée Législative), qui se teinte très vite d’une forme d’ethnicisme non racial, car fondamentalement linguistique (est français qui parle français et reconnaît le pouvoir de la Convention). Il y a donc une assimilation implicite entre nationalité (linguistique) et souveraineté populaire, assimilation dont le propos réel est de cautionner l’Etat, figure centrale du triptyque.
    Le XIX° siècle est consacré en Europe à la généralisation de cette formule de pensée (en Allemagne, de 1813 à 1871 ; en Italie, de 1848 à 1865 ; en Autriche-Hongrie, en 1867, en Pologne, à partir de 1830). Cette généralisation recouvre toujours à peu près, au fond, les mêmes mécanismes profonds : le principe national s’impose parce qu’il permet à la bourgeoisie (alors nationale) de stabiliser le mouvement révolutionnaire (la nation détruit ou transforme le royaume, donc l’aristocratie, tout en interdisant la prolongation du mouvement jusqu’à la révolution prolétarienne). Sous cet angle, la nation du « nationalisme bourgeois » est un leurre (en lisant Hobsbawm, ici, on pense inévitablement au chef d’œuvre de Visconti, « Le guépard »).
    Concrètement, au XIX° siècle, apparaît ainsi peu à peu, par un mélange de flou savamment entretenu dans le champ politique et de précision solide sur les catégories de l’économie, une certaine idée de la nation : un territoire d’une taille et d’une population suffisante pour constituer un marché adapté aux besoins du capitalisme de l’époque, doté d’une élite appuyée sur une tradition sérieuse (idéologie bourgeoise XIX° siècle du mérite), capable de se défendre militairement (voire de pratiquer l’impérialisme), et pourvue d’une homogénéité facilitant l’unification (langue en général). La « nation » au sens contemporain était née, issue du nationalisme bourgeois. Elle était, fondamentalement, pensée comme une étape vers l’unification mondiale sous la domination incontestée de la classe maîtresse du capital : la bourgeoisie.
    Fondamentalement, donc, pour Hobsbawm, le nationalisme est une création bourgeoise. Mais, ajoute-t-il, cette création a été récupérée, détournée, assimilée en partie par les peuples.
    Le leurre bourgeois valait aussi concession à la réalité vécue par les peuples. Il a correspondu aux intérêts des bourgeoisies nationales, mais limitait potentiellement les capacités du Marché à structurer, à travers  le capitalisme international, l’embryon d’une globalisation. Sous l’angle de l’analyse marxiste, la nation est donc le lieu d’une dialectique : leurre manipulé par les bourgeoisies nationales, elle est aussi un frein à l’émergence de la bourgeoisie transnationale. Grâce au nationalisme, la bourgeoisie nationale fabrique l’Etat dont elle a besoin ; mais comme cet Etat repose sur la notion de Peuple Souverain, il définit une volonté potentiellement rivale de celle constituée par l’alliance transnationale des bourgeoisies : unificatrice des marchés nationaux, l’idée nationale est potentiellement un frein au libre-échange promu par l’Empire Britannique. Du point de vue des économistes libéraux du XIX° siècle, la nation est un pis-aller en attendant l’économie mondiale intégrée – mais du point de vue des peuples, c’est aussi, potentiellement, un lieu de souveraineté. Cette communauté imaginée par la bourgeoisie peut donc, progressivement, être réinvestie par la vie réelle des peuples.
    Comment ce réinvestissement se produit-il ? Comment la bourgeoisie gère-t-elle cette situation complexe, au fil de son histoire, jusqu’au milieu du XX° siècle ?
    Pendant longtemps, le « nationalisme » a été pour les peuples, pour les nations (au sens ancien du terme), une idéologie impensable. Il repose sur la dimension quasi-mythique d’une langue unitaire qui, bien souvent, est le résultat d’une homogénéisation imposée. On a ainsi calculé qu’en 1860, seulement un Italien sur quarante utilisait l’Italien « pur », aujourd’hui celui qu’on écrit, comme langue d’usage quotidien. En 1789, un Français sur deux ne parlait pas le Français d’Île de France, et seulement un sur huit le parlait correctement.
    En outre, le nationalisme suppose un niveau d’abstraction tout à fait incompatible avec  le vécu de populations fondamentalement paysannes. Hobsbawm s’attarde ici longuement sur les étymologies et documents historiques. Son observation la plus frappante : encore aujourd’hui, être russe, c’est être « russki », de « Rus », la patrie issue de la tradition médiévale « de toutes les Russies » (au pluriel) – le terme pour « la » Russie, « Rossyia », est un néologisme créé par les Tsars moscovites. Ainsi, pour un Russe, encore aujourd’hui, son pays est « Rossya » (« la » Russie) parce qu’étant « russki », il se rattache à sa « Rus » (« une » Russie, orthodoxe avant tout).
    Pour les peuples, ce qui est réel, ce n’est donc pas la nation du nationalisme : ce sont des petites nations (provinces), reliées par l’appartenance à un même « monde mental » (la religion). C’est pourquoi, remarque Hobsbawm au passage, la « Sainte Russie » ne définit pas une « nation » au sens que ce terme a pris en Occident (elle n’est définie ni par la langue, ni par le Peuple Souverain, mais par l’inscription des terroirs dans un monde mental partagé). On en trouve une version fort différente, mais finalement tout aussi éloignée de la conception contemporaine de la « nation », dans le cas très particulier de la Suisse : unie ni par la langue, ni par l’ethnie, la Suisse l’est par un contrat reliant des cantons, le niveau d’homogénéisation restant très local. Dans les deux cas, l’architecture générale renvoie à une conception de la communauté charnelle très restreinte, encadrée par un « monde mental », ou par un « monde contractuel » supérieur, mais qui ne prétend pas traduire une réalité charnelle quotidienne.
    Cette ancienne conception des très grands ensembles fédérateurs (assez proche au fond de celle du Royaume de France), antérieure au nationalisme, a été en Occident balayée avec la chute des monarchies de droit divin (en France, en 1789). Le nationalisme, idéologie bourgeoise (cf. ci-dessus) a permis de recycler une partie de cette mystique dans un cadre favorable à la domination bourgeoise. Mais ce recyclage implique qu’à l’intérieur de l’idéologie bourgeoise, des éléments fondamentalement extérieurs au monde bourgeois ont été importés.
    D’où une situation fondamentalement chaotique, religion, communautarisme local et autres vecteurs d’identification collective venant constamment interagir avec la conception héritée du nationalisme bourgeois, pour la nourrir et, en même temps, la parasiter. Concrètement, la nation est certes  aujourd’hui structurée par la conscience partagée d’avoir appartenu à une entité politique durable ; mais cette conscience elle-même est éclatée entre divers niveaux, qui coexistent anarchiquement. En pratique, donc, l’organisation du monde bourgeois par l’échelon national est structurellement instable.
    Cette instabilité implique que le contenu de l’idée nationale est constamment renégociable. Donc, il est susceptible, suivant les moments de l’Histoire, d’être investi soit par les bourgeoisies, soit par leurs adversaires. Le nationalisme, en ce sens, n’est pas un acteur de l’Histoire, mais un enjeu, un lieu où s’affrontent les véritables acteurs. Hobsbawm, ici, souligne que la « Nation » révolutionnaire de 1790-1793, en France, a constitué un cas d’école : à la fois inscription de tous les Français dans le cadre conceptuel produit par la bourgeoisie nationale, elle a, aussi, impliqué que ce cadre était théoriquement co-construit par tous les citoyens. En réalité, derrière la définition de la nation, se cache donc le combat pour la définition de sa définition. Le combat visible oppose les centralistes aux partisans de l’ancienne conception. Mais sous ce combat, un autre combat oppose, au sein des centralistes, ceux qui veulent la nation comme outil de la domination bourgeoise et ceux qui la veulent comme instrument d’encadrement et de dépassement de cette même domination.
    Combat gagné par la bourgeoisie (Thermidor). Pour Hobsbawm, la démocratie bourgeoise a été au XIX° siècle et au début du XX°, fondamentalement, le cadre construit par la bourgeoisie pour rester maîtresse du nationalisme. Il s’agissait d’ouvrir au débat un espace clos, afin de le laisser s’épancher tout en le gardant sous contrôle. Ainsi, le patriotisme, potentiellement une force révolutionnaire, devint l’instrument d’une conception réactionnaire de la nation en devenir – d’où le chauvinisme, idéologie qui devait aider au déclenchement de la Première Guerre Mondiale, et son expression extrême, le racisme d’Etat.
    En conclusion et pour résumer : aux yeux d’Hobsbawm, le patriotisme n’est pas, en soi, une idéologie bourgeoise. C’est une idéologie captée par la bourgeoisie – à travers les nationalismes d’Etat. Le caractère réactionnaire de l’idée de nation ne tient pas à la substance de cette idée (en elle-même assez évanescente), mais à la capacité que développa la bourgeoisie d’instrumentaliser le concept, et d’en maîtriser habilement l’investissement émotionnel collectif. D’où, exemple paroxystique souligné par Hobsbawm, la coexistence, dans les nationalismes des années 30, de fascisme, d’antifascisme, de droite et de gauche – comme si, à tout moment, dès qu’une tendance politique desserre son étreinte sur le manche du drapeau, la tendance opposée voulait s’en saisir.
    Et maintenant ?
    Hobsbawm commence, pour analyser la situation présente, par démolir méthodiquement le discours sur le déclin des nationalismes. En réalité, fait-il observer, avec l’explosion de la Yougoslavie et de l’URSS, le nombre d’entités souveraines se réclament plus ou moins ouvertement du principe des nationalités n’a cessé d’augmenter. Inversement, le monde musulman semble travaillé par une remise en cause des nationalismes arabes. Le mouvement n’est donc nullement homogène, et le principe des nationalités, fort ici, est affaibli là. Il n’y a ni déclin, ni expansion du nationalisme : il y a mutation.
    C’est que le nationalisme est devenu, pour l’essentiel, une expression de défense face à la globalisation – alors qu’il avait été, par le passé, une offensive contre les structures locales. C’est donc toujours une force agie, mais au lieu de l’être par des bourgeoisies nationales qui veulent un marché national, elle l’est tantôt par une bourgeoisie transnationale qui veut détruire les Etats-nations (désormais dépassés) en soutenant des micro-nationalismes, tantôt par des opposants à la bourgeoisie transnationales, qui veulent eux préserver ces Etats, contre un gouvernement mondial latent.
    L’ambiguïté du nationalisme, agi plus qu’acteur, s’est maintenue, mais elle le positionne sur un nouveau front, selon de nouveaux clivages. C’est pourquoi le nationalisme est de plus en plus difficile à penser comme il le fut jadis : la brique de base de l’internationalisme. Ce n’est plus une étape vers l’unification, c’est un frein à l’étape ultérieure. Investi par des revendications identitaires traduisant souvent une véritable panique face à un monde devenu totalement indéchiffrable, le nationalisme est devenu une idéologie défensive : telle est la thèse d’Eric Hobsbawm.
    De toute évidence, c’est la thèse d’un adversaire des nationalismes – Hobsbawm voit en eux une fausse idée, simple leurre des véritables forces agissantes.
    Mais c’est aussi, pour les nationalistes, la thèse d’un adversaire intelligent, qu’il faut lire et comprendre.
    http://www.scriptoblog.com/

  • Crâne alibi

    Il n'est pas de site royaliste sauf un - vous y êtes - qui n'ait fait ses choux gras de la tête momifiée d'Henri IV. On (oui c'est anonyme, laisse comprendre Royauté-News) vient de créer ex-nihilo un Conseil pour les Funérailles du Chef d'Henri IV. Osons croire que la messe mortuaire sera célébrée à Notre-Dame de Paris où le roi mort passa une première fois et que les cours européennes délégueront ! Jusqu'à présent l'authentification de la pièce par comparaison des ADN aux frais de l'aîné des Capétiens n'a abouti qu'à la remettre au coffre dans une chambre forte dont je tairai le nom. J'ai lu incidemment que Mgr Henri était fort rigolard de cette affaire qui n'a servi qu'à faire mousser son contempteur à nul autre effet que d'avoir une demi-colonne dans le journal, lui même ayant obtenu la sienne en réplique. Plutôt que ce duel archi-rejoué - scène 3 Utrecht 153ème Clac ! - on aurait attendu de nos messeigneurs qu'ils enfonçassent la porte de notre insondable Connerie, sans tourner clef ni poignée, mais d'un grand coup de latte à la Monluc. Car il y a urgence.
    Je ne sais si les chiffres vous lassent comme le prétendent les fabricants d'opinion qui nous prennent pour des cafres, mais ils se gâtent en continu, et augurent de lendemains qui chantent en grec. D'ailleurs François Normal est allé à Athènes pour s'en faire une idée et au passage, s'essayer à l'insulte tragique, un registre peu travaillé en diplomatie, puisqu'il va proposer à l'Etat noyé jusqu'aux yeux dans la Dette et dont le peuple bouffe des rats, la vente en leasing de deux frégates de génération FREMM. C'est vrai qu'il a fait HEC.

    une Fremm à 640M€/pièce, lisse

    La cambrure avantageuse du chef français était au comble du ridicule à vouloir faire le grand frère attentionné si l'on sait que toute l'affaire est entre les mains de la chancellerie de Berlin et que les chiffres du premier émetteur de dette de l'Eurogroup (nous) sont catastrophiques : déficits publics tous accrus, dette souveraine et sociale en gonflement régulier, récession économique établie, déficit commercial honteux. L'Italie dont nous nous moquons avec condescendance finit 2012 avec un excédent commercial de 11 milliards d'euros !
    Qu'en disent nos princes ? Que dalles ! Gueux ! Mgr Henri, qui devrait choisir un autre sujet, a reçu Le Figaro dans ses appartements parisiens pour manifester son effroi de l'apocalypse qu'ouvre le mariage gay ; son fils, Vendôme, a bravé la froidure de la Porte Maillot pour participer à la Manif pour Tous contre cette avancée sociétale ; le cousin d'Amérique a signé une belle lettre confirmant son émoi, même si l'Espagne a depuis longtemps franchi la ligne rouge. Merci à tous déjà, mais on est loin du compte. Il ne faut pas retourner à son bénéfice le leurre qu'utilise le pouvoir à masquer son impéritie, pour éviter de se compromettre sur les grands sujets décisifs toujours prégnants derrière ce fumigène socialiste. Il faut parler régime politique, calibre de l'Etat, modèle économique, modèle social, place du pays dans l'Europe institutionnelle, rang diplomatique assumé, etc... sans se priver peut-être d'élaborer un vrai Projet pour la France, ou ce qu'il en restera !

    Alors gentils princes messeigneurs, veuillez remettre le crâne du Vert Galant au conservateur du Château de Pau, et ouvrir en vos différents instituts des séances de travail sur les questions qui saignent, ressortissant au domaine régalien, dit en passant, et nous épargner "ma vie, mon oeuvre", le segment historique étant jusqu'ici peu rempli. M'est avis que si Henri de Navarre retournait parmi nous, il botterait le cul de la grande fratrie bourbonnienne en leur demandant qu'est-ce qu'ils glandent foutrrrebleu ! Et si nous étions sérieux, ensemble ?

    Le Roi au siège de Paris

    http://royalartillerie.blogspot.fr/

  • Et si nous parlions de l’esclavage ? par Manuel Gomez

    Du 16 février au 3 mars 2013 on offre aux Français une « semaine anticoloniale » dont tous les aspects sont consacrés bien évidemment aux luttes anticoloniales. Cette manifestation est soutenue par le CRAN (Conseil représentatif des associations noires). Ces associations n’ont pour seul objectif que de semer un sentiment de haine contre le pays qui les a accueillis, qui les nourrit dans son sein et qui les a fait ce qu’ils sont devenus.¢
    La traite négrière fut, et est toujours, un commerce mais il n’est pas le fruit des seuls nations occidentales, bien au contraire, et encore moins de la France. Les nations européennes, et la France en particulier, en occupant la Maghreb ont été les premières à mettre fin à l’esclavage qui s’y pratiquait.
    Il s’y pratique d’ailleurs toujours de nos jours dans plusieurs pays : Soudan, Congo, Yemen, Oman, Mauritanie, etc. sans que cela ne paraisse inquiéter toutes ces associations dont le seul but apparemment est d’incriminer la France.
    Et pour cela, elles se réfèrent à la loi Taubira (2001) qui définit l’esclavage pratiqué du 15ème au 19ème siècle comme crime contre l’humanité et exige que l’honneur de leurs descendants soit défendu.
      Or cette loi est erronée dans sa conception puisque la qualification de « génocide » ne peut s’appliquer à la traite négrière. Elle n’avait pas pour but d’exterminer un peuple, bien au contraire comme on peut le constater aujourd’hui.
      Cette loi est faussée dans son objectif puisqu’elle exclue la traite pratiquée par les arabes et les noirs bien plus importante que celle organisée par les blancs.
    L’Afrique n’a pas été seulement une victime de la traite, elle en a été surtout l’un des principaux acteurs.
      Cette loi est anticonstitutionnelle car la constitution ne permet pas aux parlementaires de condamner des faits du passé en les qualifiant de crime contre l’humanité ou de génocide. Seule l’autorité judiciaire, dans son indépendance garantie selon l’article 64 de la constitution, a le pouvoir de le faire.
    Pourtant personne n’a osé demander l’abrogation de la loi Taubira !
    On peut reprocher à Mme Taubira son manque de lucidité concernant l’apport bénéfique de la colonisation et sa mémoire très sélective (car si son territoire n’avait pas été colonisé par la France, et si elle n’avait pas reçu les bienfaits de la civilisation française, elle n’occuperait certainement pas le poste ministériel qui est le sien aujourd’hui).
    D’une part parce qu’elle confond colonisation et esclavagisme et d’autre part parce qu’elle occulte totalement une très grande partie de l’esclavage qui s’est poursuivi  dans les territoires du Maghreb et sub-sahariens bien au-delà de l’abolition de l’esclavage organisé uniquement  par les «blancs».
    L’on apprend également qu’une française d’origine guadeloupéenne, descendante d’esclaves, assigne l’État français pour crime contre l’humanité.
      Cette descendante d’esclaves tout comme Mme Taubira, devraient réaliser que si l’esclavage avait été un génocide, comme elles le prétendent, elles ne seraient pas parmi nous pour exiger une quelconque reconnaissance.
      Il est nécessaire de rappeler à Christiane Taubira que s'il n'y avait pas eu d'esclaves noirs en Amérique du Nord Barak Obama n'aurait jamais été élu Président des États-Unis grâce à leur vote. C'est une constatation.
    Jusqu'à la moitié du 19è siècle des négriers noirs et arabes ont razzié les villes et villages de l'intérieur puis acheminé afin de les faire transporter, par des blancs, vers l'Amérique des dizaines de milliers d'esclaves en provenance d'Afrique noire et cela dans des conditions quelquefois abominables.
    Mais bien plus nombreux ont été ceux qui ont connu une existence plus confortable (nourriture-logement-sanitaire, etc.) dans les exploitations cotonnières du Sud que celle qui aurait été la leur s'ils étaient restés dans l'Afrique précoloniale.
    J'en veux pour preuve que la population noire actuelle aux États-Unis est toute issue de l'esclavage. La raison est évidente : l'esclave coûtait cher et il était de l'intérêt non pas humanitaire mais financier de le conserver en bonne santé physique afin qu'il soit plus productif et donc plus rentable.
    Je cite l’historien Olivier Pétré-Grenouilleau, spécialiste des traites négrières, qui écrivait en 2005 : « Les traites négrières ne sont pas des génocides. La traite n’avait pas pour but d’exterminer un peuple. L’esclave était un bien qui avait une valeur marchande qu’on voulait faire travailler le plus possible. »
    Il est donc incontestable qu’on ne peut pas accuser de génocide la traite des « noirs » vers les Amériques, contrairement à la traite des « blancs » dans les pays du Maghreb vers les « pays islamiques », car là il s’agit bien d’un génocide puisqu’il ne reste pas un seul descendant de ces esclaves, plus d’un million, susceptible de réclamer une repentance quelconque.

      Je citerai ensuite et pour conclure ce passage d’Albert Camus : « Il est bon qu’une nation soit assez forte de tradition et d’honneur pour trouver le courage de dénoncer ses propres erreurs. Mais elle ne doit pas oublier les raisons qu’elle peut avoir de s’estimer elle-même. Il est dangereux en tout cas de lui demander de s’avouer seule coupable et de la vouer à une pénitence perpétuelle. »

    http://www.francepresseinfos.com/

  • Les professeurs d’histoire-géographie au lycée ou comment on embrigade la jeunesse

    L’enseignement de l’Histoire en France n’est pas un long fleuve tranquille. Il a toujours donné lieu à des polémiques tant sur les contenus que sur les méthodes : histoire événementielle contre histoire sociale, adeptes du respect de la chronologie contre les tenants des analyses sur la longue durée sans repères temporels…

    Néanmoins, conformément à ce qu’affirmait Napoléon : «Qu’est ce que l’histoire si ce n’est une fable sur laquelle tout le monde s’entend ?», la République avait réussi à imposer un formatage des esprits qui, même s’il avait la fâcheuse tendance à négliger tout ce qui avait précédé 1789, avait tout de même contribué à forger une Histoire-Mémoire collective. C’est pourquoi de nombreux enseignants d’Histoire, pas dupes, s’en étaient accommodés. Une certaine unité du peuple français (sans forcément tomber dans les excès du nivellement jacobin) pouvait justifier certaines libertés prises avec la véracité des faits historiques.

    Les effets du totalitarisme mondialist

    Aujourd’hui, le totalitarisme mondialiste qui tend à détruire à marche forcée les identités culturelles et sexuelles des peuples afin de mieux écouler ses gadgets dans un monde meilleur, peuplé de pacifiques citoyens-consommateurs interchangeables se propose de «déconstruire le roman national français». Les grands maîtres du pédagogisme s’en sont donné a cœur joie dans l’élaboration de nouveaux programmes d’Histoire-Géographie taillés sur mesure.

    Les procédés utilisés : intellectualisme déconnecté des centres de préoccupation des élèves, dénigrement systématique de notre culture et de notre civilisation, introduction de chapitres consacrés à d’autres civilisations, révisionnisme. Tout un corpus de chapitres de plus en plus indigestes qui auront été oubliés sitôt appris. Mais, au fond, n’est ce pas l’effet escompté ?

    L’intellectualisme débridé de nos bobocrates parisiens qui imposent à nos élèves de terminale, parfaitement inintéressés et indifférents, souvent ignares, une analyse du rapport des sociétés à leur passé à travers l’étude d’une ville : Jérusalem, Rome ou Paris. Ainsi le candidat au baccalauréat se devra de retenir les dates des lois relatives à la conservation du patrimoine alors qu’il ne sait plus identifier les grandes dates permettant de borner les périodes de l’Histoire (Antiquité, Moyen-Age, Temps Modernes, époque contemporaine).

    On paye les quarante années d’errance pédagogique qui ont privilégié l’éveil et les méthodes dites «actives» aux dépens de la transmission des savoirs et de la mémorisation. Les élèves, déjà complètement déstructurés par des situations familiales de plus en plus compliquées et une overdose télévisuelle sont  confrontés en cours à un zapping thématique dissocié de la chronologie. Une fois de plus l’école choisit d’accompagner la déliquescence de la société plutôt que de se poser en digue protectrice.

    Les maîtres mots des programmes sont la mondialisation et la gouvernance mondiale

    Les maîtres mots des programmes sont la mondialisation et la gouvernance mondiale qui devra en être l’aboutissement ultime.

    Ainsi, on ne recule devant aucune falsification des faits historiques  ni aucune manipulation des esprits pour former les «jeunes citoyens du monde», futurs consommateurs décérébrés et interchangeables.

    La première étape grossière de cet embrigadement consiste à dénigrer systématiquement tout ce qui pourrait  évoquer notre  identité française et européenne au nom du multiculturalisme et de l’ouverture au monde.

    On a beaucoup glosé sur l’éviction de Clovis, Charles Martel, Saint Louis ou Louis XIV des programmes de collège «pour ne pas braquer les populations d’origine étrangère ou heurter les enfants musulmans», mais au lycée le travail de sape se révèle plus subtil.

    Si la part des Européens dans l’histoire du peuplement du monde est abordée en classe de seconde, c’est pour en arriver à l’amalgame douteux entre les émigrés européens du XIXe siècle (Irlandais ou Italiens) avec l’immigration extra-européenne actuelle. D’autre part, ce chapitre introductif interdit à l’enseignant de réaliser des projections et de montrer à ses élèves que les Européens sont une espèce en voie d’extinction –  grand ethnocide par remplacement et métissage souhaité par toutes nos «élites»

    Ceci est confirmé lors du chapitre qui suit, consacré à la citoyenneté dans l’antiquité gréco-romaine où l’enseignant s’appliquera à démontrer la supériorité de  la conception juridique de la citoyenneté romaine qui ne souffrait aucune barrière ethnique – même si cette citoyenneté était devenue une coquille vide (comme aujourd’hui) – sur la conception politique athénienne «qui n’avait de commun avec notre démocratie que le nom». Les Athéniens qui associaient citoyenneté et nationalité régie par le droit du sang, ne partageaient pas l’exercice du pouvoir avec les femmes, les métèques et les esclaves! Imaginez Vichy en pleine Grèce classique !

    Cependant l’enseignant ne doit en aucune manière rappeler comment l’Empire romain s’est effondré, et pour cause !

    Le chapitre des Grandes découvertes

    Arrive le chapitre sur les Grandes découvertes de la Renaissance : Les Européens (par leur génie) s’ouvrent de nouveaux horizons. Ils entrent en relation avec l’Empire ottoman dont on doit expliquer qu’il n’a été qu’un prolongement  de l’Empire byzantin. Quant à la pratique du pouvoir de la dynastie Ming en Chine, elle expliquerait le massacre de la place Tien Anmen de 1989.

    Il s’agit de préparer nos élèves à l’entrée programmée de l’entrée de la Turquie dans l’UE et à être payés comme des Chinois. Notre bonne République ne recule devant aucun révisionnisme quant il s’agit de distiller les  hypocrisies et les cynismes du mondialisme. Comme disait le Docteur en propagande M Goebbels : « un grand mensonge passe mieux qu’un petit ».

    Quant au chapitre intitulé Libertés et Nations en France et en Europe vers 1850, il arrive en fin d’année scolaire. De ce fait il est condamné à être bâclé mais l’enseignant doit se débrouiller pour finir son programme en apothéose avec l’abolition de l’esclavage de 1848.

    La géographie

    Vous pourrez penser que la géographie qui est une discipline plus descriptive, presque scientifique échappe à un tel conditionnement des esprits et au viol des consciences. Pas du tout.

    Un exemple : le chapitre introductif au programme de terminale intitulé Des cartes pour expliquer le Monde. Il s’agit d’y développer l’esprit critique des élèves, on ne peut que s’en féliciter. Mais une fois de plus, la critique ne doit pas sortir des clous idéologiques. Ainsi ils doivent apprendre à se détacher de la carte du monde qu’ils ont l’habitude de voir depuis leur tendre enfance sous prétexte que celle-ci est centrée sur l’Europe et que l’Europe n’est plus le centre du monde. Même les noms des continents deviennent sujets à caution dans la mesure où ils ont été nommés par des Européens. Il faudrait vraiment que les Africains se prennent un peu en charge et rebaptisent leur continent d’un nom bien à eux!

    L’enseignement d’Histoire-Géographie n’a pas son pareil en France pour fourguer tout ce qui ne fonctionne pas, c’est la grande foire aux invendus. Il y a quelques années c’était la citoyenneté, aujourd’hui, c’est le développement durable dont le bulletin officiel précise «qu’il ne consiste pas à préserver la nature mais d’assurer le bonheur de l’homme en société». Nous voilà (presque) rassurés. L’explosion démographique des pays du Sud doit être abordée sans catastrophisme et sans inciter au néomalthusianisme (réduire le nombre d’enfants pour améliorer ses conditions d’existence) et surtout  ne pas envisager de décroissance… c’est qu’il va falloir équiper tous ces nouveaux petits terriens en I-Phon

    La nature a horreur du vide: une fois nos élèves dépossédés de leurs racines culturelles et de la connaissance de leur passé, il faut procéder à un remplissage qui tient autant à l’acculturation.

    Ainsi au collège, les débuts de l’islam, l’empire Monomotapa, la puissance des empires africains, à l’image du Kanga Moussa où Kankou Moussa remplacent  Saint-Louis dans le nouveau programme.

    Les élèves de terminale doivent potasser toute l’histoire du socialisme et du mouvement ouvrier allemand de Bismarck à nos jours ainsi que les mouvements religieux aux Etats-Unis depuis le XIXe siècle. Est-ce de la part des hauts fonctionnaires, des commissions et des universitaires qui élaborent les programmes une façon  de lorgner vers un socialisme efficace et patriote qui a fait ses preuves et cacher l’ineptie d’un socialisme français qui n’a de français que le nom ou pour masquer une laïcité spécifiquement républicaine qui prend l’eau de toute parts ?  Je rappelle, pour information, que tous ces délires ont été concoctés sous l’ère Sarkozy.

    Le vivre-ensemble

    Nous l’avons vu plus haut, ces programmes privilégient l’ouverture sur le monde au nom du sacro-saint «vivre ensemble». Ils doivent vider la France de toute âme, de toute personnalité ethno-culturelle pour la réduire à une simple expression géographique – le mot n’est plus de Metternich mais de M Besson, ministre de l’immigration de l’ancien président qui proclamait : « La France n’est ni un peuple, ni une langue, ni un territoire, ni une religion. C’est un conglomérat de peuples qui veulent vivre ensemble ».

    Cependant les objectifs clairement établis au bulletin officiel vont plus loin : « les programmes visent la socialisation démocratique et républicaine des jeunes en s’opposant à des idées qui pourraient mettre en péril la démocratie. » Vous pensiez immédiatement à l’islamisme ? Il n’en est rien.

    Cependant les objectifs clairement établis au bulletin officiel vont plus loin : « les programmes visent la socialisation démocratique et républicaine des jeunes en s’opposant à des idées qui pourraient mettre en péril la démocratie. » Vous pensiez immédiatement à l’islamisme ? Il n’en est rien.

    Eradiquer les esprits rétifs

    Il faut éradiquer tout esprit libre rétif au nouveau credo, annihiler toute velléité de résistance qui se développe aujourd’hui dans les mouvements populistes.

    La droite dite extrême fait donc son entrée très remarquée dans les programmes scolaires :

    En seconde, la Révolution française doit être survolée. Les révolutionnaires ont été incapables d’établir un régime stable, durable et apaisé, ils se sont laissés emporter par leurs passions qu’ils ont portées à un paroxysme jamais atteint depuis les guerres de religion et ils ont eu raison de… la Raison à laquelle ils se référaient. La Monarchie constitutionnelle a été un échec, La France a loupé le coche de la modernité politique, c’est exclusivement la faute de la contre-révolution, ancêtre de l’extrême droite. C’est tellement commode !

    En classe de terminale, on ressort les vieux plats et on les réchauffe pour les besoins de la cause :

    Dans un chapitre relatif aux rapports que les sociétés entretiennent avec leur passé, les élèves doivent retenir tous les historiens et cinéastes qui ont fait ressurgir l’histoire de Vichy et de la collaboration. Un peu plus loin, un autre chapitre inédit se propose d’étudier le rôle des médias dans les grandes crises politiques qui ont marqué la République depuis l’affaire Dreyfus (!) jusqu’au 21 avril 2002 en passant par le 6 février 1934, l’Occupation et la guerre d’Algérie. Tout élève un tant soit peu attentif à ses cours devra ressortir en soupirant : « décidément, que la France serait un pays de cocagne sans la présence de cette extrême droite immonde qui gâche toujours tout  et nous empêche de tourner en rond ».

    L’Education civique Juridique et Sociale

    Pour les élèves obtus ou dont les parents votent mal et peuvent exercer une mauvaise influence sur leur progéniture, il y a l’ECJS- Education Civique Juridique et Sociale qui est là pour enfoncer le clou : « les discriminations mènent au racisme », « SOS racisme défend les personnes discriminées »… à condition qu’elles ne soient ni de souche européenne, ni chrétienne ! Bien entendu, la HALDE fournit gracieusement les supports pédagogiques.

    Un amer constat

    Après plus de vingt ans de passion pour mon métier, je fais l’amer constat d’être devenu malgré moi un commissaire politique dont la mission consiste à couvrir le grand remplacement de population qui s’opère sous nos yeux sans aucun contrôle citoyen avec en corollaire la dépersonnalisation de notre pays. La connaissance et l’érudition ont été délibérément sacrifiées  au profit de ce totalitarisme mou qui bouleverse de façon radical nos sociétés. Fort heureusement les publications qui tentent de sensibiliser l’opinion à cette menace majeure pour notre survie en tant que peuple sont nombreuses. Je peux citer le numéro 4 du Figaro-Histoire ou l’ouvrage de Dimitri CASALI édité chez Lattès, L’Histoire de France interdite, pourquoi nous ne sommes plus fiers de notre histoire ?, publiés tous deux il y a quelques mois…

    Marc  Longobard
    Professeur  d’Histoire et géographie
    11/02/2013
    Résistance républicaine

    Les intertitres sont de la rédaction

    Correspondance Polémia- 19/02/2013

  • « LE RETOUR DES GUEUX. LE REVEIL DES LIONS » suivi du « PLAN JACQUES CARTIER », de Claude Perrin

    « LE RETOUR DES GUEUX. LE RÉVEIL DES LIONS » : UN LIVRE DE RÉSISTANCE IDENTITAIRE
     
    Comme partout en Europe, l’anarchie s’est répandue sur le territoire où Claude Perrin situe l’action de son roman. Le tsunami de l’immigration-invasion, la décomposition des institutions publiques, la disparition des cadres habituels ont permis à des bandes de pillards de faire régner une terreur sans fin.¢
    Tel est le cadre dans lequel Claude Perrin place les personnages de son roman : des hommes, une femme qui refusent d’accepter l’inacceptable, la soumission, l’esclavage. Ils choisissent donc de se battre. Et s’organisent en réseaux de solidarité pour survivre et conduire la résistance, afin de préparer, un jour, la reconquête.
    Le lecteur va vivre à leurs côtés des moments intenses, des épisodes hauts en couleur, qui l’inciteront à se préparer mentalement et physiquement à l’avenir, le proche avenir qui s’annonce chaotique.
    On est là dans la veine du Camp des saints de Jean Raspail – mais en plus optimiste, heureusement, puisque Claude Perrin annonce à ceux qui sont capables d’entendre son message que la renaissance est au bout du chemin. Pour ceux qui auront choisi la lutte.
    « LE PLAN JACQUES CARTIER »
    Le plan vous convie à une nouvelle série d’aventures faisant suite au rassemblement qui concluait Le retour des gueux, le réveil des lions.
    Sous autorité militaire, après longue concertation sur la situation tant en France que de par la monde, de valeureux volontaires vont mener des actions insolites visant notamment à se débarrasser du carcan anglo-américain, mais aussi à s’attacher au sort malheureux de ce qui fut la Provence de Mistral, Daudet et Giono. Des moyens inédits fournis notamment grâce à la solide amitié liant la France à la vieille et sainte Russie vont permettre de lever le puissant système de contrôle mondial édifié par l’Oncle Sam.
    Des personnages hauts en couleurs, comme ce commandant de sous-marin Russe et cette exubérante Québécoise, donnent un relief particulier à cet épisode mouvementé.¢
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    pour les deux romans de Claude Perrin
    "Le retour des gueux. Le réveil des lions"
    et sa suite "Le plan Jacques Cartier"
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  • Des femmes sans âmes :

    "J'entends dire que la religion catholique est misogyne. Ce n'est pas sérieux ! Une religion qui agenouille les hommes devant une femme couronnée manifeste une misogynie suspecte." A.MALRAUX

    Revenons sur les conceptions de la femme soumise ou sur l'aberration répété : " les docteurs de l'Eglise de France ont discuté pendant des siècles pour savoir si les femmes avaient une âme ". Il y a quelques années, une telle ânerie était sortie de la bouche d'une personne du gouvernement et sans contestation de la part de son entourage et des médias pourtant si prolixes dans d'autres cas ...De telles choses sont couramment admises et propagés par "l'intelligentsia" qui trône chez nous, préservant l'ignorance générale pour le plus grand profit du pouvoir en place...

    Le baptême de Clovis fut un des actes fondateurs de la France et celui-ci est dû à une femme intelligente et tenace Clotilde, nièce du Roi des Burgondes. Que dit l'histoire : "Les femmes de l'Empire germanique, comme les Françaises de l'époque d'ailleurs, sont fortes et indépendantes. Au XVème siècle, une Madame Liblar, épouse d'un commerçant de Cologne,dirige, sous son propre nom, l'un des principaux ateliers de soieries de la ville. A Francfort-sur-le-Main, on compte,entre le XIVème et le XVIème siècle, 65 corps de métiers uniquement féminins(entre autres,la brasserie). Les femmes sont majoritaires dans 17 autres corporations et à égalité avec les hommes dans 38 autres, tandis que 81 professions sont à prédominance masculine.Ce qui distingue les corporations féminines c'est, parfois, leur plus grande ouverture d'esprit: certaines d'entre elles acceptent de prendre en apprentissage des enfants illégitimes"(Barbara Beuys). Nous entendons parler de "Libération de la Femme " mais regardons le Moyen-Age où la liberté rimait avec la féminité. Aujourd'hui, la réussite pour les femmes est dans la ressemblance à l'homme.C'est cela l'égalité ? Rappelons au passage qu'Aliénor d'Aquitaine, femme politique en plein douzième siècle fut aussi mère de dix enfants, que Blanche de Castille gouverna le royaume pendant 25 ans. ..

    Jeanne d'Arc entraînant le peuple de France, les armées et les grands Seigneurs, pourtant si rudes en ces temps.. .L'éducation des enfants était affaire de famille et on vivait souvent nombreux sous le toit d'une maison, il n'était pas alors question de se débarrasser d'eux... On aurait même pas imaginé envoyer des vieux dans des mouroirs, dont les chambres aux murs si blanc ne résonnent plus aux rythmes de la vie passée... Nous pourrions indéfiniment citer des exemples de femmes illustres qui marquèrent leur époque, malheureusement souvent inconnues de nos manuels d'histoire. Sous l'Ancien Régime, les rapports humains avaient beaucoup plus d'importance que dans notre monde matérialiste. Le peuple bénéficiait de privilèges comme les nobles.Rappelons à la mémoire, les dames de la Halle qui pouvaient rencontrer le roi ou ses ministres n'importe quand. A la Saint-Louis la représentante était embrassé par le roi. L'enfant royal est malade et elles accourent à son chevet pour le couvrir de baisers et d'affections, une naissance et voilà les fêtes et festins où l'on banquète tous ensemble. L'histoire continua ainsi, Henri IV était leur compère et compagnon, Louis XV sera leur "Bien-aimé".

    En 1725, au mariage du prince, elles accoururent au devant du couple royal, devant une foule en liesse, car les évènements royaux étaient vécus comme des fêtes de famille, à la reine, Marie Leszczynska "Madame, j'apportons nos plus belles truffes à Votre Majesté. Mangez-en beaucoup et faites-en manger au roi ; cela est fort bon pour la génération.Nous vous souhaitons une bonne santé et j'espérons que vous nous rendrez tous heureux.".. Bref la Monarchie populaire tant les rapports sont familiers et cela jusqu'à la Révolution. Les reines étaient couronnées comme les rois et possédaient aussi le pouvoir pour seconder ceux-ci en cas d'absence comme les croisades ou divers autres raisons,comme la mort du roi. ..Nous sommes à des lieux de la représentation présidentielle ou ministérielle. Les charges étaient souvent assumées par les femmes lors d'une défaillance maritale, celles-ci se retrouvent donc gouverneurs de places fortes ou comme Madame de la Boulaye dont le mari est décédé, commandant d'un régiment de cavalerie.Richelieu lui accorde en 1627, une augmentation de 50 hommes pour la garnison de Fontenay-le-Comte. Comment imaginer L'Eglise oubliant le sacrifice de ses Saintes au premier rang de ses martyrs (Geneviève,Blandine,Jeanne d'Arc Agnès,Cécile...). Que dit l'enseignement du Christ sur les femmes, a-t-on déjà oublié la Samaritaine et Marie Madeleine...

    ''L'amour courtois",véritable promotion de la femme et vivement encouragé par l'Eglise. Régine Pernoud dans: "Pour en finir avec le Moyen-Age" rappelle le culte de la Vierge Marie aux "temps médiévaux". Le pouvoir féodal détenu par des femmes dont certaines portaient la crosse des évêques pendant que d'autres dirigeaient la vie de paroisse ou de village. Imagine-t-on en plein Moyen-Age,un monastère double dirigé par une abbesse, Pétronille de Chemillé, âgée de 22 ans,époque pourtant noire suivant certains dires. ..Faudrait-il rappeler les consultations auprès du petit peuple pratiqués par Saint Louis, pour connaître les problèmes. Les règlements rapides de certains, évitant les attentes pénibles et la monstrueuse apathie administrative qui nous étouffe aujourd'hui. Devons nous rappeler le droit de vote qu'elles exerçaient dans les réunions locales, sans compter les nombreuses professions qui leur étaient accessibles ...En 1095, les hommes ne pouvaient partir en croisade qu'après avoir consulté leur épouse. On retrouve les votes des femmes aux Etats Généraux de Tours en 1308. L'enseignement de Rousseau sera d'un tout autre registre et la Révolution ne sera pas tendre avec les femmes.Celui-ci écrira d'elles : "La femme est faite pour obéir, elle doit apprendre de bonne heure à souffrir, même l'injustice, et à supporter les torts d'un mari sans se plaindre ...Après tout,où est la nécessité qu'une fille sache lire et écrire de bonne heure ? Il y en a bien peu qui ne fassent plus d'abus que d'usage de cette fatale science."(Emile)
    Notre République vit sous les enseignements de ce "Grand ancêtre"... Napoléon, fils de la Révolution continuera le chemin en écrivant : "La femme est la propriété du mari, comme l'arbre à fruit est la propriété du jardinier..." faudrait-il développer les incessants combats des catholiques sociaux essayant, durant le XIXéme siècle de redonner un peu de justice dans le monde social ébranlé par la Révolution de 1789. Des milliards, fonds de prévoyance, d'apprentissages, embryons de "Sécurité sociale" et d'Allocations seront volés par les révolutionnaires aux organisations de métiers, tandis que les ouvriers, propriétaires de leur métiers deviendront, broyés par le capitalisme sauvage, des prolétaires au nom de la "Liberté, l'Egalité et la Fraternité "...Des nantis. Imperturbables les défenseurs de la justice réclameront des conditions humaines de travail, l'interdiction des travaux de force durant la nuit pour les femmes, l'abaissement du nombre d'heures de travail, l'interdiction du travail pour les moins de treize ans...

    On trouve bien dans la phrase prononcée, la réelle envergure d'un ancien ministre lançant de telles inepties,sans vérifier ses dires,devant l'air hébété de ses pairs incultes approuvant en applaudissant. On comprend alors et on ressent de graves frissons en voyant notre destin mené par de tels personnages. Comment cacher aux citoyens la vérité et qu'importe, le premier jet de la calomnie est lancé. On matraque les écoliers à coup de clichés soigneusement triés, dégagés de tout contexte historique et généralisés à souhait, toujours dans le but idéologique, permettant l'assombrissement d'une des périodes les plus riches de notre histoire.

    http://www.actionroyaliste.com

  • Nihilisme et parole Le point de vue de Claude Bourrinet

    « Dieu est mort ». Ce constat, dressé à la fin du XIXe siècle par Nietzsche, dépasse le cadre strictement religieux. Le philosophe du retournement des valeurs désirait qu’on tirât les conséquences d’une perte que l’on avait, par cécité ou pusillanimité, mis du temps à percevoir. Car Dieu, ce n’est pas seulement cet « étant » qu’on reniait, mais l’homme lui-même, du moins tout ce qu’on mettait derrière la notion d’homme, les valeurs morales et humanistes qui avaient drainé l’Europe depuis plus de deux mille ans, que le christianisme avait renforcé en les exacerbant et en leur apportant cette excitation qui naît d’une affectivité attisée, et qui, à l’avènement de l’industrie, de la science et de la technique, comme si toute substance signifiante avait été vidée du monde, paraissaient encore fonctionner, comme mues par l’énergie cinétique.
      Le XXe siècle a voulu combler l’abîme en outrant le discours des valeurs, en encourageant la prolifération du signe, soit par une hypertrophie fraternitaire, soit par un retour hyperbolique à l’ethos antique. Cette tentative de réenchantement du monde par l’idéologie, fille bâtarde du messianisme religieux, était dés lors vouée à subir, selon le mot de Hegel, « l’ironie » de l’Histoire. Toute réaction contre la décadence n’aboutissait qu’à son aggravation et à son expansion, tout discours sur l’authenticité ne contribuait qu’à légitimer les forces politiques vouées à la nier. En fait, cette inflation rhétorique, ostentatoire et viciée, accroissait encore davantage le désert et préparait activement le triomphe actuel de la technique et de la marchandise, qui médiatisent définitivement l’humain et le monde en les réifiant.
      Il n’est pas sans intérêt de noter que le nihilisme se traduit pour ainsi dire naturellement dans l’usage d’une langue abâtardie, technicisée à outrance, appauvrie par l’usage publicitaire, cybernétique et communicationnel, progressivement anglicisée par une sorte de sabir à vocation universelle, passe-partout, langue aussi insignifiante que le coca-cola et le blue-jeans, plus génératrice de réflexes conditionnés que de sensations raffinées et de délicatesses émotionnelles. Bref, la langue d’un on mondialisé, évaporé, décoloré, désodorisé, uniformisé et aliéné a miné toute singularité et toute saveur locale authentique. C’est avec cette langue sans domicile fixe que les hommes tentent de communiquer, et comme la pensée se fait dans la bouche, l’imaginaire, la réflexion, la sensibilité sont devenus ce que la télévision est, c’est-à-dire un champ de ruines. Le pathos sentimentaliste et l’avarice cynique y font bon ménage, pour la gloire sans éclat d’un narcissisme omniprésent, qui donne à n’importe quelle nullité la chance d’être une star mondiale durant quelques heures.
      Le nihilisme européen vient en fait de loin. Nietzsche en trouvait l’origine dans l’opposition platonicienne entre le monde des Idées et une matière ravalée au non-être. Le monde en était dévalué. Même si ce dualisme n’est pas si radical qu’il a pu apparaître dans l’histoire de la philosophie, notamment grâce à l’apport du néoplatonisme (et déjà Cicéron, dans l’orateur, retourne la conception platonicienne de la mimesis, entachée de moindre-être, pour affirmer la participation de la psyché humaine à l’Idée, laquelle devient modèle et visée pour l’artiste 1, il a été accentué quand des tendances ascétiques, confortées par le message christique (« Mon royaume n’est pas de ce monde ») et encouragées par la fascination manichéenne allaient exercer sur le christianisme une influence déterminante pour son évolution. Il justifia l’existence, dans la weltanschauung européenne, d’un arrière-monde disqualifiant non seulement l’univers du phénomène (comme si celui-ci prenait sa source dans une dimension originaire occulte, une espèce d’en-soi problématique), mais aussi orientant le télos de la vie vers un destin post-mortem, au-delà de la vie (« La vraie vie est ailleurs »).
      On sait que Nietzsche avait opposé à cet abandon délétère l’amour de cette vie, l’assentiment à sa force et à sa cruauté, ce que le philosophe intempestif nommait le fatum. Deviens ce que tu es…
      Le christianisme a contribué fortement à ce nettoyage mythique, que Weber nommait le « désenchantement du monde ». Marcel Gauchet, dans son ouvrage qui reprend cette expression pour titre, a décrit avec rigueur le processus historique qu’une « religion de sortie de la religion » a mis en branle, processus qui aboutit à une absence universelle de sens.
      Le langage étant, dans ses fondations, généré et entretenu par une expérience du monde, l’effondrement de ce dernier le vide de toute prétention à l'éclairer et à le commenter. Avec le mot qui se délite, qui s’évase, se liquéfie, s’effrite et ou se glace, c’est la pensée, les sensations, les émotions, la chose même qui se perdent ou se momifient.
      Ce n’est pas un hasard que le souci constant d’un penseur comme Heidegger a porté sur le langage, soit en déconstruisant la métaphysique, soit en tentant de créer une langue plus adéquate. L’oubli de l’Etre entraîne l’oubli du dire, et, inversement : Aucune chose ne soit, là où le mot faillit, dit Stefan George.
      L’une des manifestations les plus probantes de cet abandon du lien existentiel entre la Vie et l’expression a été sans doute l’évolution des sciences linguistiques au XXe siècle, tant à travers les travaux de Saussure que de ceux de Peirce, pour ne nommer que les plus connus des linguistes. La sémiologie ou la théorie de l’information, sur lesquelles repose une grande part des expérimentations du siècle dernier, notamment dans le domaine de la communication, sont fondées sur le concept d’arbitraire du signe. Non seulement une rupture radicale existe entre le signifiant et le signifié, ce qui autonomise le discours et, pour ainsi dire, le transforme en autant d’ « abolis bibelots », mais un abîme ontologique s’est creusé entre l’ « objet » (selon la terminologie de Peirce), et le signe (désigné comme la conjonction entre le signifiant et le signifié), entre lesquels il n’existe plus aucune sorte de corrélation. 3 Le monde, dès lors, ne se réfléchit plus que dans l’océan  langagier d’une tribu ballottée par sa propre gratuité.
      La parole étant donc devenue communication, c’est-à-dire simple instrument intersubjectif, la transmission entre l’émetteur et le destinataire est seule pertinente, notamment dans un contexte aussi utilitariste que celui de la rationalité techniciste et scientiste moderne. La littérature apparaît dès lors invalidée par rapport au message. L’expression courante faire passer un message insiste sur cet aspect fonctionnaliste et abstrait du langage. Dans l’économie de marché, la densité et la subtilité poétiques passent pour lourdeur et parasitisme : il faut être précis, réactif, rentable. D’autant plus que la littérature (et on rangera tout récit, historique, mythique etc. dans cette catégorie) a la fâcheuse propension à se nourrir de racines, d’identités, de terroirs complètement invalidés (sauf dans les versions frelatées des parcs d’attraction ou des films hollywoodiens) par l’uniformisation planétaire. La pénurie de langage, dans l’état de saturation informative actuelle, n’est plus ressentie comme telle. Le quantitatif oblitère la déficience qualitative, et la détresse est obligée de prendre d’autres circuits que celle d’une hypothétique contre-culture authentique, dont on voit bien que les contrefaçons appartiennent au dispositif de récupération mercantile.
      C’est ainsi que l’enseignement des langues, anciennes et modernes, a subi une évolution qui semble irrésistible : d’une part, on tend à supprimer celui du latin et du grec, pour des raisons qui semblent budgétaires, mais dont les fondements idéologiques sont clairs ; d’autre part, on cherche à rabattre celui des langues modernes sur le seul anglais de communication, dont on nous explique qu’il est désormais irremplaçable, et qu’il doit devenir notre « langue maternelle ». Du moment que le monde entier parle la langue des Anglo-saxons, apprendre d’autres langues est une perte de temps et d’énergie. Time is money.
      L’inadéquation entre le Dire et l’Exister a provoqué, quand le nihilisme est devenu flagrant, une réaction qui s’est surtout manifestée dans le champ poétique.
      A-t-on assez songé que le projet rimbaldien d’alchimie du Verbe, tentative avortée de transformation radicale de la vie par l’entreprise du langage et par le dérèglement raisonné de tous les sens, témoignait bien davantage de l’absence d’une langue capable de mener jusqu’au bout cette ambition, que de l’échec d’un homme ? Et cette fuite loin de la côte armoricaine, hors d’une Europe au langage amputé, n’est-elle pas l’aveu nihiliste de l’ « homme aux semelles de vent », quand bien même il se serait résigné à étreindre  la réalité rugueuse ? Dans Matin, il confesse : Je ne sais plus parler !
      Pour saisir la profondeur de son naufrage, il est nécessaire d’évaluer la situation de Rimbaud, en pleine Révolution industrielle, au cœur d’un siècle matérialiste, scientiste, positiviste, progressiste, égalitariste et colonialiste, ce qu’il y avait d’intempestif, au sens littéral et nietzschéen, et d’évidemment désespéré, pour revenir à ce que le poète nomme « la poésie grecque », poésie oraculaire, magique, voyante, dont le veuvage d’avec le sacré n’a jamais été irrémédiablement consommé, ni chez Théocrite, ni chez Virgile, ni chez Nerval, encore moins chez Baudelaire, (Baudelaire ! « le premier voyant, roi des poètes, un vrai Dieu » !), préservant ainsi un fil précieux entre l’âge de fer et l’âge d’or. Ce rêve fracassé, dont témoigne encore l’essai mallarméen de créer une langue sacerdotale, ésotérique et hermétique, à la sortie du Romantisme, devait susciter l’un des débats les plus passionnés sur la langue poétique et ses significations existentielles.
      Pourquoi un tel dessein s’est-il perdu dans le labyrinthe des combats d’avant-garde et n’a-t-il jamais débordé, malgré la volonté messianique des surréalistes, les bornes des maisons d’édition et des cercles d’initiés ? Pourquoi la langue poétique n’a-t-elle jamais trouvé sa place dans la société contemporaine, balançant entre la perte orgiastique d’un Artaud et l’abolition  mallarméenne ? Entre le trop plein et le vide ? Entre le Dire et le Silence ?
    Langue des origines et poiêsis
      Le langage nous traverse. Dans la mesure où la langue est le dépôt le plus intime que la communauté nous a transmis, elle est en nous ce qu’il y a de plus proche et de plus lointain. Elle fonde une partie importante de notre être, car sa dynamique structurante modèle le fonds à partir duquel on peut sentir, s’émouvoir, penser. Le monde prend corps avec les mots, et ceux-ci sont les fruits d’une histoire riche et complexe. Dans chaque mot, dans chaque lien syntaxique gît une sédimentation que l’expérience historique d’une longue série de générations a accumulée. C’est pourquoi l’adoption d’une langue étrangère constitue un dépaysement existentiel radical, comme l’a bien montré Cioran, au point que l’on peut évoquer à ce propos d’exil ou de nouvelle patrie.
      Cependant cette solution langagière risque de n’engendrer, en précipitant, qu’une liqueur sans saveur ni couleur si ne s’y mélange l’ingrédient majeur d’une pensée personnelle. De même, comme les mots s’usent et suscitent, par l’usage collectif qui en atténue la force, l’oubli de leur sens originel, le risque est grand de sombrer dans le magma du on : ça parle en moi au lieu de je parle. Le langage n’est plus parlant. La pensée, quelle que soit l’acception qu’on lui donne, doit se présenter comme une lutte contre la matière du langage, soit pour rendre l’expression adéquate avec l’objet visé, soit pour faire surgir à la lumière ce dernier par une violence créatrice qui apparente la quête de sens à la poésie.
      Pourtant, la pensée philosophique a toujours prétendu à l’impersonnalité, à la distance par rapport à la subjectivité du penseur. Les Grecs mettaient derrière le terme noûs le rationnel, le spirituel. Cette emprise de la Raison, faculté du sujet transcendantal, s’est vue confortée à l’époque moderne par le triomphe du kantisme, qui a posé les bases épistémologique d’une science rigoureuse. A priori, donc, un engagement personnel dans l’exercice de la pensée invalide les résultats de celle-ci.
      Or, Hans-Georg Gadamer 5 rappelle que la pensée est appelée par Heidegger Andenken. Et, fait-il remarquer, cet emploi fait allusion « au terme d’Andacht », qui signifie « office religieux », « dans la mesure où l’expérience religieuse reste sans doute encore plus proche du caractère immémorial de l’être que la pensée de la métaphysique ».
      C’est bien ce qui distingue la philosophie européenne de l’Etre de celle, plus centrée sur la logique, du « cercle de Vienne » aux Anglo-saxons, qui se méfient de tout ce qui est nimbé d’un halo pour eux « romantique », de « mystique ».
      Aussi s’agit-il de réévaluer la notion de « subjectivité ». La pensée ne se réalise pas toute seule. Elle construit, par sa visée, par l’angoisse qui l’a rendue possible, par le souci de l’être qu’elle suppose, une situation par rapport au monde, qui trouve son analogie dans les relations qu’entretient l’Homme avec la Nature ou avec lui-même, relations qui peuvent être techniques, scientifiques, indifférentes ou pieuses. Le préjugé positiviste n’est pas tenable car les catégories de subjectivité et d’objectivité sont dépassées. Toute pensée est pensée des racines. Elle cherche à mettre au jour l’être du « monde », c’est-à-dire de ce qui nous constitue en tant qu’être. Elle n’est pas pure tautologie, mais son rôle se traduit par une tentative de dévoilement d’une vérité (non de LA vérité), d’alêthéia (qui découvre et couvre à la fois). Elle a donc une portée éminemment pragmatique, dans le sens où les lueurs qu’elle suscite nous invitent à devenir ce que l’on est, en pleine lumière.
         La situation de Heidegger par rapport au langage s’apparente à une expérience apophatique. Mettant à la question la tradition métaphysique, il se voit contraint de rejeter tout un langage piégé, dont le signifié est implicite et conditionne non seulement la pensée, mais la chose même. Pour se tirer de cette aporie, il est obligé de faire violence à la langue naturelle, donnant un sens nouveau aux termes les plus familiers. Il s’agit ni plus ni moins, comme l’explique Gadamer, de « rendre le spirituel de façon saisissable » en « [extrayant] des mines du langage les minerais les plus inusités, faisant éclater le roc ainsi mis au jour, qui en perd complètement son contour habituel, pour se mouvoir dans sa recherche et son exploration, dans un monde de pierres éclatées ».
      Pour ce faire, Heidegger a puisé dans la langue allemande, celle de Maître Eckhart, celle de la Bible de Luther, de même que dans les dialectes, une matière pleine de ressources. Il a questionné aussi de manière serrée et impitoyable la tradition philosophique et théologique latine en remontant aux origines grecques. Ces sondages au plus profond de la langue hellénique ouvraient des perspectives insolites, comme l’analyse qu’il a faite du terme ousia, que Cicéron traduit par essentia, et dont il montre tout ce qu’il doit à l’univers singulier du paysan grec, car ousia désigne à proprement parler le domaine, la propriété agricole, ce qui compte le plus dans l’existence d’un homme de la terre.
      On pourrait trouver maints cas de ces enquêtes philologiques et étymologiques (sans compter l’utilisation détournée ou « naïve » de mots, dont il utilise un sens second pour interroger autrement l’objet de la réflexion, comme c’est le cas par exemple du verbe « appeler » dans l’expression « Qu’appelle-t-on penser ? ». Ce qui rapproche aussi son langage du langage poétique est l’utilisation de métaphores qui offrent un sens évocateur à des concepts logiques et ontologiques (par exemple clairière – Lichtung -, conciliation – Austrag -, événement – Ereignis – etc.). La rencontre entre langage philosophique et langage poétique a été encouragée, comme on le sait, par sa découverte émerveillée de la poésie de Hölderlin en 1936.
      « Le commencement (arkhê) est comme un dieu qui, aussi longtemps qu’il séjourne parmi les hommes, sauve toutes choses. » (Platon, Lois, 775 e.) Arkhê, c’est le commencement, mais c’est aussi l’origine, ce qui fonde. On sait que Tite-Live avait intitulé son immense recherche sur Rome, dont il ne nous reste que quelques livres, Ab Urbe Condita, « Depuis la fondation de la Ville ». Autrement dit « Recherche sur les origines de Rome ». 9 Le trait de génie était, par une logique pour ainsi dire métapolitique, de fusionner intimement l’Histoire proprement dite de Rome avec les plus anciens mythes indo-européens. Nous savons en effet, depuis les travaux de George Dumézil, que le génie romain a consisté à historiser les structures archétypales du substrat  propre à des peuples aussi différents que les Aryens indiens, les anciens Perses, les Grecs, les Celtes, les Germains et d’autres ethnies qui ont en commun le même legs proto-historique. Aussi tout coup de sonde dans le passé se résout-il, pour un peuple qui vit un destin historial à re-fonder son être-au-monde, sa légitimité aux yeux des dieux et des hommes.
      C’est pour avoir oublié cet être, avoir choisi un autre temps, avoir choisi un autre dieu, que Rome a disparu.
      Il se trouve que nos racines mythiques ont été occultées en partie par une nouvelle mythologie, une théologie issue de l’Orient sémite, et qu’il n’en a subsisté que des bribes plus ou moins travesties au fond de la mémoire populaire et dans ses traductions « folkloriques », de même que dans la fable humanistique. Il en va de même de l’immense patrimoine philosophique gréco-latin. Tout ce patrimoine a disparu, ou est sur le point de le faire, ou bien est de moins en moins accessible.

  • 21 février 1804 Naissance du chemin de fer

    Un train à vapeur circule pour la première fois au monde le 21 février 1804, à Pen-y-Darren, une région minière du pays de Galles, près de Merthyr Tydfil.

    La locomotive a été conçue par l'ingénieur des mines Richard Trevithick, passionné par la motorisation à vapeur. Elle tracte ce jour-là dix tonnes de fer et 60 personnes montées sur cinq wagons, effectuant 16 km en 4 heures et 5 minutes.

    Parmi quelques autres réalisations de Richard Trevithick, la locomotive «Catch me who can» (M'attrape qui peut) finira à Londres, dans un manège.

    Les mines donnent naissance au chemin de fer

    L'idée de faire circuler des charges lourdes sur des rails remonte sinon à la nuit des temps du moins aux premières exploitations minières.

    Dès l'époque médiévale, en Europe, ces exploitants s'aperçoivent en effet que les charrettes de produits lourds rencontrent moins de résistance au frottement lorsqu'elles roulent sur des rails. Ces rails improvisés sont d'abord en bois et les véhicules eux-mêmes sont tirés par des chevaux.

    Avec le développement de la métallurgie, on remplace peu à peu les rails en bois par des rails en fer, ce qui améliore encore de beaucoup les performances de la traction.

    Au pays de Galles, où les fonderies ont des produits lourds à transporter, le transport sur voie ferrée apparaît très tôt comme la solution idoine. Reste le problème de la traction : doit-on se limiter à des chariots tirés par des chevaux ?

    L'invention de la machine à vapeur par James Watt en 1776 et les premiers engins mus par la vapeur, comme le fardier de Cugnot, laissent espérer des solutions plus performantes.

    Samuel Homfray, propriétaire des fonderies de Penydaren, met au défi son ami ingénieur Richard Trevithick de construire un engin capable de tracter dix tonnes.

    C'est ainsi qu'il conçoit la première locomotive à vapeur, avec une chaudière montée sur chariot ; la vapeur sous pression actionne un piston, lequel fait tourner un grand volant extérieur.

    Richard Trevithick, toutefois, néglige d'exploiter son savoir-faire. Inventeur dans l'âme, il abandonne à d'autres le passage du ferroviaire à la phase industrielle.

    Le chemin de fer acquiert droit de cité

    Différents artisans se lancent dans la traction ferroviaire, pour les besoins de la sidérurgie et des mines.

    En 1825 est inaugurée la ligne Stockton & Darlington, dans les Midlands. Il s'agit de la transposition à l'air libre d'un chemin de fer minier, avec ses chevaux et ses machines à vapeur fixes qui tirent les wagonnets. Outre le transport du charbon, elle s'accommode du transport de voyageurs.

    Cette ligne très rustique est un lieu d'expérimentation capital avant la décision de construire une première ligne ferroviaire commerciale entre Liverpool et Manchester.

    Pour ce projet capital, les autorités locales organisent un concours, avec une récompense de 500 livres sterling, afin de sélectionner un constructeur capable de faire rouler sur rails un engin de moins de 6 tonnes à la vitesse de 16 km/h. Les concurrents doivent se prêter à une démonstration sur un circuit, à Rainhill, dans les Midlands. Le concours s'étale sur une semaine et attire des curieux de toute l'Angleterre.

    Parmi les concurrents, la «Sans Pareil» de Timothy Hackmorth atteint la vitesse de 30km/h. Son concepteur est un ingénieur qui travaille sur la ligne du Stockton & Darlington. Il prend sur ses nuits pour construire la machine dans les ateliers de la ligne. Malheureusement, le jour du concours, il joue de malchance et essuie de nombreuses pannes, réussissant tout de même à tracter 19 tonnes sur 36 km à la vitesse de 22 km/h.

    C'est finalement Georges Stephenson et son fils Robert qui remportent la récompense avec leur locomotive, «The Rocket» (la «Fusée»), plus performante et ingénieuse, avec des astuces techniques empruntées à la «Sans Pareil».

    Elle prend l'apparence que l'on connaît depuis lors aux locomotives à vapeur, avec une chaudière horizontale, un foyer à l'arrière et une cheminée à l'avant. Sa chaudière tubulaire multiplie par quatre la production de vapeur par rapport aux simples chaudières. Un «tender» contenant l'eau et le charbon est attelé à l'arrière de la locomotive. D'un poids d'à peine plus de 4 tonnes, elle roule jusqu'à 56 km/h. C'est le premier record du monde de vitesse.

    Georges Stephenson fournit donc les premières locomotives de la ligne commerciale Liverpool-Manchester, laquelle fait chuter de moitié le prix des marchandises lourdes vendues à Manchester. La ligne s'avère très rentable pour les actionnaires de la compagnie. Le succès est tel que bientôt, Stephenson n'arrive plus à fournir.

    Le chemin de fer, source de profit sans pareille

    En 1835, c'est à une locomotive fournie par les établissements Sharp & Roberts que revient la gloire de franchir la barre des 100 km/h. La nouvelle fait sensation et commence à inquiéter les professionnels du transport (diligences, coches d'eau etc).

    Dans les années qui vont suivre, ils ne vont avoir de cesse de multiplier les obstacles à la construction de lignes, voire de saboter les chantiers, en Angleterre comme ailleurs.

    Mais rien n'y fait. Il faut dire qu'en dépit d'investissements importants, les promoteurs du chemin de fer réalisent des profits colossaux, jusqu'à 50% par an, tant dans le transport de marchandises que dans celui de voyageurs. Les investisseurs et les épargnants se laissent griser par ce secteur aux allures d'eldorado.

    Déjà la technologie ferroviaire franchit la Manche et atteint le Continent. Des lignes à usage minier ou de démonstration sont réalisées en Belgique et en France.

    Les Belges inaugurent une première ligne pour le transport des voyageurs entre Bruxelles et Malines, le 5 mai 1835

    La même année, le 7 décembre 1837, en Allemagne, une première ligne de 6,4 km est ouverte entre Nuremberg et la ville voisine de Führt, au nord de la Bavière.

    En France, une première voie ferrée a été ouverte en 1827 pour le transport des marchandises, entre Saint-Étienne et Andrézieux (18 km), deux villes du bassin industriel et minier de la Loire. Elle a été étendue aux voyageurs en 1832. Puis est ouverte en 1835 la ligne Saint-Étienne-Lyon (57 km), pour le transport de marchandises lourdes et de produits sidérurgiques.

    Le 24 août 1837, en avance de quelques mois sur le roi Louis 1er de Bavière, la reine Marie-Émilie, épouse de Louise-Philippe 1er, inaugure la première ligne française dédiée au transport de voyageurs. Cette ligne relie Paris à Le Pecq (18 km). Elle est dix ans plus tard prolongée jusqu'à Saint-Germain-en-Laye, de l'autre côté de la Seine. 

    En 1842, sur la ligne Paris-Versailles se produit le premier drame ferroviaire de l'Histoire : 55 morts. Malgré son caractère spectaculaire et inédit, il ne remet pas en cause la confiance des banquiers et de l'opinion publique dans ce nouveau mode de transport.

    En 1848, à la veille de faire sa révolution industrielle, la France compte déjà près de 2000 km de voies ferrées. En 1860, l'Allemagne en a quant à elle 11.000.

    Bibliographie

    Il n'y a pas beaucoup de livres en français sur la naissance du chemin de fer. On peut retenir un bel album aux Éditions Atlas : Les trains de légende (2000).

  • R. Steucker : Mes rencontres avec Marc. Eemans

    Archives de "Synergies Européennes" - 1998

    C’est Daniel Cologne, collaborateur des revues Défense de l’Occident et Totalité, qui m’a mis en contact avec Marc. Eemans. C’était en 1978. Daniel Cologne revenait voir ses parents  — dont je n’oublierai jamais l’immense gentillesse ni le sourire de sa maman —  à Bruxelles régulièrement, car il travaillait entre Genève et Paris. Lors de ces visites, il me donnait souvent rendez-vous pour discuter de Julius Evola et de tout ce qui tournait autour de son œuvre, de la Tradition et de René Guénon. Ce jour-là, il était enchanté d’avoir pris contact avec l’un des derniers représentants du surréalisme historique qui s’intéressait également à Julius Evola. Je ne percevais pas encore très bien quel pouvait être le rapport entre le mouvement Dada et les surréalistes de Breton (dont je n’avais lu, à l’époque, que L’anthologie de l’humour noir), d’une part, et l’univers traditionnel auquel Evola nous avait initiés, d’autre part. Cologne m’a annoncé, ce jour-là, que Marc. Eemans exposait ses œuvres dans une galerie de la Chaussée de Charleroi, à Saint-Gilles-lez-Bruxelles. Avec l’enthousiasme juvénile, sans hésiter, j’ai sauté dans le premier tramway pour rencontrer Eemans. Il était assis au fond de la galerie, devant un bureau de taille impressionnante, et feuilletait un magazine, le nez chaussé de ses lunettes à grosses montures noires. Il m’a reçu chaleureusement, enchanté de découvrir qu’Evola avait encore de très jeunes adeptes, y compris à Bruxelles. Je me suis empressé de lui dire que je n’étais pas le seul, que je lui ferai rencontrer mes copains, surtout le regretté Alain Derriks, passionné de traditionalisme (et de bien d’autres choses de l’esprit). Jef Vercauteren, qui avait tenté quelques années auparavant de lancer des cercles évoliens en Flandre, avait malheureusement disparu dans un accident d’automobile en 1973, tout comme Adriano Romualdi, le jeune disciple politisé d’Evola, mort la même année en Italie, dans des circonstances analogues. Eemans pensait enfin réaliser le vœu de Jef Vercauteren, travailler après lui à promouvoir en Flandre et aux Pays-Bas le corpus légué par Evola.
    Cette rencontre dans la galerie de la Chaussée de Charleroi est donc à l’origine du lancement de la section belge du Centro Studi Evoliani, appelation qu’Eemans avait reprise de l’initiative parallèle de Renato del Ponte, l’homme qui avait transporté les cendres du Maître sur le sommet du Monte Rosa, selon ses dispositions testamentaires, et dirigeait la revue Arthos. Cette rencontre est aussi à l’origine des longues conversations à bâtons rompus que j’ai eues avec Eemans pendant plusieurs années.
    Le «Centro Studi Evoliani»
    Grâce à la générosité et l’enthousiasme de Salvatore Verde, haut fonctionnaire de la CECA en poste aux Communautés Européennes, le Cercle Evola de Bruxelles a pu démarrer et organiser régulièrement des réunions privées où l’on discutait surtout des derniers numéros de Totalité parus, des initiatives de Georges Gondinet (son bref essai La nouvelle contestation  a eu un grand retentissement dans notre petit groupe), de Philippe Baillet et de Daniel Cologne en France et en Suisse. Parfois nous sortions du cadre strictement évolien, notamment quand, pendant une après-midi entière, nous avons évoqué la figure de Martin Heidegger, dont la revue Hermès, fondée avant-guerre par Marc. Eemans (j’y reviens !), avait publié les premiers textes traduits en français. A l’époque, Alain Derriks (1954-1987), moi-même et quelques autres amis potassions essentiellement Les écrits politiques de Heidegger  de Jean-Michel Palmier (L’Herne, 1969). Au cours de cette réunion, j’ai été très impressionné par une amie germaniste de Marc. Eemans qui nous a admirablement lu, avec une diction superbe et poignante, le discours qu’avait rédigé le philosophe de la Forêt Noire sur la figure du martyr politique le plus célèbre de l’Allemagne de Weimar : Albert-Leo Schlageter.
    Une autre fois, dans un salon privé de la rue de Spa, j’ai présenté maladroitement un texte de Nouvelle école sur la notion d’empire, dû à la plume de Giorgio Locchi. A cette occasion, j’ai rencontré Pierre Hubermont, ancien écrivain prolétarien de sensibilité communiste, détenteur en 1928 du Prix de la littérature prolétarienne, directeur de la revue La Wallonie  et animateur principal des Cercles Culturels Wallons (CCW) pendant la seconde guerre mondiale, sans jamais avoir renié ses idéaux communistes et prolétariens de fraternité internationale. Pierre Hubermont était presque nonagénaire en 1978-79 : il m’a prodigué des conseils avec la patience d’un grand-père affable, a renforcé en moi la conscience impériale, seule garantie de paix en Europe. Au-delà de la barrière des années et des expériences, souvent insurmontable, nous étions d’accord, lui, l’octogénaire avancé, mûri par les revers mais indompté, et moi, le jeune freluquet qui venait à peine de franchir le cap de ses vingt ans. L’effondrement du Saint-Empire, surtout après 1648, a ouvert la boîte de Pandore en Europe, ce qui nous a menés aux boucheries de 14-18 et à l’enfer de la deuxième guerre mondiale. Deux choses chez Pierre Hubermont m’ont également frappé ce jour-là et sont restées gravées dans ma mémoire : une diction et un verbe choisis, une précision de langage dépourvue de froideur, où l’enthousiasme était intact, malgré les adversités de la vie qui ne l’avaient pas épargné.
    On le voit : des commentaires sur l’aventure éditoriale de Totalité  et des péripéties du mouvement évolien en Italie (avec Romualdi, Freda et Mutti) aux exposés sur Pareto, Heidegger, Wirth, Guénon, Dumézil, Eliade, Coomaraswamy et aux souvenirs de l’époque surréaliste, le Cercle Evola a été une bonne école, une école d’éveil sans contrainte. Les plus jeunes assistants — après les séances et dans une autre salle où nous fumions de longs cigares cubains et buvions soit du whisky sec soit du vin rouge, parfois jusqu’à une franche ébriété —  se passionnaient bien évidemment pour La désintégration du système de Freda et pour toutes les formes qu’avait prises la quête de l’inflexible “Capitaine” de Padoue à l’époque : exploration des écrits de Celse et de l’Empereur Julien (que les Chrétiens nomment “L’Apostat”), de Porphyre (ses Discours contre les Chrétiens), de Sallustius (Sur les dieux et sur le monde), etc. Mutti a un jour avoué sa surprise à Baillet : qui pouvaient donc être cette équipe de Bruxellois qui commandaient jusqu’à cinq exemplaires de chaque livre du catalogue de ses éditions… ?

    Des conversations à bâtons rompus…
    Entre ces réunions, je rendais souvent visite à Eemans, qui n’habitait pas loin de l’école de traducteurs-interprètes où j’étais inscrit. Nos conversations, comme je viens de le dire, étaient à bâtons rompus, presque toujours autour d’un solide verre de Duvel, trouble et mousseuse, pétillante et traîtresse (la potion magique des Brabançons) : Marc. Eemans me parlait souvent d’Elsa Darciel (comme il en parle dans “Soliloque d’un desperado non nervalien”, cf. infra). Elsa Darciel était une amie chorégraphe de notre peintre. Elle avait connu le dissident politique américain Francis Parker Yockey lors de ses quelques passages à Bruxelles, avant qu’il ne meure mystérieusement dans une prison du FBI en 1961. Eemans évoquait aussi les philologues germanistes wagnérisants qui avaient marqué ses années d’athénée à Termonde (E. Soens et J. Jacobs, Handboek voor Germaansche Godenleer, Gand, 1901) et éveillé ses goûts pour les mythes et les légendes les plus anciennes. Plus tard, cet engouement s’exprimera dans les colonnes de l’édition néerlandaise de Hamer, où l’empreinte d’un autre grand spécialiste de l’antiquité germanique s’est fait sentir, celle de Jan De Vries.
    Marc. Eemans était une source intarissable d’anecdotes, de potins, d’histoires drôles, forçant son interlocuteur à voir le monde des arts et des lettres par le petit bout de la lorgnette. Il ne cessait de se moquer des travers et des vanités des uns et des autres, se montrant par là foncièrement brueghelien et brabançon (bien qu’il soit originaire de Flandre orientale). Les sots s’insurgent souvent devant un tel franc parler. Justement parce qu’ils sont sots. Pour moi, cette absence totale d’indulgence devant le spectacle des vanités humaines a été la grande leçon de Marc. Eemans. Tant le petit monde du surréalisme d’avant-guerre que celui de la collaboration ou celui des cénacles culturels de l’après-guerre n’échappaient à ses moqueries. Un leitmotiv  revenait toutefois sans cesse : les Pays-Bas (Nord et Sud confondus) ont une spécificité ; cette spécificité s’exprime par les arts plastiques, par les avant-gardes et les audaces qui s’y manifestent. Pour lui, ni le Paris des intellectuels à la mode ni l’Allemagne nationale-socialiste, avec son obsession de l’“art dégénéré”, n’avaient le droit de s’ingérer dans la libre expression de ces arts donc de cette spécificité. Eemans, même dans les coulisses de la collaboration intellectuelle, est resté, sans compromis, un avocat de l’art libre. Une position libertaire intransigeante et inconditionnelle qu’oublient aujourd’hui beaucoup de donneurs de leçons, de moralistes à la petite semaine, de fonctionnaires subsidiés de la culture (avec carte de parti et affiliation au syndicat).

    La revue «Hermès»
    Lors de ces conversations, immanquablement, nous avons un jour évoqué la revue Hermès, qu’il avait fondée avec René Baert dans les années 30. Il m’en a montré des exemplaires, les derniers en sa possession. Un petit tas de revues, ô combien émouvant et précieux. Je me rappelle de les avoir feuilletées avec dévotion : sur les couvertures apparaissaient les noms de Henry Corbin, de Karl Jaspers, de Martin Heidegger, de Henri Michaux, de Bernard Groethuysen, etc. Marc. Eemans avait été leur éditeur. Il avait œuvré au sommet le plus vertigineux de la culture européenne de ce siècle et une inquisition barbare l’avait chassé de cet olympe. Il en avait la nostalgie. On le comprend.
    Hermès est une ouverture sur la dimension mystique de la pensée européenne (et non-européenne). Bien avant Jacques Derrida, qui nous demande aujourd’hui, au nom du multiculturalisme, de nous ouvrir à l’Autre en explorant les traditions métaphysiques et philosophiques non-occidentales et la mystique (notamment arabe et juive), Eemans et Baert avaient clairement indiqué cette voie, au moins trente ans avant lui. Plus tard, Henri Michaux, lui aussi, membre de cette rédaction bruxelloise, évoquera ses “ailleurs”, bouddhistes ou taoïstes (et non pas seulement des “ailleurs” issus de l’expérimentation de toutes sortes de stupéfiants, mescaline et autres).
    L’intérêt de Marc. Eemans pour Evola provient de cette quête et de cette ouverture qu’il fut l’un des premiers à pratiquer dans notre pays. En compulsant chez lui les exemplaires d’Hermès, qu’il me montrait, j’ai eu la puce à l’oreille et je n’ai plus jamais cessé de considérer cette piste comme essentielle. Déjà, en première candidature de philologie germanique aux Facultés universitaires Saint-Louis de Bruxelles, en 1974-75, j’avais eu l’audace de lier Héraclite, Goethe et Eliade, dans une exploration multidirectionnelle du mythe du feu, de la notion de l’éternel retour et du défi prométhéen. Je ne renie rien de cette ébauche de jeune étudiant, certes fort immature, mais néanmoins correcte dans son intention, corroborée a posteriori par des lectures plus savantes et plus attentives. Cette percée philosophique, plus acceptante et joyeuse que critique et rigoureuse, en direction de l’univers immense de l’extra-philosophicité avait déplu à la vieille fille lugubre et sinistre, décharnée et hagarde, qui pontifiait et pontifie encore et toujours dans cet établissement d’enseignement. Quelques jours avant la rédaction de ces lignes d’hommage à Eemans, un de ses étudiants me mimait ses grimaces coutumières, me paraphrasait ses tics langagiers ; en vingt-cinq ans, rien n’a changé : la pauvresse répète les mêmes bouts de phrases, prononce les mêmes salmigondis, n’a toujours pas écrit d’articles bien charpentés pour expliciter ses positions. Quel gâchis et quelle tragédie ! Elle devrait relire les textes de Nietzsche sur la sclérose des établissements d’enseignement : bonne thérapie du miroir. Outre l’ouverture à Hermès et la leçon d’Eemans, ponctuée de moqueries bien senties, deux livres m’ont aidé à poursuivre ces recherches, tout à la fois philosophiques et extra-philosophiques, toujours dans l’esprit d’Hermès : celui de l’Indien G. Srinivasan, The Existentialist Concepts and the Hindu Philosophical Systems (acheté à Londres en 1979 dans une librairie de la Gt. Russell Street, à un jet de pierre du British Museum) et celui de l’Américain John D. Caputo, The Mystical Element in Heidegger’s Thought, acquis à Bruxelles dix ans plus tard.

    «Fedeli d’Amore» et «Lumières victoriales»
    Corbin, collaborateur d’Hermès,  a exploré le mysticisme soufi et iranien pendant toute sa vie. Ses recherches ont certainement suscité quelques idées-forces chez Marc. Eemans. Corbin a étudié l’œuvre d’Ahmad Ghazâli, centrée autour de la notion de “pur amour”. Celle-ci a été reprise en Occident par Dante et ses Fedeli d’Amore, philosophes non abstraits, en route dans le monde, sous la conduite de l’Intelligence en personne (la “Madonna Intelligenza”). L’Amour qui compénétre tout, qui meut l’univers a toujours été une constante dans la pensée de Marc. Eemans, sans qu’il ait jamais négligé les amours plus charnels. “Nous étions de terribles hétéros”, déclarait-il, dans un entretien de 1990 accordé à Ivan Heylen, journaliste flamand de Panorama. Les “Platoniciens de Perse” avaient ouvert la pensée iranienne islamisée à la sagesse de l’ancien Iran avestique, retournant ainsi aux sources pré-islamiques et pré-chrétiennes de notre culture indo-européenne. Avec Sohrawardî, la pensée iranienne avait redécouvert la “haute doctrine de la Lumière”, une théosophie que l’on qualifie d’“orientale” par opposition à l’avicennisme occidental, devenu impasse de la pensée. Sohrawardî critiquait les péripatéticiens (disciples d’Avicenne) parce qu’ils limitaient les Intelligences, les êtres de lumière au nombre de dix (ou de 55) et s’appuyaient uniquement sur le raisonnement discursif et l’argumentation logique. C’est là une clôture qu’il convient de faire éclater, pour accepter la multitude de “ces êtres de lumière que contemplèrent Hermès et Platon, et ces irradiations célestes, source de la Lumière de Gloire et de la Souveraineté de Lumière (Ray wa Khorreh) dont Zarathoustra fut l’annonciateur”. Corbin parle à ce niveau d’une philosophie qui postule vision intérieure et expérience mystique, orientale (où l’“Orient” indique la voie et signifie concrètement l’ancienne Perse avestique). La vision intérieure permet à l’homme de capter ces “splendeurs aurorales”, expression du Flamboiement primordial, de la Lumière de Gloire (Xvarnah pour les Zoroastriens, Khorreh pour les Perses et Farr/Farreh  pour la forme parsie actuelle), cette énergie “qui cohère l’être de chaque être, son Feu vital, ses Lumières “victoriales”, archangéliques et michaëliennes (Michel étant l’Angelus Victor)”.
    Ce détour par Corbin (cf. Histoire de la philosophie islamique, Gallimard, 1964) explique le passage graduel qu’ont effectué Eemans (et Evola) en partant du dadaïsme et/ou du surréalisme pour aboutir aux Traditions, mais explique aussi l’engagement ultérieur d’Eemans et de Baert aux côtés du “Feu vital” qu’ils ont cru percevoir dans les nouvelles idéologies des années 30 en général et dans le national-socialisme en particulier (ses dimensions wagnériennes et ses “cathédrales de lumière”). Cette “vision aurorale” des Platoniciens persans, qui s’est identifiée chez nos deux intellectuels bruxellois au Reich du swastika de feu (dixit Montherlant dans Le solstice de juin), s’est terminée tragiquement pour Baert ; elle a laissé beaucoup de désillusions et d’amertume dans le cœur de Marc. Eemans. Dommage qu’il n’ait jamais parlé ni sans doute entendu parler de l’Ordre fondé par Corbin, le “Cercle Eranos” qui a duré jusqu’en 1988 et qui se voulait une “milice de vérité”, un “Temple”, une chevalerie zoroastrienne, où l’on retrouvait également Mircea Eliade... Corbin disait : «Eranos n’était possible qu’en un temps de détresse comme le nôtre… En un temps où toute vérité authentique est menacée par les forces de l’impersonnel, où l’individu abdique son devoir de différer devant la collectivité anonyme, où pour celle-ci l’individualité même signifierait culpabilité, nous aurons été du moins l’organe d’un monde qui depuis la “descente des Fravartis sur Terre” n’a pas succombé aux forces démoniaques, et nous aurons contribué à la traditio lampadis, parce que ce monde impérissable aura été notre passion…». Le Prof. Gilbert Durand, qui confesse avoir été actif dans les “rencontres d’Eranos” ajoute : Renversement radical du monde de détresse au profit de l’appel secret et permanent qu’est cet “envers des ténèbres”. Eemans a-t-il eu connaissance de ce “Cercle Eranos” ? Il ne m’en a jamais parlé mais c’eût peut-être été un havre pour lui, un espace de consolation dans l’adversité…
    Feu d’Héraclite, étincelle de Maître Eckhart, énergie de Schiller, élan vital de Bergson, lumière de la tradition ouranienne chez Evola, voilà autant de signes de la vitalité et de l’intensité impérissable des grands élans de la Tradition. C’est à ce monde-là qu’appartenait Eemans, c’est de ce monde-là qu’il avait la nostalgie, c’est de sa disparition qu’il souffrait, dans l’épaisseur sans relief du monde quotidien. Dans la recherche triviale mais nécessaire du pain quotidien  — sa hantise, sa cangue, il ne cessait de le répéter —, il sentait cruellement la blessure de l’exil. Un exil vécu dans sa propre patrie, gouvernée par des cuistres et devenue sourde à l’appel de tout Feu vital.
    Bon nombre de souvenirs se bousculent encore dans ma tête : son intervention vigoureuse pour clore le bec d’un médiocre et grossier contradicteur de Jean Varenne lors d’une conférence du GRECE-Bruxelles ; la rencontre avec Paul Bieh­ler, exégète d’Evola ; sa présence lors de la conférence de Philippe Baillet à la tribune d’EROE, chez le regretté Jean van der Taelen ; la soirée mémorable chez lui, après un séminaire du GRECE-Bruxelles sur la Sociologie de la révolution de Jules Monnerot (aussi un ancien du surréalisme), où son épouse Monique Crokaert m’a remis son recueil de poèmes, Sulfure d’Alcyone (d’où je tiens à extraire ces quelques vers :
    «Il fait soleil dans mon cœur.
    Je donne, je redonne, j’ai tout donné
    A celui qui m’aime et me vénère.
    Je l’ai quitté pour un temps d’évanescence.
    Je m’en veux.
    Mes pas sont des tendresses qui deviennent délires.
    J’aspire à sentir l’effluence de celui que j’aime»).
    Boisfort, Termonde, Saint-Hubert

    Ensuite, il y a eu les vernissages et les hommages officiels, celui de Boisfort en 1982 dans la superbe Chapelle de Boondael, pour le 75ième anniversaire d’Eemans, avec un discours de Jean-Louis Depierris et un autre de Jo Gérard, en la présence de l’inoubliable “Alidor”, alias “Jam”, dans le civil Paul Jamain, le caricaturiste le plus drôle et le plus féroce du XXième siècle en Belgique, le compagnon de Hergé avant-guerre, disparu en 1994, laissant orpheline toute la presse satirique du royaume. Ce jour-là, Alidor a été un formidable boute-en-train. L’hommage de sa ville natale, Termonde (Dendermonde) en 1992, pour son 85ième anniversaire, a été particulièrement chaleureux. Les drapeaux des XVII Provinces claquaient au vent, suspendus aux mats de l’hôtel de ville, dans un superbe jeu de couleurs chatoyantes. Eemans avait également organisé en 1992 une rétrospective Saint-Pol Roux (1861-1940) à Saint-Hubert dans les Ardennes. Le symbolisme de Saint-Pol Roux et sa volonté de représenter une réalité idéelle, son style sombre, fait de métaphores imagées à la façon du surréalisme, étaient autant d’éléments qui fascinaient Eemans. Il avait réussi à attirer vers cette manifestation des spécialistes français, britanniques et allemands de cet auteur né en Provence et mort en Bretagne. A 85 ans, Eemans était toujours sur la brèche, sur le front de la vraie culture, tandis que la culturelle officielle vaquait à ses vraies bassesses.

    Le dernier voyage
    J’ai appris le décès de Marc. Eemans en revenant de notre dernière université d’été à Trente au Tyrol et de celle qu’avait organisée Jean Mabire en Normandie, trois jours plus tard ; quelques instants aussi après avoir appris la disparition de Maurice Bardèche, également âgé de 91 ans. Mabire m’a dit à mon retour de son université d’été qu’il avait reçu la dernière lettre d’Eemans, un jour après sa mort. Preuve simple, et sublime dans sa simplicité, que la lucidité et la fidélité n’ont jamais quitté notre surréaliste réprouvé, qu’il tenait son courrier à jour, soucieux de semer et de semer encore, même en terre aride, jusqu’à son dernier souffle. Il a tenu parole. Là, dans ce qui n’est qu’apparemment un détail, est son ultime grandeur. Une semaine ou deux après mon retour de Normandie, son épouse Monique m’a averti personnellement, m’a dit qu’il nous avait définitivement quittés et elle m’a aussi annoncé que Marc avait souhaité la dispersion de ses cendres dans les eaux de l’Escaut ou de la Mer du Nord. Finalement, l’autorisation a été donnée de procéder à cette cérémonie peu fréquente, au large d’Ostende. Le rendez-vous fut fixé au 25 septembre 1998. Une cinquantaine d’artistes, d’amis et d’admirateurs ont pris place à bord d’un bateau, pour accompagner Marc. Eemans dans son dernier voyage. La mer et le ciel étaient merveilleux, ce jour-là, tout en tons pastel, un bleu-gris avec scintillements argentés pour les flots, un bleu d’une douceur caressante pour le ciel. Les cendres de Marc se sont écoulées vers la mer, frôlant la coque de bois du vieux bateau de pêcheurs, requis pour cette mission funéraire. Deux bouquets ont été lancés à l’eau l’un par les mains tordues de chagrin de son épouse et l’autre par un ami, plus ferme mais aussi très ému. Un autre ami a entonné le «J’avais un Camarade», avec la forte voix et l’inébranlable conviction qu’on lui connaît depuis toujours.  Le bateau a tourné deux fois autour des bouquets, lentement, exécutant deux vastes mouvements de circonférence, permettant à chacun de se recueillir, avec toute la sérénité qu’il convenait, avec cette Gelassenheit  que nous a enseignée Heidegger. Une très belle cérémonie. Inoubliable.
    Robert Steuckers  http://robertsteuckers.blogspot.com/