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économie et finance - Page 750

  • Pierre Jovanovic : Présentation du livre “le retour au standard or” d’Antal Fekete

    Les raisons pour lesquelles le standard-or va remplacer l’argent-papier, et pourquoi l’économie mondiale est condamnée à exploser.

    Le professeur Antal Fekete est un théoricien de l’or depuis quarante ans et forme les spécialistes du métal jaune des banques centrales. Dans ce livre, il explique les raisons pour lesquelles le système financier mondial se dirige vers l’explosion, comme un train lancé à toute vitesse et auquel on a enlevé les freins, alors que la presse tente de vous faire croire par tous les moyens que tout va bien.

    “Les économistes actuels sont des charlatans, des bonimenteurs qui, tout en se délectant de leur propre gloire, sont totalement incapables de prévoir un effondrement financier, même quand ils le regardent fixement dans les yeux, comme l’a montré leur misérable performance de 2007. Pire encore, ils sont même totalement incapables d’admettre leurs propres erreurs. Ils sont une malédiction jetée sur le corps politique et des verrues sur le corps académique. Ils conduisent le monde vers un désastre monétaire et économique sans précédent à la minute où je vous parle“.

    Pour le Pr Fekete, le système reposant sur la monnaie-papier (euro, dollar) est arrivé à son terme, exactement comme les billets de banque de John Law ont disparu en fumée sous Louis XV.

    Il explique aussi pourquoi Nicolas Sarkozy avait vendu l’or de la France de toute urgence alors que le cours était au plus bas en 2002, il est alors Ministre du budget, puis en 2010 ds l’intérêt des USA pour soutenir le dollar ‘un acte imbécile’ dit l’auteur. Dans le même temps, les USA ne vendirent aucun gramme d’or. Cet or a disparu chez des personnes privées. Il n est plus mobilisable en cas de crise majeure comme aujourd’hui.

    Mr Fekete prédit même : un jour viendra pour N. Sarkozy de faire comme John Law avant lui qui avait tenté de fuir Paris comme un voleur et déguisé en femme.

    Dans la crise actuelle de l’or, ns retrouvons 2 acteurs centraux de la crise des produits dérivés JP Morgan et la Deutsch Bank, grandes détentrices d’or tandis que d autres banques st incapables de rembourser à terme les contreparties en or.

    Aujourd’hui, toutes les grandes banques sont insolvables et maquillent la réalité.

    Il note que “la destruction de l euro, puis celle du marché commun vont appauvrir tous les européens. Il y aura toujours plus de chômage, de faillite, moins d’ordre et de respect des lois et envisage une guerre civile“. Pour lui, l’or est un formidable extincteur de dettes mais les gouvernements interdisent son utilisation.

    Antal Fekete est né à Budapest en 1932. Diplômé en mathématiques de l’Université Lorant Eötvös de Budapest en 1955, il a quitté la Hongrie dans le sillage du soulèvement de 1956 réprimé par les forces d’occupation soviétiques. Émigré au Canada, il a été nommé en 1958 professeur à la Memorial University de Terre-Neuve, poste qu’il occupa jusqu’en 1993. Dans ce cadre, il a également été « professeur invité » à Columbia ( 1961 ), au Trinity College de Dublin ( 1964 ), Acadia University Wolfville Nouvelle-Écosse ( 1970 ) et à Princeton ( 1974 ) où il a rencontré Paul Volcker, futur patron de la Fed. Depuis 2000, il a été professeur au Intermountain Institute for Science and Applied Mathematics, Montana et a donné des cours dans le cadre de sa Gold University, afin d’expliquer au monde entier que le système économique va à sa ruine si on ne réinstalle pas une forme de standard or au plus vite. À partir de 2009, il a commencé à enseigner à Munich à la New Austrian School of Economics. Ses séminaires privés sont suivis par les responsables des plus grandes banques centrales et hedge funds qui utilisent l’or comme investissement.

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  • Introduction à l’économie moderne de Georges Sorel

    Georges Sorel (1847-1922) est un philosophe et sociologue français. Polytechnicien, ingénieur des Ponts et Chaussées, il publie différentes études sur des questions de météorologie, d’architecture, de physique, mais aussi d’histoire politique et religieuse. Ce n’est qu’assez tardivement, à 46 ans, que, démissionnant de son poste à Perpignan, il s’installe à Paris et que, prenant appui sur ses lectures de Proudhon, Marx et Bergson dont il suit les cours au Collège de France, il affirme son engagement socialiste et marxiste.

    Dans son Introduction à l’économie moderne, édité pour la première fois en 1903, Georges Sorel s’arrête sur différentes thèses, présente les penseurs et précurseurs de la science économique, prend parti dans leurs controverses, livre ses réflexions. Il ne s’agit donc pas tant d’une simple introduction à l’économie que d’une introduction commentée à l’économie moderne.

    Sorel s’interroge sur les interactions entre le droit et la propriété, de ces dernières avec la liberté, la constitution de la famille ou l’héritage. Ces questions fondamentales s’articulent avec celles concernant les rapports de la production et de la consommation : coopératives paysannes ou coalitions commerciales, mais aussi caisses de secours et de retraite. Surtout, au-delà des considérations économiques, il pose la question de la place de l’homme : « ce n’est point pour les artisans que cette socialisation est faite, mais pour les forces de travail, pour des abstractions d’hommes. »

    ll faut, nous dit-il « séparer la production et tout ce qui se rapporte à l’échange » car sinon, « au lieu de changer l’organisme vivant on se borne à améliorer l’appareil mécanique dont il se sert ; - on passe de la transformation par le changement du principe fondamental au perfectionnement empirique de ce qui est étranger au principe de la société.  »

    Il ne peut se résoudre à ce dévoiement et fustige les philanthropes qui ne cessent de répéter « qu’il faut rendre à la consommation son pouvoir directeur  ; de pareils sentiments sont naturels chez ces personnes qui, recevant des rentes, des traitements ou des honoraires, vivent en dehors du pouvoir productif  ; elles ont pour idéal la vie de l’oisif lettré. Tout autre est l’idéal socialiste. »

    Plus d’un siècle après lui nous pourrions dire de même, à une nuance près : par cette logique de la consommation, l’oisif est devenu illettré.

    http://www.egaliteetreconciliation.fr/

  • Objectif final du marché : la naissance d’une société décervelée

    L’âme du monde est devenue marchande avec, partout sur la planète, une offre illimitée de produits et de services qui s’adresse à des individus avides de consommation que la baisse des inégalités mondiales plonge dans le grand bain de l’hyperconsommation. Le monde est devenu ce « grand marché unique » dont rêve depuis toujours le « capitalisme total ».

    Les nouveaux libéraux, vainqueur par k.o. depuis la chute du Mur de Berlin, du bien médiocre adversaire que fut le « socialisme total » des anciens collectivistes, refusent aujourd’hui que le capitalisme continue comme avant, sur un mode fordien, uniquement productiviste et quantitatif, sans ambition esthétique. Longtemps accusé de répandre la laideur des usines et des objets, ce vieux capitalisme subit des métamorphoses constantes qui l’éloignent sans cesse de l’image lourde des modes de production anciens qui ont ravagé la beauté des villes et des paysages.

    Aujourd’hui, il est faux de dire, comme le prétendent Bernard Maris et Gilles Dostaler, dans leur essai Capitalisme et pulsion de mort, que « la beauté ne fait pas partie du plan capitaliste ». Rien n’était plus laid que l’usine et l’objet communistes. Bien au contraire, le capitalisme est devenu « artiste », comme le démontrent Gilles Lipovetsky et Jean Serroy, dans leur dernier livre L’Esthétisation du monde : « c’est un mode de production esthétique qui définit le capitalisme d’hyperconsommation ».

    L’objet industriel s’éloigne de sa fonction purement utilitaire pour entrer dans la sphère de l’art. L’industrie et les services deviennent des machines à produire du beau. Icône de la haute couture, incarnation du Beau, Yves Saint-Laurent est convoqué dans une publicité pour parler de la DS3, prolongeant ainsi le coup d’éclat des Citroën Picasso. Le stockage des fichiers informatiques se fait dans « les nuages » avec le « cloud ». Les designers comme Philippe Starck relookent les objets, les restaurants, les hôtels. Tel est l’impératif stratégique du capitalisme moderne : « le style, la beauté, la mobilisation des goûts et des sensibilités ».

    En s’emparant de la notoriété globale des formes et des couleurs de l’art, le capitalisme moderne participe à l’esthétisation de la consommation de masse et à la démocratisation du Beau. Se pose alors non plus la question marxiste du confort matériel « bourgeois », mais celle, plus complexe, que nous tendent les pièges du capitalisme artiste. Longtemps perçu comme un « être social » inscrit dans une lutte des classes, l’individu est aujourd’hui un « être unique » détaché du collectif et qui accepte de vivre le surgissement anarchique du moi.

    Il ne veut plus vivre par procuration à travers des discours extérieurs qui lui proposent des normes collectives comme la politique, la religion, le syndicalisme, la morale. Le capitalisme artiste définit des nouveaux modes de vie dont la compréhension échappe aux derniers gardiens du monde ancien. Signe de cette évolution : la dépolitisation de la société.

    Le confort matériel était l’argument du capitalisme ancien, le désir est le moteur du capitalisme postmoderne dans une société fragmentée à l’intérieur de laquelle chaque individu, comme le prophétisait l’artiste américain Andy Warhol dès 1968, cherche à vivre ses « 15 minutes of fame », c’est-à-dire son « quart d’heure de célébrité »… Le « grand soir » collectif et marxiste s’est effondré dans les sables mouvants du postmodernisme pour laisser la place à la recherche du « quart d’heure de célébrité » proposé par le capitalisme artiste qui génère ainsi une société de l’hyperindividualisme.

    L’homme ne veut plus vivre au garde-à-vous devant les catéchismes figés des normes collectives. Choisissant de vivre sa singularité, il accepte de succomber aux tentations d’un hédonisme de pacotille que lui propose la société marchande. Le capitalisme ancien trop visiblement inégalitaire, avait pour effet la mobilisation des individus qui s’engageaient dans un combat collectif contre l’exploitation. Plus subtil, le capitalisme postmoderne isole les individus en répondant à une demande croissante de satisfactions égoïstes.

    Le progrès que représente le confort matériel ne suffit plus. La société marchande ne vend plus des objets, des services, elle vend du rêve. Le moindre objet transcende sa médiocrité utilitaire et sa mauvaise qualité dans une esthétisation forcée. L’univers consumériste propose un bonheur immédiat en déployant dans tous les domaines la séduction du style. Il reste des individus déboussolés, qui avancent comme hébétés dans les allées des nouveaux temples d’un Beau prolétarisé que sont les grands centres commerciaux.

    L’adhésion massive à ce Beau médiocre traduit la déchéance intellectuelle d’une société dépolitisée qui ressemble de plus en plus à cet univers concentrationnaire que dénonce Aldous Huxley dans son roman prophétique Le meilleur des mondes. En s’appropriant le Beau, le marché réalise son objectif final : la naissance d’une société décervelée.

    Le nouvel Economiste  http://fortune.fdesouche.com/

  • Edouard Balladur soupçonné de détournement de fonds publics

    PARIS (NOVOpress) – Le parquet de Paris a conforté les soupçons de malversations entourant le financement, en 1995, de la campagne présidentielle d’Edouard Balladur (photo), en élargissant l’enquête à un éventuel « détournement de fonds publics » afin d’approfondir les investigations sur le financement de sa campagne en 1995. Les témoignages et documents sur le financement de la campagne présidentielle d’Edouard Balladur s’orientent vers deux directions : le détournement de commissions sur des contrats d’armement et les fonds spéciaux distribués par Matignon en argent liquide à l’ensemble des ministères.

     

    L’homme d’affaires Ziad Takieddine a récemment affirmé que des versements d’argent pour la campagne d’Edouard Balladur provenaient des commissions perçues au titre de son intervention dans les contrats d’armement conclus en 1994 avec le Pakistan pour des sous-marins et l’Arabie Saoudite pour des frégates. Parallèlement à ces informations, plusieurs témoins ont évoqué devant les juges la piste des fonds secrets. Notamment, l’ex-trésorier d’Edouard Balladur, René Galy-Dejean. Il avait affirmé fin 2012 que l’argent liquide versé sur le compte de campagne ne provenait pas des meetings mais des fonds secrets. Depuis des décennies, la République française s’enfonce dans les magouilles, qu’elle soit dirigée par la droite comme par la gauche.

    http://fr.novopress.info/

  • Detroit hideuse banqueroute de la gauche

     

    Detroit-130722

    La faillite de Detroit, officiellement annoncée le 17 juillet sera difficilement comprise par l'opinion hexagonale. Et pour cause.

    Cette ville représentait un cas d'école de la politique de gauche aux États-Unis. (1)⇓ Aujourd'hui elle paye le prix de 50 années de contrôle par les partisans de l'étatisme et par les bureaucraties syndicales, qui ont fait d'une grande ville américaine un champ de ruines.

    Ne nous étonnons pas si, par conséquent, les homologues français des banqueroutiers cherchent à expliquer autrement la déconfiture, en feignant de n'en remarquer que ses conséquences dommageables. Et en l'imputant aux affreux ressorts de l'économie de marché.

    L'Huma du 21 juillet 2013 donne ainsi comme d'habitude le ton. Le journal communiste prétend fournir "les trois raisons de la faillite de Detroit : la désindustrialisation (…) ; le 'white flight' ou l’exode des classes moyennes" (…) et… l’inaction de l’État du Michigan et du gouvernement fédéral"

    Commentaire encore plus typique : celui de "Solidarité et Progrès", surenchérissant dans la bêtise le 22 juillet : "les emprunts toxiques m'ont tuer". Les esprits faux confondent toujours joyeusement les causes et les effets. Ainsi, l'usure ne crée jamais elle-même le surendettement. Les 18 milliards de dollars de dettes sous lesquels cette municipalité s'est effectivement écroulée, n'ont pas été produits par les conditions d'emprunts. Ceux-ci n'auraient jamais dû être contractés, certes, mais ils n'ont jamais fait qu'aggraver la gabegie. Nombre de collectivités locales françaises ont subi le même phénomène, plombant la banque Dexia instituée précisément pour assurer ces financements contraires à l'ordre naturel.

    Ce que l'Huma appelle 'white flight' c'est-à-dire la fuite des ouvriers blancs, hors des faubourgs de l'assistanat, n'est que le produit de la gestion laxiste et faussement "sociale" de services publics devenus parallèlement inexistants et coûteux. Malgré son déclin démographique, lent et régulier depuis un demi-siècle, Detroit comptait encore 1 fonctionnaire municipal pour 55 habitants contre 115 pour la ville comparable d'Indianapolis.

    Attendons-nous donc à ce discours préfabriqué. On va l'entendre partout, sous des formes plus ou moins édulcorées : c'est la faute à l'ultra libéralisme.

    13725-henry-fordEn fait l'essor et la prospérité de Détroit auront été produits par la libre entreprise. En 1903 Henry Ford y fonde sa compagnie ; en 1908, General Motors, suivi en 1925 par Chrysler. C'est l'époque glorieuse du fordisme, fondé sur l'organisation rationnelle du travail et sur le compromis salarial en relation directe avec la productivité. Bien entendu cette médaille n'est pas dépourvue de revers, et Céline lui consacre un texte célèbre. (2)⇓

    À partir des années 1930, l'agitation marxiste en fera la capitale du syndicalisme : en 1935, fondation de l’United Auto Workers (UAW) ; en 1937 General Motors et Chrysler cèdent devant les grèves. Ford tiendra le choc quelque temps. (3)⇓ Mais en 1941 une première "convention collective" est signée.

    Après la guerre le système américain limite administrativement les augmentations de salaires. Ceci conduit les grandes entreprises à créer des "avantages sociaux". Elles développent notamment les "retraites maison" qui vont durablement plomber les comptes de production.

    Dans les années 1950 Detroit paraît encore une très grande ville américaine. Son influence culturelle n'est pas négligeable. Mais son déclin matériel a déjà commencé : elle perdra 60 % de sa population en 60 ans, passant de 1,8 million d'habitants en 1950 à 702 000 en 2010. D'autres paramètres aggravent le score : taux de chômage, gestionnaires corrompus, absence de couverture des régimes de pensions. L'ancien maire Kwame Kilpatrick, un politicien du Parti Démocrate, comme d'habitude, poursuivi pour fraude sous 24 chefs d'inculpation. La criminalité galopante, aggravée par l'existence de 78 000 immeubles réduits à l'état de squat, se traduit par un appel d'urgence toutes les 58 minutes.

    Aujourd'hui le déclin de cette collectivité semble irrémédiable sauf à prendre des mesures radicales d'assainissement rendues incontournables par le chapitre IX de la loi sur les faillites.

    Observons ici que cela ressemble beaucoup à ce que le "modèle français" de la sécurité sociale en général, et en particulier des retraites dites par "répartition" (un mot qui ne veut rien dire) est parvenu à réaliser au niveau de la nation, – et pas seulement dans l'industrie, mais aussi dans l'agriculture, l'hôtellerie-restauration, les métiers d'art etc. – détruisant ainsi toute la filière du "fabriqué en France". (4)⇓
    JG Malliarakis http://www.insolent.fr/

    Apostilles

    1. cf. la chronique de la "Heritage Foundation" en date du 22 juillet
    2. cf. dans le Voyage au bout de la nuit : "Et j’ai vu en effet des grands bâtiments trapus et vitrés, des sortes de cages à mouches sans fin dans lesquelles on discernait des hommes à remuer, mais à remuer à peine, comme s’ils ne se débattaient plus que faiblement contre je ne sais quoi d’impossible. C’était ça, Ford ?"
    3. cf. 26 mai 1937 : "bataille de l’Overpass", où les syndicalistes "maison" de Ford rossent copîeusement les agitateurs de l’United Auto Workers, devant l’usine de River Rouge à Dearborn.
    4. cf. La Sécurité sociale et comment s'en sortir" par Georges Lane.
  • Le Siècle Post-Européen

    Les exactions soutenues des croisades de l’austérité financière transatlantique continuent de manufacturer leurs pathologies en Europe en imposant une nouvelle grammaire de la croissance pour l’avenir du vieux continent. Aujourd’hui, à l’instar d’une pilule du lendemain, l’austérité financière se vend bien comme l’ultime alternative pour une relance économique. L’argumentaire tout trouvé consiste à postuler que bien que nous soyons sortis de la récession, nous subissons les effets d’une dépression déflationniste. On rassure que les obligations de la dette seront honorées. Concomitamment, les salaires sont en chute libre, la spéculation immobilière a retrouvé sa vitesse de croisière. Pendant ce temps, le coût réel de la vie connait une hausse notoire quand bien même il faut paradoxalement dégager des revenus pour le service de la dette. Un truisme qui ne souffre pas de propagande. Le service de la dette est en passe de phagocyter les autres activités économiques, voire, l’investissement indispensable pour les générations futures.

     

    Les djihadistes de l’austérité financière ont réussi à coloniser le discours public de leurs maître-récits d’une économie des agonisants. De fait, ils semblent, à ne point s’y méprendre, des serviteurs dociles des intérêts des créanciers internationaux. Pour illustration, gouvernements de centre-droit ainsi que leurs alliés dans le business international instrumentalisent la crise fiscale à desseins pour opérer des coupes sombres dans les dépenses sociales bien que celles-ci n’ont aucun rapport avec les causes de la récession. Ce compromis tacite avec les créanciers internationaux contribue doublement à la marginalisation de l’Europe dans les relations internationales, d’une part, tout en tissant le lit d’une dynamique d’insécurité humaine et de retrait stratégique et économique pour le continent, d’autre part. Le retrait programmé de l’Europe du centre du monde va au-delà d’une simple crise de l’eurozone. L’Europe semble avoir renoncé à ses grandes ambitions de locomotive économique du monde pour enfiler le brassard de capitaine de la micro-finance des agonisants.

     

    Du Miracle Economique à la Micro-Finance des Agonisants

     

    Après la Seconde Guerre Mondiale, la dette publique Américaine dépassait 120% de son PIB. Contrairement aux dogmes des élites financières en vogue aujourd’hui, la dette Américaine ne fut pas une menace à la prospérité économique des Yankee. Bien au contraire, l’Amérique choisit de vaincre la dette, non par des mesures punitives d’austérités financières, mais plutôt par une libération de son génie économique par le recours à l’innovation industrielle. Fidèle à son passé, l’économie Américaine est sortie du creux des turbulences économiques après le plan de stimulus de l’ordre de $775 billions de dollars lancé par le président B. Obama en 2008.

     

    Contrairement aux USA, la Grande Bretagne et certains pays en Europe ne sont pas encore sortis de la récession en dépit de leur programme d’austérité. En 2010, le gouvernement du Premier Ministre Britannique, David Cameron, a choisi d’opérer des coupes sombres budgétaires dans les bénéfices de santé et les aides sociales. George Osborne, le chancellier du trésor britannique annonça une mesure d’austérité de l’ordre de £83 milliards de compression budgétaire. Ces mesures d’austérité ont coûté 200.000 jobs dans la construction et la maintenance de l’immobilier en 2011. Dans les rues de Londres, on estimait que le nombre de jeunes sans abri a connu une hausse de 32% entre 2010 et 2011. L’Irlande pour sa part, enregistrait 68% de hausse des sans-abri. Tandis que Barcelone connaissait 31% de sans-abri entre 2008-2013. Le Portugal comptabilisait 25% d’augmentation de sans-abri entre 2007-2011. En Grèce, Le taux de sans-abri a connu une hausse de 25% entre 2009 et 2011.

     

    Le choix de mesures punitives d’austérités ont des répercussions graves sur la qualité de la santé publique et de la sécurité humaine. Pour sa relance économique, la Grèce s’est vue imposée les plus larges coupes draconiennes en Europe depuis la Seconde Guerre Mondiale. Rien qu’en 2009, le budget de santé publique en Grèce a connu un effondrement de €24 milliards d’euros à près de €16 milliards d’euros. Traduites en coût humain, ces mesures autoritaires se sont illustrées, entre janvier et mai 2011, par une hausse de 52% du taux de seropositivité dans la pandémie du VIH/Sida. La Grèce a opéré des coupes radicales dans son budget de santé publique sous la pression du Fonds Monétaire International et de la Banque Centrale Européenne. Entre juillet et août 2010, la Grèce a vu l’apparition, la plus large en Europe depuis 1996, d’une épidémie du Virus du Nil Occidental. Aujourd’hui, nous assistons au retour de la malaria, de l’augmentation du taux de suicide et des homicides en Grèce. Ces regressions brutales dans la sécurité humaine ont été largement occultées par la littérature fiscale et les plans de redressement économique. Elles ont eu pour effet de masquer le fait que l’Europe tout lentement est en train de s’exclure du centre du monde. 

     

    Le Traité de Lisbonne de 2007 posait les jalons d’une Europe comme marché mondial le plus compétitif. Le rêve européen d’une économie de la connaissance apporterait caution à la qualité de son capital humain, liquidant ainsi de sa zone les bas salaires. L’absence d’une Europe de la recherche scientifique et de l’innovation technologique ou d’une eurozone de l’énergie et de l’environement sonne en faux contre les lyriques élitistes de l’Union. Les grands maux de l’Europe ne sauraient se décliner grosso modo en ce double handicap historique souvent relayé par la presse : les crises budgétaires et le financement du bien-être social. L’Europe a perdu le centre du monde par son auto aliénation par rapport à sa responsabilité financière, économique, politique et démographique.

     

     

     

    La Vieille Europe Demilitarisée et Désargentée

    L’Europe représente ¼ de la production écononomique mondiale. Elle se pose comme le plus large partenaire économique des USA avec plus de $600 milliards de commerce annuel. Mais le piédestal économique de l’Europe prend appui sur du sable mouvant. Avec ses 500 millions d’habitants, la population Européenne est sur une forte pente de vieillissement démographique. D’ici 2050, le ratio des retraités relativement à la classe des travailleurs va simplement doubler de 0.54. Dans la même période, la population européenne va décliner de 20 millions, avec pour corollaire, un déséquilibre de la stabilité fiscale du continent. Les pensions retraites généreuses, la faible mobilité du travail, l’hostilité contre l’immigration comme gage de renouvellement démographique ainsi que le système exorbitant de taxation provoqueront un déclin significatif du rayonnement économique en Europe. L’exit de l’Europe du centre économique mondial s’accompagnera de sa marginalisation diplomatique et militaire.

    Aujourd’hui, semblent tournées définitivement les pages où l’Europe était au centre de la diplomatie mondiale et du théâtre des deux grandes guerres mondiales ainsi que des programmes de reconstruction post-crise. Avec un budget de défense de l’ordre de $250 milliards par an, l’Europe compte environ 2 millions de troupes bercées dans l’ambiance d’une culture largement anti-militaire, faute d’ennemis. L’armée continentale manque de pertinence en ce sens qu’elle n’a pas les moyens d’une auto-projection en dehors de l’Europe continentale. Le rêve d’une politique commune de défense européenne se heurte à l’insularité particulière des entités nationales. En matière de défense, les forces spéciales européennes manquent de vision commune stratégique géopolitique autant pour le continent que la stabilité du monde. Ce qui la rendrait quasi-amorphe et assoupie, pour ne pas dire vulnerable.

     

    Aujourd’hui, la vieille Europe se métamorphose progressivement en une relique de musées de luxe à contempler pour les touristes Asiatiques. Le siècle post-européen a rattrapé le vieux continent ! L’Europe gagnerait cependant l’absolution des pays émergents en tempérant ses programmes austères par un allègement de la dette et par le choix d’une politique plus attrayante de nouveaux investissements. Cette stratégie ne peut être efficiente que si elle intègre l’européanisation des politiques fiscales et d’investissements dans sa zone pour freiner son expulsion forcée du centre du monde.

     

     

     

    Narcisse Jean Alcide Nana, International Security Studies

     

    Bibliographie 

    - Richard N. Hass, Foreign Policy Begins At Home : The Case For Putting America’s House In Order (New York, Basic Books, 2013)

     

    - Robert Kuttner, Debtor’s Prison : The Politics of Austerity Versus Possibility (New York, A. Knopf, 2013)

     

    - David Stuckler & Sanjay Basu, The Body Economic, Why Austerity Kills : Recessions, Budget Battles, and The Politics of Life and Death (New York, Basic Books, 2013)

    http://www.agoravox.fr

  • Quand le poulet brésilien s’invite dans les plats bretons

    GUINGAMP (NOVOpress Breizh) – Les aviculteurs de la Coordination Rurale des Côtes-d’Armor n’en sont pas encore revenus. Lundi dernier, lors d’une visite à Farmor,  une entreprise de Guingamp qui fabrique des plats préparés, ils ont découvert que 90 % des poulets stockés dans les chambres froides étaient de provenance étrangère.

     

    La délégation de la Coordination rurale (CR) a été reçue par le directeur du site, qui s’est dit très attaché à la traçabilité et l’origine des viandes – insistant notamment sur le fait que 40 % de la volaille utilisée provient de France, le reste étant des volailles importées.

    Un calcul apparemment très optimiste, puisqu’en réalité, comme l’a démontré la visite qui a suivi, il est apparu que 90 % du poulet en stock ce lundi, provenaient du Brésil, des Pays-Bas ou de Thaïlande. Selon la CR, seuls quelques cartons, sans étiquettes d’origine, provenaient, aux dires du directeur, de l’abattoir Bocher, appartenant aussi au groupe Sofiprotéol, à Mur-de-Bretagne.

    Farmor, rappelle le syndicat paysan, « est une filiale de Glon Sanders, elle-même détenue par Sofiprotéol, société présidée par Xavier Beulin (qui est aussi accessoirement président de la FNSEA, syndicat qui se targue de défendre les agriculteurs !). »

    La Coordination rurale affirme qu’« au vu de la situation dramatique des aviculteurs français, [il] trouve intolérable que Sofiprotéol, financée par des cotisations “volontaires obligatoires” prélevées aux agriculteurs, n’impose pas à ses filiales de privilégier l’utilisation de poulets bretons au lieu d’utiliser massivement du poulet d’importation. »

    Rappelant que « les intégrateurs ont déjà imposé aux éleveurs des baisses de prix de reprise des volailles de 50€/Tonne en début d’année. [Que] cette course au prix toujours plus bas est fatale [et qu’on] s’achemine vers des cessations massives », les aviculteurs bretons affirment qu’ils « ne veulent pas jouer le rôle de variable d’ajustement » et qu’« ils ne se laisseront pas faire ! » Un dossier de plus pour Messieurs Le Foll et Montebourg.

    http://fr.novopress.info/

  • Faut-il continuer à subventionner le travail par les impôts ? (arch 2010)

    17 % des salariés du secteur marchand, contre 11 % seulement il y a vingt ans, sont payés au SMIC. Non rebuté par des fraudes massives en raison de la médiocre sécurisation du dispositif, le gouvernement Villepin a décidé de revaloriser la Prime pour l'emploi (PPE) afin qu'elle arrive à représenter jusqu'à un treizième mois pour un salarié rémunéré au SMIC. Cette prime aurait pour but d'inciter les chômeurs à reprendre un emploi. en leur assurant un revenu global supérieur, à la fois au salaire minimum mais surtout aux minima sociaux.
    En réalité, en faisant payer cette prime par les contribuables, le gouvernement reconnaît que, sans ce coup de pouce fiscal, d'une part, le SMIC ne constitue plus un minimum vital décent, d'autre part, les entreprises ne peuvent plus verser davantage à leurs travailleurs les moins qualifiés. C'est sans doute vrai pour celles qui sont en concurrence directe avec l' économie mondialisée. Pour les autres, c'est plus discutable.
    Une première question se pose : cette prime évaluée à 4 milliards est-elle efficace ? Certes, elle améliore un peu la vie des smicards, mais contribue-t-elle vraiment au retour à l'emploi ? A-t-elle un impact sur la consommation de produits nationaux et donc sur le chômage ?
    Dans la foulée, le gouvernement qui n'a de cesse d'augmenter les prélèvements sur les particuliers - on peut s'attendre à une flambée des impôts après les élections présidentielle et législatives de 2012 quels que soient les vainqueurs ! - annonce la suppression des charges sociales au niveau du SMIC pour les entreprises de moins de 20 salariés pour un coût estimé à 640 millions. Rappelons que 19 milliards sont déjà mobilisés pour compenser la baisse des charges sociales au bénéfice des entreprises dont les rémunérations de leurs salariés sont égales ou légèrement supérieures au SMIC...
    Là encore, connaît-on les effets des baisses de charges dont le coût fiscal cumulé à celui de la PPE équivaut à environ la moitié des recettes de l'impôt sur le revenu ?
    Est-il viable et légitime de subventionner le travail ? Sans la PPE, compte tenu du faible écart entre le SMIC et les minima sociaux, parmi les 9 millions de salariés au SMIC, combien n'iraient pas travailler ? Est-il sain que 7 millions de salariés supplémentaires soient tributaires des baisses de charges dont le coût s'élève, insistons encore, à 19 milliards ?
    Faire subventionner le travail de 16 millions de salariés démontre-t-il que l'économie française n'est plus compétitive ou les syndicats patronaux sont-ils si persuasifs qu'ils réussissent à faire financer par les contribuables, sous forme d'impôts qui ne servent plus à la consommation ou à l'investissement, des charges que les entreprises devraient supporter seules ?
    La "smicardisation" des salariés, paupérisation institutionnalisée, synonyme de démotivation au travail et d'insécurité sociale, semble ainsi en voie d'accélération. Certains affirment que, très vite, un salarié sur cinq devrait être concerné. Et comme la pression des économies dans lesquelles les salariés sont payés à un niveau ridicule par rapport au SMIC ne se relâche pas, les salaires français continueront inexorablement à être tirés vers le bas. Sans que la position de l'économie française retrouve de la vigueur sur les marchés extérieurs. La production industrielle française s'essouffle selon l'Insee.
    Avec le chèque-transport, le gouvernement, une nouvelle fois, se propose d'accroître le pouvoir d'achat des salariés. Pour mettre un baume sur les plaies créées par les fluctuations du prix du pétrole, donc de l'essence à la pompe, l'Etat veut partager la facture du chèque-transport avec les entreprises volontaires. Comment l'Etat financera-t-il les 55 millions au titre du chèque-transport, dont 20 millions pour celui qui sera accordé à l'ensemble des agents de l'Etat, sinon par des prélèvements ou de l'endettement ? Décidément, depuis trente ans, rien ne change. Le pouvoir d'achat ne peut progresser sans création de richesse nouvelle. Il faut permettre aux salariés, dans les secteurs où l'économie est encore active, de travailler au delà de 35 heures, de faire des heures supplémentaires. Ce sont ces heures-là qu'il faut exonérer. Ou bien alors, puisque personne n'ose proposer que l'Europe se protège à ses frontières par des droits douaniers adaptés, que l'on ait donc le courage de dire aux salariés européens qu'avant que les rémunérations des salariés indiens, chinois, brésiliens ne rattrapent les leurs, ils devront concevoir et accepter de voir baisser leurs salaires au niveau de ceux des travailleurs de Chine par exemple.
    Pierre PERALDI RIVAROL  28 MAI 2010 

  • 26 juillet 2013 : jour de libération fiscale

    Le salarié moyen travaille jusqu'au 26 juillet pour financer les dépenses publiques, «jour de libération fiscale et sociale», calculé par Ernst & Young et l'Institut économique Molinari (lire l'étude en pdf de 22 pages). L'étude prend en compte les charges sociales patronales, les charges sociales salariales, l'impôt sur le revenu et la TVA, comparés dans 27 pays. Seule la Belgique fait pire avec un taux de prélèvements obligatoires de 60,3 % contre 56,6 %.

    L'étude constate que le salarié français est en théorie «un des mieux payés» (53 647 euros), mais c'est aussi celui dont le niveau de vie est le plus pénalisé par la fiscalité. Impôts, charges et TVA s'élèvent à 30.371 euros. Et, à elles seules, les charges sociales (26.583 euros) représentent plus que le pouvoir d'achat (23.276 euros). Et cela alors que les comptes publiques ne sont pas à l'équilibre !

    Et ce n'est pas terminé : une nouvelle hausse des impôts est prévue en 2014.

    Les employeurs Belges et Français doivent débourser 252 et 230 € pour que leurs salariés moyens disposent de 100 € de pouvoir d'achat. À l'opposé, les employeurs du Royaume‐Uni, d'Irlande ou de Malte peuvent se contenter de distribuer entre 157 et 125 € pour générer 100 € de pouvoir d'achat réel.

    http://www.lesalonbeige.blogs.com/

  • “La décroissance permet de s’affranchir de l’impérialisme économique”

    Entretien avec Serge Latouche, professeur émérite d’économie et un des principaux inspirateurs du mouvement de la décroissance. Il retrace ici les racines de la décroissance, entre Club de Rome, Yvan Illich et André Gorz.

    Quelle est votre définition de la décroissance ?

    C’est très difficile de définir la décroissance car je considère que ce n’est pas un concept, c’est une bannière, un drapeau. Pour moi, c’est un mot d’ordre qui permet de rallier les objecteurs de croissance. C’est aussi un horizon de sens vers lequel chacun chemine comme il l’entend.

    La décroissance permet surtout de s’affranchir de la chape de plomb de l’impérialisme économique pour recréer la diversité détruite par l’occidentalisation du monde. Elle n’est pas à proprement parler une alternative, mais plutôt une matrice d’alternatives: on ne va pas construire une société décroissance de la même façon au Chiapas et au Texas, en Amérique du Sud et en Afrique… Il y a des histoires et des valeurs différentes.

    Avec la décroissance, on n’est plus dans l’intérêt, l’égoïsme, le calcul, la destruction de la nature, dont l’homme serait maître et possesseur, ce qui définit le paradigme occidental. On veut vivre en harmonie avec elle et, par conséquent, retrouver beaucoup de valeurs des sociétés traditionnelles. On sort aussi de la vision « économiciste » de la richesse, de la pauvreté, de la rareté.
    D’où l’idée d’« abondance frugale », qui semble être un oxymore du fait de la colonisation de notre imaginaire, mais qui dit en réalité qu’il ne peut y avoir d’abondance sans frugalité et que notre société dite d’abondance est au fond une société de rareté, de frustration et de manque.

    La décroissance implique aussi évidemment une autre répartition des richesses, une autre redistribution, le changement des rapports de production, une démondialisation, pas seulement économique – à la Montebourg –, mais aussi culturelle. Il faut retrouver le sens du local et, naturellement, réduire notre empreinte écologique, réutiliser, recycler, etc., ce que l’on a définit par les « 8 R ».

    Quelle est l’histoire de la décroissance ?

    Serge Latouche - L’histoire de la décroissance, en tant qu’étiquette, est très brève. Cette appellation a été inventée dans les années 2000 par des « casseurs de pub ». Elle a pour fonction de casser la langue de bois. Comme le dit Paul Ariès, c’est un « mot-obus ». Mais derrière ce mot, il y a tout un projet d’objection de croissance. Et ce projet a une assez longue histoire.

    Elle débute en 1972 avec la publication du rapport au Club de Rome Les limites de la croissance. En tant que projet de société socialiste anti-productiviste et anti-industraliste, la décroissance est alors proche de l’écosocialisme qui apparaît dans les mêmes années avec André Gorz. Cette première phase de la décroissance est essentiellement une phase de critique de la croissance : on veut l’abandonner car elle n’est pas soutenable. C’est une phase « écologique ».

    Mais un second courant, porté par Ivan Illich – qui a d’ailleurs refusé de participer au Club de Rome –, est apparu en disant que ce n’est pas parce que la croissance est insoutenable qu’il faut en sortir, mais parce qu’elle n’est pas souhaitable !

    C’est la critique du développement – terme que l’on utilise dans les pays du Sud comme équivalent de la croissance au Nord –, c’est le mouvement post-développementiste.

    Personnellement, je me rattache à ce courant-là depuis que j’ai viré ma cuti au milieu des années 1960 alors que j’étais au Laos. La fusion de ces deux courants s’est opérée à l’occasion du colloque organisé en février-mars 2002 à l’Unesco « Défaire le développement, refaire le monde ».

    Pourquoi la croissance n’est-elle pas souhaitable ?

    Elle n’est pas souhaitable parce qu’elle est, comme le disait Illich, la destruction du vernaculaire. C’est la guerre aux pauvres. Une guerre qui transforme la pauvreté en misère. La croissance développe les inégalités, les injustices, elle détruit l’autonomie.

    Illich a développé cette thèse avec la critique des transports, de l’école, de la médecine, en analysant la façon dont les institutions engendrées par le développement et la croissance acquièrent un monopole radical sur la fourniture de ce qui permet aux gens de vivre et qu’ils se procuraient jusqu’alors par leurs propres savoir-faire traditionnels. Ayant travaillé sur le Tiers-Monde, j’ai effectivement vu, en Afrique, en Asie, comment le rouleau compresseur de l’occidentalisation détruisait les cultures.

    Quel regard portez-vous sur les économistes ?

    L’économie est une religion, et non pas une science. Par conséquent, on y croit ou on n’y croit pas. Les économistes sont des prêtres, des grands ou des petits, des orthodoxes ou des hétérodoxes. Même mes amis Bernard Maris ou Frédéric Lordon – les meilleurs d’entre eux.

    Les altermondialistes, par exemple, dont la plupart sont des économistes, ont tendance à réduire tous les malheurs du monde au triomphe du néo-libéralisme. Mais ils restent dans le productivisme et la croissance. Or le mal vient de plus loin. La décolonisation de l’imaginaire que je préconise vise précisément à extirper la racine du mal : l’économie. Il faut sortir de l’économie !

    Comment les idées décroissantes peuvent-elles avancer dans notre société ?

    Pour moi, même si on a en face de nous à une énorme machine médiatique qui matraque et qui manipule, tous les terrains sont bons. Comme le terrain politique, par exemple. Je crois beaucoup, non pas à la politique de participation, mais à la politique d’interpellation. On ne veut pas le pouvoir. Le pouvoir est toujours mauvais, mais c’est une triste nécessité. On veut seulement que le pouvoir respecte nos droits. La décroissance doit être un mouvement d’interpellation du pouvoir, qu’il soit de droite ou de gauche.

    A la différence de mes camarades du journal La Décroissance, qui passent leur temps à exclure, je pense que nous devons faire un bout de chemin avec des gens comme Pierre Rabhi, Nicolas Hulot, le mouvement Slow Food, etc. La décroissance, c’est comme une diligence. Même s’il y a un cheval qui tire à hue et l’autre à dia, l’important est que la diligence avance. Les initiatives des villes en transition et de simplicité volontaire – comme ce qu’Illich appelait le « techno-jeûne » – s’inscrivent aussi parfaitement dans la décroissance.

    La décroissance contient-elle en germe un « risque de pureté » ?

    Oui. Toute culture a un double mouvement, centrifuge et centripète. Et une culture n’existe que dans le dialogue avec les autres cultures. Par conséquent, soit elle est ouverte et accueillante, soit elle a tendance à se replier sur elle-même et à s’opposer, c’est l’intégrisme. On trouve cela dans les mouvements politiques et religieux. Même dans les sectes philosophiques.

    La décroissance est quelque fois dénoncée comme étant autoritaire. Les décroissants seraient des catastrophistes, des « prophètes de malheur ». Que répondez-vous à ce genre de critiques ?

    C’est n’importe quoi. Il est vrai aussi que les gens qui adhèrent à la décroissance ne sont pas très différents de ceux qui adhéraient autrefois au socialisme, au communisme, au mouvement Occident… Il y a de tout : le bon grain et l’ivraie ! Via leur histoire personnelle, certains sont intolérants, d’autres sectaires, d’autres encore ont une vision manichéiste des choses. Il ne faut pas pour autant accuser le projet de la décroissance des vices de ceux qui la diffusent.

    Au contraire, la décroissance nous permet de renouer avec ce qui était la base de toutes les philosophies de toutes les sociétés et cultures humaines : la sagesse. Comme dans le stoïcisme, l’épicurisme, le cynisme, le bouddhisme, etc. Le fondement de tout cela est ce que les Grecs appelaient la lutte contre l’hubris. L’homme doit discipliner sa démesure, s’auto-limiter. C’est seulement ainsi qu’il peut espérer mener une vie saine, heureuse, juste, équilibrée. Alors si c’est cela un projet autoritaire…

    Vous avez écrit un ouvrage intitulé “L’âge des limites”. Quelle pourrait être cette nouvelle ère ?

    Avec la modernité, les limites sont devenues bidon. Il faudrait s’en émanciper. Mais s’il n’y a plus de limites, il n’y a plus de société. Certes, certaines limites doivent être remises en cause, mais on s’en donne de nouvelles. On déplace les frontières, mais on ne les abolit pas. Je suis viscéralement attaché aux libertés individuelles, mais à l’intérieur de certaines limites. Est-ce qu’une société démocratique peut exister avec une absence totale de limites à l’enrichissement et à l’appauvrissement personnel ?

    Jean-Jacques Rousseau a écrit qu’une société démocratique est telle que personne ne doit être riche au point de pouvoir acheter l’un de ses concitoyens, et aucun ne doit être pauvre au point d’être obligé de se vendre. Dans notre société, on en est loin…

    L’idéologie moderne stipule qu’on ne doit subir aucune atteinte à notre liberté, jusqu’à pouvoir choisir son sexe, la couleur de sa peau, sa nationalité, etc. C’est donc refuser l’héritage. Tout cela nous mène au transhumanisme : on n’accepte plus la condition humaine, on s’imagine être des dieux. La liberté, au contraire, c’est d’abord accepter les limites de sa propre culture, en être conscient et agir en conséquence, quitte à les remettre en question.

    La décroissance est-elle de droite ou de gauche ?

    Pour moi, elle est à gauche. Mais le débat est biaisé. Comme le dit Jean-Claude Michéa, finalement, ne faut-il pas abandonner la dichotomie droite-gauche qui tient à notre histoire ? Par exemple, dois-je interdire à Alain de Benoist de se revendiquer de la décroissance sous prétexte qu’il est classé à droite ? Est-ce qu’il est condamné ad vitam aeternam à être enfermé dans cette catégorie ? Sa position pourrait être réévaluée, rediscutée.

    Reporterre   http://fortune.fdesouche.com/