Le libéralisme fait débat. Pas seulement à « gauche » mais aussi à « droite ». Les uns font valoir, non sans raison, que l’économie de marché est performante. Les autres soulignent les limites courtermistes, sociales et morales du modèle néolibéral. Contributeur régulier de Polémia, Michel Geoffroy propose ici un nouvel éclairage de ce débat.
— Présentation —
Voici les dix thèses critiques de Michel Geoffroy que Polémia met en débat.
1) Le libéralisme est une doctrine économique qui repose sur des principes simples : seuls les individus sont des acteurs économiques pertinents. C’est la micro-économie qui est signifiante, pas la macro-économie. La liberté du commerce, la liberté d’installation et la liberté d’entrée sur le marché produisent des résultats profitables à tous et en tout cas supérieurs à ceux de la réglementation étatique ; plus le marché est libre plus il est efficace ; le marché trouve toujours la meilleure réponse ; la libre circulation des personnes et des capitaux par-delà les frontières permet une allocation optimale des moyens et un fonctionnement harmonieux du marché.
2) Le néo-libéralisme repose sur certains postulats qui ne sont pas éloignés de ceux du socialisme : la volonté d’unifier le genre humain, la croyance en la toute-puissance de l’intérêt, l’idée que le progrès mène au Paradis.
3) La propriété privée reste un système économique et social efficace car elle produit en général de meilleurs résultats que sa suppression. Mais plus la propriété est vaste, moins elle est facile à maîtriser.
4) La liberté du commerce et des prix ainsi que la concurrence économique produisent des effets positifs pour tous mais à condition que les termes de l’échange ne soient pas trop inégaux et que les coûts des facteurs restent homogènes entre les concurrents. C’est la faute méthodologique du néolibéralisme, c’est-à-dire du libre-échange mondialiste, que de ne pas vouloir prendre cela en considération.
5) En diabolisant le protectionnisme, le néolibéralisme commet une erreur d’analyse et s’écarte de la réalité des faits tels que l’histoire économique permet de les constater.
6) Le tout n’est pas seulement la somme des parties. L’accent mis sur la micro-économie a progressivement détourné le libéralisme de la bonne compréhension des sociétés humaines et, d’une façon générale, de tout ce qui est collectif et communautaire. Cela résulte aussi du fait que le libéralisme a été formulé à une époque (XVIIIe siècle notamment) où l’on avait de l’anthropologie une conception utopique. Les libéraux finissent par oublier que les hommes sont « par nature des êtres de culture » (Gehlen) et qu’ils n’existent pas en dehors d’une culture et d’une société.
7) Il n’est pas avéré que « le marché » prenne nécessairement toujours les bonnes décisions ou, pour le dire autrement, que la société profite toujours des décisions du marché. Les marchés sont en effet conformistes, c’est-à-dire qu’ils ont tendance à imiter les pratiques qui semblent donner de bons résultats et de bons profits : cela contribue à amplifier l’effet des mauvaises décisions. Et cette amplification est désormais mondiale. Les libéraux ignorent aussi le fait que les entreprises ont tendance à externaliser leurs coûts et leurs échecs sur les Etats.
8) La tendance naturelle du capitalisme n’est pas le respect de la juste concurrence mais la concentration, l’intégration verticale et la financiarisation. Aujourd’hui les entreprises transnationales ont des surfaces financières et des capacités d’influence bien supérieures à celles de certains Etats : elles sont devenues des pouvoirs. En outre, les grandes entreprises transnationales disposent, avec l’exercice du pouvoir médiatique et la suggestion publicitaire (et sujétion), de puissants moyens de sidération du consommateur.
9) Le bilan de la mise en œuvre des recettes néolibérales dans le domaine social n’est pas probant. On ne peut contester qu’avec l’avènement du néolibéralisme les entreprises soient devenues plus profitables. Mais la question est de savoir à quel coût cela s’est fait pour la société. En Europe, ce coût ne s’appelle-t-il pas chômage, immigration, déficits publics et croissance des inégalités de revenus ?
Partout en Occident les classes moyennes autochtones ont fait les frais de la mondialisation des échanges vantée par les néolibéraux.
10) Les principales réalisations de la culture humaine, celles qui font que la vie vaut d’être vécue, ne sont pas le fruit de l’économie de marché mais le produit de la fonction souveraine, c’est-à-dire des églises, des princes et des Etats. Elles sont le produit d’une volonté consciente ou non de la « main invisible » des marchés.
— Développement —
1) Le libéralisme est une doctrine économique qui repose sur des principes simples
Seuls les individus sont des acteurs économiques pertinents. C’est la micro-économie qui est signifiante, pas la macro-économie. La liberté du commerce, la liberté d’installation et la liberté d’entrée sur le marché produisent des résultats profitables à tous et en tout cas supérieurs à ceux de la réglementation étatique ; plus le marché est libre plus il est efficace ; le marché trouve toujours la meilleure réponse ; la libre circulation des personnes et des capitaux par-delà les frontières permet une allocation optimale des moyens et un fonctionnement harmonieux du marché.
Certains des principes du libéralisme sont restés pertinents mais d’autres ne le sont plus.
Ce qui reste pertinent dans la théorie économique libérale :
- la valeur de la propriété privée ;
- le rôle des prix comme source d’information pertinente sur la qualité et la rareté des biens ;
- le fait que la concurrence soit facteur de progrès, lorsqu’elle est équitable;
- le fait que plus les systèmes sont complexes, plus ils sont difficiles à contrôler et plus il est difficile de prévoir les effets réels des politiques (sociales) mises en œuvre.
Cependant, le principe d’ajustement optimal de l’offre et de la demande sur le marché libre repose sur des situations qui se rencontrent rarement dans le monde réel, en tout cas qui se rencontrent de plus en plus rarement dans le cadre de la mondialisation des échanges que nous vivons aujourd’hui. Ce principe ne produit pas les effets bénéfiques prévus-en particulier dans les pays occidentaux – dans une économie où la concurrence s’effectue non plus entre des producteurs mais entre des civilisations.
2) Le néolibéralisme repose sur certains postulats qui ne sont pas éloignés de ceux du socialisme : la volonté d’unifier le genre humain, la croyance en la toute-puissance de l’intérêt, l’idée que le progrès mène au Paradis.
Le libéralisme se différencie du socialisme dans la mesure où il préconise la propriété privée, où il stigmatise l’intervention économique et sociale de l’Etat et où il est avant tout un individualisme.
Le néolibéralisme rejoint le socialisme sur plusieurs points :
- a croyance dans la possibilité d’unifier le genre humain, que le néolibéralisme entend assurer par le marché comme le socialisme l’imaginait par la solidarité mondiale des travailleurs ;
- la croyance que les hommes sont mus par leur seul intérêt (l’intérêt de classe ou l’intérêt économique) et que cet intérêt est objectif. C’est-à-dire que tous deux négligent l’importance des identités, nationales notamment, comme déterminants humains, de même que l’importance des spécificités et croyances culturelles. Le libéralisme néglige que les hommes sont mus non par leur intérêt objectif mais par l’idée qu’ils se font de leur intérêt, ce qui n’est pas la même chose ;
- la croyance que les traditions culturelles et les identités sont des obstacles au bonheur humain (à la création de l’homme nouveau comme à la concurrence pure et parfaite) ; même si certains libéraux se sont efforcés de montrer que le fonctionnement optimal de l’économie supposait le respect de règles qui ne pouvaient que s’enraciner dans une culture ;
- la croyance en la possibilité d’assurer le Paradis sur terre (réduit à l’abondance matérielle) par la mise en œuvre de solutions adaptées (le collectivisme ou l’économie de marché) ;
- la prétention du néolibéralisme à incarner l’avant-garde du progrès, comme hier les élites révolutionnaires. Il existait, en effet, un libéralisme politique qui s’est avant tout opposé à l’absolutisme monarchique puis au conservatisme et au socialisme. Le libéralisme politique déclinait dans l’ordre politique ses principes économiques, la libre confrontation des opinions – parlementarisme et démocratie – étant considérée comme aussi efficace que l’ajustement de l’offre et de la demande sur le marché libre. Mais le néolibéralisme a rompu aujourd’hui avec cette tradition et adopte désormais une approche élitiste de la chose publique : il se méfie des peuples et donc de la démocratie et s’est mis au service de l’oligarchie.
3) La propriété privée reste un système économique et social efficace car elle produit en général de meilleurs résultats que sa suppression. Mais plus la propriété est vaste, moins elle est facile à maîtriser.
C’était l’erreur du socialisme de penser que la suppression de la propriété privée (la collectivisation) constituait le remède au capitalisme. La propriété est levier de responsabilité et de sécurité pour le propriétaire. La collectivisation provoque, au contraire, l’irresponsabilité et la prise de mauvaises décisions. Les politiques redistributives d’inspiration socialiste, qui consistent à prélever des impôts sur ceux qui travaillent pour les redistribuer sous forme de prestations « sociales » à ceux qui ne travaillent pas, provoquent des effets pervers de même nature : elles découragent l’effort et la prise de risques. Il faut donc au contraire encourager l’accession à la propriété personnelle, la conservation des patrimoines et diminuer les impôts et les prélèvements pesant sur les revenus du travail.
Il y a cependant des limites à cela. D’abord l’efficience de la propriété privée est d’autant plus grande que le propriétaire est proche de son bien : plus la propriété est vaste moins elle est facile à maîtriser. Ensuite tous les biens ne peuvent pas faire l’objet d’une appropriation privative, en particulier ceux qui sont nécessaires à la survie de la communauté. Certaines circonstances exceptionnelles peuvent justifier de substituer la propriété publique à la propriété privée pour garantir un intérêt public, sous réserve d’une compensation équitable des propriétaires. Enfin, aucune société policée ne peut se désintéresser de la situation des personnes privées d’emploi et de revenus (mais cela ne signifie pas que la charité soit obligatoirement publique).
4) La liberté du commerce et des prix ainsi que la concurrence économique produisent des effets positifs pour tous mais à condition que les termes de l’échange ne soient pas trop inégaux et que les coûts des facteurs restent homogènes entre les concurrents.
La mise en concurrence au sein d’un espace économique non homogène, a fortiori la mise en concurrence mondiale des économies, provoque des effets pervers beaucoup plus importants que ses avantages économiques présumés. Dans un premier temps la baisse des protections tarifaires a un effet positif sur les consommateurs, qui voient les prix baisser et affluer des marchandises du monde entier. Mais s’ils perdent leur emploi du fait que les entreprises étrangères sont plus performantes et que les leurs doivent cesser leur activité, ils finissent par voir diminuer leurs revenus et leur consommation.
C’est la faute méthodologique du néolibéralisme, c’est-à-dire du libre-échange mondialiste, que de ne pas vouloir prendre cela en considération.
La mondialisation des échanges perturbe en effet le fonctionnement de la concurrence. Car un pays ne peut durablement se spécialiser dans un seul domaine d’activité et dépendre pour le reste des autres économies, d’autant que les avantages comparatifs ne sont pas donnés une fois pour toutes. Il est très difficile en outre de reconstituer des capacités de production dans un secteur que l’on a abandonné à d’autres, en particulier à cause des compétences perdues. Il y a par ailleurs des limites naturelles à l’adaptation des facteurs de production à la concurrence mondiale du point de vue de la mobilité de la main-d’œuvre. Dans une économie mondialisée les coûts sociaux des ajustements économiques sont trop élevés, en particulier dans les pays en déclin démographique, pour que l’optimum de la théorie économique soit réalisable.
5) En diabolisant le protectionnisme, le néolibéralisme commet une erreur d’analyse et s’écarte de la réalité des faits tels que constatés par l’histoire économique.
Les protections tarifaires – c’est-à-dire les frontières économiques – permettent de préserver une juste concurrence entre des acteurs inégaux, dès lors qu’elles sont raisonnables. Les situations d’autarcie ou de blocus ont constitué aussi des facteurs d’accélération de l’innovation pour les sociétés qui y étaient soumises.
L’histoire économique ne confirme pas que les grandes puissances économiques le sont devenues en appliquant la théorie des avantages comparatifs de David Ricardo mais en appliquant plutôt différentes formes de patriotisme économique. Le discours libéral sur les bienfaits de l’ouverture des frontières économiques a en réalité souvent été utilisé comme moyen de soumission et de colonisation des Etats : en imposant l’ouverture de l’économie du pays dominé au commerce inégal avec la puissance dominante. D’ailleurs, les pays qui sont présentés comme un modèle de libéralisme – comme les Etats-Unis, par exemple – sont en réalité protectionnistes, car ils usent de nombreux moyens non tarifaires pour décourager les importations.
La solution économique la plus efficiente n’est pas la suppression des protections tarifaires, comme le pratique aujourd’hui l’Union européenne, mais de mettre en place une certaine dose de protection du marché intérieur alliée à une politique de promotion des exportations au sein d’un espace économique cohérent ; c’est la politique que pratiquent également les économies émergentes avec succès.
Il n’est pas avéré que la croissance économique soit en relation directe avec le degré d’ouverture au commerce international, comme le montre le cas de l’Union européenne qui est désormais une économie ouverte mais à faible croissance.
Enfin, contrairement à ce que prétendent les libéraux depuis l’origine, le commerce ne garantit nullement la paix. Dans l’histoire, c’est le contraire qui est vrai ; les nations les plus commerçantes ont toujours été belliqueuses car elles ont utilisé la force pour s’ouvrir des marchés et éliminer des concurrents : exemple l’Angleterre. Il est donc faux de croire que la mondialisation de l’économie conduira à la paix perpétuelle ; au contraire, l’ouverture mondiale des frontières économiques met en concurrence non plus seulement des acteurs économiques mais les peuples et les civilisations eux-mêmes. Le libre-échange mondialiste mène fatalement au choc des civilisations, comme le montrent notamment les conséquences des migrations massives de populations.
6) Le tout n’est pas seulement la somme des parties.
L’accent mis sur la micro-économie a progressivement détourné le libéralisme de la bonne compréhension des sociétés humaines et, d’une façon générale, de tout ce qui est collectif et communautaire. Cela résulte aussi du fait que le libéralisme a été formulé à une époque (XVIIIe siècle notamment) où l’on avait de l’anthropologie une conception utopique : celle d’un homme primitif vivant de cueillette en dehors de toute culture, les institutions sociales étant perçues comme une contrainte faisant perdre à l’homme sa bonne nature.
Les intellectuels libéraux ont cru ensuite trouver dans la formulation de la théorie de l’évolution au XIXe siècle une confirmation de leurs analyses : le caractère spontané et structurant des micro-variations individuelles, la survie du mieux apte.
Le libéralisme est donc un individualisme méthodologique, qui pose que les individus sont la mesure de toute chose et à l’origine de la société. Cette conception a débouché sur l’idéologie politique des droits de l’homme qui expliquait justement que la société était faite pour les hommes, et non l’inverse, et que le but de l’organisation politique résidait dans la conservation des droits propres à chaque homme, et non dans la conservation de la communauté. Les droits de l’homme ont ainsi supplanté ceux de la citoyenneté.
Les libéraux conséquents ne reconnaissent aucune réalité, ni aucune légitimité souvent, aux entités et déterminants collectifs, à l’exception du concept de « marché » perçu comme la sommation des décisions économiques individuelles. Ils prônent la « société ouverte » (Hayek), c’est-à-dire un système où les institutions ne viendraient pas contrarier l’initiative des individus. Cette expression est cependant une contradiction dans les termes car ce qui fonde un ordre social consiste justement à organiser et à pacifier le choc des appétits individuels, donc à les restreindre.
Le libéralisme a, par conséquent, beaucoup de difficulté à concevoir que les relations de pouvoir puissent venir perturber son modèle. Les libéraux sont des optimistes qui pensent que les supériorités sont transitoires et susceptibles d’être recomposées par le marché.
Les libéraux finissent par oublier que les hommes sont « par nature des êtres de culture » (Gehlen) et qu’ils n’existent pas en dehors d’une culture et d’une société. Ils ignorent aussi que beaucoup d’animaux vivent en société et ne sont pas non plus des « individus ».
La société qu’ils préconisent, conçue comme une agrégation d’individus, est en réalité un chaos, comme le démontrent les sociétés occidentales qui ont été façonnées conformément à ces principes. Les libéraux négligent le fait que les hommes réagissent en fonction de l’idée qu’ils se font de leur intérêt : or, cette idée est aussi le fruit de leurs traditions et de leurs cultures. Ils négligent enfin que les hommes sont plus attachés à leur identité et à leur culture qu’à leur intérêt économique, a fortiori quand ce dernier n’est pas à court terme.
7) Il n’est pas avéré que « le marché » prenne nécessairement toujours les bonnes décisions ou, pour le dire autrement, que la société profite toujours des décisions du marché.
A l’âge de la mondialisation des échanges, les acteurs économiques prennent de plus en plus de décisions à court terme. Tous les observateurs le confirment. Les visions stratégiques à moyen ou long terme sont de plus en plus rares. Les exemples sont nombreux où « le marché » – c’est-à-dire les acteurs privés – a pris de mauvaises décisions (bulles spéculatives, actifs toxiques, crédits imprudents, …) ou a été incapable d’éviter des dérèglements majeurs (Madoff, Kerviel, …). Les marchés sont en effet conformistes, c’est-à-dire qu’ils ont tendance à imiter les pratiques qui semblent donner de bons résultats et de bons profits : cela contribue à amplifier l’effet des mauvaises décisions. Et cette amplification est désormais mondiale.
L’argument des libéraux selon lequel les erreurs privées sont toujours moins graves que les erreurs publiques néglige les effets sociaux des mauvaises décisions privées, a fortiori quand elles sont prises par des entreprises transnationales. Les libéraux, dans leur critique systématique de la mauvaise efficacité des politiques publiques comparée à l’efficience des entreprises privées,ignorent le fait que les entreprises ont tendance à externaliser leurs coûts et leurs échecs sur les Etats.
Ainsi afin d’améliorer leur profitabilité, les entreprises ont partout cherché à diminuer leurs coûts salariaux. Cela s’est produit par le développement de l’automation (au Japon, par exemple) et par l’encouragement à l’immigration, en particulier en Europe et en France. Les immigrés sont, en effet, moins syndiqués et acceptent des salaires plus bas que les autochtones. Le travail des femmes produit le même effet. C’est d’ailleurs pourquoi les entreprises sont en général les meilleurs partisans des mesures discriminatoires prises par les Etats en faveur de ces catégories, aux dépens des salariés mâles et autochtones.
Comme les coûts sociaux de ces politiques sont avant tout supportés par les finances publiques, elles sont tout bénéfice pour les entreprises. De même il est significatif que les Etats – c’est-à-dire le contribuable – aient été appelés au secours des banques et des institutions financières lors de la crise financière de 2008 ; ce qui montre à l’évidence que les erreurs privées peuvent être aussi graves que les erreurs publiques.
8) La tendance naturelle du capitalisme n’est pas le respect de la juste concurrence mais la concentration, l’intégration verticale et la financiarisation.
Ce point a clairement été diagnostiqué par les socialistes dès le XIXe siècle et c’est bien ce qui s’est passé à la fin du XXe siècle, avec la création des entreprises transnationales, des grands conglomérats et des bulles financières successives. Aujourd’hui, ces entreprises transnationales ont des surfaces financières et des capacités d’influence bien supérieures à celles de certains Etats : elles sont devenues des pouvoirs. La caractéristique principale de l’économie mondialisée est la dé-territorialité et la très grande mobilité du capital, qui lui permettent d’échapper aux régulations nationales et politiques. Cette évolution est renforcée par la financiarisation, qui pousse à vouloir réaliser des profits à court terme et à reconfigurer en permanence, voire à détruire, les entreprises pour cela. Sur ce plan les banques et les institutions financières sont les véritables dirigeants des entreprises, transnationales ou non.
Cette tendance rencontre cependant ses limites car plus les entreprises grandissent moins elles sont faciles à gérer et plus elles sont tentées de prendre de mauvaises décisions ou, en tout cas, pas meilleures que celles des Etats. C’est pourquoi il faut réguler la concentration des entreprises et surveiller l’exercice de la concurrence.
En outre, les grandes entreprises transnationales disposent, avec l’exercice du pouvoir médiatique et la suggestion (et sujétion) publicitaire, de puissants moyens de sidération du consommateur. De ce fait, l’équilibre entre l’offre et la demande n’est plus équitable puisque les grandes entreprises disposent du pouvoir de créer artificiellement des besoins éphémères.
On sait depuis le XIXe siècle que l’échange entre le travail et le capital n’est pas égal puisque le travailleur ne peut vivre sans salaire ni aides sociales. Mais depuis le XXe siècle et l’avènement de la publicité de masse, on sait que l’échange avec le consommateur n’est pas plus équitable.
L’économie occidentale repose en effet sur la stimulation de la consommation, par la création artificielle des besoins et par le crédit sans limite. Mais les effets pervers de cette stimulation – en particulier sur la santé publique ou l’environnement – sont supportés par les Etats et les consommateurs et non par les entreprises, qui ne privatisent que les prises de bénéfice. La stimulation constante de la consommation conduit à un monde de l’éphémère et de l’obsolescence, qui génère le nihilisme occidental.
La maîtrise des moyens de communication et des biens culturels par le système marchand a enfin des effets politiques majeurs, du moins dans les pays occidentaux : elle sape la démocratie car elle donne à ceux qui financent et donc dirigent les médias les moyens de choisir les dirigeants politiques et de formater l’opinion. On peut douter qu’ils le fassent sans considération de leurs intérêts propres.
9) Le bilan de la mise en œuvre des recettes néolibérales dans le domaine social n’est pas probant.
Le néolibéralisme a voulu appliquer à partir de la fin du XXe siècle à toutes les institutions sociales les mesures inspirées de la théorie économique : suppression des statuts pour établir une « juste concurrence », hausse des tarifs pour obtenir des prix réels, équilibre des dépenses et des recettes pour les institutions publiques afin qu’elles soient le plus possible « rentables », diminutions d’impôts sur les entreprises, dérégulation, privatisation de services publics, externalisation des activités non régaliennes de l’Etat sur des opérateurs privés, promotion de l’assurance, des contrats, etc. Ces politiques se sont appuyées sur les succès présumés des politiques conduites dans les pays anglo-saxons à partir des années 1980 (Reagan, Thatcher).
On ne peut contester qu’avec l’avènement du néolibéralisme les entreprises soient devenues plus profitables. Mais la question est de savoir à quel coût cela s’est fait pour la société. En Europe, ce coût ne s’appelle-t-il pas chômage, immigration, déficits publics et croissance des inégalités de revenus ?
Les mesures prises ont surtout abouti à déstructurer les sociétés et les Etats en affaiblissant les protections au moment où les hommes en avaient besoin du fait des effets de l’ouverture mondiale des frontières économiques. Ce phénomène se constate aussi bien en Occident que dans les pays qui se sont vus appliquer les recommandations du FMI.
Les « paradis » tant vantés par les idéologues libéraux dans les années 1990 sont largement factices et les mesures prises n’ont manifestement pas abouti à des résultats meilleurs dans la durée que dans d’autres pay : ainsi les taux de chômage, les taux d’endettement public, la précarité des emplois ou la pauvreté aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne ne diffèrent pas sensiblement de la moyenne des pays développés, soit sont pires (endettement public notamment). La crise financière a montré aussi que le remplacement de la capitalisation par la répartition n’était pas la solution tant vantée par les néolibéraux pour les systèmes d’assurance sociale.
Contrairement à ce que prétend le néolibéralisme, il n’a pas institué un monde « gagnant-gagnant ». En fait, il y a bien des gagnants qui ont profité de ces mesures d’inspiration libérale : les économistes qui les ont préconisées et qui ont gagné une notoriété ce faisant, les professions juridiques, les cabinets de conseil et de communication, ceux qui ont pu acquérir des biens privatisés, les riches inactifs, ainsi que les grandes entreprises et les institutions financières qui ont vu baisser leurs charges ou qui ont profité des marchés d’externalisation publique. Les perdants sont ceux qui ne peuvent plus bénéficier de la gratuité et de la qualité des services publics et qui supportent la diminution des prestations sociales.
Le néolibéralisme est devenu l’idéologie de la superclasse dirigeante mondiale, c’est-à-dire l’idéologie de ceux qui bénéficient des avantages de la mondialisation et de la dérégulation des échanges marchands sans en supporter les conséquences désagréables, en particulier sans supporter les conséquences pénibles de l’ajustement économique et social permanent consécutif à la mise en concurrence mondiale des économies.
C’est ce qui explique que le néolibéralisme n’ait pas bonne presse en Occident et en particulier en France : les pays occidentaux ont subi en effet successivement la progression des prélèvements publics consécutive à la mise en place de l’Etat Providence, puis sa déconstruction néolibérale, sur fond de progression continue du chômage, de l’immigration et des déficits publics. Partout en Occident les classes moyennes autochtones ont fait les frais de la mondialisation des échanges vantée par les néolibéraux. On peut donc comprendre qu’elles n’aient plus aujourd’hui une « image positive » des grandes entreprises ni de la super-classe mondiale.
10) Les principales réalisations de la culture humaine, celles qui font que la vie vaut d’être vécue, ne sont pas le fruit de l’économie de marché mais le produit de la fonction souveraine, c’est-à-dire des églises, des princes et des Etats. Elles sont le produit d’une volonté, consciente ou non, de la « main invisible » des marchés.
Le capitalisme d’Etat, l’interventionnisme, diabolisés par les idéologues néolibéraux depuis la fin du XXe siècle, ont produit des résultats au moins équivalents, et dans bien des cas plus durables et supérieurs, à ceux de l’économie de marché. La première économie du monde, la Chine, est un capitalisme d’Etat. La maîtrise du nucléaire, l’aéronautique, la conquête spatiale, l’informatique, la recherche médicale n’auraient pas été possibles sans l’intervention décisive des Etats, qui en ont supporté les risques.
La soumission de tout à la loi du marché (marchandisation du monde), loin de constituer une amélioration, n’a abouti qu’à un appauvrissement culturel généralisé à l’image de ce qui s’est passé dans l’univers médiatique.
Il en va ainsi parce que le libéralisme poussé dans ses implications ultimes est un agent dissolvant de tout ordre social, ce que les socialistes reconnaissaient d’ailleurs positivement au XIXe siècle, pour sa contribution à l’avènement de la révolution mondiale.
Le libéralisme conduit en effet à délégitimer toutes les institutions, toutes les traditions, toutes les préférences culturelles, réputées faire obstacle à l’optimum économique, au nom de l’efficience réputée supérieure des initiatives des individus sur le marché libre. La seule distinction que le néolibéralisme ne conteste pas porte sur les différences de richesses, qui seraient hautement morales à ses yeux, car elles sont censées rémunérer des talents supérieurs.
Il délégitime aussi tout volontarisme politique, au nom de la critique des effets pervers du « constructivisme ». Mais il est un ardent défenseur du volontarisme des grandes entreprises transnationales…
Le libéralisme repose sur la croyance en la supériorité d’un modèle économique et social, le gouvernement des choses en dehors de toute régulation humaine, qui malheureusement ne fonctionne nulle part d’une façon pure et parfaite. Mais au lieu d’en tirer une nécessaire modestie, le néolibéralisme prétend plier la réalité à ses postulats. Cette attitude conduit les idéologues néolibéraux à négliger les conséquences désagréables des politiques qu’ils préconisent et qu’au demeurant en général ils ne supportent pas personnellement, bien au contraire.
Le néolibéralisme est donc une idéologie commode qui prône l’indifférenciation et la soumission aux lois abstraites du marché pour la population, tout en justifiant les inégalités de richesse en faveur des puissants.
Nous vivons aujourd’hui la déconstruction de tout ordre social par la mise en œuvre des principes libéraux poussés à leurs limites. Car les sociétés occidentales ont été soumises à une véritable révolution néolibérale et sont en train d’imploser pour cette raison même. Mais cette déconstruction suscite désormais la révolte croissante des peuples et des identités contre le système qui s’est mis en place.
Michel Geoffroy Polemia
22/02/2011
économie et finance - Page 751
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Dix thèses sur le libéralisme
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L'ÉCONOMIE DÉTRUIT L'ÉTAT-NATION
La pensée est devenue unique - parait-il - et l'on peut même dire qu'elle est devenue économique et d'un seul courant. Le seul mot d'ordre actuel est la destruction de tout esprit national et cela passe par la machine de guerre économique.
La France, plus vieil État-Nation de l'Occident, a toujours eu une politique économique organisée dans un cadre national depuis les rois, et en particulier Louis XIV, jusqu'au général De Gaulle qui était animé du volontarisme économique le plus solide : plan calcul pour l'informatique, programme spatial, armement nucléaire le plus moderne, aérospatiale...
Depuis Pompidou, ancien directeur de la banque Rothschild, et Giscard, sans discontinuer, les gouvernements n'ont fait qu'organiser le démantèlement économique de la France pour la soumettre aux «lois» du marché mondial.
Les capitaux, la Finance internationale sont les maîtres de l'économie. L'emploi n'est plus une priorité et, l'on pourrait même dire, qu'il est le dernier des soucis. Vis à vis de celui-ci n'existe que le pieux discours sur la baisse des charges, la flexibilité des salaires ou le discours infantile d'Alain Madelin « si le libéralisme était vraiment appliqué, tout irait mieux dans le meilleur des mondes possibles ». Mais en fin de compte seule compte la bonne santé des marchés financiers.
L'État ne peut plus intervenir dans un cadre national. D'ailleurs tous les outils qui étaient à sa disposition lui sont enlevés les uns après les autres.
La Banque de France n'existe plus et la Banque Centrale européenne est indépendante des gouvernements. Toute politique monétaire est donc extrêmement limitée. Quant à la politique budgétaire, les fameux critères de Maastricht l'anéantissent presque totalement.
L'État de régulateur devient même dérégulateur. La croissance et la création d'emplois ne sont plus des objectifs dans une économie sous la domination des marchés financiers.
Le productif est soumis au financier. On ne raisonne qu'à travers la sphère monétaire et non plus celle réelle des biens et des personnes. Ceci est bien sur totalement contraire à l'intérêt réel des agents économiques, à part celui de quelques financiers. La pensée keynésienne de régulation, qui a fait ses preuves, qui s'effectuait très bien dans un cadre national et avait comme objectif une augmentation des biens et de l'emploi (donc du bien-être économique), n'a plus de raison d'être dans le contexte économique actuel sauf pour des pays qui ont gardé leur souveraineté comme les États Unis, le Japon, la Norvège, la Suisse et dans une certaine mesure la Grande Bretagne (pays qui ont tous moins de chômage).
Cette pensée unique qui se veut irremplaçable est bien sûr fondée sur des prémisses idéologiques de la fin des Etats-Nations où tout ce qui peut rappeler l'idée d'une vision nationale est à bannir. L'Euro fait partie de cette logique puisque les nations n'ont même plus leur propre monnaie et seront complètement immergées dans les mécanismes financiers internationaux. De Gaulle disait souvent : « l'intendance suivra ». Maintenant il faut inverser cette, phrase : c'est à partir de l'économie que les Etats-Nations et leurs structures seront détruits de façon inexorable. Jacques Chirac, comme les socialistes, a totalement accepté cette nouvelle pensée économique.
Un changement de politique ne pourra s'effectuer que par un changement des hommes politiques en place et par un renouveau total de la classe politique et des partis. Les Français par un sursaut de survie pourront alors empêcher la destruction et la mort de leur nation. Ceci serait même avantageux sur le plan économique, car la France aurait de nouveau le choix de la croissance et du plein emploi. Les années où la France était souveraine correspondent aux périodes de forte croissance et de plein emploi. La construction européenne s'est accompagnée, elle, d'une croissance de plus en plus faible et d'un taux de chômage de plus en plus grand. Ce changement est d'autant plus réalisable que la France est, quoi qu'on dise, la 5° puissance industrielle mondiale et n'est pas du tout le nain économique qui nous est décrit par les «anéantisseurs» de notre pays qui cherchent à tout prix des raisons et des prétextes pour accélérer sa disparition et la faire accepter par les Français eux-mêmes. La pensée qui se veut unique n'est pas du tout incontournable mais est un choix idéologique. D'autres choix sont possibles tout en restant dans des cadres nationaux et d'échanges réciproques. La France peut très bien continuer à exister au milieu des autres pays européens sans disparaître.
Mais ceci ne se fera pas grâce à un gouvernement socialiste qui a complètement accepté la logique de la mondialisation. La seule différence avec la droite est qu'il met un léger baume de social.
Il faut donc une rupture totale grâce à un parti qui prône de nouveau une France souveraine, tant sur le plan politique qu'économique.
par Patrice GROS - SUAUDEAU Statisticien - Économiste 1997 -
« Je me fous des Bretons » (Nicolas Sarkozy)
PARIS (NOVOpress Breizh) – Nicolas Sarkozy a de gros problèmes d’argent. Au 31 juillet, son parti l’UMP, doit – ou devrait – rembourser aux banques un prêt de 11 millions d’euros, or l’Etat ne remboursera pas cette somme au parti en question car les comptes de campagne de M. Sarkozy – correspondant à l’élection présidentielle de 2012 – ont été invalidés par le Conseil constitutionnel. Ben sûr, l’inquiétude n’est pas de mise puisque les banquiers accepteront de bonne grâce le rééchelonnement de la dette.
En effet le principal créancier concerné, la Société générale, dont le PDG n’est autre que Frédéric Oudéa, ancien conseiller de M. Sarkozy lorsque celui-ci était ministre du Budget, en 1993. Sous la présidence de M. Sarkozy, la Socgé a bénéficié en décembre 2008, de deux emprunts d’Etat de 1,7 milliard d’euros chacun. On voit mal, dans ces conditions, comment la banque et l’UMP pourraient ne pas trouver un accord pour quelques millions (Libération, 09/07/13).
Cette question ne peut laisser indifférent M. Sarkozy car ce dernier s’était porté caution solidaire du prêt de 11millions d’euros que le parti doit rembourser au 31 juillet (Le Monde, 09/07/13). D’où l’organisation d’un « Sarkothon » destiné à trouver des fonds permettant de couvrir cette dette. SelonLes Echos (22/07/13), près de 7 millions d’euros auraient déjà été récoltés. Une somme suffisante, d’après Jean-François Copé, pour que les banques acceptent d’accorder un nouveau prêt si la somme de 11 millions n’est pas réunie. Donc l’ancien président de la République pourra partir en vacances l’esprit tranquille. Certes, les esprits chagrins font remarquer que le parti compte 44 millions de dettes, en dehors du prêt de 11 millions à rembourser pour la campagne de Sarkozy. Pour revenir à l’équilibre fin 2016, il doit rembourser 11 millions d’euros par an à quatre banques à qui il a emprunté 55 millions d’euros (Le Monde, 03/07/13).
Bien sûr, il faut tenir compte du financement public dont bénéficie l’UMP, à savoir 19,87 millions d’euros en 2013 (Journal Officiel du 28/05/13), à quoi s’ajoutent les cotisations des adhérents et des élus.
Soucieux d’aider Nicolas Sarkozy à sortir de ce mauvais pas, le Canard enchaîné (10/07/13) propose six pistes pour « faire du fric » et lutter contre le surendettement. L’une d’elle consiste à « discourir plus ». En effet l’ancien président de la République s’est lancé dans une carrière de conférencier international. Il parait que M. Sarkozy est un orateur recherché. Ses prestations sont généralement évaluées à 100.000 dollars (1 euro = 1,30 dollar).
En douze mois, Nicolas Sarkozy est allé dispenser ses avis et analyses sur la situation préoccupante de l’Union européenne, l’état de la mondialisation ou les perspectives de sortie de crise aux Etats-Unis, en Russie, en Chine, à Singapour, au Brésil, en Lybie, au Qatar, au Canada et enfin en Grande-Bretagne. Et, d’ici à l’automne, le « Sarko tour » est annoncé en Israël et au Mexique (Le Nouvel observateur, 11/07/13). En octobre dernier, à New York, invité par le groupe brésilien BTG Pactual, principal fonds d’investissement d’Amérique latine, il aurait empoché 120.000 dollars, pour une conférence à Las Vegas, invité par la société américaine de gestion d’actifs Skybridge Capital, il serait reparti avec 200.000 dollars. Début juin, à l’hôtel Intercontinental de Londres, l’ancien président a dû se contenter de la moitié pour s’exprimer devant des représentants de la banque Goldman Sachs. Bref le dépôt de bilan n’est pas pour demain.
L’entourage de M. Sarkozy s’est empressé de claironner que l’intéressé avait versé 7.500 euros à la caisse du parti, le maximum autorisé par la loi. « Or, en tant que candidat à la présidentielle, Sarko n’est pas tenu à cette règle : il peut légalement, s’il le veut ou le peut, payer l’intégralité de la douloureuse. Soit les 11 millions que l’Etat ne remboursera pas à l’UMP du fait du rejet de son compte de campagne. Ou au moins les pénalités subsidiaires : la restitution au Trésor de l’avance forfaitaire (153.000 euros) ainsi que le paiement au même Trésor de l’« amende » de 363.615 euros infligée au candidat « pour dépassement » par la Commission nationale des comptes de campagne. » (Canard enchaîné, 10/07/13).
Consentir un effort supplémentaire ne serait pas de trop pour celui qui chantait au début de l’année 2008 : « Pour l’instant je fais président, mais un jour j’irai faire du fric. » Rappelons que le candidat Sarkozy s’est porté « caution personnelle » auprès des banques pour obtenir un crédit relais de 11 millions d’euros ».
En attendant, les adhérents sont priés de faire un effort pour aider le parti et éviter à M. Sarkozy d’avoir à sortir un chèque autrement plus conséquent que celui de 7.500 euros donnés récemment. A cette occasion, il ne semble pas inutile d’attirer l’attention des adhérents bretons de l’UMP sur ce que le « petit mari » de Carla pense d’eux.
Dans son dernier ouvrage, « Breizh bric-à-brac » (Palantines), Yann Lukas rappelle un évènement qui situe le personnage Sarko. « Qu’est-ce qu’on va foutre dans un cercle opérationnel sinistre, à regarder un radar ? Je me fous des Bretons. Je vais être au milieu de dix connards en train de regarder une carte ! Grand sens politique, vraiment ! ». C’était le 1er mai 2007 au Cross Corsen, dans le Finistère. Yasmine Reza rapporte ces propos de Nicolas Sarkozy dans son livre-enquête, L’Aube, le soir ou la nuit, sorti le 24 août 2007. A partir de l’automne 2006, elle avait suivi le candidat pendant sa première campagne présidentielle. Sa relation des faits n’a pas été démentie. Des propos qui font dire à certains qu’un(e) Breton(ne) possédant un brin de dignité de donne pas un sou à Sarko.
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Europe : la construction automobile a-t-elle un avenir ?
En Europe, la capacité de production des usines automobiles est sous-employée. En 2010, elle atteignait seulement 69 %, elle est remontée à 82 % en 2011. Le patron de Fiat-Chrysler, Sergio Marchionne, ne voit pas d'autre solution que de fermer de nombreuses usines en Europe, une dizaine... Il saute directement à la solution sans dire pourquoi le marché en est arrivé là. Nous l'apprendrons un peu plus loin. Il pointe certes la mévente des petites voitures, et leurs prix tirés vers le bas qui ne génèrent pas une rentabilité suffisante. Est-ce la seule explication ? On peut assurer que non, il y a la solvabilité des acheteurs, leur vieillissement, la concurrence étrangère, le prix des carburants et de l'entretien, les assurances, la répression routière, la difficulté d'obtenir son permis, et son prix, etc. Qui dit fermeture dit licenciements. Rappelons qu'en 2008, les industries de la construction automobile des 27 pays de l'Union européenne employaient 2 420 000 salariés.
Selon lui, « c'est à l'Europe de prendre en charge cette transition, car individuellement, les gouvernements des différents pays ne le feront pas. » Il suggère un « effort coordonné » de façon que « la douleur soit partagée [...] Si l'Europe bloque cette restructuration, les constructeurs ne pourront pas investir suffisamment pour moderniser leur outil de production et monter en gamme » Monter en gamme signifierait-il que les petites voitures sont abandonnées et laissées aux constructeurs automobiles situés hors d'Europe, y compris des marques européennes, pour ne conserver que les véhicules haut de gamme ? Certes, mais les modèles premium ne sont-ils pas déjà monopolisés en très grande partie par les constructeurs allemands ? Et l'export en direction de la Chine en particulier restera-t-il longtemps encore ouvert aux importations sans que les autorités chinoises imposent l'implantation d'usines sur place ? Quid alors de l'exportation et de la production européenne ? Ce qui est certain, c'est que l'Europe serait alors condamnée à importer ses petites voitures ! Fabuleux, non ? Néanmoins, Sergio Marchionne suggère que l'Europe mette en place « un mécanisme de soutien financier » pour rendre supportable les inéluctables licenciements et un « système de protection sociale (qui) assure la transition » de manière à donner du « soin et de l'attention » aux futurs licenciés. Mais quid des dizaines de milliers de ceux qui ne seront pas embauchés ? Qui osera affirmer que la crise est derrière nous ?
LA COMMISSION EUROPÉENNE TIRE CONTRE SON CAMP
En 2011, la Commission européenne a signé un accord de libre-échange avec la Corée du Sud. Le patron de Fiat-Chrysler lui reproche sa vision "bucolique" des relations commerciales internationales. Il ajoute, nous partageons son opinion depuis bientôt 20 ans : « Nous sommes tous, bien sûr, pour un monde meilleur où il n'y aurait plus de barrière : c'est une idée séduisante. Mais quand on regarde la réalité, c'est plus compliqué à faire fonctionner. » Quels sont les résultats immédiats de l'application de l'idéologie libre-échangiste bruxelloise, fanatique de la concurrence libre et non faussée ? En 2011, la Corée du Sud a exporté 436 000 véhicules vers l'Union européenne, plus 150 000 en un an. Les constructeurs européens 75 000 seulement, le marché leur restant relativement fermé. Il faut oser ! Soit 15 000 exemplaires supplémentaires seulement. Et encore, souligne M. Marchionne, s'agit-il de modèles haut de gamme allemands. Conclusion « Cet accord a été une erreur, personne n'y a rien gagné sauf les marques premium. »
Et ce n'est qu'un début. Sont en cours des négociations de libre-échange avec l'Inde, le Japon, d'autres pays asiatiques et du Mercosur. Ce patron qui mériterait de militer dans un parti souverainiste ou de figurer au Comité de soutien de Marine Le Pen ou de M. Dupont-Aignan considère que le problème ce sont « les conditions de concurrence (qui) ne sont pas comparables », du fait du soutien de la Corée à son industrie et de barrières non douanières. Un exemple, le gouvernement coréen pénalise les concessionnaires qui distribuent des voitures étrangères. « Au Japon, l'État soutient la demande de mini-voitures, un segment réservé aux Japonais », précise-t-il. Le mot est lâché, pour se protéger, oui, se protéger « l'Europe devra vérifier la prochaine fois qu'elle sait ce qu'elle signe » avant de conclure un nouvel accord de libre-échange, insiste-t-il.
À ce point de la rédaction, on ne peut que se scandaliser de l'indifférence, de l'incompétence, de la nocivité, de la complicité sans doute, à la fois des fonctionnaires, hauts notamment, des conseillers des ministres, des ministres eux-mêmes. Comment peuvent-ils ainsi tirer contre leur camp ? Le réquisitoire se poursuit « L'Europe pousse à signer des accords de libre-échange, souvent inégalitaires, alors même que l'industrie manque de compétitivité sur ce continent et ne peut pas survivre par elle-même » On comprend mieux maintenant pourquoi les constructeurs sont en situation de surproduction. Il s'agit du manque de compétitivité aggravée par les conséquences du libre-échangisme qui permet l'introduction en masse de véhicules bon marché. Pour la France, le coup de grâce a été porté à notre industrie automobile par Renault, entreprise dont l'État français est actionnaire, avec l'ouverture d'une usine au Maroc, dont la production est majoritairement destinée au marché français. Depuis 1945, sous l'impulsion des grandes firmes américaines l'enseignement de la doctrine idéologique libre-échangiste a été imposé aux universités américaines financées par ces entreprises ; les prix Nobel assurèrent le relais, à l'exception notoire de Maurice Allais, méprisé et ignoré ; les organismes internationaux mondialistes (FMI, GATT, OMC, OCDE), le Siècle, Bilderberg, etc. propagèrent et imposèrent le dogme ; les "élites" économiques issues des grandes écoles qui avaient tété le lait empoisonné à la source du "savoir" n'imaginaient pas que le libre-échangisme est nocif, etc. Résultat, il fallait abattre les frontières et laisser les portes grandes ouvertes, s'opposer aux partis souverainistes et nationaux, ridiculiser leurs critiques et leurs propositions. Etc. On en est là, et on vient de voir ci-dessus que les conséquences de l'idéologie triomphante sont désastreuses. Combien de politiques, combien de chefs d'entreprise, combien de gestionnaires, combien d'experts, combien de journalistes liront le réquisitoire implacable de M. Sergio Marchionne, autrement plus responsable et au fait des réalités que les clowns clones qui baragouinent ou écrivent dans les divers média ?
Pierre PERALDI. Rivarol du 20 avril 2012 -
Mettre un terme aux interventions du FMI ?
Minimisée, dédaignée, déformée par les médiats hexagonaux la polémique entre les autorités européennes et le Fonds monétaire international mérite qu'on s'y attarde.
De quoi s'agit-il en effet ?
Dès le 16 juillet, sur le site de "Die Welt" était publié un long article relatant la teneur d'un entretien avec Mme Viviane Mme Reding, vice-présidente de la Commission européenne, à paraître en date du 17 dans les colonnes de la "Stuttgarter Zeitung".
Le site internet du Figaro (1)⇓, reprenant l'AFP résume sa nouvelle mise en garde sous le titre suivant "UE : Viviane Reding veut abolir la troïka". (2)⇓
Un peu court, semble-t-il, par rapport au long texte à l'origine du débat. La responsable européenne considère, entre autres, que la "troïka" cette émanation supposée des "bailleurs de fonds internationaux" a, désormais, "fait son temps". Elle fait remarquer que sa mise en place en 2010 remonte à une période où l'Europe ne disposait pas des dispositifs de stabilité, adoptés depuis.
À cet argument juridique elle en ajoute un autre : celui de l'impopularité grandissante, pour ne pas dire les campagnes de haine orchestrées à bon compte contre les trois technocrates dans les diverses capitales où ils viennent régulièrement inspecter les mesures de rigueur planifiées et, probablement, nécessaires.
Au bout du compte la question que pose Mme Reding porte sur la légitimité d'une intervention extra-européenne, celle du FMI, en Europe. (3)⇓ Le Fonds Monétaire International intervient-il quand les collectivités locales américaines font faillite ?
L'intervention du FMI fut inventée en 2010, sous prétexte de "sauver l'euro", par Strauss-Kahn, avec l'appui de son prête-nom, président de l'Internationale socialiste et, accessoirement chef du gouvernement d'Athènes, Georges Papandréou.
Mme Lagarde, a prétendu réagir au nom du FMI mis en cause. Ci-devant ministre des Finances du gouvernement Fillon, ayant succédé en juin 2011 à Strauss-Kahn, empêché, à la tête du FMI, elle a cru bon d'ironiser avec toute l'arrogance dont les oligarques parisiens savent exaspèrent nos voisins : ils ne débattent pas, ils n'argumentent jamais, ils "expliquent".
Devons-nous penser qu'en toutes circonstances les solutions du FMI sont les bonnes ? Non : les économistes de cette organisation viennent officieusement de reconnaître eux-mêmes qu'ils ont accumulé les erreurs dans la gestion de la crise de la dette des pays de l'Europe du sud.
En regard deux choses méritent d'être retenues dans cette affaire, outre le fait que la [méchante]* Luxembourgeoise de Bruxelles (4)⇓ peut avoir raison, sur ce point et la [gentille] Française de Washington avoir tort. Incroyable n'est-ce pas ?
Le FMI ne représente pas l'assainissement nécessaire des finances publiques d'États mis en faillite par les démagogies et les bureaucraties syndicales. Le FMI n'est que l'embryon de la gouvernance technocratique mondialiste.
Sa présence dans la "troïka" a fait son temps.
JG Malliarakis http://www.insolent.fr/
Apostilles
- cf. http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2013/07/16/97001-20130716FILWWW00522-ue-viviane-reding-veut-abolir-la-troika.php⇑
- Depuis 2010 on appelle ainsi le comité de trois technocrates représentants respectifs du FMI, de la Commission européenne et de la Banque centrale européenne supposés apporter "la" solution aux résorptions des dettes souveraines en Europe dans le cadre de la monnaie unique.⇑
- Dès le règlement, assez "novateur", de la crise chypriote on savait que les représentants de l'Union européenne n'avaient pas apprécié pas la solution spoliatrice des déposants. Or elle fut imposée par les services de Mme Lagarde. Un lapsus du jeune président socialiste néerlandais de l'Eurozone s'en était suivi. IL fut très vite démenti sur le principe… et confirmé cependant par les décisions ultérieures. Il s'agissait bien de faire de la procédure un précédent que l'on prétend renouveler dans les autres crises analogues.⇑
- Mme Viviane Reding dispose habituellement de toutes les qualités nécessaires pour désobliger les adversaires de l'eurocratie. À vrai dire les médiats parisiens, les souverainistes hexagonaux et les inconditionnels du droit de l'État ne parlent jamais d'elle. À peine se souviendra-t-on qu'en 2010 elle avait engendré une controverse position contre les déclarations du président français à propos des gens du voyage. Or, après avoir été l'éditorialiste du principal quotidien du Grand-Duché, le Luxemburger Wort, cette ancienne sorbonnarde, née en 1951, est devenue, à partir de 1999, l'un des piliers de la Commission européenne. Elle en assume aujourd'hui la charge de la Justice, des droits fondamentaux et de la citoyenneté. Ainsi Mme Reding joue-t-elle donc un rôle pivot au sein de cette Europe institutionnelle tant décriée dans le pays même qui en a conçu la plupart des dispositifs : la France, ou plutôt ses représentants officiels, ès Delors et Lamy pour le traité de Maastricht, d'où sont sortis l'euro et la Banque centrale, ès Juppé pour le calamiteux traité de Nice, ès Giscard pour la constitution avortée devenue Traité de Lisbonne.
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Retraites : encore une réforme pour rien ?
par Pierre Marchand * - Le gouvernement a lancé au début du mois une concertation sur les retraites avec les partenaires sociaux. Le sujet, aussi brûlant par son urgence que par les réactions qu’il risque de susciter, a fait l’objet de diverses annonces et commentaires de la part du gouvernement.
Des commentaires bien à son image : imprécis, parfois contradictoire et souvent inutiles.
Evasif fiscal
Par la voix de Marisol Touraine1, il avait promis une réforme « juste » (comprendre : tout le monde va payer, surtout les classes moyennes). Des annonces pourtant mal perçues par les syndicats qui reprochent au gouvernement son manque de clarté. Et il est vrai que personne ne discerne les véritables intentions du gouvernement, qui commande un rapport aux conclusions plutôt limpides2 et s’empresse d’en contester leur application dans le futur projet de réforme… Qui a dit qu’on ne sortait de l’ambiguïté qu’à son détriment ? Et de se justifier en prétendant vouloir laisser un maximum de place à la concertation. Seule certitude, le sort réservé aux retraités. Pour le peu qu’on en sache aujourd’hui, le mot d’ordre pourrait se résumer ainsi : on ne change rien, on fiscalise. Une musique qui prend une allure de rengaine tant le gouvernement nous la sert depuis un an. Autre certitude, l’absence de remise en cause des régimes spéciaux. Pourtant, quand la société change il faut que la législation
l’accompagne. C’est l’un des grands arguments que le gouvernement avait mis en avant pour justifier la loi sur le mariage unisexe. Mais les grands principes (et les bons sentiments) ne valent que s’ils permettent de flatter l’électorat. Ainsi, les privilèges subsisteront au sein de certaines professions mais surtout dans la fonction publique. Là, peu importe l’évolution de la société, ce qui est acquis est acquis et doit le rester. Qui a dit que le problème de l’égalité, c’est qu’on ne la voulait qu’avec nos supérieurs ? L’égalité, ça vaut pour la cause homosexuelle, pas pour celle des travailleurs…
Vacuité et démagogie [...]
* Pierre Marchand est rédacteur à L’AF, spécialiste des questions économiques
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Élargissement de l'Union européenne : un chaos annoncé (arch 2002)
❏ Si Jean de La Fontaine était encore de ce monde, sa fable sur la grenouille qui se voulait plus grosse que le bœuf caricaturerait à merveille le processus d'élargissement du Moloch européiste. 6 hier, 15 aujourd'hui, 25 demain ... Où s'arrêtera la boulimie fédéraliste des technocrates qui nous gouvernent ? L'Europe de Madère à Riga fait rêver tous les ayatollahs du mondialisme. Or, comment une Europe déjà incapable à 15 d'adopter une position commune sur la crise irakienne pourrait-elle dégager un semblant de consensus à 25 ? Pourquoi cacher plus longtemps que ce énième charcutage vise à rogner au nom de la nécessaire cohésion les dernières parcelles de souveraineté que possèdent encore les États ?
Après le «oui» arraché à des Irlandais soumis à une intense campagne de désinformation aux accents comminatoires, Bruxelles est prête pour le saut dans l'inconnu, disposée à accueillir dix nouveaux pays d'Europe centrale et de l'Est, dont le revenu par tête n'atteint en moyenne que 40 % de celui des Quinze et qui entrent dans l'Union européenne plus pour bénéficier de la manne financière que pour contribuer à sa relative prospérité. Et dans un marché européen où la récession et le taux de chômage touche déjà près de 9 % de la population active, l'entreprise est plus que risquée, elle est suicidaire. Tout d'abord pour les finances d'États déjà fortement endettés et qui devront débourser 40 milliards d'euros pour financer l'élargissement (une hausse de 5 % pour la France dont la contribution au budget communautaire pour 2003 est déjà de 15,8 milliards d'euros), mais aussi pour les fonds structurels et plus précisément la Politique agricole commune qui constituent à eux deux les trois quarts du budget européen.
❏ La France n'a rien à gagner
En se mettant d'accord sur un plafonnement du budget européen de 2007 à 2013, Chirac et Schroder vont contraindre les 25 à vivre sur le même budget que celui attribué aujourd'hui aux Quinze. La mort à court terme pour des agriculteurs qui devront de surcroît subir la concurrence déloyale des produits fabriqués à des coûts moindres.
Qu'a donc à gagner la France d'une Union européenne élargie, contraire aux intérêts de ses peuples et qui ne sert, comme le souligne Jean-Marie Le Pen, que « les intérêts mercantiles des uns (les multinationales) et les idéaux utopistes et antinationaux des eurocrates de Bruxelles » ? Rien si ce n'est une perte d'influence dans une Europe noyautée par Berlin et dans une moindre mesure par Londres et un afflux d'immigrés attirés par une législation sociale incitatrice. Sans compter une hausse du chômage qu'entraîneront inéluctablement les délocalisations d'entreprises soucieuses de s'installer dans des pays où les salaires sont largement inférieurs à ceux en vigueur à l'Ouest. C'est dans ce magma fédéraliste où la France ne conservera qu'un commissaire sur vingt-cinq, 9 % des voix au Conseil et 9 % d'élus au Parlement européen, que les nations européennes sont invitées à se dissoudre, passant du mirage européiste à la prison des peuples.
✍ Éric Domard FDA décembre 2002 -
L'IMMIGRATION A-T-ELLE ENCORE UN INTERET ECONOMIQUE (arch 2004)
L'époque actuelle est celle de la mondialisation. Tout le monde sait cela mais n'a pas encore conscience que cela a changé la perception et le rôle de l'immigration. Les entreprises délocalisent là où la main d'œuvre est la moins chère. Les multinationales, négriers des temps modernes, ont compris cela depuis longtemps et savent très bien que les immigrés sont donc moins chers chez eux plutôt que chez nous. Tout immigré lorsqu'il entre en France ou en Europe, bénéficie du système social en place et devient par le fait même trop cher, en tout cas beaucoup plus cher que celui qui est resté sur place. Il n'y a donc plus aucun intérêt économique (en admettant qu'il y en ait eu) pour un pays comme la France de faire venir une main d'œuvre massive non qualifiée comme on continue de le faire. De plus, les entreprises qui-ne-délocalisent-pas licencient, pour rester compétitives, la main d'œuvre non qualifiée en automatisant et font donc appel à une main d'œuvre plus qualifiée. Les immigrés n'intéressent donc plus les négriers puisqu'ils délocalisent. On a donc voulu substituer au vieux slogan éculé : « Les immigrés font le travail que les Français ne veulent pas faire » un slogan tout aussi creux : « Les immigrés font le travail que les Français ne peuvent pas faire » comme si les Français étaient trop bêtes pour faire certains travaux ou le pouvoir politique trop stupide pour anticiper les besoins professionnels de la France.
A propos de l'immigration pour des raisons idéologiques, on a dit tout et le contraire de tout pour la faire accepter par les Français. Actuellement en France entrent les «bac moins 5» et sortent les «bac plus 5» comme l'écrivait Nicolas Baverez dans son livre « La France qui tombe ».
La politique se faisant malheureusement à coup de slogans, certains répètent celui-ci : « les immigrés paieront les caisses de retraites » alors que plus de 90% des immigrés qui entrent en France sont à la charge de la collectivité et sans emploi. Comment peuvent-ils participer aux caisses de retraite ? Tout cela représente des sommes considérables qui pourraient être utilisées pour autre chose (recherche, investissement...)
La politique de l'immigration massive a été décidée dans les années soixante pour peser sur les salaires. D'autres pays avaient fait un autre choix puisque comme le soulignait Paul Lambert, le Japon par exemple avait pratiqué l'immigration zéro forçant le patronat japonais à moderniser l'appareil productif et ne pas recourir à la facilité de l'appel à l'immigration. Le résultat a été celui-ci : le Japon, qui dans les années cinquante avait une économie inférieure à la nôtre, nous a surpassés dans l'absolu. Sans immigration, par sa modernisation, le Japon a connu des taux de croissance de 10% l'an. Cet exemple montre que des choix politiques autres sont toujours possibles.
Pourquoi, puisque l'immigration n'est plus une nécessité, connaît-on encore celle-ci sous sa forme massive : 200 000, 300 000 personnes chaque année comme si cela était une fatalité ou une nouvelle norme dictée par qui ? l'ONU ? Bruxelles ? Alors que la France est lourdement endettée, (mille milliards d'euros) cela pèse sur notre économie. A côté, le chiffre de quelques milliers de fonctionnaires que l'on voudrait supprimer semble bien léger.
Les fondements politiques de l'immigration sont masqués idéologiquement. Veut-on à tout prix détruire les vieux peuples européens ? Les lendemains qui chantent se trouvent-ils dans les banlieues ? A-t-on envie d'y chanter « le temps des cerises » ? II faudrait demander leur avis aux Français de souche qui y vivent comme aux Français de confession juive. La France, dans un contexte de mondialisation impitoyable où ne s'en sortiront en Occident que les pays les plus performants ou les plus qualifiés, doit donc repenser totalement sa politique d'immigration.
La survie du peuple français est liée plus que jamais à sa survie économique.
par Patrice GROS-SUAUDEAU 2004 -
« Les patrons de la presse nationale/ Tous mauvais » de Jean Stern
La presse est-elle encore le Quatrième Pouvoir ou, se traînant péniblement à la remorque des médias audiovisuels, n’est-elle plus qu’un tigre de papier ? La question se pose avec de plus en plus d’acuité au moment où tant de journaux, exsangues, ne survivent que grâce aux « aides directes à la presse » (13 millions d’euros pour Le Figaro, 14 millions pour Libération et 17 millions pour Le Monde en 2010) généreusement versées par un Etat qui, lui-même aux abois, pourrait bien être contraint de fermer le robinet. CL
Un journaliste de Marianne assistait-il, le 13 octobre, à la tonique Journée de réinformation organisée par Polémia sur le thème « Face à la tyrannie médiatique : nouvelles donnes, nouvelles cibles, nouveaux outils » et au cours de laquelle fut présenté l’Observatoire des journalistes et de l’information médiatique (www.ojim.fr/) présidé par Claude Chollet ? Toujours est-il que, treize jours plus tard, l’hebdo fondé par Jean-François Kahn faisait sa une sur ou plutôt « contre le panurgisme médiatique » : une charge violente contre les confrères qui « disent tous la même chose, au même moment ». Rien n’est d’ailleurs plus logique puisque, selon un sondage publié le 17 avril dernier par le même magazine sur les intentions de vote des journalistes au premier tour de la présidentielle, 76,7% des sondés se partageaient entre François Hollande, Jean-Luc Mélenchon et Eva Joly, les autres s’abstenant ou affirmant leur préférence pour des candidats marginaux (Philippe Poutou, Jacques Cheminade…), cependant que Nicolas Sarkozy et Marine Le Pen obtenaient tous deux… 0% ! Un vote aux antipodes de celui des Français.
Une consanguinité dévastatrice entre journalistes et politiques
La fracture va s’accentuer puisque les intentions de vote des élèves des écoles de journalisme étaient encore plus caricaturales : là, c’est 100% des suffrages qui se portaient sur les candidats oscillant du rose au rouge cramoisi : un décalage radical avec le corps électoral. De même que « la consanguinité de plus en plus forte et dévastatrice entre journalistes et politiques » est soulignée le 1er novembre par le sociologue Thierry Wolton sur le site latribune.fr, ce décalage explique la perte de crédibilité de la presse et donc la fuite du lectorat. Ce dernier préfère se contenter des journaux radio-télévisés, tout aussi conformistes mais gratuits, et, surtout, recourt de plus en plus à Internet pour s’informer.
Evidemment, ce n’est pas cette gauchisation croissante des faiseurs (de moins en moins) d’opinion qu’incrimine dans la crise actuelle Jean Stern, ancien du Libération de la haute époque qu’il continue d’idéaliser et cofondateur du magazine homosexuel Le Gai-Pied. Mais, à condition de le lire d’un œil critique et de conserver pendant la lecture son libre-arbitre et même son esprit critique, son essai Les patrons de la presse nationale/ Tous mauvais n’en est pas moins riche d’enseignements.
Main basse sur la presse
Comme dans Les médias en servitude publié par Polémia et dans Ils ont acheté la presse de Benjamin Dormann (éd. Jean Picollec), Jean Stern constate que, si la presse devenue une « machine à décerveler, moutonnière et banale » a perdu en vingt ans des millions de lecteurs, c’est en raison de la mainmise sur ces organes affaiblis des magnats du luxe (Pinault, Arnault et Bergé), de l’armement (Lagardère et Dassault), de la communication (Xavier Niel) et maintenant de la banque avec Antoine Bernheim, Edouard de Rothschild et surtout Matthieu Pigasse (Lazard).
S’interrogeant sur ces rachats, alors que « les grands médias ne gagnent pas d’argent. Au contraire, ils en perdent », Jean-Yves Le Gallou, président de Polémia, en concluait lors de la remise des Bobards d’Or 2011 : « Ceux qui investissent dans les médias n’en attendent donc pas une rétribution financière immédiate. Non. Ils visent à acquérir du pouvoir, de l’influence » et aussi, accuse Jean Stern, le silence complice de leurs nouveaux salariés sur leurs agissements : « Maintenue tout juste hors d’eau, la presse enquête peu, analyse peu et sert en copié-collé les mêmes idées. » Exeunt, dès lors, les enquêtes économiques, sociales et internationales susceptibles de gêner les oligarques autopromus patrons de presse.
Danseuses ou vaches à lait… fiscales ?
A cela s’ajoute un autre intérêt strictement financier. Qu’il s’agisse du Monde, de Libé ou desEchos, ces coûteuses « danseuses » sont indispensables sur le plan fiscal. Le chapitre consacré au sujet (« Le hold-up des holdings ») compte parmi les plus intéressants du livre de Jean Stern. « Les holdings “actives”, écrit-il, sont devenues les centres de contrôle et de pouvoir des grands capitalistes français et donc des patrons de journaux. Le principe de la holding active est simple : une maison mère possède des filiales et travaille pour elles », lui facturant pour ce faire des « prestations », souvent exorbitantes, notamment pour des sièges somptueux. « Avec les factures de ces prestations, la holding peut “fabriquer” du déficit dans ses filiales. En pompant leur chiffre d’affaires, elle peut ainsi consolider ses comptes en faisant remonter pertes et revenus. Des experts en flux financiers créent à l’intérieur des groupes français des holdings en chaîne, ce qui permet de faire apparaître des pertes tout aussi artificielles et de diminuer ainsi l’imposition globale. »
Ainsi, « l’achat d’une société éditant un journal en perte peut donc se révéler une bonne affaire fiscale pour une holding. C’est le cas du groupe LVMH de Bernard Arnault. Les pertes de sa filiale à 100% Groupe Les Echos – entre 17 et 35 millions d’euros en 2010 selon les sources – permettent de baisser l’imposition totale de LVMH qui affiche globalement trois milliards de bénéfices en 2011 ».
La mortelle Sainte Alliance entre gaullistes et communistes
Reste à savoir, bien sûr, pourquoi la presse nationale française, si diverse et si florissante avant la guerre (en pleine Occupation, Le Petit Parisien tirait encore à 600.000 exemplaires), n’a cessé depuis de s’étioler, au point de n’avoir d’autre recours que de se donner à d’avides magiciens qui s’en débarrasseront aussi vite quand ils n’en auront plus l’utilité.
Parmi les facteurs ayant concouru à mettre les « médias en servitude » est évidemment écrasante la responsabilité des « journalistes-managers » qui ont sévi ces dernières décennies avec autant d’arrogance que d’avidité : après s’être offert le mirobolant salaire de 400.000 euros par an, le calamiteux Jean-Marie Colombani, ancien directeur du Monde finalement mis en minorité en 2007, obtint 950.000 euros d’indemnités de départ.
Mais cela ne suffit pas à expliquer l’agonie de nos quotidiens. Ceux qui ont lu la fondamentale et monumentale (500 pages) Histoire de la spoliation de la presse française que Claude Hisard publia en 1955 à la Librairie française savent à quoi s’en tenir. Les autres liront avec profit le chapitre de Jean Stern sur la « Sainte Alliance à la Libération », avec le « partage des tâches entre gaullistes et communistes : aux premiers, les rédactions, aux seconds, la distribution du papier, les ateliers et les imprimeries » dont les ouvriers syndiqués – au contraire de nombreux journalistes – échappèrent à toute épuration (y compris ceux qui avaient quatre ans durant assuré la parution de la Pariser Zeitung allemande, dont le siège rue Réaumur devint celui du très résistancialisteCombat, où ils furent immédiatement embauchés).
Cette Sainte Alliance, dont le Syndicat du Livre CGT, toujours plus pléthorique en raison de son clientélisme et de son activisme, tira d’ahurissants profits pour lui-même, ainsi placé en situation de monopole, et pour ses adhérents (bien mieux rémunérés que les journalistes pour des journées de six heures seulement quand la semaine était alors de 40 heures, tout dépassement d’horaire, fût-il de quelques minutes, coûtant aux journaux une période supplémentaire), se révéla mortelle pour la presse. Ajoutons que les Messageries de presse tombèrent, elles aussi, sous le joug du Syndicat du Livre qui y exigea la multiplication des emplois, généralement par cooptation et souvent surnuméraires, alors même que la mécanisation était en marche. Les grèves incessantes sous le moindre prétexte, avec occupations et parfois incendies des dépôts de papier, ne contribuèrent pas peu à la désaffection des lecteurs, entraînant la disparition de nombreux kiosques.
Or, mis à part Emilien Amaury, patron du Parisien libéré qui se révolta contre ce système (après en avoir été partie prenante à la Libération), et y perdit la vie en 1977, tous les groupes de presse acceptèrent le carcan, qui aboutit à l’étranglement de leurs journaux.
Les drôles de noubas de L’Huma
Néanmoins, la collusion perdure. « Chaque année, en lever de rideau de la Fête de L’Humanité », rappelle Jean Stern, un dîner à La Courneuve réunit « le véritable comité central de la “cogestion” à la française de la presse ». En 2011, autour des responsables de L’Huma et des pontes de la CGT, banquetaient ainsi et échangeaient force gracieusetés Marc Feuillée, directeur général du Groupe Figaro et président du Syndicat de la presse quotidienne nationale, Jean-Pierre Baechter (Dassault), Pierre-Jean Bozo (20 minutes), l’ancien ministre giscardien Anne-Marie Couderc (Presstalis, ex-NMPP), François d’Orcival (Valeurs actuelles), Louis Dreyfus (Le Monde), Olivier Henrard, conseiller de Nicolas Sarkozy pour la culture et la presse, David Kessler (Les Inrockuptibles de Pigasse), Emmaneul Hoog (AFP), Bruno Lesouëf (président de la presse Lagardère), Francis Morel (Les Echos), Yvan Levaï (France Inter), etc.
Au vu de cette union impure entre les représentants des plus grandes fortunes de France et les prétendus « soldats de la faim », il est difficile d’espérer une « refondation » de la presse.
Se présentant aujourd’hui comme « directeur pédagogique de l’EMI (Ecole des métiers de l’information), Scop (*) de formation à l’Université Paris X [Nanterre] », Jean Stern conclut en bon gauchiste que si les journalistes « ne veulent pas finir broyés », ils doivent « oublier les patrons » et « retrouver la parole et la rage d’écrire ». Mais, si tant est qu’elles puissent s’exprimer, de quel poids seront cette parole et cette rage si elles restent univoques, si la profession continue de psittaciser le credo marxiste et antiraciste qui exaspère une majorité de lecteurs mais ne gêne nullement les « patrons », bien au contraire, puisqu’il sert leurs ambitions mondialistes ? A force d’alignement bêlant sur les dogmes de la saison, les mutins de Panurge finiront comme les moutons.
Claude Lorne http://www.polemia.com/
3/11/2012
Jean Stern, Les patrons de la presse nationale/ Tous mauvais, La Fabrique éditions, octobre 2012, 210 pages, avec notes et annexes (mais pas d’index).
Note :
(*) Une Scop (Société coopérative et participative) est soumise à l’impératif de rentabilité comme toute entreprise mais elle bénéficie d’une « gouvernance démocratique » et d’une répartition des résultats favorisant la pérennité des emplois et du projet d’entreprise. -
Transparence... transparence... Vous avez dit transparence ?
À grands ahans, nos députés ont fini par adopter les projets de loi sur la transparence de la vie publique et la lutte contre la fraude fiscale. 326 voix contre 193 pour le texte sur la transparence ; 366 voix contre 174 voix sur le texte contre la fraude fiscale. Un vote acquis, pour la majorité, dans le souvenir de l'affaire Cahuzac, dont le principal responsable devait être auditionné, quelques jours plus tard, par la commission d'enquête sur les éventuels dysfonctionnements du gouvernement en l'espèce. À commencer, bien sûr, par l'ignorance affichée et stupéfaite du chef de l’État.
Le débat aura beaucoup tourné autour de la question de la publication à donner aux déclarations de patrimoine des élus. En définitive, et du fait de l'opposition manifeste d'une grande partie de sa majorité, à commencer par celle du président de l'Assemblée Claude Bartolone, ni les parlementaires, ni les autres élus ne verront publier leur déclaration de patrimoine. Elle sera seulement consultable en préfecture, avec interdiction de les divulguer sous peine de sanction pénale.
Autant dire que la mesure perd beaucoup de sa force. On imagine mal des cohortes de citoyens se précipiter en préfecture pour connaître la valeur des biens de leur édile. L'éloignement, une certaine impossibilité technique et pratique, et peut-être la peur d'être fiché, l'emporteront rapidement, et la plupart du temps, sur l'envie et la suspicion. Tant pis, en définitive, pour les ministres qui, eux, n'ont pas eu le choix. Mais qui se sont partiellement tiré d'embarras en affectant de remplir leur déclaration de patrimoine comme s'il s'agissait de celle des impôts... Avec dissimulation donc d'un certain nombre d'éléments pouvant être considérés comme relevant de leur fonction, ou de domaines flous, comme celui, par exemple, des œuvres d'art.
Seront publiques en revanche les déclarations d'intérêts, qui indiqueront toutes les activités (bien que, a priori, aucun métier ne leur soit interdit) et relations que les parlementaires, leurs proches ou leurs collaborateurs, peuvent avoir, et qui sont, un jour ou l'autre, susceptibles de créer des conflits d'intérêt.
Dans l'opposition, majoritairement opposée à de telles dispositions, même quand la non-publication leur a retiré de leur réalité, on a crié au « voyeurisme », assurant que le Parlement, désormais, allait se trouver sous la tutelle de la (future) Haute autorité de la transparence, dont la fonction consistera essentiellement à contrôler lesdites déclarations.
La peur du citoyen
Qu'il soit nécessaire de voter une loi de moralisation politique donne déjà une triste idée de notre République. Mais la peur relève surtout ici du théâtre. À moins que certains parlementaires n'aient - déjà - des raisons de craindre les dispositions de la nouvelle loi sur la fraude fiscale, qui durcissent le dispositif pénal : création d'un délit de fraude fiscale en bande organisée, possibilité de recourir à tout type de preuve, y compris illicite, contre les fraudeurs supposés, allongement du délai de prescription de trois à six ans, etc.
Évoquant les nouvelles lois, Jean-Marc Ayrault a assuré qu'il s'agissait de la « législation dans toute l'Europe la plus exigeante ». Peut-être.
On peut aussi supposer que les élus, parlementaires en tête, soient tout à coup touchés par une espèce de grâce citoyenne, comme ces dix députés, de droite et de gauche, qui ont appelé à l'« abolition » de leurs privilèges. Et se sont dressés contre l'opacité.
Il en faudra plus, cependant, pour convaincre nos concitoyens. Selon un sondage réalisé en pleine affaire Cahuzac (mais on pourrait évoquer les affaires Tapie, Guéant...), 77 % des Français envisageaient, sans état d'âme, la malhonnêteté de leurs élus. Il faudra plus qu'une petite loi taillée sur mesure pour leur rendre leur confiance en la politique.
Olivier Figueras monde & vie 2 juillet 2013