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géopolitique - Page 753

  • Poutine et Louis XIV

    Le président russe est-il un autocrate expansionniste obsédé par l'annexion des territoires limitrophes ou un nationaliste prudent désireux de protéger son pays ?

    La Russie géopolitique de 2014 est évidemment l'héritière de l'URSS. Frontières, alliances, place dans les institutions internationales, elle ne tient son rang actuel qu'en raison du rôle que l'Occident a bien voulu assigner au « bloc de l'Est ». Il faut en effet poser trois remarques : d'une part, l'Occident (c'est-à-dire les Etats-Unis) feint de découvrir aujourd'hui que Russie et URSS n'étaient qu'une même réalité, comme si brusquement se révélaient les intérêts nationalistes de la Russie à travers son instrumentalisation du communisme international; d'autre part, l'Occident a une volonté clairement impérialiste dans l'imposition d'une mondialisation libérale (la Russie n'étant pas vierge de toute influence, à cet égard) ; enfin, l'Occident tient à ce que la Russie continue de jouer le rôle de la menace immédiate : Zbigniew Brzezinski et son Grand échiquier est le promoteur de cette thèse américaine paranoïaque.

    Une caricature aux contours mal définis

    Aujourd'hui, il est donc coutumier et nécessaire que les commentateurs grossissent à plaisir les forces et les faiblesses de la Russie, mettent en avant autant la gabegie, la misère, la corruption que les richesses naturelles, la puissance militaire, etc., saluent l'intelligence de Poutine comme ils en déplorent la rouerie, bref dressent constamment un épouvantail, une caricature, un simulacre excitant à la fois la crainte tout en suggérant une victoire facile.

    Bizarrement, Poutine se sent menacé ; il réagit. Et depuis quelques semaines, les thèses s'affrontent: de quoi Poutine n'est-il pas le nom? On lui prête les plus noirs desseins et les pratiques les plus infâmes. Avec lui, jamais le droit des peuples, le droit des nations, le droit international et les consciences douloureuses n'ont été si violentés.

    À bien considérer les cartes, l'impérialisme russe a en effet quelques restes : présence militaire en dehors des frontières, communautés russo-phones, accords économiques déséquilibrés. Autrement dit, tout ce qui fait la politique étrangère des Etats-Unis ou de la France, ces deux pays ayant en plus la prétention messianique d'apporter la vérité démocratique au monde entier, si nécessaire par la force, qu'ils ne rechignent jamais à employer, le « fais-ce-que-je dis-pas-ce-que-je-fais » étant devenu la règle.

    Seul contre un libéralisme envahissant

    C'est précisément ce messianisme qui est en cause - et c'est le moment où le parallèle avec Louis XIV peut être fécond. Quand Louis lance sa grande série d'annexions diplomatiques ou guerrières, il a moins en tête un impérialisme français que la volonté de restaurer son pays continuellement grignoté sur ses marges et fragilisé par les guerres de religion. Il veut restaurer son pré carré et contrer l'appétit des Habsbourg.

    Exactement comme Poutine qui voit se dresser contre sa Russie toutes les démocraties libérales mondialistes : en 2004, en 2007, les élargissements européens poussent l'Europe vers l'Est ; la signature du Partenariat oriental de 2009 poursuit l'encerclement en gagnant l'Ukraine, mais aussi l'Arménie, la Géorgie, etc. ; les « nouveaux » Européens rejoignent l'OTAN. Bref, Poutine se sent étranglé : il multiplie les accords diplomatiques et économiques.

    Face à Louis XIV et à sa diplomatie tout à la fois tatillonne et musclée (Jean-Christian Petit-fils y consacre des pages très intéressantes), les Européens ont pris peur : que la France veulent regagner ses places fortes et mettre au pas la poussière de communautés, principautés, archevêchés, plus ou moins indépendants et vaguement inféodés à celui qui paye le plus, très bien ; mais jusqu'où irait le jeune roi ? Là où Louis se pose en garant de la paix de sa nation, les autres ne veulent voir qu'un belliqueux, la propagande française officielle renforçant le malaise. A l'arrivée, en soixante ans, la France aura poussé au Nord, absorbé la Franche-Comté et annexé l'Alsace : ça reste modeste.

    Protection ou expansion ?

    Il est fascinant que dans l'histoire de la Crimée (et bientôt de la Transnistrie, de l'Ossétie...) on prête à Poutine des volontés expansionnistes guerrières quand il ne fait que vouloir préserver les populations russes et son indépendance territoriale face à un plan avoué des États-Unis et de l'Europe de faire basculer des régions entières dans leur sphère d'influence politique et économique. C'est le camp du bien qui hurle à la guerre, parle de nécessaire et juste coalition - exactement ce que les princes protestants firent pour ne pas conclure de paix avec Louis XIV. La défense de la nation russe passe aussi par la promotion de la chrétienté : ce n'est pas sans arrière-pensées, certes, comme la visite d'Obama au pape François, comme la prétention des rois catholiques à maîtriser le spirituel. C'est aussi une autre façon de résister à un bonheur libéral qui se révèle comme une nouvelle religion et qui est brandi comme une arme d'influence, exactement comme les protestants luttaient politiquement contre le roi.

    Il faut considérer que Poutine est un nationaliste, pas un expansionniste, et qu'il a décidé derefuser la fatalité d'un encerclement économique,diplomatique, militaire et idéologique, de protéger les populations russophones et de lutter contrel'Islam. Un programme qui, malgré ses déficiences, fait rêver dans une France où une soumissionéconomique aux États-Unis et une soumissionfataliste à l'Islam tiennent désormais lieu de touteréflexion politique étrangère.

    Hubert Champrun monde & vie 9 avril 2014

  • Le «gouvernement» de Kiev rejette le fédéralisme et les droits linguistiques. Il préfère flirter avec l’OTAN

    Un éclairage américain sur le fédéralisme et l’usage du multilinguisme

    Il n’y a pas si longtemps, «fédéralisme» n’était pas un gros mot en politique ukrainienne, et cela même d’un point de vue nationaliste orienté vers l’Occident. Par exemple l’année passée, le professeur Alexander J. Motyl de l’Université de Rutgers, qui commente fréquemment les événements en Ukraine, a fourni une explication éclairée de la raison pour laquelle la décentralisation serait judicieuse : en particulier pour lutter contre la corruption (voir le commentaire de l’AIU de l’époque dans l’article «Decentralizing Ukraine: an Issue that Deserves Serious Discussion» [La décentralisation de l’Ukraine: un sujet qui mérite d’être discuté], août 2013).

    Cependant, à présent, les gouvernements occidentaux ne voient dans la perspective de la décentralisation qu’un stratagème visant à désintégrer l’Ukraine. John Kerry, le secrétaire d’Etat américain a délaissé la question du fédéralisme au «gouvernement» de Kiev qui n’a pas été élu, et qui a toutefois été accepté sans réserve par les Etats-Unis comme par l’Union européenne en tant que gouvernement légitime et voix autoritaire de tous les Ukrainiens. Il n’est donc pas surprenant que les habitants fulminent :
    «Pourquoi la Russie n’adopte-t-elle-pas le fédéralisme? Pourquoi ne confère-t-elle pas davantage de pouvoir aux régions nationales de la Fédération? Pourquoi n’introduit-elle pas d’autres langues officielles des Etats, à côté du russe, dont l’ukrainien qui est parlé par des millions de Russes?» […]

    «Au lieu de sermonner les autres, il vaut mieux d’abord mettre les choses en ordre chez soi.» (Reuters, «Ukraine hits back at proposals by Russia’s Lavrov» [L’Ukraine riposte aux propositions de Lavrov], 31 mars).

    Bien sûr qu’en effet, la Fédération de Russie possède une structure fonctionnelle fédérale. Selon l’article 68 de sa Constitution, les Etats membres de la Fédération ont le droit d’adopter des langues officielles. Cela dépasse les droits des oblasts ukrainiennes. D’ailleurs, il existe des dizaines de langues officielles des différentes Républiques, dont l’ukrainien, le tatare de Crimée et d’autres langues. Inversement, comme aucune autre langue que le russe n’est parlée à l’échelle nationale, il est la seule langue officielle dans l’ensemble du territoire de la Fédération.

    C’est tout le contraire de la situation en Ukraine, où le bilinguisme ukrainien-russe est un fait quotidien dans une grande, sinon la majeure, partie, du pays. Pourtant, l’article 10 de la Constitution de l’Ukraine déclare absurdement que le russe n’est qu’une langue minoritaire.

    Quand l’Ukraine décide de considérer le fédéralisme, si elle s’y décide réellement, le pays sera obligé de fournir un cadre juridique plus réaliste à son bilinguisme fonctionnel : un cadre qui promeuve l’unité, plutôt que de provoquer le désaccord, en prenant pour exemple l’expérience d’autres pays bilingues ou multilingues.

    Une manière de faire précisément cela serait d’adopter un accord national qui permettrait de définir les rôles de l’ukrainien et du russe en tant que langues nationales en leur donnant un cadre constitutionnel fédéralisé.

    En plus, la prestation de Kiev, selon la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, reste insatisfaisante du point de vue de langues véritablement minoritaires, comme le roumain, le bulgare, le gagaouze ou le rusyn, que Kiev refuse de reconnaître à tout prix, bien que cette langue soit protégée en tant que langue minoritaire officielle en Slovaquie, Serbie, Roumanie et ailleurs.

    Si le «gouvernement» de Kiev rejette strictement et mal à propos toute discussion sur le fédéralisme et les droits linguistiques, cela ne peut aboutir qu’à un affaiblissement ultérieur de l’intégrité de l’Ukraine, plutôt que de la renforcer. Malheureusement, la priorité du «gouvernement» de Kiev est évidente : c’est son programme géopolitique, militaire et stratégique. Le 2 avril, la Commission OTAN–Ukraine a fait une déclaration dans laquelle elle soutenait ce qui suit (et ce n’était probablement pas un poisson d’avril): «Nous saluons le fait que, le 21 mars, l’Ukraine a signé les chapitres politiques de l’Accord d’association avec l’Union européenne.»

    On aurait pu penser que les «chapitres politiques» d’un accord signé avec une organisation complètement différente – l’Union européenne – ne concernent pas l’OTAN. Mais bien sûr que l’OTAN est concernée, car cet accord oblige Kiev à harmoniser ses politiques étrangères et de sécurité avec Bruxelles, qui, quant à elle, est subordonnée à l’OTAN selon les arrangements «Berlin Plus» datant de 2002.

    Si les gouvernements occidentaux continuent à se tromper de priorités et à soutenir avec détermination le «gouvernement» ni représentatif ni élu de Kiev, ils ne font que menacer l’unité fragile de l’Ukraine.    •

    James George Jatras

    Directeur adjoint de l’Institut américain en Ukraine (AIU)

    Source: AIU, 3/04/2014

    (Traduction Horizons et débats, N° 8, 14 avril 2014.)

    James George Jatras est juriste et spécialiste en relations internationales, affaires gouvernementales et sciences politiques des législations. De 1985 à 2002, il a travaillé en tant que conseiller et analyste politique de plusieurs membres républicains du Sénat américain. De 1979 à 1985, il a été fonctionnaire au sein du Secrétariat d’Etat américain. Il est membre de la chambre des avocats de la Cour suprême des Etats-Unis et des chambres d’avocats de Pennsylvanie et du district de Columbia. Il fait des conférences et publie des articles sur divers sujets dans les médias papier et en ligne.
    Il s’exprime régulièrement au sujet de la loi FATCA, notamment concernant les aspects législatifs et politiques, et il dirige le site Internet www.repealfatca.com.

    http://www.polemia.com/le-gouvernement-de-kiev-rejette-le-federalisme-et-les-droits-linguistiques-il-prefere-flirter-avec-lotan/

  • La grogne de l’armée française et des familles de militaires face aux déficiences et restrictions budgétaires

    France Info s’est intéressé à la grogne des militaires français déployés en Centrafrique: matériel déficient, conditions de vie difficiles. Les témoignages se font via les mères et épouses de militaires, qui s’expriment sur Facebook. On apprend ainsi que des véhicules sans blindage circulent dans des zones sensibles. Pour se protéger, les militaires font avec les moyens du bord: gilets pare-balles ou sacs de sable. Mais ce n’est pas tout : les véhicules blindés tombent régulièrement en panne, les pièces de rechange n’arrivent pas ou tout simplement il n’y a plus d’argent. Des journalistes ont corroboré ces allégations et ont été témoins de ces pannes fréquentes. Quant aux conditions de vie, les douches sont insuffisantes ou bien encore les tentes sont sans climatisation, les vêtements ne tiennent pas. Aux questions des journalistes, l’état-major préfère botter en touche, parlant d’une amélioration par rapport à la rusticité des premiers moments de l’opération Sangaris. Quant aux familles, elles se demandent où passe l’argent de leurs impôts, estimant que leurs maris ou fils ont droit à un meilleur matériel et des conditions de vie décentes.

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  • Kosovo: le témoignage choc d'un officier français

    Jacques Hogard est le créateur et le directeur d'une entreprise de conseil spécialisée en intelligence stratégique et en diplomatie d’entreprises à l’international, EPEE. Colonel en retraite, il était au Kosovo le patron des forces spéciales françaises lors de l'invasion de cette province serbe par l'OTAN en 1999. Il y a donc tout vu de cette forfaiture. Il livre aujourd'hui son témoignage dans un livre à paraitre le 22 mai: l'Europe est morte à Pristina.

    JH1

    Paula Corbulon

  • Les barbares à Maaloula

    Bachar al Assad s’est rendu aujourd’hui à Maaloula, qui a été reprise en début de semaine par l’armée syrienne. Il a visité le couvent grec-catholique Saints-Serge-et-Bacchus pour se rendre compte des dégâts occasionnés par les jihadistes, puis il s’est rendu au couvent grec-orthodoxe Sainte-Thècle (dont les religieuses avaient été enlevées) [...]. Les terroristes ont fait sauter le couvent Sainte-Thècle, dont une partie s’est écroulée, avant de vandaliser la nouvelle église et de brûler la porte de marbre ornée d’icônesLes murs sont carbonisés, les icônes des saints ont été arrachées, les icônes du Christ poignardées. Une série d’autres icônes d’une valeur inestimable ont été endommagées.

    Les terroristes ont volé des chandeliers, des lustres, une statue du Christ de trois mètres, en bronze doré, qui avait été donnée par la Russie en 2009. Une statue de marbre du Christ Pantocrator a été détruite par explosifs. Toutes les croix qui se trouvaient sur les dômes des monastères et les églises ont été enlevées. Des documents datant de 1.500 ans ont été brûlés.

    http://www.lesalonbeige.fr/les-barbares-a-maaloula/

  • Syrie: Washington et Riyad derrière les livraisons de missiles anti-char (WSJ)

    Situation politique en Syrie.

    Alors que la France accepte de voir partir pour la Syrie certains jeunes pour rejoindre les djihadistes, qui, paradoxalement, entre temps capturent nos propres journalistes, et assure la prise en charge financière des familles de ceux morts au combat (voir «Paris-Match» n°3384 – Du 27 mars au 2 avril 2014 – page 57), les Etats-Unis arment de missiles antichars, sans la moindre vergogne, certaines factions de l’ALS. Voyons ce qu’en dit le « Wall Street Journal » de ce jour.

    Polémia

    Les Etats-Unis et l’Arabie saoudite ont supervisé les livraisons de systèmes de missiles antichars de fabrication américaine en Syrie, rapporte dimanche le Wall Street Journal citant des sources proches du dossier.

    Auparavant, les médias occidentaux ont rapporté que des représentants du mouvement de l’opposition syrienne Harakat Hazm, qui faisait partie de la dénommée Armée syrienne libre (ASL), avaient reçu au moins 20 systèmes antichars fabriqués aux Etats-Unis.

    Un membre du mouvement a alors fait savoir que les combattants antigouvernementaux avaient appris à utiliser les armes en question et les avaient déjà employées contre les forces fidèles au gouvernement de Damas. Toujours selon lui, les missiles ont été obtenus à partir d’«une source occidentale».

    Selon le quotidien américain, le groupe Harakat Hazm a été le seul à avoir reçu des missiles américains, mais dans l’avenir ces armes pourraient tomber entre les mains d’autres groupes d’opposition anti-Assad.

    Le Wall Street Journal indique que les Etats-Unis conjointement avec l’Arabie Saoudite ont supervisé les livraisons d’armes antichars en Syrie via la Jordanie et la Turquie voisines. D’après une source au sein de l’opposition syrienne, ces livraisons ont été réalisées dans le cadre d’un programme des services de renseignement américains et saoudiens en vue de «tâter le terrain» avant d’augmenter les livraisons d’armes modernes en Syrie.

    La Maison Blanche n’a pas encore émis de commentaire officiel sur ces informations, indique le journal.

    La Syrie est secouée depuis plus de trois ans par un conflit civil opposant les troupes gouvernementales aux insurgés armés. Selon l’ONU, la confrontation armée a déjà coûté la vie à plus de 130.000 civils et fait 2,3 millions de réfugiés et 6,5 millions de déplacés à l’intérieur du pays.

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    Source : RIA Novosti 20/04/2014

    http://www.polemia.com/syrie-washington-et-riyad-derriere-les-livraisons-de-missiles-anti-char-wsj/