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l'emploi - Page 107

  • Le Déclin français et les années 1970

    Le rapport Gallois le relève dès ses premières pages : le début du déclin français date des années 1970. Pour autant il ne cherche pas à tirer quelque enseignement que ce soit de cette constatation : il s'abstient de toute allusion directe à la période extraordinairement brillante qui précédait ces années 70; et pas davantage il n'aborde les événements et décisions politiques de l'époque qui pourraient être responsables de ce déclin. (1)

    Or en dépit de leur ancienneté, ces années méritent grande attention. P.M.

    Des Trente Glorieuses à aujourd’hui

    Quelques chiffres permettront de situer la brillante période 1950-1970 et l'exceptionnelle prospérité que connut alors la France et qu'on ne peut attribuer à la reconstruction de l'après guerre. Certes celle-ci avait stimulé l'activité mais son influence ne pouvait être que passagère : en 1949 l'économie française avait retrouvé son niveau de 1938 et l'élan de la reconstruction ne pouvait plus expliquer la persistance de l'expansion.

    Or de 1949 à 1969, le taux moyen de croissance annuelle évolua entre 5 et 5,5% et le chômage resta extrêmement faible : 1,2% de la population active jusqu'en 1958, même s'il augmenta ensuite quelque peu (2,2% dans les années 1960). Dans les dernières années de cette période, la France était même en mesure, grâce à ses résultats en commerce extérieur, d'exiger le remboursement en or de ses avoirs en dollars. (2)

    Or à partir des années 1970 tout a changé. Notre situation économique a entamé une détérioration dont rien, et pas même les hauts et les bas circonstanciels, ne peut masquer l'implacable continuité :  

                               Taux annuel moyen de croissance                               Taux de chômage

    1949-1957                                5,3 %                                                                 1,2
    1957-1970                                5,4 %                                                                 2,2
    1970-1980                                3,3 %                                                                 5,4
    1980-1992                                1,9 %                                                                  9
    1993-2008                                1,3 %                                                                  9,1
    année 2012                                                                                                      10 à 11

    Les changements des années

    Sauf cécité volontaire, il est impossible de ne pas se demander quelle est l'origine de ce renversement de tendance.

    1) L'orthodoxie contemporaine fournit une réponse « politiquement correcte » qui a l'avantage de situer la cause du malheur dans un événement extérieur, dans une sorte de cas de force majeure exonérant l'idéologie du moment de toute responsabilité : est accusé en l'espèce le choc pétrolier de 1972, c'est à dire la décision des pays producteurs de pétrole de brusquement et fortement augmenter le prix du baril

    On ne saurait évidemment nier l'effet nocif de cette décision. Mais il n'est pas possible de lui attribuer la responsabilité des quarante années, ni même des dix années suivantes : en effet le choc pétrolier a été absorbé en quelques années grâce aux efforts entrepris pour économiser l'énergie et développer l'utilisation des sources de substitution. C'est ainsi que la part de la consommation d'énergie dans le PIB après avoir évolué entre 5 et 6% dans les années 1950-1970 et avoir presque doublé à partir de 1974 était revenue autour de 7% dès 1980 avant de retrouver le niveau des années de prospérité (d'ailleurs le contre-choc pétrolier des années 1980 favorisa ces efforts).

    En vérité il s'est produit dans ces années 1970 un bouleversement d'ensemble qui a particulièrement affecté la France. En quelques années nombre des traits qui caractérisaient le modèle français ont été effacés l'un après l'autre

    *

    2) On notera d'abord, même si elle fut un peu plus tardive, la libéralisation de la gestion de l'économie. En effet durant ces années que Fourastié qualifia de « trente glorieuses », la France avait vécu sous un système dirigiste où la puissance publique tenait un rôle d'orientation décisif. Il convient de rappeler :

    • – que l'ensemble du système bancaire était nationalisé et se conformait, dans leurs grandes lignes aux recommandations des pouvoirs publics ;
    • – que les entreprises régissant la production et la distribution de l'énergie appartenaient également à la communauté nationale ;
    • – qu'il en allait de même de grandes entreprises industrielles comme Renault ou Air liquide ;
    • – que les prix étaient contrôlés ;
    • – que le Trésor avait la haute main sur les émissions d'actions (jusqu'en 1959) et d'obligations, puisqu'il lui appartenait de les autoriser ou non en vertu d'une loi du 23 décembre 1946 (qui reprenait une loi de 1941) ;
    • – qu'au sein d'un commissariat au Plan se réunissaient les représentants du patronat, des syndicats et des ministères ;
    • – que si les recommandations de ce commissariat n'étaient pas obligatoires, elles n'en exerçaient pas moins une forte influence sur l'orientation globale de la politique économique et sur les décisions de tous les acteurs. C'était la « planification à la française ».

    Ce système n'a pas vraiment été démantelé dans les années 1970 : les atteintes les plus spectaculaires qui lui ont été portées ne l'ont été que dans les années 1980 avec les dénationalisations des banques. Mais une lente évolution a commencé : M. Giscard d'Estaing élu en 1974 ne passait pas pour un dirigiste, le contrôle des prix connut des sorts variables, le 7è Plan (1976-1981) ne suscitait déjà plus (en dépit du maintien du Commissariat) l'« ardente obligation » qu'avaient suscitée nombre de ses prédécesseurs. Cette légère évolution a-t-elle contribué à la diminution des performances économiques du pays ? Il serait imprudent de l'affirmer comme il serait inutile de rouvrir ici une discussion classique sur les mérites comparés des systèmes économiques. Du moins peut-on tirer de l'évocation de cette période, la conclusion que, contrairement à ce qui est souvent répété comme une vérité éprouvée, l'intervention de la puissance publique dans la vie économique n'est pas nécessairement catastrophique et qu'elle peut obtenir des résultats très brillants et durables. En tout cas, il est permis d'imaginer les clameurs qui auraient accueilli l'évolution inverse, celle qui aurait vu successivement une période de grande prospérité sous un système libéral puis des années de déclin coïncidant avec une économie dirigée par les pouvoirs publics…

    *

    3) La décision américaine de renoncer à la convertibilité du dollar en or et la destruction du système monétaire de Bretton Woods furent un important facteur de changement. Le régime des changes flottants, outre qu'il substituait une certaine instabilité à la sécurité antérieure, ne pouvait qu'accélérer le danger d'une inflation mondiale dont la politique monétaire américaine était grosse depuis la guerre du Vietnam. Ce danger conduisit le gouvernement français à renoncer progressivement au système de financement public qui reposait beaucoup sur le marché monétaire (extension remarquable des émissions des bons du trésor dans les années 1950 et 1960, facilitée notamment par la fixation d'un plancher de bons qui était imposé aux banques) et qui était jugé de nature inflationniste. La France revint donc dans les années 1970 à des méthodes plus classiques : les grands emprunts se multiplièrent (1973, 1976, 1977 et, bénéficiant de forts avantages fiscaux, 1978). Cette évolution aboutit finalement dans les années 1980 à une libéralisation du marché financier.

    *

    4) Mais il est surtout un autre changement qui fut le facteur décisif et qui est passé sous silence pour des raisons souvent idéologiques : c'est la destruction rapide, à l'échelle mondiale, des frontières économiques. Cette destruction fut le fruit de négociations internationales multiples exprimant un mouvement de pensée de portée plus générale (3). Utilisant et portant ce mouvement de pensée, le pouvoir américain imposera successivement toutes les négociations nécessaires pour atteindre son objectif : la libéralisation des échanges mondiaux et l'exposition à la concurrence des pays en voie de développement. S'y ajouta un début d'unification européenne. Pour la France , il en résulta la disparition rapide d'un système de protection très ancien, sous lequel vivaient, depuis des générations, l'économie et surtout l'industrie françaises. Une description chiffrée de cette évolution sera très parlante.

    Au 1er Janvier 1960, c'est à dire au cœur des années de prospérité, l'industrie française bénéficiait d'une protection tarifaire moyenne de 20%. Cette protection fort élevée était complétée pour un certain nombre de produits par des restrictions quantitatives à l'importation.

    Intervinrent alors :

    l'établissement progressif de la CEE. Il conduisait à la suppression des droits de douane entre les six pays membres. La C.E.E avait été mise en place le 1/1/1959. Au 1/1 1970, l'union douanière était achevée. Dans le même temps, l'institution du tarif extérieur commun (TEC) avait ramené la protection vers les pays tiers à 13,4%.

    la négociation internationale dite Kennedy round. Le Kennedy Round, lancé à l'initiative et sur l'insistance des Etats-Unis, marque le véritable coup d'envoi de l'entreprise de mondialisation de l'économie. Ses résultats, obtenus après plusieurs années de négociations, entraient en vigueur au 1er janvier 1972 : ils amputaient le T.E.C. de près de 40% et le ramenaient autour de 8,3%.

    Quel que soit le jugement que l'on porte sur une protection tarifaire, on ne peut que constater l'extrême brutalité pour la France d'un choc qui en quelques années a fait passer cette protection de 20 à zéro % sur les importations provenant de la CEE (c'est à dire sur 60% du total des importations industrielles) et à 8,3% sur les importations d'autres provenance. Autrement dit, une « protection globale pondérée » abaissée de 20 à 3,3% en une douzaine d'années.

    Il ne s'agissait que de la première étape : de nombreuses négociations internationales sont par la suite venues achever cet effacement des frontières économiques.

    Les échanges extérieurs de l’industrie française en 1966

    L'industrie française était-elle en mesure de supporter un tel choc ? L'examen du commerce extérieur des produits industriels (ouvrés et semi-ouvrés) conduit à une réponse réservée. En 1966, c'est- à- dire pendant la période de prospérité évoquée plus haut, la balance des importations et des exportations de ces produits se présentait ainsi (il est rappelé que la CEE n'englobait à l'époque, outre la France que l'Allemagne -réduite alors à la RFA -, l'Italie et les trois pays du Benelux et il est précisé que l'intitulé « Tiers ind. » regroupe les pays de l'AELE, le Japon, le Canada et les Etats-Unis.)

    en milliers de F.                CEE                       Tiers ind.                              Autres
    TOTAL

    _______________________________________________________________

     

     

    Importations                  19.483.606               10.184.860                           2.721.090
    32.389.556

    Exportations                 15 528 536                  7.958.722                           15.548.676
    39.035.934

    _______________________________________________________________


    Solde                            - 3.955.070                - 2.226.138       
                                                                                                                  +12.827.586
    + 6.646.378

    Ce tableau fait apparaître que le solde créditeur global résulte de la compensation du déficit sur l'ensemble du monde industriel par un excédent sur les pays moins industrialisés. Il donne à penser qu'il existait une faiblesse d'ensemble et que la suppression des mesures permettant de supporter cette faiblesse présentait un risque certain.

    Toutefois la situation des secteurs industriels était très variable de ce point de vue.

    Certains d'entre eux illustraient la situation globale : déficit vers les pays industrialisés compensé par l'excédent obtenu ailleurs. Etaient dans ce cas: construction des moteurs thermiques, construction électrique, horlogerie, optique, matériel de mines et de travaux publics, etc.

    D'autres se trouvaient dans une situation encore plus défavorable, leur excédent sur les pays moins développés étant trop faible pour compenser le déficit sur les pays industrialisés. Tel était le cas notamment d une grande partie de l'industrie mécanique (sauf automobile et matériels ferroviaires), du travail des métaux, des articles en bois et ameublement, des papiers et cartons, des aciers fins et spéciaux, du matériel récepteur de radio et télévision.

    Enfin, parmi ceux qui au contraire étaient excédentaires dans les relations avec tous les groupes de pays, on pouvait relever entre autres : une partie de l'électro-métallurgie et de la sidérurgie, l'automobile, les motocycles et cycles, les pneumatiques, le verre, les textiles ( mais sur ce dernier point, il faut relever que subsisteraient encore quelque temps des restrictions quantitatives protégeant le marché français contre les exportations des pays sous-développés .


    •  •

    Un exemple : le sort de l’automobile

    Il a paru intéressant de rechercher ce qu'est devenu, depuis les années 1970, dans le domaine des échanges extérieurs, l'un des plus symboliques des secteurs industriels parmi ceux jouissant de la meilleure situation à l'époque : l'automobile.

    La situation de ce secteur (à l'époque, secteurs SH n° 440, 441, 442, 443) était la suivante en 1966.
    en milliers de francs
                                        CEE                   Tiers industrialisés              Autres tiers                     Totaux
    Import.                   1.920.167                      564.658                        31.256                        2.516.080
    Export. 2.024.212 775.736 1.913.914 4.713.862 ___________________________________________________________________________            Solde           +104.045         +211.078             +.1882.652     +2.197.775 ________________________________________________________________________________

    Il n'est pas possible de présenter en 2011 un tableau synthétique construit de la même façon qu'en 1966. La CEE et ses 6 Etats membres ont laissé la place à l'Union Européenne forte de 27 membres. Et surtout le groupe des pays non industrialisés a été profondément modifié. Il paraît meilleur d'adopter la classification retenue par les Douanes en regroupant si nécessaire certaines zones géographiques

    Résultats 2011, en milliers d'euros ________________________________________________________________________________
                                            U.E.                       Afrique                      Asie                  Autres
    Totaux --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
    Import.                       20.892.655                155.723                   1.937.723            810.461
    23.796.562

    Export                       12..611.298                 708.470                  544.669             1.887.761
    15.752. 198

    _______________________________________________________________

     

    Solde                        -8.281.357                                               -1.393.054
    -8.044.364     
                                                                       + 552.747                                          +1.077.300

    La comparaison de ces deux tableaux souligne de façon saisissante le déclin de cette industrie française. Alors qu'elle enregistrait des soldes positifs avec toutes les zones, on relève en 2011 qu'elle présente au contraire de multiples soldes négatifs pour un total considérable de plus de 8 milliards €

    On notera la place prépondérante qu'occupe l'Union européenne puisque le solde négatif enregistré avec elle (8,28 milliards €) est à lui seul supérieur au déficit global (8,04 milliards €). De fait, les échanges (beaucoup moins importants) avec le reste du monde se trouvent approximativement équilibrés, le solde négatif enregistré avec l'Asie (Japon surtout et Corée) étant à peu près compensé par des excédents obtenus sur les autres zones (Afrique et Europe hors UE).

    C'est pourquoi les relations commerciales avec l'Union Européenne en matière automobile méritent un commentaire particulier qui distinguera entre voitures Diesel et voitures à moteur à explosion (les documents de 1966 ne permettent malheureusement pas de faire cette distinction) entre lesquelles se répartit le déficit de 8,281 milliards : 7,030 milliards pour les Diesel et 1,250 milliard pour les autos à moteur à explosion.

    En ce qui concerne les Diesel, la construction française est particulièrement en difficulté puisque sur les 8,281 milliards de solde négatif, plus de 7, on vient de le voir, sont imputables à ce type de voiture. Les principaux concurrents sont l'Espagne et surtout l'Allemagne qui compte à elle seule pour environ 6 milliards dans le solde négatif de 7. Les pays nouveaux partenaires de l'Union (adhérents depuis 2004 ou 2007) tiennent une part relativement importante dans les importations, la Roumanie et la Slovaquie notamment.
    Comme déjà dit, on ne sait pas ce qu'il en était pendant la période de prospérité mais la situation globale de l'époque permet d'exclure une infériorité aussi massive que celle d'aujourd'hui. Les statistiques douanières ne permettent pas à elles seules d'analyser les motifs de cette évolution.

    S'agissant des voitures à moteur à explosion, il faut immédiatement souligner que le solde déficitaire (1,250 milliard) vient seulement en 2011 des échanges avec des pays d'Europe centrale, nouveaux partenaires de l'Union (depuis 2004 et 2007) (4): République tchèque, Slovaquie, Slovénie, Pologne notamment, à qui la France ne vend que très peu d'autos (0,250 milliard €) mais qui lui en vendent énormément : 2,1 milliards €. (déficit : 1.850 Md €). Si on fait abstraction de ces courants commerciaux, et si on considère seulement les échanges avec les 14 pays partenaires plus anciens de l'U .E., on trouve un solde positif pour l'industrie française de 0,6 milliard et une balance pratiquement équilibrée avec l'Allemagne.....

    L'irruption des pays d'Europe centrale en l'affaire est donc l'événement marquant. S'agit-il du résultat d'initiatives allemandes ? On est tenté de le penser si l'on prend l'exemple des autos de moins de 1000 cm³. Il est en effet piquant de constater qu' en 2011, dans cette catégorie, alors que l'Allemagne nous a vendu 1704 voitures, la République tchèque et la Slovaquie ensemble nous en ont vendu 71.633, soit 35 fois plus ! Certes les statistiques douanières ne permettent pas de confirmer la rumeur selon laquelle il s'agit là de voitures de marques allemandes qui à défaut d'être produites « in Germany » le seraient « by Germany ». Si pourtant tel est le cas, il est évident qu'en recourant à ces pays d'Europe centrale, les industriels allemands ont recherché l'avantage d'une main d'œuvre moins chère.

    Peut-être l'ont-t-ils fait plus massivement que d'autres, mais ils ne sont pas les seuls : la France importe probablement de Slovénie des automobiles Peugeot.

    Et cette constatation conduit une nouvelle fois à une conclusion de nature politique : en imposant pratiquement les délocalisations, grâce à la suppression des frontières économiques, le cosmopolitisme a mis en œuvre un autre moyen de « casser » ce « verrou qui doit sauter : la nation ».

    Pierre Milloz 29/07/2013

    Notes :

    (1) Nombre de renseignements utilisés dans la présente note proviennent d'un document établi en 1968 à l'issue de la négociation Kennedy
    (2) Bien sûr, tout n'était pas parfait et la période a connu ses difficultés, comme l'ont montré les grèves de 1953 et 1963 ou les dévaluations du franc décidées, pour des motifs partiellement étrangers à l'économie, en 1958 et, en fin de période, en 1969.
    (3) Ce mouvement de pensée d'inspiration cosmopolite, exigeant l' « ouverture au monde » et érigeant l' « autre » en objet d'une amitié obligatoire et réglementaire, allait bien au delà des questions économiques. C'est en France l'époque de la loi Pleven (1er juillet 1972) qui pose en principe pour la première fois dans l'histoire de France l'interdiction de distinguer entre un Français et un étranger ; de la montée en puissance de l'immigration ; du décret sur le regroupement familial des immigrés ; c'est aussi à la même époque, plus précisément le 18 juillet 1970 que M.de Rothschild écrit dans  Entreprise  : « La structure qui doit disparaître, le verrou qui doit sauter, c'est la nation ».
    (4) Il faut saluer ici l'heureuse initiative qui, au sein des statistiques douanières concernant l'U.E., a isolé les mouvements de commerce extérieur entre la France et ces douze pays.

    Correspondance Polémia – 1/02/2013

  • L'illusion économique d'Emmanuel Todd

    Modernité de la Nation

    Le livre est sous-titré : « essai sur la stagnation des sociétés développées ». On subodore l'œuvre d'un spécialiste, avec tout ce que cela comporte trop souvent d'abscons et d'ésotérique. Mais, si « L'illusion économique » est en effet rédigée dans toutes les règles universitaires et abondamment documentée, ses conclusions générales restent aussi claires que sans appel. L'auteur, Emmanuel Todd, diplômé de Sciences Po et docteur en histoire de Cambrigde, y met à nu les fausses logiques des diverses théories de la mondialisation, et démontre que la crise actuelle ne sera surmontée que si renaît l'idée de nation. Cependant, tout en condamnant la pensée unique, qu'il appelle pour sa part « pensée zéro », Todd se justifie de son audace en donnant des coups de patte au Front National, en ménageant certains des responsables du déclin de notre civilisation, et en faisant des concessions au marxisme, bien que son exposé en prenne fondamentalement le contre-pied. Des précautions regrettables et discordantes, qui ne parviennent quand même pas à atténuer le choc des évidences que Todd dégage.

    Il fallait une bonne vision, et pas mal d'audace pour annoncer en 1976 l'implosion du système soviétique, comme le fit Todd dans « La chute finale ». À l'époque, néanmoins, la pression subie par ceux qui résistaient au communisme ne revêtait pas, du moins en Occident, un caractère aussi pesant et omniprésent que celle exercée aujourd'hui sur les réfractaires au mondialisme. C'est pourquoi, en dépit de sérieuses réserves à émettre sur quelques-unes de ses affirmations, les vérités de Todd méritent d'être relevées. D'emblée, il va au cœur du problème contemporain « Le souci d'efficacité (l'idée de modernité, la nécessité économique) exige la déstabilisation des existences, implique la destruction des mondes civilisés... La mondialisation - globalisation selon la terminologie anglo-saxonne - serait la force motrice de cette fatalité historique. Parce qu'elle est partout, elle ne peut être arrêtée nulle part... Elle flotte a-sociale, a-religieuse, a-nationale, au-dessus des vastes océans, l'Atlantique et le Pacifique s'affrontant pour la prééminence dans un combat vide de conscience et de valeurs collectives. Que faire contre une telle abstraction, une telle délocalisation de l'Histoire ? »

    La réponse de Todd est décapante : face à cela, les temps présents sont dominés par l'« impuissance des Etats, des nations, des classes dirigeantes ». On assiste à un « accablement spirituel » et « la dépression des classes dirigeantes françaises est particulièrement surprenante. Elle intervient au moment exact où la France a enfin cessé d'être, à l'intérieur du monde développé, un pays en retard ». Pour Todd, la France n'a pas à avoir de complexe face à l'Amérique, en plein recul culturel, ce dont il fournit des preuves étonnantes et convaincantes (éléments chiffrés sur la chute du niveau intellectuel aux États-Unis). Malheureusement, il y a ces chefs de gouvernements spectateurs résignés ou cyniques d'une histoire qui les dépasse. Ainsi, Bill Clinton et Jacques Chirac... « subissent-ils passivement la mondialisation, une illusion, parce que le mécanisme économique n'est en rien le moteur de l'Histoire, une cause première dont tout découlerait ».

    Le moteur de l'Histoire, Todd le cherche dans les « croyances collectives », et la plus importante à ses yeux est la nation, dont il souligne la permanence à travers l'anthropologie, l'éducation, l'économie, la démographie. Il touche au tabou de l'individualisme, qu'il ne tient pas pour la panacée, tout au contraire. Il accuse les diverses sortes de mondialisme de s'attaquer à l'idée nationale, par le haut (credo monétaire maastrichien) ou par le bas (décentralisation géographique, droit à la différence pour les immigrés) : « Tous ces phénomènes, que rien ne relie en apparence - européisme, mondialisme, décentralisation, multiculturalisme - ont en réalité un trait commun : le refus de la croyance collective nationale. »

    La Nation, un besoin prioritaire

    Quand il recherche l'origine et le développement, ce qu'il baptise d' «antinationalisme», Todd est incisif et percutant. Il montre crûment tout le mépris du peuple français chez les soixante-huitards, à quel point Bernard-Henri Lévy identifiait « en notre nation un monstre abject », la « véritable horreur de la nation » dont sont atteintes les prétendues élites françaises. Pour nos lecteurs, ce n'est certes pas une découverte. Todd ne se contente pas, il est vrai, d'enfoncer cette porte ouverte, il cherche à voir où mène « l'antinationalisme » qui spécule sur la disparition des nations : « une illusion tragique, dont la puissance a conduit à l' incohérence économique du monde développé, à travers les expériences désastreuses que sont le libre-échange intégral et la construction monétaire de l'Europe ».

    « L'utopie libre-échangiste », « L'utopie monétaire », sont deux chapitres très forts, le noyau dur du livre. Le libre-échangisme, démonté dans tous ses aspects, est accusé en particulier de générer, outre la pauvreté et la spéculation, le racisme et les inégalités. Au passage, Tood remarque que ce n'est pas le développement de l'informatisation qui a déstabilisé l'économie. Il accompagne sa défense du protectionnisme d'une tentative de « réintroduction de sociologie marxiste », comme s'il lui fallait une excuse. Il est plus direct en s'en prenant à la monnaie unique, dont il met à jour les multiples insuffisances et le caractère irrationnel. À elles seules, les différences d'évolutions démographiques de l'Allemagne et de la France sont appelées à créer des difficultés insolubles pour la gestion de l'euro. « Sortir de la monnaie unique ne serait pas un drame, sauf peut-être pour les dirigeants trop mouillés dans le naufrage du projet. »

    B M ne dit pas autre chose dans la "Troisième voie", et Todd le sait. Aussi s'est-il cru obligé, par crainte sans doute de se voir «amalgamé», de traiter du FN par le biais d'une analyse marxiste à la fois hautaine, discutable et réductrice. Parallèlement, il a évité de s'attarder sur le rôle du PC (à qui il sert à l'occasion de faire-valoir) dans la soumission à la « pensée zéro ». N'en déplaise à Todd, pour que son souhait final se réalise (« ce dont nous avons d'abord besoin est d'un saut de la foi, dans une croyance collective raisonnable, la nation »), il n'y a qu'un vecteur possible, le Front National. L'inventeur de la fameuse "fracture sociale" a encore un petit pas à faire. 
    N.T.
    Emmanuel Todd, « L'illusion économique », Éd. Gallimard.
    Français d'abord ! 2e quinzaine mars 1998

  • Europe : Les jeunes générations sont-elles perdues ?

    A chaque crise sérieuse, on se lamente sur le sort des jeunes qui ne trouvent pas de travail et que l’on qualifie de “génération perdue”. Mais de telles générations, il y en a eu d’autres dans l’histoire et à chaque fois, elles s’en sont sorties, écrit , un chroniqueur polonais.

    Ils devaient être notre espérance, mais ils sont devenus un fardeau. Plus de 400.000 jeunes Polonais sont sans emploi. Et peu en parlent autrement que sous le terme de “génération perdue”. Le fléau concerne l’ensemble du continent européen, mais demeure particulièrement grave dans le Sud.

    Selon les données d’Eurostat, publiées en octobre, le taux de chômage des moins de 25 ans atteint 27,8 % en Pologne, contre 55,9% en Espagne, 57% en Grèce et 36,5% en Italie. Même dans un pays aussi riche que la France, un jeune sur quatre est sans emploi.

    Des statistiques biaisées

    De telles statistiques impressionnent, mais elles prêtent aussi à confusion. Elles ne prennent en compte que ceux qui travaillent ou ne travaillent pas, laissant ainsi de côté tous ceux qui étudient, font des stages professionnels, voyagent, ou ne travaillent pas par choix. De ce point de vue, le concept NEET, mis en place par l’Organisation mondiale du travail, paraît mieux adapté pour mesurer le phénomène du chômage de jeunes.

    Quand on quantifie les personnes qui ne travaillent pas, n’étudient pas et ne sont pas en formation (No Employment, Education, Training – NEET), il s’avère qu’elles représentent 15,5 % des Polonais âgés de 15 à 29 ans. Bien sûr, c’est toujours trop (une augmentation de 22 % depuis le début de la crise), mais ce n’est plus qu’une personne sur six, et non plus une sur deux, qui se retrouve réellement “sans perspectives”.

    Comment parler d’une génération perdue, quand cinq jeunes sur six suivent un parcours sensé ? Ce n’est guère différent dans le reste de l’Europe. Le taux de NEET est de 23 % en Grèce et de 21% en Espagne. Et dans des pays comme les Pays-Bas et l’Autriche, il tombe à 5-8 % seulement.

    Jeunes, sans emploi mais pas sans avenir

    Paradoxalement, une telle proportion de jeunes parmi les chômeurs peut être source d’espoir. L’exemple de l’Espagne est très éloquent à cet égard. L’explosion du chômage dans ce pays résulte moins de la récession que de la réforme du marché du travail menée par le Premier ministre Mariano Rajoy.

    “Grâce aux mesures mises en oeuvre, les employeurs peuvent licencier bien plus facilement, mais quand la conjecture est plus favorable, ils n’hésiteront pas à réemployer”, estime Jorge Nunez du CEPS (Centre for European Polcy Studies) à Bruxelles. Avant les réformes de Rajoy, les sociétés espagnoles devaient négocier les changements dans les contrats de travail avec les syndicats de branche, et non au niveau des entreprises.

    En dépit de cette réglementation stricte, héritée de l’époque de Franco, une fois la prospérité retrouvée, les entrepreneurs espagnols ont repris systématiquement le risque de recruter de nouveaux employés. Après l’adhésion à l’UE en 1986, le taux de chômage chez les jeunes a été divisé par deux en trois ans, en tombant à 18 %. Les jeunes Espagnols sortiront-ils cette fois la tête de l’eau aussi rapidement ?

    Zsolt Darvas, de l’Institut Bruegel, à Bruxelles, explique : “Une chose est sûre, il s’agit de la génération la mieux formée dans l’histoire de ce pays. Grâce aux réformes de Monsieur Rajoy, l’économie espagnole a rapidement gagné en compétitivité : le commerce extérieur du pays enregistrait, il y a encore 5 ans, un déficit de 11 % du PIB. Depuis, il connaît un excédent commercial équivalant à 2 % du PIB”.

    Un choc salutaire

    La Pologne est dans une situation comparable. Notre pays a déjà connu deux vagues de “ générations perdues” en 1992/1993 et 2002/2003, et en vit une troisième à l’heure qu’il est. Même en s’appuyant sur les statistiques pessimistes du GUS (Office centrale de statistiques), on s’aperçoit que le chômage touche aujourd’hui deux fois moins de jeunes Polonais de moins de 25 ans qu’en 1995. Le niveau de formation est un autre atout de l’actuelle “génération perdue”. La Pologne a aujourd’hui cinq fois plus d’étudiants qu’en 1990, et le pourcentage d’actifs diplômés de l’enseignement supérieur est aujourd’hui 2,5 fois supérieur.

    Les périodes de crise ont toujours été pour la Pologne un temps de restructuration profonde de son économie. Depuis 2008, la productivité de notre travail a augmenté de 20%. Le développement d’industries et de services innovants, telles que l’électronique de pointe, les recherches moléculaires ou la production de composants automobiles de haute qualité, attirent les grandes entreprises qui délocalisent leur production du Sud vers l’Est de l’Europe, et notamment la Pologne.

    On pourrait dire qu’un taux de chômage élevé est en quelque sorte le prix à payer pour améliorer la compétitivité polonaise, gage d’une supériorité durable sur ses rivaux dans les années à venir. En attendant, selon les données d’Eurostat, notre productivité – plus de deux fois inférieure à celle de l’Allemagne – n’a atteint l’année dernière que 57 % de la moyenne européenne.

    Le modèle allemand

    L’Allemagne reste clairement un exemple de l’impact efficace des réformes du marché de travail sur l’amélioration des perspectives d’emploi des jeunes. Le chômage y est à son plus bas niveau depuis la réunification du pays : non seulement le chômage des jeunes (12 %), mais également celui de l’ensemble de la population (5,4 %), et l’on se dirige progressivement vers le plein emploi. Pourtant, il y a dix ans, avant les réformes de Gerhard Schröder, l’Allemagne était considérée comme “l’homme malade de l’Europe” en termes de marché du travail.

    “Nous devrions tout d’abord nous inspirer du système de formation professionnelle allemande. Les perspectives des jeunes dépendent en partie d’eux-mêmes et de leur capacité à adapter leurs projets à la réalité du marché”, explique Katinka Barysch du Center for European Reform, basé à Londres.

    De nombreux signes laissent espérer aux jeunes Polonais et Européens que le pire est derrière eux. Même si l’année 2012 s’est achevée dans le marasme économique, l’UE a évité le pire : la désintégration de la zone euro et l’effondrement de l’Union. Aussi peu croyable que cela semble aujourd’hui, dans deux ou trois ans, ce sont bien de jeunes actifs extrêmement compétents qui pourront dicter leurs conditions d’emploi aux employeurs, et non l’inverse.

    Press Europ  via http://fortune.fdesouche.com

  • Un chômage de masse historique en Espagne

    Le nombre des sans-emploi atteint presque les 6 millions en Espagne. La création d’emplois ne repartira pas avant fin 2013.

    Lors de son arrivée au pouvoir il y a un peu plus d’un an, Mariano Rajoy n’espérait certainement pas être le Premier ministre sous lequel l’Espagne atteindrait les 6 millions de chômeurs. C’est pourtant la triste réalité dépeinte par les chiffres officiels pour l’année 2012 délivrés hier : 26,02 % de la population active espagnole est sans-emploi, soit 5,965 millions de personnes. Jamais, depuis la mort du général Franco en 1975, l’Espagne n’avait connu un tel niveau de chômage de masse.

    Cette augmentation « reflète la forte contraction de l’économie au quatrième trimestre, conséquence des mesures d’ajustement comme l’augmentation de la TVA ou la suppression de la paie de Noël des fonctionnaires », a analysé, hier, le secrétaire d’Etat à l’Economie, Fernando Jimenez Latorre. La veille, la Banque d’Espagne avait indiqué que l’économie s’était contractée de 0,6 % du PIB au quatrième trimestre, soit le repli le plus marqué depuis la récession de 2009. Sur l’année, le PIB espagnol a reculé de 1,3 %, un peu mieux qu’initialement prévu.

    L’économie espagnole a-t-elle (enfin) touché le fond ? Le gouvernement l’espère : « dans la seconde partie de l’année, il y aura des signes positifs en termes de croissance », a expliqué Fernando Jimenez Latorre. La création d’emplois venant toujours après la reprise de la croissance, aucune bonne nouvelle n’est à attendre sur ce front avant « la fin de l’année ou début 2014 ». Sans compter le nombre d’années qu’il faudra pour résorber un tel niveau de chômage. « Le problème central pour l’Espagne est le temps énorme qu’il faut pour récréer les emplois perdus dans la construction en bénéficiant de la bonne compétitivité du pays », soulignait récemment Patrick Artus, chef économiste chez Natixis.

    Ce « temps énorme » fait craindre que la population, qui compte 1,8 million de foyers avec tous leurs membres au chômage, atteigne ses limites. Certains signes ne trompent pas : les familles abandonnent leurs téléphones mobiles, réduisent leurs achats de nourriture tandis que leur taux d’épargne a atteint un minimum historique, prouvant qu’elles puisent dans leurs économies pour terminer leurs fins de mois.

    « On ne sait jamais où est la limite, mais elle pourrait arriver quelque part cette année, estime Fermín Bouza, professeur de sociologie à l’université Complutense. Pour l’instant, la situation semble sous contrôle, mais il n’y a qu’un mur de papier entre ça et une situation incontrôlable, et on ne sait jamais d’où peut venir l’étincelle. »

    Pour le sociologue, ce sont les classes moyennes qui souffrent le plus de la crise. « C’est une situation qu’elles n’avaient pas connue depuis des décennies. Pour elles, le chômage est complètement nouveau, tandis que les classes populaires sont plus habituées et ont plus de possibilités, par exemple via l’économie au noir [qui pèserait un cinquième du PIB selon diverses estimations, NDLR] », détaille Fermín Bouza. Les manifestations, quotidiennes depuis l’été, en sont la preuve : peu d’ouvriers mais beaucoup de médecins, d’infirmières, de professeurs et d’employés.

    Les Echos via http://fortune.fdesouche.com/

    A lire en complément :

    Les chiffres effarants du chômage de masse en Espagne (sur le site de L’Expansion)

  • Quelque chose d'incrusté dans nos échecs

    une Delage D8 de 1939, motorisation Delahaye
    Les résultats 2012 de nos trois constructeurs nationaux sont réputés désastreux, tant sur le Marché commun qu'au niveau mondial. Quand on les décortique, on en trouve assez vite des raisons expliquant chaque segment de l'analyse. Par exemple, Peugeot a subi un déficit de 300.000 CKD en Iran (450000 en année pleine) pour cause d'embargo américain ; le marché espagnol favorable à Citroën s'est complètement retourné (je signale en passant qu'on y trouve des Camaro IV°génération pour une bouchée de pain) ; le marché de prédilection pour Renault, la France à moins 14%, est malade de l'imbécillité de ses dirigeants qui contrent partout la voiture et asphyxient tout enthousiasme dans ce pays, et ce n'est pas le scoop de l'année, l'équipe précédente était plus arrogante encore et pas moins déconnectée du réel. Ainsi observons-nous ces chiffres qui font honte à la patrie de l'automobile :
    • marché français de Renault : -24,7%
    • marché français de Peugeot : -17,4%
    • marché français de Citroën : -17,5%
    • (tous les détails par ici)
    • marché mondial de Renault : -6,3% (2,55Mv)
    • marché mondial de PSA : -16,5% (2,96Mv)
    Retour sur le futur chez l'agence Bloomberg
    General Motors a mangé sa soupe sur la tête de Volkswagen l'an dernier en Chine continentale menant le train des étrangers grâce à ses mini-vans Wuling qui se sont vendus comme des petits pains ! Par contre au niveau mondial, c'est Toyota Motor qui redevient le boss avec 9,7Mv (+22%) devant le Lazare des constructeurs, GM qui n'a vendu "que" 9,2Mv (+2,9%). Si l'on s'en tient aux Européens, Volkswagen a crevé le plafond de ses records globalement avec 9,07Mv (+11%). Sur le marché chinois qui a dépassé cette année les 20 millions de véhicules vendus, les progressions sont presque ahurissantes :
    • marché chinois de General Motors (Chevrolet, Buick, Wuling) : +11% (2,84Mv)
    • marché chinois de Volkswagen (VW, Audi, Porsche) : +24% (2,81Mv)
    • marché chinois de PSA (Peugeot, Citroën) : +9% (0,44Mv seulement) (et contre les japonaises/Diaoyu)
    L'amorce d'un déclin
    La RCZ Peugeot en Chine
    Tous ces chiffres nous indiquent que l'industrie automobile française ne joue plus dans la cour des grands. La contraction de ses marchés et la diminution de ses marges, s'il en reste, vont entraver durablement la recherche et développement, seul moteur de croissance. Si la spirale prend des tours, on sait comment cela finit : Simca, Panhard, Citroën, pour ne remonter qu'aux années soixante. PSA annonce une production chinoise de 450.000 véhicules en... 2015. Ils sont au seuil du hors-jeu.
    Les surcapacités des constructeurs généralistes français ne sont pas correctement prises en compte ; à se demander si l'extinction des fabrications françaises n'est pas au programme en déroulant de mauvais résultats. Il est évident que les marchés d'Europe occidentale sont au-delà de la saturation et que les marges qui permettent de s'y battre doivent provenir d'ailleurs. Ailleurs les français y sont depuis longtemps, mais pas assez pour faire l'écart en Europe occidentale et globalement.
    La soviétisation résiduelle du modèle social national les handicape certes, mais plus généralement, l'industrie automobile française subit le syndrome de l'industrie française : sous-capitalisation, banques timorées, foisonnement des règles et codes en constante "amélioration", immixtion indirecte et continue de l'Etat dans les discussions paritaires fermées, lois du travail obsolètes. Aucun de ces problèmes n'est en voie de réforme, même si le début d'un commencement annonce l'aube d'une remise en cause réciproque des partenaires sociaux. Mais à la fin sera-t-il trop tard ? Il sera intéressant de noter la réaction des patrons de la General Motors aux succès comparés de leurs marques (PSA avec), pour obtenir une vision plus globale de notre avenir. Le bruit a couru qu'ils voulaient donner Opel à PSA, la pierre autour du cou ? Détruire Peugeot c'est aussi faire un appel d'air sur des marchés exotiques que la GM peut servir !

    Le Dacia Duster Delsey
    Du côté de Renault, il semble que la direction s'embarrasse moins de déclarations apaisantes et que l'avenir soit carrément au-delà des frontières, les sites français ayant vocation à devenir à terme des usines de montage de pièces et sous-ensembles fabriqués ailleurs. On peut douter aussi de la sincérité du patriotisme de Carlos Ghosn qui trouve beaucoup plus de satisfactions dans la direction de Nissan au Japon que dans celle de Renault. Et on traitera une autre fois du parti-pris "Diesel" des constructeurs français aidés par une fiscalité anti-économique, qui se fracasse aujourd'hui sur la pureté de l'air !
    Si ce destin d'activité tiers-mondiste devait se concrétiser - le conditionnel est mis pour être sympa - il s'agirait d'activer les meilleures conditions possibles de production en espérant conserver à côté des usines de la recherche appliquée et tout le savoir-faire de la construction de lignes de production, activité qui induit derrière elle la fabrication des robots, progiciels, machines-outils et maints ancillaires. Maître Montebourg comprend-il cette exigence ?

    C'est la semaine franco-allemande
    Guangzhou-Peugeot 504 Truck
    Peugeot et Volkswagen sont allés en Chine à la même époque, en 1984. Ils étaient des précurseurs et avaient les mêmes atouts, des soutiens politiques du même ordre. L'un a mis de l'argent sur de bonnes idées puisqu'il en avait (des deux) ; l'autre, à niveau technique comparable et avec de meilleurs châssis¹, fut toujours handicapé par un partenaire local imposé, plus faux qu'un jeton de Macao ! A faire une connerie, "faites la vite", dit-on dans l'arme blindée-cavalerie ; l'agonie cantonaise de Peugeot dura douze ans. Avec les autorités chinoises la relation de l'un fut hypocritement attentive et efficace, celle de l'autre paradoxalement naïve, arrogante et peu réactive. Certes l'expérience acquise permit à PSA de se replacer ailleurs avec des constructeurs fiables, mais le nerf de la guerre fait toujours défaut, à chercher les dix cents qui manquent au dollar ! Ce pourquoi il faudrait arrêter l'hémorragie financière en France. Son concurrent d'outre-Rhin dégage plus de vingt milliards d'euros de résultat net au niveau groupe en 2012, de quoi creuser l'écart avec tout les autres. Deux mondes désormais.
    http://royalartillerie.blogspot.fr/
    (1) Peugeot-Canton assemblait des pick-up 504 (en photo) et des breaks 505 qu'il destinait à un usage professionnel, en ratant d'entrée le marché des taxis qui demandait des berlines à coffre, comme la VW Santana brésilienne ! Malgré l'introduction de berlines 505 sur la chaîne, l'usine GPAC de Canton a fermé ses portes en 1997 pour de multiples raisons inextricables. Peugeot reformera une joint venture avec un partenaire plus fiable à Wuhan sur un site Citroën, mais là encore avec un "vieux" modèle, la ZX. Les choses s'arrangent depuis qu'ils ont ouvert un gros bureau d'ingénierie à Shanghaï qui conçoit "chinois".

  • « Ne vous indignez pas, nous l’avons tous cherché »

    « La fin de l’État-providence ne coûtera rien aux Français, elle leur rapportera »

    On ne présente plus à nos lecteurs Max et Pascal Dray. Le premier est PDG d’un groupe français implanté dans de nombreux pays du monde. Auteur d’un ebook gratuit, Ne vous indignez pas, nous l’avons tous cherché (critique et entretien), il souhaite pour l’instant conserver l’anonymat. Le second est chef d’entreprise, docteur en économie et chroniqueur aux Nouvelles de France. Nous les avons réunis pour commenter l’actualité économique et sociale française.

    Adeptes du prêt-à-penser, de l’interventionnisme et de l’étatisme, vous avancez aux risques et au péril… de vos certitudes. Les autres, vous allez vous régaler. Bonne lecture !

    Suite de l’article sur Nouvelles de France

    Max, un entrepreneur, a décidé d’écrire et de partager son « manifeste pour la responsabilité », rédigé autour de 8 principes forts comme « Osons », « Simplifions » ou « Reconnaissons la vraie valeur de la chose publique ». L’auteur ne se fait pas le défenseur de ses pairs ou le héraut d’une doctrine économique. Cet essai est d’autant plus accessible qu’il est gratuitement proposé au téléchargement et à la lecture en ligne.

    En identifiant les anomalies et les contradictions de notre système économique, l’auteur a le mérite de frapper juste, de trancher et de proposer, loin de l’anesthésie ambiante et des postures de rebelles de salon. 

    Lucide sur les questions de génération, le livre reproche à celle de 68 d’avoir dilapidé les efforts d’après-guerre et d’entretenir un conservatisme frileux. Une vision qui l’amène à un constat : le manque d’ambition et de vision à long terme, depuis les années De Gaulle. Un manque qui nuit gravement au moral et au dynamisme économique d’une France qui a toujours peur du moindre risque.

    Symbole de ces inepties auxquelles nous ne faisons plus attention : le chèque-déjeuner et ses confrères chèque cadeau ou chèque-vacances. Ces artifices infantilisent les employés et multiplient les pertes de temps tout en compliquant les processus de règlement. L’auteur s’amuse aussi de la taille de certains comités d’entreprise et dénonce l’hypocrisie sur les rémunérations des stagiaires.

    Cependant, Max n’est pas là pour se complaire dans la critique. Il a choisi de proposer des réponses simples et efficaces aux problèmes d’une France (trop) lourde, qu’il aurait préféré voir guidée par une « éthique positive et réaliste » plutôt que par la « bien-pensance médiatique » actuelle.

    L’auteur, à travers huit principes de base, invite au débat sur l’avenir social et économique français et appelle à simplifier notre système. Sa réflexion est née d’un constat fait sans concession aucune. Sa critique de la société d’assistanat et du principe de précaution appelle à la responsabilisation des citoyens. Pour y arriver, il préconise une revalorisation du travail par le retour à une pensée et une éthique positives et réalistes.

    Pour lui, l’homme a le droit de maîtriser sa vie, de façonner son destin et de faire ses choix. Pour lui, l’indignation, réflexe ô combien à la mode ces derniers mois, ne mène à rien. Pour la France et pour les Français, il est temps de passer à l’action et de faire triompher le bon sens…

    Novo Press

  • 75 % des industriels français s’estiment compétitifs

    D’après une étude réalisée par le cabinet RolandBerger en partenariat avec L’Usine Nouvelle, les trois quarts des industriels français considèrent leur usine comme compétitive. La question du coût du travail ne semble pas aussi critique que celles de la performance de la fonction achats et de l’organisation industrielle.

    Estimez-vous que votre usine est compétitive ? C’est la question à laquelle ont répondu plus d’une centaine de directeurs de sites industriels, dans le cadre d’une étude menée par les consultants de RolandBerger en partenariat avec L’Usine Nouvelle. Menée fin 2012, en plein cœur du débat sur la compétitivité des usines françaises, cette étude dresse un état des lieux moins sombre que l’on pourrait penser. En effet, 63 % des patrons interrogés considèrent que leur site est compétitif, et 12 % le jugent même “très compétitif“.

    Bien sûr, cela ne les empêche pas de nourrir des inquiétudes pour 2013. Seuls 4 % des patrons de sites “compétitifs” envisagent une hausse de leur performance économique l’an prochain.

    Cette étude permet de dresser un portrait-robot de l’usine compétitive. “Il s’agit plutôt d’usines de taille moyenne à grande, de plus de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires, commente Georges de Thieulloy, consultant au sein du centre de compétences Opérations chez RolandBerger. Parmi les usines les plus rentables, la majorité est intégrée à un groupe, et vend ses produits sur le marché français.” Un résultat qui peut s’expliquer par le fait que les entreprises confrontées à la concurrence internationale ont plus de mal à se considérer comme compétitives. L’usine compétitive “type” affiche également un engagement fort en matière d’innovation, et réalise plus de 10 % de son chiffre d’affaires sur des nouveaux produits lancés dans l’année.

    Le coût du travail n’est pas le critère le plus important

    Les directeurs de sites ont dressé leur liste des critères les plus déterminants pour être compétitif. Contre toute attente, le coût du travail ne ressort pas comme étant le critère le plus important. Cité par 79 % des répondants, il arrive en quatrième position derrière les achats de matières premières (87 %), l’efficacité du système de production (80 %) et la maîtrise des processus industriels (79 %).

    Les préoccupations des patrons français semblent donc plutôt tournées vers les achats. “Non seulement les achats ressortent comme le critère de compétitivité n°1, mais l’étude montre aussi que seulement 49 % des personnes interrogées se considèrent performantes sur ce critère“, commente Georges de Thieulloy. Ainsi donc, il reste beaucoup à faire en matière d’achats et, après les mesures prises fin 2012 pour réduire le coût du travail, il est probable que la question du coût des matières premières revienne rapidement sur le devant de la scène.

    Pas de problème d’organisation, d’après les patrons

    Le constat est assez différent pour tout ce qui touche à l’organisation industrielle. Interrogés au sujet de leur efficacité opérationnelle et de la maîtrise de leurs procédés (deux des trois critères-clés de compétitivité), les patrons s’estiment compétitifs à 64 % sur le premier critère et à 77 % sur le second. Pour Georges de Thieulloy, une telle autosatisfaction, c’est presque trop beau pour être vrai. “Il est plus facile d’identifier les problèmes chez les autres que chez soi, renchérit-il. Sur ces questions touchant à l’organisation, les résultats auraient été très différents si l’on avait interrogé les responsables de production plutôt que les patrons de site“.

    En parlant d’organisation, justement, il ressort de l’étude que les équipes marketing et Supply Chain sont peu impliquées dans le renouvellement du portefeuille produits. 58 % des organisations n’impliquent pas les personnes chargées de la gestion de la Supply Chain (chaîne d’approvisionnement). Ces derniers souffrent encore aujourd’hui d’un manque de considération, alors que leur capacité à définir le coût global d’un produit devrait en faire des interlocuteurs de choix pour les dirigeants. “Avec un marché qui a tendance à se mondialiser et des clients qui demandent toujours plus de personnalisation, les fonctions Supply Chain et marketing vont forcément gagner en poids au sein des organisations dans les années à venir“, conclut Georges de Thieulloy.

    L’Usine Nouvelle via http://fortune.fdesouche.com/

  • Catholicisme et libéralisme économique

    « Le très catholique Mario Monti [1]... ». C’est ainsi que France-Info (mercredi 2 janvier 2013) évoquait le professeur d’économie qui a été mis en place en Italie par le système oligarchique actuel. Pour corriger ce médiamensonge obscène, nous devons rappeler quelques repères à ce sujet.

    Chacun reconnaîtra qu’au XXème siècle, les penseurs catholiques plutôt traditionnels se sont surtout focalisés sur des critiques du marxisme. Cette concentration du discernement s’est traduite par une certaine tolérance idéologique envers le libéralisme économique. C’est ainsi que la réalité sociologique du catholicisme pratiquant manifeste des personnes bien établies dans le monde, plutôt aisées. Le fait que ces catholiques bourgeois se sentent tout à leur aise dans une église trahit l’ignorance doctrinale et religieuse de ce temps.

    Ce constat sociologique n’annule pas les déclarations du magistère dans le domaine. Notre vie quotidienne est formatée par le positivisme et tous ses corollaires (scientisme, relativisme, nihilisme…) dont le libéralisme économique est également un surgeon majeur. Mais l’enseignement de l’Église catholique sur le libéralisme économique est clair et précis.

    Nous connaissons les travaux de Jean-Claude Michéa [2] sur les racines philosophiques [3] de ce libéralisme de marché. Or, il faut savoir que ce libéralisme des échanges a pu se développer sur les bases philosophiques du positivisme issu, d’une manière paradoxale pour certains, du protestantisme. Le fidéisme protestant, en effet, en niant à l’homme sa capacité à définir l’ordre naturel, favorise la réduction des biens humains aux biens utiles. Or, cette réduction du sens de la vie humaine à la gestion utile de ce qui est, de l’existant, est une violence réelle faite aux intelligences qui cherchent la vérité.

    Le travailleur français, à l’origine majoritairement artisan, paysan ou ouvrier, s’est vu progressivement contraint à l’isolement face à la toute- puissance des structures étatiques. La Révolution a ainsi supprimé les anciennes Corporations (institutions de métiers qui protégeaient les affiliés à travers une législation reconnue) et les anciennes Mutuelles. En adoptant la loi « Le Chapelier » [4], cette Révolution a interdit au travailleur de s’associer en lui ouvrant une nouvelle ère : celle d’un esclavage de l’industrie naissante. La course à la productivité et au rendement allait ainsi servir l’éclosion et la pérennité de groupements économiques financièrement puissants et asservissants.

    Le droit au travail consacré par la sainte Déclaration des Droits de l’Homme cachait surtout le nouveau devoir de se faire exploiter par les puissants de ce monde.

    Le fruit de la libéralisation des esprits, dont Voltaire fut un travailleur acharné, a surtout été la légalisation de la loi de la jungle et le triomphe des appétits égoïstes, dans la droite ligne de l’anthropologie protestante [5]. Les hommes et les femmes, enfermés dans leurs appétits narcissiques, sont ainsi « naturellement » en concurrence et la réussite individuelle, l’arrogance, la superbe, la suffisance deviennent des vertus dans ce monde anglo-saxon. Il n’y a pas loin à voir dans la réussite matérielle le signe des vertus humaines les plus hautes… Ne voit-on pas ici l’arrière-plan protestant de la prédestination dont les signes sont la réussite sociale et les richesses matérielles ?

    Il a existé des patrons catholiques [6] conscients de leurs responsabilités et qui humanisaient autant que possible la vie de leur entreprise. Il faut ici rappeler en toute justice que c’est l’Église catholique qui les rappelait à leur devoir. Si la séparation de la foi et de la raison, aujourd’hui majoritaire dans les cerveaux catholiques, est une catastrophe sociale et ecclésiale, la séparation des classes laborieuses et de l’Église catholique en est une autre.

    Le catholicisme social en France : quelques exemples

    Pourtant, et c’est ce que nous voulons rappeler ici, il n’a pas manqué de voix, même parmi les évêques (eh oui, tout arrive !), pour exposer ce qu’on appelle la doctrine sociale de l’Église [7], laquelle explique l’inhumanité de la doctrine libérale. Sans exposer le détail de l’argumentation, il convient de rappeler que la tradition de l’Église n’est pas de soutenir sans discernement les pouvoirs établis, même si certains hommes d’Église y ont succombé. Nous ne dresserons pas ici une liste dont les noms sont maintenant inconnus pour la plupart. Nous pourrions ici rappeler l’engagement des cardinaux Liénart [8] et Guerry [9] contre cette violence économique et sociale, Frédéric Ozanam [10] ou encore Léon Harmel [11]. Le rappel de cette doctrine sociale au regard du libéralisme économique est essentiel en un temps où le surnaturalisme imprègne le catholicisme, ce qui se traduit par la désertion du combat politique authentique.

    Nous citerons le cardinal Richaud (1887-1968), archevêque de Bordeaux :

    « Le travail de l’homme est une réalité voulue par Dieu et sanctifié par le Christ. Le chômage est donc un mal moral avant d’être un mal économique. Ses conséquences sur la valeur personnelle de l’ouvrier, sur la condition de la vie au foyer, sur l’ensemble de la vie sociale, sont à peser avant tout licenciement. Le chômage ne peut être que temporaire et “subi” par les responsables de la Cité, de la profession, de l’entreprise. Tous les moyens doivent être mis en œuvre pour l’éviter ou le réduire [12]. Jamais il ne saurait être envisagé comme un bien pour relancer une affaire ou équilibrer une situation. Même en face de difficultés économiques d’une entreprise ou d’un pays, les dirigeants doivent avoir le souci de sauvegarder une priorité absolue aux salaires vitaux. Un abandon momentané de la rémunération du Capital, une réduction par le haut de la hiérarchie des salaires et des traitements, un engagement des réserves de l’entreprise peuvent apparaître nécessaires dans une période particulièrement difficile. C’est ici que la morale évangélique du renoncement doit dicter à ceux qui sont avantagés ou qui jouissent d’une plus grande sécurité les gestes que les Chrétiens doivent faire et qui entraîneront leurs collègues et leurs compatriotes… Le dirigeant chrétien… évitera de transférer sur d’autres les difficultés qu’il rencontre. Il s’associera à eux pour les partager… Une conscience chrétienne ne peut supporter qu’une certaine catégorie de citoyens exploitent une période de crise pour s’y enrichir tandis que d’autres connaissent des moyens d’austérité [13]. »

    La véritable Église du Christ a ainsi toujours combattu les abus de pouvoir en protégeant les humbles et les petits. Le catholicisme social n’est pas une vue de l’esprit. Ce christianisme authentique a en effet fourni de nombreux résistants.

    Un certain abbé Busson écrivait ainsi en 1819 :

    « Il est un autre socialisme que les peuples doivent accueillir sous peine de retomber, et bientôt, dans la barbarie : c’est le socialisme chrétien. Celui-ci se fonde sur la liberté, l’égalité et la fraternité, telles que la religion du Christ les révèle. Il ne crée pas une humanité fantastique, pour dicter des lois à l’humanité réelle. Il prend les hommes comme ils sont, avec leurs inégalités sans nombre, parce que ces différences dérivent naturellement de la différence même des individualités humaines. Et voilà pourquoi il cherche à faire servir, dans une juste mesure, la plénitude des uns de ressource à l’indigence des autres. »

    Le catholicisme social en Allemagne

    C’est pourtant au XIXème siècle en Allemagne que le catholicisme social va s’incarner de façon significative autour des « lois Ketteler » du nom de l’évêque de Mayence Wilhelm Emmanuel von Ketteler (1811-1877). Cet évêque ne s’est jamais prostitué aux autorités établies, ce qui lui a valu de nombreuses difficultés. Il est cité en exemple par Benoît XVI dans son encyclique sociale Dieu est amour (n° 27). Dans cet élan, Mgr Weis (1796-1869) écrivait : « Le sort des salariés des riches fabriques est plus oppressif que l’ancien esclavage. » Le fruit de ces réflexions est la création d’associations de protection ou encore la modification du droit du travail.

    En 1864, trois ans, donc, avant la parution du Capital de Karl Marx, monseigneur von Ketteler publie La question ouvrière et le christianisme [14].

    Il dénonce alors une oppression d’une grande actualité :

    « Il n’y a plus de doute possible aujourd’hui : l’existence matérielle de la classe ouvrière presque tout entière, c’est-à-dire la grande masse des citoyens de tous les États modernes, celle de leur famille, le pain quotidien nécessaire à l’ouvrier, à sa femme et à ses enfants, est soumise à toutes les fluctuations du marché et du prix de la marchandise. Connaissez-vous quelque chose de plus déplorable qu’une telle situation ? Quels sentiments doit-elle éveiller dans le cœur de ces malheureux qui se voient, chaque jour, eux et ceux qui leur sont chers, exposés aux éventualités d’un marché ! C’est le marché aux esclaves de l’Europe libérale, taillé sur le modèle de notre libéralisme et de notre franc-maçonnerie philantropiques, éclairés et antichrétiens »

    Léon XIII (1810-1903) reconnaîtra en von Ketteler son précurseur. Une de ses intuitions de résistance est la création d’associations ouvrières, sortes de syndicats, indépendantes de l’État bien entendu, mais également des réseaux capitalistes. Ce mouvement aboutira à la création d’un parti chrétien qui remportera plusieurs élections. Dans l’œuvre de Mgr von Ketteler se trouve également le projet de création d’un institut de crédit qui permet aux ouvriers de contrôler le capital de leur entreprise et la participation des travailleurs aux bénéfices.

    À la même époque, de nombreuses initiatives fleurissent en Occident. En France particulièrement, Mgr Freppel (1827-1891) et Albert de Mun (1841-1914) vont proposer la création de caisses de sécurité sociale. Ces initiatives annoncent les grandes lignes des encycliques sociales de Léon XIII qui ordonnent en conscience la protection des ouvriers.

    La doctrine sociale et les papes

    Pie XI (1857-1922) dénonça en son temps « le libéralisme immoral » que Pie XII (1876-1958) condamnera de nouveau en 1944 « comme contraire au droit naturel ». Il va sans dire que ces hommes connaissaient les relations étroites entre ce libéralisme et la pratique de l’usure, dénoncée depuis les débuts de l’Église [15].

    Cette doctrine sociale de l’Église se fonde sur ce qu’on appelle le droit naturel [16] et la Révélation : cette dernière n’annulant point le premier, dont les grandes lignes ont été définies par des philosophes grecs [17] et romains. Cette doctrine, issue d’une longue maturation, ne définit pas le travail comme une marchandise ou une simple force productrice dépersonnalisée. Cette doctrine sociale relativise donc le travail mais en lui redonnant ses lettres de noblesse : en l’humanisant.

    Concernant la propriété privée, elle ne la définit pas comme un droit absolu de disposer de ses biens [18]. S’inspirant de saint Thomas, elle précise, ce qui ne va pas sans étonner nos oreilles formées au matérialisme égoïste, que la propriété privée, bien que nécessaire [19] à la satisfaction des besoins vitaux et pour d’autres raisons, est destinée en droit au bien commun. Quand j’use d’un bien matériel (maison, moyen de locomotion, outil, etc), je ne dois pas le faire comme s’il m’appartenait en propre mais comme s’il était à tous, si bien que si je rencontre quelque nécessiteux, je dois lui céder ce bien comme s’il s’agissait d’une restitution. Saint Thomas finit ainsi son argumentation en citant saint Paul (1 Tm 6, 17-18) : « Recommande aux riches de ce monde... de donner de bon cœur et de savoir partager. »

    Cette communauté des biens ou destination universelle des biens [20] est traditionnelle dans l’Église, bien que les catholiques, travaillés par des décennies de bourgeoisie néo-protestante, l’aient oublié pour le plus grand bien de la marche libérale. L’Église parle ainsi de droit naturel, non qu’elle enseigne qu’on ne doit rien posséder en propre [21] mais que l’on ne doit pas oublier que, naturellement, nous naissons nus et sans possessions. Le riche qui, par exemple, s’empare en premier d‘une richesse (un puits d’eau par exemple) pour la partager avec le plus grand nombre agit bien et en justice : il faute par contre quand il empêche la redistribution selon un juste prix ou engrange des bénéfices démesurés. Saint Thomas cite dans cette question saint Ambroise : « Que personne n’appelle son bien propre ce qui est commun [22], car tout ce qui dépasse les besoins, on le détient par la violence. »

    L’Église catholique, à travers tout l’argumentaire de sa doctrine sociale, rejette le libéralisme sauvage et le capitalisme démesuré qui lâchent la bride des prédateurs, ouvriers d’injustice. L’aveuglement de trop nombreux catholiques en ce domaine est le fruit du travail de sape d’idéologies déformantes et déshumanisantes. Cette ignorance [23] grave engendre dans leur mode de vie un contre-témoignage non moins grave et empêche leur entrée dans la résistance efficace au nouvel ordre mondial positiviste.

    En 1937, Pie XI s’insurgeait :

    « Que faut-il penser des manœuvres de quelques patrons catholiques, qui, en certains endroits, ont empêché la lecture de notre encyclique Quadragesimo anno dans leurs églises patronales ? Que dire de ces industriels catholiques qui n’ont cessé jusqu’à présent de se montrer hostiles à un mouvement ouvrier que nous avons-nous-mêmes recommandé ? On combattra cette incohérence, cette discontinuité dans la vie chrétienne, que nous avons déplorée tant de fois, et qui fait que certains hommes [24] , apparemment fidèles à remplir leurs devoirs religieux, mènent, avec cela, par un déplorable dédoublement de conscience, dans le domaine du travail, de l’industrie ou de la profession, dans leur commerce ou leur emploi, une vie trop peu conforme aux exigences de la justice et de la charité chrétienne ; d’où scandale pour les faibles et facile prétexte offert aux méchants de jeter sur l’Église elle-même le discrédit. »

    Divini Redemptoris, 1937.

    Quand une structure se corrompt, elle le fait toujours par le haut. L’Église authentique subsiste dans l’Église catholique. Car de nos jours, il est facile de se dire catholiques, du moins dans les réseaux ecclésiaux, d’aller à l’église, de participer à sa vie liturgique et communautaire, voire même d’accéder à certains « grades ». C’est ainsi que l’Église institutionnelle présente parfois, ponctuellement, le visage d’une auberge de prostituées. Ne voit-on pas certains encourager cette situation indigne en entretenant l’ignorance et le mépris de l’étude : c’est ainsi qu’on confisque les clés de la formation en empêchant le peuple d’y accéder. On le conforte ainsi dans ce dédoublement de conscience qui sert l’ordre établi. Au sein de ces zizanies subsiste un petit reste de fidèles qui résiste aux compromissions inacceptables et prend conscience, par l’étude et la lecture, de la nécessité de la dissidence.

    « L’Église n’est ni à droite, ni à gauche mais au-dessus, non pour dominer mais pour servir. »

    Pie XII

    Nul ne peut juger la conscience d’un autre, mais Mario Monti n’est pas catholique : c’est objectivement un petit agent de groupes de domination privés protestants et juifs dont les buts exclusifs sont l’argent et le pouvoir. Entièrement soumis à ces intérêts au détriment du bien commun des personnes, il œuvre chaque jour contre cette doctrine sociale de l’Église qu’il devrait servir en cohérence. Son évêque devrait vigoureusement rappeler ces vérités au risque d’accentuer des contre-témoignages inadmissibles.

    Conclusion

    La société libérale-libertaire, qui est la finalité de l’idéologie mondialiste (à ne pas confondre avec la mondialisation), consacre le prêt à intérêt de l’individu égoïste, alors que la doctrine sociale de l’Église, tout en reconnaissant la propriété privée comme un bien objectif et humanisant, recommande le don gratuit pour l’autre.

    Historiquement, nous sommes passés de la noblesse au calcul intéressé. Il ne faut pas oublier les intentions des pères du libéralisme économique dominant dont un représentant emblématique est Bernard Mandeville (1670-1733). Dans sa Fable des Abeilles (1714), il manifeste qu’une société fondée sur les vertus ne peut pas être prospère matériellement. Il faut donc libéraliser les vices. Le principe de cette nouvelle société libérale sera l’utilité sociale de l’égoïsme. Il ne s’agit plus ici de combattre les vices mais d’en accepter d’institutionnalisation.

    C’est là un des fruits du protestantisme, tel que l’a manifesté Max Weber dans son Éthique protestante et l’esprit du capitalisme. L’Église reconnaît par ailleurs le rôle pertinent du profit comme le rappelle Jean-Paul II dans Centesimus Annus. La difficulté vient quand les âmes sont à ce point absorbées par la Cité temporelle que les soucis propres à cette Cité ont envahi l’esprit des citoyens. Peut-on encore combattre à la suite du Christ dans ces circonstances ? Le souci de la vérité apparaît alors comme une recherche désincarnée : mais dans cette logique, le plus désincarné se trouve être le Christ incarné…

    Un autre sociologue, Werner Sombrart (1863-1941), plus connu en son temps que Max Weber, a fait le lien entre l’économie capitaliste sauvage et la religion juive. Aujourd’hui, deux principes bancaires coexistent dans le monde occidental : l’un, issu du monde protestant, de tendance ascétique ; l’autre provenant du monde juif, de tendance plus spéculative, (cf. Alain Soral, Comprendre l’Empire). Ces deux principes bancaires co-gèrent la capacité qu’ils se sont donnée de créer de l’argent à partir de rien et de tirer profit de l’emprunt. C’est là le mode de fonctionnement de la religion mamonnique. Il apparaît que le positivisme philosophique est un des piliers de l’esprit du monde : logique de domination temporelle.

    Pour une analyse du prêt à intérêt chez saint Thomas : Somme Théologique, IIa-IIae, qu. 78.

    En rappelant le passage du Livre de l’Exode (22, 25), saint Thomas se situe dans la lignée des Pères de l’Église en affirmant le caractère peccamineux de l’usure. On peut dire que jusqu’à la Renaissance, travailler pour accroître ses richesses étaient considéré comme un péché : la finance était immorale. Il fallait trouver le juste prix. L’authentique catholicisme recommandait le prêt gratuit. On sait par ailleurs que deux Conciles (Latran 1315 et Paris 1532) ont solennellement condamné le prêt à intérêt.

    Pour une analyse globale de la question : Pamphile Akplogan, L’enseignement de l’Église catholique sur l’usure et le prêt à intérêt, L’Harmattan, 2010.

    Keroas http://www.egaliteetreconciliation.fr

    Notes

    [1] Né en 1943, après avoir fait le va-et-vient entre la Commission Européenne et la banque Goldman Sachs, il est nommé en novembre 2011 Président du Conseil des Ministres italien et démissionne en décembre 2012. Le technocrate œuvre pour le racket légal des italiens au service des banques privées. Candidat aux prochaines élections, il annonce vouloir poursuivre sur la même voie : libéralisations, mesures de compétitivité, etc.

    [2] Impasse Adam Smith. Brèves remarques sur l’impossibilité de dépasser le capitalisme sur sa gauche (Climats, 2002. Réédition Paris, Champs-Flammarion, 2006) et La double pensée. Retour sur la question libérale (Paris, Champs-Flammarion, 2008) dont Alain Soral nous a recommandé la lecture.

    [3] Le raisonnement est toujours le même : notre connaissance ne touche jamais la vérité des choses mais son aspect sensible seulement. Et par conséquent comme l’appétit suit la connaissance, mon désir sera borné à un calcul d’intérêt singulier. Suivront les utilitaristes anglo-saxons : Adam Smith (1723-1790), Jeremy Bentham (1748-1832), Bernard Mandeville (1670-1733), son disciple Ricardo (1772-1823), John Stuart Mill (1806-1873), Malthus (1766-1834), et plus tard Keynes (1883-1946). Ces auteurs positivistes peuvent s’opposer ici ou là mais leurs points de départs sont les mêmes. Il est intéressant de noter que pour Keynes, influencé par Moore (1873-1958), le bien ne peut être défini adéquatement de façon universel et nécessaire. Il nous faut donc nous en tenir aux institutions établies qui ont fait leur preuve dans l’histoire des hommes pour guider nos actions. L’aboutissement contemporain de cette filiation est Milton Friedman (1912-2006), prix Nobel d’économie (1976), dont la doctrine économique est devenue dominante dans la marche vers le Nouvel Ordre Mondial.

    [4] La Loi Le Chapelier (juin 1791, du nom de Isaac Le Chapelier, avocat au Parlement de Bretagne, et abrogée progressivement en 1864 et 1884) proscrit légalement : les organisations ouvrières, dont les corporations des métiers, mais aussi les rassemblements paysans et ouvriers et le compagnonnage. Étrangement, elle épargne les clubs patronaux, les trusts et ententes à caractère monopolistique.

    « Enfin, à ceux qui verraient encore dans la Révolution la naissance de l’égalité et de la fraternité réelles, nous rappelons la loi “Le Chapelier”. Soit l’avènement aussi dans le dos des “droits de l’homme”, mais sur le dos du petit peuple du travail, du plus brutal libéralisme économique ! La loi Le Chapelier, promulguée en France deux ans seulement après la prise de la Bastille, proscrivant les organisations ouvrières et les rassemblements de paysans. Interdisant, de fait, les grèves et la constitution des syndicats, ainsi que les entreprises non lucrative comme les mutuelles. Ne visant ni les club patronaux, ni les trust, ni les ententes monopolistiques qui ne furent jamais inquiétés, elle provoque, dès 1800 chez les ouvriers charpentiers, la formation de ligues privées de défense et de grèves sauvages, qu’elle (la loi) permet de réprimer jusqu’à Napoléon III » (voir loi Ollivier).

    Alain Soral, Comprendre l’Empire.

    [5] Pour la théologie protestante, avec bien-sûr des nuances chez les auteurs et les filiations, le péché originel a détruit (complètement obscurci) la nature humaine si bien que non seulement l’intelligence ne peut plus connaître le vrai mais la volonté est incapable de bien objectif. On verra ainsi une certaine forme d’anti-intellectualisme chez Luther lorsqu’il refuse de donner à l’intelligence la capacité d’accéder à la vérité. Sa définition de la nature humaine est telle qu’il l’estime incapable de connaître naturellement des vérités premières et d’aimer objectivement un bien. Sa formation nominaliste occamiste a fondé ce postulat. Dés lors, l’usage de la raison dans les matières de la foi, et donc la prétention d’exposer une théologie scientifique du donné révélé, est non seulement invalidée par cette orientation protestante mais lui est insupportable. L’usage de la raison humaine, avec sa logique naturelle, dans les matières de la foi, est un abominable scandale. Nous rappelons ici le texte bien connu : "dans les choses spirituelles la raison est non seulement aveugle et ténèbres, elle est vraiment la putain du diable, elle ne peut que blasphémer, déshonorer tout ce que Dieu a dit ou fait". Notre intelligence totalement détruite ne peut plus définir des vérItés naturelles et les vérités révélées de la foi ne sont pas rationnelles mais s’adressent uniquement à notre cœur, compris comme siège des sentiments. Ce sera le Dieu sensible au cœur de Pascal. Luther repoussait ainsi toute philosophie, et invalidait toute logique en théologie. "La logique n’est nulle part nécessaire en théologie, dit-il, parce que le Christ n’a pas besoin des inventions humaines". Et par conséquent Aristote devient pour lui le rempart impie des papistes. Son éthique est la pire ennemie de la grâce. Saint Thomas est rejeté, la Sorbonne est la mère de toutes les erreurs et Jacques Maritain peut conclure :"Luther en somme apportait à l’humanité 230 ans avant J.J. Rousseau une délivrance, un immense soulagement : il délivrait l’homme de l’intelligence, de cette fatigante et obsédante contrainte de penser toujours et de penser logiquement. La grande oeuvre révolutionnaire, à partir du protestantisme en descendant jusqu’à nos jours, c’est de ne permettre de repos à la raison que dans la contradiction. Elle met en nous une guerre universelle." Luther et ses disciples protestants de tous les temps mettent en oeuvre le programme philosophie de Guillaume d’Occam (franciscain anglais mort en 1347) : abandon de la philosophie réaliste jugée inutile et incertaine, séparation de la philosophie et de la théologie, prédominance du sentiment au détriment de la raison. Plus tard, quand la foi disparaîtra : réduction des biens humains aux biens utiles. Et comme le souligne Jean-Paul II dans Fides et Ratio (n° 48) : « la foi, ainsi privée de la raison, a mis l’accent sur le sentiment et l’expérience, en courant le risque de ne plus être une proposition universelle. Il est illusoire de penser que la foi, face à une raison faible, puisse avoir une force plus grande ; au contraire, elle tombe dans le grand danger d’être réduite à un mythe ou à une superstition. De la même manière, une raison qui n’a plus une foi adulte en face d’elle n’est pas incitée à s’intéresser à la nouveauté et à la radicalité de l’être ».

    [6] Voir plus bas, Léon Harmel.

    [7] Une synthèse de cette doctrine a été publiée en 2006 aux éditions du Cerf.

    [8] 1884-1973 : peu apprécié des traditionnalistes pour son progressisme, il développa cependant le syndicalisme chrétien.

    [9] 1891-1969 : figure du catholicisme social en France après-guerre.

    [10] 1813-1853 : professeur d’histoire de la littérature à la Sorbonne, béatifié en 1997.

    [11] 1829-1915 : industriel français, tertiaire de saint François. Le patronat catholique l’appréciait peu. Harmel rappelait la nécessaire autonomie de l’organisation ouvrière face au patronat.

    [12] L’indice N.A.I.R.U. est ainsi le taux de chômage nécessaire et suffisant pour limiter l’inflation. Équation économétrique essentielle dans le système libéral actuel et dénoncée par Etienne Chouard.

    [13] Le Figaro, 13-02-1959.

    [14] Disponible au téléchargement sur gallica.fr.

    [15] Cf ; Pamphile Akplogan : L’enseignement de l’Église catholique sur l’usure et le prêt a intérêt. L’Harmattan, 2010. L’auteur béninois s’étonne par ailleurs que le nouveau Code de Droit Canonique (1983) ne parle plus de l’usure. Le Compendium de la Doctrine Sociale de de l’Église (Cerf, 2006) rappelle cependant cette condamnation dans son n° 341 : « Si dans l’activité économique et financière la recherche d’un profit équitable est acceptable, le recours à l’usure est moralement condamné : « Les trafiquants, dont les pratiques usurières et mercantiles provoquent la faim et la mort de leurs frères en humanité, commettent indirectement un homicide. Celui-ci leur est imputable » (Catéchisme Église Catholique, n° 2269). Cette condamnation s’étend aussi aux rapports économiques internationaux, en particulier en ce qui concerne la situation des pays moins avancés, auxquels ne peuvent pas être appliqués « des systèmes financiers abusifs sinon usuraires » (CEC, n° 2438). Le Magistère plus récent a eu des paroles fortes et claires contre une pratique dramatiquement répandue aujourd’hui encore : « Ne pas pratiquer l’usure, une plaie qui à notre époque également, constitue une réalité abjecte, capable de détruire la vie de nombreuses personnes » (Jean-Paul II : Discours à l’Audience générale du 4 février 2004).

    [16] Pas celui de Hugo Grotius qui conserve l’expression mais en détourne le sens vers la subjectivité.

    [17] Dont le principal est Aristote, auteur indépassable dans l’ordre naturel.

    [18] Comme c’est le cas chez Grotius. Alors que chez Thomas d’Aquin, tout usage de la richesse doit avoir une destination communautaire (Somme Théologique, IIa-IIae, question 66, a.2).

    [19] Saint Thomas donne trois raisons qui justifie cette nécessité : 1° on prend davantage soin de ce qui nous appartient, 2° l’efficacité dans la gestion est plus assurée quand chacun s’occupe de son office et non quand chacun veut s’occuper de tout, 3° la paix sociale est plus garantie quand chacun est relativement satisfait vis-à-vis des biens extérieurs. Dans le cas des biens partagés ou indivis, il se rencontre beaucoup de conflits.

    [20] La destination universelle des biens de ce monde est rappelée dans le Compendium (Cerf, 2006) à partir du n° 171.

    [21] Sauf dans le cas de vocation particulière, avec des degrés selon les constitutions religieuses.

    [22] Ici, il parle de la propriété au point de vue de l’usage.

    [23] La prise de conscience ne suffit pas : il faut y ajouter la réforme de vie, en un mot sortir de la prostitution à l’ordre établi bourgeois et mercantile avec ses corollaires de consommation continue et avilissante.

    [24] La mixité récente a accentué cette dérive : l’accent mis en effet sur la communion relationnelle au détriment de la raison et de la vérité est une caractéristique de la vie ecclésiale catholique actuelle.

  • Zemmour : « Montebourg est tout miel avec Renault »

    Chronique d’Eric Zemmour du 18 janvier 2013 : la curieuse mansuétude de Montebourg sur le dossier Renault.


    "La Chronique d'Eric Zemmour" : la curieuse... par rtl-fr