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tradition - Page 256

  • Julius Evola : « L’affaiblissement des mots »

    Une des preuves que le cours de l’histoire n’a pas suivi, en dehors du plan purement matériel, une direction de progrès, c’est la pauvreté des langues modernes par rapport à de nombreuses langues anciennes. Pas une seule des « langues vivantes » occidentales ne peut soutenir la comparaison, en matière d’organicité, de précision et de souplesse, avec, par exemple, le latin ou le sanskrit. Parmi toutes les langues européennes, il n’y a peut-être que l’allemand qui ait conservé quelque chose de la structure archaïque (et c’est pour cela que la langue allemande a la réputation d’être « si difficile »), alors que la langue anglaise et celles des peuples scandinaves ont également subi un processus d’érosion et d’affaiblissement. D’une manière générale, on peut dire que les langues anciennes étaient tridimensionnelles, tandis que les langues modernes sont bidimensionnelles. Le temps a agi, ici aussi, dans un sens corrosif ; il a rendu les langues « fluides » et « pratiques » au détriment, justement, du caractère organique. Ceci n’est qu’un reflet de ce qui s’est vérifié dans bien d’autres domaines de la culture et de l’existence. Les mots, eux aussi, ont leur histoire et, souvent, le changement qu’ont subi leurs contenus est un indice barométrique intéressant de modifications correspondantes de la sensibilité générale et de la vision du monde. En particulier, il serait intéressant de comparer le sens qu’eurent certains mots dans la vieille langue latine et le sens propre à des termes, restés pratiquement les mêmes, de la langue italienne et d’autres langues romanes également. On observe généralement une chute de niveau. Le sens le plus ancien a été perdu, ou ne survit sous une forme résiduelle que dans certaines acceptions ou locutions particulières, mais ne correspond plus au sens désormais courant ou, encore, semble tout à fait déformé et fréquemment banalisé. Nous donnerons ici quelques exemples.

    1 – Le cas le plus typique et le plus connu, c’est peut-être celui du mot virtus. La « vertu » au sens moderne n’a rien à voir avec la virtus antique. Virtus désignait la force de caractère, le courage, la prouesse, la fermeté virile. Ce terme dérivait de vir, l’homme véritable, non l’homme dans un sens général et naturaliste. Le même terme a pris, dans la langue moderne, un sens essentiellement moraliste, très souvent associé à des préjugés d’ordre sexuel, au point que, se référant à lui, Vilfredo Pareto a forgé le terme « vertuisme » pour désigner la morale bourgeoise puritaine et sexophobe. Quant on dit une « personne vertueuse », on pense aujourd’hui à quelque chose de bien différent de ce que pouvaient signifier par exemple, à l’aide d’une réitération efficace, des expressions comme celle-ci : vir virtute praeditus. II n’est pas rare que la différence se transforme en opposition. En effet, une âme forte, fière, intrépide, héroïque est le contraire de ce que veut dire une personne « vertueuse » au sens moraliste et conformiste moderne. Le sens de virtus comme force efficiente ne s’est maintenu que dans certaines locutions particulières : la « vertu » d’une plante ou d’un médicament, « en vertu » de ceci ou de cela.

    2 – Honestus. Lié à l’idée d’honos, ce terme eut pour les Anciens le sens prédominant d’honorable, noble, de noble rang. De cela, que s’est-il conservé dans le terme moderne correspondant ? Une personne « honnête », c’est aujourd’hui un représentant « bien-pensant » de la société bourgeoise, quelqu’un qui ne se livre pas à de mauvaises actions. L’expression « né de parents honnêtes » a même de nos jours une nuance quasiment ironique, tandis que dans la Rome antique elle servait à désigner précisément une noblesse de naissance, qui était souvent liée aussi à une noblesse biologique. Vir honesta facie signifiait en effet un homme de belle prestance, de même qu’en sanskrit le terme arya se référait à la fois à une personne digne d’être honorée et à une noblesse aussi bien intérieure que physique.

    3 – Gentilis, gentilitas. Aujourd’hui chacun pense à une personne courtoise, affable, bien élevée. Le terme antique renvoyait par contre à la notion de gens, la race, la caste ou le lignage. Pour les Romains, était « gentil » celui qui possédait les qualités dérivant d’un lignage et d’un sang bien différenciés, lesquelles peuvent éventuellement, et comme par réflexion, déterminer une attitude de courtoisie détachée, chose très différente des « bonnes manières » que peut aussi posséder le parvenu après avoir lu un manuel de savoir-vivre – et différente, également, de la vague notion moderne de « gentillesse ». Peu de gens sont aujourd’hui capables de saisir le sens le plus profond d’expressions comme « un esprit gentil » et autres, restées comme des prolongements isolés chez des écrivains d’autres temps que le nôtre.

    4 – Genialitas. Qui est « génial » de nos jours ? Un type d’homme foncièrement individualiste, riche de trouvailles originales et de fantaisie. A la limite, on a le « génie » dans le domaine artistique, auquel la civilisation bourgeoise et humaniste a voué un culte fétichiste, si bien que le « génie » – plus que le héros, l’ascète ou l’aristocrate – a souvent été considéré, dans cette civilisation, comme le type humain le plus élevé. Le terme latin genialis renvoie, lui, à quelque chose de fort peu individualiste et « humaniste ». II provient du mot genius, qui désigna originellement la force formatrice et génératrice, interne, spirituelle et mystique, d’une certaine lignée. On peut donc affirmer que les qualités « géniales » au sens antique eurent une certaine relation avec les qualités « raciales », dans l’acception la plus haute du terme. En opposition au sens moderne, ce qui est « génial » se distingue ici de ce qui est individualiste et arbitraire ; il se rattache à une racine profonde, obéit à une nécessité intérieure par une fidélité aux forces supra-personnelles d’un sang et d’une lignée, donc à ces forces qui, dans toute famille patricienne, étaient en rapport, on le sait, avec une tradition sacrée.

    5 – Pietas. Inutile de rappeler ce que veut dire aujourd’hui une « personne pieuse ». On songe à une attitude sentimentale plus ou moins humanitaire – et « pieux » est parfois synonyme de compatissant. Dans la vieille langue latine, la pietas, par contre, appartenait au domaine du sacré, désignait en premier lieu les rapports que l’homme romain entretenait avec les divinités, en second lieu ses rapports avec d’autres réalités liées au monde de la Tradition, y compris l’État lui-même. Envers les dieux, il s’agissait d’une vénération calme et digne : sentiment d’appartenance et, simultanément, de respect, d’accord reconnaissant, de devoir et d’adhésion aussi, comme renforcement du sentiment que faisait naître la sévère figure du pater familias (ce qui explique aussi la pietas filialis). La pietas pouvait également se manifester dans le domaine politique : pietas in patriam voulait dire fidélité et sens du devoir envers l’État et la patrie. Dans certains cas, le terme en question connote aussi le sens de iustitia. Celui qui ne connaît pas la pietas, celui-là est également l’injuste, presque l’impie, celui qui veut ignorer la place qui est sienne et qu’il doit occuper dans le cadre d’un ordre supérieur, à la fois humain et divin.

    6 – Innocentia. Ce mot évoquait lui aussi l’idée de clarté et de force ; son sens le plus courant dans l’Antiquité exprimait la pureté de l’âme, l’intégrité, le désintérêt, la droiture. Ce terme n’avait donc pas un sens purement négatif : « ne pas être coupable ». II ignorait la nuance de banalité que présente aussi l’expression « un esprit innocent », devenue presque synonyme de simplet. Dans d’autres langues romanes, comme le français par exemple, le même terme, innocent, finit par désigner les idiots, les tarés de naissance, les faibles d’esprit.

    7 – Patientia. Le sens moderne, par rapport au sens ancien, est de nouveau émoussé et affaibli. Quelqu’un de patient, c’est aujourd’hui quelqu’un qui ne se met pas en colère, qui ne s’énerve pas, qui tolère. Dans la langue latine la patientia désignait une des « vertus » fondamentales de l’homme romain : elle connotait l’idée d’une force intérieure, d’une imperturbabilité, faisait allusion à la capacité de tenir bon, de garder l’âme non troublée devant n’importe quel échec et n’importe quelle adversité. C’est pour cela qu’il fut dit de la race de Rome qu’elle avait en propre le pouvoir d’accomplir de grandes choses et d’endurer des malheurs tout aussi grands (cf. la fameuse formule de Livius : et facere et pati fortia romanum est). Le sens moderne est, par rapport à l’autre, complètement déformé. Aujourd’hui, comme exemple d’une nature typiquement « patiente », on se réfère à l’âne.

    8 – Humilitas. Avec la religion qui a fini par prédominer en Occident, l’« humilité » est devenue une « vertu » dans un sens fort peu romain et a été glorifiée par opposition à la force, à la dignité, à l’attitude calmement composée dont nous avons parlé plus haut. Dans la Rome antique elle désigna au contraire l’opposé de toute virtus. Elle voulut dire bassesse, qui mérite le mépris, basse condition, abjection, lâcheté, déshonneur – au point qu’il fallait préférer la mort ou l’exil à l’« humilité » : humilitati vel exilium vel mortem anteponenda esse. Les associations d’idées sont fréquentes, comme par exemple mens humilis et prava, un esprit bas et mauvais. L’expression humilitas causam dicentium se rapporte à la condition inférieure et coupable de ceux qu’on mène devant un tribunal. On rencontre ici aussi une interférence avec l’idée de race ou de caste. Humilis parentis natus signifiait être né du peuple au sens péjoratif, né de la « plèbe », par opposition à la naissance noble, donc avec une différence sensible par rapport au sens moderne de l’expression « de condition humble », surtout si l’on songe que le critère exclusif de la position sociale est aujourd’hui le critère économique. De toute façon, jamais un Romain de la meilleure Rome n’aurait eu l’idée de faire de l’humilitas une vertu, encore moins de s’en vanter et de la prêcher. Quant à une certaine « morale de l’humilité » , on pourrait rappeler la remarque d’un empereur roman, selon laquelle rien n’est plus méprisable que l’orgueil de ceux qui se disent humbles, ce qui ne doit pas être pris pour une façon d’encourager l’arrogance et la prétention.

    9 – Ingenium. Le sens ancien du terme ne s’est conservé que partiellement, et, de nouveau, sous son aspect le moins intéressant. Ingenium désignait aussi en latin la perspicacité, l’agilité d’esprit, la sagacité, la clairvoyance – mais, en même temps, ce terme renvoyait au caractère, à ce qui est, chez chacun, organique, inné, vraiment personnel. Vana ingenia put donc désigner des personnes sans caractère ; redire ad ingenium put signifier revenir à sa propre nature, à un mode de vie conforme à ce que l’on est vraiment. Ce sens profond a été perdu dans le terme moderne, ce qui a donné naissance à une antithèse. En effet, si l’on entend par « intelligence » quelque chose d’intellectualiste et de dialectique, on est alors très loin du second sens inclus dans le terme antique, qui se rapporte aussi au caractère, à un style en accord avec la nature propre ; l’intelligence est alors ce qui est superficiel par rapport à ce qui est organique, elle est mouvement inquiet, brillant et inventif de l’esprit, au lieu d’être un style de pensée rigoureux qui adhère parfaitement au caractère.

    10 – Labor. En ce qui concerne certains changements de valeur des mots qui indiquent clairement un changement radical de la vision du monde, le cas le plus caractéristique est peut-être celui du terme labor. En latin, ce terme avait essentiellement un sens négatif. II pouvait désigner dans certains cas l’activité en général – comme par exemple dans l’expression labor rei militaris, activité dans l’armée. Mais son sens courant exprimait une idée de fatigue, d’épuisement, d’effort désagréable, et parfois même de disgrâce, de tourment, de poids, de peine. [...] Ainsi, laborare pouvait aussi signifier souffrir, être angoissé, tourmenté. Quid ego laboravi ? veut dire : pourquoi me suis-je tourmenté ? Laborare ex renis, ex capite signifie : souffrir du mal de reins ou de tête. Labor itineris : la fatigue, le désagrément du voyage. Et ainsi de suite. De sorte que jamais le Romain n’aurait pensé à faire du labor une espèce de vertu et d’idéal social. Et qu’on ne vienne pas nous dire que la civilisation romaine a été une civilisation de lambins, de fainéants et d’« oisifs ». La vérité, c’est qu’à l’époque on avait le sens des distances. Au « travailler » s’opposait l’agere, l’agir au sens supérieur. Le « travail » correspondait aux formes sombres, serviles, matérielles, anodines de l’activité humaine, en référence à ceux chez qui l’activité n’était provoquée que par un besoin, une nécessité ou un destin malheureux (car l’Antiquité connut aussi une métaphysique de l’esclavage). A eux s’opposaient ceux qui agissent au sens propre du terme, ceux qui entretiennent des formes d’activité libres, non physiques, conscientes, voulues, dans une certaine mesure désintéressées. Pour celui qui exerçait une activité matérielle, certes, mais possédant un certain caractère qualitatif, et qui le faisait à partir d’une vocation authentique et libre, on ne parlait déjà plus de « travail » ; celui-là était un artifex (il y avait également le terme opifexl, et ce point de vue fut aussi conservé dans l’atmosphère et le style des corporations artisanales traditionnelles. Le changement de sens et de valeur du terme en question est par conséquent un signe très clair de la vulgarité plébéienne qui a gagné le monde occidental, une civilisation qui repose toujours plus sur les couches les plus basses de toute hiérarchie sociale complète. Le « culte du travail » moderne est d’autant plus aberrant qu’aujourd’hui plus que jamais, avec l’industrialisation, la mécanisation et la production anonyme de masse, le travail a nécessairement perdu ce qu’il pouvait avoir de meilleur. Cela n’a pourtant pas empêché certains de parler de « religion du travail », d’« humanisme du travail » et même de souhaiter un « État du travail ». On en est arrivé à faire du travail une sorte d’impératif éthique et social insolent, applicable à tous, devant lequel on a envie de répondre par ce proverbe espagnol : El hombre que trabaja perde un tiempo precioso (l’homme qui travaille perd un temps précieux). En une autre occasion, nous avions déjà relevé l’opposition suivante entre le monde traditionnel et le monde moderne : dans le premier, même le « travail » put prendre la forme d’une « action », d’une « oeuvre », d’un art ; dans le second, même l’action et l’art prennent parfois la forme du « travail », c’est-à- dire d’une activité obligatoire, opaque et intéressée, d’une activité qu’on ne poursuit pas en fonction d’une vocation, mais du besoin et, surtout, en vue du profit, du lucre.

    11 – Otium. Ce terme a subi le sort exactement contraire du précédent. Il a de nos jours, pratiquement sans exception, un sens négatif. Est oisif, selon l’acception moderne, celui qui est inutile à lui-même et aux autres. Etre oisif et être indolent, distrait, inattentif, paresseux, enclin au « dolce farniente » de l’Italie des mandolines pour touristes, reviennent plus ou moins au même aujourd’hui. Le latin otium avait par contre le sens de temps libre, correspondant essentiellement à un état de recueillement, de calme, de contemplation transparente. L’oisiveté au sens négatif – sens connu aussi de l’Antiquité – n’était que ce à quoi elle peut conduire quand elle est mal employée : dans ce cas uniquement on put dire, par exemple, hebescere otio ou otio dif luere, s’abrutir ou se laisser aller par oisiveté. Mais ce n’est pas le sens courant. Cicéron, Sénèque et d’autres auteurs classiques comprirent l’otium comme la contrepartie, saine et normale, de tout ce qui est activité, et même comme la condition nécessaire afin que l’action soit vraiment activité, non agitation, affairement (negotium), « travail ». On peut aussi se référer aux Grecs puisque Cicéron écrivit : Graeci non solum ingenio atque doctrina, sed etiam otio studioque abundantes – «Les Grecs sont riches non seulement en dons innés et en doctrine, mais aussi en oisiveté et en application ». D’un personnage comme Scipion l’Ancien on avait l’habitude de dire : Nunquam se minus otiosum esse quam cum otiosus esset, aut minus solum esse quam cum solus esset – « II n’était jamais aussi peu oisif que lorsqu’il ne faisait rien, et jamais aussi peu seul que lorsqu’il jouissait de la solitude », ce qui met en évidence une variante « active », au sens supérieur, de l’« oisiveté » et de la solitude. Et Salluste : « Maius commodum ex otio meo quam ex aliorum negotiis reipublicae venturum » – « Mon oisiveté sera plus utile à l’État que l’affairement des autres ». On doit à Sénèque un traité qui s’intitule justement De otio, dans lequel l’« oisiveté » est décrite comme menant progressivement à la contemplation pure. Certaines idées caractéristiques de ce traité valent la peine d’être rapportées ici. Selon Sénèque, il y a deux États : l’un, grand et privé de limites extérieures et contingentes, contient à la fois les hommes et les dieux ; l’autre est l’État particulier, terrestre, auquel on appartient par la naissance. Or, dit Sénèque, il y a des hommes qui servent les deux États à la fois, d’autres qui ne servent que le plus grand, d’autres encore qui ne servent que l’État terrestre. L’État le plus grand, on peut le servir aussi par l’« oisiveté », pour ne pas dire surtout par l’oisiveté – en cherchant donc en quoi consiste la virtus, la force et la dignité viriles : huis maiori rei publicae et in otio deservire possumus, imno vero nescio an in otium melius, ut quaeremus quid sit virtus. L’otium est étroitement lié à la tranquillité d’âme du sage, à ce calme intérieur qui permet d’atteindre les sommets de la contemplation ; laquelle contemplation, pour peu qu’on la comprenne dans son sens juste, traditionnel, n’est ni évasion du monde ni divagation, mais approfondissement intérieur et élévation jusqu’à la perception de l’ordre métaphysique que tout homme véritable ne doit cesser de voir dans sa vie même et dans son combat au sein d’un État terrestre. Du reste, dans le catholicisme lui-même (quand on n’avait pas encore pensé au Christ travailleur qu’il faut honorer le 18 mai et quand on ne pratiquait pas encore l’« ouverture à gauche ») a figuré l’expression sacrum otium, « oisiveté sacrée », en référence, précisément, à une activité contemplative. Mais dans une civilisation où l’action a fini par revêtir les aspects ternes, physiques, mécaniques et mercenaires d’un travail, même quand celui-ci doit tout à la tête (les « travailleurs intellectuels » qui ont naturellement leurs « syndicats » et qui font valoir, eux aussi, des « revendications catégorielles »), le sens positif et traditionnel de la contemplation devait inéluctablement disparaître. C’est pourquoi la civilisation moderne ne doit pas être considérée comme une civilisation « active », mais comme une civilisation d’agités et de névropathes. Comme compensation du « travail » et de l’usure d’une vie qui s’abrutit dans une agnation et une production vaines, l’homme moderne, en effet, ne connaît pas l’otium classique, le recueillement, le silence, l’état de calme et de pause qui permettent de revenir à soi-même et de se retrouver. Non : il ne connaît que la « distraction » (au sens littéral, distraction signifie « dispersion ») ; il cherche des sensations, de nouvelles tensions, de nouveaux excitants, comme autant de stupéfiants psychiques. Tout, pourvu qu’il échappe à lui-même, tout, pourvu qu’il ne se retrouve pas seul avec lui-même, isolé du vacarme du monde extérieur et de la promiscuité avec son « prochain ». D’où radio, télévision, cinéma, croisières organisées, frénésie de meetings sportifs ou politiques dans un régime de masse, besoin d’écouter, chasse au fait nouveau et sensationnel, « supporters » en tout genre et ainsi de suite. Chaque expédient semble avoir été diaboliquement disposé pour que toute vie intérieure soit détruite, pour que toute défense interne de la personnalité soit interdite dès le départ, pour que, tel un être artificiellement galvanisé, l’individu se laisse porter par le courant collectif, lequel, évidemment, selon le fameux « sens de l’histoire », avance vers un progrès illimité.

    12 – Par association d’idées, il nous vient à l’esprit de faire remarquer le changement de sens subi par le terme grec theoria. Quand on parle aujourd’hui de « théories », c’est plus ou moins dans le sens d’« abstractions », de choses éloignées de la réalité, d’affaires « intellectuelles » ; un grand poète a même écrit : « Grise est toute théorie, mais toujours vert est l’arbre éternel de la vie ». De nouveau, on est en présence d’une altération et d’un affaiblissement du sens. Pour les Grecs, ??? [terme manquant, NDLR] ne voulait pas dire intellectualité abstraite mais vision réalisatrice, quelque chose de particulièrement actif, l’acte de ce qu’il y a de plus élevé chez l’être humain, l’intellect olympien (sur lequel nous reviendrons dans un autre chapitre).

    13 – Servitium. Le verbe servio, servire a aussi en latin le sens positif d’être fidèle. Mais la signification négative – être serviteur – prévaut ; c’est ce sens, de toute façon, qu’on retrouve dans servitium, qui désignait précisément l’esclavage, le servage, car dérivé de servus = esclave. Dans les temps modernes, le verbe « servir » s’est répandu de plus en plus en perdant cette connotation négative et avilissante, au point qu’on a pu faire du service en tant que « service social », surtout parmi les peuples anglo-saxons, l’objet d’une éthique, de la seule éthique vraiment moderne. De même qu’on n’a pas compris qu’il était absurde de parler de « travailleurs intellectuels », de même on a pu voir dans le souverain « le premier serviteur de la nation ». Nous avons dit que les Romains ne se présentent pas du tout à nous comme un peuple d’« oisifs ». En ce qui concerne le point qui nous occupe, on peut dire aussi qu’ils nous offrent les exemples les plus élevés de loyalisme politique, de fidélité à l’État et aux chefs. Mais l’atmosphère est très différente. La transformation dé l’âme des mots n’est pas le produit du hasard. Que des mots comme labor, servitium, otium se soient imposés dans l’usage courant avec leur sens moderne, c’est un signe subtil, mais éloquent, d’un changement de perspective qui s’est fait à rebours de toute orientation virile, aristocratique, qualitative.

    14 – Stipendium. N’insistons pas sur ce que signifie le « salaire » de nos jours. On pense immédiatement au petit employé, à la bureaucratie, au fameux 27 du mois des fonctionnaires. Dans la Rome antique, ce terme, par contre, se référait presque exclusivement à l’armée. Stipendium merere voulait dire être militaire, être sous les ordres de tel ou tel chef ou condottiere. Emeritis sti- pendis signifiait : après avoir accompli le service militaire ; homo nullius stipendii désignait celui qui n’avait pas connu la discipline des armes. Stipendis multa habere voulait dire pouvoir s’enorgueillir de nombreuses campagnes, de nombreuses entreprises guerrières. Ici aussi, le glissement de sens n’est pas mince. Le sens profond d’autres mots latins, comme studium et studiosus, n’est aujourd’hui conservé que dans certaines locutions spéciales, comme par exemple l’expression italienne « fare con studio », faire quelque chose exprès ou avec une certaine application. Dans le terme latin était présente l’idée de quelque chose d’intense, d’une chaleur, d’un intérêt profond, qui a disparu dans le vocable moderne car celui-ci fait penser surtout à des disciplines intellectuelles ou universitaires arides. Le latin studium pouvait même dire amour, désir, vive inclination. In re studium ponere signifiait prendre une chose à coeur, s’y intéresser profondément et activement. Studium bellandi désignait le plaisir, l’amour du combat. Homo agendi studiosus : celui qui aime l’action – donc qui était l’opposé, si l’on se souvient de ce que nous avons dit au sujet de labor, de celui pour qui l’action ne peut être que « travail » . Que faut-il penser, aujourd’hui, d’une expression comme studiosi Caesaris ? Elle ne voulait pas dire ceux qui étudient César, mais bien ceux qui le suivent, qui l’admirent, qui se rangent à ses côtés, qui lui sont dévoués et fidèles. Autres termes latins dont le sens antique a été oublié : docilitas, qui ne voulait pas dire docilité mais surtout bonne disposition, ou capacité d’apprendre, de faire sien un enseignement ou un principe ; puis ingenuus, qui n’avait pas du tout le sens d’ingénu, mais désignait l’homme né libre, de condition non servile. Une chose assez connue maintenant : humanitas ne voulait pas dire « humanité » au sens démocratique et fumeux d’aujourd’hui, mais culture de soi- même, plénitude de vie et d’expérience, sans qu’il faille voir là, du moins à l’origine, quelque chose d’« humaniste » à la Humboldt. Un autre exemple assez important : certus. Dans la vieille langue latine la notion de certitude, de chose certaine, était souvent en relation avec l’idée d’une détermination consciente. Certum est mihi veut dire : c’est ma ferme volonté. Certus gladio désigne celui qui peut se fier à son épée, qui est sûr de savoir s’en servir. On connaît aussi la formule diebus certis, qui ne veut pas dire « aux jours certains », mais aux jours fixés, établis. Ceci pourrait nous pousser à des considérations sur une certaine conception de la certitude : conception active, qui la fait dépendre de ce qui rentre dans notre pouvoir déterminant. C’est ce qu’énonça également, en quelque sorte, Gian Battista Vico avec la formule verum et factum convertuntur – mais tout devait finir plus tard dans les divagations de l’« idéalisme absolu » néo-hégélien. Nous mettrons fin à ces observations en examinant le contenu original de trois notions romaines antiques, celles de fatum, de felicitas et de fortuna.

    15 – Fatum. Selon l’acception moderne la plus courante, le « destin » est une puissance aveugle qui plane sur les hommes, qui s’impose à eux en faisant que se réalise ce qu’ils souhaitent le moins, en les poussant éventuellement vers la tragédie et le malheur. Fatum a ainsi donné naissance au mot « fatalisme », qui est l’opposé de toute initiative libre et efficace. Selon la vision fataliste du monde, l’individu n’est rien ; son action, en dépit de toute apparence de libre- arbitre, est prédestinée ou vaine, et les événements se succèdent en obéissant à une puissance ou une loi qui le transcende et qui ne le prend pas en compte. « Fatal » est un adjectif qui a essentiellement une connotation négative : issue « fatale », accident « fatal », l’« heure fatale de la mort » , etc. Selon la conception antique, le fatum correspondait par contre à la loi de manifestation continue du monde ; cette loi n’était pas réputée aveugle, irrationnelle et automatique – «fatale » au sens moderne du mot – , mais chargée de sens et comme procédant d’une volonté intelligente, surtout de la volonté des puissances olympiennes. Le fatum romain renvoyait, de même que le rta indoeuropéen, à la conception du monde en tant que cosmos, en tant qu’ordre, et en particulier à la conception de l’histoire comme un développement de causes et d’événements reflétant une signification supérieure. Même les Moires de la tradition grecque, tout en présentant certains aspects maléfiques et « infernaux » (dus à l’influence de cultes pré- helléniques et pré-indo-européens), apparaissent souvent comme des personnifications de la loi intelligente et juste qui préside au gouvernement de l’univers, dans certaines de ses expressions. Mais c’est surtout à Rome que l’idée de fatum prend une importance toute particulière. Et ce parce que la civilisation romaine fut, de toutes les civilisations de caractère traditionnel et sacré, celle qui se concentra le plus sur le plan de l’action et de la réalité historique. Pour elle, il fut donc moins important de connaître l’ordre cosmique comme une loi supra-temporelle et métaphysique que de le connaître comme force en acte dans la réalité, comme vouloir divin qui ordonne les événements. C’est à cela que se rattachait le fatum pour les Romains. Ce terme vient du verbe fari, d’où dérive aussi le mot fas, le droit comme loi divine. Ainsi, fatum renvoie à la « parole » – à la parole révélée, surtout à celle des divinités olympiennes qui permet de connaître la norme juste (fas) en tant que celle-ci annonce ce qui va arriver. On doit ajouter, à propos de ce second aspect, que les oracles, par lesquels un art traditionnel précis cherchait à saisir en germe des situations devant se réaliser, s’appelaient aussi fata ; ils étaient pratiquement la parole révélée de la divinité. Mais, pour bien comprendre ce que nous sommes en train d’étudier, il faut se souvenir du rapport que l’homme entretenait, dans la Rome antique et dans les civilisations traditionnelles en général, avec l’ordre global du monde. C’était un rapport très différent de celui qui devait s’instaurer plus tard. Pour l’homme antique, l’idée d’une loi universelle et d’un vouloir divin n’annulait pas la liberté humaine ; mais sa préoccupation constante était de mener sa vie et son action de sorte qu’elles fussent la continuation de l’ordre global et, pour ainsi dire, comme le prolongement ou le développement de cet ordre. A partir de la pietas, c’est-à-dire, pour un Romain, de la reconnaissance et de la vénération des forces divines, on se fixe comme tâche de pressentir la direction de ces forces divines dans l’histoire de façon à pouvoir y accorder opportunément l’action, à la rendre extrêmement efficace et chargée de sens. D’où le rôle très important que jouèrent dans le monde romain, jusque dans le domaine des affaires publiques et de l’art militaire, les oracles et les augures. Le Romain avait la ferme conviction que les pires mésaventures, et notamment les défaites militaires, dépendaient moins d’erreurs, de faiblesses ou de travers humains que du fait d’avoir négligé les augures, c’est-à-dire, pour en revenir à l’essentiel, d’avoir agi de façon désordonnée et arbitraire, en suivant de simples critères humains, en rompant les liens avec le monde supérieur (donc, pour un Romain, cela voulait dire avoir agi sans religio, sans « rattachement »), sans tenir compte des « directions d’efficacité » et du « moment juste » indispensa- bles à une action couronnée de succès. On remarque que la fortuna et la felicitas ne sont souvent, dans la Rome antique, que l’autre face du fatum, sa face proprement positive. L’homme, le chef ou le peuple qui emploient leur liberté pour agir en conformité avec les forces divines cachées dans les choses connaissent le succès, réussissent, triomphent – et cela signifiait, dans l’Anti- quité, être «fortuné » et être « heureux » (ce sens s’est conservé dans des locutions comme « une heureuse initiative » , une « heureuse manoeuvre », etc.). Un historien contemporain, Franz Altheim, a cru pouvoir déceler dans cette attitude la cause effective de la grandeur de Rome. Pour éclairer encore mieux les rapports qui unissent le « destin » à l’action humaine, on peut recourir à la technique moderne. II y a certaines lois régissant choses et phénomènes, qui peuvent être connues ou ignorées, dont on peut tenir compte ou ne pas tenir compte. Face à ces lois l’homme reste foncièrement libre. II peut même agir de façon contraire à ce que ces lois lui conseilleraient, avec pour résultat l’échec ou l’atteinte du but après un gaspillage d’énergie et d’innombrables difficultés. La technique moderne correspond à la possibilité opposée : on cherche à connaître le mieux possible les lois des choses pour pouvoir les exploiter, pour qu’elles montrent le point de moindre résistance et donc d’efficacité maximale quant à la réalisation d’un objectif donné. II en va de même sur un plan où il ne s’agit plus des lois de la matière, mais de forces spirituelles et « divines ». L’homme de l’Antiquité estimait essentiel de connaître ou, du moins, de pressentir ces forces, afin de pouvoir se faire une idée des conditions propices à une action donnée et, éventuellement, une idée de ce qu’il devrait faire ou ne pas faire. Défier le destin, s’élever contre le destin, n’avait pour lui rien de « prométhéen » , au sens romantique de ce terme exalté par les modernes ; c’était tout simplement une sottise. L’impiété (le contraire de la piété qui se rapporte donc à l’être privé de religio, sans « rattachement » et sans compréhension respectueuse de l’ordre cosmique) équivalait plus ou moins, pour l’homme de l’Antiquité, à la stupidité, à l’infantilisme, à la fatuité. La comparaison avec la technique moderne n’est défectueuse que sur un point : parce que les lois de la réalité historique ne se présentaient pas comme froidement « objectives », tout à fait détachées de l’homme et de ses buts. On pourrait répondre ainsi : passée une certaine limite, l’ordre divin objectif lié au « destin » cesse d’être déterminant et devient incertain (ce que dit aussi la fameuse formule astrologique : astra inclinant non determinant). Ici commence le monde humain et historique au sens pro- pre. En toute rigueur, ce monde devrait continuer le précédent, la volonté humaine devrait prolonger la volonté « divine ». Que cela advienne, ou non, dépend essentiellement de la liberté : il faut le vouloir. Dans le cas positif, ce qui était seulement en puissance devient, grâce à l’action humaine, réalité. Le monde humain se présentera alors comme une continuation de l’ordre divin et l’histoire même revêtira les contours d’une révélation et d’une « histoire sacrée » ; alors, l’homme ne vaut plus et n’agit plus pour lui-même mais recouvert d’une dignité divine, et l’ordre humain acquiert, d’une certaine façon, une dimension supérieure. On voit donc qu’il ne s’agit pas ici de « fatalisme » . De même qu’une action contre le « destin » est sotte et irrationnelle, de même une action harmonisée avec le « destin » est non seulement efficace, mais aussi transfigurante. Celui qui ne tient pas compte du fatum est presque toujours emporté passivement par les événements ; celui qui le connaît, l’assume et s’y conforme est par contre guidé vers un accomplissement supérieur, chargé d’un sens qui dépasse l’individu. Telle est la signification de la maxime selon laquelle les fata « nolentem trahunt, volentem ducunt ». Dans le monde romain antique et dans l’histoire romaine, on trouve un grand nombre d’épisodes, de situations et d’institutions où est justement mise en lumière l’impression de rencontres « fatidiques » entre le monde humain et le monde divin. Des forces supérieures sont à l’oeuvre dans l’histoire et se manifestent à travers les forces humaines. Pour nous contenter d’un seul exemple, rappelons que « le moment culminant du culte romain de Jupiter était constitué par un acte où le dieu affirme sa présence, chez un homme, en qualité de vainqueur, de triomphateur. Ce n’est pas que Jupiter soit la seule cause de la victoire, il est lui-même le vainqueur ; on ne célèbre pas le triomphe en son honneur, mais c’est lui le triomphateur. C’est pour cette raison que l’imperator revêt les insignes du dieu » (K. Kerényi, F. Altheim). Actualiser le divin – parfois prudemment, parfois audacieusement – dans l’action et dans l’existence fut un principe directeur que la Rome antique appliqua aussi à l’ordre politique. C’est pourquoi certains auteurs ont fait remarquer avec raison que Rome ignora, à la différence d’autres civilisations, le mythe au sens abstrait et anhistorique ; à Rome le mythe se fait histoire, et l’histoire, à son tour, prend un aspect « fatal », devient mythique. D’où une conséquence importante. Dans des cas comme celui évoqué, c’est une identité véritable qui se réalise. Il ne s’agit pas d’une parole divine qui peut être entendue ou non entendue. II s’agit d’un déploiement des forces supérieures. On est ici en présence d’une conception spéciale, objective, nous serions tenté de dire transcendantale, de la liberté. En m’opposant au fatum, je peux bien sûr revendiquer pour moi un libre-arbitre, mais celui-ci est stérile, est un simple « geste » qui ne saurait avoir beaucoup d’incidence sur la trame de la réalité. Par contre, quand je fais en sorte que ma volonté continue un ordre supérieur, soit seulement l’instrument par lequel cet ordre se réalise dans l’histoire, ce que je veux dans un tel état de coïncidence ou de syntonie peut se traduire éventuellement par une injonction adressée à des forces objectives qui, autrement, ne se seraient pas pliées facilement ou qui n’auraient pas eu d’égard pour ce que les hommes veulent et espèrent.

    On peut maintenant se poser la question suivante : comment en est-on arrivé à cette conception moderne qui fait du destin une puissance obscure et aveugle ? Comme tant d’autres, un tel glissement de sens n’a rien de fortuit. II reflète un changement de niveau intérieur et s’explique, essentiellement, par l’avènement de l’individualisme et de l’« humanisme » compris dans un sens général, c’est- à-dire en rapport avec une civilisation et une vision du monde uniquement fondées sur ce qui est humain et terrestre. II est évident que, cette scission s’étant produite, on ne pouvait plus saisir un ordre intelligible du monde, mais seulement un pouvoir obscur et étranger. Le « destin » devint alors le symbole de toutes les forces les plus profondes qui agissent et sur lesquelles l’homme, malgré sa maîtrise du monde physique, ne peut pas grand-chose parce qu’il ne les comprend plus, parce qu’il s’est détaché d’elles ; mais aussi d’autres forces que l’homme, par son attitude même, a libérées et rendues souveraines dans différents domaines de sa propre existence.

    C’est avec cette étude des deux conceptions, l’antique et la moderne, du fatum, que s’achève ce chapitre. Notre étude pourra déjà donner une idée de l’intérêt et de l’importance que présenterait une philologie éclairée. Nous le répétons : les mots ont une âme et une vie, si bien que, dans ce secteur également, se référer aux origines peut souvent ouvrir des perspectives insoupçonnées. Ce travail, d’ailleurs, serait encore plus fécond s’il ne se contentait pas de reculer jusqu’au latin en partant des langues « romanes », mais si le latin lui-même était rattaché au tronc commun des langues indo-européennes dont il n’est, dans ses éléments fondamentaux, qu’une simple branche.

    Julius Evola, Chapitre V de « L’arc et la massue » (PDF)

    http://la-dissidence.org/2013/07/26/julius-evola-laffaiblissement-des-mots/

  • Le site de Laissez-les-vivre fait peau neuve

    Pendant que le gouvernement fait tout un tapage contre les sites pro-vie, ces derniers se modernisent, sans aucune subvention publique.

    C'est par ici.

    S

    http://www.lesalonbeige.blogs.com/

  • Partants pour un nouveau Tour de France... pour tous ?

    Alors que le nouveau parcours de la Grande boucle vient d'être dévoilé, la Manif pour tous annonce sa 2e édition du "Tour de France pour tous".

    "De Yorkshire à la plus belle avenue du monde en passant par le Nord Pas de Calais, la Picardie, la Champagne Ardenne, la Lorraine, l’Alsace, la Franche Comté, la région Rhône Alpes, la PACA, le Languedoc Roussillon, le Midi Pyrénées et l’Aquitaine, c’est une foule de militants déterminés à refuser la marchandisation du corps de la femme et à défendre l’intérêt supérieur de l’enfant qui ne peut être privé délibérément d’un père ou d’une mère qui fera entendre sa voix. Le désormais célèbre « 600 », ce drapeau géant qui tire son nom de sa superficie (600 m2), sera lui aussi de retour sur les routes du Tour. Dès le 5 juillet 2014 et pendant 3 semaines, les drapeaux de la Manif Pour Tous flotteront au milieu des drapeaux français pour accueillir les coureurs, les banderoles fleuriront les champs de nos campagnes et les routes du Tour tandis que les sweats et tee shirts de la Manif Pour Tous seront à n’en pas douter la tenue tendance dans toutes les villes étapes et sur le village."

    Louise Tudy

    http://www.lesalonbeige.blogs.com/

  • « Les douze champs de bataille de la guerre contre le cosmopolitisme »

    Une réflexion stratégique d’Henry de Lesquen.
    L’idéologie dominante se manifeste sous différents aspects
    –  « le grand remplacement » (la substitution de population) ;
    – « le grand effacement » (la non transmission de l’histoire et de la mémoire identitaire) ;
    –  « le grand dérangement » (la rupture des traditions, la dénaturation du mariage). Ces différents aspects sont en cohérence les uns avec les autres, ce ne sont que des expressions particulières de l’idéologie cosmopolite imposée par la superclasse mondiale. Pour y faire face la lutte contre le cosmopolitisme doit s’inscrire dans une bataille d’ensemble, cohérente dans ses actions. Et unir dans un combat commun adversaires du « mariage gay », de l’immigration-islamisation et de la perte de souveraineté.
    Polémia.
    Ne pas aborder le champ de bataille en ordre dispersé
    Dans les différentes dénominations qui recouvrent le dogme cosmopolite, « idéologie dominante », « pensée unique », « politiquement correct », les attributs « dominant », « unique » sembleraient lui accorder un caractère uniforme. Or ce dogme, dans son expression, coiffe un ensemble d’aspects qui puisent à la même source. Il en résulte, pour le contrer, plusieurs « champs de bataille » qui, s’ils sont abordés en ordre dispersé, nuisent à la cause à défendre : celle de nations souveraines, respectueuses de leur histoire et de leurs traditions. Ainsi, ce fut une erreur pour les dirigeants du mouvement « La manif pour tous » d’associer à ses rassemblements, sous le prétexte d’une opposition commune au mariage homosexuel, des membres de l’UOIF dont l’objectif est une « islamisation » de la France.
    La lutte contre le cosmopolitisme doit s’inscrire dans une bataille d’ensemble, cohérente dans ses actions.
    Ce cosmopolitisme, manifestation de l’utopie égalitaire de la gauche constitue un basculement de celle-ci d’une vision « étatiste » à un idéal xénophile. Apparaît la notion de « citoyen du monde », or celle-ci recèle une totale contradiction puisque, par essence, il n’est possible d’être citoyen qu’à l’intérieur d’une frontière : « pas de frontières, pas de cité ». Il faut se référer, ici, à l’école Cynique, au temps de l’antiquité grecque, dont la figure emblématique fut Diogène qui incrimina non seulement les frontières matérielles de la cité mais qui prôna la disparition des frontières spirituelles que sont la morale et la tradition.
    Le cosmopolitisme contre les frontières matérielles
    Henry de Lesquen a distingué douze champs de bataille. Les quatre premiers nommés touchent aux frontières matérielles. Il s’agit de la « supranationalité », opposée à la souveraineté, de la théorie du réchauffement climatique, du libre-échange et de l’immigration.
    – La « supranationalité » trouve des origines juridiques dans la création en 1920 de la Cour internationale de justice internationale, dit Tribunal de La Haye, et de la signature en 1950 de la Convention européenne des droits de l’homme. Ces institutions comptent parmi les prémisses du projet cosmopolite d’instaurer un État mondial.
    – La praxis conduisant à celui-ci s’exprime, parmi d’autres axes, par l’affirmation, scientifiquement contestable, d’un réchauffement du climat de nature anthropique, allégation promue par le GIEC, organisme supranational, émanation de l’ONU. Le renversement de la tendance climatique observée ne pourrait sourdre que d’un engagement international qui sert la cause d’un gouvernement mondial. Au rebours de la théorie émise par les membres du GIEC, il faut d’ailleurs constater que les périodes de réchauffement du climat furent celles d’une prospérité.
    – Le libre-échange, dans sa volonté d’abolir toute entrave à la circulation des biens et des services, et l’immigration, postulant le libre déplacement des hommes par-delà les frontières, constituent les socles d’un monde politiquement unifié. La thèse « libre-échangiste » se heurte aux faits. En empêchant les États d’élever des protections douanières, l’étude montre que loin de favoriser la croissance économique, l’application de la doctrine a pour effet, pour nos États européens, de les précipiter, au moins, dans la stagnation économique avec toutes les conséquences qu’elle implique. S’agissant de l’immigration, si la population française est restée stable dans ses origines de 550 à 1850, s’y sont mêlés, à partir de cette date, d’abord des migrants venus d’autres pays d’Europe ayant le même creuset comme civilisation. Pour Jules Ferry, le principe était que ces habitants nouveaux devaient s’assimiler. Depuis 1950, l’immigration provient pour la plus large part, devenue maintenant pratiquement exclusive, de régions non européennes. Elle présente pour l’assimilation, autrefois considérée comme une nécessité, deux obstacles majeurs qui tiennent à la race et à la religion. Nos édiles y voient un cheminement vers la société du métissage, mixage obligatoire, dont Nicolas Sarkozy se fit le chantre lors de son discours à l’école Polytechnique, le 17 décembre 2008.
    Le cosmopolitisme subvertit la pensée
    Agissant sur la formation de la pensée, d’autres domaines d’action de l’idéologie cosmopolite constituent autant d’espaces où elle doit être contrebattue. Henry de Lesquen distingue ainsi l’antiracisme, la religion de la shoah, la défiguration de l’histoire, l’art contemporain, la famille, l’État de droit, la justice pénale et la défense de la langue française.
    « L’antiracisme » est le faux-nez principal du cosmopolitisme qui postule la non-existence des races, assertion contraire à la simple observation. Cette négation de la réalité relève d’un refus de l’identité des nations. À cet égard, il faut rappeler le propos de De Gaulle à Alain Peyrefitte :
    « C’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns.
    Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a une vocation universelle. Mais à condition qu’ils restent une petite minorité. Sinon, la France ne serait plus la France. Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne ».
    Au-delà même de la notion de race, il apparaît que « l’antiracisme » est un refus de la discrimination. Hors discriminer c’est choisir, la loi Pleven du 1er juillet 1972, par ses conséquences, porte ainsi atteinte aux libertés fondamentales.
    La pensée cosmopolite use aussi de l’histoire en la défigurant par la mise en exergue des revers subis ou la transformation des faits. Présenter une période sous l’angle de la défaite bien que le dénouement fut inverse est une posture qui remonte même au XIXe siècle. La lecture des manuels de Malet et Isaac montre la place privilégiée accordée dans le récit de la guerre Cent ans aux défaites de Crécy, de Poitiers et d’Azincourt au détriment de l’issue victorieuse, pour la France, du conflit, notamment, par les batailles de Formigny et de Castillon. L’esclavage paraît être le seul fait des Européens alors que la traite atlantique s’alimenta auprès d’empires négriers d’Afrique de l’ouest, qu’il y eut une traite musulmane et que ces européens eux-mêmes furent victimes de la traite organisée par les barbaresques.
    S’il faut souligner deux domaines où l’idéologie dominante exerce son influence délétère, « l’art contemporain » pour lequel Tom Wolfe livre une analyse intéressante de ce « non art » dans son roman « Bloody Miami » et la famille dont l’institution se délite depuis quelques décennies (suppression par la loi du 4 juin 1970 de la notion de chef de famille ; multiplication des naissances hors mariage : 1% avant 1789 jusqu’à 5% au début des années soixante-dix, 50% de nos jours), il en est un autre qui suscite peut-être moins d’attention mais qui est fondamental dans ses effets : l’État de droit.
    Par nature un État, quel qu’il soit, est créé du droit. Tout État est donc un État de droit. Toutefois, la notion a pris un sens propre, décalque d’une vision de juristes allemands, le Reichstett, lui-même inspiré du  Rule of law  britannique. Le juge se fondant sur le principe d’un État de droit va opposer à l’État et au gouvernement ses procédures internes. Par exemple, si la loi punit d’un an d’emprisonnement la présence illégale sur le territoire national, le juge s’estime fondé à contester l’interpellation au motif d’un contrôle irrégulier.
    La société marchande implique l’État de droit et réduit ainsi la fonction souveraine à son aspect purement juridique.
    Inspirée par Marc Ancel qui nie la valeur de la responsabilité, l’évolution de la justice pénale privilégie la rééducation du criminel, le considérant à la limite comme un malade qu’il faudrait soigner. Mais l’homme est responsable de ses actes ce qui peut conduire à l’application de la peine de mort à laquelle s’oppose le cosmopolitisme.
    Enfin cette idéologie construit son expression sur une langue, l’anglais, qu’elle voudrait universelle au détriment des autres langues reléguées à un rôle purement local.
    Conclusion
    En conclusion, Henry de Lesquen se réfère au livre de Thierry Bouclier La République amnésique  qui montre comment l’ordre politique dominant est maintenant fondé sur la diabolisation de l’adversaire. Il procède à des confusions et à des amalgames afin de déconsidérer l’opposant. Il fait accroire que l’extrême droite inclue le national-socialisme alors que le nazisme dans ses termes comme dans ses inclinations ne répond aucunement à un entendement de droite. Il existe, certes, des personnes et des idées excessives à l’extrême-droite mais l’attitude vis-à-vis de cette dernière doit être parallèle à celle de la gauche par rapport à son extrême gauche.
    Face au cosmopolitisme, il ne faut pas mener de combats séparés sans penser à leurs sources communes.
     Michel Leblay, Club de l’Horloge, 22/10/2013
    http://www.polemia.com/les-douze-champs-de-bataille-de-la-guerre-contre-le-cosmopolitisme/
    Ce texte a été établi par Michel Leblay. Il présente une synthèse du « carrefour doctrinal » du Club de l’Horloge tenu par son président Henry de Lesquen, le 17 octobre 2103 sur le thème « Les douze champs de bataille de la guerre contre le cosmopolitisme ». Cette conférence constitue un préambule à la 29e  université annuelle du Club qui se déroulera samedi 23 et dimanche 24 novembre 2013.
    Voir aussi :
    http://www.polemia.com/lideologie-de-la-superclasse-mondiale/
    http://www.polemia.com/dissidents-de-toute-tendance-unissez-vous/

  • « Insécurité culturelle » : « Seul le FN assume l’importance de la question identitaire »

    L’époque est aux révisions déchirantes et à l’abandon des certitudes et des catéchismes assenés jusqu’alors avec aplomb aux Français comme aux autres peuples européens. Frits Bolkestein, ancien commissaire européen et ancien président du parti libéral néerlandais VVD, membre du très mondialiste club Bildelberg, était jusqu’alors surtout connu pour la directive de dumping social, de libéralisation des services portant son nom. Elle actait la destruction des droits sociaux nationaux, en ce quelle prévoyait de permettre aux entreprises européennes d’appliquer les réglementations de leur pays d’origine plutôt que celles des pays où elles sont installées. On se souvient de la fameuse polémique dite « du plombier polonais » qui agita alors nos médias. Dans le journal néerlandais De Volkskrant du 2 octobre 2013, M. Bolkestein estime aujourd’hui que « L’union monétaire est un échec ».

    «L’euro s’est révélé un somnifère qui a incité les pays déficitaires à rêver à un dolce farniente au lieu de se soucier de leur propre compétitivité » affirme Frits Bolkestein. Le résultat est une union de transfert, qui menace de s’instaurer de façon permanente. L’union monétaire était censée favoriser l’amitié entre les peuples. Au lieu de cela, la chancelière allemande, Angela Merkel, est comparée à Hitler dans les pays déficitaires. Les Pays-Bas sont pris au piège et ne savent plus comment s’en dégager. »

    Une analyse que peut aujourd’hui méditer la Croatie, pays qui depuis son entrée dans l’UE, le 1er juillet dernier, a vu une chute de ses exportations de 11% par rapport à la même période de l’année précédente, selon les premières estimations de son gouvernement.

    La baisse a été de 19% pour le seul mois d’août. La raison en étant l’exposition accrue de la la Croatie à la concurrence internationale et à la perte des privilèges qui découlaient de l’appartenance à l’Accord de libre-échange d’Europe centrale (ALECE).

    Au moment ou François Hollande vient de lever le veto de la France au processus de négociations sur l’entrée de la Turquie au sein de l’Union européenne, veto que Sarkozy avait décrété sous la pression du Front National, Jean-François Copé pour les mêmes raisons, agite le retour au droit du sol.

    En fait uniquement pour les enfants de clandestins, ce qui ne résoudrait pas le problème de fond…et sous une avalanche de critiques dans son propre camp. A l’instar du député Jérôme Chartier (voir notre article paru hier ) mais aussi de l’ex-conseiller de Nicolas Sarkozy, Henri Guaino qui estime comme le PS que « le droit du sol est le fondement d’une société ouverte»…

    Société ouverte que célèbre opportunément Le Parisien ce jeudi en consacrant sa une et un article de fond à « ce que la France doit aux étrangers ».

    N’en déplaise aux idéologues plus ou moins bien intentionnés et faisant acte de propagande, la France s’est longtemps signalée par la stabilité de sa population. Entre la fin de la Grande migration des peuples (« Völkerwanderung ») au Véme siècle et l’arrivée sur notre sol de tribus germaniques, jusqu’à la fin du XIX éme siècle et la première partie du XXème avec l’installation et l’assimilation réussie en deux générations de nos cousins européens italiens, espagnols , portugais, polonais, la France est restée fidèle à la définition qu’en donnait le général De Gaulle.

    Alain Peyrefitte, rapportait, les propos de ce dernier : « C’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns. Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a une vocation universelle. Mais à condition qu’ils restent une petite minorité. Sinon, la France ne serait plus la France. Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne. »

    Cet apport de gens venus d’autres continents ne saurait être en soi un problème si ledit apport est en effet quantitativement mesuré et ne bouleverse pas de fond en comble les références culturelles, les valeurs de notre civilisation française et européenne.

    Aujourd’hui le site Atlantico se penche sur « les angoisses françaises », « sur une phrase qui résonne régulièrement dans notre pays : On ne se sent plus chez nous. Mais le racisme dont est taxé quasi automatiquement quiconque oserait aborder l’insécurité culturelle et l’immigration empêche de faire la part des choses. »

    Pour se faire la parole est donnée à Guillaume Bernard, maître de conférences (HDR) à l’ICES (Institut Catholique d’Etudes Supérieures) et à Aymeric Patricot, diplômé d’HEC et de l’EHESS, agrégé de lettres. Leur analyse, même si nous n’en partageons pas toutes les facettes, n’en est pas moins intéressante et mérite d’être lu dans sa totalité sur Atlantico.

    Guillaume Bernard prend acte de ce que « Certains territoires de la République ont démographiquement basculé avec le changement de nature de l’immigration entre la fin des années 1970 et le début des années 1980 : de travail, elle est devenue familiale. L’INED a pu établir qu’entre 1968 et 2005, les jeunes d’origine étrangère étaient passés, par exemple, de 19 à 57 % en Seine-Saint-Denis, de 22 à 76 % à Clichy-sous-Bois ou de 20 à 66 % à Sarcelles. »

    « Ce changement radical d’environnement social a créé, pour les autochtones, une insécurité culturelle qui les a poussé, pour ceux qui en avaient les moyens, à quitter ces quartiers et, pour d’autres, à mettre en place des stratégies d’évitement (par exemple pour l’inscription de leurs enfants dans les établissements scolaires). Il est raisonnable de penser que des Français vivant dans des lieux qui ne sont pas encore concernés par ce bouleversement démographique et culturel le craigne. »

    Aymeric Patricot indique que « ces mouvements de population bousculent le quotidien des populations concernées, qu’elles se déplacent ou qu’elles observent les mouvements (…) La plupart des journalistes le reconnaissent aujourd’hui : la société multiculturelle, multiethnique peut certes représenter un idéal, il n’en faut pas moins admettre qu’elle suscite des tensions. »

    Guillaume Bernard souligne qu’ « Alors même qu’ils incarnent l’identité de référence, celle du lieu, nombre de Français se considère acculés à une sorte de résistance. Pour résumer, l’immigration est vécue comme une invasion, la mondialisation comme un déracinement. Il ne s’agit donc pas d’un rejet de l’autre en tant qu’il est différent, mais le refus de la dépossession de ses racines et du fractionnement culturel du territoire. »

    Il relève encore que pour les tenants de la pensée unique immigrationniste et multiculturaliste, « envisager qu’une immigration trop importante (ou culturellement trop éloignée du pays d’accueil) puisse être facteur de désagrégation sociale est (…) automatiquement analysé comme du racisme (…) . Dire qu’une personne n’est pas assimilée au corps social ne pourrait donc être que la manifestation d’un rejet raciste et en aucun cas la constatation d’une inadéquation culturelle (…) ».

    « Les Français enracinés (qu’ils soient de souche ou non) poursuit-il, ne sont plus considérés par les pouvoirs publics et nombre d’immigrés (ayant ou non la nationalité française) comme les référents culturels. Auparavant, les étrangers s’adaptaient sinon spontanément aux coutumes du pays d’accueil du moins étaient invités à le faire ; désormais, c’est aux hôtes porteurs de la tradition culturelle autochtone de modifier leurs habitudes pour permettre aux personnes accueillies de maintenir leurs traditions exogènes. »

    Et Guillaume Bernard de conclure qu’ « En fait, seul le FN semble, aujourd’hui, assumer l’importance de la question identitaire. Il est certain que cela va être difficile pour les partis traditionnels de se (ré)approprier ce thème car ils risquent soit d’être accusés de participer à la « lepénisation » des esprits, soit de ne pas apparaître crédibles (et ne cherchant qu’à récupérer les électeurs). Pour ce qui regarde plus particulièrement la droite modérée, il est certain qu’elle ne peut que s’en prendre à elle-même d’avoir déserté ce terrain. L’UMP relira-t-elle le programme de la plate-forme RPR-UDF pour les législatives de 1986 ? Et ses dirigeants et élus sont-ils prêts à l’assumer et à l’appliquer ? »

    Les Français qui se tournent chaque jour plus nombreux vers le FN auront l’occasion de répondre à cette question dés l’année prochaine dans les urnes.

    Alors oui, affirme Bruno Gollnisch, l’immigration-invasion est un péril mortel pour notre pays. «Il y a bien un peuple français qui est principalement -pas exclusivement- une synthèse des civilisations celtique, latine et germanique » dans une France qui «n’est pas née en 1789, n’est pas réductible aux valeurs républicaines dévoyées dans un cosmopolitisme outrancier, à l’idéologie des droits de l’homme. La France c’est une réalité charnelle et spirituelle. Et cette réalité là, le FN est le seul grand mouvement politique à la défendre et à l’assumer.

    http://www.gollnisch.com/2013/10/24/insecurite-culturelle-seul-fn-assume-limportance-question-identitaire/

  • La souveraineté et le Politique

    « Est souverain celui qui décide de la situation exceptionnelle. Seule cette définition peut satisfaire à la notion de souveraineté en tant que notion limite. […] Par situation exceptionnelle, il faut entendre ici une notion générale de la théorie de l’’État, et non quelque urgence proclamée ou quelque état de siège. […] Tout ordre (Ordnung) repose sur une décision […] Même l’’ordre juridique repose, à l’’instar de tout ordre, sur une décision et non sur une norme. »
    Carl SCHMITT
    Théologie politique (1922 et 1969) Gallimard, Paris, 1988 « Le concept d’’État présuppose le concept de politique. »
    Carl SCHMITT
    La notion de politique (1932),Flammarion, Paris, 1992
    Théologie politique est resté célèbre pour la première phrase de l’œ’œuvre, reproduite dans l’’extrait ci-dessus. Par cette sorte d’’axiome, le juriste et politologue allemand, Carl Schmitt (1888-1985) donnait à voir ce que Julien Freund, dans un ouvrage non moins fameux, avait analysé comme « l’’essence du politique ».
    Le rapprochement intellectuel de Schmitt avec le fondateur de l’’Action française, Charles Maurras, s’’il a été brillamment mais succinctement esquissé par Pierre Lafarge dans un numéro de la revue Les Epées, n’’en demeure pas moins, aujourd’’hui, relativement risqué. Même si les deux hommes ne se sont jamais rencontrés, Schmitt fréquentait néanmoins Maurras par sa lecture de l’’Action française. Une étude de l’’influence que le premier aurait reçue du second, impossible à livrer dans le format de cette chronique, mériterait assurément d’’être menée.
    Il est incontestable que Schmitt et Maurras ont, chacun de leur côté, avec les références culturelles et historiques qui étaient les leurs, développé une critique semblable de la démocratie libérale et du parlementarisme. On ne retiendra, ici, que les définitions de la souveraineté et du Politique, notions essentielles de la doctrine schmitienne et qui, quoi qu’’on en dise, ont profondément renouvelé la science politique du XXè siècle.
    Dernière instance
    Dans sa Théorie de la constitution (1928), Carl Schmitt précisait, à propos de l’’État (donc du souverain, l’’État n’étant qu’’une forme d’’organisation de la société politique) que « ce qui fait son essence, c’’est le fait qu’’il prend la décision politique ». Ce faisant, on a pu dire que Schmitt, à la suite de Thomas Hobbes (« voluntas non veritas facit legem » : c’’est la volonté du souverain et non la vérité de ses édits qui fait la loi), avait théorisé le décisionnisme politique.
    C’’est toute « l’’irréductibilité du politique » qui était ainsi posée. Mais la genèse du décisionnisme schmitien est également à rechercher chez Jean Bodin, l’’auteur des Six livres de la République, que nous avons eu l’’occasion de présenter dans ces colonnes. Réitérant avec le jurisconsulte français la question de savoir « jusqu’’à quel point le souverain est-il tenu par les lois ? », Schmitt considère avec Bodin que le souverain doit s’’affranchir des lois, non pas arbitrairement, mais parce que cela est commandé par une impérieuse nécessité. Passant au-dessus des lois convenues en période normale, le souverain se voit contraint d’’appliquer la seule et unique loi : « l’’autoconservation » de l’’État, c’’est-à-dire, de l’’ordre politique. Rien de vraiment nouveau sous le soleil, si l’on garde en mémoire ce vieil adage du droit romain : « salus populi suprema lex esto » (le salut du peuple est dans la loi suprême). On pourrait dire aussi que « nécessité fait loi ».
    Pour Schmitt, « le cas d’’exception révèle avec la plus grande clarté l’’essence de l’’autorité de l’’État. C’’est là que la décision se sépare de la norme juridique et (pour le formuler paradoxalement) là l’’autorité démontre que, pour créer le droit, il n’’est nul besoin d’’être dans son bon droit ».
    Pour illustrer ces propos, imaginons un instant que pour un motif quelconque, le président de la République française soit obligé de recourir à l’’article 16 de notre Constitution et, en application d’icelui, de rétablir les frontières de notre pays, notamment parce « l’’intégrité de son territoire » est menacée. Il violerait immanquablement les traités constitutifs de l’’Union européenne. Aux termes de l’’article 297 du traité de Rome, les États membres doivent obligatoirement se consulter ( !) « en vue de prendre en commun les dispositions nécessaires pour éviter que le fonctionnement du marché commun ne soit affecté par les mesures qu’’un État membre peut être appelé à prendre en cas de troubles intérieurs graves affectant l’’ordre public ». Toutefois, « ces mesures ne doivent pas altérer les conditions de la concurrence dans le marché commun » (!) (article 296) Question laissée à la sagacité du lecteur : l’’État français est-il encore souverain et le serait-il a fortiori en situation exceptionnelle ?
    Souveraineté
    À l’’inverse mais en complémentarité des juristes positivistes (à l’’instar de l’autrichien Hans Kelsen) Schmitt affirme la soumission du Droit au Politique. Comment ne pas reconnaître le « politique d’’abord » de Charles Maurras ? Par extension, l’’on doit considérer que tout est soumis au Politique, donc au souverain. Mais Schmitt va plus loin. Il n’’y aurait, en effet, qu’’un intérêt purement théorique à présupposer le Politique, sans déterminer au fond se qui fait son essence. Affirmer la primauté du Politique, ce n’’est rien moins que le définir, donc se définir soi-même par rapport aux autres.
    Schmitt met ainsi en lumière une dimension du Politique fort peu connue jusqu’alors : l’’altérité. La situation d’’exception décrite plus haut devient alors le moteur de cette altérité puisque’’il s’’agira pour le souverain de désigner l’’agresseur extérieur ou intérieur (l’’ennemi, chez Schmitt) tout en se déterminant par rapport à l’’allié (l’’ami selon Schmitt). L’’ennemi est celui qui veut annihiler l’’ordre politique. Est donc souverain celui qui est capable de décider politiquement en vue de mettre fin à la tentative de renversement ou, à tout le moins, de bouleversement de l’’ordre politique.
    Partant, Schmitt craignait, à juste titre, que le libéralisme conduise à l’’homogénéité des sociétés politiques. L’exemple archétypique de la construction européenne témoigne de la prescience de Schmitt. Il est patent, en effet, que l’’Union européenne, par son uniformité institutionnalisée, a sonné le glas du Politique, les États membres étant soumis à la volonté univoque des organes supranationaux. Le système onusien tend, de semblable façon, à gommer toute volonté d’’exclusion.
    D’’une manière générale, on peut observer que le Droit, la Morale ou l’’Économie supplantent insidieusement mais nettement le Politique, sous prétexte d’’obsolescence du conflit politique. Le désenchantement de nos concitoyens pour la chose publique est une manifestation de cette asepsie idéologique. Mais, comme le soulignait Julien Freund, le Politique est un fait humain et naturel qui ne pourra jamais disparaître.
    Aristide Leucate L’’Action Française 2000 du 7 au 20 décembre 2006

  • [Marseille] Cercle : Le lexique maurrassien

    A Marseille, le cercle d’Estienne d’Orves vient de démarrer ses activités. Ce cercle d’études permet de donner aux jeunes adhérents et sympathisants de l’Action Française-Provence une formation aux idées maurrassiennes.

    Samedi 18 octobre, Michel Franceschetti, assisté de Jacques Saint-Pierre, a axé la première réunion sur le thème du "LEXIQUE MAURRASSIEN".

    L’AF emploie parfois un vocabulaire qui peut paraître obscur pour les non-initiés et dont le sens est souvent transformé par nos adversaires. Pour avoir une pensée politique claire, il faut être clair sur les définitions de base. Maurras avait bien compris ces risques quand il déclarait en janvier 1945 :

    "Rendez-moi ma personnalité. Ne vous amusez pas à fabriquer un mannequin que vous appelez Charles Maurras. J’ai, moi, ma vie, mes livres, ma doctrine, mes idées, mes disciples".

    Dans ce cercle, furent donc présentées et expliquées les expressions :

    - nationalisme intégral

    - tout ce qui est national est nôtre

    - compromis nationaliste

    - divine surprise

    - coup de force

    - par tous les moyens

    - politique d’abord

    - pays légal, pays réel

    - tout désespoir en politique est une sottise absolue

    Pour chaque définition, l’exposé était suivi d’une discussion avec les participants. L’application de la théorie à l’actualité récente fut chaque fois précisée.

    Et encore une fois, les jeunes royalistes n’oublient pas qu’il n’y a pas d’action sans doctrine et pas de doctrine sans action.

    Action francaise Provence