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  • La cinquième colonne

    Terminologie issue de la guerre d’Espagne, la cinquième colonne désigne par exemple toute force œuvrant dans son propre pays pour un pays hostile. Le principe de cinquième colonne, permet de semer la guerre psychologique dans les rangs de l’adversaire et sert d’appui intérieur.

    Les guerre modernes, qui reposent toujours sur des considérations terre à terre (contrôle des ressources ou d’un territoire stratégique par exemple) sont très souvent idéologisées pour s’assurer l’appui des masses. Ainsi les conflits sont un mélange d’intérêts et d’idéaux. Le patriotisme est typique de cette exaltation idéologique qui sert in fine les intérêts des oligarchies prédatrices comme nous l’a démontré le nombre important d’engagés volontaires en 1914-1918… Les défilés et autres commémorations ont pour objectif de donner un caractère rationnel au sacrifice irrationnel de milliers d’hommes. Sitôt les traités de paix signés, les oligarchies font des affaires et les peuples continuent de payer l’addition. Le front de l’est, plus grand front militaire de l’histoire, et ses millions de victimes, aura par exemple été tout autant l’occasion d’une confrontation sanglante entre les intérêts allemands et les intérêts russes, que la confrontation de deux visions du monde. Le nazisme et le bolchevisme servant à justifier les engagements des uns et des autres. Ceux qui déclarent et engagent les guerres n’étant pas toujours motivés par les mêmes raisons que ceux qui combattent.

    Les guerres civiles récentes démontrent une chose: les oligarchies agitent systématiquement les ressentiments identitaires, qu'ils soient ethniques, culturels ou religieux, jamais les antagonismes de classe. Non seulement cela bat en brèche l'analyse marxiste classique, puisqu’il n’y a pas de conscience de classe mais cela doit nous rentre très vigilant face à toute tentative de détourner tout combat identitaire ou nationaliste de ses objectifs : la souveraineté, la justice ou la liberté.

    En effet, comment défendre son identité et sa souveraineté, sans devenir la 5e colonne dont se servent les oligarchies?

    Le scénario ukrainien suscite un certain nombre d’inquiétudes à ce titre, la propagande russe fait des nationalistes souverainistes ukrainiens des agents occidentaux et la propagande occidentale fait des séparatistes des agents pro-russes. Dans les deux cas, les foules combattent pour une certaine conception de leur souveraineté et de leur identité, là où les oligarchies qui font la propagande s’opposent sur des questions comme le contrôle des ressources ou le contrôle de territoires stratégiques, pour rappeler ce que j’ai écrit plus haut. L’émotion suscitée par les massacres de civils sont un carburant idéal pour mystifier les masses et justifier une montée aux extrêmes qui débouchera de toute façon sur la paix soit par écrasement complet de l’ennemi, soit par un partage ou par la renégociation de certains accords. Nous avions aussi évoqué précédemment le fait que la guerre en Syrie n’est au fond qu’une guerre du gaz dans laquelle les qataris comme les russes ont des intérêts et que toute diatribe anti-impérialiste comme droitdelhommiste ou djihadiste n’est là que pour mobiliser des partisans autour de deux factions qui cherchent à contrôler des ressources.

    En France nous devons être vigilants à ces questions. Bien que notre pays ne soit pas un territoire clef pour les matières premières, les routes commerciales ou l’eau, il pourrait vivre des tensions politiques de diverses natures en raison de sa situation socio-économique, de sa crise identitaire, de son rejet de plus en plus marqué de l’Union européenne, pour ne donner que quelques exemples. Il serait alors assez simple pour des factions opposées d’agiter les ressentiments identitaires, qu'ils soient ethniques, culturels ou religieux. Nous pourrions ainsi assister à un scénario où les salafistes auraient pour mission de favoriser l’embrasement de certains territoires et de pousser la population vers une force résolument hostile à l’islam. Cette force aurait préalablement donnée un certain nombre de garanties au camp libéral, sioniste et sécuritaire et recueillerait les fruits d'un long travail idéologique de séduction des masses. Cette force pourrait même s’affirmer pendant ses événements, écartant toute autre faction refusant de rentrer dans ce type d’engrenage. En effet, toute faction qui aurait un projet politique visant à empêcher l’oligarchie de gouverner par le chaos serait alors impitoyablement combattue. Peut-être faut-il comprendre ici l’hostilité du système envers toute structure ou personnalité qui vise à désamorcer l’hostilité des populations arabo-musulmanes envers les français de souche européenne. On notera aussi la schizophrénie apparente de l’Etat français, appelant à la lutte totale contre Al-assad en Syrie mais emprisonnant préventivement de présumés djihadistes sans que cela soulève le moindre questionnement. Cette volonté de créer une cassure entre l’Europe et le monde musulman, alimentée initialement par les Etats-Unis, n’est-elle pas aussi une volonté d’empêcher toute coopération euro-maghrébine dans la lutte contre l’immigration sub-saharienne à l'heure où le Maroc et l'Algérie commencent à sentir les effets de la submersion démographique?
    Cependant, ce type de manipulation est tout autant possible au nom de « l’anti-impérialisme » comme les communistes français en ont été l’exemple, eux qui furent la cinquième colonne de l’URSS pendant un demi siècle… pour empêcher par exemple la constitution d’un projet alter-européen.

    A ce titre, tout combat doit toujours être mené en opposition au système, à l’Etat, aux pouvoirs publics, aux médias, aux organismes financiers et non contre des populations ou des communautés. Ce qui n’empêche pas un discours clair sur le refus du grand remplacement par exemple et la définition d‘une doctrine. Chaque prise de position doit être analysée à l’aune de ce critère : vais-je servir potentiellement de cinquième colonne?

    Malheureusement, ce sont souvent les événements et leur brutalité qui poussent les populations à choisir leur camp, rendant toute solution politique ou toute position neutre ou de troisième voie difficile à tenir, au moins à court terme. C’est donc par un travail d’information, de formation et de sensibilisation que nous parviendrons à empêcher l’édification d’une cinquième colonne dans nos rangs.

    Jean/C.N.C

    http://cerclenonconforme.hautetfort.com/archive/2014/05/11/la-cinquieme-colonne-5366788.html

  • Bouygues Telecom pourrait supprimer près d’un quart de ses effectifs

    Un Comité Central d’Entreprise est convoqué jeudi 15 mai. Le projet de suppression de 1.500 à 2.000 postes, révélé par « Le Figaro », pourrait être présenté.
    C’est la douche froide chez Bouygues Telecom. L’opérateur se prépare à supprimer entre 1.500 et 2.000 postes, ce qui représente près d’un quart des effectifs - l’entreprise emploie aujourd’hui 9.000 salariés. L’information, révélée ce matin par « Le Figaro », nous a aussi été confirmée. Selon une source proche de l’opérateur, un Comité Central d’Entreprise (CCE) a même été convoqué jeudi 15 mai, date de la publication des résultats du premier trimestre. Le plan de suppression de postes pourrait être présenté plus en détail lors de cette réunion.

     

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    Cette vague de licenciements vient un peu plus d’un mois après l’échec de Bouygues Telecom dans sa tentative de rachat de SFR, finalement cédé à Numericable par Vivendi pour 13,5 milliards d’euros en cash et un solde de 20 % du capital. En difficulté depuis 2012 et l’arrivée de Free dans le mobile, la filiale du groupe de BTP espérait trouver, en cas de mariage avec SFR, les ressources suffisantes pour résister sur un marché alors réduit à trois opérateurs. En deux ans, Bouygues Telecom a en effet perdu 200.000 clients et a vu son revenu par abonné chuter, alors que 18% de ses clients ont opté pour sa marque low-cost B & You.

    Des difficultés dans la branche Entreprises
    Pour se relancer, Bouygues Telecom a misé sur son réseau 4G, mais en dépit du succès technologique _ Bouygues Telecom dispose du premier réseau 4G de France, même si Orange a largement comblé son retard _ le succès commercial se fait toujours un peu attendre. « Nous avons le plus grand réseau 4G, mais le chiffre d’affaires le plus faible des trois opérateurs historiques. Cherchez l’erreur ! », s’emporte Azzam Ahdab, représentant CFDT chez Bouygues Telecom, cité par Le Figaro.

    Chateau

    A la peine dans le mobile, le troisième opérateur national le serait aussi dans l’activité Entreprises. Selon nos informations, la publication des résultats du premier trimestre, jeudi, devrait à nouveau l’illustrer.
    Selon Le Figaro, le groupe travaillerait enfin à réduire les coûts de fonctionnement et notamment par le biais d’une simplification de sa grille d’offres qui compte actuellement six forfaits, qui se déclinent chacun en offre avec ou sans engagement, auxquels s’ajoutent les quatre tarifs de B & You dans le mobile, les offres pour la box et remises aux clients les plus fidèles.

    Afp via les Echos :: lien

    http://www.voxnr.com/cc/politique/EFAAlAkkAypzZZJWXZ.shtml

  • Ukraine, acte II du démembrement ?

    Le présent de l’Ukraine commence à ressembler à la fin de l’Union soviétique. Les périphéries s’éloignent, le pays se déchire, le centre se crispe. L’Ukraine a certainement laissé passer le moment où jouer la carte du fédéralisme aurait suffi à garantir ses frontières actuelles.

    Près de 90 % des votants au référendum de la région de Donetsk, et 96 % pour la région de Lougansk ont opté pour l’indépendance. Sept millions d’« Ukrainiens » étaient concernés. Mais il faut prendre en compte un autre critère : la participation. Or, les anti-sécessionnistes, c’est-à-dire les partisans de l’unité de l’Ukraine, récusaient ce référendum et appelaient à l’abstention. Selon les « rebelles », comme dit le gouvernement de Kiev, en d’autres termes selon les pro-Russes, la participation a été de 75 %, non sans fraudes massives, comme toujours, aussi bien en Ukraine qu’en Russie, et ce, depuis des décennies. Dans le Donbass, ce qu’on a vu, ce n’est pas la quasi-unanimité de la population, comme en Crimée, basculant du côté russe. Mais la tendance est incontestable : la majorité de la population de ces régions est pro-Russe. Son cœur, mais aussi ses intérêts économiques, notamment ceux des ouvriers, la poussent vers la Russie.

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  • La petite histoire du site Fdesouche

    A l'occasion du 9e anniversaire de ce site emblématique, Pierre Sautarel raconte l'histoire et les déboires de ce blog, qui s'est fixé pour mission

    "de devenir l’Observatoire de la Balkanisation de la France, l’objectif étant de provoquer la sidération des internautes par l’accumulation de preuves, afin qu’ils prennent conscience de la poudrière qu’est la société plurielle."

    Michel Janva

  • Je deviens SDF, mais je n’abandonnerai pas mon métier !

    Je constate qu’entre chrétiens, il n’y a pas beaucoup de solidarité. C’est le contraire chez les musulmans qui, eux, s’entraident.   

    Interview de Marie-Neige Sardin

    Votre librairie-papeterie va fermer ce soir. Pouvez-vous nous expliquer les raisons de cette fermeture ?

    Pour une seule raison : la multiplication de mon loyer par trois, qui a été validée par un tribunal qui a rendu cette décision exécutoire. Je me trouve, en outre, face à un huissier qui n’entend pas m’accorder de délai et à un maire qui refuse de préempter.

    Pourquoi cette décision de multiplier par trois votre loyer ?

    J’étais soumise à un bail vieux de 36 ans. La loi veut que l’on autorise le déplafonnement des loyers. La commission des baux du 93, qui ne fait que ce genre de calcul toute la journée, a estimé que mon nouveau loyer devait passer de 500 € à 700 €, ce qui était le « tarif syndical » pour le département. Mais mon propriétaire a décidé de le passer à 1.400 €.

    Avez-vous pu faire un recours administratif ?

    J’ai bien sûr fait appel de cette décision, mais comme le jugement est exécutoire, cela ne change rien. En outre, la révision du loyer a un caractère rétroactif, ce qui implique pour moi de régler un arriéré de loyer pour un montant de 34.000 €.

    Comment expliquez-vous cette augmentation si importante alors que la commission des baux la calcule autrement ?

    En réalité, on ne me compare pas à d’autres librairies-papeteries, puisque je suis la dernière sur Le Bourget, mais à des boucheries ou à des grandes surfaces. Bref, ils comparent ce qui est incomparable.

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  • Une situation politique comparable à 1958 ?

    Maxime Tandonnet, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, compare notre situation avec celle de 1958 :

    "Le début de l'année 1958 marque en effet le paroxysme d'une impuissance publique qui n'a jamais cessé de s'aggraver depuis la Libération. Depuis 1954, tous les gouvernements ont échoué face à la guerre d'Algérie qui fait rage et emporte la classe dirigeante. Les enjeux sont évidemment d'une ampleur et d'une nature différentes, mais comment éviter le rapprochement avec la classe dirigeante d'aujourd'hui qui, d'une majorité à l'autre, depuis plusieurs décennies, ne parvient pas à régler les questions fondamentales de l'époque, en particulier le chômage, le déclin économique, la montée des violences?

    Une grave crise de la représentation politique frappe la France de 1958 comme la France de 2014. A la fin de la IVème République, les partis politiques sont déchirés, les majorités introuvables, les gouvernements se succèdent dans un climat d'instabilité avec trois présidents du Conseil en un an. Les dirigeants donnent le sentiment de ne plus contrôler l'appareil d'Etat, l'administration, la police qui manifeste à Paris.Le discrédit de la classe politique est général, et se traduit par l'existence de puissants courants «anti-système», le parti communiste et le mouvement «poujadiste», tous deux rejetant à leur manière la mondialisation, la construction européenne et l'ouverture des frontières économiques.Comment ne pas faire le lien avec la situation de la France aujourd'hui: l'impopularité de la classe politique (11% des Français font confiance aux partis politiques selon le sondage CEVIPOF de janvier 2014) et la poussée vertigineuse de l'abstention et du vote protestataire. [...]

    La France de 1958 comme celle de 2014 connaissent une crise identitaire d'une particulière acuité. 1958 est une année phare dans le processus de décolonisation et la fin de l'Empire français. En 2014, les interrogations sur l'identité de la France et son destin sont d'une autre nature mais tout aussi vives. Le pays connaît une pleine mutation et questionnement sur lui-même, autour des questions de la maîtrise des frontières, de la cohésion nationale, du modèle «multiculturel», de sa place dans la mondialisation et dans l'Europe. Cette crise se manifeste par des déchirements idéologiques extrêmement profonds et par des haines entre Français. Le débat politique était particulièrement violent en 1958 marqué par des phénomènes de stigmatisation de personnalités traitées en bouc émissaire à l'image d'un Félix Gaillard, éphémère président du Conseil président accusé de tous les maux de l'époque. La même personnalisation des rancœurs, des angoisses et des haines se retrouve aujourd'hui, quotidienne, permanente, par exemple dans «l'antisarkozisme» des années 2007-2012. [...]"

    Michel Janva

  • 27 juillet 1214 : la bataille de Bouvines

    Extrait de la Vie de Philippe Auguste de Guillaume le Breton (v. 1165-1226), prêtre biographe du roi, auteur de la Philippide et continuateur de la Gesta Philippi Augusti (Vie de Philippe Auguste) de Pierre Rigord.

    L’an de l’Incarnation du Seigneur 1214, pendant que le roi Jean exerçait ses fureurs dans le pays de l’Anjou, ainsi qu’il a été rapporté plus haut, l’empereur Othon, gagné par argent au parti du roi Jean, rassembla une armée dans le comté de Hainaut, dans un village appelé Valenciennes, dans le territoire du comte Ferrand. Le roi Jean envoya avec lui, à ses frais, le comte de Boulogne, le comte de Salisbury, Ferrand lui-même, le duc de Limbourg, le duc de Brabant, dont ledit Othon avait épousé la fille, et beaucoup d’autres grands et comtes d’Allemagne, de Hainaut, de Brabant et de Flandre. [...]

    Les ennemis étant arrivés à un ruisseau qu’on ne pouvait facilement traverser, le passèrent peu à peu, et feignirent, ainsi que le crurent quelques-uns des nôtres, de vouloir marcher vers Tournai. Le bruit courut donc parmi nos chevaliers que les ennemis se détournaient vers Tournai. L’évêque était d’un avis contraire, proclamant et affirmant qu’il fallait nécessairement combattre ou se retirer avec honte et dommage. Cependant les cris et les assertions du plus grand nombre prévalurent. Nous nous avançâmes vers un pont appelé Bovines, placé entre un endroit appelé Sanghin et la ville de Cisoing. [...]

    Pendant que le roi, un peu fatigué des armes et du chemin, prenait un léger repos sous l’ombre d’un frêne, près d’une église fondée en l’honneur de saint Pierre, voilà que des messagers envoyés par ceux qui étaient aux derniers rangs, et se hâtant d’accourir promptement vers lui, annoncèrent avec de grands cris que les ennemis arrivaient, et que déjà le combat était presque engagé aux derniers rangs ; que le vicomte et les archers, les cavaliers et hommes de pied armés à la légère, ne soutenaient leur attaque qu’avec la plus grande difficulté et de grands dangers, et qu’ils pouvaient à peine plus long-temps arrêter leur fureur et leur impétuosité. A cette nouvelle, le roi entra dans l’église, et adressant au Seigneur une courte prière, il sortit pour revêtir de nouveau ses armes, et le visage animé, et avec une joie aussi vive que si on l’eût appelé à une noce, il saute sur son cheval. Le cri de Aux armes ! hommes de guerre, aux armes ! retentit partout dans les champs, et les trompettes résonnent ; les cohortes qui avaient déjà passé le pont reviennent sur leurs pas. On rappelle l’étendard de Saint-Denis, qui devait dans les combats marcher à la tête de tous, et, comme il ne revient pas assez vite, on ne l’attend  pas. Le roi, d’une course rapide, se précipite vers les derniers rangs, et se place sur le premier front de la bataille, où personne ne s’élance entre lui et les ennemis.

    Les ennemis voyant le roi, contre leur espérance, revenu sur ses pas, frappés, je crois, comme de stupeur et d’épouvante, se détournèrent vers le côté droit du chemin par lequel ils venaient, et, s’étendant vers l’occident, s’emparèrent de la partie la plus élevée de la plaine, et se tinrent du côté du nord, ayant devant les yeux le soleil plus ardent ce jour-là qu’à l’ordinaire. Le roi déploya ses ailes du côté contraire, et se tint du côté du midi avec son armée qui s’étendait sur une ligne dans l’espace immense de la plaine, en sorte qu’ils avaient le soleil à dos. Les deux armées se tinrent ainsi occupant à peu près une même étendue, et séparées l’une de l’autre par un espace peu considérable. Au milieu de cette disposition, au premier rang était le roi Philippe, aux côtés duquel se tenaient Guillaume des Barres, la fleur des chevaliers ; Barthélemy de Roye, homme sage et d’un âge avancé ; Gautier le jeune, homme prudent et valeureux, et sage conseiller ; Pierre de Mauvoisin, Gérard Scropha, Etienne de Longchamp, Guillaume de Mortemar, Jean de Rouvrai, Guillaume de Garlande, Henri, comte de Bar, jeune d’âge, vieux d’esprit, distingué par son courage et sa beauté, qui avait succédé en la dignité et en la charge de comte à son père, cousin-germain du roi récemment mort, et un grand nombre d’autres, dont il serait trop long de rapporter les noms, tous hommes remarquables par leur courage, depuis longtemps exercés à la guerre, et qui, pour ces raisons, avaient été spécialement placés pour la garde du roi dans ce combat. Du côté opposé se tenait Othon au milieu des rangs épais de son armée, qui portait pour bannière un aigle doré au dessus d’un dragon attaché à une très-longue perche dressée sur un char. Le roi, avant d’en venir aux mains, adressa à ses chevaliers cette courte et modeste harangue : « Tout notre espoir, toute notre confiance sont placés en Dieu. Le roi Othon et son armée, qui sont les ennemis et les destructeurs des biens de la sainte Eglise, ont été excommuniés par le seigneur Pape : l’argent qu’ils emploient pour leur solde est le produit des larmes des pauvres et du pillage des églises de Dieu et des clercs. Mais nous, nous sommes chrétiens ; nous jouissons de la communion et de la paix de la sainte Eglise ; et quoique pécheurs, nous sommes réunis à l’Eglise de Dieu, et nous défendons, selon notre pouvoir, les libertés du clergé. Nous devons donc avec confiance nous attendre à la miséricorde de Dieu, qui, malgré nos péchés, nous accordera la victoire sur ses ennemis et les nôtres. » A ces mots, les chevaliers demandèrent au roi sa bénédiction ; ayant élevé la main, il invoqua pour eux la bénédiction du Seigneur ; aussitôt les trompettes sonnèrent ; et ils fondirent avec ardeur sur les ennemis, et combattirent avec un courage et une impétuosité extrêmes. [...]

    http://www.fdesouche.com

    Guillaume le Breton, Vie de Philippe Auguste (XIIIe siècle), publié par François Guizot dans la Collection des mémoires relatifs à l’Histoire de France, Paris, J.-L.-J. Brière, 1825, pp. 274-279.

  • Les faux rebelles

    Le Figaro Magazine - 08/10/2005
    Ils ont fait, selon leur génération, les barricades de 1968, les manifs étudiantes de 1986 ou les rassemblements anti-Le Pen de 2002. L’été 2003, certains se sont retrouvés à la grande fête altermondialiste qui s’est tenue sur le plateau du Larzac, comme au bon vieux temps des pantalons pat’d’eph’, des 2 CV orange et des sacs à main en toile de jute. Quand ils fument, ce n’est pas toujours du tabac. Leurs nuits sont peuplées de cauchemars qui ont nom capitalisme, libéralisme, fascisme et racisme. Etudiants hier, ils travaillent aujourd’hui dans des secteurs où ils gagnent beaucoup d’argent. Ils ont néanmoins bonne conscience, car ils sont des révoltés : contre un monde injuste et dur, ils portent haut le flambeau de la morale et des droits de l’homme. Ils le disent dans les journaux et à la télé - qui les accueillent volontiers. C’est maintenant le comble du chic : des brasseries de Saint-Germain-des-Prés au Festival de Cannes, tout le (beau) monde se dit « politiquement incorrect ».
    Etrange unanimité. Car qu’y a-t-il derrière cette expression qui tend à se banaliser ? Au printemps dernier, Jean-François Kahn publiait un Dictionnaire incorrect (Plon) dans lequel il entendait pourfendre « la bien-pensance et les nouveaux conformismes ». Il y a trois ans, Vladimir Volkoff - qui vient de mourir - avait fait de même paraître un Manuel du politiquement correct (Editions du Rocher) où il s’attaquait à l’idéologie dominante. En effectuant une lecture croisée des deux volumes, on trouve quelques réflexions convergentes, mais surtout une multitude de désaccords, et sur des points essentiels. D’après Kahn, rechercher l’absolu est « sublime », mais « croire l’avoir trouvé génère toujours des catastrophes ». Volkoff déplore au contraire que « dans la vision politiquement correcte des choses, il n’y a pas d’absolu ».
    Deux personnalités, deux livres, deux définitions opposées. L’expression « politiquement correct »étant passée dans le langage commun, chacun l’emploie en lui appliquant le contenu de son choix : on a ainsi entendu Jacques Chirac, Michel Rocard, Nicolas Sarkozy, François Bayrou, Jean-Marie Le Pen ou Laurent Fabius stigmatiser les méfaits du politiquement correct. S’y opposer, ce serait manifester le courage du « politiquement incorrect ». Mais cette étiquette n’étant pas non plus une marque déposée, n’importe qui peut prétendre jouer les contestataires en véhiculant les plus solides conformismes de l’époque : le magazine Les Inrockuptibles se vante bien d’être un journal « culturellement incorrect », alors qu’il a épousé toutes les causes militantes qui fleurirent aux Etats-Unis avec le mouvement « politically correct ».
    C’est en Amérique, il ne faut pas l’oublier, que la formule est née. En 1990, un chroniqueur du New York Times dénonçait une « nouvelle orthodoxie en vogue sur les campus ». Se réclamant de Sartre, de Foucault, de Derrida, de Deleuze ou de Marcuse, le mouvement « pc » (prononcer pi-ci) rassemblait la gauche intellectuelle américaine : marxistes, postmodernistes, féministes et gays radicaux, afro-centristes, etc. Au mythe fondateur du melting-pot, celui de la fusion des cultures dans l’ American way of life, cette nébuleuse progressiste substituait le modèle du multiculturalisme, où chacun revendique sa particularité et obtient que sa différence soit protégée par la loi.
    Importée en France au début des années 90, la formule a fait florès. Le politiquement correct, c’est désormais ce à quoi tout le monde affirme avec fierté ne pas se soumettre. Mais comment le définir ? Plus qu’une doctrine, l’expression évoque des réflexes, une sensibilité, une manière de réagir devant l’actualité. Vladimir Volkoff, dans le livre cité plus haut, mentionnait plusieurs sources idéologiques conditionnant ces réflexes : la sympathie pour les démunis et l’antipathie pour les possédants, héritage du socialisme ; un certain misérabilisme, venu du christianisme de gauche ; le goût de l’égalité et la méfiance à l’égard de la société, dans la lignée du rousseauisme ; le sens de la lutte des classes et l’affinité avec les mouvements révolutionnaires, avatar du marxisme ; le rejet de toute structure paternelle, scorie d’un complexe d’OEdipe sorti du freudisme ; la haine des normes morales et des hiérarchies sociales, legs de la « pensée 68 ».
    Au cours de la même période, le politiquement correct s’est imposé dans les milieux culturels et médiatiques, souvent en contradiction avec les enjeux d’une époque qui a vu reculer les clivages idéologiques (le conflit Est-Ouest s’étant éteint, et la distinction gauche-droite ayant perdu de sa pertinence), et en tout cas en décalage avec la société. En matière de sécurité, d’éducation, de morale civique ou de regard sur l’immigration, on sait que les élites parisiennes, au nom du politiquement correct, ont vite fait de cataloguer de « populistes » les attentes d’une population qui n’habite pas les beaux quartiers. En matière économique, de même, l’antilibéralisme sert souvent de masque à un anticapitalisme primaire, appuyé sur des raisonnements déconnectés du réel.
    Dès 1991, analysant dans Le Figaro l’émergence du politiquement correct, Annie Kriegel soulignait les dangers d’un nouveau maccarthysme consistant à délégitimer son contradicteur en l’assimilant aux personnages ou aux théories symbolisant le mal à travers l’histoire. Ce terrorisme intellectuel, au cours des dernières années, a été dénoncé par des esprits issus de traditions très diverses. Mais dans le cas de ceux qui venaient de la gauche, c’était au prix d’une contradiction ou d’une rupture avec leur famille d’origine. Cette rupture, encore faut-il l’assumer. Sous peine d’être un faux rebelle.