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Que va devenir Valls après 2017 ?
Que va devenir Valls après 2017 ? Ce n’est pas que je sois spécialement inquiet pour le parcours professionnel, la carrière de celui qui se pense un destin national. J’imagine que l’intéressé n’ira pas pointer au chômage et on le voit mal faire comme Montebourg, c’est-à-dire travailler dans le privé, n’ayant jamais exercé de métier hors de la politique. Mon interrogation est celle d’un citoyen qui s’inquiète pour son pays, s’il venait à tomber entre les mains d’un tel politicien dont certes, on ne peut douter du républicanisme mais pour lequel en revanche on peut avoir de légitimes interrogations quant à ses profondes convictions démocratiques.
Est-il nécessaire de rappeler le palmarès de Valls depuis 2012 qu’il est aux affaires ? Le ministre de l’Intérieur qui fit utiliser les gaz lacrymogènes sur les familles manifestant contre le mariage homo. Le Premier ministre qui porta une loi sur le renseignement mettant dans les mains du pouvoir politique des moyens de fliquer comme jamais aucun pouvoir n’en eut sans doute dans ce pays. Le Premier ministre qui signe un décret sur le collège au lendemain même d’une manifestation des professeurs. Le Premier ministre, selon Valeurs actuelles, qui aurait demandé une note juridique sur les moyens d’interdire le Front national. Brutalité, cynisme, autoritarisme sont le mélange explosif qui, lorsqu’on y ajoute une ambition personnelle sans limite, font les dictateurs potentiels. Manque un élément seulement : les circonstances.
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Marion Maréchal Le Pen aux veilleurs : "Sommes-nous gouvernés par les juges ?"
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Réforme du collège : une prise de conscience comparable à La Manif Pour Tous
Pierre Nora est interrogé dans Le Figarovox. Extrait :
"Le débat sur la réforme du collège a été très tendu. Que révèle-t-il de notre société?
Ce qui frappe, c'est l'emballement progressif à partir d'une mesure qui paraissait un simple ajustement à la société déjà décidé de longue date. En fait, cette réforme du collège a été une étincelle qui a mis le feu aux poudres. Un peu comme la décision du mariage pour tous (qui paraissait aussi une mesure «évidente») a réveillé un volcan dans les profondeurs de la société. Entre ces deux épisodes du quinquennat de François Hollande, il y a quelque chose de semblable. Le mariage pour tous concerne la famille, la réforme du collège a fait prendre conscience aux Français du naufrage où plongeaient l'école et l'enseignement depuis vingt ou trente ans. Or la famille et l'école sont ce qui reste quand il n'y a plus rien. Malgré la décision d'application destinée à couper court, le problème demeure. C'est la grande vertu de cette réforme du collège et de la polémique qu'elle a déclenchée: une prise de conscience collective."
Pour tenter d'éviter une nouvelle flambée de manifestations, le gouvernement a donc essayé d'aller très vite en publiant rapidement le décret d'application de cette réforme, qui n'a pas été discutée à l'Assemblée.
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La laïcité n’est plus ce qu’elle était
Le débat autour de la laïcité empoisonne la vie politique française depuis trente ans et, de l’étranger, on a peine à reconnaître la patrie de Voltaire. Comment peut-on exclure une élève de l’école pour une histoire de longueur de jupe au motif du respect de la laïcité et, en même temps, affirmer que cette laïcité est une des vertus cardinales de la République. C’est proprement incompréhensible, sauf si on accepte l’idée que ce qu’on appelle aujourd’hui laïcité n’a plus rien à voir avec le principe d’origine énoncé en 1789 puis renforcé en 1905.
« Cette hypocrisie patente autour du concept de laïcité résulte de la volonté de ne pas traiter la question taboue de l’immigration. »
Au risque de surprendre le lecteur, la laïcité est un principe qui s’applique à l’Etat, et à l’Etat seul ; il le contraint à la neutralité et le protège contre l’influence de la religion. Jamais dans l’esprit des défenseurs d’une république laïque – hormis pendant la sinistre période de la Convention – il n’a été question d’empêcher le simple citoyen de pratiquer ni même d’affirmer ostensiblement son appartenance à une religion, ni en privé bien évidemment, ni dans la sphère publique. Incontestablement, cette laïcité-là fut un progrès sur l’obscurantisme religieux et un exemple de tolérance pour le monde entier. Après la crise de 1905, la question de la laïcité semblait réglée une fois pour toutes et pendant plus d’un demi-siècle avait totalement déserté le débat politique. Elle a resurgi dans les années 1980 pour une seule et unique raison : l’immigration maghrébine avec l’irruption de l’islam dans la société française.
Aujourd’hui, la laïcité n’est plus seulement une contrainte pour l’Etat, mais aussi pour les citoyens, et plus précisément pour les musulmans, et pour les musulmans seuls. Une vérité qui dérange mais incontestable. Comment en sommes-nous arrivés là ? Par l’union improbable entre deux courants de pensée antagonistes qui traversent la société française depuis deux siècles : la gauche laïcarde, hier farouchement anticatholique, aujourd’hui islamophobe (de François Hollande à Caroline Fourest), et la droite conservatrice majoritairement de souche catholique, disons judéo-chrétienne (de Nicolas Sarkozy à Alain Finkielkraut). Leur terrain d’entente ? La première, qui n’a de cesse d’achever la déchristianisation de la société française, encourage l’immigration mais s’emploie à ce que la pratique de l’islam soit réduite a minima avant de lui faire subir plus tard le sort de la religion catholique. La seconde, qui doit subir l’immigration contre son gré, pour se donner bonne conscience ou encore par intérêt économique, exige que celle-ci soit la moins visible possible. Dans un cas comme dans l’autre, la laïcité n’est plus une vertu mais une arme, offensive pour les uns, défensive pour les autres.
Cette hypocrisie patente autour du concept de laïcité résulte de la volonté de ne pas traiter la question taboue de l’immigration. Dans sa version d’origine, la laïcité, définie à la fois comme neutralité et tolérance, est tout bonnement incompatible avec l’islam, et cette incompatibilité que personne ne veut reconnaître ne peut être résolue que de deux façons : soit l’arrêt total de l’immigration et l’assimilation forcée des étrangers, soit la désislamisation rampante des populations musulmanes sous couvert d’une laïcité dont le sens a été totalement dénaturé.
Christophe Servan
16/05/2015Source : Boulevard Voltaire.fr
http://www.polemia.com/la-laicite-nest-plus-ce-quelle-etait/
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L'expérience avortée de la monarchie constitutionnelle de Louis XVI.
Dans la récente édition de l'émission de « secrets d'histoire » consacrée au roi Louis XVI, j'ai été un peu surpris de constater que la fête de la Fédération n'était pas évoquée alors qu'elle est, sans doute, l'un des moments de la plus grande popularité du roi et qu'elle est devenue, dans le calendrier, jour de fête nationale (même si nombre de nos concitoyens y voient d'abord la prise de la Bastille). Marc Bloch lui-même, ce républicain exigeant, la plaçait très haut dans son Panthéon personnel. Bien sûr, c'était une sorte de « grande illusion », et le roi Louis XVI en sera la victime tout autant que La Fayette, ce libéral gonflé de lui-même mais sincère : malgré la bonne volonté de l'un et de l'autre, la monarchie constitutionnelle ne résistera pas aux tourmentes soulevées par la Révolution qui, fidèle à son principe historique, mangera ses enfants et un peu plus encore, pour le plus grand malheur de la France...
Etait-ce écrit en ce 14 juillet 1790 ? Je n'en suis pas certain : au-delà de l'indécision tragique du roi, c'est bien plutôt la disparition précoce de Mirabeau qui désorientera le souverain et lui fera commettre l'erreur d'un départ précipité vers l'est du pays, qui s'achèvera dans la confusion à Varennes. A ce moment-là, la monarchie semble se disjoindre d'une « souveraineté nationale » qui, en l'année 1791, ne lui est pas encore hostile sans, pour autant, lui être complètement favorable : ce sera l'occasion pour les plus ardents révolutionnaires de basculer dans un républicanisme politique qui incarne, mieux que la monarchie, leur idéologie jacobine.
La monarchie constitutionnelle façon 1791 n'est pas mon idéal monarchique : je suis plutôt partisan d'une monarchie active, fédérative et fédérale, éminemment politique sans être bureaucratique ou omniprésente, véritablement sociale sans être étatiste, d'abord arbitrale plutôt qu'arbitraire... Mais l'expérience (malheureuse en fin de compte) de la monarchie de 1791 n'était pas inutile et a, au moins, posé les bases d'une démocratie parlementaire qui, si elle me semble parfois fort périlleuse (et l'histoire de la IIIe République l'a tristement prouvé à l'envi et pour la plus grande honte de la France...), permet l'expression (plus ou moins...) apaisée des opinions et des grandes tendances intellectuelles et politiques de notre pays.
En fait, la démocratie représentative ne me semble pas aller assez loin dans cette expression politique des peuples et de leurs cadres sociaux, de la famille à la nation, voire à l'Union européenne : sans tomber dans une démagogie « démophilique » qui ne serait que la caricature de la véritable démophilie, éminemment nécessaire à mes yeux, il ne me paraîtrait pas choquant de donner de véritables pouvoirs aux communes et aux provinces, aux professions et aux établissements scolaires (par exemple), pouvoirs qui seraient confirmés ou légitimés par les électeurs locaux ou les travailleurs concernés. Dans les années soixante-dix, la Nouvelle Action Française prônait la « sociogestion » et une « nouvelle citoyenneté » active : ce sont des pistes intéressantes que les royalistes se doivent de préciser encore, pour concilier « les libertés à la base » et « l'autorité au sommet »... N'était-ce pas, d'une certaine manière, la problématique de Louis XVI, malgré les pressions d'une Assemblée qui ne jurait que par une « démocratie représentative », en définitive si mal adaptée à notre histoire et à nos « passions populaires » ?
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Gollnisch: « j’appelle volontiers à une clarification »
Bruno Gollnisch a accordé fin avril un assez long entretien à l’institut Civitas. Il a répondu, sans langue de bois et sans les esquiver, aux questions portant parfois sur des « sujets sensibles ». Le député européen frontiste donne ici son sentiment sur la capacité du Front National à incarner une résistance à la culture de mort et à défendre les valeurs traditionnelles. Il apporte aussi son éclairage sur « l’affaire Jean-Marie Le Pen », la doctrine et le programme du FN (« nouveau » et « ancien »?), les nouveaux enjeux, l’évolution du clergé catholique, les perspectives pour les élus nationaux au Parlement européen, le drame de l’immigration de peuplement… Nous reproduisons ici questions et réponses in extenso
Civitas : Tout d’abord, merci Monsieur Gollnisch d’avoir répondu à notre invitation pour cet entretien.Les circonstances actuelles sont un difficiles pour la droite nationale et ses sympathisants. Alors, si vous le permettez, nous allons essayer de vider l’abcès dès le début de cet entretien en évoquant un sujet qui importe beaucoup aux sympathisants de Civitas. Vous me contredirez si notre interprétation des choses est erronée. En fait, depuis l’élection de la présidente du Front National, on sent que s’accélère l’amenuisement ou l’enfouissement d’une tendance catholique traditionnelle au sein du FN. Cette tendance est connue pour son regard critique sur une République identifiée au génocide vendéen ou au laïcisme virulent, laïcisme qui ne semble pas mort d’ailleurs. Quoi qu’il en soit, lorsqu’un catholique perçoit les appels incessants des personnalités FN à la République, la défense de la loi Veil, lorsqu’il constate que les évolutions des mœurs de la maison…, comprenez-vous qu’un catholique patriote qui aurait des velléités de militer au FN finisse par se dire : « mais qu’est-ce que je vais faire dans cette galère ? »
Bruno Gollnisch : Je crois tout de même que votre appréciation est exagérée. D’une part, s’agissant par exemple de la loi Taubira, sur le mariage dit « pour tous » – qui est en fait une dénaturation du mariage –, le Bureau politique du FN, à l’unanimité, a condamné cette loi et a manifesté son intention de l’abroger, ce que ne fait aucune autre formation politique et surtout pas l’UMP qui, comme vous le savez – même si quelques-uns de ces parlementaires, d’ailleurs très largement favorisés par les organisateurs de cette manifestation, y ont pris part – y est elle-même très réticente.
M. Juppé a même annoncé qu’on ne changerait plus rien à cette loi, selon d’ailleurs l’habitude de l’UMP qui consiste à protester plus ou moins du bout des lèvres, ou à protester par l’intermédiaire de certaines de ses composantes contre les projets présentés par la gauche, puis une fois qu’ils sont passés, à les avaliser et à les faire siens au motif qu’il serait impossible de revenir dessus. Ce n’est pas le cas du Front National.
En ce qui concerne la loi Veil, je regrette en effet que nous n’ayons pas voté contre l’indécente célébration de cette législation à l’Assemblée Nationale. En fait nous n’avons pas voté pour : nous n’y ayons simplement pas pris part. Les propos de Marine Le Pen tendent à dire que la situation actuelle est pire que celle de la loi Veil, puisque cette loi, aussi critiquable qu’elle soit, interdisait la propagande en faveur de l’avortement, et proposait malgré tout une tentative de dissuasion de la femme en restreignant soi-disant l’avortement aux situations de détresse. Ces fragiles barrières, comme on pouvait s’y attendre évidemment, ont volé en éclats. Mais il n’y a pas au F.N. d’apologie de la loi Veil, simplement le fait de constater que la législation actuelle a encore empiré depuis la loi Veil.
En ce qui concerne la laïcité, je crois qu’il ne faut pas confondre la laïcité avec le laïcisme. La laïcité, c’est une forme de tolérance dans nos sociétés qui, malheureusement, ne sont plus spirituellement cohérentes. Cette tolérance mutuelle est instaurée en vue d’éviter un mal plus grand, qui résulterait d’affrontements civils. Cela signifie donc que, pour sauvegarder la paix civile, l’Etat ou la puissance publique ne fait pas acception de l’appartenance religieuse des uns ou des autres. Chacun le comprend très bien. En tout cas Marine Le Pen interrogée par moi-même, m’a dit très clairement que si elle ou d’autres invoquent la laïcité, c’est essentiellement pour éviter les empiétements sur notre législation civile de l’Islam qui, comme vous le savez, n’est pas seulement une religion mais aussi un ordre social et juridique, et qui par conséquent, prétend naturellement, (je veux dire : par nature), à empiéter sur le domaine social, politique, légal, législatif, etc. C’est en ce sens que nous parlons de laïcité.
Si les musulmans qui sont en France, la plupart d’origine immigrée, et à qui les gouvernements successifs ont donné la nationalité française, se convertissaient au christianisme, ce serait préférable, de mon point de vue. Mais on ne peut pas exiger du FN qu’il fasse ce que ne fait pas ou fait assez peu le clergé, y compris le haut clergé, ni ce qui reste de fidèles catholiques dans ce pays. Nous sommes obligés de tenir compte de la situation où nous nous trouvons, c’est-à-dire d’une France déchristianisée en grande partie. Certes, l’on sent de part et d’autre un retour des valeurs traditionnelles, et on a l’impression que dans beaucoup de franges de la population, y compris d’ailleurs de la jeunesse, le balancier revient en quelque sorte dans le bon sens.
Mais nous, en tant que responsables politiques d’un parti qui d’ailleurs n’est pas un parti confessionnel, nous sommes obligés de tenir compte de la situation actuelle du pays et d’évoluer dans ce cadre, en essayant de restaurer, au moins partiellement, l’ordre naturel. C’est là notre devoir d’état. Pour ce qui est de la restauration de l’ordre surnaturel, cela demande d’autres forces que les nôtres…
Ce que je peux dire en conclusion aux catholiques qui seraient réticents à l’engagement politique à nos côtés, c’est ceci : en dehors de tout esprit partisan, à la rigueur, je pourrais personnellement comprendre leur démarche s’ils parvenaient à faire mieux à côté. Mais je suis obligé de constater que, même si le FN est forcément très imparfait comme toute entreprise humaine, c’est de très loin malgré tout la formation politique qui est la moins éloignée de leurs convictions ; la seule grande formation politique qui puisse faire élire des gens, et même quelquefois en position de gouverner, au moins des mairies, peut-être même demain des Conseils Régionaux, et après-demain peut-être l’ensemble de l’Etat.
Pour être tout-à-fait clair sur ce sujet, je rencontre souvent des catholiques qui ont été formés, voire très bien formés. Ils ont suivi des cursus de formation doctrinale, puis ils ont formé d’autres formateurs, etc. Mais ce que je constate avec regret, c’est que cette excellente formation, bien souvent, ne se traduit par aucun engagement concret, et ce au motif que les engagements concrets peuvent être des occasions de compromis, voire de compromissions, d’erreurs, de chutes, etc. C’est Péguy qui a dit : « ils ont les mains propres, mais ils n’ont pas de mains ». Il disait cela des moralistes Kantiens. Mais il a dit aussi de certains chrétiens « Parce qu’ils n’ont pas la force d’être de la nature ils croient qu’ils sont de la grâce. Parce qu’ils n’ont pas le courage d’être du monde ils croient qu’ils sont de Dieu. »
C’est malheureusement le cas de beaucoup de catholiques qui, restant sur le bord du fleuve, voient les autres se débattre, essayer de ramer à contre-courant, et trouvent qu’ils ne le font pas avec assez de vigueur.
Civitas : Justement, par rapport à la problématique de formation doctrinale, on dirait que la droite nationale au sens large commet une erreur soit par excès soit par défaut. D’un côté, nous avons des mouvements groupusculaires dont certains travaillent énormément la question doctrinale en faisant preuve d’un pointillisme qui empêche toute action de rassemblement et tout développement d’un mouvement qui disposerait d’une taille critique pour une politique nationale. De l’autre, nous avons un Front National qui dans le contexte démocratique dans lequel il a choisi d’agir (mais qui s’impose aussi à lui), veut réunir tous les patriotes sincères au risque de foncer dans le mur des crises successives, faute d’une doctrine suffisamment pensée et surtout partagée. L’élection présidentielle sera en 2017. N’est-il donc pas temps pour le FN de prendre un peu ses distances avec l’événementiel et de redéfinir clairement sa doctrine afin de permettre à ses divers militants, sympathisants et électeurs de s’y retrouver et de définir cette doctrine partagée, sans quoi on évitera difficilement les crises successives que l’adversaire ne manquera d’ailleurs pas de provoquer ?
BG : Oui, je suis assez de votre avis. Même si les crises n’ont pas toujours exclusivement une source doctrinale. Aucune organisation, même pas l’Eglise catholique qui fait profession d’universelle charité, n’est à l’abri de conflits qui peuvent avoir leurs sources dans des querelles personnelles, dans des ambitions, et pas seulement dans un désaccord sur le fond. Ceci étant dit, je partage assez largement votre opinion. Il se trouve que nos deux précédents congrès, celui qui a assuré la succession de Jean-Marie Le Pen et au cours duquel, en 2011, Marine Le Pen a été élue présidente, et le dernier congrès, pour des raisons pratiques, n’ont pas été des congrès doctrinaux. Il n’y a donc pas été procédé à la mise à jour de notre programme. Il y a cependant, au sein du FN, un effort intellectuel. Il y a des commissions (les « CAP ») qui réunissent des gens compétents dans divers domaines, et qui s’efforcent d’élaborer un programme. Celui-ci doit, selon moi, tenir compte de nos valeurs fondamentales, de nos traditions, de nos combats passés, mais aussi proposer des solutions qui sont adaptées à la situation de notre société, qui évolue très rapidement et malheureusement pas toujours en bien.
Toutefois, j’appelle volontiers à une clarification, d’autant plus que j’ai été un peu déçu et même choqué, par des propos récents à l’occasion de la crise provoquée par les réactions à l’interview de Jean-Marie Le Pen à Rivarol, et aux problèmes des investitures des régions Provence, Alpes, Côte d’Azur. Marion Maréchal-Le Pen, que j’apprécie, et dont beaucoup avait salué la participation à la « Manif pour Tous », où je me trouvais d’ailleurs avec elle et bien d’autres élus à ce moment-là, aurait tenu au journal Le Figaro des propos qui suscitent mon interrogation, je le dis sans absolument aucune animosité à l’égard de sa personne. Ces propos paraissaient affirmer que je serais l’un des tenants d’un Front National en quelque sorte révolu, que c’est à tort qu’on l’aurait assimilée, elle, à cette famille d’esprit, et qu’elle se rangeait résolument sous la bannière d’un Front National nouveau, dirigé par Marine Le Pen. J’ai été assez étonné parce que, même si la campagne avait été très déséquilibrée du point de vue médiatique, j’avais accepté sans réserve la décision de notre congrès d’élire Marine Le Pen avec laquelle je me trouvais à l’époque, par la force des choses, en concurrence. En conséquence, je n’ai pas l’impression d’appartenir à un Front National « ancien », ni de ne pas appartenir au Front National de Marine Le Pen.
En revanche, je suis assez fondé à demander en quoi, s’il y a un Front National « nouveau », il se distinguerait du Front National « ancien ». D’ailleurs, Marine Le Pen elle-même m’a assuré vivement qu’il n’y avait pas, si j’ai bien compris, d’autres différences que celle de rechercher la dédiabolisation de notre mouvement. On aurait d’ailleurs tort de me faire un partisan de la « diabolisation », car j’ai toujours considéré la diabolisation comme anormale et comme injuste. La diabolisation nous a été imposée par nos adversaires. Peut-être y avons-nous prêté le flanc. Mais si on peut éviter d’être diabolisé, ce n’en est que mieux, bien sûr. Quoi qu’il en soit, au-delà des personnes, je crois quand même que ce problème doctrinal doit être posé car il est fondamental.
Qui sommes-nous ? Que voulons-nous ? Pourquoi nous battons-nous ? Quel but poursuivons-nous ? Du fait encore une fois de l’absence de contenu doctrinal de nos derniers congrès, et de l’afflux-dont je me réjouis- de membres et de cadres nouveaux, y compris au sommet de la hiérarchie, Il est possible qu’il y ait à cet égard un certain flou préjudiciable à notre action future, si surtout, comme je le souhaite, nous avons part à l’exercice du pouvoir. Parce qu’après, nous n’aurons plus le temps de la réflexion.
Civitas : Vous avez parlé d’un point important, c’est la dédiabolisation, c’est un processus déjà ancien. Et on comprend que certains responsables du Front National, pressés d’arriver au pouvoir, compte tenu de la gravité de la situation, cherchent légitimement à s’enlever des barrières. Cela dit, est-ce qu’il faut en venir à se comporter en communicants rassurants plutôt qu’en militants dérangeants ? On a vu parfois des responsables du Front National se déshonorer à condamner des personnes ayant tenu des propos pourtant bien fondés, exprimés sans haine, au-delà même de ce qu’espérait l’adversaire. Sans parler de l’affaire Le Pen toute récente, on pourrait parler par exemple de l’affaire Vanneste. On peut quand même supposer que ces responsables du FN savent lire et ont le sens de la nuance, et donc ne faut-il pas conclure que la sur-réaction de ces responsables, sur-réaction que vous avez d’ailleurs dénoncée, me semble-t-il, plutôt que de traduire une certaine prudence dans la communication, dénote en réalité, au moins chez certains, une volonté d’opérer une révolution doctrinale ?
BG : Ce n’est pas moi qu’il faut interroger sur ce sujet. Ce serait les auteurs de cette sur-réaction. Je crois que cette sur-réaction n’est pas forcément le produit de la volonté d’opérer un virage doctrinal. Elle est peut-être la volonté de s’affranchir des interprétations de tels propos, malveillantes évidemment, qu’en donne majoritairement le monde médiatique. A partir du moment où la radio, les journalistes, etc., sur un ton de procureur, disent à Marcel : « Avez-vous lu les propos scandaleux qu’a tenus Jean ? », Marcel pris de crainte, est porté à répondre : « mais moi je n’ai rien à voir avec ça, je désapprouve, je les désavoue », au lieu de dire simplement, « eh bien, je vais d’abord demander à Jean quelle portée il donne à ses propos. Et puis si vous voulez les commenter, vous n’avez qu’à l’inviter lui-même »…
Je crois qu’il y a quelquefois un manque de sang-froid, et, c’est vrai, une complaisance excessive à l’égard des médias qui n’attendent que cela. Parce que, une fois que Marcel a condamné les propos de Jean, évidemment ils se retournent vers Jean en disant, « même votre ami Marcel trouve que vous avez dit des choses scandaleuses ». Jean va alors être porté à dire que Marcel est un traître, etc. C’est ainsi que prend une mayonnaise qui, à mon avis, ne prendrait pas, si tous nos amis opposaient à cette dialectique le calme des vieilles troupes et la solidarité qu’on doit observer entre camarades de combat, à supposer même que l’on pense que tel ou tel d’entre eux a commis une erreur ou une faute.
Civitas : Vous avez parlé de certaines évolutions envisageables en matière doctrinale. Est-ce que vous pourriez nous dire rapidement quelles seraient les évolutions qui vous sembleraient indispensables, voire simplement souhaitables ? Quelles sont les principales ?
BG : Oui, bien sûr. Par exemple : l’Europe. Nous avons été pendant très longtemps partisans d’une autre Europe, d’une Europe des Nations qui, au cours de nos différentes campagnes européennes au cours de ces dernières années, a eu un contenu qui s’est exprimé dans un certain nombre d’ouvrages, de brochures, de documents électoraux, etc. Il semble que nous soyons majoritairement d’accord aujourd’hui pour considérer que l’Union Européenne est parvenue à un point où elle est irréformable. Dans ces conditions, évidemment, il faut savoir si nous proposons une autre forme de coopération ou d’association avec nos voisins, ou si nous n’en proposons aucune. Je pense que l’on ne détruit véritablement que ce que l’on remplace. Personnellement, j’ai un certain nombre d’idées sur ce sujet.
Deuxième sujet : Le développement, en relation avec la question de l’immigration. Bien sûr, la France ne peut pas prendre à son compte toute la misère du monde. Elle ne peut pas la prendre sur son territoire parce qu’elle se déstabiliserait elle-même, ce qui est d’ailleurs largement entamé. Comme le disait mon ami Bernard Antony, ce n’est pas en « tiersmondisant » la France que l’on résoudra les problèmes du Tiers-monde. Cependant, pouvons-nous malgré toutcontribuer à la résolution de quelques-uns des problèmes du Tiers-monde ? Et si oui, de quelle façon ?
J’ai mon idée, je pense que le libre-échange mondial empêche le décollage des économies du Tiers-monde, et notamment le passage de l’artisanat à l’industrie. C’est un point de vue personnel. Je pense qu’il faut améliorer notre réflexion économique, parce que je constate qu’un certain nombre d’intellectuels, de dirigeants africains, asiatiques ou américains du sud sont en relations amicales avec nous, et ont compris qu’en défendant notre identité, nous défendions aussi implicitement la leur. C’est un domaine qui doit être exploré.
Autre sujet que nous nous devons d’affronter : le réchauffement climatique. Il paraît aujourd’hui à peu près établi. En revanche, a-t-il véritablement sa cause dans l’activité humaine ou pas ? C’est un point tout à fait central, et sur lequel nous devons approfondir notre réflexion, mais à partir d’expertises scientifiques indépendantes. J’avais moi-même, quand je dirigeais le comité scientifique du Front National, organisé un colloque à ce sujet où des spécialistes éminents avaient exprimé un point de vue sensiblement différent de celui qui est aujourd’hui communément admis. Parce que la réaction du politique doit être tout à fait différente, selon qu’il se confirme ou pas que ce réchauffement a une origine humaine.
L’efficacité des politiques familiales et natalistes est aussi un domaine qui doit aussi être exploré. Parce que le problème démographique de l’Europe occidentale en particulier, est évidemment posé. On se gargarise régulièrement du fait qu’en France la situation serait moins dramatique qu’elle ne l’est chez nos voisins. En réalité, c’est par l’effet de notre Code de la nationalité qui donne la nationalité française à tout enfant né en France, même de parents étrangers, et de façon automatique. Chacun le pressent, mais c’est un tabou.
Il y a beaucoup de choses comme cela : le problème de l’immigration, ne se pose plus évidemment de la même façon pour des personnes d’origine étrangères employées à l’usine Flins de Renault avec un contrat de travail temporaire, ou lorsqu’on en est à la troisième génération. C’est un sujet qui doit être abordé à la lumière de nos convictions chrétiennes et aussi du souci du bien commun qui doit être le nôtre.
Nous avons une volonté légitime, d’arrêter, et même d’inverser le courant de l’immigration. Mais il est très clair que certaines personnes, qui l’ont manifesté par leur attitude et par le fait qu’elles n’ont plus d’attaches avec leur pays d’origine, peuvent avoir vocation à rester en France. Et alors, à quelles conditions ? Et selon quelles modalités, compatibles avec leur dignité et avec l’intérêt et l’identité nationaux ? C’est un champ de réflexion. Mais il y en a bien d’autres.
Autre exemple : nous étions, à juste titre, hostiles à l’économie dirigée infiniment moins efficace que l’économie de marché. Par voie de conséquence, nous étions hostiles aux nationalisations. Nous constatons cependant que la privatisation ou le démantèlement de tel ou tel groupe industriel aboutit à faire basculer les actifs de ces entreprises dans l’escarcelle du mondialisme, et à en priver le peuple français. Les destins récents, par exemple de Péchiney ou d’Alstom, etc. sont les dernières manifestations de cet état de chose. Par réaction, nous avons pris la défense d’un certain nombre de ces quasi monopoles, même très imparfaits, comme EDF, SNCF, ou d’autres.
Jusqu’où devons-nous aller dans ce domaine ? Jusqu’à quel point, cette défense est-elle compatible avec la restauration nécessaire des libertés économiques dans notre pays, et notamment de la liberté d’entreprendre ? Compatible avec notre lutte contre les excès du fiscalisme qui spolie, et de la bureaucratie qui paralyse ?
Car voilà un problème nouveau qu’évoquait devant moi il y a plusieurs mois Jean-Marie Le Pen qui me disait que nous avions désormais aussi un problème d’émigration en France, c’est-à-dire que nos jeunes élites les mieux formées, désireuses d’entreprendre, de créer, quittent la France, souvent à destination du monde anglo-saxon beaucoup plus pragmatique, où elles pressentent qu’il leur sera beaucoup plus facile d’exercer leurs talents et éventuellement de recueillir les fruits de leur travail et de leur esprit d’initiative. Cette émigration de personnels jeunes les plus qualifiés et les plus entreprenants est évidemment un appauvrissement considérable pour notre pays. Nous commençons à connaître les problèmes qui sont ceux d’un certain nombre de pays du tiers-monde, à savoir la fuite des cerveaux.
Voilà des sujets nouveaux qui ne nécessitent pas un renoncement à nos fondamentaux, encore moins un reniement, bien évidemment, mais qui nécessitent une nouvelle déclinaison de ces fondamentaux sur les sujets qui sont plus récemment apparus dans notre société.
Civitas : Monsieur Gollnisch, vous êtes un habitué du Parlement européen et notre revue a publié récemment deux articles sur la victoire des euro-sceptiques qui se transformerait en quelque sorte en échec, nous voulons évidemment parler des difficultés pour constituer un groupe à ce Parlement. Pouvez-vous nous dire aujourd’hui quelles sont les perspectives de réalisation d’un tel groupe ? Pouvez-vous espérer trouver un terrain d’entente avec Nigel Farage ?
BG : C’est à M. Farage qu’il faudrait poser la question. Nous, nous y sommes disposés, mais là on voit les effets de la diabolisation qui, sans doute, fonctionne de moins en moins sur le plan intérieur, mais subsiste au plan international. Si l’on dit que le FN est un parti raciste ou violent, personne ne le croit plus en France. En revanche, dans les médias internationaux qui répandent leurs mensonges à l’égard de publics étrangers qui ne nous connaissent pas, ou qui n’ont pas l’occasion de vérifier, ça peut encore faire impression.
On s’aperçoit que cette diabolisation obéit absolument aux mêmes règles, aux mêmes principes, aux mêmes méthodes sur le plan international, dès lors qu’émerge une nouvelle formation décidée à défendre l’indépendance des nations et son identité. Une telle formation sera en butte aux mêmes méthodes. Personnellement – j’ai une divergence de ce point de vue avec Marine Le Pen, mais c’est Marine Le Pen la présidente, et je suis respectueux de la hiérarchie – je considère que parmi les élus au Parlement européen, élus qui se sont soumis à un processus pacifique, légal, démocratique, il me suffit personnellement que ces personnes partagent sur l’Union Européenne notre diagnostic.
Et nous n’avons pas à juger si certains ont des comportements différents du nôtre dans certains pays qui n’ont pas forcément la même culture que nous. Je pense à ces pays de l’est européen qui ont subi pendant des décennies des formes très violentes d’oppression. Qu’il y ait des comportements qui puissent nous surprendre, à la limite ce n’est pas notre problème. Il me suffit que ces personnes partagent notre diagnostic sur les dysfonctionnements de l’Union Européenne, son instrumentalisation par le mondialisme, sa volonté implacable de régir, contrairement au principe de subsidiarité, l’ensemble des aspects politique, économique, socio-culturel, sexuel, etc. de la vie de 500 millions d’Européens, en rupture complète avec les traditions européennes. Il me suffit que les intéressés partagent ces opinions et je serais prêt à m’entendre avec eux. Je pense en particulier à mes amis hongrois du parti Jobbik.
Ce n’est pas la stratégie choisie par Marine Le Pen, qui souhaite davantage de précautions. Je m’incline, mais je constate qu’on est toujours le diable de quelqu’un. A partir du moment où les médias anglo-saxons, qui sont pires que les médias français – et pourtant il y a de la concurrence ! – ont dit beaucoup de mal à notre sujet, M. Farage, est devenu réticent au fait de s’entendre publiquement avec nous. Peut-être aussi par goût personnel, car pour certains Britanniques, l’Afrique commence au sud de la Manche. Je vous dirai que ça n’a pas grande importance. On a sans doute attaché trop d’importance à cette affaire de groupe parlementaire. J’ai été membre d’un groupe parlementaire pendant quinze ans, et président de celui que nous avions réussi à constituer dans des conditions acrobatiques, qui s’appelait « Identité, Traditions, Souveraineté »… tout un programme !
Mais on a eu tort à mon avis de communiquer là-dessus pendant plusieurs mois avant l’élection européenne, sans être assuré de pouvoir le constituer, ce qui a focalisé évidemment l’attention médiatique sur ce sujet. Je le crois par expérience : les élections ont lieu, et ensuite les groupes se constituent ou ne se constituent pas, très rapidement après. D’autre part, il ne faut pas non plus se bercer d’illusions. Il y a eu une poussée très importante, et je m’en réjouis, de ce qu’on appelle l’euro-scepticisme ou le souverainisme, que ce soit Nigel Farage, le Front National ou mes amis hongrois qui viennent de gagner une élection partielle.
Nos adversaires sont obligés d’en tenir compte. Ceci étant, nous sommes encore minoritaires. Nous avons encore des chances de parvenir à constituer un groupe en cours de mandature, autour d’un noyau qui fonctionne déjà en très bonne intelligence. Mais si nous parvenions à obtenir deux nationalités de plus pour faire un groupe, cela ne changerait pas substantiellement notre situation qui est malgré tout minoritaire. Cela nous donnerait davantage de moyens, mais cela ne changerait pas la face de l’Europe et cela n’empêchera pas la majorité acquise au mondialisme de poursuivre dans sa voie. Voilà ce que je peux dire sur ce sujet.
Civitas : Nous avons commencé cet entretien en évoquant les catholiques, nous allons finir en parlant d’eux. Bien que soutenu ou peut-être parce que soutenu amplement par de nombreux catholiques dits traditionalistes, le Front National a longtemps souffert de l’opposition de l’Eglise catholique en France, notamment sur le problème de l’immigration. Il semble que l’Eglise catholique, du moins celle que l’on voit officiellement et qui a l’appui des autorités vaticanes, reste rangée sur une position globalement intégrationniste. Tout se passe comme si les clercs oubliaient le bien commun de la Cité au profit d’une vision uniquement centrée sur les droits des migrants. Est-ce que vous partagez ce constat ou bien percevez-vous une évolution du clergé sur ces problématiques ?
BG : Je perçois, mais je peux me tromper, une évolution positive d’une façon générale du clergé catholique. Je perçois un renouveau du spirituel, et malgré tout une plus grande prudence à l’égard des questions politiques, une moindre influence des idées marxisantes qui ont eu en leur temps leur influence sur le clergé comme elles l’avaient sur l’ensemble de la société. Le clergé n’échappe pas totalement à l’esprit du temps. Je vois beaucoup de jeunes prêtres, je ne parle pas seulement de la Tradition bien sûr, qui portent de nouveau l’habit ecclésiastique. Je suis moi-même un laïc très imparfait et je ne suis donc pas en mesure de porter des jugements sur le clergé. Simplement, ce que je peux dire c’est que cette question de l’immigration a été une pierre d’achoppement, compte tenu de la doctrine chrétienne de charité qui fait obligation de venir en aide et au secours, des pauvres, des déshérités, de ceux qui fuient des situations intolérables et qui fait obligation de leur tendre la main, de les accueillir, de les recevoir, de les réconforter, de les héberger, etc.
Et il est certain que pour une partie assez large du clergé catholique, mais aussi des fidèles, notre message était irrecevable parce que notre opposition à la politique d’immigration paraissait être une position de sécheresse de cœur, d’égoïsme, contraire à la parole de l’Ecriture : « Tu accueilleras l’étranger puisque tu as été toi-même étranger au pays d’Egypte ». Sauf que, quand on accueille un million, puis trois millions, puis cinq millions, puis dix millions d’étrangers dans une société comme la société française, cela pose de graves problèmes.
Mon épouse est d’origine japonaise et avant de faire une carrière politique, si l’on peut appeler ça une carrière, j’ai enseigné la langue, la culture, la civilisation japonaises. Je suis donc dépourvu de préjugés hostiles à ce pays ! Mais ce que je dis cependant, c’est que s’il y avait dix millions de Japonais en France, quelle que soit la bonne tenue des Japonais, cela poserait à la France un très sérieux problème social, politique, économique, culturel… Et s’il y avait dix millions de Français au Japon, je pense que la société japonaise exploserait ! Je dis cela avec humour pour faire comprendre que ça n’est pas une question d’hostilité viscérale à l’égard de tel ou tel. C’est la vertu de prudence, qui est une vertu chrétienne, qui nous oblige à nous inspirer de l’expérience des peuples. Et cette expérience, produit de l’Histoire, nous montre que la coexistence de communautés hétérogènes à l’intérieur d’un même territoire n’est pratiquement jamais pacifique. Que les dynamiques de groupes sont telles qu’elles conduisent à des affrontements. Or la France était relativement exempte de ces problèmes. Le crime, car c’est vraiment un crime, des dirigeants des décennies passées depuis la Vème République, a été d’introduire ces ferments de division que constitue cette immigration de peuplement, sur laquelle le peuple français n’a d’ailleurs jamais été consulté. Je crois qu’il faut faire comprendre au clergé qu’encore une fois, ce n’est pas en « tiersmondisant » la France qu’on résoudra les problèmes du Tiers-monde.
Forcément, je suis touché par ce qu’a dit le Pape, notamment dans un discours au Parlement européen, qui était assez sévère envers les institutions européennes, et qui comportait d’ailleurs beaucoup de rappels de la doctrine chrétienne, mais aussi c’est vrai, nous interpellait sur le sort des malheureux qui traversent la Méditerranée et qui souvent y perdent la vie. Mais ce qu’il faut que le clergé, notamment le haut clergé français comprenne, c’est que nous sommes aussi dans notre rôle en voulant protéger la communauté nationale dont nous sommes les élus, des risques d’atteinte à son unité, des risques de conflits, des risques de dépossession des Français de leur indépendance, de leur culture. Il faut que les Français retrouvent la priorité naturelle qu’ils doivent avoir dans leur pays. La préférence nationale a été défendue par le cardinal Feltin, il y a longtemps La préférence nationale est parfaitement légitime. Enfin, il est un devoir pour les Français d’être reconnaissants aux générations qui les ont précédés, car le patriotisme est une des formes de la piété filiale, comme le rappelait souvent le regretté Jean Madiran.
Civitas : Merci Monsieur Gollnisch.
http://gollnisch.com/2015/05/26/gollnisch-jappelle-volontiers-a-une-clarification/
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Conférence du C.N.C: Les pièges de la réinformation - Lille - 30/05/15
En raison de l'annulation de la conférence d'Alain de Benoist, le Cercle Non Conforme organise une nouvelle conférence à Lille à la même date (30 mai) intitulée "les pièges de la ré-information".
Alexandre Rivet, journaliste à Présent, débutera la conférence par un éclairage sur le métier de journaliste au sein de la ré-information et Arnaud Naudin, journaliste indépendant, développera les différents pièges auxquels peuvent-être confrontés lecteurs et journalistes des médias de ré-information.
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NRH n°78 "Identité et démocratie; la Suisse de Guillaume Tell à Oskar Freysinger"
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La machination américaine contre la Russie – et l’Europe – Par Guillaume Faye
La stratégie de Washington est de créer un conflit ouvert en Europe avec la Russie, en y entraînant l’Union européenne. La crise ukrainienne n’est qu’un aspect de cette politique. Une guerre contre la Russie est envisagée sérieusement. Essayons de décrypter sereinement les événements et les faits, en évitant l’anti-américanisme simpliste et dogmatique ; en séparant bien les desseins des dirigeants oligarques américains et les Etats-Unis, comme nation, dans leur complexité sociologique et politique.
9 mai 2015 : l’affront fait à la Russie
Lors des cérémonies du 9 Mai à Moscou célébrant le 70e anniversaire de la victoire alliée, les chefs d’État et de gouvernement occidentaux – et en particulier européens – n’étaient pas présents. Pour la France, seul M. Fabius, ministre des Affaires étrangères était à Moscou. Et encore, il s’est contenté de déposer une gerbe, refusant d’assister au traditionnel défilé militaire sur la Place Rouge. Ce boycott est probablement le résultat d’un ordre de Washington, auquel les gouvernements européens ont obéi avec servilité, comme toujours. C’est un geste inamical envers la Russie, voire insultant et d’une stupidité diplomatique insondable pour les Européens.
Boycotter la cérémonie de la victoire à Moscou, alors que sans la Russie et les peuples de l’URSS cette victoire aurait été obtenue par Hitler, a été une décision symbolique très blessante pour la nation russe. Ce fut une provocation de plus. D’autant que Vladimir Poutine s’était poliment rendu en Normandie pour l’anniversaire du Débarquement, répondant à l’invitation de M. Hollande.
M. Poutine d’ailleurs, dans son discours à l’occasion du défilé militaire du 9 mai, a bien dénoncé la volonté des dirigeants occidentaux – pilotés par Washington– de vouloir déstabiliser les relations internationales. Par ce boycott, les gouvernements occidentaux ont voulu manifester une hostilité à la Russie, lui signifier son exclusion du concert des nations. La France a suivi – quelle honte ! – oubliant son principe d’indépendance en matière de politique extérieure. Ce geste, d’une immense portée symbolique, a humilié le sentiment national russe et aura pour les Européens de graves conséquences. Car ce n’est pas la Russie qu’on isole, c’est l’Europe qui s’isole.
La démonstration de force de l’armée russe à l’occasion du défilé du 9 mai correspond à une volonté dissuasive et non pas agressive. C’est un message envoyé à Washington. La Russie augmente son effort militaire mais sans commune mesure avec le colossal budget militaire US (50% des dépenses mondiales en la matière). Le Kremlin anticipe une agression militaire US qui ne relève pas de la science-fiction, comme nous le verrons plus loin.
Le prétexte du boycott fut l’”annexion” de la Crimée, alors que cette dernière, territoire russe, a été rattachée à la Fédération de Russie par référendum régulier. Mais la véritable raison de cette insulte faite à la Russie est l’obéissance à Washington. Nos dirigeants ne sont pas tant antirusses qu’américanolâtres. Ils obéissent au suzerain.
L’erreur ukrainienne
Un membre du parti ultra-nationaliste paramilitaire aux accointances néonazies, Pravyi Sektor, M. Dmytro Iaroch, a été nommé début avril 2015 conseiller au ministère de la Défense du gouvernement de Kiev. Pravyi Sektor combat aux côtés de l’armée ukrainienne dans l’Est séparatiste, une armée qui a été responsable de milliers de morts civils russophones et de l’exode de populations qui ont dû fuir en Russie. Une armée qui bénéficie de livraisons d’armes américaines, voire européennes, et de l’aide logistique de la CIA. Le Pentagone vient d’envoyer des troupes américaines en Ukraine pour ”entrainer” l’armée de Kiev. Le but est évidemment de préparer une guerre. Face à cela, la propagande essaie de nous faire croire que Moscou envoie des troupes qui envahissent l’Est de l’Ukraine.
Le gouvernement de Kiev – issu en réalité d’un coup d’État– financé par Washington, ses satellites et ses affidés, totalement irresponsable, cherche, sur ordres, à lancer une confrontation armée avec la Russie. Les ultra nationalistes ukrainiens sont les idiots utiles du Pentagone et de la CIA qui ne cherchent qu’une seule chose : un conflit armé en Europe contre la Russie, qui déborderait le cadre géopolitique ukrainien. Ce serait le couronnement de la stratégie américaine post-URSS : empêcher la naissance de la ”Maison Commune”, une solution de bon sens, de paix et de prospérité que Gorbatchev comme Poutine ont défendue. L’idée d’une hostilité entre Ukrainiens et Russes est une tragédie, construite par Washington.
Le gouvernement de Kiev commet une erreur majeure, peut-être par aveuglement, peut-être aussi par soumission corrompue aux donneurs d’ordre américains. Car l’intérêt fondamental de l’Ukraine est son bon voisinage avec la Russie, dans tous les domaines y compris économiques, et non pas son alignement sur Washington et son annexe, Bruxelles. Les Ukrainiens comprennent-t-ils qu’ils sont instrumentalisés ?
Le déshonneur français
Le refus – scandaleux– du gouvernement français de livrer à la marine russe les navires Sébastopol et Vladivostok (de la classe Mistral), alors que des paiements avaient été effectués, en rompant unilatéralement et illégalement un contrat, est dévastateur pour l’image et la réputation de la France. Les pressions de Washington sont derrière ce renoncement à livrer les navires, ce qui prouve à quel point le PS au pouvoir est asservi à la politique étrangère américaine. Dans cette affaire, où le gouvernement français a joué le rôle du cocu consentant, le but de Washington n’était nullement d’empêcher le prétendu ”impérialisme russe” de se doter de matériel naval occidental pouvant menacer les voisins de la Russie. Il s’agissait de casser les reins à une coopération militaro-industrielle franco-russe et surtout de nuire aux exportations militaires françaises – concurrentes des américaines – en dégradant la fiabilité de la France comme fournisseur. Cela fait plus de 50 ans que les gouvernements américains essaient par tous les moyens de torpiller les exportations de la filière industrielle de défense française. C’est la logique de Washington. Et les plus critiquables, dans cette lamentable affaire, ne sont pas les Américains, qui jouent leur jeu, mais le gouvernement français qui abdique, obéit, renonce à sa souveraineté et à l’indépendance nationale.
En refusant de se rendre à Moscou le 9 mai à l’invitation de Poutine, Hollande « s’est aligné sans nécessité sur la position américaine d’un boycott de la Russie qui la jette imprudemment dans les bras de la Chine », explique Renaud Girard qui ajoute : « dans cette lente dérive de la Russie vers la Chine, on ne voit pas très bien où se situe l’intérêt stratégique de la France » (Le Figaro, 12/05/2015). La France commet une erreur majeure de politique étrangère, oubliant les principes de De Gaulle : notre allié principal est la Russie et non pas les États-Unis. Ces derniers ne sont pas un ennemi, certes, mais un adversaire, un compétiteur. Le seul véritable ami naturel de la France comme de nos partenaires continentaux de l’UE, c’est la Russie. Cette réalité est à la fois géopolitique et historique.
Opinions russes sur les manipulations américaines
Le dernier dirigeant soviétique, Mikhaïl Gorbatchev, déclarait récemment : « la décision d’élargir l’Otan vers l’Est a été prise par les Etats-Unis et leurs alliés en 1993. Je l’ai, dès l’origine, qualifiée d’erreur majeure. […] Cela constituait une violation de l’esprit des déclarations et assurances qui nous avaient été données en 1990 » (Russia Beyond the Headlines, 19/11/2014). Le secrétaire d’État américain James Baker avait en effet juré à Gorbatchev en 1990 qu’il n’y aurait pas d’élargissement de l’Otan vers l’Est. Il savait qu’il mentait. Et aujourd’hui, après la Pologne et les Pays baltes, Washington cherche un casus belli avec Moscou en poussant l’Ukraine à adhérer, comme il y a incité la Georgie.
Vladimir Iakounine, président des chemins de fer russes RZD et proche de Poutine, a déclaré à propos des sanctions économiques contre la Russie, décidées par les USA et appliquées servilement par l’Europe : « leur but principal n’est pas de mettre la Russie à genoux, mais d’empêcher que la coopération entre Russes et Européens n’engendre le premier concurrent de l’économie américaine. […] Les sanctions nous ferment l’accès aux marchés internationaux de capitaux. Elles ont encore un autre effet, en poussant les dirigeants russes à réorienter le développement économique du pays vers l’Asie, les pays émergents et les pays non membres de l’Otan. Cela représente une grande partie du monde. » (entretien avec Philippe Gélie, Le Figaro, 21/04/2013)
Le politologue et universitaire moscovite associé au Club Valdaï, Andreï Souchentsov, écrivait : « la Russie a réévalué ses rapports avec l’Occident. Les projets de création d’un ordre mondial sur un pied d’égalité ne se sont pas réalisés. Les États-Unis et l’Otan ont utilisé unilatéralement la force à plusieurs reprises dans des conflits au mépris du droit international. Menant une politique indépendante dans la défense de ses intérêts, Moscou se voit accusé de ”ne pas jouer selon les règles ”. La crise ukrainienne est devenue la dernière et la plus importante conséquence de cette rupture de l’équilibre de l’ordre international » (Rossiyskaya Gazeta, 19/11/2014).
Dans le même numéro de cette revue, Fedor Loukianov, président du Conseil pour la politique étrangère et la politique de défense, explique qu’au cours de son premier mandat présidentiel, Vladimir Poutine avait sincèrement cru à la perspective d’un ordre multinational multipolaire et à une entente sincère avec les USA contre des menaces communes, ainsi qu’à la construction d’une alliance structurelle avec une Europe libre. Mais devant un gouvernement US grisé par la chute de l’URSS, succombant à ses tentations de superpuissance interventionniste autoritariste et belliciste (d’autant plus agressive qu’elle se sait provisoire (1)), Poutine a dû déchanter. Dès 2012, explique Loukianov « il s’est interrogé sur le sens des initiatives de Washington qui lui semblaient viser à une déstabilisation de l’ordre mondial plutôt qu’à son renforcement. Le ton de son discours prononcé au club Valdaï cette année (Sotchi, octobre 2014) avait une pointe de fatalisme. Poutine ne s’attend plus à un changement de la part des Etats-Unis, il dénonce simplement le côté dévastateur de leurs actions. […] Vladimir Poutine refuse de jouer selon les règles définies par les dirigeants américains ».
Le nouveau rideau de fer
Depuis la chute du Mur de Berlin et la dissolution du Pacte de Varsovie, l’Europe et la France ont mené vis-à-vis de la Russie une politique étrangère catastrophique, sur ordre de Washington. L’occasion unique d’un partenariat puissant euro-russe (la ”Maison Commune”) a été sabordée. Contrairement aux promesses faites à Gorbatchev, en échange de la réunification de l’Allemagne, l’Otan s’est étendu vers l’Est, jusqu’aux portes de la Russie. Washington et l’Otan jouaient la carte de la déstabilisation de l’Europe et de l’humiliation agressive de la Russie, qui leur apparaissait, depuis la chute de l’URSS, comme un pays en déclin et à soumettre.Mais la renaissance de la puissance russe, avec Poutine, a changé la donne. Poutine, dans son discours de la Wehrkunde à Munich en 2007 annonçait que la Russie reprenait sa liberté stratégique et géopolitique. C’est pourquoi Washington a fomenté et financé le coup d’ État de Maïdan et lancé dans la provocation anti-russe le nouveau gouvernement de Kiev. Le but des Etats-Unis est clair : reconstituer le rideau de fer, couper l’Europe de l’Ouest de la Russie pour mieux vassaliser la première, entretenir une tension permanente (la nouvelle guerre froide) avec le Kremlin, catastrophique pour l’Europe. Le boycott des cérémonies de la victoire à Moscou le 9 mai 2015, qui est un affront calculé par Washington et les milieux atlantistes européens, marque bel et bien le retour de cette seconde guerre froide. Geste symbolique d’hostilité.
Pour les Européens pusillanimes, adeptes de la servitude volontaire, roulés dans la farine par leur suzerain américain, cela signifie la fin de l’alliance russe, indispensable à notre sécurité collective, et la destruction du grand projet de partenariat macro-économique global UE–Russie. Le pire est le gouvernement français qui trahit et tourne le dos à ce partenaire, à cet allié naturel qu’est la Fédération de Russie, au mépris de notre intérêt national, pour obéir à un pseudo-allié qui nous méprise et donc le seul but est nous asservir à sa puissance tutélaire et souriante, tout en regardant avec joie notre dissolution dans une colonisation de peuplement et une islamisation galopante.
L’hypothèse et le projet d’une guerre contre la Russie.
Aussi bien en Ukraine que dans les Balkans ou en Georgie, le bellicisme déstabilisateur de l’Otan, directement dirigé par Washington, cherche l’affrontement armé. Par exemple, en mars 1999, l’Otan est intervenue militairement – et illégalement– contre la Serbie pour aider les séparatistes albanais du Kosovo, en jurant de faire de ce pays un havre de paix démocratique et multiethnique. Aujourd’hui, le Kosovo est un État voyou, mafieux et raciste, qui a chassé toutes les minorités serbes et non albanophone et qui mène une guérilla sanglante pour déstabiliser sa voisine, la Macédoine. Bravo et merci à l’Otan et à Washington. Le 7 août 2008, le gouvernement géorgien antirusse de Saakachvili, candidat à l’UE et à l’Otan, aidé par les Américains, bombardait Tsinkhvali, la capitale de l’Ossétie du Sud séparatiste, tuant des centaines de civils et dix observateurs militaires russes. Et, déjà à l’époque, on s’est scandalisé que les Russes réagissent !
La stratégie de Washington est de pousser l’Otan au bras de fer avec Poutine, au bord du gouffre, au risque d’un affrontement armé. Ce fut le sens de la visite d’Obama à Talinn où il rencontra, début septembre 2014, les présidents des trois pays baltes, jadis incorporés dans l’URSS et aujourd’hui membres de l’Otan. Sous le prétexte que la Russie les menace – pur fantasme, mais infusé dans les opinions publiques –, thèse défendue par Thomas Wright, de la Brookings Institution, il s’agit de provoquer le Kremlin en renforçant militairement l’Otan à ses frontières immédiates. Actuellement, l’Otan met en place dans cette zone une” force de réaction rapide” prépositionnée dans les pays d’Europe de l’Est (readiness action plan, ” plan de réactivité”) En parallèle, Washington renforce son soutien à l’armée ukrainienne et augmente la pression pour faire adhérer Kiev à l’Otan. Afin de faire naître, de manière totalement irresponsable, un casus belli avec Moscou. Tout cela est perçu comme un grave danger et une menace majeure par le gouvernement russe, qui réoriente sa doctrine militaire en fonction de ces provocations, comme l’a rappelé Mikhail Popov, secrétaire adjoint du Conseil de sécurité russe.
Les cadres supérieurs du Pentagone (qui déterminent la politique de la Maison Blanche) (2) se réjouissent des réactions russes à leurs provocations. Leur but est de multiplier ces dernières pour créer a war situation, un état de guerre contre la Russie. Un clash (”heurt”) militaire avec l’armée russe, en risquant une escalade nucléaire, est intégré dans les protocoles militaires américains. Les services secrets russes savent parfaitement ce que je dis : le Pentagone veut une confrontation armée Otan/ Russie dans l’arc géopolitique nord-sud Baltique-Mer Noire.
Les faiblesses et les dangers de la stratégie US
Mais les souhaits américains d’isoler et d’étouffer la Russie échouent. Aux commémorations du 9 mai à Moscou, le président chinois Ji Xin Ping et le premier ministre indien Narendra Modi étaient présents au premier rang. Leurs pays représentent 2,5 milliards d’hommes. Au contraire, le suivisme servile et aveugle d’une Union européenne obéissant aux USA est en train de nous isoler du monde.
De plus, cette politique aventureuse de Washington suscite d’importantes critiques aux Etats-Unis mêmes. John J. Mearsheimer avertissait dans le magazine Foreign Affairs de « la détermination de Poutine d’empêcher la Georgie et l’Ukraine de rejoindre l’Otan » en ajoutant : « les Etats-Unis et leurs alliés devraient abandonner leur plan d’occidentaliser l’Ukraine, et tenter d’en faire une zone neutre entre l’Otan et la Russie ». La chef de la commission de renseignement du Sénat, la démocrate Dianne Feinstein, parlait sur NBC de l’inefficacité des sanctions en ces termes : « les Russes sont un peuple endurant et courageux, ils surmontent toutes les difficultés économiques. Je ne suis pas sûre que des sanctions puissent avoir le moindre effet ». Elle en appelait à un dialogue direct avec Poutine, se démarquant de la position de son propre gouvernement.
Le risque d’une hubris américaine existe, c’est-à-dire la volonté de déclencher une guerre pour maintenir l’hégémonie américaine ou pour tenter une résoudre une crise financière et économique géante qui menace. Le cow boy peut devenir fou et tirer dans le saloon. Ce ne serait pas la première fois dans l’histoire que Washington, animé par un mélange schizophrène de cynisme et d’idéalisme, se lancerait dans un aventurisme militaire catastrophique. Le chaos actuel du Moyen-Orient est partiellement le fruit des interventions insensées des Bush père et surtout fils, le plus dingue des deux. Avec, comme toujours dans l’histoire, des interventions armées américaines, justifiées par des prétextes fabriqués. L’éléphant dans un magasin de porcelaines.
N’oublions pas que les USA, s’ils ne sont pas une puissance militariste – au sens classique du mot – sont un pays belliciste. L’énorme budget militaire du Pentagone et le complexe militaro-industriel sont au centre de l’appareil économique américain mais aussi du financement de la classe politique. Le système américain a fondamentalement besoin d’un état de guerre sinon permanent, du moins récurrent. Une confrontation armée avec la Russie est très sérieusement envisagée dans les milieux du Pentagone et du complexe militaro-industriel. Peu importent les conséquences : la politique étrangère américaine a toujours manqué de sagesse et de finesse ; la brutalité et l’irréflexion sont ses marques de fabrique. De même qu’un mépris pour les règles et institutions internationales qui ne sont valables que pour les autres, pas pour les USA ; sans oublier cette certitude naïve de se prendre pour le gendarme du Bien, avec tous les droits.
La diabolisation de Vladimir Poutine et de son gouvernement, présentés comme une dictature autocratique par la propagande US relayée servilement dans tout l’Occident – alors qu’ils sont très populaires dans la population russe – ne présage rien de bon. Du temps de l’URSS, les risques de guerre étaient de 10%. Aujourd’hui, ils sont de 60%.
L’impasse
Ce qui a terriblement ennuyé Washington, ce furent les fragiles accords de Minsk passés entre Mme Merkel, M. Hollande, M. Poutine et le gouvernement de Kiev pour un cessez-le-feu. De quoi se mêlent la France et l’Allemagne ? L’objectif américain est de briser la trêve, de relancer la guerre. Une guerre civile en Ukraine de l’est qui, comme un furoncle infectieux, pourra déboucher sur une vraie guerre, où l’on pourra impliquer la Pologne et les pays baltes, c’est l’objectif. Bien sur, Mister Obama ne cherche pas cela. Mais c’est un pion, ce n’est pas lui qui dirige. Il n’a pas d’idées précises, il obéit aux maîtres qui l’ont fait élire, comme dans toute ploutocratie. Tout président américain fait la politiques des lobbies qui l’ont fait élire. En Russie, Poutine fait la politique du peuple qui l’a élu.
Les grands perdants sont les pays européens soumis aux Etats-Unis. D’autant plus que le traité commercial transatlantique va les asservir un peu plus, uniquement de leur faute. On leur fait croire que le danger et l’ennemi sont à l’Est, la Russie, alors que c’est l’allié naturel. Tandis que la véritable menace vient du Sud, comme l’actualité le démontre tous les jours. Mais cette stratégie américaine est stupide à long terme pour les Etats-Unis eux-mêmes. Plutôt que de s’entendre avec un bloc euro-russe indépendant, ils poussent la Russie dans les bras de la Chine et se constituent ainsi un adversaire redoutable. Quant aux nations de l’Union européenne, incapables de contenir une immigration de peuplement massive concomitante d’une islamisation, elles semblent sortir de l’Histoire. Les stratèges washingtoniens s’en félicitent ; les stratèges russes le déplorent. Quand allons-nous nous réveiller ? Quand l’intelligence et la lucidité vont-elles ressurgir ? Après l’explosion.
(1) Toute hégémonie est passagère. Charles Krauthammer a lancé en 1990 le concept de « moment d’unipolarité », c’est-à-dire la période pendant laquelle les Etats-Unis, étant la seule vraie superpuissance, pouvaient agir à leur guise. Il estime cette période, qui a commencé au début des années 1990 à la chute de l’URSS, entre 25 et 30 ans. Ça se termine.
(2) La véritable direction de la politique des USA n’est pas déterminée par la présidence, la Maison Blanche, mais par la triarchie Pentagone/ CIA/ Complexe militaro-industriel.” Les Trois Sœurs ”. Le président américain (contrairement aux présidents français ou russes) est un exécutant et non pas un directeur. (Cf. autres articles de ce blog sur ce sujet).
Guillaume Faye
http://www.gfaye.com/la-machination-americaine-contre-la-russie-et-leurope/