L’ébullition politique, tant au plan national qu’européen, entourant les prétendues révélations du Spiegel sur la portée des écoutes américaines, aurait été du plus haut comique si elle ne confirmait pas l’état de vassalité dans laquelle les Etats-Unis tiennent les pays européens et singulièrement la France...
...depuis au moins 1945 et plus exactement même depuis la fin de la Première guerre mondiale, dont nous commémorons le centenaire de la déclaration l’an prochain. Il faut en effet toujours prendre du recul et dépasser l’effervescence d’une phénomène pour en extraire le précipité et comprendre sa nature profonde.
Les accusations du Spiegel, fondées sur des documents confidentiels transmis par l’ancien consultant de la NSA Edward Snowden, ne font que confirmer ce que, il faut du moins l’espérer, les Etats européens et la Commission européenne savaient depuis toujours : oui les Américains nous écoutent, oui, il nous espionnent, et ils le font parce qu’il y trouvent leur intérêt. Aussi convient-il, plutôt que de le leur reprocher — nous devrions pour notre part consacrer à des écoutes réciproques davantage de moyens — de prendre les déclarations indignées de nos dirigeants nationaux et européens pour ce qu’elles sont : du théâtre en direction des peuples. Dès 1980, l’affaire Echelon avait révélé au grand public la surveillance au niveau planétaire, opérée par les Américains, avec déjà, pour l’Europe, la complicité des Britanniques, des communications téléphoniques, de télécopie, puis, à leur apparition, des messageries électroniques transitant par les satellites de communication, voire les communications diplomatiques par ondes courtes, un logiciel étant dédié au filtrage des messages en fonction d’un lexique pré-choisi. Or jamais l’Europe n’a conditionné la bonne qualité de ses rapports avec les Etats-Unis à la loyauté de l’Oncle Sam. Pourquoi ? C’est là que nous revenons à l’histoire. Parce que les Etats-Unis ont commencé d’imposer à l’Europe à la faveur de la Première guerre mondiale une mainmise à la fois idéologique et politique qui est devenue, à la faveur de la Seconde — nous écrivons bien « à la faveur » car du point de vue américain, ces deux guerres ont été une aubaine — une hégémonie culturelle et économique (plan Marshall) que d’aucuns ont justifiée jusqu’en 1989 par le danger communiste. Et s’ils n’ont pu forcer la planète, après la chute du Mur de Berlin, à accepter leur hyperpuissance unilatérale — version américaine de la fin de l’histoire —, ils n’en ont pas continué d’imposer leur cadre à un « projet européen », qui n’a jamais été conçu par ses promoteurs, notamment français (qu’il s’agisse de Jean Monnet, de Robert Schuman ou de Léon Blum) indépendamment de la « protection » des Etats-Unis, c’est-à-dire de la soumission à leurs intérêts. Comme le prouve suffisamment la servilité continue avec laquelle les Européens s’empressent, sans jamais exiger de réciprocité, de satisfaire les exigences américaines, s’agissant notamment du transfert des données des passagers aériens européens aux autorités américaines ou, tout simplement, de l’ouverture, qui sera peut-être simplement retardée par décence [1], d’un traité de libre-échange transatlantique, qui permettra au renard américain d’entrer désormais en toute liberté dans le poulailler européen, l’arbre de la question culturelle dissimulant la forêt des abandons bientôt consentis par les Européens, tant en termes économiques, qu’en matière de propriété intellectuelle et de préservation de la qualité des produits et d’un mode de vie étranger au tout-consumérisme outre-atlantique.
C’est pourquoi lorsque Michel Barnier, seul commissaire européen français, tweete : « Clarté, vérité et transparence : c’est ce qu’on peut et doit attendre de nos amis et alliés. Les explications américaines sont nécessaires et urgentes », il continue de prendre les Français et les Européens pour des imbéciles : nous ne vivons pas au pays des Bisounours, et si les Américains ont pu apparaître au cours de l’histoire comme nos alliés — au même titre, et certainement pas plus, que les Russes puis les Soviétiques —, ils ne sont certainement pas nos « amis », comme le sait, du reste, fort bien Barroso qui se contente de son rôle de valet d’Obama — un rôle qu’il a maladroitement surjoué à propos de la question de l’exception culturelle. Il n’en reste pas moins — et ce serait le seul effet heureux de cette affaire des écoutes — que l’icône du « premier-président-noir-des-Etats-Unis » pourrait enfin être sérieusement écornée auprès d’une opinion publique qui, en Europe, et à la suite de la propagande de media gardiens de l’ordre américain, s’était majoritairement retrouvée sur l’image d’un Obama nouveau messie d’une Amérique de paix et d’amour... — en quelque sorte une résurrection mais en mieux, puisque issue de la « diversité », du président Wilson... alors qu’il s’agit précisément de la version la plus dangereuse de l’impérialisme américain.
Hollande, en déplacement à Lorient, a patriotiquement déclaré le 1er juillet : « Nous ne pouvons pas accepter ce type de comportement entre partenaires et alliés. Nous demandons que cela cesse immédiatement », ajoutant que « les éléments sont déjà suffisamment réunis pour que nous demandions des explications ». Quant on sait que François Hollande est le premier « Young Leader » de la FAF — ... pour French American Foundation, groupe de pression chargé de promouvoir les intérêts américains dans le monde —, à être devenu président de la République française (promotion de 1996) et que son gouvernement en comprend quatre autres — Pierre Moscovici, Arnaud Montebourg, Marisol Touraine, Najat Vallaud-Belkacem —, sans oublier son conseiller Aquilino Morelle, on peut être certain de la détermination de notre vénéré Geôlier pour tous à défendre l’intérêt national.
Geôlier pour tous ? Plus encore que la condamnation, qui pouvait être sans lendemain, la mise en détention immédiate de Nicolas Bernard-Buss restera une tâche indélébile sur le mandat de Hollande. Taubira, pour justifier la séquestration de ce pacifique veilleur, interpellé sans aucune base légale par la police politique de Valls, a osé invoquer les lois répressives adoptées sous le quinquennat de Sarkozy. Comment expliquer dans ces conditions que ces mêmes lois épargnent la prison aux délinquants ? Une justification mensongère est un aveu de culpabilité : Nicolas Bernard-Buss est bien un prisonnier politique. Hollande avait déclaré en 2012 qu’il ferait de la jeunesse la priorité de son mandat. Voilà une promesse tenue... mais en renouant avec la triste pratique des prisonniers politiques. En visant délibérément un jeune étudiant brillant, dans le seul but de « terroriser » une jeunesse généreuse et pacifique, mais déterminée à refuser le monde inhumain que l’idéologie totalitaire au pouvoir veut lui imposer, Hollande a montré son vrai visage : celui d’un apprenti-dictateur entouré de fanatiques — Taubira, Belkacem, Peillon pour ne citer que les plus caricaturaux et les plus haineux — et déterminé à violer les libertés publiques si c’est le prix à payer pour traduire en acte une volonté morbide de changer de force la société et les comportements. Le dernier projet en date : imposer le congé parental aux hommes et la lutte contre les « stéréotypes sexués » à la télévision... Imposer, imposer...
Face à une élite politique, qui redouble la désagrégation économique par la désagrégation sociétale et qui est, par ailleurs, complètement discréditée par son haut niveau de corruption, les Français ont commencé à montrer, eux aussi, qu’ils n’hésiteraient pas, en cas de besoin, à entrer en résistance.
François Marcilhac - L’AF 2866 http://www.actionfrancaise.net
[1] : La décision de Hollande de refuser le survol du territoire français au président bolivien soupçonné de ramener dans son pays Snowden et celle d’ouvrir finalement les négociations sur le traité transatlantique à la demande de Merkel ne font que confirmer la profonde vassalité de notre "Young leader" Hollande.