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culture et histoire - Page 1149

  • Bérénice Levet : « L’École républicaine a implosé, elle n’est plus »

    FIGAROVOX/GRAND ENTRETIEN – A la rentrée, le gouvernement encadrera les écoles hors contrat et financera les « décrocheurs ». Dans un entretien fleuve, Bérénice Levet décrit la mort d’une École républicaine dont le requiem n’a pas encore été prononcé.

    Bérénice Levet est docteur en philosophie et professeur de philosophie à l’École Polytechnique et au Centre Sèvres. Son dernier livre La théorie du genre, ou le monde rêvé des anges a été publié chez Grasset en novembre 2014.

    FIGAROVOX. – A partir de la rentrée 2017, les écoles hors contrat seront soumises à un régime d’autorisation et de contrôle a priori en lieu et place du régime de déclaration. Présentée par le ministre de l’Education nationale pour lutter contre la radicalisation, cette réforme ne risque-t-elle pas de porter atteinte à la liberté d’enseignement et d’entraver d’abord les initiatives pédagogiques de certains établissements – comme les écoles du réseau Espérance Banlieues ou la Fondation pour l’Ecole d’Anne Coffinier – qui cherchent à lutter contre la crise de l’Ecole républicaine? A force de ne pas nommer les maux de notre société, ne risquons-nous pas de détruire ce qui tient encore debout en se trompant de cible?

    Bérénice Levet. – C’est une grande supercherie. Personne n’est dupe. La ministre dit s’inquiéter du niveau d’instruction des élèves inscrits dans ces établissements hors contrat, de la «pauvreté des savoirs» qui leur sont dispensés, du déficit de culture générale. Elle est tout simplement grotesque. Nos enfants sortent ignorants des écoles de l’Education nationale, ce qui ne semble guère la tourmenter. Elle prétend par ailleurs s’être saisie de cette question pressée par des élus locaux, des citoyens préoccupés de voir proliférer dans leurs quartiers, dans leurs communes, des écoles musulmanes salafistes – le danger est bien réel et exige une vigilance extrême mais les moyens de les repérer existent déjà et, de toute façon, quelles seront les suites? On se contentera, comme pour les mosquées salafistes, de les avoir identifiées… Si le savoir et la radicalisation des esprits hantaient réellement la ministre, elle renoncerait à sa réforme du collège qui parachève, nous y reviendrons, la destruction de l’école comme lieu de transmission du savoir et de formation les esprits pour lui substituer un grand centre d’animations ludiques.

    L’enjeu de ce projet est ailleurs. La ministre est résolue à faire rentrer les réfractaires dans le rang.

    Elle s’alarme d’ «une augmentation importante du nombre d’élèves scolarisés dans des établissements privés hors contrat du premier degré» mais elle ne s’interroge pas un instant sur les raisons de cette fuite loin des collèges publics ou privés sous contrat. Or, les réseaux alternatifs prospèrent sur la démission, la faillite de l’Education nationale. Et l’on peut être assuré qu’avec la réforme du collège qui doit entrer en vigueur en septembre 2016, le processus n’ira que s’accélérant, sauf naturellement si le ministère parvient à en interdire l’ouverture.

    Et pourtant l’existence et l’essor de ces réseaux est une heureuse nouvelle: voilà quelque quarante-cinq années, depuis la décennie soixante-dix, que l’école ne remplit plus sa mission. Que les professeurs ont renoncé à transmettre le vieux monde aux enfants, à leur apprendre à le connaître et à l’aimer. Chaque réforme a vidé toujours plus de sa substance et de son sens l’école et certains adultes ont réagi. Combien encore de générations perdues? se sont-ils demandés et plutôt que de regarder passivement les ruines s’amonceler, ils se sont retroussé les manches et ont créé ces réseaux alternatifs ou ont renoué avec le principe aristocratique du précepteur à domicile.

    Ces initiatives prouvent que tous les adultes n’ont pas signé la reddition avec l’exigence, l’excellence, l’instruction, le besoin fondamental de l’être humain d’être inscrit dans un monde, dans une histoire, d’être riche d’une langue et de sa littérature, bref d’engendrer des héritiers de notre civilisation – on conçoit la haine venimeuse que de telles ambitions doivent inspirer à la ministre. Des héritiers! Ce mot banni du discours des progressistes fécondé par Pierre Bourdieu.

    Ces initiatives prouvent que tous les adultes n’ont pas signé la reddition avec le besoin fondamental d’engendrer des héritiers de notre civilisation. Des héritiers ! Ce mot banni du discours des progressistes fécondé par Pierre Bourdieu.

    Quant aux critères qui permettront d’apprécier ces établissements, et de leur octroyer le droit ou non d’ouvrir ou de se maintenir quels seront-ils? Ceux de l’éducation nationale et de ses pédagogies? Le risque est grand alors de voir se tarir le développement de ces écoles puisque leur raison d’être est d’offrir un contrepoids à l’enseignement étatique.

    Pour endiguer la fuite hors des établissements publics comme privés de l’Éducation nationale, les professeurs et les proviseurs devraient, comme les médecins ou les journalistes, avoir la possibilité de faire valoir une clause de conscience et de refuser d’appliquer les diktats du ministère.

    Pour lutter contre les « décrocheurs », ces élèves qui quittent l’école sans diplôme ou qualification, le Plan Valls pour les jeunes prévoit que les lycéens boursiers de 16 à 18 ans qui reprendront leurs études recevront une prime de 600 euros. N’est-ce pas un couteux emplâtre sur une jambe de bois ? Les décrocheurs ne sont-ils pas le symptôme d’un décrochage beaucoup plus large du système éducatif dans son ensemble ?

    J’ignore si cette mesure sera coûteuse ou non mais je la tiens pour extrêmement dégradante et pour Manuel Valls qui la propose et pour la jeunesse à laquelle elle est destinée.

    La proposition de Manuel Valls est en parfaite cohérence avec la logique utilitariste et consumériste qui a investi l’école ces dernières années. Les politiques, les professeurs, les chefs d’établissement, les journalistes ont les yeux rivés sur le classement PISA qui émane de l’OCDE, les critères d’évaluation sont donc économiques. L’école n’est d’ailleurs plus le lieu de la transmission des savoirs, mais de l’acquisition des «compétences» – la substitution est éloquente: on rappellera que les DRH et autres spécialistes préconisent d’ouvrir son Curriculum Vitae par une rubrique précisément intitulée « compétences ». On ne forme plus à l’école des êtres capables de penser, de juger, mais des spécialistes de la solution des problèmes, de bons techniciens.

    L’homme y est réduit à un agent économique. Nul n’envisage d’éperonner chez ces jeunes gens plutôt que la passion de l’argent, la passion de comprendre, d’explorer la condition humaine, tous ont renoncé à leur faire découvrir la jouissance d’avoir les mots pour dire les choses…On m’objectera que c’est utopique, je ne le crois pas: il faut faire le pari de l’intelligence, tenter d’aiguillonner en tout homme l’éros de la connaissance.

    Je rappellerai ces magnifiques mots du général De Gaulle destinés à la jeunesse lors de ces vœux du 1er janvier 1969, soit quelques mois après les événements de mai: «Dans mes discours, j’aurai toujours mis l’accent sur le relèvement du franc, sur la prospérité économique, comme s’il n’y avait que cela qui comptait à mes yeux et aux vôtres, alors que je suis catholique, l’un des derniers chefs d’État à en faire ouvertement profession. C’est là encore une des contradictions de ma vie. Comme si je ne savais pas que vous avez une âme!» Il serait bon que nos politiques n’oublient pas que l’homme n’est pas qu’un homo economicus.

    Vous avez raison, le décrochage concerne le système éducatif en son entier. La plus grande incertitude règne quant au sens de l’école, y compris du côté des enseignants. Eux aussi ont décroché en quelque sorte: un professeur de français d’une classe de Cinquième qui vous explique, ainsi que j’ai pu le lire dans Le Figaro (21 mars 2016), qu’elle «a choisi d’entrecouper l’étude du Roman de Renart ou des Fourberies de Scapin, d’une lecture qu’elle nomme ”plaisir”, à savoir un roman jeunesse de science-fiction», ne sait plus pourquoi elle est là, devant ses élèves. Elle aussi, semble-t-il, prendrait bien le chemin des écoliers….

    Un peu plus de quatre ans après l’élection de François Hollande, que reste-t-il de la priorité accordée aux jeunes ? Que restera-t-il en particulier de la philosophie et de l’action de Najat Vallaud-Belkacem rue de Grenelle ?

    Si accorder la priorité à la jeunesse, c’est se soumettre à ces prétendues attentes, l’encapsuler dans « son » monde, dans « sa » culture ainsi qu’on le fait depuis les années Mitterrand/Lang, si lui donner la priorité, c’est confier au rappeur Black M la commémoration du centenaire de Verdun, ou laisser la jeunesse déferler entre les tombes de la nécropole de Douaumont [Robert Redeker , «Nous n’étions plus à Douaumont mais à Verdun Pride»] , alors François Hollande n’aura pas failli à sa promesse.

    Mais si l’on se fait une idée plus noble de la jeunesse alors on peut conclure à son immolation, au regard précisément de l’école qu’il laissera derrière lui.

    La réforme du collège qui entrera en vigueur en septembre parachève la transformation de l’école comme instance de transmission – je dis «parachève» car le processus était déjà bien avancé – en centre d’animations et celle des professeurs en gentils organisateurs d’activités culturelles et «ludiques». Nous assistons une véritable tyrannie du « ludique » qui s’exerce dans tous les domaines de la culture, de la science.

    La ruse de la ministre a été d’entremêler dans un même projet une réforme des programmes et une refonte du collège, de ses pratiques d’enseignement et de son organisation pédagogique. Or, c’est ce second volet qui est le plus décisif.

    La philosophie, pour reprendre votre terme, de Najat Vallaud-Belkacem, sa volonté d’abolir l’école comme instance de transmission des savoirs, s’incarne dans l’instauration des Enseignements Pratiques Interdisciplinaires. L’argumentaire qui les justifie est totalement fallacieux: il s’agirait de permettre aux élèves de faire travailler les connaissances acquises, mais la possibilité même d’acquérir des connaissances est définitivement hypothéquée par cette nouvelle organisation.

    Je milite pour des cours de maintien à l’école. Tout commence par le corps, disait Nietzsche, admiratif du XVIIe siècle français et de son principe : « Ne jamais se laisser aller ».

    En quoi consisteront ces EPI? En activités pratiques, créatives qui associeront plusieurs disciplines où l’élève sera toujours en orbite, avec un professeur qui supervisera les activités, s’autorisera à l’occasion à distiller quelques bribes de son savoir. Mai 68 avait eu raison de l’estrade mais le dispositif scénique de la classe maintenait la séparation du maître et de ses élèves. Désormais, il sera parmi eux, soit leur parfait égal. Or, «abolir la transcendance du maître» disait Maurice Blanchot, c’est détruire les conditions mêmes de la transmission. L’asymétrie qui s’incarne dans l’espace renvoie à la polarité temporelle qui sépare l’élève du maître – le professeur est le représentant d’un monde vieux, qui précède et excède l’enfant.

    La culture, la formation de l’esprit n’est pas qu’une question de contenu, elle suppose certaines dispositions: pour recevoir des connaissances, il faut être capable d’attention, de calme, d’oubli de soi… Je milite pour des cours de maintien à l’école. Tout commence par le corps, disait Nietzsche, admiratif du XVIIe siècle français et de son principe: «Ne jamais se laisser aller». Mais Najat Vallaud-Belkacem ne voit dans la concentration, les «haltes méditatives» (Marc Fumaroli) qu’ennui, passivité dont il faut triompher.

    Voilà ce qui restera du passage de Najat Vallaud-Belkacem rue de Grenelle. N’exonérons pas cependant de leur responsabilité le Président naturellement, mais non moins le Premier ministre car c’est sous son autorité que s’accomplit cette réforme. Ce qu’on ne saurait pardonner à un homme qui se réclame volontiers d’Alain Finkielkraut, lequel a fait de l’école républicaine un des grands combats de sa vie !

    Il y a presque vingt ans, en juin 1997, Claude Allègre proposait de « dégraisser le mammouth ». Le ministère de l’Éducation nationale est-il encore réformable ou, paralysée par la rencontre de crispations idéologiques et de préservation d’intérêts particuliers, faut-il attendre qu’il implose pour « refonder l’École », formule qui fut utilisée par tant de ministres successifs ?

    Je ne pense pas que Claude Allègre ait aspiré à renouer avec une école de la transmission et de l’intégration, il entendait adapter l’école aux exigences du marché, mais là n’est pas votre question.

    L’école a déjà implosé. Personne cependant n’a encore eu le courage de prendre à bras-le-corps cette réalité.

    Aussi l’institution scolaire vivote-t-elle, maintenue, sans conviction, dans un entre-deux crépusculaire: elle n’est plus l’école républicaine telle que conçue par ses fondateurs mais elle n’est pas non plus encore tout à fait autre chose. En tout cas jusqu’à la rentrée prochaine. Et quoi qu’il en soit, le grand remplacement se fera sournoisement. Personne n’est prêt à assumer la responsabilité d’être le fossoyeur de l’école républicaine, d’en prononcer le requiem.

    Refonder l’école n’est pas un vain projet. Le statu quo n’est nullement souhaitable. Sauf que jusqu’à présent, les ministres ont botté en touche. Si le mot refondation a un sens, il implique de s’interroger sur les bases, les fondements de l’école et donc ses finalités. Il conviendrait de toute urgence d’instaurer des états généraux de l’école. Une seule question devrait aujourd’hui nous requérir: pour quoi l’école ? l’école pour quoi faire ? Quels sujets voulons-nous former dans les écoles de la République : des agents économiques, des êtres compétitifs sur le marché du travail, ainsi que nous y enjoint le rapport PISA ? Des hommes cultivés, capables d’une pensée argumentée et d’un jugement autonome ? Des citoyens c’est-à-dire des êtres « ouverts à une responsabilité », selon la belle définition de Vaclav Havel ? Voulons-nous une école qui renoue avec sa mission d’intégration et d’assimilation et travaille, par la transmission de l’héritage, à refabriquer des Français, qu’ils soient de souche ou non, car après quarante-cinq années d’éducation progressiste, tout est à rebâtir ?

    L’instauration de tels états généraux est nécessaire, et l’on aurait pu penser que les attentats islamistes qui nous ont frappés en 2015 y inciteraient, voire les imposeraient. Au lendemain des tueries de janvier, lorsque l’identité des terroristes fut connue, que l’on apprit qu’ils avaient été scolarisés dans nos établissements, l’école se trouva au centre des questions mais tout continua comme avant.

    Le président de la République décréta une « grande mobilisation de l’École pour les valeurs de la République », quand il eût fallu décider d’une grande mobilisation en faveur de l’instruction. Il encouragea la multiplication des débats au sein des classes, quand il n’y aurait rien de plus urgent que de faire taire les élèves. À leur donner la parole sans cesse, on les entretient dans l’illusion qu’ils pensent. Or, pour penser, il faut posséder la langue, une langue qui se cultive au contact de la littérature. Et c’est précisément la mission de l’école que de leur apprendre à former, élaborer une pensée articulée, argumentée. Jusqu’à plus ample informé, contre l’obscurantisme, contre les théories du complot et autres discours de propagande, nous n’avons d’autres armes que l’apprentissage de la pensée complexe, de l’esprit critique qui ne se confond pas, contrairement à ce que certains professeurs ont tendance à croire, avec l’indignation. Il est l’art d’établir des distinctions, de séparer comme le dit son étymologie grecque.

    S’il avait un instant pris la mesure de ce qui nous arrivait, François Hollande aurait sans délai et avec la dernière énergie, remisé au placard la réforme du collège que son ministre de l’Education nationale devait présenter quelques semaines plus tard et qui jette la dernière pelletée de terre sur l’école comme instance de transmission, d’intégration et d’assimilation.

    Alexis Feertchak 24/06/2016 – Source : LeFigaro.fr

    http://www.polemia.com/berenice-levet-lecole-republicaine-a-implose-elle-nest-plus/

  • Crise à Radio Courtoisie: Mise en garde de Jean-Yves Le Gallou

    Le patron du bulletin de la réinformation explique :

    « En 2007, j’ai proposé de créer un bulletin de réinformation quotidien sur Radio Courtoisie. Henry de Lesquen en a accepté l’idée et m’en a confié la direction. Je l’en remercie. Comme je remercie la grande centaine de réinformateurs qui ont participé à cette aventure. En particulier, Carl Hubert qui me seconde aujourd’hui et Henri Dubost, animateur du Kiosque courtois.

    « La réinformation, c’est le refus du déni de réalité, c’est le respect des faits, rien que les faits mais tous les faits. Selon la belle formule de Charles Péguy dans Notre jeunesse : « Il est toujours difficile de dire ce que l’on voit, surtout il faut toujours, ce qui est plus difficile, voir ce que l’on voit. »

    « Aujourd’hui, je me dois de voir ce que je vois et de le dire :Radio Courtoisie traverse une crise profonde dont l’origine se situe dans des déclarations de son président – certes tenues à l’extérieur de la radio – mais qui n’ont pas été sans répercussions sur la vie de la radio.

    « Le bulletin de réinformation prendra ses quartiers d’été le 2 juillet. Je quitterai sa direction à la rentrée de septembre et cesserai toute collaboration à Radio Courtoisie si, d’ici là, Radio Courtoisie et sa direction ne sont pas apaisées et si cette grande famille n’est pas à nouveau rassemblée. « Comme toujours ma ligne de conduite sera la suivante : ni provocation inutile, ni soumission futile, ni invectives sur les personnes, refus de tout recours au point Godwin. Il faut savoir raison garder ! »

    Le Salon Beige

  • Le Journal du chaos de cette semaine

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  • L’IDÉAL SPARTIATE : L’APPEL DE TYRTÉE À L’ARETÉ

    La volonté qui fit de Sparte une grande nation vit encore dans les élégies de Tyrtée. Cette volonté eut pour résultat la formation d’un idéal sublime qui dura bien plus longtemps que la Sparte historique – à vrai dire, il n’a pas encore disparu – et dont les élégies en question constituent le témoignage le plus suggestif. La communauté spartiate, telle qu’elle est connue dans l’histoire à une époque éloignée de sa création, apparaît à beaucoup d’égards comme quelque chose de transitoire et d’excentrique. Mais l’idéal qui inspira ses citoyens et vers lequel tendirent avec une constance farouche tous les efforts, est impérissable parce qu’il représente un instinct fondamental de l’humanité.

    Bien que la société qui lui donna naissance nous semble avoir été partiale et bornée dans ses conceptions, cet idéal demeure vrai et valable. Platon lui-même qualifiait d’étroite l’idée que se faisait le Spartiate des devoirs et de l’éducation civiques, mais il ajoutait que ces vues, immortalisées par les poèmes de Tyrtée, forment une des bases immuables de la vie politique. D’autres, d’ailleurs, partagèrent cette opinion : en réalité, le philosophe exprima simplement l’impression générale de la Grèce au sujet de Sparte. Les Grecs de son temps n’approuvèrent pas sans réserve Lacédémone et son système ; tous, néanmoins, admirent la valeur de son idéal. Dans toute cité il y eut un parti favorable à Sparte, qui se faisait une idée très optimiste de la constitution de Lycurgue. La majorité ne partageait pas cette admiration sans bornes. Pourtant, la place réservée par Platon à Tyrtée dans son système éducatif demeura indiscutée chez les Grecs des périodes ultérieures et devint un élément indéfectible de leur culture. Il appartient à Platon d’arranger et de systématiser l’héritage spirituel de l’Hellade : dans sa synthèse, les divers idéaux que posséda le peuple grec furent objectivés et situés selon leur parenté réelle. Depuis lors aucune modification importante n’y a été opérée, et durant deux millénaires, l’idéal spartiate a gardé dans l’histoire la place que le grand philosophe lui avait assignée.

    Les élégies de Tyrtée ont une portée éducative très grande. L’appel qu’elles font au sacrifice personnel et au patriotisme des Spartiates était certainement justifié par les circonstances au moment où elles furent écrites – Sparte était alors près de succomber sous le poids écrasant de la guerre de Messénie. Mais elles n’auraient pu faire l’admiration des époques subséquentes, en tant qu’expression suprême de la volonté qui fit oublier aux Lacédémoniens leur intérêt personnel au profit de celui de leur patrie, si elles n’avaient conféré à cet idéal une valeur éternelle et immuable. Les modèles qu’elles proposent pour tous les actes et pour toutes les pensées des citoyens ne furent pas conçus en un sursaut momentané de patriotisme guerrier : ils formaient les fondements mêmes et la raison d’être du monde spartiate. Rien dans la poésie grecque ne montre plus clairement combien le poète trouve la source de son inspiration dans la vie de la société à laquelle il appartient. Tyrtée n’est pas un génie poétique individuel au sens moderne du mot ; il est la voix du peuple, il exprime la foi de tous les citoyens bien pensants. Voilà pourquoi il parle le plus souvent à la première personne du pluriel : « combattons ! » crie-t-il et « mourons ! ». S’il dit parfois « je », ce n’est ni pour donner libre cours à sa personnalité ni pour s’imposer en autorité supérieure (comme le pensèrent les Anciens qui le qualifièrent souvent de général) ; ce « je » est un « je » universel, celui que Démosthène appelait la « voix unanime de la patrie ».

    Il parle donc au nom de sa patrie, et dès lors, son jugement sur ce qui est « honorable » et « honteux » acquiert une portée et une autorité bien plus grandes que s’il s’agissait de l’opinion subjective d’un quelconque rhéteur. Même à Sparte, cette relation étroite entre la volonté de l’Etat et celle de l’individu pouvait devenir en temps de paix assez peu effective pour le citoyen ordinaire. Mais en période de crise, la force de l’idéal se manifestait brusquement, en un élan irrésistible : la redoutable épreuve d’une guerre longue et indécise – qui n’en était alors qu’à ses débuts – devait donner à l’Etat spartiate sa structure d’airain. A cette heure tragique, les Lacédémoniens éprouvèrent le besoin de disposer non seulement d’une direction ferme à la fois politique et militaire, mais encore d’une expression universellement valable des vertus nouvelles que la guerre, avec ses durs combats, venait de forger. Depuis des siècles les poètes grecs étaient les hérauts de l’areté ; un héraut semblable apparut alors en la personne de Tyrtée. Comme nous avons déjà eu l’occasion de le signaler, la légende déclare qu’il fut envoyé par Apollon – confirmation frappante de cette croyance bizarre qui veut que lorsqu’un chef spirituel est nécessaire, il survienne immanquablement. Tyrtée vint pour exprimer en une poésie immortelle les vertus civiques indispensables en période de danger national.

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  • Les Ducs et Duchesses de Bretagne (Philippe Tourault)

    Philippe Tourault est un historien spécialiste de la Bretagne et de l’Anjou.

    ducs-duchesses-bretagne-183x300.jpgCet ouvrage tente de dégager les lignes de force du pouvoir ducal de la Bretagne, du Xe au XVIe siècle.

    Après une naissance difficile en 936, à l’issue d’une éphémère monarchie de Bretagne et des invasions vikings, la période ducale se prolonge en Armorique jusqu’en 1532, soit près de six siècles. Elle connaît un âge ingrat jusqu’au début du XIIIe siècle, puis son affermissement et son rayonnement jusqu’aux années 1450, avant son apogée jusqu’à la fin de l’Etat breton dans la seconde moitié du XVe siècle et au début du XVIe siècle.

    Car c’est bien un Etat breton que forme le duché cent ans avant sa chute : l’ancienne Armorique est gouvernée par de véritables souverains qui développent, en toute indépendance, une idéologie et des structures de gouvernement adaptées. Mais l’auteur nous montre que cet Etat breton finit par attiser la convoitise de la France.

    Un ouvrage passionnant et un sujet méconnu et peu traité. 

    Les ducs et duchesses de Bretagne, Philippe Tourault, éditions Perrin, collection Tempus, 406 pages, 10 euros

    A commander en ligne sur le site de l’éditeur

    http://www.medias-presse.info/les-ducs-et-duchesses-de-bretagne-philippe-tourault/56765

  • Les racines chrétiennes dans la terre de France : découverte d'une église paléochrétienne à Nîmes

    Lu ici

    6a00d83451619c69e201b8d1fcf9a8970c-300wi.png"Une église paléochrétienne datant du Ve siècle a été découverte par une équipe de l'Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives) lors de fouilles menées sur le terrain d'un particulier qui habite dans le quartier des Amoureux. 130 tombes dont les datations s'échelonnent entre la fin de l'Antiquité et le haut Moyen-Age ont également été trouvées lors d'une campagne débutée le 30 décembre dernier et achevée le 22 avril dernier.

    L'imposante fondation d'une abside semi-circulaire de l'édifice religieux, bâti avec des remplois antiques monumentaux, a été mise au jour. L'intérieur de l'abside accueille de nombreuses sépultures. Au sein du cimetière, ont été découverts des sarcophages en plomb datant d'autour du IIIe siècle. Les autres tombes sont construites avec des pierres, tuiles ou bois. Il faudra de nombreux mois de travail avant la remise du rapport de fouilles probablement pour la fin de l'année prochaine".

    Vidéo ici.

    Lahire http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html

  • Salan (Jean-Paul Angelelli et Bernard Zeller)

    Jean-Paul Angelelli est né à Alger en 1934. Historien et journaliste, il est aussi vice-président de l’association des amis de Raoul Salan.

    Bernard Zeller, fils du général André Zeller, a fait carrière dans les industries spatiale et de défense. Il a présidé l’association des amis de Raoul Salan de 2004 à 2015.

    Salan-qui-suis-je.jpgCe livre interroge. Qui était Salan ? Rarement une personnalité a suscité autant de questions et de jugements abrupts et contradictoires. Sa réserve naturelle, son passage dans les services de renseignement, son manque d’aisance en public, ont pu y contribuer.

    Pour décrire qui était le général Salan, les deux co-auteurs de ce livre prennent soin d’éviter l’écueil qui consisterait à le réduire à son rôle de chef de l’OAS et à occulter le reste de sa vie.

    Or son existence s’écrit en parallèle de l’apogée, du déclin et de la chute de l’Empire français. Raoul Salan (1899-1984) est un homme qui a vécu, sur le front, la fin de la guerre de 1914-18 et, en prison, la fin de la « plus grande France « . Qui s’est battu pour son pays le long de l’Euphrate, qui a administré une province perdue du Haut-Laos, qui a vécu la défaite de 1940 et qui a participé à la victoire de 1945. Qui a assumé les plus lourdes responsabilités en Indochine et en Algérie avant de se dresser contre le gouvernement du pays qu’il avait servi plus de quarante ans au risque de sa vie.

    Suivre le destin de Raoul Salan, c’est aussi vivre l’Histoire de France au vingtième siècle. 

    On conseillera cet excellent ouvrage à ceux qui n’ont pas connu ces événements et qui voudraient se faire une opinion honnête sur cet officier qui ne peut laisser indifférent. 

    Salan, Jean-Paul Angelelli et Bernard Zeller, éditions Pardès, collection Qui suis-je ?, 128 pages, 12 euros

    A commander en ligne ici

    http://www.medias-presse.info/salan-jean-paul-angelelli-et-bernard-zeller/56902

  • Et la politique ?

    Les seules idées politiques que nous tenions pour consistantes se trouvent dans Catholica, la Revue universelle et surtout l’Action française dont la rédaction, notablement rajeunie, se montre combative, grâce à Aristide Leucate et François Marcilhac, lesquels s’expriment aussi sur le site Boulevard Voltaire de Robert Ménard, examinant toute chose dans la perspective du bien commun français dont la monarchie, si elle renaissait, serait le plus solide garant.

    Les livres et internet ont permis aux opinions divergentes de percer. Ensuite, certaines émissions de radio et de télévision destinées au grand public ont dû les relayer, car les médiatiques dominants ont compris qu’ils se couperaient d’une partie de leur public s’ils continuaient à dédaigner ou à passer sous silence quelques méchants sires. Pour de simples raisons de rentabilité, il n’était plus possible de bavarder entre bien-pensants.

    Bien que l’ambiance médiatique libérale-libertaire règne encore, ses serviteurs prennent peur, leur position est menacée. Il faut s’attendre à un durcissement de la caste en place, à l’élaboration de lois réprimant plus sévèrement le racisme supposé, le sexisme, l’homophobie, voire le spécisme, et limitant une liberté d’expression désormais infestée de « dérapages » incorrects.

    Nous avons parlé de « dissidents », mais il n’y a pas de commune mesure entre les résistants au communisme ou au nazisme et les rebelles d’aujourd’hui. Un Eric Zemmour court infiniment moins de risques que Soljénitsyne en son temps. Le traitement plutôt doux réservé aux élèves turbulents va-t-il durer ? Nul ne sait… [....]

    La suite sur la Ligue Vaudoise

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?Et-la-politique

  • Les idées à l'endroit - Pierre Manent :"Vers un nouveau contrat social avec les musulmans ?"