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  • Affaire Bourdin-Plenel : avons-nous un Président florentin ?

    Par Yves-Marie Adeline

    Yves-Marie Adeline a réagi hier dans Boulevard Voltaire à l'entretien télévisé du président de la République avec Jean-Claude Bourdin et Edwy Plenel. Il en dit avec talent, érudition, sagesse politique et lucidité ce que nous en avons nous-mêmes pensé et pas encore publié... Nous lui laissons la parole. Le sujet est d'importance car il touche au statut régalien - ou non - du Chef de l'Etat. Promoteur de ce dialogue sulfureux dans son essence, Emmanuel Macron, a-t-il prémédité une manoeuvre florentine pour discréditer ces deux journalistes ? Pourquoi pas ? Yves-Marie Adeline risque cette hypothèse. Une autre explication, il est vrai plus classique, est qu'il est bien difficile sous notre république de restaurer une verticalité du pouvoir qui dure plus d'une ou deux saisons. LFAR

    L’irrespect intentionnel des deux journalistes invités de l’Élysée fait glisser toujours plus la Ve République vers une forme plus authentiquement républicaine…

    Celle qui, à l’instar des Ire, IIIe et IVe, répugne à reconnaître un chef d’État. Son principe remonte au sacrifice rituel de Louis XVI, qui fit résonner notre mentalité primitive (tuer le père, tuer le lion, etc.), quand bien même l’on recouvrait cette pulsion primaire d’un semblant de civilisation par une forme caricaturale de procès.

    Depuis lors, en dépit d’une recherche continue d’arracher la France à ses deux racines fondatrices – le christianisme adopté sous l’empire de Rome et la figure du chef d’État imposée depuis César (qui tranchait avec la faiblesse des royautés gauloises étroitement dépendantes du pouvoir druidique) et continuée par les royautés franques -, la France, secouée dans la longue tempête politique du XIXe siècle, a toujours eu un chef d’État entre Bonaparte Premier consul – bientôt Napoléon 1er – et Napoléon III. On sait que le principal dessein de De Gaulle aura été de rétablir cette figure du chef, réalisant une sorte de mariage entre la royauté – un chef avec son Premier ministre, cette fonction étant typique d’une monarchie depuis le maire du palais mérovingien – et la république avec son fonctionnement oligarchique. Après lui, la présidence de la République, nourrie au lait républicain, a été mise à mal, d’abord dans la volonté affichée depuis Giscard de lui donner une apparence démagogique, puis dans le passage au quinquennat, qui transforme le Président en simple chef de majorité et repousse dans l’ombre le Premier ministre.

    Plus fondamentalement encore, certains politiciens de gauche souhaitent un retour en arrière, une « VIe République » qui rendrait le pouvoir à l’Assemblée. C’est aussi remettre en cause notre puissance nucléaire, qui n’est dissuasive que si l’ennemi sait qu’un seul homme peut décider de son usage sans en rendre aucun compte, ce pouvoir lui ayant été implicitement reconnu au moment de son élection.

    On reconnaîtra à M. Macron d’avoir tenté de rendre un peu de prestige à la fonction présidentielle, notamment en se tenant à distance des feux de la rampe médiatique, où l’on se brûle plus souvent que l’on brille. Mais alors, lui auquel on peut reprocher de n’avoir pas su s’entourer, mais certainement pas d’avoir du talent à revendre, quelle mouche l’a donc piqué pour inviter à sa table – en pleine crise sociale, qui plus est ! – le sulfureux M. Plenel, communiste affiché et manipulateur d’informations, et M. Bourdin, que son désir de revanche sociale conduit à humilier les personnalités politiques – exercice facile avec le personnel incompétent d’aujourd’hui ? Il entre aussi dans leur arrogance un appétit de puissance médiatique, démagogique par essence. Chacun se souvient de la désinvolture du journaliste Poivre d’Arvor demandant au Président Sarkozy s’il ne se sentait pas « petit garçon ravi de jouer dans la cour des grands ». L’insolent a confié plus tard « qu’il aimait cela, et que cela plaît aux téléspectateurs ». Depuis, c’est l’appellation même de « Président » qui écorche les lèvres de Plenel et Bourdin, au motif que, selon Plenel, M. Macron redeviendra demain un simple citoyen, que l’on est donc tous égaux : la distinction entre la fonction et son dépositaire, pensée depuis au moins la crise donatiste au IVe siècle, lui est inconnue. Quant à M. Bourdin, il se justifie ainsi : « Puisque nous étions sur le même plateau pour parler du pays, il n’y avait aucune raison d’être déférent. » Autrement dit, « le plateau » est le nouveau pavois… et les journalistes les nouveaux prétoriens.

    Quant à nous, quelle que puisse être l’opinion de chacun sur sa politique, on ne peut approuver cette humiliation d’un chef d’État par deux échotiers infatués d’eux-mêmes. À moins que M. Macron n’ait prémédité l’événement pour discréditer la caste journalistique ? Alors, nous aurions à la tête de l’État un nouveau florentin, comme l’était Mitterrand…  

    Ecrivain 
  • Lafautearousseau vous invite au colloque « Charles Maurras, l'homme de la politique » pour le 150e anniversaire de sa naissance

    L'on peut encore s'inscrire au colloque. Mais en urgence ! Voir modalités ci-dessous.  

    Le 150ème anniversaire de la naissance de Charles Maurras sera par ailleurs commémoré le lendemain dimanche 22 avril. Programme à venir.  

    Manifestations organisées conjointement par Lafautearousseau, la Fédération Royaliste Provençale, le Cercle de Flore et le Cercle Vauban. 

    Programme des interventions (9 h30 - 17 h 30)

    • Modérateur : Hilaire de Crémiers, directeur de Politique magazine et de La nouvelle Revue Universelle

    • Maurras, au-delà de la caricature, l’homme, par Christian Franchet d’Espérey, rédacteur en chef de La nouvelle Revue Universelle.

    • Maurras, l’homme de la liberté par Jean-Philippe Chauvin , professeur d’histoire.

    • Maurras, l’homme de l’ordre, par Stéphane Blanchonnet, président du comité directeur de l’Action française.

    • Maurras, l’homme de la paix par Bernard Pascaud, président de la Restauration Nationale.

    • Maurras, l’homme de la cité par Jean-Baptiste Donnier, professeur de Droit.

    • Maurras, l’homme de la Nation par Axel Tisserand, écrivain.

    • Maurras, l’homme de l’universel par Gérard Leclerc, journaliste et écrivain.

    • Maurras, l’homme du Roi par Jacques Trémolet de Villers, avocat et écrivain.

    PAF 10 € (Entrée et pauses-café) - Jeunes 6 € 

    Règlements par chèque à l'adresse suivante : Les Amis de Lafautearousseau, 48 rue Sainte-Victoire 13006 Marseille (Ordre Les Amis de Lafautearousseau).

    Ou par PayPal (ci-dessous) en spécifiant « Colloque »

    Contact

    lafautearousseau@outlook.fr

    T.  06 08 31 54 97

    http://lafautearousseau.hautetfort.com/archive/2018/03/12/pour-le-150eme-anniversaire-de-sa-naissance-lafautearousseau-6033437.html

  • Jean-Marie Le pen : génération Le pen (Interview Tepa pour patriote info)

  • Le cri d’alarme et la folle espérance de Raouldebourges

    raouldebourges-chroniques-revolution.jpg

    Décidément, cela devient la mode de passer du web au livre ! C’est le cas des Chroniques pour une révolution conservatrice de Raouldebourges, chroniqueur de la revue en ligne Mauvaise Nouvelle. L’auteur a été très marqué par sa lecture de Roger Scruton et sa promotion du conservatisme, il en a donc fait a posteriori le fil rouge de son livre. C’est depuis 2014, que Raouldebourges écrit pour Mauvaise Nouvelle, cette revue en ligne dont l’« anti-ligne éditoriale » est résumée dans le slogan : « entre glose outrancière de l’actualité et laboratoire du Verbe ».

    Pour Raouldebourges, notre monde condamné au modernisme à perpétuité produit des monstres à la chaîne : Gender, multiculturalisme, islamisme, virtualisation du travail, etc. et détruit tout ce qui permet à un homme d’être une personne souveraine : son enracinement, sa vie intérieure, sa quête d’un bien universel. Raouldebourges s’est choisi des héros : philosophes, intellectuels, écrivains, historiens… et pour les noms : Zemmour, Onfray, Rioufol, Sevillia, Delsol, Finkielkraut, Camus, Villiers, Houellebecq, Brague, Scruton, … Raouldebourges fait de l’exercice de la recension littéraire une passe d’armes digne des chevaliers. C’est effectivement par esprit chevaleresque, qu’il s’astreint à écrire chaque semaine inlassablement. Cet esprit est bien sûr au service de son pays. Il se fait passeur entre toute une famille de pensées et les lecteurs que nous sommes.

    Chroniques pour une révolution conservatrice se veut donc bien plus qu’une compilation extraite de Mauvaise Nouvelle, mais la bibliothèque de combat d’un homme résolu à ne pas laisser la page blanche à l’unique camp du bien, au politiquement correct. Raouldebourges dit qu’il est passé au livre dans un souci de transmission et dans une logique de thésaurisation. Transmission à ceux qui inévitablement auront à mener combat pour l’homme et la civilisation. Thésaurisation pour tous ceux qui, l’ayant croisé sur le web, veulent y revenir, tiennent à approfondir et ainsi mieux aiguiser leurs armes intellectuelles. Nous nous réjouissons donc que ce « saint patron de la Mauvaise Nouvelle » soit passé du web au livre. De la lecture de ses pages reste un sentiment d’alarme et d’urgence pour notre pays, et en même temps une folle espérance contractée au cœur dans cette bibliothèque de résistance.

    Jacques Leonor Croseta

  • Marion Maréchal-Le Pen et son académie de sciences sociales

    marion-300x170.pngL’ancienne benjamine de l’Assemblée nationale, député du Front national, se reconvertit en fondatrice d’université !

    Dès la rentrée prochaine, elle espère pouvoir ouvrir les portes de son « académie de sciences sociales ». Selon Lyon Mag qui a interrogé le conseiller régional frontiste Thibaut Monnier, proche de Marion Maréchal-Le Pen, elle aurait même déjà trouvé les locaux, à Lyon, dans le quartier de la Confluence, situé à deux pas du siège de la région Auvergne-Rhône-Alpes.

    Pour donner envie aux étudiants de s’inscrire, « une communication officielle est prévue courant juin », ajoute le site d’informations lyonnais. Cette école serait destinée, selon Marion Maréchal-Le Pen, qui avait dévoilé son projet dans les colonnes de Valeurs Actuelles en février dernier, à « détecter et former les dirigeants de demain qui auront le courage, l’intelligence, le discernement et les compétences pour agir efficacement dans la société et au service de la société ».

    Il n’est pas demandé aux futurs candidats de partager les idées de Marion qui souhaite son projet « libre et indépendant ». Mais ce sera « bien un projet politique », affirmait la principale intéressée il y a deux mois. « Nous souhaitons être le terreau dans lequel tous les courants de la droite pourront se retrouver et s’épanouir », ajoutait-elle, dans le but de donner « des armes intellectuelles, culturelles, juridiques, techniques et médiatiques à (nos) jeunes afin qu’ils soient le plus performant possible dans l’entreprise comme dans l’arène politique ».

    Le virus de la politique ne semble pas avoir quitté la petite-fille de Jean-Marie Le Pen !

    Francesca de Villasmundo

    http://www.medias-presse.info/marion-marechal-le-pen-et-son-academie-de-sciences-sociales/90531/

  • La revanche des Russes blancs

    Leurs parents en rêvaient. Eux l'ont fait. Cent après la révolution de 1917, ces descendants d'aristocrates sont venus s'installer et investir en Russie. Un pays à présent compatible avec leurs valeurs. 
    Daniil Tolstoï se souvient de son premier voyage en Russie, en 1989. Il avait 16 ans et accompagnait son père: «Une expérience mystique», sourit-il. Dans cette allée de bouleaux majestueux menant au domaine familial devenu musée, il accueille ses visiteurs. Nous sommes à 200 kilomètres de Moscou, à Iasnaïa Poliana, la maison légendaire où son arrière-grand-père, Léon Tolstoï, a rédigé ses chefs-d’œuvre «Guerre et Paix» et «Anna Karenine». C'est à quelques kilomètres, dans cette campagne russe hérissée de datchas et de forêts, que Daniil Tolstoï est en train d'élaborer un vaste projet d'agriculture biologique. «Nous sommes dans une région de terres noires, une des meilleures du pays. Un climat idéal: il y a assez de pluie et l'été est chaud. Il faut juste être rapide car le printemps est très court.»
    Les Tolstoï, les Romanov, les Apraxine... Ils portent des noms bien connus, sont descendants de l'aristocratie russe ou officiers de l'armée blanche. Tous ont été chassés par la révolution de 1917. En France, où bon nombre d'entre eux ont émigré, nous les appelons les Russes blancs et connaissons leur histoire, leur arrivée brutale. Eduqués mais désargentés - ils ont pour la plupart tout perdu avec le changement de régime -, ces réfugiés deviennent chauffeurs de taxi ou ouvriers d'usine. Au fil des générations, beaucoup se sont intégrés, ne parlent plus russe, ne sont jamais allés sur la terre de leurs ancêtres. Pourtant, cent ans après la révolution, une minorité devenue prorusse revendique ses origines depuis que la Russie n'est plus soviétique. 
    Comme pour Daniil Tolstoï, né en Suède, si le retour est empreint d'émotion - il raconte que c'est lors d'une réunion familiale sur le domaine et devant des champs délaissés à perte de vue que lui est venue l'idée d'une exploitation agricole -, il tient surtout à des raisons économiques. L'agriculture est en effet un secteur prioritaire pour le gouvernement Poutine. «Les standards sont bas mais le potentiel est énorme. La Russie sait rattraper son retard très vite quand elle le désire», note le descendant Tolstoï. Pour profiter de ce développement, il vient d'acquérir 500 vaches, des holsteins réputées pour leur lait, et 7000 hectares de terrain, sur lesquels il entend cultiver céréales et fourrages et produire de A à Z pain, fromage, charcuterie... Un épais dossier sous le bras, il espère des subventions du gouvernement, une perspective facilitée par son nom bien connu et ses relations.
    Se lancer dans une aventure et faire fortune dans la nouvelle Russie, comme Rostislav Ordovsky-Tanaevsky. Parmi les descendants de Russes blancs revenus au pays, c'est sans doute la plus belle réussite économique. Et, bien que le businessman vive entre Londres et Moscou, il revendique son héritage russe avec vigueur et fierté. En témoigne l'arbre généalogique aux branches chargées d'ancêtres et les photos de ses aïeux, aux murs de son spacieux bureau, où il nous reçoit, intarissable. Son arrière-grand père était gouverneur de la région de Tobolsk, là où l'entourage du dernier tsar est exilé en 1917, avant d'être assassiné à Iekaterinbourg. Après la révolution, les siens quittent la Russie, d'abord pour la Yougoslavie, puis le Venezuela, après la Seconde Guerre mondiale, «afin d'être le plus loin possible de Staline». 
    En 1984, Rostislav Ordovsky-Tanaevsky travaille pour Kodak. Il est invité à un festival de cinéma à Moscou. Là, il constate la difficulté de se nourrir à l'extérieur. «Devant certains restaurants, il y avait cette pancarte absurde 'Fermé à l'heure du déjeuner.' Il fallait insister pour être servi, c'était incroyable!» Quelques années plus tard, il s'installe dans la capitale russe, ouvre son premier établissement et développe des chaînes de restauration rapide: de la cuisine d'inspiration espagnole, suisse ou italienne qui rencontre un vif succès à l'heure de l'ouverture du bloc communiste. «A l'époque, c'était l'anarchie. Tout ce qui n'était pas interdit était possible. Les lois relatives au business des étrangers se résumaient à trois pages à peine.» Au souvenir de ces années-là, il sourit. 
    Sourire, il a de quoi : aujourd'hui, Rostislav Ordovsky- Tanaevsky est propriétaire d'environ 200 restaurants. Il est aussi actif dans la communauté des Russes blancs et organise tous les ans une réception, observant les fluctuations des différentes vagues d'émigration. «Nous, les Russes blancs, avons été élevés avec une image de la Russie souvent idéalisée. A la maison, le premier toast était porté à la Russie et il y avait toujours cette conviction, complètement naïve, qu'on reviendrait, un jour, libérer le pays.» 
    Christopher Mouravieff-Apostol réfute toute idée de nostalgie - trop sombre à son goût -, il évoque plutôt un lien émotionnel avec le pays d'origine. Depuis une quinzaine d'années, cet homme d'affaires et mécène suisse s'est lancé dans une longue aventure: il a restauré le palais du XVIIIe siècle de ses ancêtres et en a fait un lieu d'exposition artistique. Rapidement, il a été soutenu par les médias russes, qui ont adoré son histoire, et aussi, de loin, par l'ancien maire de Moscou, Iouri Loujkov, limogé en 2010 pour corruption. Dans le palais moscovite où il est de passage, Christopher Mouravieff-Apostol arrive, souriant, démarche imposante, s'excuse du retard, ôte son col en fourrure, répond à sa femme brésilienne au téléphone avant de s'exprimer en français ou en anglais avec une maîtrise des langues typique du milieu. Né au Brésil, il est issu d'une famille réputée pour s'être soulevée contre l'empereur, en faveur d'une monarchie constitutionnelle, avec le mouvement des décembristes, en 1825.
    Après la prise de pouvoir par les bolcheviques, sa famille s'exile, d'abord en France puis à Genève. En 1991, elle est invitée par un groupe d'échanges culturels à visiter la Russie, sur les traces de ses ancêtres. «Ils voulaient mettre en place un processus de réconciliation, rappeler les Russes blancs au pays. Bien sûr, mon père avait peur de revenir, mais en même temps il était enthousiaste.» Christopher tombe sous le charme. «J'ai grandi au Brésil, où l'on trouve peu d'indices du passé, et j'ai été fasciné ici par l'attachement à la mémoire.» Il travaille alors dans la finance des pays émergents et oriente sa carrière vers la Russie pour pouvoir y retourner plus souvent. 
    A cette époque, l'ancien palais moscovite, transformé en musée des décembristes sous l'URSS, tombe en ruine. «Il y avait toujours un directeur, un adjoint, une dame à la garde-robe. C'était pour faire bonne figure car en vérité personne n'était payé. Des banques et des casinos lorgnaient sur le bâtiment. J'ai effectué les travaux d'urgence, et heureusement mon projet a été soutenu, d'abord parce que je voulais créer un lieu ouvert au public et ensuite parce que les Mouravieff-Apostol jouissent ici d'une image romantique, cultivée sous l'URSS: nous sommes des décembristes, des révolutionnaires, avant d'être des aristocrates. » Reste néanmoins un point à régler dans son affaire: il n'a obtenu qu'un bail de quarante-neuf ans, le palais restant la propriété de la ville de Moscou, qu'il aimerait bien prolonger, ad vitam aeternam. Il rit, plutôt amusé: «Tout ça n'est pas du tout rationnel. Souvent ces histoires de Russes blancs sont un peu austères, sombres ou nostalgiques, mais ici c'était surtout l'occasion de renouer avec mes racines à travers une belle aventure, quelque chose de romantique.»
    Plus jeune, la quarantaine, David Henderson-Stewart s'est investi lui aussi à corps perdu dans un business romantique. Cet Anglais, Russe blanc d'origine, a relancé la fameuse marque de montres soviétiques Raketa, «fusée» en français. En 2010, il rachète l'ancienne manufacture impériale, fondée par Pierre le Grand en 1721 à Peterhof, le Versailles russe, situé à une vingtaine de kilomètres de Saint-Pétersbourg. Nationalisée sous l'URSS, elle était devenue usine d'Etat et fabriquait des montres, en l'honneur de Youri Gagarine notamment. Après les années 1990, elle tombe en ruine, et la racheter est un pari hasardeux. Pourtant David et son associé, un Français d'origine russe, Jacques von Polier, le défendent avec conviction : «En 2010, tout le monde nous a dit que c'était de la folie. Le made in Russia ne faisait pas rêver. Les gens voulaient porter une montre suisse. Les Russes d'ici n'auraient jamais fait cela. De notre côté, c'était différent, souligne David. Le projet nous touchait. Nous sommes russes dans le sens où nous sommes patriotes mais nous possédons cette sensibilité française du luxe et de la marque.» Jacques von Polier, ici avec un artisan, a relancé les ateliers Raketa. Leur dernier modèle de montre célèbre le centenaire de l’avant-garde russe.
    Depuis, la petite Rolex russe, comme on la surnomme parfois, a effectué des tours de cadran et attiré du beau monde : le célèbre mannequin Natalia Vodianova prête son nom à un modèle, ainsi qu'un couple de danseurs vedettes du Bolchoï, le réalisateur serbe Emir Kusturica ou le prince Rostislav Romanov, de la lignée du dernier tsar. A tout juste 30 ans, le jeune homme, artiste peintre, vit entre la Grande-Bretagne et la Russie et participe au comité d'administration de l'entreprise. 
    Alors bien sûr, devant le mélange des genres, une question s'impose: comment des descendants d'aristocrates peuvent-ils soutenir une marque soviétique ? Dans le bureau de design, un grand appartement en plein coeur du centre-ville cossu de Moscou, la réponse est réfléchie: «Nous reprenons l'esthétique épurée de l'avant-garde russe. Ce courant artistique a conquis le monde, bien plus que les idées bolcheviques, défend avec bagou Jacques von Polier, qui adore parler de son travail, sourire charmeur et tee-shirt Raketa à l'appui. En revanche, nous refusons de véhiculer la nostalgie de l'URSS. Nous avons banni les symboles politiques de nos montres : Lénine, la faucille et le marteau.» 
    Car l'histoire demeure sensible. Dans l'opinion publique, les Russes blancs sont souvent perçus comme des étrangers, ayant fui le pays aux pires heures. «Pendant soixante-dix ans de communisme, la guerre civile est restée un sujet tabou. L'armée blanche a été décrite comme une traîtresse. Et les livres d'histoire ont peu changé leur récit», déplore David Henderson-Stewart. Avec sa femme Xénia Yagello, fille d'un prêtre de la cathédrale orthodoxe Saint-Alexandre-Nevsky, rue Daru à Paris, ils ont milité pour l'ouverture d'une exposition sur l'armée blanche. Elle est accueillie au sein du monastère moscovite de Novospasski, connu pour abriter la crypte des Romanov. 
    Ce soir-là, un petit groupe de Russes blancs s'est réuni chez Xénia et David. Ils préparent une cérémonie religieuse et se sont retrouvés pour travailler le chant. A la maison, on dîne de bortsch et de hareng en fourrure, deux plats typiquement russes. Les enfants, chignons parfaits sur cheveux blonds, jouent de la balalaïka et de la domra, deux instruments de musique traditionnels. On chante aussi d'anciens hymnes militaires. «La musique est un pilier de l'émigration, elle permet de conserver la langue», appuie Xénia, qui confie «adorer la Russie» et avoir fait le choix de s'y installer pour donner une éducation locale à ses enfants. «Ici, ils reçoivent un apprentissage artistique, ouvert, beaucoup plus créatif et sérieux. Mais attention, se reprend-elle soudain, ce n'est pas non plus une idylle, c'est compliqué parfois.» 
    Une chose est sûre : ces Russes blancs, faute d'avoir retrouvé le paradis perdu de leurs ancêtres, se reconnaissent bien dans les valeurs de la Russie d'aujourd'hui : la religion et le patriotisme. «Poutine est un vrai orthodoxe. Il va à l'église, et les Russes blancs apprécient cela. Il a également redressé son pays, lui a redonné sa place au niveau international, même si ses dérives autoritaires peuvent déplaire», estime Rostislav Ordovsky-Tanaevsky au nom de la communauté. 
    Chez Raketa, on est également de cet avis. « Depuis Poutine, la population est fière à nouveau, et nos montres vont dans ce sens-là. Le contexte politique actuel, avec la montée du patriotisme, joue en notre faveur, c'est sûr.» En témoigne un de leurs modèles récents : la montre Crimée 2014, qui célèbre «l'unification de la Crimée avec la Russie». Malgré les discours, peu sont allés jusqu'à prendre la nationalité russe, comme Vladimir Poutine le leur a proposé officiellement. La plupart font des allers-retours avec leur pays de naissance. «Je reste français, la France nous a tout donné lorsque nous sommes arrivés», confie l'un d'eux. D'autres évoquent les avantages sociaux à ne pas devenir russes ou les difficultés administratives à en faire la demande. «C'est une telle paperasse. En fait, il n'y a rien de facilité !» dénonce un autre. Surtout, la méfiance demeure. «Je m'interroge: puis-je vraiment faire confiance au gouvernement russe?» questionne Rostislav Ordovsky-Tanaevsky, dans un sourire un peu désolé. 
    Reste à savoir comment se dérouleront les commémorations de 1917. Une question épineuse pour beaucoup, même si Vladimir Poutine a laissé entendre qu'il voulait la réconciliation. De son côté, Raketa a déjà prévu son modèle: une montre noire dont le cadran est traversé d'une goutte de sang. Elle a été dessinée par le prince Rostislav Romanov. 

  • RÉINFO, MAGAZINE D'INFORMATION DU PARTI DE LA FRANCE DU 9 AVRIL 2018

    Réinfo, journal d’information bimensuel du Parti de la France, présenté par Sylvie Collet.

    Au sommaire de ce numéro : 
    • La réforme de la SNCF: Une dette colossale, un statut très éloigné de l'esprit de solidarité nationale et un service public où l'on a parfaitement bien identifié le public mais où l'on cherche encore le service. 
    • Mortalité médicale: Le rapport du Conseil national de l'Ordre des Médecins recense plus de 1000 cas d'agression commises contre les médecins pour l'année 2017. Les soldats du feu ne sont pas en reste. Nous reviendrons sur l'échec de la politique de la ville. 
    •Réformes constitutionnelles :Elles sont pleines de bonnes intentions. Mais sans une révolution des mentalités des élus, ce n'est pas gagné. Et oui faut-il le rappeler, l'élu doit servir son pays et non se servir. 
    • Suite de l'affaire Skrypal.Un petit rappel chronologique des faits et un peu de lumière sur les intérêts en jeu, juste pour rappeler que la diplomatie est un vrai métier qui exige un vrai talent et ne pas oublier qu'il y va toujours de l'intérêt national. 
    Et pour finir, l’actualité du parti de la France et les prochains rendez-vous du mouvement.