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Législatives : PS, après la défaite, la banqueroute ? - Journal du mardi 13 juin 2017
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Élections législatives : La désertion – par Guy Rouvrais
La fracture béante entre la France d’en bas et celle d’en haut, entre les bénéficiaires de la mondialisation et ses victimes, n’a pas fondu au soleil de juin, pas plus qu’elle n’a disparu en mai avec l’élection d’Emmanuel Macron. C’est la sociologie électorale qui le dit : ceux qui ont voté pour lui le mois dernier et dimanche pour ses candidats, ce sont ceux que les économistes et les têtes chercheuses du marketing et de la publicité appellent les CSP +, les bobos intégrés, comblés par la libéralisation de notre économie, jouissant de confortables revenus. En Marche leur en promet davantage.
Ils sont donc en pâmoison devant le nouveau président, ils chantent le « formidable succès » de ce premier tour. Mais les autres existent toujours, les exclus, les oubliés, les laissés pour compte de la mondialisation, qui souffrent de la condescendance des prétendues élites dont le macronisme est le dernier avatar. Ce sont ceux-là qui sont restés chez eux dimanche, aboutissant à ce triste record d’abstention sous la Ve République, plus de 51 %.
Dans ces conditions, il est indécent que les dévots du gourou Macron célèbrent une victoire bâtie sur la désertion, l’écœurement, le rejet d’un électeur sur deux. Le chef de l’Etat s’est pourtant déclaré « heureux » de ce résultat. Mais comment peut-il l’être quand tant de ses compatriotes ont dit, en boudant les urnes, combien ils étaient malheureux ? Que les vainqueurs n’oublient pas que leur quelque 32 % ne représentent finalement que 15 % des électeurs inscrits, la « majorité » est un colosse aux pieds d’argile.
Que tant de Français ne se sentent plus concernés par le gouvernement, et donc le destin de leur pays, parle plus haut et plus fort que les clameurs triomphalistes des macronistes. Pour combien de temps les premiers se contenteront-ils de cette protestation silencieuse ? Car cette indifférence dissimule aussi de la colère. Si elle ne peut pas s’exprimer à l’Assemblée nationale, c’est dans la rue qu’elle le fera, et nul ne sait jusqu’où elle peut aller quand ce qui, dans le domaine fiscal et social, était projet deviendra réalité, lorsque la majorité des godillots – et des escarpins – d’Emmanuel Macron auront voté sans barguigner tout ce qu’il leur présentera.
Sans le Front national, cette abstention eût été encore plus grande. Car ses détracteurs doivent au moins lui reconnaître ce mérite civique d’avoir ramené aux urnes les milieux populaires qui en étaient détachés. C’est un combat de chaque instant qui n’est pas toujours gagné. Quand le découragement gagne même ceux-là, alors le FN en fait les frais. Son score n’égale pas celui de Marine Le Pen, mais il y a toujours eu ce décalage à la baisse entre le scrutin présidentiel, très personnalisé, et le législatif où les candidatures sont éclatées, sachant qu’il y a une prime aux sortants, or le Front national n’en avait que deux. Il en aura sans doute davantage, ne serait-ce que Marine Le Pen dans sa circonscription. Cela dit, il reste possible pour les patriotes d’arracher des sièges encore en balance à condition que, devant la déferlante Macron, ceux qui refusent une Assemblée nationale sans opposition crédible se mobilisent immédiatement avec ardeur pour que la voix des oubliés puisse résonner fortement sous les voûtes du Palais Bourbon.
Guy Rouvrais
Article publié dans le quotidien Présent daté du 13 juin 2017
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David Rachline : “Nous allons nous faire entendre pendant le second tour”
Le sénateur-maire Front national de Fréjus était le premier invité de l’édition spécial de RTL Matin le 12 juin. Il répondait aux questions d’Yves Calvi.
David Rachline estime notamment que le mode de scrutin actuel “ne permet pas de représenter les Français” et milite pour l’introduction de la proportionnelle.
La réalité, c’est que par rapport à 2012, nous passons de 60 seconds tours à 120. Nous résistons beaucoup mieux que les autres, il y a un effondrement des Républicains et du Parti socialiste.
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Les députés les plus mal élus de toute l’histoire parlementaire française
Cette abstention record est un nouveau signe de la recomposition politique en cours, qui n’est certainement pas achevée.
Les premiers signes étaient clairs : l’abstention, pour ce premier tour des élections législatives, serait forte et battrait tous les records. Les premiers chiffres venant de l’outre-mer, qui votait en avance, étaient vertigineux : 74 % d’abstention en Martinique, en hausse de 7 points par rapport à 2012 ! Et, à midi, la participation au niveau national n’était que de 19,2 %, en baisse aussi par rapport à 2012, où elle atteignait 21 %. Plus forte chute encore à 17 h, où elle n’atteignait que 40 %, au lieu de 48 % en 2012 ! C’est un effondrement historique qui a abouti à une participation inférieure à 50 %. Du jamais vu pour des élections législatives générales, non seulement depuis 1958, mais même depuis l’instauration du suffrage universel en 1848 ! Il y a là quelque chose de vertigineux. La République en marche, c’est aussi cela.
Les conséquences de cette abstention massive sont nombreuses. D’abord, à très court terme, cela signifie qu’il y aura très peu d’élus au premier tour puisqu’il faut rassembler plus de 50 % des exprimés, mais aussi 25 % des inscrits.
Quasiment impossible avec une abstention forte. Mais cela réduit aussi considérablement l’hypothèse de triangulaires pour le second tour, puisqu’il faut que le 3e candidat, pour se qualifier, atteigne 12,5 % des inscrits.
Les raisons de cette abstention massive sont connues : monopolisation de l’intérêt par la présidentielle, sentiment que tout est joué avec des sondages annonçant une majorité écrasante pour le parti du Président, perte des repères des électeurs troublés par la déconfiture des partis traditionnels.
Certes, la baisse de la participation aux élections législatives, qui n’a jamais plus atteint la barre des 80 % depuis 1978, est un phénomène ancien et continu, depuis 25 ans : 69 % en 1993, 68 % en 1997, 64 % en 2002, 60 % en 2007 et 57 % en 2012. Mais cette nouvelle descente est une alerte démocratique d’une tout autre nature.
Cette abstention record est un nouveau signe de la recomposition politique en cours, qui n’est certainement pas achevée. Après l’élection de M. Macron et la transformation politique qu’il a engagée, elle traduirait un attentisme, voire une méfiance, pour ce nouveau pouvoir, que les Français laisseraient s’installer, mais sans le soutenir. Que pèserait une majorité pléthorique de 400 députés, comme les sondages l’annoncent, si ces 400 députés sont élus avec une abstention de plus de 50 % ?
Cette situation peut être transitoire, le temps que la recomposition aille à son terme, qu’une ou des oppositions structurées émergent. Mais l’incapacité de la droite parlementaire à incarner cette opposition sous le quinquennat calamiteux de Hollande a montré que cela n’était pas automatique. Le nouveau pouvoir pourrait se réjouir de ce règne sans partage qui lui semble promis.
Mais, en cas d’échec, d’événement grave, de crise de confiance, un parlement élu dans les conditions de cette recomposition, sans adhésion populaire massive, et sans opposition clairement identifiée et susceptible d’offrir une alternance, serait certainement très fragilisé.
http://www.bvoltaire.fr/deputes-plus-mal-elus-de-toute-lhistoire-parlementaire-francaise/
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Une nouvelle page à écrire pour Sens Commun
La forte mobilisation de Sens Commun derrière la candidature de François Fillon pour l'élection présidentielle a eu l'issue que nous connaissons. Le parti présentait 6 candidats hier pour les législatives sous l'étiquette "Les Républicains". Parmi eux, seul un candidat a réussi à se hisser au deuxième tour :
- Charles d'Anjou, candidat investi par LR dans la 10e circonscription de Seine-Maritime, a été éliminé dès le premier tour après avoir recueilli 16,56% des voix.
- Maxence Henry est en ballottage défavorable dans la 2e circonscription de Maine-et-Loire après avoir recueilli 12,09% des suffrages. Il fera face à Stella Dupont, candidate de La République en marche, qui a réuni... 45,93% des voix.
- Sébastien Pilard, cofondateur de Sens commun, est éliminé dès le premier tour dans la 2e circonscription de Loire-Atlantique avec 13,95% des voix.
- Anne Lorne était candidate dans la 1re circonscription du Rhône. Peine perdue. Elle est éliminée dès le premier tour avec 12,47% des suffrages.
- Hayette Hamidi n'avait aucune chance. La candidate n'a recueilli que 6,78% dans la 2e circonscription de Seine-Saint-Denis.
- Pierre Saulnier est éliminé dès le premier tour dans la 3e circonscription des Pyrénées-Atlantique.
Sauf énorme surprise en Maine-et-Loire, Sens Commun n'aurait donc pas de député.
La question se pose du rôle qu'ils pourront jouer dans le cadre de la recomposition de la droite qui devra se faire au-delà des partis.
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Edition Spécial législative : Macron marche sur l'assemblée - Journal du lundi 12 juin 2017
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La marée et le ressac
Les superlatifs étaient de mise hier chez les commentateurs politiques pour analyser la véritable raz-de-marée de députés estampillés La République En Marche (LREM) qui se dessine à l’issue de ce premier tour des élections législatives, ce dont s’est immédiatement félicitée officiellement la chancelière allemande Angela Merkel. Selon la fourchette admise par les différents instituts de sondage, l’alliance LREM (28,21%)-MoDem (4,11%) devrait emporter entre 400 et 455 des 577 sièges (la majorité absolue est de 289 élus) et tous les ministres macronistes engagés dans la bataille sont en situation de l’emporter au second tour. Y compris Richard Ferrand dans le Finistère malgré la très lourde affaire dite des Mutuelles de Bretagne. Mais en politique il y a du vent ou il n’y en a pas, et quand il souffle… Quelle opposition au macronisme dans ce contexte? Les mêmes sondeurs prévoient entre 80 et 132 sièges pour le conglomérat LR (15,77%) -UDI (3,03%), de 15 à 40 sièges pour la coalition PS (7,44%) -PRG (0,47%) -EELV (4,30%) -DVG (1, 60%) , de 10 à 23 sièges pour FI (11, 02%) et le PC (2,72%) , de 1 à 10 sièges pour le Front National (13,20%).
Une chambre qui donnera comme à chaque fois sous la cinquième république une majorité pour gouverner au président nouvellement élu mais qui s’annonce sans sursaut des électeurs particulièrement monocolore. D’autant que de très nombreux candidats LR-UDI ont fait savoir qu’ils étaient macrono-compatibles et ne s’opposeraient pas fermement à la politique de la majorité présidentielle. La force d’attraction de LREM apparaît si forte que même des figures de la droite progressiste mais non adoubées par le parti d’Emmanuel Macron sont en grande difficulté. C’est le cas de Nathalie Kosciusko-Morizet qui dans la deuxième circonscription de Paris, jugée imperdable, arrive très loin derrière le candidat de LREM et devrait être battue dimanche prochain. L’ex secrétaire d’Etat aux droits de l’homme de Nicolas Sarkozy, Rama Yade, a été elle éliminée sèchement dès le premier tour dans la 1e circonscription du Loir-et-Cher, avec 5,65% des voix…
Une droite qui sous sous la conduite de François Baroin ne parvient plus a dissimuler l’incapacité grandissante de ses membres à vivre-ensemble tant les écarts idéologiques apparaissent béants, toutes choses que les basses eaux électorales révèlent au grand jour… Henri Guaino, candidat malheureux dans la même circonscription que NKM, qui a annoncé hier soir qu’il mettait fin à sa carrière politique, l’a dit sans ambages sur le plateau de BFMTV. Il a conspué un électorat bourgeois-bobos à vomir , le cercle de la raison centriste et LR, parti- ramassis selon lui de menteurs, d’affairistes, d ‘opportunistes.
Certes la droite libérale n’est pas (encore?) dans l’état de quasi mort clinique du Parti socialiste qui, comme elle, s’achemine vers son score le plus faible aux législatives de toute l’histoire de la cinquième république. La liste des éliminés du premier tour, avec des scores très souvent inférieurs à 15%, est impressionnante en ce qu’elle compte beaucoup de figures de ce parti: son premier secrétaire Jean-Christophe Cambadélis, élu depuis 1997 dans la 16e circonscription de Paris, totalise moins de 10% des voix; le porte-parole du PS Razzy Hammadi, les ex ministres de Lionel Jospin, Elisabeth Guigou et Jean Glavany ; l’organisateur de la primaire à gauche, Christophe Borgel; la présidente de la commission des affaires sociales à l’Assemblée, Catherine Lemorton; les très hargneux antifronstistes Pascal Cherki et Eduardo Rihan Cypel…
Sans candidat macroniste contre lui, Manuel Valls qui a bénéficié dans son fief d‘Evry de l’ estampille majorité présidentielle à encore ses chances de l’emporter dimanche prochain tout comme les ex ministres Stéphane Le Foll et Marisol Touraine. Mais ce sont des exceptions. Outre la disparition du PS de zones entières de la carte électorale, les ex-membres de gouvernements du quinquennat de François Hollande engagés dans la bataille sont en général éliminés dès le premier tour: le candidat à la présidentielle Benoit Hamon; Kader Arif, ex-ministre des Anciens combattants; Pascale Boistard, ex-titulaire du portefeuille des Personnes âgées; Cécile Duflot et son successeur à l’Ecologie Emmanuelle Cosse; Christian Eckert, responsable du Budget; l’éphémère ministre de l’Intérieur, Mathias Fekl; Aurélie Filippetti, ancienne ministre de la Culture; François Lamy, ex-ministre délégué à La Ville; Juliette Médael, ex-secrétaire d’Etat chargée de l’Aide aux victimes; l’ex-secrétaire d’Etat Ségolène Neuville…
L’ancienne très décriée ministre de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem et le dernier ministre de la Justice de François Hollande, Jean-Jacques Urvoas, ont passé la barre du second tour mais sont très nettement distancés par les candidats de LREM, sauf miracle ils devraient mordre la poussière le 18 juin.
Le Front National pour sa part se retrouve avec 110 candidats qualifiés au second tour contre 61 en 2012. Mais l’absence de triangulaires et les consignes de désistements réciproques entre partis du Système au nom du front républicain données par François Baroin, les dirigeants du PS, de l’UDI, du MoDem, Mélenchon, laissent augurer un faible nombre d’élus. Certes, le FN sera présent dans 10 des 11 circonscriptions du Pas-de-Calais et Marine avec 46,02% des suffrages (elle augmente son score de la présidentielle dans sa circonscription) prend un net ascendant à Hénin-Beaumont. Si la mobilisation s’amplifie si le sursaut se matérialise dimanche prochain, Louis Aliot, Bruno Bilde, Sébastien Chenu, Gilbert Collard, José Evrard, Hervé de Lépineau, Emmanuelle Ménard (femme du maire de Béziers soutenue par le FN), Florian Philippot, Stéphane Ravier ont notamment encore des chances de l’emporter.
Bien sûr, chacun aura constaté avec Bruno Gollnisch, outre l’abstention record (51,29%, contre 42,78% du premier tour de 2012, déjà historiquement élevé), toutes les tares antidémocratiques de ce Système. Le fait que les 40 % d’électeurs de Marine et de Mélenchon du 23 avril dernier n’auront qu’une poignée de députés pour les représenter, faire entendre leur voix. Le fait que le parti de M. Macron (6 390 871 voix sur 47 571 319 d’électeurs inscrits et 23 170 977 votants) avec à peine le double de suffrages ce dimanche que le FN, devrait obtenir en toute hypothèse 70% des sièges alors que 68 % des électeurs qui se sont déplacés ce dimanche n’ont pas voté pour l’attelage LREM-MoDem, la droite LR-UDI héritant de la quasi totalité du reste. Le fait que troisième parti en terme de voix, le FN devrait avoir beaucoup moins de députés que le PS et la FI.
Vivre c’est choisir, et les électeurs, souvent par résignation, découragement, ont choisi de donner les pleins pouvoirs écrasants aux libéraux-libertaires, aux bruxellois, aux immigrationnistes. Mais il serait trop facile, même si cela est tentant, de blâmer les Français. Il est évident que nous n’avons pas réussi à mobiliser les 7,7 millions d’électeurs qui se sont portés sur la candidature de Marine au premier tour de la présidentielle et encore moins les près de 11 millions qui ont voté pour elle au second. Le FN avec 2 990 613 voix, engrange même moins de suffrages qu’au premier tour des législatives de 2012. De tout cela il faudra tirer un bilan constructif, opérationnel et une analyse franche et lucide.
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Record historique de l'abstention
Derrière l'écrasante victoire du parti d'Emmanuel Macron, il faut souligner que les Français ne sont pas emballés. L'abstention dépasse les 50%, ce qui est historique :
Voici les résultats officiels du 1er tour :
http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html
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LREM : la République n’est pas un régime politique mais une idéologie, un processus progressiste
De Joël Hautebert dans L'Homme Nouveau :
"Depuis la victoire d’Emmanuel Macron à l’élection présidentielle, « En marche ! » est devenu « La République en marche ». D’aucuns penseront que ce modeste changement ne mérite pas que l’on s’y attarde. Il s’agirait d’un toilettage résultant du passage d’un simple projet en vue d’une élection à sa mise en œuvre politique, une fois le suffrage remporté. L’opinion inverse s’impose pourtant, dans la mesure où cette légère modification du nom accentue le marqueur idéologique.
Ce choix par l’équipe présidentielle nous rappelle que la République n’est pas un régime politique mais une idée, transformée en idéologie par l’affirmation d’un processus progressiste dans lequel elle se coule.
La République…
Ce n’est pas nouveau, nous le savons depuis longtemps, la République en France n’est pas à proprement parler un régime politique. Certes, le mot « république », « res publica » (chose publique) a longtemps revêtu deux sens. Au sens large, il a correspondu plus ou moins à la communauté politique, tandis qu’au sens restreint et plus rarement employé, il a désigné effectivement un type de régime politique. Nous savons depuis l’Antiquité grecque qu’il existe trois sortes de régimes politiques, le gouvernement du plus grand nombre, celui d’un seul ou d’une minorité. Un régime politique se définit par la forme constitutionnelle que prend la communauté politique, afin de lui offrir stabilité et permanence dans le temps. Personne n’aurait eu l’idée d’évoquer la république romaine ou la monarchie capétienne « en marche ». Quant à l’emploi plus large du mot « république », il s’est limité à la seule démocratie depuis le XVIIIesiècle et plus nettement encore depuis la Révolution. Il y a là une ambiguïté, inhérente au fait que la Révolution a introduit une forme politique démocratique particulière destinée à mettre en œuvre l’émancipation de tout ordre que l’homme n’a pas créé.
Parfaitement dans la lignée de la pensée politique moderne, la République telle que l’entend Emmanuel Macron ne désigne pas un type de constitution, mais une construction intellectuelle, une idée. C’est pourquoi, on lui attribue des valeurs propres, c’est-à-dire un ensemble de principes qui ne s’appuient en aucun cas sur des données extérieures au système, comme l’ordre naturel des choses, mais au contraire, au moins en apparence, sur la volonté des citoyens souverains. Notre personnel politique use et abuse des références aux « valeurs de la République », à la morale républicaine, expressions généralement rattachées au contrat (ou pacte) social (ou républicain). On observe par conséquent un lien étroit entre ce pacte et les principes de la république, suggérant par là que la société fondée sur l’assentiment de tous et non sur la dimension politique naturelle des hommes génère ses propres valeurs. Puisque la dimension naturelle disparaît, l’usage du mot « France » pour désigner la nation et la patrie devient logiquement facultatif. Ainsi, la République assume seule, d’une part, la communauté politique entendue comme créatrice d’un ordre nouveau et, d’autre part, les principes supposés définis, choisis, par cette même communauté unie, non par le sang et la terre, mais par l’exercice de la volonté émancipée du vrai et du juste. Le nom du parti présidentiel n’a donc rien d’innocent, de la part d’un homme dont le livre/programme édité pendant la campagne s’intitule « Révolution ».
Enfin, cette République-idée est « en marche ». Elle est mouvement, plus précisément processus. Bien évidemment, se dire « en marche » ou « en mouvement » ne renvoie pas systématiquement à un contenu idéologique. Toutefois, dans le contexte intellectuel issu de la modernité, l’adjonction de la notion de mouvement à la République-idée révèle à coup sûr un projet politique, certes adapté aux temps postmodernes, mais fidèle à des sources intellectuelles anciennes. Il ne s’agit pas de maintenir un cadre institutionnel fixe, mais de s’inscrire résolument dans un mouvement, de suivre le cours d’un processus, caractéristique du progressisme.
Contre l’ordre divin
De quel processus est-il ici question ? Si l’on considère que la République, entendue au sens d’idée, s’est toujours caractérisée par la négation de l’ordre naturel et divin dont il faut progressivement se défaire, nous devons envisager, selon toute probabilité, que le processus vise la dissolution de la famille et de l’identité, c’est-à-dire la révolution anthropologique. Le programme d’Emmanuel Macron était explicite : « Il n’y a pas un modèle unique qui représenterait la “vraie” famille. Les familles sont de plus en plus diverses : il faut pouvoir les reconnaître et permettre à chacun de vivre sa vie de couple et ses responsabilités parentales. Le quinquennat qui s’achève a permis de progresser dans la reconnaissance de cette diversité. Toutefois, si l’égalité est édictée dans la loi, elle n’est pas entière et l’injustice perdure dans la vie. Trop de personnes ont encore du mal à vivre normalement, parce qu’elles subissent des discriminations du fait de leur homosexualité ». Le jour où le nouveau gouvernement a été formé, Benjamin Griveaux, porte-parole de « La République en marche », a tweeté : « Nous ouvrirons la PMA à toutes les femmes et combattrons l’homophobie du quotidien grâce à des tests aléatoires au travail ». Ce processus n’a pas besoin de justification raisonnée. Il s’appuie très simplement sur la mystique sécularisée du progrès et de l’émancipation.
Cela n’a pas empêché 71 % des catholiques pratiquants dits « réguliers » de voter pour Emmanuel Macron au second tour des élections. [...]"
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Élections législatives : le grand remplacement !
Ce dimanche soir, ce n’est pas seulement une page qui, indubitablement, s’est tournée, mais un nouveau livre qui vient de s’ouvrir.
Première information de taille, plus d’un Français sur deux n’a pas jugé bon de se rendre aux urnes ; du jamais vu sous la Cinquième république, voire même celle l’ayant précédée. D’où qu’ils viennent, les nouveaux élus seront donc mal élus et jamais le fossé n’aura semblé aussi grand entre peuple et représentants du peuple.
La deuxième, c’est évidemment l’indéniable vague de La République en marche, même si ce jeune mouvement ne représente, malgré ses 32%, que 15% des électeurs inscrits, et profite évidemment de l’effondrement du Parti socialiste, tout juste au-dessus de la barre des 10%, alors que ce dernier était encore aux affaires il y a peu. Les Républicains, eux sauvent à peu près les meubles, avec 21%.
On notera néanmoins que nombre de ténors de ces deux formations, données pour être « de gouvernement », ont fini par se fondre en ce front libéral et libertaire, de droite et de gauche, de droiche, dira-t-on. LREM, incarnation de cette UMPS naguère dénoncée par Marine Le Pen ? C’est à croire.
En même temps, comme dirait Emmanuel Macron, les deux principales formations populistes, France insoumise (11%) et Front national (14%), tirent malgré tout leur épingle du jeu.
Même si ce chiffre demeure à méditer : 56% des électeurs de Marine Le Pen ont boudé les urnes, alors que nombre de ceux de Jean-Luc Mélenchon se sont reportés sur d’autres candidats de gauche, communistes le plus souvent, dans leurs ultimes fiefs rouges.
Qu’en conclure ? Qu’à défaut d’alternance ou d’alternative, les Français ont opté pour le grand remplacement ; voire, la pêche à la ligne. Et c’est là que deux France commencent à se dessiner, ligne de fracture qui n’est pas sans rappeler celle de la dernière élection présidentielle. Celle des vainqueurs de la mondialisation, jeunes urbains actifs, et dont les préoccupations identitaires sont loin de constituer l’ordinaire. Et celles des perdants de cette même mondialisation, France périphérique, France des oubliés qui, en l’occurrence, a oublié d’aller voter.
C’est cette France que Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen ne désespèrent pas de mobiliser afin de leur faire reprendre le chemin des urnes ce dimanche prochain. Les bonnes idées ont toujours de l’avenir. Celle consistant à défendre le peuple en est une. Malgré les aléas et les revers : ceux qui finissent par réussir sont souvent les mêmes ayant su persévérer dans les défaites, fussent-elles à répétition.
http://www.bvoltaire.fr/elections-legislatives-grand-remplacement/