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géopolitique - Page 483

  • Les enjeux géoéconomiques sur l’Arctique

    L’Arctique, la fin d’un sanctuaire

    L’Arctique peut être définie de différentes manières ; pour le géographe, la zone Arctique commence au cercle polaire qui se situe à 2600 kilomètres du pôle Nord et qui correspond à la limite où le soleil ne se lève pas ou ne se couche pas aux solstices. Pour le météorologue, la limite va se situer à la ligne isotherme des 10 degrés, variation de température correspondant à la modification de la flore entre la taïga et la toundra. Enfin, pour le pédologue, la limite est le sol restant gelé toute l’année, le pergélisol.
    A cause du réchauffement climatique, on constate depuis une vingtaine d’années une diminution impressionnante de la taille, de l’épaisseur et de la durée de présence de la banquise. Le GIEC (Groupe Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat) estime en effet que lorsqu’on parle d’un réchauffement de 2 degrés aux latitudes tempérées, l’impact à moyen terme sur l’Arctique serait d’environ 5 degrés, ce qui entraînera à terme la disparition du pergélisol.
    Ainsi, le développement de nouvelles technologies d’exploitation de ressources, l’ouverture de nouveaux passages commerciaux, de nouvelles zones de pêche et la recherche d’accroissement de puissance des grands acteurs mondiaux entraînent une transition d’une vision d’un désert de glace sanctuarisé à une vision utilitaire. On parle alors aujourd’hui d’un « Nouvel Eldorado » ou d’un « Nouveau Moyen-Orient ».

    Présentation des acteurs

    Six pays sont frontaliers avec l’Arctique : Les Etats-Unis via l’Alaska, le Canada, la Russie, l’Islande, la Norvège et le Danemark via le Groenland. La notion de course vers l’Arctique est aujourd’hui développée en raison de la mobilisation importante des pays du Conseil de l’Arctique (initié en 1991 et composé de 8 pays membres) et de certains pays observateurs comme la Chine. Bien que selon Damien Degeorges, consultant en relations internationales « L’Arctique est devenu un laboratoire des enjeux géopolitiques du XXIe qui mêlent climat, énergie et défense », je vais focaliser tout particulièrement cette étude sur les rapports de force entre les trois acteurs principaux : La Russie, les Etats-Unis et la Chine.

    Définition de la nature des rapports de forces

    L’affrontement entre ces trois puissances est principalement de nature économique, avec des enjeux liés aux ressources et aux passages commerciaux. Cependant, la conséquence directe de ces affrontements économiques est l’apparition de rapports de forces politiques, poussant à la conquête territoriale et à la militarisation.
    On estime en effet que 13 % des ressources conventionnelles en pétrole et 30 % de celles de gaz non découvertes se trouveraient dans la zone Arctique, ainsi que d’importantes richesses minérales et halieutiques. Ces ressources représenteraient un atout stratégique considérable pour tous les acteurs.
    Par ailleurs, la fonte des glaces a pour principale répercussion l’ouverture de deux nouveaux passages commerciaux : Nord-Ouest et Nord-Est. La Chine par exemple, voit la moitié de son produit intérieur brut dépendre du trafic maritime, elle considère la route du Nord-Est, le long des côtes russes, et le passage du Nord-Ouest comme des voies de substitution au canal de Suez ou à celui de Panamá. Par le passage du Nord-Est, le trajet Rotterdam-Shanghaï serait réduit d’un quart, soit d’environ 5 000 kilomètres. L’enjeu majeur se situe donc dans le contrôle douanier de ces passages, source substantielle de puissance économique.
    La deuxième répercussion de la fonte des glaces est l’ouverture de nouvelles zones de pêche, jusqu’à présent non exploitées.
    Cette course à l’exploitation des ressources disponibles et au contrôle des passages commerciaux a pour conséquence directe la mise en exergue des affrontements politiques et militaires entre les acteurs.  On voit alors des rapports de forces politiques apparaître, par l’intermédiaire de revendications territoriales, de militarisation de la zone Arctique ou encore par des manœuvres d’influences diplomatiques.

    La Russie

    En 2009, l’ancien président russe Dmitry Medvedev validait la stratégie de sécurité nationale de la Russie, par l’intermédiaire du document « Les fondements de la politique de la Fédération de Russie dans l’Arctique dans la période allant jusqu’à 2020 et au-delà » édité par les organes les plus importants du pouvoir en Russie : le Premier ministre, les ministres de l’Intérieur, des Affaires étrangères et de la Défense, les administrateurs du Service fédéral de sécurité (FSB) et le Service de renseignement extérieur (SVR). Ce document met en avant l’aspect stratégique prioritaire de la course vers l’Arctique, dont le but ultime est de « transformer la zone Arctique en la première base stratégique des ressources russes d’ici 2020 » et de contrôler les passages commerciaux du Nord. Dmitry Medvedev indiquait alors que « La Tchoukotka peut et doit jouer son rôle dans l’Arctique et être rétablie dans ses droits de maillon incontournable du passage Nord ».

    Une stratégie de revendication territoriale précurseur
    C’est en 2001 que la Russie a initié ouvertement sa stratégie de conquête du territoire Arctique en déposant auprès de l’ONU un dossier y revendiquant 1,2 millions de kilomètres carrés comprenant notamment une partie de la dorsale Lomonossov (chaîne de montagnes sous-marines, longue de 1 800 km et haute de plus de 3 000 mètres, qui s’étend de la Sibérie au Groenland et à l’île canadienne d’Ellesmere).
    Outre l’avantage stratégique que ce territoire accorderait aux russes quant au contrôle du passage commercial Nord-Est, cette zone renferme selon les estimations des experts russes 4,9 millions de tonnes d’hydrocarbures. La Russie s’appuyait notamment sur l’argument de la similitude des roches entre la dorsale et le continent sibérien, mais le dossier fût refusé en raison d’un manque de preuves suffisantes. Suite à cet échec, la Russie a poursuivi différentes manœuvres offensives dans le but d’asseoir sa souveraineté sur le territoire : En Août 2007, à la stupeur générale, une expédition était organisée dans le but de planter le drapeau russe à 4200 mètres de profondeur dans les eaux arctiques.
    En Août 2015, la Russie déposait de nouveau le dossier revendiquant les 1,2 millions de kilomètres carrés auprès de l’ONU, affirmant qu’après des années de recherche scientifique sur les limites de son plateau continental, celles-ci démontrent son droit sur les vastes ressources naturelles situées au fond de l’océan Arctique. L’examen du dossier débutera début 2016.

    Une militarisation massive à l’appui
    En plus de cette dynamique offensive d’accroissement de puissance économique, la Russie a lancé une très forte politique de militarisation de l’Arctique. Cette politique passe par la réactivation de certaines bases militaires soviétiques, par une présence renforcée sur le territoire Arctique (près d’une centaine de survols de la zone par des flottes aériennes armées) et par le développement intensif de la flotte navale et la formation de brigades spécialisées.
    Pour finir, la Russie possède l’avantage stratégique colossal de posséder une flotte de quarante brise-glaces capables de traverser le pôle Nord toute l’année,  dont six brise-glaces nucléaires (plus un en construction), sans équivalent dans le monde.

    Les Etats-Unis

    En 2009, les Etats-Unis communiquaient par l’intermédiaire de la Maison Blanche un document présentant l’aspect stratégique de l’Arctique et leur stratégie associée. Ce document édité sous le gouvernement de Georges W. Bush met en avant la problématique essentielle du réchauffement climatique et des enjeux de la préservation des glaciers, ainsi que les intérêts des Etats-Unis pour la zone Arctique d’un point de vue défense nationale.

    Une stratégie d’influence de l’opinion publique
    On constate alors que sa politique d’accroissement de puissance par l’économie en Arctique n’apparaît pas de manière claire et distincte. En effet, l’influence publique en interne de nombreuses ONG environnementales se trouve être bien plus importante que chez ses adversaires directs que sont la Russie et la Chine. Dès lors, la Maison Blanche adopte la position de sauveur de la zone arctique, en passant par de nombreux programmes de recherche visant à limiter l’impact humain et la fonte des glaces, notamment via le programme ABoVE — Arctic Boreal Vulnerability Experiment de la NASA lancé en 2015. Ce programme fût appuyé par l’opération de communication de Barack Obama en visite en Arctique en Septembre 2015 afin de mettre l’accent sur l’implication des Etats-Unis dans la lutte pour la sauvegarde des glaciers. Ce positionnement a également joué un rôle majeur dans la prise de fonction de présidence du Conseil de l’Arctique des Etats-Unis, prenant la relève du Canada.
    Ainsi, la stratégie des Etats-Unis se base alors fortement sur l’opinion publique, mais la difficulté se place alors dans le double-jeux croisant intérêt économique et protection de l’environnement ; comme le rappelle Barack Obama en 2013 « Notre esprit pionnier est naturellement attiré vers cette région pour les opportunités économiques qu’elle présente et en reconnaissance de la nécessité de protéger et de préserver cet environnement unique, précieux et changeant ».
    Dans le jeu de l’influence, les Etats-Unis ont joué un coup majeur en donnant leur autorisation au groupe pétrolier Européen Shell de forer à la recherche de ressources en Arctique. Cette manœuvre leur fût bénéfique en tout point. En effet, Shell a subit dès lors la colère des ONG environnementales, et dût investir très fortement pour déployer la technologie nécessaire au forage Arctique (environ 895 millions de dollars), mais surtout jouer le rôle d’éclaireur dans cette recherche, élément essentiel au vu de l’abandon de ce programme quelques mois plus tard à cause de la pression sociétale, des difficultés à forer au vu du climat très dur, de l’éloignement et du manque de ressources exploitables suffisantes découvertes.

    Un investissement majeur sur leur retard technologique
    Malgré sa nouvelle présidence du conseil de l’Arctique et sa forte politique d’influence, les Etats-Unis souffrent d’un retard conséquent dans la course vers l’Arctique sur deux points : Premièrement, leur flotte de brise-glaces se réduit au nombre de trois vieux bâtiments, dont un seul capable de traverser le pôle Nord toute l’année et aucun à propulsion nucléaire. Barack Obama a souligné en Septembre 2015 l’accélération de la construction d’un nouveau navire à propulsion nucléaire afin de palier ce manque. Cette manœuvre est essentielle mais fait pâle figure face à la flotte russe. Enfin, face à la militarisation intensive menée par la Russie en Arctique, les Etats-Unis ont lancé une forte politique de déploiement armé par l’intermédiaire de bases navales et aériennes sur le territoire, sur ce sujet également ils souffrent de leur retard malgré leur force de frappe sans équivalent.

    La Chine

    La Chine dans ce contexte de course vers l’Arctique se positionne tout autrement que la Russie et les Etats-Unis en partant d’une différence majeur : Elle n’est pas frontalière avec l’Arctique, et ne bénéficie donc aujourd’hui que du statut d’observateur dans le Conseil de l’Arctique. Malgré ce handicap, la Chine y trouve des intérêts économiques stratégiques importants, le plus important étant l’ouverture des passages commerciaux Nord.
    La Chine a en effet engagé depuis une dizaine d’années une vaste stratégie de positionnement en Arctique, dont l’Islande a longtemps été l’axe central.

    Une stratégie de contournement par la diplomatie
    Afin d’asseoir sa position, la Chine décide d’investir en 2012 dans le consortium d’entreprises islandaises Arctic Services, qui espère profiter rapidement de l’ouverture de la route maritime créée par la fonte de la banquise pour construire sur la côte nord du pays une plaque tournante vers l’Arctique. Mais ce rapprochement avec l’Islande avait déjà débuté en 2006, quand Pékin ouvrait des négociations sur un traité de libre-échange.
    C’est après un accord financier sino-islandais en 2010, qui a aidé Reykjavik à sortir de sa crise financière, que la consécration de ce rapprochement fut opérée en 2012 avec la visite du premier ministre chinois de l’époque, M. Wen Jiabao.
    On comprend alors que l’Islande était un coup d’essai pour la Chine qui ne s’est pas arrêtée là après le succès de cette diplomatie bilatérale. Ainsi, le président chinois de l’époque Hu Jintao, s’est rendu au Canada en 2010, puis au Danemark en 2012, multipliant les accords scientifiques et commerciaux. Rachael Lorna Johnstone, professeure de droit à l’université islandaise d’Akureyri explique alors que « Pékin a fini par tenir le bon discours aux membres du Conseil de l’Arctique et aux populations autochtones en affirmant son respect de la souveraineté des Etats »,
    En plus de ces manœuvres d’influence diplomatique, la Chine s’est lancée dans la course aux ressources de l’Arctique, notamment au Groenland, qui a accordé l’an dernier à la Chine (à 15 voix contre 14, le Danemark s’étant positionnée contre) son feu vert pour l’exploitation de son sous-sol. Dans cette île-continent de 57 000 habitants, les Chinois seraient prêts, comme ils le font en Afrique, à envoyer des ouvriers par milliers.

    La Russie, un allié idéal
    Depuis 2013, Pékin a renforcé son rapprochement économique avec Moscou en signant avec le pétrolier russe Rosneft un accord pour l’exploration de l’Arctique russe.
    De plus, avec son statut d’observateur acquis depuis 2013 et ses rapprochements avec les différents pays du Conseil de l’Arctique, la Chine s’offre aujourd’hui une place importante dans la course vers l’Arctique et le démontre au monde entier. En effet, en septembre 2015, lors de la visite symbolique en Arctique de Barack Obama, la Chine opérait une vaste opération militaire de déploiement de sa flotte navale en Arctique, traversant les eaux territoriales américaines pour faire passer un message clair sur son positionnement. Pékin ajouta même qu’il s’agissait d’une opération courante, menée conjointement avec la Russie.
    Pour finir, la Chine s’est offert les moyens nécessaires à son ambition en achetant un brise-glace nucléaire à la Russie et en amorçant la construction de bâtiments équivalents par une stratégie de raccourcis. Elle a déjà mené jusqu‘à présent plusieurs expéditions dans le pôle Nord et compte intensifier la cadence.

    Pas de vainqueur, mais un leader ?

    On comprend alors que le réchauffement climatique va sur le long terme intensifier les rapports de force déjà existants sur l’échiquier international que représente l’Arctique. Ces trois super puissances se disputent leur part de la zone en développant des stratégies très différentes. Viennent s’ajouter à cela plusieurs manœuvres stratégiques des autres pays du Conseil de l’Arctique, comme le Canada qui vient jouer les trouble-fête auprès des Etats-Unis en affirmant que le passage Nord-Ouest se situerait dans ses eaux intérieures. Cette qualification permettrait à Ottawa de revendiquer la pleine souveraineté sur cette portion de territoire, d’y appliquer ses lois et de réglementer la navigation comme toutes les activités qui s’y déroulent.
    La Russie apparaît aujourd’hui comme favori dans cette course grâce à son positionnement précurseur auprès de l’ONU, sa stratégie très offensive et son avance technologique liée au climat polaire. Les Etats-Unis bénéficient du plus fort pouvoir d’influence qui peut lui permettre des manœuvres offensives face à ses adversaires, mais souffre d’un fort retard technologique. Enfin, la Chine n’affichant pas de volonté d’accroissement de puissance par le territoire et par le militaire assoie son positionnement dans l’ombre avec des manœuvres d’influence diplomatiques et économiques.

    Thomas Bachelerie

    http://www.infoguerre.fr/matrices-strategiques/les-enjeux-geoeconomiques-sur-larctique-5793

  • Hillary Clinton a de sacrés ennuis : une nouvelle enquête ouverte à cause de ses mails

    Le FBI a décidé de rouvrir l’enquête sur les mails et les serveurs privés utilisé par Hillary Clinton quand elle était Secrétaire d’État.

    A seulement 10 jours des élections pour la Maison Blanche, cela fait mal. Donald Trump exulte : « C’est un scandale plus grave que celui du Watergate. » La candidate démocrate, de son côté, se veut confiante.

    « Le FBI est venu à connaissance de nouveaux mails « potentiellement pertinents » en s’occupant d’un autre cas » a expliqué le directeur, James Comey, annonçant retenir« opportun des actions d’investigation pour analyser ces mails, déterminer si ils contiennent des informations classifiées et évaluer leur importance pour notre enquête sur l’emailgate. »

    Le New York Times écrit que les nouveaux mails ont été découverts sur des dispositifs électroniques que le FBI a séquestrés à la principale collaboratrice d’Hillary Clinton, Huma Abedin, et à son mari, l’ex-membre du Congrès, Anthony Weiner, impliqué dans des scandales à caractère sexuel.

    En 2015, les médias révélaient que, durant ses quatre ans au Département d’État, Hillary Clinton avait utilisé un compte personnel pour ses communications avec un serveur privé. Le Département d’État avait identifié plus de 2100 mails envoyés avec des informations confidentielles. Le cas avait cependant été archivé par le FBI bien que la grave négligence de la Secrétaire d’État de l’époque avait été grandement critiquée.

    La ré-ouverture d’un enquête sur « l’emailgate » est un coup dur pour Hillary Clinton à quelques jours des élections. Une aubaine pour Trump. Un mince espoir pour les pays du Moyen-Orient meurtris par les guerres d’Hillary !

    Francesca de Villasmundo

    http://www.medias-presse.info/hillary-clinton-a-de-sacres-ennuis-une-nouvelle-enquete-ouverte-a-cause-de-ses-mails/63478

  • Journal du 28 octobre 2016 : International / Casques blancs et coeur djihadiste !

  • La France décrédibilisée sur la scène internationale

    De Frédéric Pichon dans Le Figaro :

    "Début octobre, la résolution française, rejetée par le veto russe, avait suscité le commentaire suivant de la part du président français: «Un pays qui mettrait son veto à la résolution de la France sur Alep serait discrédité aux yeux du monde». S'il ne reste que la morale pour convaincre, c'est que la diplomatie française est devenue insignifiante… [...] 

    L'été 2016 a véritablement rebattu les cartes au Nord de la Syrie. Il semble que la timide réconciliation entre Ankara et Moscou se soit faite sur le dos des Kurdes syriens, et que cela a fait les affaires de Damas. Le problème des Kurdes du PYD, c'est qu'ils ont multiplié tour à tour les alliances de circonstance: avec les Américains, les Russes, les Syriens ce qui les a fait passer pour des partenaires non fiables. À présent, la Turquie les vise tout particulièrement car elle a toujours considéré que le problème kurde était prioritaire pour elle: même si Ankara semble s'être convertie tardivement à la lutte anti-Daech, les Turcs ne considèrent pas autrement le PYD que comme une organisation terroriste. Et Damas n'ira pas à leur secours car cela fait partie aussi du «contrat» avec Erdogan qui de son côté a fermé sa frontière. [...]"

    Michel Janva  http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html

  • Un procès de Nuremberg pour Poutine ?

    « Les nazis russes exterminent les mutins humanitaires d’Alep ». C’est une émission de la télé française, on est le 20 octobre sur Antenne 2. Courageux, les candidats de la droite primaire expliquent comment on va châtier le tzar. Oubliée la présence sacrée et pacifiante de l’OTAN et de l’Amérique en Irak, Libye, Syrie, Colombie ou ailleurs. Il faut détruire la Russie et accueillir du réfugié à la tonne.

    Vladimir Poutine devrait se méfier : car il va finir pendu au prochain procès de Nuremberg. Il ne semble pas avoir compris à qui il avait affaire.

    Vladimir Poutine sera pendu quand nos preux chars occuperont Moscou mieux qu’Hitler et Napoléon n’avaient su le faire. Il est vrai qu’à l’époque la Russie était vaguement aidée par l’Angleterre ou par le monde anglo-saxon. Mais cette fois-ci « tout le monde » est contre elle et son tzar imprudent !

    Adolf Hitler sert ici de modèle à l’occident, et on n’a pas détruit le lieu de naissance de l’ex-monstre pour rien. Fin du repentir.

    C’est le philosophe libertarien Butler Shaffer qui explique dans son test sur Hitler (voyez en ligne son brillant The Wizards of Ozymandia) que ses étudiants démocrates pensent comme le führer : ils sont végétariens, contre le tabac, contre le harcèlement sexuel, pour les interventions humanitaires, pour la nature relookée, et pour la colonisation de la Russie annoncée dans Mein Kampf. Ils sont aussi contre la possession d’armes, comme Hillary, et comme Adolf. Des fois que les citoyens voudraient se protéger de la folie étatique en démocratie. Mais les citoyens en France sont là pour tweeter ou pour se faire écraser (impôts, lois, camion fou?).

    Hitler aussi était contre les excès de vitesse. Et il s’est allié aux islamistes rebelles du Caucase pour détruire la Russie. Un modèle je vous dis. Il était antisémite ? Mais le seul pays occidental correct avec la Russie est Israël. Benjamin Netanyahou sait mieux que Juppé ou Lemaire qui a libéré Auschwitz. Il l’a dit d’ailleurs. La France socialiste a voté les pleins pouvoirs à Pétain. Ils étaient même 666 à le faire (voyez mon Mitterrand).

    Et les Français sont bien contents, parfaitement d’accord, enthousiastes, dirait Céline en 39. Le nez dans le tweeter.

    C’est que l’occident ne recule jamais quand il s’agit de principes, d’humanité ou de conscience universelle, et il l’a déjà montré bravement au cours des dernières cent années. L’occident a bombardé l’Europe de fond en comble, il a livré la Chine et la moitié de notre continent au communisme, il a encouragé la destruction turque de notre Asie mineure grecque, saccagé ses empires coloniaux pour que se multiplient les dictatures en Algérie et ailleurs en Afrique noire, il a détruit l’Irak, armé les guerres civiles en Yougoslavie, en Libye, en Syrie (souvent au détriment des chrétiens orthodoxes), et maintenant en Ukraine où le gouvernement insurrectionnel local a établi sa tyrannie et veut déclencher la énième guerre mondiale que l’on imputera à la Russie et à son tzar éternel.

    On sera tous aussi vengeurs que l’ex-patron de l’OTAN, ce Rasmussen qui déclencha l’opération des BD sur Mahomet et imposa à son église luthérienne la bénédiction du mariage homosexuel. Il pantoufle chez Goldman Sachs depuis lors, flanqué du Barroso.

    Avant de désosser la Russie au nucléaire avec Hillary, on nous aura bien sûr fait renoncer à son gaz et tripler notre facture énergétique avec l’huile de ricin venue du fracturé Far West.

    Céline avait aussi tout dit :

    « Une telle connerie dépasse l’homme. Une hébétude si fantastique démasque un instinct de mort, une pesanteur au charnier, une perversion mutilante que rien ne saurait expliquer sinon que les temps sont venus, que le Diable nous appréhende, que le Destin s’accomplit. »

    Cette affaire se terminera par une nouvelle session de pendaisons. On regardera tout ça à la télé. Et ce jour-là nous serons tous pendus aux cordes vocales de BHL. Tout cela fera du bruit pendant quelques heures, comme disait Voltaire.

    http://www.voxnr.com/4995/un-proces-de-nuremberg-pour-poutine

  • Syrie : Avertissement de Moscou !

    Débat avec la participation de Fabrice Beaur, expert pour l’ONG EODE depuis Moscou, Laurent Ozon, analyste des questions internationales depuis Paris, ainsi que Bahar Kimyongur, journaliste depuis Bruxelles.
    Source: presstv.ir
  • Qatar, Arabie Saoudite : Quand la France entretient des relations avec des pays qui financent l’islamisme

    « Nos très chers Emirs ». Tel est le titre d’un livre consacré aux relations qu’entretiennent la France avec les monarchies du Golfe.

    Pour les journalistes et ex-otages Christian Chesnot et Georges Malbrunot, les gouvernements français successifs se sont montrés complaisants avec des pays qui financent une idéologie qui nous menace et des réseaux terroristes que nous ciblent.

    Sous Sarkozy, c’est la lune de miel avec le Qatar. Leur ambassadeur arrose Paris. Subventions, financements, cadeaux personnels. A chaque Noël, il envoie des paquets à une trentaine de personnalités, d’une valeur de 10 000 euros à peu près. Aucun sac de grand luxe n’a été retourné à l’ambassade. Certains élus français se plaignent même lorsque le cadeau n’arrive pas ou les Qataris refusent de payer tel ou tel voyage.

    Le Qatar et l’Arabie Saoudite ont pourtant joué un rôle important dans le financement du terrorisme islamiste :

    Depuis la révolution iranienne en 1979 et l’aide apportée aux mudjaïdines en Afghanistan, des réseaux financiers se sont créés pour financer le djihad dans le monde. Les rapports américains, du FBI et de la CIA, le disent clairement.

    http://fr.novopress.info/201217/qatar-arabie-saoudite-quand-la-france-entretient-des-relations-avec-des-pays-qui-financent-lislamisme/

  • L’exception russe par Georges FELTIN-TRACOL

     

    C_LATSA_Printemps-183x300.jpgAlexandre Latsa est un Français qui vit et travaille en Russie. Avec son blogue Dissonances et par ses articles mis en ligne sur le site Sputnik, il présente au public francophone un point de vue différent de l’opinion dominante très orientée. Dans deux ouvrages de médiocre qualité, plus proche de l’enquête en pissotière que de la grande politique (1), certains plumitifs voient en lui un formidable agent d’influence du Kremlin. Qualifié de « véritable ode à la Russie poutinienne (2) », son essai, Un printemps russe, mérite mieux que ces approximations malveillantes.

    Alexandre Latsa explique que depuis l’arrivée au pouvoir en 1999 de Vladimir Poutine, la Russie connaît une phase de renouveau au point que « le poutinisme est en train d’émerger comme un modèle, sorte de gaullisme amélioré et moderne qui, dans les années à venir, devrait faire de nombreux émules dans le monde et en Europe (p. 285) ». Le pays sort pourtant d’une longue transition chaotique. L’auteur a bien raison d’insister sur ces nouveaux « Temps des troubles », les années 1991 – 1999, même si le déclin commença au temps de l’URSS avec la Perestroïka de Gorbatchev.

    Une décennie troublée

    La soudaine disparition de l’Union Soviétique cumulée à l’application immédiate et idiote d’une politique économique ultra-libérale inadaptée au contexte psychologique et social post-soviétique plongèrent la Russie dans un désordre multiple. Des républiques fédérées telles le Tatarstan ou la Tchétchénie cherchent à se libérer de la tutelle moscovite. Parallèlement, l’armature étatique détériorée passa sous la coupe de la Sémibankirchtchina (les sept oligarques les plus puissants). Leur fortune rapidement acquise reposait sur des connivences entre jeunes loups avides de gains, hauts fonctionnaires véreux et apparatchiks ex-communistes corruptibles. Il est clair que « la prise de contrôle de groupes mafieux s’était faite de façon tout à fait “ légitime ” durant la Perestroïka et avec le soutien indirect (volontaire ?) de gouvernements étrangers, du FMI et de la Banque mondiale (p. 47) ». La Russie perdit alors son rang de grande puissance et certains misèrent sur son implosion territoriale imminente quand ils ne tablaient pas sur sa rétractation proprement européenne. Deux chercheurs français, affiliés aux cénacles atlantistes, Françoise Thom et Jean-Sylvestre Mongrenier, envisagent encore « à très long terme […], une Russie revenu aux frontières de la Moscovie, délestée de la Sibérie et de l’Extrême-Orient (3) ». Ils ne font que reprendre une hypothèse émise par le géopolitologue Yves Lacoste, auteur de Vive la nation !, il y a plus de dix ans, quand il s’interrogeait sur l’avenir de la Russie. « L’indépendance des peuples non russes inclus plus ou moins sous la contrainte dans la Fédération de Russie est sans doute le moyen pour la Russie de reprendre son développement économique, social et politique sur des bases géographiques nouvelles certes restreintes par rapport à l’ancien empire, mais encore de très grande taille, notait-il. La reconstruction de la Russie passe sans doute moins par le maintien de son autorité sur de vastes territoires où les Russes sont de moins en moins nombreux, que par la lutte contre les facteurs de l’excessive mortalité (l’alcoolisme, la misère des hôpitaux, les carences de l’habitat) qui en font un cas très exceptionnel en Europe et qui le conduisent au déclin. L’« homme malade » de l’Europe doit d’abord se guérir et une Russie convalescente, au territoire mieux organisé, pourrait alors raisonnablement demander son entrée dans l’Union européenne (4). » Ces spéculations ne sont pas nouvelles et n’appartiennent pas aux seuls nationistes républicains français. Alexandre Latsa remarque que l’« obsession anglo-saxonne de démembrement de la Russie est ancienne et a historiquement commencé dans le sud du pays, au cœur du Caucase russe (p. 27) ». Faut-il rappeler que « de 1989 à 2016, l’alliance entre les États-Unis et les islamistes radicaux s’avérera une constante de la géopolitique américaine en Eurasie, en particulier de la lutte contre la Russie (p. 45) » ? Au soir de sa vie, le géo-penseur réaliste national-grand-européen Jean Thiriart répétait que le retrait soviétique d’Afghanistan fût une erreur géopolitique considérable que les Européens regretteront. Cette défaite accéléra l’effondrement soviétique et stimula l’islamisme. En outre, « les années 1990 avaient transformé la Russie en une sorte de IVe République déformée, avec des partis éphémères, rendant le jeu politique favorable à la stratégie des alliances et à l’achat de députés (p. 79) ».

    Ruinée par des krachs à répétition, victime d’une insécurité record, exaspérée par l’alcoolisme chronique d’Eltsine, la population réclamait un « Pinochet » russe. D’abord séduite par le discours nationaliste du « libéral-démocrate » Jirinovski, elle se tourne ensuite vers le Parti communiste, puis vers le général Alexandre Lebed qui obtint à la présidentielle de 1996 14,5 % des suffrages. L’entourage présidentiel sut détourner cette revendication en promouvant Evgueni Primakov. L’auteur souligne avec raison qu’avant Poutine, « c’est Evgueni Primakov qui historiquement mit la Russie sur les rails du “ grand redressement ”, même s’il ne resta pas en poste bien longtemps (pp. 49 – 50) ». Ministre des Affaires étrangères de 1996 à 1998, puis Premier ministre de septembre 1998 à mai 1999, l’ancien journaliste arabophone du KGB donna à la diplomatie russe son impulsion eurasienne actuelle. Mais de féroces querelles intestines le chassèrent du pouvoir, remplacé par quelques politiciens plus occidentalistes, libéraux et américanophiles. Sur un point, Alexandre Latsa commet une erreur. Vladimir Poutine serait selon lui le « huitième Premier ministre de la Fédération de Russie au cours des dix-huit derniers mois (p. 60) ». En fait, avant sa nomination, occupèrent successivement la fonction Sergueï Kirienko (24 avril – 23 août 1998), Viktor Tchernomyrdine (23 août – 11 septembre 1998), Evgueni Primakov et Sergueï Stepachine (19 mai – 9 août 1998).

    Indispensable restauration de l’État

    La nomination surprise du chef du FSB, Vladimir Poutine, à ce poste, allait confirmer et amplifier les esquisses posées par Primakov. Ce n’est pas étonnant, car Poutine appartient à l’époque du KGB aux « réformateurs » dont le chef de file n’était autre que le directeur lui-même, Youri Andropov. Dans ses articles de Monde et Vie du début des années 2000, l’ancien résistant et journaliste spécialisé dans la guerre secrète, Pierre de Villemarest, le qualifiait de « national- soviétique ». Conscient de l’ampleur de la tâche à mener, Poutine parvient néanmoins à réduire l’influence délétère des oligarques et à restaurer une « verticale du pouvoir », ce qui assure à l’État depuis Moscou le contrôle de « cet immense territoire en quelque sorte laissé à lui-même et au sein duquel il était vital pour l’État d’accentuer son autorité afin de contrecarrer les dynamiques naturelles d’inertie territoriale dues principalement à la géographie du pays (pp. 81 – 82) ». L’administration du pays le plus étendu au monde n’est pas une mince affaire. « La recomposition du modèle russe s’opère selon une équation assez surprenante visant à reconsolider la solidarité et l’unité nationale en affirmant la diversité culturelle par l’essor du patriotisme. Ce dernier élément vise également à atténuer les tendances nationalistes jugées dangereuses, car pouvant remettre en cause l’équilibre polyethnique et multiconfessionnel russe, et surtout contribuer à l’essor du nationalisme régional et donc aux pulsions indépendantistes (p. 71). » La restauration d’un État fort accorde une priorité aux « aspirations et besoins de la communauté […] sur les aspirations individuelles, et […encourage] au maximum les cultures et identités locales en accentuant leur intégration (et leur compatibilité) avec l’identité fédérale (p. 116) ».

    État-continent, la Russie dispose de spécificités qu’ignorent les États-nations d’Occident. Par exemple, elle « n’a pas besoin de l’immigration pour connaître un système naturellement pluriculturel et pluriethnique (p. 131) ». Ainsi, depuis le XIIIe siècle et l’invasion tataro-mongole, les peuples slaves de l’Est cohabitent-ils avec des peuples musulmans qui rejettent (pour combien de temps encore ?) l’islam wahhabite et ses succédanés. Sait-on à ce sujet que la Russie a depuis 2005 rang de membre observateur à l’OCI (Organisation de la coopération islamique) ? Héritière tout autant de Byzance que du khanat de la Horde d’Or, la Russie applique le polyethnisme, c’est-à-dire un cadre socio-historique et politique de cohabitation ethno-culturelle très variée agencée et ordonnée autour du noyau ethnique majoritaire, le peuple russe. Cela signifie que « le modèle de l’État-nation ne lui sied pas puisque la Russie comprend en son sein des nations et des républiques (p. 118) ». Mieux encore, « le patriotisme et le monde polyculturel sont intrinsèquement liés et […] chaque citoyen peut se sentir appartenir à la Fédération (p. 136) ».

    Ni Asie, ni Europe. Russie !

    Alexandre Latsa explique qu’à rebours de cette tradition politique, des nationalistes russes les plus radicaux et les plus hostiles à Poutine prônent le départ complet de toute présence russe au Caucase du Nord, voire de la Sibérie, parce qu’ils adhèrent précisément à une logique stato-nationale incompatible avec l’histoire de la Russie, l’ultime ensemble supranational au sens traditionnel du terme. « Alors que le manifestant moyen de Bolotnaïa est souvent hostile aux immigrants d’Asie centrale, nationaliste et libéral, et rêve de Rome et de Paris, son opposant politique est un patriote étatiste, croit au monde russe et rêve d’une Russie slave et orthodoxe, mais non occidentale (p. 263). » Ce constat surprend l’Occidental intoxiqué par ses médiats. Pour le patriote étatiste russe, « cette expérience historique, qui fait clairement de la Russie un empire et non un État-nation, l’éloigne non seulement de l’expérience historique de l’Europe, mais lui procure une capacité d’appartenance et de projection à cet ensemble culturel à part qu’est l’Eurasie, cette zone du monde qui se situe géographiquement entre la plaine hongroise et la frontière chinoise, et culturellement entre Moscou, Athènes et Astana (p. 273). » Par conséquent, le patriotisme politique, civique et civilisationnel russe « est en réalité nécessaire pour maintenir une unité nationale bien plus difficile à conserver qu’au sein des États-nations européens, plus homogènes sur le plan ethnique, religieux et culturel (p. 114) ». Il importe, d’une part, de relativiser cette dernière affirmation, car, suite à quatre décennies d’immigration de masse extra-européenne, les sociétés d’Europe occidentale deviennent hétérogènes sur le plan ethnique, se fragilisent et tentent de pallier ce délitement désormais quasi inévitable par l’avènement d’un État de droit sécuritaire ultra-moderne. L’auteur mentionne, d’autre part, la surprenante demande du « nationaliste » Vladimir Jirinovski qui aurait aimé « loger la moitié de la population du Japon au centre de la Russie (p. 269) ». Le chef du Parti libéral-démocrate de Russiepensait ici en homme d’Empire et non pas en politicien stato-national. Si un jour (proche ?) la guerre civile et le chaos embrasaient l’Occident européen, la Russie accueillerait peut-être des exilés (définitifs ?) venus de France, de Belgique, d’Allemagne, d’Italie ? Déjà, sous la Révolution, de nombreux émigrés vécurent dans l’Empire des tsars. Joseph de Maistre en retira ses magistralesSoirées de Saint-Pétersbourg.

    « En développant une politique de puissance sur le long terme, la Russie apparaît désormais pour un nombre croissant d’Européens mais aussi d’Africains, d’Asiatiques ou de ressortissants du monde musulman comme une forme d’anti-modèle, de contre-modèle, capable de proposer une alternative à la voie sans issue dans laquelle s’est engagé le modèle dominant actuel (p. 160). » Cela agace les médiats occidentaux dirigés par des financiers et des banksters. « La censure existe autant en France qu’en Russie. […] N’est-il pas plus juste que ce soit l’État et non des oligarques ou des banquiers qui contrôlent les médias (p. 200) ? » Dans l’Hexagone, les puissances industrielles et d’argent financent les structures médiatiques. Vincent Bolloré n’a-t-il pas le groupe Canal + (iTélé, C8) et le quotidien gratuit Direct Matin ? Serge Dassault le groupe Le Figaro ? Patrick Drahi Libération, L’Obs, les télés BFMTV et N° 23, la radio RMC ? Martin Bouygues TF1, TMC et LCI ? Arnaud Lagardère Europe 1, Paris Match et Le Journal du Dimanche ? Le groupe bancaire Le Crédit mutuel de nombreux titres de la presse quotidienne régionale de l’Est de la France ? Souvent en contact avec des journalistes « dont le travail s’est, au cours des dernières années et concernant la Russie, avéré être un mélange de militantisme idéologique, d’incompréhension, de mensonge et de mauvaise foi (p. 184) », Alexandre Latsa ne cache pas ses critiques à leur égard. En effet, « majorité de gauche, parisianisme, morale petite-bourgeoise, le journalisme français est devenu la courroie de transmission d’un courant d’idées qui a tendance à négliger l’information et la vérité au profit de l’éducation du grand public (p. 195) ». Il dénonce « cette diabolisation, que certains analystes ont qualifié de guerre médiatique totale, vise essentiellement la gouvernance russe actuelle ainsi que ses prises de position internationales contribuant à l’établissement d’une nouvelle architecture mondiale, davantage multipolaire, que pourtant chacun devrait souhaiter (p. 20) ». Pis, « les années qui passent démontrent le manque d’imagination des commentateurs et leur totale incompréhension de la Russie d’aujourd’hui et de ses élites, mais surtout elles prouvent l’alignement des agences de presse avec les intérêts stratégiques américains et leurs relais actifs de relations publiques (p. 76) ». Les campagnes de presse russophobes réussissent souvent du fait de grandes lacunes sur « le front médiatique, où la Russie connaît une certaine faiblesse (p. 184) ».

    Nécessaire stabilité politique et institutionnelle

    Favorable au libéralisme politique, social, économique et sociétal, la caste intello-médiacratique hexagonale exècre la Russie, défenseur de la « dimension illibérale de l’État [qui] est une constante historique (p. 121) ». La particularité de son système politique, qu’on peut définir comme une démocratie charismatique ou une démocratie illibérale, se caractérise par des forces politiques agencées « dans trois cercles concentriques, en fonction de leur nature davantage que de leur corpus idéologique (p. 84) ». Le premier représente, avec Russie unie, le bloc central de gouvernement. Dans le deuxième gravite l’« opposition de gouvernance (p. 85) », à savoir les communistes, Jirinovski, Russie juste de centre-gauche (membre de l’Internationale socialiste), les libéraux deIabloko et les libéraux-conservateurs de l’Union des forces de droite aujourd’hui dissoute. « Cercle marginal (p. 85) », le troisième rassemble tous les partis dits extrémistes, y compris les nationaux-bolcheviks d’Édouard Limonov. Les belles âmes s’offusquent du manque de renouvellement politique. Et en Afrique du Sud alors ? L’ANC gouverne depuis 1994 sans soulever les mêmes condamnations…Idem pour le géant de la Corne de l’Afrique, l’Éthiopie dirigée depuis 1991 par le Front démocratique révolutionnaire des peuples éthiopiens. Alexandre Latsa n’évacue pas les dysfonctionnements dus à une politique libérale qui assèche le secteur public, et reconnaît même volontiers que « la corruption est un problème qui fait partie de l’ADN de la Russie (p. 102) » en le replaçant sur la longue durée historique, la seule pertinente pour mieux comprendre.

    Avec la politique poutinienne de redressement, « la Russie est […] incontestablement redevenue, malgré les récurrents soubresauts qui la traversent, l’un des principaux acteurs de la scène politique mondiale (p. 11) ». Pour l’auteur, on l’a vu, la Russie « apparaît également comme un nouveau modèle alternatif, que ce soit sur le plan politique, mais aussi sociétal via la promotion des valeurs traditionnelles, religieuses et familiales, qui étaient finalement celles de la “ Vieille Europe ” (p. 12) ». Vraiment ? Et la GPA ? Maria Poumier rappelle que, rémunérée, cette procédure biotechnique « y est légale depuis 2009 et connaît un boum effrayant. Mais l’Église orthodoxe s’y oppose (5) ». Elle tient toutefois à préciser que « cas unique, la législation russe permet à la mère porteuse de garder l’enfant pour elle si elle change d’avis à la naissance. La culture chrétienne orthodoxe règne donc bel et bien encore sur le pays, conclut-elle (6) ».

    Alexandre Latsa se penche enfin sur le dessein géopolitique immédiat de Moscou qui se traduit à travers une Union douanière, une Union eurasiatique calquée sur le modèle de la pseudo-UE et une politique d’hydrocarbures. Le dynamisme russe exercerait un tel attrait que « l’Inde, la Moldavie, le Chili, Singapour, Israël ou la Nouvelle-Zélande ont émis le souhait de rejoindre l’Union douanière, tandis que l’Union eurasiatique pourrait s’étendre à l’est et l’ouest de l’Eurasie en englobant, par exemple, la Bulgarie, la Hongrie, la Mongolie, le Venezuela ou encore le Vietnam et la Syrie (p. 162) » ? Tous ces projets indiqueraient plutôt la résurgence, plus étendue, du COMECON soviétique. Il compare aussi la création de l’État fantoche du Kossovo avec le rattachement de la Crimée à la Russie et juge que le précédent criméen permettra aux Bélarussiens et aux Khazaks de réintégrer la Russie. En est-il si sûr ? Les régimes forts du Bélarussien Alexandre Loukachenko et du Khazak Noursoultan Nazerbaïev construisent de véritables nations reposant aux identités politico-culturelles originales dorénavant moins malléables que des Moldaves tiraillés entre Moscou, Kiev et Bucarest. Sinon pourquoi le tracé du gazoduc North Stream contournerait-il le Bélarus pourtant guère sensible aux sirènes occidentalistes ?

    La difficile question ukrainienne

    Le gouvernement russe entend contester les visées néo-conservatrices occidentales. L’auteur insiste sur le rôle délétère majeur joué par Jean Monnet dans l’intégration de la construction pseudo-européenne au cadre atlantiste dont l’OTAN, le TAFTA et le CETA (le traité de libre-échange avec le Canada) parachèveront l’exclusion finale des Européens de l’histoire. En revanche, « la France, en se rapprochant de l’OCS, pourrait devenir la première puissance européenne membre stricto sensu et ainsi conforter ses positions (p. 291) ». Mais faut-il pour autant qu’une France libérée de la tutelle atlantiste rejoigne un bloc continental eurasiatique ? Certes, Alexandre Latsa a raison d’affirmer que la Russie a une vocation – méconnue – de thalassocratie potentielle. L’URSS le savait comme l’a montré en 1982 le jeune stratégiste Hervé Coutau-Bégarie avec La Puissance maritime soviétique(7).

    Quant aux menées expansionnistes en Ukraine, si elles se comprennent du côté russe, elles n’en demeurent pas moins datées. Alexandre Latsa considère que « le Maidan sera donc une révolution de couleur qui verra une minorité d’activistes radicaux d’extrême droite faire basculer dans la violence des manifestants critiquant, avec sans aucun doute une réelle légitimité et une réelle sincérité, la mauvaise gestion de l’ex-président ukrainien Viktor Ianoukovitch (p. 250) ». Tous ces événements signifient-ils que « l’Ukraine pour notre pays n’est ni une zone d’influence française historique, ni un partenaire économique de poids (p. 288) » ? Et les soldats morts devant Sébastopol lors de l’odieuse Guerre de Crimée (8) ? Et la princesse Anne de Kiev qui épouse le Capétien Henri Ier et devient d’abord reine de France, puis plus tard première régente du royaume ? Et le duc de Richelieu, gouverneur général de l’Ukraine, fondateur du port d’Odessa ? L’auteur commet d’autres erreurs factuels. Il parle de l’« armistice du 8 mai (p. 113) » alors qu’il s’agit de la capitulation de l’Allemagne. Plus grave, l’Ukraine n’aurait aucun « projet national réel (p. 258) ». C’est exact pour les nabots qui dirigent ou ont dirigé l’Ukraine. C’est faux en ce qui concerne les nationalistes « néo-bandéristes ». Certes, ce projet d’ordre national n’existe pas chez Svoboda, cette sorte de FN de pacotille. Il est en revanche tangible, réfléchi et fort avancé au Prevy Sektor et surtout au sein duBataillon Azov. Avec les Italiens de CasaPound, les Grecs d’Aube Dorée et des Espagnols, les patriotes ukrainiens ont eux aussi commémoré le sacrifice de Dominique Venner en 2013 et traduisent ses œuvres. Comprenant le caractère mortifère de l’Union soi-disant européenne, ils ne se résignent pas à rejoindre une Union eurasienne qui nierait leur identité nationale, car le peuple ukrainien existe comme existent en France les peuples corse, basque, breton ou alsacien. Les nationalistes ukrainiens postulent une véritable alternative au-delà du rapprochement avec Moscou, l’alignement obligatoire sur le complexe atlantiste ou le maintien d’une Ukraine seule et isolée. Ils ont réactivité l’ambitieuse vision de l’Intermarum, soit la coopération stratégique entre les nations de la Baltique, de la Mer Noire, voire de l’Adriatique. Le conflit dans les contrées orientales de l’Ukraine est inacceptable d’autant que les descendants de Boréens meurent dans les deux camps. Pourquoi tous ces drames, ces morts, ces familles déchirées ? Une Europe-puissance aurait certainement pu éviter cette tragédie. Aujourd’hui, la réconciliation russo-ukrainienne devient presque impossible. Les Ukrainiens en colère prouvèrent en tout cas leur indéniable courage tandis qu’à Paris, La Manif pour Tous montrait sa couardise foncière et son légalisme pathologique. versant dans la nostalgie soviétique, les républiques indépendantistes de Donetsk et du Donbass acceptent l’appui de mouvements antifas et reprennent les antiennes anti-fascistes qui abrutissent les Européens de l’Ouest depuis 1945.

    L’Ukraine est une jeune nation à qui il a manqué dans les premières années de son indépendance unecolonne vertébrale politique ainsi qu’un État fort que les Khazaks apprécièrent dès 1991, les Bélarussiens à partir de 1994 et les Russes en 1999 ! Cette absence étatique favorisa l’instabilité politique et l’émergence d’oligarchies locales dans une situation comparable aux indépendances post-coloniales d’Amérique latine au début du XIXe siècle. La guerre qui dévaste l’Est de l’Ukraine est proprement intolérable pour tout authentique Européen qui ne peut que déplorer que « pour les Ukrainiens, une rupture terrible est en train de se produire avec leurs frères russes, tandis qu’il est évident que nulle intégration de l’Ukraine, ni dans l’Europe, ni dans l’OTAN, ne devrait voir le jour (p. 256) ». Anthropologiquement boréenne, la Russie – comme l’Amérique du Nord – n’est pas européenne. Elle doit suivre sa propre voie hors de toute ingérence étrangère. Enterrons donc le mythe eurosibérien et l’idée d’une Grande Europe de l’Islande au Kamtchatka. À l’heure où l’Occident ultra-moderne, cosmopolite et humanitariste subit la submersion démographique des peuples de couleurs d’Afrique et d’Asie, détournons-nous des abjectes « Lumières », récusons l’occidentalisme et privilégions plutôt une coopération boréale intelligente de Dublin à Vladivostok en passant par Paris, Madrid, Rome, Berlin, Budapest et Moscou.

    Georges Feltin-Tracol

    Notes

    1 : Cécile Vaissié, Les réseaux du Kremlin en France, Les petits matins, 2016; Nicolas Hénin, La France russe. Enquête sur les réseaux Poutine, Fayard, 2016. Il manque cruellement une grande enquête sur l’Hexagone yankee et les larbins français de la Maison Blanche. Un ouvrage pareil serait à coup sûr plus volumineux qu’un gros bottin téléphonique.

    2 : Anne Dastakian, dans Marianne, du 19 au 25 août 2016.

    3 : Jean-Sylvestre Mongrenier et Françoise Thom, Géopolitique de la Russie, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2016, p. 120.

    4 : Yves Lacoste, « Dans l’avenir, une très grande Europe de l’Atlantique au Pacifique ? », dansHérodote, n° 118, 3e trimestre 2005, pp. 211 – 212.

    5 : Mari Poumier, Marchandiser la vie humaine, Le Retour aux Sources, 2015, p. 137.

    6 : Idem, p. 139.

    7 : Hervé Coutau-Bégarie, La Puissance maritime soviétique, Économica, 1983.

    8 : Érigée en 1860 sur le rocher Corneille avec la fonte du fer des canons russes pris à Sébastopol cinq ans plus tôt, la statue de Notre-Dame de France surplombe Le Puy-en-Velay.

    • Alexandre Latsa, Un printemps russe, Éditions des Syrtes, 2016, 309 p., 20 €.

    http://www.europemaxima.com/lexception-russe-par-georges-feltin-tracol/

  • Pierre Lellouche : Du jamais-vu - une loi américaine transcrite dans le droit français !

    Pierre Lellouche, député de Paris, préside la mission d’information sur l’extraterritorialité du droit américain, mission créée en mars 2016 par les commissions des affaires étrangères et des finances de l’Assemblée nationale.

    Le rapport de cette mission a été présenté le 5 octobre dernier à ces deux commissions.

    Pierre Lellouche donne quelques exemples de cette instrumentalisation du droit au seul profit des intérêts des États-Unis et, évidemment, aux dépens des nôtres.

    http://www.bvoltaire.fr/pierrelellouche/du-jamais-vu-une-loi-americaine-transcrite-dans-le-droit-francais,289872

  • [Éditorial de L’AF n° 2941] Des évêques plus mondialistes que catholiques ?

    Encensé par Libération (du 13 octobre) qui y voit « un texte qui fait du bien », et plus généralement par la presse de l’oligarchie, nous avions tout lieu de craindre le dernier opus du Conseil permanent de la Conférence des évêques de France (CEF), sous le titre "Dans un monde qui change, retrouver le sens du politique".

    D’autant que sa sortie en libraire avait été précédée par un entretien, d’une niaiserie affligeante, de Mgr Pontier, président de la CEF, dans Le Monde (du 14 octobre) — une page et demie ! Grand apôtre du vivre-ensemble « au ras du terrain », l’archevêque de Marseille qui, comme les socialistes de Terra Nova, voit dans chaque migrant ou presque une chance pour la France — « Ce sont aussi des talents qui nous arrivent » ...et dont nous dépouillons leur pays d’origine —, a « un peu honte » quand, contrairement au Liban, voire la Grèce et l’Italie, il ne voit pas notre pays « manifester le minimum d’accueil  ». Il n’a pas, en revanche, « un peu honte » de déconsidérer la Manif’ pour tous du dimanche suivant : car pour Mgr Pontier, le mariage pour tous, et, nous supposons, ce qui va avec, à savoir le prétendu droit à l’enfant, ne « tracassent » qu’ « un certain nombre de Français », qui, en manifestant, « donnent l’apparence d’une “militance excessive”  ». Il y a donc eu à Paris, ce dimanche, 200 000 militants excessifs !

    Ces propos illustrent bien la teneur de l’opus épiscopal : il faut désormais avaliser les évolutions de la « société », terme qui, selon la vulgate communautariste et mondialiste auquel ce texte emprunte son vocabulaire, est employé comme synonyme de « nation » ou de « pays ». Et si la question de l’identité est posée, c’est, là aussi, uniquement pour constater que, entrés dans une société « pluriculturelle  », nous devons positiver.

    Libération a raison sur un point : le diagnostic « n’est pas vraiment neuf », qu’il s’agisse du discrédit de la classe politique, de l’individualisme, du consumérisme et du matérialisme ambiants, de l’éclatement de la société en différents communautarismes, de « la question du sens » au sein d’une « société en tension » et du « contrat social à repenser ». Non, ce qui est intéressant, c’est ce que ce texte révèle de l’état d’esprit de nos évêques, du moins de ceux qui composent la commission permanente de la CEF, ce « pays légal » épiscopal censé s’exprimer au nom de tous. D’autant que leur parole sur le politique est rare, ce qui devrait donner d’autant plus de poids à un texte qu’ils destinent non seulement aux catholiques mais à tous les citoyens français. Ou plutôt non : « aux habitants de notre pays ». Or la différence n’est pas mince.

    Il pourrait en effet paraître paradoxal, alors que ce texte a été publié en complément de celui de juin dernier visant à donner « quelques éléments de réflexion » pour « 2017, année électorale », qu’il ne s’adresse pas en priorité aux citoyens. C’est qu’il s’agit bien, selon le titre d’un rapport commandé par le Gouvernement qui avait fait scandale en 2013, et dont ce texte n’est finalement que la version cléricale, de « faire société commune dans une société diverse », à savoir, comme l’affirment les auteurs du document épiscopal, de « gérer (sic) la diversité dans notre société », le christianisme ne devant plus être sollicité que pour « partager son expérience doublement millénaire et sans renouvelée d’accueil et d’intégration de populations et de cultures différentes dans la naissance d’une identité qui ne nie pas les autres appartenances ». Ou quand l’annonce du message évangélique est réduite à la valorisation d’une chrétienne attitude dans la gestion du vivre-ensemble. Du reste, cette attitude ne « doit pas être une confrontation de vérités, mais une recherche ensemble, en vérité », c’est-à-dire, en bon français, et non plus en sabir estampillé CEF, une recherche, certes emplie de sincérité, mais neutre au plan des vérités évangéliques, puisque toutes les idées se valent dans un relativisme dont on croit que sortira la paix sociale — comme si la société, comme la nature, n’avait pas horreur du vide. Du reste, « liberté, égalité, fraternité », « ces trois mots sont une change pour notre pays » (Mgr Pontier). Au pays enchanté des valeurs républicaines, qu’a-t-on encore besoin de parler d’évangélisation ?

    Remarquons simplement, nous qui ne nous intéressons dans ces colonnes qu’à l’humble bien positif de la cité, que le document avalise, voire revendique, finalement comme une « richesse », cette crise de l’identité nationale, qui entraîne la rupture du lien originel entre le christianisme et la France, qu’une laïcité agressive n’a cessé de distendre depuis plus d’un siècle et que le mondialisme, conçu par nos évêques eux-mêmes comme le nouvel horizon de l’humanité, est en voie de rompre définitivement. C’est là que la confusion entre société et nation est active, puisqu’elle vise, en encourageant l’immigration, à rendre inéluctable l’éclatement culturel et donc à placer « l’idée d’une Nation homogène » au rang des accessoires obsolètes — le concept de nation devant s’effacer derrière celui de société plurielle. Car si l’immigration n’est pas sans poser déjà de graves questions à notre communauté de destin, les évêques anticipent, dans l’esprit de Terra Nova, en déclarant qu’il conviendrait d’ores et déjà, face à l’affirmation de différences communautaires ou identitaires, « de redéfinir ce que c’est d’être citoyen français et de promouvoir une manière d’être ensemble qui fasse sens » — charabia qui signifie simplement l’acceptation d’une société multiculturelle dans une logique communautariste. Et pour bien enfoncer le clou d’affirmer que « le danger serait d’oublier ce qui nous a construits », c’est-à-dire notamment le christianisme, mais dont l’action est manifestement révolue, « ou, à l’inverse, de rêver du retour à un âge d’or imaginaire ». Plus explicite encore, Mgr Pontier, dans Le Monde, évoque une « supposée identité fermée, éternelle, que tout le monde aurait partagée dans le passé ». Voilà à quoi certains de nos évêques ramènent aujourd’hui le baptême de Clovis, et par là-même de la France, aux promesses duquel, en 1980 au Bourget, saint Jean-Paul II demandait aux Français s’ils étaient demeurés fidèles, déjà, sans susciter l’enthousiasme d’un bon nombre de nos évêques. N’osa-t-il pas aller jusqu’à qualifier la France de « fille aînée de l’Eglise » ? Il est vrai : « Dieu nous préserve aussi des saints ! », s’exclame le doyen de Blangermont devant le jeune curé d’Ambrecourt, dans le Journal d’un curé de campagne de Bernanos…

    Pour le rapport socialiste de 2013, il convient de « faire évoluer la société française [...] afin de permettre à toutes les personnes qui résident en France de vivre ensemble, de participer à une “société des égaux”, d’être (re)connues dans leur diversité, [...] simplement pour leur présence sur le territoire national ». Le texte épiscopal ne dit pas autre chose, en s’adressant aux « habitants de notre pays  », et non aux Français, tous ces « habitants  » étant destinés à partager une citoyenneté devenue le prête-nom d’un vivre-ensemble riche d’ « identités plurielles », ...et heureuses ? Et dans la dénonciation de « postures racistes réciproques », comment ne pas voir un écho à la définition européenne de l’intégration comme « processus dynamique à double sens d’acceptation mutuelle de la part de tous les immigrants et résidents des États membres » ? Ne sommes-nous pas tous des migrants, après tout ?

    Ce texte aurait mérité un 10 sur 20 s’il avait été la dissertation sans personnalité d’un potache auquel son professeur d’instruction citoyenne avait demandé de réfléchir sur le vivre-ensemble. Malheureusement il exprime, du moins officiellement, la pensée de nos évêques, manifestement soumise à la logique du mondialisme, prélude au village planétaire. Il n’est pas certain que, là aussi, le pays réel soit en accord avec le pays légal.

    François Marcilhac - L’Action Française 2941

    - Conseil permanent de la Conférence des évêques de France - Dans un monde qui change, retrouver le sens du politique - CERF- MAME - BAYARD, 4 euros
    - Faire société commune dans une société diverse

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?Editorial-de-L-AF-no-2941-Des