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international - Page 1200

  • BHL sur la Syrie : « al-Assad et Poutine ont gagné » –

    BHL s’en prend à la dictature de l’opinion publique. Quand le peuple ne veut pas que des massacres et des guerres illégales soient commis en son nom pour défendre les intérêts d’Israël, BHL estime qu’il s’agit là de la dictature de l’opinion public. Il nous rappelle aussi les bienfaits de ses guerres pour Israël en Libye, en Bosnie… pays contaminés par l’uranium appauvri américain. Il se fout vraiment du monde, mais on a l’habitude.

    Il va même jusqu’à nous expliquer que Bashar Al-Assad est celui qui soutient les isalmistes, alors que nous savons tous que le président Al-Assad et son allié le Hezb’Allah sont ceux qui protègent les Chrétiens contre les islamistes saoudiens soutenus quant à eux par Israël et l’occident.

    Bernard-Henry Lévy, en France comme en Syrie, la dictature de l’opinion publique s’appellent la démocratie.

    http://www.altermedia.info/france-belgique/

  • Education : échec prévisible de la propagande pour effacer la différence des sexes

    PARIS (NOVOpress via Bulletin de réinformation) – La Théorie du genre en œuvre dans la pédagogie à l’école : la ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud‑Belkacem, a lancé un programme “ABCD de l’égalité” qui, d’après le communiqué de sante.gouv.fr , s’adresse à tous les élèves de la grande section au CM2 et à leurs enseignants. Ce programme vise “à déconstruire des stéréotypes de genre”. Une documentation a été mise à disposition. Il est expérimenté dans cinq académies pour cette rentrée 2013 et fera l’objet d’une évaluation pour être généralisé dans toutes les écoles à la rentrée 2014.

    Ce que préconise la documentation à destination des enseignants

    Les enseignants doivent remplir des questionnaires pour débusquer leur stéréotype de genre dans leur pédagogie. Si certaines questions sont légitimes : mes sanctions, mes critères d’évaluation sont‑ils les mêmes entre filles et garçons ? D’autres sont véritablement idéologiques : fais‑je référence à mon appartenance sexuée, à celle des élèves . Est‑ce que je pense à insister sur la neutralité des disciplines ? Est‑ce que les activités visent à briser les stéréotypes ? On invite même à observer la répartition des enfants dans les jeux dans la cour de récréation.

    Quelles ont été les conclusions de telles expériences à l’étranger ?

    En Norvège, une émission de 2010 s’interrogeait sur les effets d’une pédagogie très proche mise en place depuis des années. Or les carrières poursuivies par les hommes et les femmes restent étonnamment et sensiblement les mêmes malgré les programmes scolaires : beaucoup plus de vocations scientifiques et techniques chez les garçons, et beaucoup plus de vocations à fort lien social chez les filles. C’est ce que l’on appelle le paradoxe norvégien de l’égalité des genres. A tel point que l’Institut gouvernemental norvégien pour les études de Genre a cessé de recevoir toute subvention.

    http://fr.novopress.info

  • Le bilan de l’OSDH est concluant : Bachar ne massacre pas son peuple

     

    Le bilan de l’OSDH est concluant : Bachar ne massacre pas son peuple
    L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), un organisme proche de la rébellion financé par les monarchies arabes et les Etats occidentaux et dont le siège se trouve à Londres vient de publier son bilan des victimes de trente mois de guerre en Syrie. Ces chiffres aussi macabres que surprenants révèlent la malhonnêteté des médias mainstream et contredisent la propagande pro-interventionniste.

    Ce 1er septembre 2013, l'OSDH a annoncé qu'en 30 mois de conflit, il y aurait eu 110.371 morts.

    Deux lignes plus loin, l'organisation des droits de l'homme anti-Assad apporte quelques précisions stupéfiantes : au total 45.478 combattants loyalistes auraient été tués depuis le début du conflit.

    Vous avez bien lu : 45.478 combattants loyalistes.

    Cela voudrait dire que depuis le 15 mars 2011 qui marque le début de la révolte, il y aurait en moyenne plus de 15 soldats et miliciens gouvernementaux tués chaque jour.

    Cela signifie aussi que près de la moitié des victimes de la guerre sont des soldats et des miliciens loyalistes !

    Le nombre de « soldats de Bachar » tués est ainsi nettement supérieur au nombre de civils tués.

    D'autre part, l'armée arabe syrienne étant essentiellement composée de conscrits, c'est-à-dire de citoyens qui défendent leur pays, leurs institutions et leur gouvernement, on peut dire que l'armée est indissociable du peuple syrien.

    Par conséquent, il est aussi malhonnête de tenir Assad pour responsable de la mort de plus de 110.000 Syriens comme le font les médias et les militants provocateurs que de mettre le peuple et le gouvernement syriens dos à dos puisque la première victime de la guerre de Syrie, c'est l'armée, donc le peuple en uniforme, donc le « peuple pro-Assad ».

    Venons-en à présent au nombre de victimes civiles. L'OSDH dénombre 40.146 tués.

    Ce chiffre ne distingue pas les Syriens que l'on pourrait globalement qualifier de « pro-gouvernementaux » ou de « pro-rébellion ».

    Le nombre de civils, femmes et enfants inclus, que l'on peut situer dans le camp des pro-Assad, des anti-rebelles ou des neutres est sans doute extrêmement élevé surtout si l'on tient compte des tueries de masse commises ces dernières semaines par les groupes terroristes dans les zones kurdes du Nord du pays (Tell Aran, Tell Hassel, Tel Abyad, Sereqaniye), dans les quartiers et les villages chiites (Nubbol-Zahra, Hatlah), alaouites (Lattaquieh) et chrétiens (Marmarita, al Duvair, Jaramana) et parmi les sunnites patriotes un peu partout dans le pays.

    Les groupes armés anti-régime ont d'ailleurs revendiqué des centaines d'exécutions de civils y compris des enfants, soupçonnés de sympathie envers le régime syrien.

    Parmi les victimes civiles du conflit, comptons également les Syriens massacrés par des groupes non identifiés (Houla en 2012 et Banias en 2013).

    Du côté des victimes de l'opposition armée, l'OSDH a comptabilisé 21.850 tués, soit deux fois moins que de militaires syriens tués et un cinquième du nombre total de victimes de la guerre.

    Ces groupes armés se livrent eux-même à des guerres intestines qui entraînent la mort de nombreux combattants pro-rébellion ainsi que leurs familles.

    Parmi les 40.146 victimes civiles du confit syrien, il faudrait donc tenir compte des centaines de civils pro-rebelles tués par des rebelles.

    Le 26 août dernier, par exemple, une vingtaine d'habitants du village Madmouma à Idlib ont été exécutés par un groupe radical anti-régime. Aucun loyaliste ne se trouvait dans la zone.

    Parmi les victimes de Madmouma, on compte plusieurs femmes et enfants exécutés d'une balle dans la tête. Le groupe rebelle Ahrar Al Cham et l'Etat islamique de l'Irak et du Levant (EIIL) s'accusent mutuellement.

    A la lecture du bilan tragique de l'OSDH, deux conclusions s'imposent :

    Soit on appréhende la situation syrienne d'un point de vue légaliste et l'on dit : « ce n'est pas Bachar mais la rébellion qui massacre le peuple syrien. Par conséquent, l'Etat syrien a raison de lutter contre le terrorisme pour restaurer la paix dans le pays comme n'importe quel autre Etat dans le monde »

    Soit on analyse la crise syrienne sous l'angle humanitaire à l'aune des intérêts du peuple syrien et l'on dit : « Bachar et la rébellion sont pareillement responsables de la violence en Syrie. Dès lors, il faudrait encourager les deux camps à dialoguer afin d'épargner la vie des Syriens. »

    L'une et l'autre conclusion nous amènent en tout cas à défendre la non-ingérence et la paix en Syrie.
    source :
  • Condamnée pour avoir dit à des gauchistes qu’ils constituent une bande d’asociaux

    Condamnée pour avoir dit à des gauchistes qu’ils constituent une bande d’asociaux

     MUNICH (NOVOpress via Lionel Baland) – Le 12 juin 2013, le parti anti-islamisation Die Freiheit (La Liberté) a organisé de 14h à 20 h un stand d’information sur la Marienplatz, située dans le centre de la ville, afin de récolter des signatures en vue de voir organiser une consultation du peuple à propos de la construction d’un centre islamique géant à quelques pas du centre piétonnier de la ville.

    Soudain est apparu un groupe de contre-manifestants habillés en noir, portant des piercings et aux cheveux colorés. Ils se sont assis par terre afin de bloquer l’accès au stand de Die Freiheit. Maria Frank, une courageuse retraitée, s’est faite insultée par un de ces gauchistes qui l’a qualifiée de « xénophobe » et de « personne ayant un casier judiciaire ». Maria Frank, membre du parti Die Freiheit, a répliqué en disant à ces gauchistes qu’ils constituent « une bande d’asociaux ». Ce lundi 16 septembre 2013, Maria Frank a été condamnée pour ce propos par le juge munichois Matthias Braumandl à 1.000 euros d’amende.

    * Maria Frank a été condamnée dans le passé pour avoir écrit que les Turcs et musulmans menacent l’Europe.

    Photo en une : “La bande d’asociaux” est assise par terre ; près de la table ,en chemisier rouge, se trouve Maria Frank. Crédit photo : DR.

    http://fr.novopress.info/141452/condamnee-pour-avoir-dit-a-des-gauchistes-quils-constituent-une-bande-dasociaux/#more-141452

  • Les lanceurs d'alerte : vigies ou pirates ?

    Jullian Assange, Edward Snowdon, Bradley Manning, ces trois personnages hors du commun ont fait beaucoup parler d’eux. Accusés de traîtrise et d’espionnage, tous les trois connaissent, malgré des soutiens d’importance, l’opprobre et la vindicte des institutions politiques. Le premier est reclus dans l’ambassade de l’Equateur à Londres, le second a obtenu, non sans mal, l’asile politique en Russie mais pour une durée limitée et le troisième, misérable soldat de deuxième classe dans l’armée américaine, vient d’être condamné à 35 ans de prison. Quelles étaient donc leurs véritables motivations ? A les entendre, tous les trois affirment avoir livré et détourné des documents diplomatiques et militaires par pur altruisme, dans le seul but de parvenir à une paix sociale en obtenant des gouvernements et spécialement américain de rétablir la « protection de la vie privée », à lutter contre la corruption, etc.
    Polémia s’est intéressée au cas de ces « whistleblowers »  en publiant deux articles issus de la presse anglo-saxonne et dont on trouvera en notes les liens des originaux. « Le Monde », avec le recul, a publié, sous la signature de Frédéric  Joignot journaliste et romancier, une analyse distinguant les dénonciateurs américains des « lanceurs d’alerte » français. La nuance est parfois subtile ; nous la soumettons à la réflexion de nos lecteurs.

    Aux Etats-Unis, les « whistleblowers » dénoncent des dérives ou des abus de pouvoir déjà existants. En France, l’expression « lanceurs d’alerte » désigne ceux qui anticipent un risque environnemental ou sanitaire. La loi commence à les protéger.

    Les « lanceurs d’alerte » sont des personnages controversés, qui font couler beaucoup d’encre. Petit rappel de l’actualité récente : le 22 juin, l’analyste de l’Agence nationale de sécurité américaine, la NSA, Edward Snowden est inculpé d’ « espionnage » pour avoir transmis à la presse les documents top secret des deux programmes de surveillance massive Prism et XKeyscore. Réfugié à Hongkong, il déclare : « Je suis prêt à tout sacrifier, (1) car je ne peux pas, en conscience, laisser le gouvernement américain détruire la protection de la vie privée. » Le 9 août, Barack Obama doit s’expliquer sur ces écoutes généralisées : il assure que les Etats-Unis n’espionnent pas « les gens ordinaires » et promet davantage de transparence. Enfin, le 21 août, Bradley Manning – qui a fourni, courant 2010, 250.000 câbles diplomatiques et 500.000 rapports militaires classés secret défense à WikiLeaks – se voit condamné à trente-cinq ans de prison par un tribunal militaire américain. Aux Etats-Unis, l’ONG Freedom of the Press Foundation (Fondation pour la liberté de la presse) milite pour qu’il reçoive le prix Nobel de la paix.

    Devoir moral

    Dans les deux cas, ces hommes se sont prévalus d’un devoir moral (2) pour divulguer des informations secrètes. Ce faisant, ils sont devenus des héros pour les uns, des irresponsables, voire des traîtres, pour d’autres. Pourtant, l’action de ces citoyens s’inscrit dans une longue tradition américaine, qui remonte à la lutte contre la corruption dans l’armée pendant la guerre de Sécession. Aux Etats-Unis, le whistleblower – « celui qui souffle dans le sifflet » – est un employé ou un fonctionnaire qui révèle à sa direction, à la police ou à la presse la malhonnêteté d’une administration, la corruption d’une direction, un commerce nuisible à la santé ou une atteinte aux libertés, avec la volonté de défendre l’intérêt public. Au Canada, on traduit le mot par « dénonciateur ». Souvent considérés comme des « délateurs » ou des « mouchards », les whistleblowers sont depuis longtemps protégés par les gouvernements américains.

    Ralph Nader, célèbre militant des droits des consommateurs, a donné ses lettres de noblesse au whistle blowing. Dans An Anatomy of Whistle Blowing « une anatomie du coup de sifflet » (Penguin) – texte paru en 1974 dans Whistle Blowing, avec deux essais de Petkas et Blackwell -, il proclame : « La volonté et la possibilité des employés de siffler une faute est la dernière ligne de défense des citoyens ordinaires contre le déni de leurs droits et de leurs intérêts par des institutions secrètes et puissantes.» L’expression devient alors populaire, comme les whistleblowers.

    Les exemples sont nombreux et retentissants

    En 1971, l’analyste militaire Daniel Ellsberg fournit au New York Times les Pentagon Papers (« papiers du Pentagone ») qui dévoilent l’intensification de l’engagement militaire américain au Vietnam, ce qui lui vaut d’être poursuivi pour vol, conspiration et espionnage. En 1974, l’affaire du Watergate est divulguée au Washington Post par Mark Felt, l’un des chefs du FBI. En 1979, lorsqu’un accident grave survient dans la centrale nucléaire de Three Mile Island, des écologistes décident d’alerter le public.

    Toutes ces affaires sont évidemment relayées par de nombreux débats médiatiques. En 1989, le Congrès américain promulgue le Whistleblower Protection Act afin de défendre toute personne apportant la preuve d’  « une infraction à une loi, à une règle ou à un règlement » ou encore d « une mauvaise gestion évidente, d’un flagrant gaspillage de fonds, d’un abus de pouvoir ou d’un danger significatif et spécifique en ce qui a trait à la santé et à la sécurité du public ».

    Cette loi se voit renforcée, en 2000, par le No-FEAR Act, puis, en 2012, par le Whistleblower Protection Enhancement Act. Ces dispositifs n’ont cependant pas empêché l’inculpation d’Edward Snowden, au grand regret de Stephen Kohn, le directeur de l’association National Whistleblowers Center. En effet, la plupart des employés fédéraux dépendant de l’exécutif et du renseignement ne sont pas protégés par le Whistleblower Protection Act.

    « Prophètes de malheur »

    L’expression française « lanceur d’alerte », elle, s’inspire de cette tradition, mais en l’élargissant. Elle a été forgée en France par deux sociologues, Francis Chateauraynaud et Didier Torny, dans leur ouvrage de 1999 Les Sombres Précurseurs. Une sociologie pragmatique de l’alerte et du risque. Mais, selon Chateauraynaud, le terme est apparu pour la première fois fin 1994, au cours de réunions de travail avec le sociologue Luc Boltanski, un spécialiste de la dénonciation des injustices : « C’était l’époque de la maladie de la vache folle et de sa possible transmission à l’homme, se souvient-il. Certains prédisaient une épidémie massive de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, qui a fait plus de 200 victimes humaines. D’où notre intérêt pour ce qu’Hans Jonas, le philosophe qui a inventé l’idée du principe de précaution, appelait “ les prophètes de malheur ” : les chercheurs ou les militants alarmistes, qui voient parfois juste. Mais nous trouvions que les cantonner dans un rôle de Cassandre n’était pas suffisant. »

    C’est la rencontre avec le toxicologue Henri Pézerat, fondateur de l’association Alert – qui a identifié les dangers de l’amiante et obtenu son interdiction en 1997 -, qui sera déterminante. Pézerat ne se considérait pas comme un prophète, mais comme un militant de la prévention des risques professionnels qui a passé sa vie à faire le siège des autorités. Comment l’appeler alors ?

    Affaire du sang contaminé

    « Depuis l’accident de Bhopal, en Inde [fuites de gaz toxique émanant d'une usine américaine], en 1984, et ses 8 000 morts, l’explosion du réacteur de Tchernobyl en 1986, l’apparition brutale du sida ou l’affaire du sang contaminé, nos sociétés semblent avoir perdu en partie le contrôle des progrès technologiques, des pollutions industrielles ou de la surveillance médicale, poursuit Francis Chateauraynaud. Des organismes de vigilance comme Greenpeace se sont développés, prenant le relais des Etats, multipliant les alarmes. De simples citoyens et des chercheurs font la même chose, dénoncent l’aveuglement des administrations et les conflits d’intérêts. D’où l’idée de les appeler des lanceurs d’alerte. A la différence du whistleblower, qui révèle une dérive ou un abus de pouvoir déjà existant, le lanceur anticipe un risque. Il révèle un danger sous-évalué, ou méconnu. Il veut arrêter un processus qu’il croit fatal. Parfois, il décrit des phénomènes inédits, difficiles à prouver. » C’est le cas d’Anne-Marie Casteret qui révèle, dès 1987, l’affaire du sang contaminé, ou d’Irène Frachon avec le Mediator, qui doit mener une longue enquête épidémiologique avant d’être entendue.

    Une longue liste de craintes

    En ce début de XXIe siècle, la liste des craintes s’allonge : réchauffement climatique, érosion de la biodiversité, désertification, déchets nucléaires, pollution chimique, maladies émergentes, dangers de la pénétration dans le corps humain des nanoparticules, surveillance de la vie privée, etc. Celle des lanceurs d’alerte aussi. Cette multiplication des alarmes peut avoir des effets pervers, selon Claude Gilbert, spécialiste des risques collectifs au CNRS : « Une sensibilité excessive à tout signal d’alerte transforme parfois les chercheurs en guetteurs d’apocalypse. »

    « Il faut pourtant les protéger, comme les whistleblowers aux Etats-Unis », affirme André Cicolella, dont l’histoire a fait connaître les lanceurs d’alerte en France. Toxicologue à l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), il constate les effets nocifs des éthers de glycol – les solvants utilisés dans les peintures et les détergents – et organise, en avril 1994, un colloque international sur le sujet. Une semaine avant sa tenue, il est licencié pour « faute grave » par l’Institut. « Ce fut un choc de se retrouver du jour au lendemain sans travail, quand on croyait oeuvrer pour le bien commun, commente-t-il. Mais je ne regrette rien. C’est souvent la destinée des lanceurs d’alerte, au début… » En octobre 2000, la Cour de cassation reconnaît le caractère abusif de son éviction et le rétablit dans ses droits. « L’arrêt reconnaît l’indépendance due aux chercheurs, c’est important, fait remarquer André Cicolella. C’est la première légitimation d’une alerte scientifique allant contre la direction d’une institution. » Que pense-t-il de l’affaire Snowden ? « Il est courageux. Il a choisi l’intérêt public alors qu’il risque sa liberté. »

    Scientifiques placardisés

    Depuis, le toxicologue a créé, avec d’autres chercheurs, le Réseau environnement santé, dont les alertes ont mené en juin 2010 à l’interdiction des biberons contenant du bisphénol A. Il a également milité pour que l’on protège légalement les lanceurs d’alerte. Pour cela, il a rencontré les juristes Christine Noiville et Marie-Angèle Hermitte, spécialistes des risques techniques et scientifiques.

    « Un arrêt aussi clair que celui qui a été rendu en faveur de Cicolella ne suffisait pas, explique cette dernière, il fallait réfléchir à une loi protégeant les gens comme lui. Etablir une typologie. » Durant les années 2000, Marie-Angèle Hermitte a ainsi rencontré beaucoup de lanceurs d’alerte, scientifiques placardisés ou militants décriés. »   « Quand un lanceur d’alerte dénonce un danger ignoré, explique-t-elle, il remet en cause des expertises, des évaluations, des autorisations de mise sur le marché par les agences de vigilance. Il rencontre beaucoup d’animosité, se retrouve isolé ou dénigré, d’autant qu’il peut se tromper. »

    Pour elle, le lanceur d’alerte doit être défendu parce qu’il constitue « une sécurité de dernier recours quand le système de surveillance est défaillant ». Inspirée par le Whistleblower Protection Act et par les décisions de justice en France, elle a travaillé à la rédaction d’un projet de loi sur la protection des lanceurs d’alertes sanitaires et environnementales. Poussé par Marie-Christine Blandin et le groupe Europe Ecologie-Les Verts, le texte a été proposé au Parlement en octobre 2012, puis adopté le 3 avril 2013. Une définition du lanceur d’alerte y est écrite : « Toute personne physique ou morale a le droit de rendre publics ou de diffuser un fait, une donnée ou une action, dès lors que la méconnaissance de ce fait, de cette donnée ou de cette action lui paraît faire peser un risque grave sur la santé publique ou pour l’environnement. »

    Une loi consensuelle ?

    Ronan Dantec, le rapporteur de la loi au Sénat, parle d’une « avancée démocratique et citoyenne majeure ». « Ce n’est pas un texte consensuel, c’est dommage, affirme-t-il. L’UMP a voté contre, à la suite d’un fort lobbying du Medef. Dès la rentrée, je vais me démener pour instaurer la commission nationale qui doit étudier les alertes recensées. »

    Qu’en pense Marie-Angèle Hermitte ? « C’est insuffisant. La loi propose aux lanceurs d’alerte de s’adresser aux préfets pour être entendus, je doute que cela aille bien loin. Il faudrait que la Commission, actuellement sans vrai pouvoir, ait une véritable capacité d’instruction des dossiers litigieux, sans écarter les signaux d’alerte. » Aujourd’hui, même un message d’apparence paranoïaque peut être rattrapé par la réalité.

     Frédéric  Joignot
    Le Monde.fr 5/09/2013
    (article prélevé sur le site du Monde le 7/09/2013 à 14h.30)

    Notes :

    Voir :
    (1) « Ils ont dit la vérité. Ils seront exécutés (Guy Béart) »
    (2) Qui est Edward Snowden ? – Discours de Glenn Greewald, le journaliste qui a divulgué l’affaire Snowden/NSA au monde

  • La démence destructrice de l'Amérique sanguinaire

    http://antiimperialism.files.wordpress.com/2012/04/bloody_us_empire30-e1334864205386.gif?w=650

    L'ivresse de la guerre, nourrie à l'euphorie nationaliste qui s'était emparée du pays au lendemain des attentats du 11-Septembre, s'est aujourd'hui dissipée aux Etats-Unis. La rhétorique ronflante du patriotisme et de la destinée nationale, claironnant notre devoir de refaçonner le monde par la violence, de libérer les opprimés et d'implanter la démocratie au Moyen-Orient, est enfin mise à nu dans toute sa vacuité et son absurdité.
    La machine de guerre a épuisé tous ses stratagèmes éculés. Elle a diffusé en boucle ses habituelles images d'horreurs ; elle a péroré sur le risque, si jamais nous n'allions pas bombarder, de voir l'affreux dictateur tourner ses armes de destruction massive contre nous ; elle a invoqué le  sacrifice de la nation durant la seconde guerre mondiale, le ministre des affaires étrangères Kerry assimilant même la situation à un "Munich contemporain". Rien n'y a fait.
    C'est une remarque désinvolte de Kerry le clown qui a ouvert la porte à une initiative russe, fournissant du même coup au gouvernement Obama une échappatoire commode à son bellicisme aveugle et à ce qui aurait été une humiliante défaite sur la scène intérieure.
    PILLAGE DES FINANCES PUBLIQUES
    Après douze longues et vaines années de guerre en Afghanistan et dix autres en Irak, l'opinion est lasse des mensonges de sa classe politique, écœurée par l'infinie violence de l'empire et opposée à ce qu'on continue à injecter des milliards de milliards de dollars dans une machine de guerre qui dégage des bénéfices colossaux pour une petite coterie d'entreprises du secteur militaro-industriel et de fabricants d'armes, dont Raytheon et Halliburton, pendant que nous sommes économiquement et politiquement phagocytés de l'intérieur. La fête est finie.
    Comme chaque génération le redécouvre devant les corps sans vie de sa jeunesse et le pillage de ses finances publiques par les profiteurs de guerre, le mythe de la guerre est un mensonge. La guerre ne parvient plus à détourner les Américains d'un déclin qui est train de transformer leur pays en une oligarchie des entreprises, en une nation où le "consentement des gouvernés" n'est plus qu'une farce cruelle. La guerre ne peut occulter ce que nous sommes devenus.
    La guerre a fait de nous un pays qui, ouvertement, torture et enferme indéfiniment des êtres humains dans toute une constellation de colonies pénitentiaires d'outre-mer. La guerre dépêche des escadrons de la mort chargés d'assassiner nos ennemis partout sur la planète, y compris des citoyens américains. La guerre nous voit terroriser des populations entières, y compris des populations contre lesquelles nous ne sommes pas officiellement en conflit, par le truchement de drones armés qui survolent nuit et jour de modestes villages du Pakistan, du Yémen, de la Somalie, de l'Irak et de l'Afghanistan.
    La guerre, au nom de la sécurité nationale, a mis en lambeaux nos libertés civiques les plus fondamentales. La guerre a fait de nous le peuple le plus espionné, le plus surveillé, le plus écouté et le plus photographié de l'histoire de l'humanité.
    La guerre a réduit nos plus courageux dissidents et lanceurs d'alerte – ceux-là même qui nous ont dévoilé les crimes de la guerre et de l'empire, de Chelsea (anciennement Bradley) Manning à Edward Snowden – au rang de prisonniers politiques persécutés ou d'êtres traqués. La guerre a constitué quelques immenses fortunes, comme toujours, pendant que nos écoles, nos bibliothèques et nos casernes de pompiers sont fermées au nom de l'austérité budgétaire, pendant que disparaissent nos programmes d'aide sociale pour les enfants et les seniors, que des villes comme Detroit se déclarent en faillite et que le sous-emploi et le chômage endémique. Détroit était le fleuron de la production automobile américaine.
    RÉALITÉ DOULOUREUSE ET AVEUGLANTE
    Plus personne ne connaît la vérité de l'Amérique. Ce vaste village Potemkine que nous sommes devenus, ce mensonge monstrueux que sont les Etats-Unis, passe, de Wall Street à Washington, par la manipulation délibérée des chiffres de la finance et des statistiques officielles.
    Après des années passées dans les vapeurs de l'ivresse, voilà que sonne l'heure du réveil à une réalité douloureuse et aveuglante. Nous voilà confrontés à de sinistres vérités, sur nous-mêmes et sur cette machine de guerre. Nous avons compris que nous ne pouvons pas transposer nos "vertus"par la violence, que parler de droits de l'homme, dès lors que l'on emploie l'arsenal d'armes industrielles de la guerre moderne, est une pure absurdité.
    Nous percevons tout ce qu'ont d'orwellien les déclarations de Barack Obama et de John Kerry assurant à la communauté internationale que les Etats-Unis ne prévoient rien qu'une action "incroyablement petite, limitée" en Syrie, et pas une guerre. Nous savons que les projets du Pentagone pour anéantir les bunkers de commandement, les terrains d'aviation, les batteries d'artillerie ou les lance-missiles utilisés pour des attaques chimiques constituent bien ce que les dirigeants réfutent : une guerre.
    Nous savons que le lancement de plusieurs centaines de missiles Tomahawk par des destroyers et des sous-marins basés en Méditerranée sur des installations militaires et de commandement de l'Etat syrien sera perçu par les Syriens comme un acte de guerre – nous penserions la même chose si ces missiles étaient lancés contre nous.
    "DES DOMMAGES COLLATÉRAUX SONT PROBABLES"
    Un Tomahawk transporte une charge de 450 kg, ou 166 sous-munitions. La puissance destructrice d'un seul Tomahawk est terrifiante ; des centaines de Tomahawks, c'est la mort qui frappe aveuglément depuis le ciel.
    Nous avons entendu cette rhétorique calibrée qui, si jamais la boîte de Pandore de la guerre se trouvait grande ouverte et laissait le chaos s'abattre sur la Syrie, n'exclut pas le déploiement de troupes au sol. Nous avons écouté le général Martin Dempsey, le chef d'état-major des armées, reconnaître que "des dommages collatéraux sont probables" ; nous savons que cela veut dire que des civils seront tués pour empêcher le régime de Bachar Al-Assad de survivre.
    Seule la logique captieuse de la guerre peut donner une apparence rationnelle à un tel énoncé. Cette logique captieuse ne peut plus se cacher derrière le paravent des drapeaux qu'on brandit, de la "gloire" et de l'"honneur" grandiloquents, des discours politiques hypocrites et de l'exaltation qui accompagne la maladie nationaliste : s'il déclenche une nouvelle guerre, Barack Obama et la machine de guerre qu'il sert doivent s'attendre au tollé général d'une opinion révulsée.
    Texte Traduit de l'anglais par Julie Marcot l'échelle de Jacob

    http://1.bp.blogspot.com/-UNIkCKqeuXA/UiIAtOW-biI/AAAAAAAAkOQ/ASpEO9ldT0o/s1600/war-criminals.jpg
    http://konigsberg.centerblog.net/2586-la-demence-destructice-de-amerique-satanique

  • Les moyens de l’indépendance nationale

    François Hollande a attendu le vote du Congrès des Etats-Unis. Comme l’initiative russe le rendait inutile, François Hollande a attendu la conclusion de l’accord entre les Américains et les Russes sur les armes chimiques en Syrie pour s’exprimer.
    Répondant aux questions de Claire Chazal ce dimanche 15 septembre, le président de la République a voulu nous faire croire qu’il avait joué un rôle dans « la tragédie la plus grave du début du 20ème siècle » – en oubliant la tragédie actuellement vécue par l’Afghanistan – alors qu’il n’en fut que le spectateur. C’est bien beau de disserter à la télévision sur les obligations et les sanctions, sur le maintien de l’option militaire, sur le soutien à l’opposition démocratique syrienne… mais les faits contredisent le ton résolu et les formules martiales.
    Notre ministre des Affaires étrangères n’a pas soutenu l’initiative russe mais exprimé à plusieurs reprises un scepticisme rageur et impuissant alors que le président des Etats-Unis sautait sur la perche tendue par Vladimir Poutine pour écarter la fameuse option militaire. Laurent Fabius  préférait sans doute lire les articles imbéciles de « Libération » et du « Monde » qui dénonçaient la « ruse » de Poutine et la « resoviétisation » de la diplomatie russe… Notre ministre des Affaires étrangères n’a pas été convié à Genève pour participer aux discussions entre John Kerry et Sergueï Lavrov : lorsque l’accord a été conclu, Laurent Fabius a été forcé de saluer piteusement une « étape importante ». Pour sauver la face, on prétend à l’Elysée que c’est la menace des bombardements qui a contraint Moscou à changer d’attitude. On oublie que sur le plan militaire les Américains étaient maîtres de la manœuvre. On oublie surtout que Barack Obama, sensible à l’opposition du peuple américain et soucieux de ne pas s’engager dans une affaire à l’irakienne, ne cessait de différer le passage à l’acte et espérait sans doute un vote négatif du Congrès. Entre les Etats-Unis et la Syrie, la Russie a tenu le rôle d’une puissance médiatrice – au grand dépit de ceux qui veulent rejouer la Guerre froide.
    À la faveur de la crise syrienne, François Hollande va-t-il prendre conscience de l’inconsistance de sa diplomatie ? J’en doute. Il pourra continuer à se donner le beau rôle, parce que la France est membre permanent du Conseil de sécurité. Mais s’il voulait mener une politique d’indépendance nationale, il lui faudrait reconsidérer toute la politique militaire de la France et en tirer les conséquences budgétaires. C’est ce que montre très justement le colonel Goya (1). Si la France avait maintenu le même effort qu’au temps de la Guerre froide, explique-t-il, « on aurait investi plus de 200 milliards d’euros (constants) supplémentaires dans notre outil de défense, dont environ 80 milliards en investissements industriels et technologiques. Le budget s’élèverait aujourd’hui à environ 56 milliards d’euros au lieu de 31. Si les contribuables français faisaient le même effort que les contribuables américains ce budget avoisinerait les 80 milliards d’euros ». Cet effort aurait eu des retombées économiques et technologiques en tous points positives mais surtout «nous disposerions d’un outil de projection de forces puissant, second seulement de celui des Etats-Unis. Nous ne serions pas obsédés par l’idée de « peser dans une coalition » puisque nous n’aurions pas besoin de coalition. Nous serions intervenus seuls en Libye s’il avait fallu, nous aurions pu porter nous-mêmes nos troupes au Mali et nous serions capables de lancer une campagne de frappes sur n’importe quel pays proche si le Président de la République le décidait. L’« indépendance nationale » chère au général de Gaulle serait préservée ainsi que la possibilité de constituer une alternance à la protection des Etats-Unis. Nous ne serions pas obligés, phénomène inédit dans notre histoire, d’attendre le vote d’un parlement national étranger pour engager notre propre armée ».
    Il n’est jamais trop tard pour se donner les moyens d’une politique conforme aux intérêts de la France. Mais le propre de la gouvernance, c’est d’organiser sa propre impuissance.
    ***
    http://www.bertrand-renouvin.fr/les-moyens-de-lindependance-nationale-chronique/
    (1)    Lire son article sur le blog « La voie de l’épée » : http://lavoiedelepee.blogspot.fr/2013/09/la-france-troisieme-puissance-militaire.html

  • Le Conflit au Congo: La Vérité Dévoilée - Crisis In The Congo: Uncovering The Truth

  • Montesquieu et les considérations sur la Pax Americana au Moyen-Orient

    Essai philosophique de Jure Georges Vujic.
    Le modèle belliciste américain expansionniste montre plus d’une fois son visage avec l’annonce de l’intervention militaire de l’administration Obama en Syrie. Il semblerait à première vue que les Etats-Unis n’aient tiré aucune leçon de l’expérience irakienne ou libyenne. En fait, il n’en est rien : il s’agit bien, hier comme aujourd’hui, d’un géo-constructivisme agressif qui est à l’œuvre et dont l’objet est d’appliquer par la force aux peuples du Moyen-Orient et du Maghreb la recette du « chaos constructif » qui consiste à exporter le modèle occidental de la démocratie de marché, en déconstruisant et reconstruisant les régimes et les Etats de la région comme de simples  jouets Lego.

    Une stratégie à l’américaine

    Il s’agit bien d’une entreprise belliqueuse (certes, aventureuse) néo-impériale et atlantiste qui compte bien sur la dissémination des micro-bellicismes à l’échelon local, en instrumentalisant des dispositifs identitaires construits artificiellement. A cet effet, l’induction de conflits locaux inter-ethniques, religieux en Afghanistan et dans le monde arabe (chiites contre sunnites), n’est que le fruit de cette stratégie de faible intensité qui tend à entretenir et générer des foyers de tension pour mieux diviser et régner. A propos de cette stratégie, les Considérations inspirées de celles de Montesquieu sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence, écrites en 1734, sont instructives. Elles sont toujours d’actualité et notamment lorsqu’elles se transposent à la Pax Americana, notamment dans le chapitre sur « L’art de la conduite que les Romains tinrent pour soumettre tous les peuples ». On y lit : « Ils tenaient à terre ceux qu’ils trouvaient abattus », « ôtaient une partie du domaine du peuple vaincu pour le donner à leurs alliés », se servaient de ceux-ci pour faire la guerre à leurs ennemis, « ce en quoi ils faisaient deux choses ; ils attachaient à Rome des rois dont elle avait peu à craindre et beaucoup à espérer et en affaiblissaient d’autres dont elle n’avait rien à espérer et tout à craindre ». Après avoir détruit des armées, ils ruinaient les finances en faisant payer les frais de guerre, ce qui forçait les dirigeants de ces pays « d’opprimer leurs peuples et de perdre leur amour ». Les vaincus pouvaient se voir décerner des récompenses éclatantes, notamment le titre convoité « d’allié du peuple romain » : amis, ils n’en étaient que le plus souvent humiliés.

    Comment ne pas songer à la paix versaillaise accablante et honteuse que les Etas-Unis et leurs alliés ont imposée en 1919 à l’Allemagne, avec des réparations de guerre que le peuple allemand devait payer jusqu’en 1988 ? Puis encore comment ne pas transposer cette stratégie d’assujettissement des peuples à la situation des pays du Tiers-Monde, du Maghreb au Pakistan,  sans parler des sanctions infligées aux « Etats-parias » ou « voyous » ?

    Comme au temps de la colonisation espagnole du continent américain contre laquelle s’était levé Bartolome de Las Casas qui prendra la défense des indigènes colonisés (voir la « Controverse de Valladolid », fameux débat au cours duquel il s’illustra), le monde actuel, et plus particulièrement l’Europe, est dominé par le système de « encomienda ». Ce système colonial consistait à donner « en commande » à un conquérant une parcelle de territoire, ainsi que les indigènes qui y habitaient, avec pour but de faire fructifier le pays, lever l’impôt et christianiser les indigènes. Comme hier dans le « Nouveau Monde », nous vivons presque dans une « encomienda » globale, une terre d’Europe en friche exploitée par l’oligarchie financialiste globale.

    Aujourd’hui, le colon a rangé sa soutane de jésuite pour propager aux quatre coins du monde parmi les indigènes la nouvelle foi dans le monothéisme du marché, des bienfaits matériels de la société de consommation, de la culture coca-cola, de la musique techno et rap et en l’adhésion inconditionnelle aux sacro-saints dogmes de la démocratie de marché et en l’idéologie des droits de l’Homme. Comme hier lorsque les tuniques bleues pacifiaient les Indiens en les abreuvant de whisky, aujourd’hui nos indigènes européens sont amadoués par les drogues douces de la société de consommation, les sédatifs hédonistiques de la cité de la joie permanente. Bernanos avait raison, la grande tragédie de notre siècle de néocolonisation globale réside dans la duperie généralisée.

     En effet, la fin de l’ordre bipolaire, avec l’effondrement de l’URSS, permettait aux Etats-Unis, comme puissance dominante du moment, d’en revenir à la politique de la canonnière. La mise en œuvre d’une telle politique est le produit d’un approfondissement des réflexions stratégiques entreprises depuis 1984 sur les opérations de dissuasion sélective. Ces opérations, après avoir planché sur les conflits de faible intensité, étudièrent les moyens à mettre en œuvre pour faire face à des conflits de moyenne intensité, qui mettaient en scène des puissances régionales disposant d’un important armement conventionnel comme la Syrie et l’Irak.

    Dans les pays les plus faibles on utilise la stratégie du « coupe-feu » qui consiste à monnayer, au prix d’une libéralisation du marché, le bouclier protecteur d’Oncle Sam et le titre d’allié. Là où le pays est plus récalcitrant et « entêté », on met en œuvre le concept de conflit de moyenne intensité qui implique la mise au point de nouvelles techniques d’intervention prévoyant le transport sur de longues distances, et dans les délais les plus brefs possibles, des troupes nombreuses et un matériel conventionnel important capables de faire la différence face à des ennemis disposant d’une puissance de feu non négligeable.

    Bref, pour soumettre l’ennemi, on utilise tout d’abord la dissuasion, le « pressing diplomatique », euphémisme pour un chantage économico-financier, où sous prétexte de pacification on intervient militairement et médiatiquement comme ultime recours. Ainsi, Grenade, l’Afghanistan, la Guerre du Golfe, la Bosnie Herzégovine, le Kosovo, l’Irak, la Libye ne sont que des théâtres où les Etats-Unis ont été en mesure de tester la pertinence de leurs schémas théoriques stratégiques et la fiabilité de leur logistique et de leur armement. Là où il n’y avait pas de conflit dans une zone géostratégique convoitée par Oncle Sam, on induisait artificiellement et volontairement des conflits de faible ou de moyenne intensité pour prétexter une intervention hypothétique.

    Les Etats-Unis sont passés maîtres en l’art de générer le « chaos  constructif » et minuté.

    La lecture de Montesquieu

    Mais poursuivons la lecture de Montesquieu. L’utilisation des peuples voisins étaient en général la tactique adoptée. « Quand deux peuples étaient en guerre, quoiqu’ils n’eussent aucune alliance ni rien à démêler entre l’un et l’autre, ils ne laissaient pas de paraître sur la scène et de prendre le parti du plus faible. C’est l’illustration de la politique d’alliance des Etats-Unis vis-à-vis des conflits régionaux de type Ossétie, Bosnie, Arménie, etc. Ils s’appuyaient toujours sur des alliés à proximité du peuple qu’ils désiraient vaincre, alliés qu’ils avaient créés de toutes pièces. « Ils n’accordaient point de paix à un ennemi qui ne contînt une alliance, c’est-à-dire qu’ils ne soumettaient point de peuple qu’il ne leur servît à en abaisser d’autres ». Les peuples soumis ou à soumettre mettaient tous leurs espoirs dans un tel traité. Pour Rome, la paix n’était qu’une manière de préparer la guerre et les traités n’étaient que des suspensions dans la guerre. Les peuples vaincus, soumis ou à se soumettre, n’étaient jamais épargnés même dans l’humiliation : après chaque victoire Rome suscitait deux factions, s’immisçait dans les affaires intérieures, utilisait les opposants qualifiés « d’alliés du peuple romain » et divisait afin d’affaiblir. De l’Honduras, du Salvador au Nicaragua, en passant par le Chili, toute la politique étrangère et militaire des Etats-Unis est ici expliquée en quelques mots.

    Néanmoins, Montesquieu constate que Rome « avait une manière lente de conquérir », « car il fallait attendre que toutes les nations fussent accoutumées à obéir comme libres ou comme alliés avant de leur commander comme sujettes ». C’est ce qui distingue la mission civilisatrice universelle qu’entreprenaient les légions romaines dans les quatre coins du monde dans le respect des religions et de la diversité des peuples sujets, et l’unipolarité hégémoniste des Etats-Unis d’aujourd’hui qui ne propose aucune vision du monde (ou du moins américano-centrée) ni de véritable projet de société : elle ne fait que broyer impitoyablement, tel un rouleau compresseur, les peuples qui refusent de se soumettre aux diktats de l’argent roi, du libéralisme mercantile, de la loi du marché et de la société multiculturelle. La stratégie utilisée est celle que préconise Brzezinski : une stratégie totale qui vise, par le biais de la fragmentation et de la déstabilisation (théorie du « chaos constructeur »), à coloniser des Etats « voyous » et à contrôler les zones riches en ressources, sans rien donner en contrepartie.

    Il n’existe plus de dialogue loyal autour du thème de la globalisation entre les pays riches et les pays pauvres. Il n’existe qu’un monologue américain à travers ses diverses courroies de transmission, qui devra consolider sa suprématie par l’intermédiaire de la « dépersonnalisation » des peuples et des nations et « l’interpersonnalisation » desdites ploutocraties et des trusts dominants qui sont les rouages de la globalisation.

    La « zoologisation » 

    La globalisation, par le jeu d’une uniformisation du génotype, aboutit à un racisme contemporain à nouveau visage en générant une « zoologisation » du monde dans laquelle on assiste à un nouveau partage social darwiniste des espèces. Le globalisme à ce titre, comme l’a si bien remarqué Peter Sloterdjik, constitue le champ expérimental « de nouvelles règles pour un parc humain ». En ce sens cette nouvelle forme de déterminisme globaliste n’a rien à envier aux théories racistes ou socio-racistes de Gobineau, Spencer, Glumpowitz, Galton, Malthus, Hobbes et Mendel. Le globalisme est une « tumeur » pathogène de la civilisation de la Renaissance, qui dans le sillage de l’anthropomorphisme et de la technoscience a fini par broyer les peuples et les identités pour le seul intérêt de l’oligarchie mondiale de Paris, Londres et Wall-Street. En l’espèce il est difficile alors d’être un esprit libre, alors que, comme Sénèque l’a dénoncé, « l’opinion conformiste de seconde classe d’essence scientifique a le monopole de la vérité ».

    L’ambivalence de cette mentalité scientiste dominante est la conséquence de la dissociation de la philosophie de la sciensa (sens) et sa domestication à des fins économiques et mercantiles. Le globalisme n’est qu’un symptôme d’une accélération générale de la dynamique capitaliste, qui (comme le démontre Paul Virilio) par excès de vitesse démultiplie les conflits inter-ethniques et géo-économiques. Gilles Deleuze avait noté cette évolution : « Le capitalisme statique », la vieille taupe a muté vers un capitalisme financier et fluide, incarné par le serpent des sociétés de contrôle. Victor Hugo constatait déjà en son temps qu’au nom de la pseudo-démocratie globalisante, « peu de progrès a été effectué alors que l’exercice de cette utopie coûte de plus en plus cher ». Dostoïevski proclamait que la chance trouve ses sources dans la souffrance : le globalisme trouvera-t-il un second salut dans le génocide des peuples et des cultures ? Peut-être trouvera-t-on la réponse à cette question en relisant les thèses de Schumpeter sur les capacités transformatrices du capitalisme (la fameuse « destruction créatrice » qui, transposée à la géopolitique américaine, s’identifie au « chaos constructif ») et les leçons d’Etienne de La Boétie données dans son Discours de la servitude volontaire.

    Jure Georges Vujic http://www.polemia.com
    Avocat au Barreau de Paris, diplômé de la Haute école de guerre des forces armées croates,

    collaborateur de l’Académie de Géopolitique de Paris et contributeur à la revue  Géostratégiques et au site Polémia.com
    6/09/2013

    Les intertitres sont de la rédaction

    Notes :

    - Montesquieu, Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence, Michael Prudhomme, 2007.

    - Zbigniew Brzezinski, « Puissance américaine et stabilité mondiale », Fondation pour la Recherche Stratégique (FRS), Puissances et Influences, géopolitique et géostratégie à l’aube de l’an 2000, sous la direction de François Géré et Gérard Chaliand, Mille et Une Nuits, 1999.

    - Paul Virilio, Vitesse et Politique, essai de dromologie, Galilée, 1997.-Paul Virilio, Stratégie de la déception, Galilée, 2000.

  • Poutine, l’homme qui les rend tous fous


    Les Occidentaux étaient persuadés que sur le front syrien, on ne pouvait rien attendre de la Russie. Et voilà que Poutine lance une initiative diplomatique qui fait bouger les lignes. Comment expliquer ce tête à queue ?

    Ce sont les aléas d’une actualité mouvante mais aussi les conséquences des esprits formatés par des a priori idéologiques. Dans son numéro de cette semaine, L’Express publie un article fort circonstancié titré : «Poutine ou les calculs de « M. Niet ». Décryptons la formule pour les plus jeunes et pour ceux qui ne sont pas férus de Kremlinologie. En somme, à l’instar de feu Andreï Gromyko, ministre des affaires étrangères de l’époque soviétique, l’actuel président d’un pays appréhendé comme un remake de l’URSS ne peut que dire Non à tout.

    Manque de chance, il n’a pas dit « Niet » mais « Da » à la suggestion de John Kerry sur les armes chimiques de la Syrie. Patatras. C’est le monde à l’envers. Du coup, l’analyse de L’Express tombe complètement à plat (ce n’est pas exceptionnel) tout comme les clichés véhiculés dans les médias occidentaux pour qui Poutine est à la fois un Diable, un Soviétique en peau d’ours et un imbécile.

    Certes, on ne peut comprendre la Russie sans son passé soviétique ou même tsariste. Et pourtant, rien ne ressemble moins à l’URSS que la Russie d’aujourd’hui, convertie aux dogmes de l’hyper capitalisme fou. De même, si Poutine n’a rien d’un petit Saint orthodoxe, s’il perpétue des traditions antidémocratiques tenaces, il est absurde de le réduire à une marionnette de l’ex KGB, comme on le lit en permanence dans Le Monde ou dans les écrits des nostalgiques de la guerre froide. Quand Bush père était à la Maison Blanche, on ne rappelait pas permanence son passé de dirigeant de la CIA.

    La Russie a donc pris tout le monde à contre-pied en ouvrant une porte diplomatique. Surprise dans les chaumières. Quoi ? Les Russes, ces rustres que l’on dit incapables de sortir de l’obstruction permanente au Conseil de sécurité de l’ONU peuvent reprendre une suggestion américaine afin d’ouvrir une alternative à la guerre ? Comment est-ce possible ? Manifestement, ça l’est. On ne peut d’ailleurs exclure que Barack Obama en soit fort satisfait, lui qui voyait arriver l’hypothèse d’un Waterloo politique au Congrès comme un Tomahawk mal dirigé tombant sur la Maison Blanche. On peut même penser que des discussions secrètes ont été menées depuis plusieurs jours entre les représentants des deux pays.

    Certes, la question de la Syrie n’est pas réglée pour autant. Certes, il faut s’assurer de la faisabilité du projet. Certes, on peut douter de la bonne volonté de Bachar El Assad. Certes, on peut penser que dans les rangs de la rébellion, certains auront tout intérêt à faire capoter l’opération. Certes, il ne sera pas facile d’aller chercher les armes chimiques dans un pays déchiré par la guerre civile. Bref, le plus dur est à venir.

    Reste que le pire a été (peut être) évité, à savoir l’engrenage guerrier aux lendemains indécis. Force est de reconnaître que la Russie y aura pris une part non négligeable, prouvant ainsi qu’elle ne se réduit pas aux raccourcis manichéens en vogue dans les gazettes. Les adeptes de la diplomatie du missile diront qu’une telle perspective aurait été inenvisageable sans la menace militaire exhibée par les Etats-Unis et la France. C’est possible, mais ce n’est pas certain. On peut aussi y voir la volonté de ne pas rajouter la guerre à la guerre dans un pays d’ores et déjà éclaté.

    Dans ce conflit, rien ne pourra se faire sans la Russie et a fortiori contre elle. Ses liens avec la Syrie sont connus. On peut sans doute les critiquer compte tenu de ce qu’est le régime en place à Damas, mais ils ne sont guère différents de ceux entretenus par les Etats-Unis avec l’Arabie Saoudite et le Qatar, qui ne sont pas vraiment des modèles de démocratie. Quoi qu’on pense de Poutine, il ne fait que dire à haute voix ce que disent les dirigeants de nombre de pays (comme l’Inde, le Brésil, l’Argentine, l’Afrique du sud, la Chine) et la plupart des membres de l’Union Européenne).

    Evitons les raccourcis, les diabolisations et les procès d’intention qui font écrire au Monde que « la nouvelle donne diplomatique suscite des inquiétudes ». Ah bon ? Parce que l’ancienne donne, celle qui devait déboucher sur les bombardements suscitait de l’espoir ? Si, pour l’heure, le risque d’un aventurisme guerrier a été écarté, c’est parce que certains pays, à commencer par la Russie, ont su trouver une voie que d’autres, aveuglés par la folie guerrière, n’ont pas voulu étudier.

    Cela ne change rien à la nature du régime syrien. Cela n’enlève rien à la nécessité de faire toute la lumière sur des exactions qui ont conduit la Commission d’enquête de l’ONU à dénoncer les « crimes contre l’humanité » commis par les forces gouvernementales et les « crimes de guerre » perpétrés par une opposition gangrenée par les djihadistes, comme en témoigne le journaliste de La Stampa, Domenico Quirico, détenu cinq mois en Syrie. Mais cela devrait amener à regarder le monde avec les lunettes d’aujourd’hui et non avec des clichés hérités d’une époque révolue.

    Jack Dion http://www.voxnr.com/cc/etranger/EFZAEylklZVpHZyWtm.shtml