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tradition - Page 272

  • Les journées du patrimoine commencent par la défense de la famille

    Depuis ce matin, plus de 1000 volontaires et sympathisants de La Manif Pour Tous sont réunis au Parc Floral de Vincennes (Paris) pour la 1ère université d’été du mouvement né à l’automne 2012 en opposition au projet de loi Taubira de mariage et adoption pour les personnes de même sexe.

    A l'ouverture de l'Université d'été de La Manif Pour Tous, Ludovine de La Rochère a déclaré que, en 15 jours, 37535 personnes ont répondu au questionnaire de sympathisants. Parmi lesquels 93% veulent continuer à s'engager avec LMPT.

    L
    Ici, les sweat interdits sont acceptés !

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    Puis Chantal Delsol revient sur la notion de progrès dans les sociétés. C'est ce WE les journées du Patrimoine. Les journées du patrimoine commencent par la défense de notre patrimoine le plus cher : la famille.

    http://www.lesalonbeige.blogs.com/

  • Pour une entrée en Tradition

    Prolégomènes à une métaphysique opérative
    L'idée de Tradition, au sens guénonien du terme, connaît aujourd'hui un incontestable regain d'intérêt dans des milieux encore quantitativement restreints mais qui n'en paraissent pas moins appelés à jouir d'une influence grandissante, encore que celle-ci doive surtout, de par sa nature “subtile”, se faire sentir sur un plan très largement ignoré du grand public. De même, un certain nombre de personnes, légitimement insatisfaites des réponses apportées par le monde moderne à leur exigence spirituelle, poursuivent, le plus souvent à titre individuel, une recherche dans ce domaine, en s'appliquant à éviter autant que faire se peut les pièges d'un spiritualisme dévoyé et humanitariste. Devant cette situation, nous voudrions tenter d'apporter dans les lignes qui vont suivre une clarification quant à la véritable nature de la “Tradition” dont les premiers se réclament et à laquelle les secondes aspirent. Il nous semble en effet que le mot, s'il n'est pas toujours, à proprement parler, galvaudé, n'est que trop rarement employé dans la plénitude de sa signification, des valences secondaires lui étant trop fréquemment attachées. Cette volonté de clarification nous conduira également à préciser ce qu'il convient d'entendre, dans l'optique Traditionnelle, lorsque référence est faite à la “métaphysique”.
    Envisagé dans la plénitude effective de sa définition, le mot “Tradition” ne désigne essentiellement nulle autre chose que la perception de l'immanence de la Transcendance, suivie de la transmission doctrinale de la possibilité de cette perception. Est donc “traditionniste”, pour employer le néologisme forgé par Pierre A. Riffard (1), tout homme qui vit hic et nunc cette Transcendance, c'est-à-dire qui ressent dans son Esprit, son âme et sa chair ― indissociablement ― l'action de celle-ci, sur le plan tant personnel qu'historique et / ou politique. Les mots n'étant que ce qu'ils sont, cette sensation renvoie, dans ses profondeurs ultimes, au registre de l'indicible, ce dont les adversaires de la vision du monde Traditionnelle ne manquent pas de tirer argument pour reléguer cette dernière au rayon des sous-produits de l'idéalisme, quand ce n'est pas à celui des délires quasi-psychotiques. Dans ce dernier cas, la volonté de vivre l'enseignement Traditionnel est ramené à un phantasme de réunification fusionnelle, affirmé fondé sur la nostalgie refoulée de l'état de non-séparation entre mère et nourrisson. Il n'est plus alors question de dépassement de la condition humaine et de rattachement au divin, mais au contraire de régression, soit intellectuelle soit affective, soit les deux à la fois. L'expérimentation de la Transcendance, identique, dès lors qu'elle est stabilisée, à la re-divinisation, ne s'analyse plus, dans le cadre de cette conception spirituellement mutilante, que comme une hallucination, provoquée par le désir angoissé d'échapper à la condition d'être « marqués par leur radicale finitude », ainsi que l'écrit un auteur par ailleurs intéressant mais qui n'en confond pas moins trop facilement la pensée de la Tradition avec sa parodie New Age (2).
    En réalité, que l'appel à l'Esprit puisse effectivement, dans certains cas, cacher un malaise existentiel, le fait n'est pas niable, encore que les conséquences en soient parfois, même dans ces conditions, bien plus positives qu'on ne veut bien l'admettre (3). Mais vouloir à toute force tout ramener à cela, généralement, d'ailleurs, pour les besoins d'une cause partisane, philosophique ou religieuse, plus ou moins avouée revient à adopter l'attitude moderne par excellence qui consiste à toujours prétendre expliquer à bon droit le supérieur par l'inférieur, et à ne reconnaître in fine de légitimité au premier que du moment que l'on est (croit-on) parvenu à le réduire au second (4). Face à une contestation ainsi dirigée, la réaction des hommes de Tradition ne peut être d'engager la discussion selon une tactique “arguments / contre-arguments”, ceci en raison du caractère d'indicibilité ultime de l'expérience de l'immanence de la Transcendance mentionné plus haut. Il n'est pas pour autant question pour eux de se draper dans leur superbe pour mieux poitriner aux quolibets, ni davantage de reprendre à leur compte quelque saugrenu credo quia absurdum, mais simplement de relever que l'affirmation et sa réfutation ne sont pas, en l'occurrence, au même niveau, qu'elles ne renvoient pas, précisément, au même registre. C'est pourquoi il n'y a, à parler strictement, rien à répondre à qui nie la possibilité d'atteindre ― c'est-à-dire de retrouver ― des états de conscience supérieurs à celui partagé par l'immense majorité de factuelle humanité, ou, à plus forte raison, qui rejette l'éventualité même de l'existence de ces états. Ce qui doit parler ici, c'est seulement la force de l'exemple. Non que chacun soit libre de le suivre ou non, d'accepter ou de refuser la transmission (le tradere) de la doctrine puis de s'engager dans l'expérience de la Transcendance vécue en mode immanent. Il y a tout au contraire en ce domaine comme l'effet d'une Grâce (si l'on veut s'exprimer à la manière des théologiens) qui détermine pour chacun, au moins dans les conditions de son existence présente, une manière de prédestination (5).
    On comprend aisément que ce vécu immanentiste de la Transcendance soit plus que difficilement compatible avec toute forme d'exclusivisme religieux, surtout militant et prosélyte. La forme, certes nécessaire sur son plan propre, que telle ou telle religion donne à l'expérience de la Transcendance a en effet pour conséquence inévitable de “figer” celle-ci dans son expression, ce par le mouvement même dans lequel elle en dévoile l'existence ; c'est pourquoi une religion peut être tout aussi bien un chemin d'accès à l'Absolu que l'occasion d'un piétinement, si ce n'est d'un égarement, spirituel. Nous retrouvons ici la distinction bien connue de l'ésotérisme et de l'exotérisme, distinction qui repose en dernière instance sur la faculté de passer, littéralement, “au travers des formes”. Il faut également souligner qu'un tel vécu interdit le culte de tout “impératif catégorique” moral, quelle qu'en puisse être la source. Dût ceci choquer certains parmi nos lecteurs, nous affirmons que la Tradition, parce qu'elle est d'essence métaphysique, ne saurait être en aucune manière “morale”. Si l'on veut authentiquement retraduire en langage normatif l'expérience des états supra-humains, c'est sur le plan de l'éthique et non sur celui de la morale qu'il convient de se situer, la seconde étant universaliste par définition alors que la première est différentialiste au sens où elle ne connaît d'autre loi que celle qui s'impose, à des fins de conservation (6), à un être particulier en fonction de sa nature propre, c'est-à-dire en fonction du niveau d'expérimentation de la Transcendance dont il est effectivement capable. Que des normes soient ― si l'on peut dire ― encloses dans chacun des « états multiples de l'Être » (7), nous ne songeons nullement à le nier. Mais, précisément parce que chaque norme est consubstantielle à l'état au niveau duquel (et à partir duquel) elle se manifeste, aucune d'entre elles ne saurait se prévaloir d'une validité universelle (8). C'est pourquoi celui qui atteint l'Absolu ne peut plus connaître de normes, puisqu'il les a toutes expérimentées et finalement dépassées, un tel être devenant donc « à lui-même sa propre Loi » (9). La morale possède certes sa justification sur le plan qui est légitimement le sien, celui de l'aide apportée, si l'on veut à la manière d'une béquille, aux individus incapables de se rendre authentiquement libres et donc de se tenir debout par leurs seules forces. Mais lui accorder une valeur éminente, c'est couper l'accès à l'Absolu, en bornant l'expérience de la Transcendance à l'un des niveaux de la Manifestation illusoirement posé comme ultime. De fait, l'Absolu ne mériterait pas son nom s'il ne contenait toutes les normes, y compris les plus “immorales”, chacun des « états multiples de l'Être » manifestant telle d'entre elles selon sa potentialité et sa valence particulières. Dès que conscience est prise de ceci, le refus d'un comportement quelconque ne peut plus se fonder sur des préceptes affirmés valides dans l'universel, mais uniquement sur l'affirmation de valeurs supérieures d'un point de vue métaphysique, c'est-à-dire témoignant d'un état de l'Être plus élevé et contenant de ce fait les précédents états qu'il dépasse selon le principe de l'intégration hiérarchisante. Repousser cette conception revient à rejeter principiellement la nécessaire dimension destructrice de l'Être et donc à mutiler intellectuellement l'Absolu.
    Ces précisions indispensables étant apportées, la Tradition commence à apparaître sous son jour véritable. Ce dont celle-ci témoigne, c'est d'une Connaissance expérimentale, celle de la présence active de forces non-humaines dans le monde des hommes. Mais il faut prendre garde de n'enfermer la formule dans une dimension ni étroitement théiste ni, à l'inverse, vaguement “occultisante”. Ce qui est évoqué ici, ce n'est pas faction providentielle d'un Dieu personnalisé ou les agissements de “Supérieurs Inconnus” et autres entités plus ou moins désincarnées. Que de pareilles choses appartiennent au possible ― et tout particulièrement les secondes ―, nous ne songeons pas le moins du monde à le nier. Mais il s'agit là de phénomènes qui renvoient, du seul fait qu'ils sont, précisément, des phénomènes, au domaine de la physique (10), non à celui de la métaphysique. La Connaissance Traditionnelle, de nature authentiquement métaphysique parce que d'essence contemplative, est celle de l'Action, impersonnelle et détachée, de l'Absolu en tant que Source d'où jaillissent et où retournent s'anéantir tous les contraires dyadiquement unis dont l'entrelacs cosmique forme la trame de la Manifestation (11). La perception de l'immanence de la Transcendance repose sur la contemplation de (et la participation à l'éternel maelström d'Énergie qui danse sans début ni fin au sein du Vide universel comme dans le Cœur de l'Homme (12), maelström que l'Hindouisme représente par l'image du Shiva Nataraj dans un cercle de flammes (13). C'est sur cette base qu'il revient à chacun, s'il en ressent la vocation et entend l'appel de ce qui en lui est plus que simplement humain, de tenter, au risque très réel d'y perdre la raison et sans doute bien davantage, de faire sien ce « chaos vivant dans lequel est contenue chaque possibilité » (14), d'unir indissolublement en lui-même Connaissance et Puissance, ce qui est la seule manière réelle de dépasser tout aussi bien le nihilisme (Connaissance désespérée car sans Puissance) que le titanisme (Puissance enivrée car sans Connaissance). Si la quête vient à être couronnée de succès, celui qui l'aura menée à terme en recueillera les lauriers destinés à ceux auxquels il a été promis qu'ils re-deviendraient “comme des dieux”, c'est-à-dire qu'ils retrouveraient leur nature originelle non bornée. Toute la légitimité de la Voie tantrique, plus spécialement dans son orientation dite “de Main Gauche”, en tant que mode de déconditionnement et de réintégration au Divin reposant sur une intensification énergétique appropriée aux conditions du Kali Yuga, est là.
    Cette mention du caractère originellement non borné ― donc essentiellement et absolument libre ― de la nature humaine, caractère qui la constitue immédiatement en tant que « préternature » selon la formule de Pierre Gordon (15), nous conduit à examiner le sens du mot “métaphysique” tel que l'emploient les traditionnistes afin de dissiper une confusion. En effet, la métaphysique Traditionnelle n'est pas la métaphysique moderne, celle des traités de philosophie rédigés dans le sillage du réductionnisme ontologique aristotélicien (16), même si l'assimilation est aujourd'hui trop répandue qui mène à ne voir dans la métaphysique qu'une espèce de sous-catégorie de la philosophie au surplus rendue obsolète par les prétendues conquêtes intellectuelles du positivisme logique (17). Or la métaphysique n'est pas la philosophie mais autre chose et davantage que celle-ci ; l'opposition complémentaire des deux disciplines renvoie à celle du sacré et du profane, et leur confusion en dit par elle-même long sur l'état réel du monde moderne (18). Non que la seconde soit dépourvue de sens et donc de légitimité. Mais la quête du Vrai qui la constitue et la « passion de la vérité » (19) qui l'évertue ne peuvent prétendre, du simple fait que la philosophie est une démarche tout humaine avec les limitations que cette qualification implique, s'élever au-dessus des horizons de l'intelligence logico-conceptuelle et spéculative. D'où la volonté, chez ceux qui en tiennent pour la thèse de la métaphysique philosophique, de parvenir à l'élimination de celle-ci.
    Le cas d'un Ludwig Wittgenstein est de ce point de vue tout à fait significatif. En écrivant la phrase fameuse qui clôt le non moins fameux Tractacus (20) : « Ce dont on ne peut parler, il faut le taire », celui-ci n'aurait fait qu'énoncer une banalité fort peu “philosophique”, s'il n'avait eu pour projet, ce faisant, de mettre fin à la métaphysique en démasquant derrière celle-ci une faiblesse logique, létale selon lui, qui proviendrait du caractère d'au-delà du langage qu'il lui impute. « La juste méthode de philosophie serait en somme la suivante : ne rien dire sinon ce qui se peut dire, donc les propositions des sciences de la nature ― donc quelque chose qui n'a rien à voir avec la philosophie ― et puis à chaque fois qu'un autre voudrait dire quelque chose de métaphysique, lui démontrer qu'il n'a pas donné de signification à certains signes dans ses propositions. Cette méthode ne serait pas satisfaisante pour l'autre ― il n'aurait pas le sentiment que nous lui enseignons de la philosophie ― mais elle serait la seule rigoureusement juste », lit-on un peu plus haut (21) dans le même ouvrage. Mais la métaphysique que Wittgenstein poursuit de sa vindicte n'est que la métaphysique des philosophes, non la seule métaphysique que l'on doit tenir pour authentique précisément parce qu'elle se situe par-delà les enchaînements purement logiques (formels) de la philosophie, ce que l'emploi synonymique des deux termes dans le passage cité montre sans hésitation possible.
    De la métaphysique authentique, on ne saurait d'ailleurs dire qu'elle est indicible formellement, même si elle le demeure, avons-nous dit, fondamentalement, l'indicibilité métaphysique de l'Absolu par le relatif que constitue le langage étant tout autre chose que l'indicibilité absolue de la métaphysique, ce dans la mesure où, si le signe n'est certes pas le sens, il n'en représente pas moins sa trace. Trace à dire vrai moins rémanente qu'actualisante et même incitatrice, car le sens, s'il fallut qu'il fût “voilé” ― ou encore “abrité” ― comme tout ce qui possède Gloire (22), appelle de ce fait son nécessaire dévoilement, non dans les rêveries “mystiques” au douteux parfum d'évasionnisme pseudo-spirituel (et au goût trop réellement infernal) chères aux zélateurs du soi-disant “Nouvel Âge-à-venir-pour-nous- apporter-le-bonheur” (23), mais dans le recueil patient des modalités horizontalement divergentes et verticalement convergentes de l'être-là. À cette nécessité du recueil peut seule faire droit la réconciliation de l'Attention, qui enveloppe amoureusement du regard le monde phénoménal, et de la Contemplation, qui transperce ce même monde pour atteindre au Mystère du « supramonde », lequel est aussi et tout autant un « intramonde ». Car, puisque le Monde est essentiellement un du Principe au plus bas étage de Sa manifestation (24), connaître, ce ne peut être voir simplement au-delà des formes mais également au travers de celles-ci, ce qui suppose que soit préalablement renversée en soi-même l'opacification, contrepartie individuelle de la « solidification du monde » (25), qui s'oppose à l'acuité du Regard. La « perspective métaphysique » (Georges Vallin) repose ainsi en dernière instance sur l'élection continuée de l'ascèse du diaphane. La formule selon laquelle « ce qui concerne la métaphysique, c'est ce qui est au delà de la nature » (26) est évidemment indiscutable, mais celle qui affirmerait que « ce qui concerne la métaphysique, c'est ce qui transparaît au travers de la nature » le serait tout autant. Ne serait-ce que parce que « la nature tout entière n'est qu'un symbole des réalités transcendantes » (27).
    Si Wittgenstein, pour en revenir à lui, était parvenu à dépasser le simple niveau de la métaphysique des philosophes, il aurait pris conscience que ce dont on ne peut parler demande moins à être tu qu'à être vécu, car « ce dont il s'agit (pour (le métaphysicien), c'est de connaître ce qui est, et de le connaître de telle façon qu'on est soi-même, réellement et effectivement, tout ce que l'on connaît » (28). C'est pourquoi, après avoir écrit que « le monde est indépendant de ma volonté » (29), il aurait pu ajouter, en toute orthodoxie Traditionnelle (et “tantrique”) que ma volonté peut à son tour se rendre indépendante du Monde, et donc, à la fin, rendre le Monde dépendant d'elle, en s'enracinant dans ce qui transcende les phénomènes, c'est-à-dire en devenant identique à l'objet de ma Connaissance. Mais Wittgenstein, en tant que philosophe, ne peut pas ne pas être prisonnier des limitations formelles de la logique, et plus particulièrement de la formulation aristotélicienne du tiers-exclu, d'où sa conviction que « de même qu'il n'y a qu'une nécessité logique, il n'y a qu'une impossibilité logique » (30), ce qui l'amène à tenir pour « clair que le produit logique de deux propositions élémentaires ne peut être ni une tautologie ni une contradiction » (31), sans qu'il se doute apparemment que la notion de “contradiction” n'est elle-même qu'une conséquence de l'adoption d'un schéma exclusivement logique, schéma qui peut être dépassé par l'intuition de la non-contradiction absolue des contraires. Intuition intellectuelle, bien entendu, et non psychologique, donc essentiellement contemplative et non discursive, ceci parce qu'« en toute conception vraiment métaphysique, il faut toujours réserver la part de l'inexprimable ; et même tout ce qu'on peut exprimer n'est littéralement rien au regard de ce qui dépasse toute expression comme le fini, quelle que soit sa grandeur, est nul vis-à-vis de l'Infini » (32).

    Cette dimension apophatique de la Connaissance, aucun système philosophique ne saurait l'admettre, simplement parce que, en tant que système, il est une “mise en discours” du Monde, le non-discours étant assimilé par les esprits systématiques au non-sens (33). D'où l'illusion dont est victime, après et avec bien d'autres, Wittgenstein et qui lui fait croire que « le sens du monde doit se trouver en dehors du monde », parce qu'« il n'y a pas en lui de valeur ― et s'il y en avait une, elle n'aurait pas de valeur » (34), alors que le sens du Monde réside, tout au contraire, dans la manifestation mondaine du sens, lequel, s'il n'est pas de ce Monde, n'en est pas moins dans ce monde. Pour le métaphysicien traditionniste, la radicale contingence des événements pointés dans le Tractacus (35) par la formule : « Car tout événement et être-tel ne sont qu'accidentels. Ce qui les rend non-accidentels ne peut se trouver dans le monde, car autrement cela aussi serait accidentel », cède la place à la signifiance, tout aussi radicale parce que nécessaire, de l'avènement décrypté par la pensée analogico-symbolique dont le déploiement constitue proprement l'ésotérisme. Le principe de l'homogénéité du Monde, que la Table d'Émeraude énonce, on le sait, sous la forme célèbre : « Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut », implique celui de l'homogénéité du sens, ce qui signifie que toute chose, même celle apparemment la plus insignifiante, est susceptible d'un dévoilement, non dans la singularité de sa présence mais par sa mise en relations avec l'ensemble des choses autres qu'elles-même, ensemble que le Tout recueille sous l'égide de l'Unité. Le rôle des symboles, dont chacun manifeste le Tout en récapitulant, sous la forme particulière et selon la logique articulatoire qui lui sont consubstantielles en raison des contingences ethno-historiques (36), la somme des relations universelles, est de rappeler cette homogénéité tout en offrant sous une forme voilée les moyens du dévoilement, lequel culmine dans la gnose. C'est pourquoi René Guénon peut affirmer que le symbolisme est « le moyen le mieux adapté à l'enseignement des vérités d'ordre supérieur, religieuses ou métaphysiques, c'est-à-dire de tout ce que repousse ou néglige l'esprit moderne » (37).
    Si la philosophie demeure par nature étrangère à toute possibilité (et même à toute finalité) de Réalisation, la métaphysique, en revanche, prend en compte, ainsi que nous l'avons vu, l'obligation pour qui veut réellement connaître de devenir ce qu'il connaît, sans limitation aucune ― c'est-à-dire sans plus succomber à l'illusion suprême, celle de l'opposition du sujet et de l'objet ―, l'« affirmation de l'identification par la connaissance » s'identifiant elle-même au « principe même de la réalisation métaphysique » (38). Cette identification conduit dès lors à la Réalisation, non certes tout un chacun, mais ceux qui se montrent capables d'y parvenir au travers des épreuves, « car il y a, pour certaines individualités humaines, des limitations qui sont inhérentes à leur nature même et qu'il leur est impossible de franchir » (39). Ce n'est par conséquent nullement s'opposer à la pensée de la Tradition que d'affirmer que la métaphysique véritable se distingue aussi de la métaphysique moderne par son caractère essentiellement élitiste. René Guénon lie en effet explicitement “intellectualité” (dans le sens de “capacité d'accès à la gnose”) et “élite” ― par ex. dans la formule suivante : « Il ne peut y avoir qu'un seul moyen de sortir du chaos : la restauration de l'intellectualité et, par suite, la reconstitution d'une élite » (40) ― et précise que si l'Occident connut au Moyen Âge « des doctrines purement métaphysiques et que nous pouvons dire complètes », celles-ci demeurèrent toujours réservées « à l'usage d'une élite » (41). Quant à ceux que leurs « limitations » empêchent d'accéder à la Connaissance pleine et entière, il reste le secours des dogmes et de la foi (42).
    Cette Réalisation que permet la démarche métaphysique et sans laquelle elle ne se justifierait aucunement (43), n'est en réalité rien d'autre qu'une ré-intégration, la restauration de l'« état primordial » qui est « celui qui était normal aux origines de l'humanité, tandis que l'état présent n'est que le résultat d'une déchéance, l'effet d'une sorte de matérialisation progressive qui s'est produite au cours des âges, pendant la durée d'un certain cycle » (44). Il s'agit donc bien moins de se rendre autre que l'on est que tel que l'on fut, ou, pour le dire avec une plus grande précision, de se ressaisir ainsi que l'on est toujours demeuré depuis il Origine, même si l'on avait oublié ce que l'on était. Ce ressaisissement, en tant que sortie hors de l'illusion du temps et accès à l'Éternité (45), est ainsi identique au « déchirement du Voile » qui dissimule la Réalité suprême (46).
    Discipline éminemment pratique, opérative, si l'on considère le mot dans la plénitude de son acception ― en tant que voie de réalisation ―, la métaphysique l'est tout autant si on l'envisage de manière complémentaire comme grille d'intellection universelle. En tant qu'elle possède par nature le statut de métalangue par rapport à tous les énoncés ou vision du monde d'origine et de nature uniquement humaine, la perspective qui est sienne peut en effet légitimement s'appliquer à l'analyse des formes produites par telle ou telle civilisation, y compris, bien entendu, le monde moderne. C'est sur sa base que René Guénon ouvre le chapitre premier d'Orient et Occident en fondant l'étude de la civilisation occidentale comme tératologie (47) ; sur elle encore qu'il diagnostique des « signes des temps » dans les diverses manifestations de la modernité (48) ; sur elle toujours qu'il entreprend son « œuvre d'assainissement » en en condamnant théosophisme et spiritisme (49), peu avant que Julius Evola n'entreprenne, selon la même logique, d'arracher les « masques » du spiritualisme contemporain pour en révéler les « visages » (50). C'est sur elle enfin qu'il devient possible de comprendre la signification réelle des idéologies aujourd'hui dominantes.
    Ainsi du libéralisme. Pour qui est demeuré capable de voir, il est patent que les analyses sociologiques ou économiques, si elles peuvent en éclairer certains aspects, sont incapables de rendre entièrement compte de celui-ci. Envisagé d'un point de vue métaphysique, le liberalisme apparaît comme une forme de “satanisme” plus précisément comme la forme que prend ce dernier, non seulement en tant qu'« esprit de négation et de subversion » (51), mais aussi de parodie, dès lors qu'il entend agir dans le domaine idéologico-politique. L'inversion des traits propres au mode de vie Traditionnel est visible à tous les niveaux du discours libéral. À la figure de l'Initié qui n'est devenu “à lui-même sa propre Loi” que parce qu'il a triomphé des épreuves et connu la renaissance spirituelle qui le place légitimement au-dessus de la condition humaine, et donc des règles qui s'appliquent, pour son bien propre et celui de sa Communauté, à tout homme qui n'a pas dépassé cette condition, le libéralisme substitue celle de l'Individu, lequel refuse toute autorité parce qu'il ne reconnaît d'autre loi que celle du désir sans frein, ce qui fait de lui un esclave alors même qu'il proclame en tous lieux sa liberté prétendument inaliénable. De même, l'idéologie libérale ― dont la devise “Laisser faire, laisser passer” est déjà en soi une parodie, celle de l'“Agir sans agir” taoïste ― remplace la doctrine Traditionnelle de l'Harmonie spontanée, et maintenue vivante par l'interactivité universelle innervée par l'Esprit, par la fiction mécaniste du Marché autorégulateur, allant jusqu'à affirmer que, dès lors que ce dernier pourra fonctionner sans contrôle, “la somme des déséquilibres particuliers ne pourra que créer l'intérêt général”, alors que la vérité est très exactement l'inverse, à savoir que c'est “l'équilibre général” (dans le sens d'“universel”) préexistant qui garantit seul le caractère éthiquement acceptable parce que métaphysiquement signifiant de ce qui apparaît, non comme des “déséquilibres particuliers”, mais comme des “modes d'expression”, nécessairement limitée, de l'Absolu à l'un ou l'autre niveau de sa Manifestation. Les affirmations prévaricatrices du libéralisme reviennent ici à affirmer que ce qui est en haut se trouve sous la dépendance de ce qui est en bas, ce qui représente le complet renversement de l'enseignement de la Tradition. De plus, le libéralisme est structurellement incapable de présenter la hiérarchisation sociale en termes autres qu'économiques, comme le résultat des mérites respectifs d'acteurs engagés dans un éternel procès de production et d'échange de biens matériels, ce qui : premièrement, constitue un mensonge, car le processus d'accumulation du capital empêche le jeu pourtant affirmé “libre” de la promotion sociale (52) ; deuxièmement, entraîne un état de guerre de chacun contre tous en exacerbant les rivalités mimétiques et les jalousies du ressentiment ; troisièmement, aboutit à nier toute vie, donc toute hiérarchie, spirituelle, en ramenant l'expérience de l'Être au niveau de la simple recherche de la satisfaction des besoins organiques, c'est-à-dire en prônant comme valeur dominante de la Cité un comportement caractéristique des stades les plus primitifs du comportement animal.
    Ainsi mis en perspective, le libéralisme se laisse saisir pour ce qu'il est vraiment, une idéologie que l'on peut qualifier d'authentiquement “infernale”, d'autant plus que la volonté de séduire pour tromper et soumettre ― signature du satanique ― ne lui fait nullement défaut. En effet, le libéralisme joue analogiquement dans le domaine idéologico-politique le rôle que joue le New Age dans le domaine spirituel, parce qu'il s'agit, ici comme là de présenter une image dégradée de la liberté en l'assimilant à l'individualisme. La différence de positionnement des discours s'explique par celle des cibles (au sens où les spécialistes du “marketing” entendent ce mot) et tient à ce que le libéralisme s'adresse à ceux qui ne conçoivent même plus une autre vie que celle de la jungle, soit qu'il leur fournisse des armes afin qu'ils deviennent de meilleurs prédateurs, soit qu'il tente de les persuader que la jungle est un jardin d'enfants pour qu'ils demeurent des proies faciles (mais il s'agit toujours de faire en sorte que la jungle ne cesse pas d'être une jungle), alors que le New Age trouve un écho chez ceux qui s'imaginent qu'il est possible d'“humaniser” et de “spiritualiser” cette jungle en y baguenaudant pour y planter des fleurs multicolores au gré de ses caprices. Dans les deux cas, le but, qui ne situe pas seulement, répétons-le, à vue humaine, est d'empêcher la transmutation alchimique de la jungle en “forêt” (au sens d'Ernst Jünger), comme prélude à la concentration intensificatrice de cette dernière en « Arbre du Monde » en tant qu'« Arbre de Vie et de l'Immortalité » (53).
    Sans doute, à ce stade de l'exposé, n'est-il pas inutile de revenir, pour préciser un point fondamental que nous n'avons fait jusqu'ici qu'effleurer, sur la question de l'origine de la métaphysique. Dans la mesure où elle voit (et donne à voir) le Monde depuis un point de vue que nous qualifierions volontiers, si le mot n'était si galvaudé, de “surhumain” (54), et où elle permet, dans le même temps, le dépassement effectif de la condition désormais commune à la quasi-totalité des hommes, la métaphysique ne saurait avoir une origine humaine. Cette nécessité, à la fois principielle et logique, d'une source an-historique et non-humaine est exposée par René Guénon dans La métaphysique orientale (55) : « Ces doctrines métaphysiques traditionnelles auxquelles nous empruntons toutes les données que nous exposons, qu'elle en est l'origine ? La réponse est très simple, encore qu'elle risque de soulever les protestations de ceux qui voudraient tout envisager au point de vue historique : c'est qu'il n'y a pas d'origine ; nous voulons dire par là qu'il n'y a pas d'origine humaine, susceptible d'être déterminée dans le temps. En d'autres termes, l'origine de la Tradition, si tant est que ce mot d'origine ait encore une raison d'être en pareil cas, est “non-humaine”, comme la métaphysique elle-même ». Cette origine ne peut donc être que l'Absolu, en entendant bien évidemment ce terme dans un sens a-personnel (non-théiste) puisque les “personnifications” n'importent pas davantage en sens ascendant que descendant, ne serait-ce que parce que la notion d'un Dieu personnalisé et dans le même temps absolutisé présente une contradiction dans les termes car la personnalité, du fait qu'elle se définit par la possession et la manifestation d'un certain nombre de traits idiosyncrasiques, implique la repérabilité et renvoie donc en toute rigueur au relatif et non à l'Absolu.
    La métaphysique, en tant qu'elle s'identifie à la Tradition elle-même, peut donc être définie la codification inséparablement doctrinale et opérative d'une inspiration délivrée par l'Absolu (56). Encore reste-t-il à définir ce dernier.
    Disons-le clairement : s'il est un point sur lequel nous estimons que les analyses évoliennes touchent juste, c'est l'affirmation selon laquelle l'Absolu ne mérite pleinement ce nom que d'être défini comme Puissance. Ceci parce que « la notion de puissance (çakti) (…) s'associe invariablement au concept de Divin, lequel est un et sans second. C'est par la vertu de cette çakti que le microcosme (adhyâtma) et la macrocosme (adhidaiva) sont étroitement reliés l'un à l'autre, et que tout ce qui se trouve dans l'un d'eux se trouve se retrouve nécessairement dans l'autre » (57). René Guénon ou Frithjof Schuon, pour des raisons qui tiennent à leur nature brahmanique, ne paraissent guère s'être arrêtés à cette conception, alors qu'Evola lui a toujours donné la place qui lui revient de droit en écrivant : « Et nous affirmons que le principe de l'absolu est la puissance (çakti), et que tout système qui pose dans l'ordre métaphysique quelque chose avant ou au-dessus de la puissance est rationaliste (au sens péjoratif utilisé par Guénon) et abstrait » (58). Sans doute, d'ailleurs, n'est-il pas tout à fait inutile de saisir l'occasion afin de préciser un point qui n'est pour nous nullement de détail : ce n'est pas parce que nous pensons que le métaphysicien italien a raison ici contre “l'orthodoxie” guénonienne que nous croyons qu'il en va de même partout et toujours. Nous nous en sommes expliqué autre part (59), en particulier en ce qui concerne l'incontestable erreur évolienne à propos de la hiérarchisation de la Royauté et du Sacerdoce et de ce qui en découle quant aux relations entre Action et Contemplation. Il est pour nous hors de discussion que la Contemplation est supérieure à l'Action comme sattwa l'est à rajas. Mais ceci ne nous incite aucunement à croire que la Connaissance l'est absolument à la Puissance, sauf à entendre celle-ci dans le seul sens dégradé de force motrice de l'action non-maîtrisée, ce qui n'est nullement notre cas. Pour reprendre une formule guénonienne déjà citée dans cet article, Connaissance et Puissance expriment à nos yeux un seul et même état, celui de l'être qui est « soi-même, réellement et effectivement tout ce qu'il connaît ». Qui connaît l'Absolu est l'Absolu, et la Puissance de celui-ci devient de ce fait la sienne, ce qui ne signifie évidemment pas qu'un être parvenu à un tel niveau de Réalisation fasse servir cette Puissance à la satisfaction de desseins personnels fondés sur le désir. Ceux qui voient dans l'exposition de telles doctrines un symptôme de “satanisme”, alors même qu'ils ignorent les agissements de ce dernier là où il se manifeste authentiquement, ne saisissent pas la contradiction qu'il y a à soutenir qu'un être qui a atteint l'Absolu, et qui a donc cessé d'être un “individu”, puisse encore éprouver des désirs, lesquels sont, par définition, relatifs aux conditions existentielles d'une individualité donnée. Croit-on vraiment que quiconque est réalisé éprouve la moindre envie de se gaspiller en soustrayant à l'Absolu, c'est-à-dire à lui-même, ne fût-ce qu'une parcelle de Puissance ? Si la Contemplation est traditionnellement reconnue supérieure à l'Action, c'est bien parce que la Réalisation conduit à la première et non à la seconde.
    Pour notre part, nous appelons “puissance” l'intensité vibratoire d'un être individualisé, c'est-à-dire existant au niveau de tel plan de la Manifestation, et “Puissance” (avec la majuscule, donc) la vibration originelle unique dont la différenciation intensive crée les divers plans de Réalité (60). Jean Marquès-Rivière a fort éloquemment précisé cette distinction en écrivant : « En fait, il y a une communauté vibratoire étroite entre le corps humain et le cosmos, et l'on peut, avec les grandes cosmogonies asiatiques, considérer qu'il existe une seule et même substance qui se différencie par vibrations de plus en plus “lourdes”, de moins en moins rapides, la vibration originelle étant métaphysiquement à l'infini. Ces différenciations vibratoires créent des “mondes” ou plus exactement des “plans vibratoires” divers ayant chacun leur forme, leurs activités, leurs créatures et leurs lois » (61). La Puissance est l'essence de l'Absolu ― et c'est pourquoi il a pu être dit : « Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu » (62), la Parole évangélique n'étant autre que la « Parole de Puissance » (Mantrashakti) qui est originellement et éternellement identique à l'Absolu en tant que Principe créateur ― comme les puissances sont celles de innombrables entités qui peuplent le Monde, tant au plan matériel qu'à des niveaux infiniment plus subtils et, de ce fait, devenus inaccessibles à l'homme moderne. La “nature propre” (svadharma) d'un être donné est ainsi très exactement identique à son intensité vibratoire. Plus un être est “évolué”, c'est-à-dire plus il se trouve situé à un emplacement élevé sur l'échelle de la Manifestation (donc moins il s'est éloigné du Centre, donc, en fait, moins il est “involué”), plus il vibre rapidement. La doctrine des Gunas n'a pas d'autre signification : de sattwa à rajas puis à tamas, c'est l'« alourdissement vibratoire » qui s'accentue, ce qui explique et justifie la distribution hiérarchique des hommes en castes. On peut remarquer en passant qu'un être dont l'intensité vibratoire est incommensurablement supérieure à celle d'un autre être demeure de ce fait invisible aux yeux de ce dernier. C'est ce qui explique « l'éloignement » des dieux par rapport aux hommes depuis la séparation des deux lignées « qui étaient une à l'origine » (Hésiode), et c'est ce qui explique aussi, en sens inverse, les diverses apparitions religieuses, tant “divines” que “démoniaques”, lesquelles proviennent du rapprochement momentané ― qu'il soit accidentel ou délibéré ― de deux intensités vibratoires normalement incomparables.
    On comprend à présent pourquoi la Réalisation ne peut être autre chose qu'une restauration, elle qui consiste dans la ré-élévation d'une intensité vibratoire particulière jusqu'au niveau de celle de la vibration originelle ; par cette ré-élévation, qui constitue stricto sensu l'initiation, la qualité humaine disparaît en cédant la place à ce qui est infiniment plus grand, car plus puissant, qu'elle, ce même si l'être “régénéré” demeure apparemment inchangé aux yeux des hommes communs. Les initiés sont dès lors “redevenus comme des dieux”, demeuraient-ils parmi les hommes jusqu'à la conclusion de leur existence terrestre, ce que Gustav Meyrink illustre à sa manière en évoquant « la loi sur laquelle repose toute magie : si deux grandeurs sont égales, elles se réduisent à une seule, quand bien même elles auraient une existence en apparence séparée dans l'espace et dans le temps » (63). On comprend aussi pourquoi la métaphysique, ainsi que nous l'avons déjà mentionné, ne peut être qu'a-morale (au sens d'un dépassement ou, pour mieux dire, d'un “laisser-derrière-soi” de la morale), dans la mesure où la Puissance ne saurait être ni “bonne” ni “mauvaise”, ce qui représenterait encore des limitations et nous ramènerait au domaine des simples puissances et donc du relatif (64). La Puissance est, tout simplement et tout uniment, à jamais irréductible à tout autre qu'Elle-même, et à jamais présente en toute forme manifestée, forme qui n'est que l'actualisation oublieuse d'Elle-même. Il ne nous semble pas faire preuve d'une trop grande audace intellectuelle en voyant ici la définition de l'Absolu, au souvenir duquel nous convie, et plus encore à la reconquête duquel nous appelle, la métaphysique authentique, c'est-à-dire la métaphysique intégrale et donc opérative.
    Jean-Paul Lippi http://www.voxnr.com
    ► Jean-Paul Lippi, Antaïos n°15, 1999.
    ◘ Né à Marseille en 1961, Jean-Claude Lippi est diplômé de l'Institut d'Études Politiques d'Aix-en-Provence et docteur en Droit. Depuis quelques années, il s'impose comme l'un des meilleurs connaisseurs de la pensée traditionnelle. Son livre, Julius Evola, métaphysicien et penseur politique : Essai d'analyse structurale (Âge d'Homme 1998) constitue le texte de sa thèse. L'auteur a publié aux éditions Pardès, un remarquable Qui suis-je ? consacré à Evola (1898-1974), penseur de la Tradition pérenne et révolté contre le monde moderne. Présenter l'œuvre de Julius Evola, « un érudit de génie » (Marguerite Yourcenar) en moins de cent pages (nombreuses photographies, bibliographie), sans simplification ni hagiographie était un défi que JP Lippi a relevé avec brio. Voilà un parfait vade-mecum pour tous les passionnés de la pensée traditionnelle, qui permettra à l'honnête homme de mieux connaître le “sulfureux” Evola, depuis l'agitation dadaïste jusqu'à la contemplation immobile. Dans un texte consacré aux Mystères de Mithra, Evola écrivait précisément : « Notre désir d'infini, (…) notre seule valeur : une vie solaire et royale, une vie de lumière, de liberté, de puissance ». Ces simples mots devraient suffire à faire de lui un compagnon de veille et de randonnée.
    Notes :
    1) « Qu'est-ce que l'ésotérisme ? », suivi de « Anthologie de l'ésotérisme occidental », in L'ésotérisme, Robert Laffont, coll. Bouquins, 1990, pp. 11-397, cit. p. 47. Les « traditionnistes » s'opposent à « ceux que l'on peut qualifier proprement de “traditionalistes”, c'est-à-dire ceux qui ont seulement une sorte de tendance ou d'aspiration vers la Tradition, sans aucune connaissance réelle de celle-ci » (René Guénon, Le Règne de la quantité et les signes des temps, 1945, Gallimard, coll. Tradition, 1972, p. 205).
    2) Bernard Bastian, Le New Age ; D'où vient-il, que dit-il ? Réponses pour un discernement chrétien, O.E.I.L., Paris, 1991, p. 136
    3) Frithjof Schuon l'a exprimé mieux que nous ne saurions le faire : « (…) la question qui ce pose n'est pas de savoir quel peut être le conditionnement psychologique dune attitude, mais bien au contraire quel en est le résultat. Quand on nous apprend par ex. qu'un tel a choisi la métaphysique à titre d'“évasion” ou de “sublimation” et à cause d'un “complexe d'infériorité” ou d'un “refoulement”, cela est sans importance aucune, car béni soit le “complexe” qui est la cause occasionnelle de l'acceptation du vrai et du bien ! » (« L'imposture du psychologisme », in Résumé de métaphysique intégrale, Le Courrier du Livre, 1985, pp. 101-107, cit. pp. 105-106).
    4)Cette attitude est tout aussi bien politique que scientifique ou philosophique ; dans le premier cas, elle fonde la profession de foi démocratique, dans le second elle sous-tend les diverses doctrines évolutionnistes, dans le troisième elle légitime le progressisme.
    5) Rien n'est en effet plus étranger à l'authentique esprit Traditionnel que l'idée moderne de tabula rasa qui égalise les hommes dans le néant à l'instant de leur naissance. Pour la Tradition, chacun naît porteur de qualifications précises, tout à la fois spécifiques dans leur modalité et partagées dans leur essence. C'est pourquoi un homme réalisé est en même temps un être unique (une Personne) et le membre d'un groupe ― réel ou idéal ― formé de ceux qui sont semblables à lui sous le rapport des qualifications (une caste). Ceci relève de la nécessité ; quant à la liberté, elle est donnée par le fait que chacun peut, sur la base existentielle fournie par ses qualifications propres, s'élever ou, au contraire, s'abaisser dans la hiérarchie des êtres, l'ante mortem ayant ici des répercussions obligées sur le post mortem et l'éventuelle procession vers une nouvelle existence terrestre. Cet enchaînement constitue la lai du Karma envisagée dans sa véritable dimension, technique et déterminante et non morale.
    6) Nous entendons le mot au sens où Louis de Bonald écrit : « Qu est-ce que la conservation d'un être ? C'est son existence dans un état conforme à sa nature » (Théorie du pouvoir politique et religieux, 1796, suivi de Théorie de l'éducation sociale, choix et présentation par Colette Capitan, UGE, coll. 10-18, 1966, p. 31).
    7) Cf. R. Guénon, Les états multiples de l'Être, 1932, Éd. Traditionnelles, 1984.
    8) Tel est l'argument que l'on peut apposer à la morale kantienne, laquelle fait, comme on le sait, reposer la morale sur la raison, en prétendant de ce fait lui conférer une valeur indépendante de toute considération “existentielle”. Emmanuel Kant tient en effet pour « évident que tous les concepts moraux ont leur siège et leur origine complètement a priori dans la raison, dans la raison humaine la plus commune aussi bien que dans celle qui est au plus haut degré spéculative », d'où il conclut, après avoir exigé que soit admis comme étant « de la plus grande importance pratique de puiser ces concepts et ces lois à la source de la raison pure », que les lois morales doivent valoir non seulement pour l'homme mais aussi « pour tout être raisonnable en général » (Grundlegung zur Metaphysik der Sitten, traduit de l l'allemand par Victor Delbos : Fondements de la métaphysique des mœurs, 1785, Deuxième section, Delagrave, 1971, pp. 120-121). Or, même si l'on accepte de reconnaître en la raison une instance immédiatement normative, ce qui apparaît bien davantage comme une pétition de principe que comme une nécessité, l'impératif que celle-ci produit ne peut être dit catégorique qu'au seul niveau des êtres gouvernés exclusivement par elle, et non à celui d'êtres participant dune connaissance supra-rationnelle. Pour ces derniers, l'impératif catégorique tombe du fait qu'ils se situent, au sens littéral de l'expression, “par-delà bien et mal” parce que par-delà les bornes du monde balisé par la seule raison.
    9) C'est le sens de la sortie des castes “par le haut”, celle du ativarna, par opposition à la même sortie effectuée “par le bas”, laquelle est propre au paria.
    10) Nous ne disons point du “surnaturel” car ce mot, s'il ne vient que trop aisément sous la plume, n'en est pas moins dépourvu de sens. Tout ce qui existe, en quelque mode que l'on voudra, est naturel, c'est-à-dire engendré. Seul peut être à bon droit qualifié de “surnaturel” ce qui n'existe pas mais est, en ce qu'il demeure étranger à la temporalité du fait qu'il possède en soi-même sa propre cause identique à sa propre perfection (entéléchie nécessaire de l'Absolu). Stanislas de Guaita, au milieu de considérations toutes personnelles, à écrit des lignes non dépourvues d'intérêt sur cette question (cf. Essais de Sciences maudites : Le Serpent de la Genèse, 1897, Seconde Septaine - Livre II - La clef de la magie noire, coéd. Trédaniel / Savoir Pour Être, coll. Les trésors de l'ésotérisme, 1995, « Le surnaturel existe-t-il ? », pp. 14-17).
    11) « L’Univers est un tissu fait de nécessité et de liberté, de rigueur mathématique et de jeu musical ; tout phénomène participe de ces deux principes » écrit Frithjof Schuon (Résumé de métaphysique intégrale, op. cit., p. 16).
    12) De l'Homme, mais non de lui seul. La perception de l'unité supramondaine interdit de conférer à l'Humanité une suprématie sur le reste de la Manifestation, hormis sur un seul point : autant qu'il nous est permis d d'en juger, et dans le cadre de notre propre continuum, l'Homme est le seul être par le truchement duquel le Principe se rend à même de parvenir de manière intégrale à la ressaisie de Lui-même.
    13) Jean Parvulesco, dont la vision du monde repose sur ce que nous qualifierions volontiers de “tantrisme marial”, rend cette idée par l'emploi d'une image véritablement prodigieuse : « Un immense lac de feu tournoyant sur lui-même, avec en son centre, la sur-centralité polaire de l'amour de Dieu et de Marie, tel est le dispositif en action de la divinité vivante, tel est le mystère de l'Ædificium Caritatis, tel est l'être même de Dieu » (« Dieu est amour, et l'amour soutient l'empire de la charité », in éléments n ° 95, « Avec ou sans Dieu ? », juin 1999, pp. 40-44, cit. p. 43).
    14) Julius Evola, La tradizione ermetica, nei suoi simboli, nella sua dottrina e nella sua “arte regia”, traduit de l'italien par Yvonne J. Tortat : La tradition hermétique : Les symboles et la doctrine. “L'art royal” hermétique, 1931, Éd. Traditionnelles, 1988, p. 35. C'est cette « coexistence » qui rend ce « chaos » indissociablement créateur et destructeur. Si c'est la seconde potentialité qui vient à prévaloir, soit par l'effet d'une évertuation ponctuelle volontaire (magie prétendue “noire” ou goétie), soit simplement par celui des lois cycliques de la Manifestation, nous trouvons l'image du Shiva tamasique ou, sur un plan plus cosmologique que métaphysique, celle du « Grand Dieu Pan » cher à Arthur Machen.
    15) « Nos travaux antérieurs nous ont montré qu'au point de départ de nos annales se situe une Révélation, ou illumination primitive de la pensée humaine ; celle-ci se trouvait pourvue, en effet, originairement d'un potentiel mental supérieur, qui l'exhaussait au-dessus de la “nature”. Le péché, en la dessoudant de Dieu, autrement dit de l'Être, l'a dépouillée ipso facto de sa puissance première, et scindée de l'essence des choses. C'est ce dénivellement, cette chute vers un palier inférieur de connaissance, qui a ravalé le surhomme du début au rang d'homme, et déterminé la vision de l'univers comme un fluctuant agrégat de mécanismes physiques (…) L'on nomme Révélation Primitive la communication spéciale qui s'est établie, tout au début de l'histoire humaine, entre l'homme et la préternature. Par préternature nous entendons l'univers transcendant ou dynamique qui forme le substrat des choses accessibles à nos sens » (Pierre Gordon, La révélation primitive, Dervy, 1951, pp. 9 et 17, souligné dans le texte).
    10) Pour une étude pénétrante des conséquences de la réduction de la métaphysique stricto sensu à la seule ontologie, cf. Georges Vallin, La perspective métaphysique, Dervy-Livres, 1977.
    17) Cf. O. Hanfling, Logical Positivism, éd. Blackwell, Oxford, 1981.
    18) Pour un exposé synthétique des rapports entre les 2 disciplines, cf.R. Guénon, Introduction générale à l'étude des doctrines hindoues, 1921, Deuxième partie : « Les modes généraux de la pensée orientale », chapitre VIII : « Pensée métaphysique et pensée philosophique », Trédaniel, 1997, pp. 123-140.
    19) Étienne Borne, Passion de la vérité, Fayard, 1962.
    20) Ludwig Wittgenstein, Tractacus logico-philosophicus, Vienne, 1918. Nous citons d'après la traduction due à Pierre Klossowski, Gallimard/Tel, 1989, p. 107 (texte suivi par les Investigations philosophiques).
    21) pp. 106-107 (6.53), souligné dans le texte.
    22) Ésaïe, IV, 5.
    23) Il est trop évident (pour qui se donne la peine de regarder) que le New Age s'inscrit dans le cadre de la contre-Tradition et de la parodie dénoncées par R. Guénon pour qu'il soit indispensable d y insister. Disons simplement qu'il contribue, tant par son message de spiritualité à bon marché ― et donc à la portée du premier venu qui est toujours le moins qualifié ― que par les pratiques magico-religieuses qu'il génère de la part d'individus totalement inconscients de la véritable nature des forces avec lesquelles ils entrent en contact, à augmenter le chaos ambiant, y compris sur des plans tout à fait concrets.
    24) La perception de l'Unité transtatique entraîne la prise de conscience de la présence continue du supra-mondain dans la Monde, donc l'élaboration de la doctrine immanentiste de la Transcendance que nous avons déjà évoquée. Insistons sur le fait que c'est bien cette perception (intuitive, dans le sens de “supra-sensible”) qui est première, et non l'élaboration doctrinale, ceci suffisant à distinguer la métaphysique de la philosophie.
    25) Cf. R. Guénon, Le Règne de la quantité et les signes des temps, op. cit., ch. XVII, « Solidification du monde ».
    26) R. Guénon, La métaphysique orientale, 1939, Éd. Traditionnelles, 1985, p. 7.
    27) R. Guénon, Le Symbolisme de la Croix, 1931, coéd. Trédaniel-Véga, 1984, p. 10.
    28) René Guénon, La métaphysique orientale, op. cit., p. 14, nous soulignons. Cette mise au point illustre ce que Georges Vallin décrit comme « le caractère d'intégralité qui permet à la perspective métaphysique de dépasser les limitations dogmatiques en général (La perspective métaphysique, op. cit., p. 153), limitations qui naissent inévitablement du fait que « la formulation dogmatique se révèle ordinairement par l'exclusion systématique d'un aspect du réel au profit d'un autre » (ibid., p. I55). On notera que, dans le cadre d'une critique des thèses de la métaphysique Traditionnelle telles que les expose précisément Vallin dans la fidélité à la Lux Guenoniana, critique conduite depuis des positions chrétiennes, Christophe Andruzac écrit : « La recherche d'un “Absolu” au-delà de toute dualité (être / agir, connaissance / connu, être / connaître, cause / effet, etc.), exprime à notre sens très profondément le thumos vers une vie de l'intelligence qui serait coextensive à la totalité de l'être. Mais cette vision n'exprime-t'elle pas la nostalgie qu'éprouve l'intelligence du contemplatif de connaître de la connaissance-même du Créateur ? » (R. Guénon. La contemplation métaphysique et l'expérience mystique, Dervy-Livres, coll. Mystiques et Religions, 1980, p. 45). On saisit bien à travers ces propos tout ce qui sépare la religion, en particulier dans le cadre des monothéismes, de la métaphysique. La première est structurellement incapable de dépasser le dualisme de la nature et de la surnature (du “contemplatif” / créature et du “Créateur” / contemplé) car elle demeure inéluctablement bloquée dans une conception antinomique de l'immanence et de la Transcendance, alors même que, comme le souligne à juste titre Vallin : « L'intuition intellectuelle de l'Un dépasse l'antinomie en posant la cause première à partir de l'Un et en intégrant dans l'Infini métaphysique l'indéfinité de l'existence “phénoménale” » (La perspective métaphysique, op. cit., p. 153).
    29) Tractacus logico-philosophicus, op. cit., p. 102 (6.373).
    30) Ibidem (6.375), souligné dans le texte.
    31) Ibidem, p. 103 (6.3751).
    32) René Guénon, La métaphysique orientale, op. cit., p. 10.
    33) « Une réponse qui ne peut être exprimée suppose une question qui elle non plus ne peut être exprimée. L'énigme n'existe pas. Si une question se peut absolument poser, elle peut aussi trouver sa réponse » (Tractacus logico-philosophicus, op. cit., p. 105 (65), souligné dans le texte).
    34) Ibidem, p. 103 (6.41), souligné dans le texte.
    35) Ibidem.
    36) La synergie de cette forme et de cette logique détermine l'action historique et culturelle (le la Tradition.
    37) Symboles fondamentaux de la Science sacrée, Gallimard, 1962. Cette “efficacité” du symbole ― qui n'est certes pas réductible à une efficacité symbolique ― est fort bien explicitée par René Alleau : « Or la nature fondamentale du symbole étant d'élever l'âme humaine vers le surhumain, le mouvement même de la connaissance symbolique correspondait à un élan vers la Lumière incréée, au delà des apparences repérables de toute création matérielle et des bornes concevables de l'univers du discours » (De la nature des symboles : Introduction à la symbolique générale, 1958, Petite Bibliothèque Payot, 1997, p. 18).
    38) R. Guénon, La métaphysique orientale, op. cit., p. 13.
    39) Ibidem, p. 7.
    40) La crise du monde moderne, 1927, Gallimard, coll. Tradition, 1973, p. 94.
    41) La métaphysique orientale, op. cit., p. 14. Il va sans dire que prétendre donner au mot “élite” une signification sociologique et “réactionnaire” serait une lourde erreur, même si certains, en toute bonne foi “évangélique” (mais sans doute plus encore néo-conciliaire) semblent surtout avoir retenu de l'enseignement guénonien le risque qui serait le sien d'être : « récupéré par les milieux d'extrême-droite » (Bernard Bastian, Le New Age, op. cit., p. 38).
    42) Nous ne pouvons que nous opposer sur ce point à notre excellent ami Arnaud Guyot-Jeannin, lequel écrit : « La Connaissance n'est rien d'autre que l'approfondissement de la foi. Sans foi, pas de Connaissance ! » (« Tradition d'abord ! », in Tradition - Lettre d'information du Cercle Sol lnvictus n°1, automne 1998, p. 2). Il nous semble au contraire que la Connaissance est non “l'approfondissement” de la foi, mais bien son dépassement. Celui qui connaît est de ce fait dispensé de croire. Le voudrait-il, d'ailleurs, qu'il ne le pourrait, puisque la foi suppose une séparation entre le sujet qui croit et l'objet de sa foi, ainsi qu'une ignorance, au moins relative, de la nature dernière de cet objet. Séparation et ignorance que la gnose laisse derrière elle sans possibilité de retour car « tout résultat, même partiel, obtenu par l être au cours de la réalisation métaphysique l'est de façon définitive » (R. Guénon, La métaphysique orientale, op. cit., p.20). Il y a des étapes sur le chemin de la Connaissance et la foi est l'une d'entre elles, supérieure certainement à l'agnosticisme, mais il n'y a pas de retour en arrière.
    43) Affirmons-le sans barguigner, quitte à paraître provocateur : si la métaphysique ne conduisait pas à la Réalisation, autant vaudrait jouer aux petits chevaux que de s'en occuper. Quelle valeur réelle pourrait avoir une Connaissance qui ne serait pas immédiatement opérative, et qui demeurerait donc non intégrée à celui qui la posséderait ?
    44) René Guénon, La métaphysique orientale, op. cit., p. 18.
    45) Le ressaisissement se trouve tout à la fois au début de la Réalisation et à sa conclusion, celui-là apparaissant comme la préfiguration “possibilisante” de celle-ci. « La première chose à faire pour qui veut parvenir véritablement à la connaissance métaphysique, écrit Guénon, c'est de se placer hors du temps, nous dirions volontiers dans le “non-temps” si une telle expression ne devait pas paraître trop singulière et inusitée. Cette conscience de l'intemporel peut d'ailleurs être atteinte d'une certaine façon, sans doute très incomplète, mais déjà bien réelle pourtant, bien avant que soit obtenu dans sa plénitude cet “état primordial” dont nous venons de parler » (La métaphysique orientale, op. cit., p. 18).
    46) La signification ultime de ce Voile, qui est celui d'lsis et que l'Hindouisme connaît comme Maya et l'Islam comme Hijâb, a été exposée par Frithjof Schuon dans une étude intitulée « Le mystère du Voile » publiée in L'ésotérisme comme Principe et comme Voie, Dervy, coll. L'Être et l'Esprit, 1997, pp. 45-62.
    47) « La civilisation occidentale moderne apparaît dans l'histoire comme une véritable anomalie : parmi toutes celles qui nous sont connues plus ou moins complètement, cette civilisation est la seule qui se soit développée dans un sens purement matériel, et ce développement monstrueux, dont le début coïncide avec ce qu'il est convenu d'appeler la Renaissance, a été accompagné, comme il devait l'être fatalement, d'une régression intellectuelle correspondante ; nous ne disons pas équivalente, car il s'agit là de deux ordres de choses entre lesquels il ne saurait y avoir aucune commune mesure » (Orient et Occident, Payot, 1924, p. 9, nous soulignons).
    48) Cf. Le Règne de la quantité et les signes des temps, op. cit.
    49) Cf. Le théosophisme : histoire d'une pseudo-religion, 1921, Éd. Traditionnelles, 1966, et L'erreur spirite, 1923, mêmes éditions, 1952 (l'expression « œuvre d'assainissement » est due à Raymond Abellio et figure in « L'esprit moderne et la Tradition », introduction à Paul Sérant, Au seuil de l'ésotérisme, Grasset, coll. Correspondances, 1955, pp. 9-81, cit. p. 81).
    50) Cf. Masques et visages du spiritualisme contemporain, 1932, Pardès, 1991.
    51) R. Guénon, La crise du monde moderne, op. cit., p. 116. Lorsque nous évoquons le satanisme libéral, précisons-le, nous n'avons nullement à l'esprit l'image d'Épinal de l'entité à cornes et à queue fourchue, même si ce n'est certainement pas glisser de l'ésotérisme à l'occultisme vulgaire que d'admettre la possibilité, ici comme en d'autres endroits, d'une action “démoniaque” au sens usuel du terme. Citons encore une fois René Guénon afin de dissiper l'éventuel malentendu : « Quand nous qualifions de “satanique” l'action antitraditionnelle dont nous étudions ici les divers aspects, il doit être bien entendu que cela est entièrement indépendant de l'idée plus particulière que chacun pourra se faire de ce qui est appelé “Satan”, conformément à certaines vues théologiques ou autres, car il va de soi que les “personnifications” n'importent pas à notre point de vue et n'ont aucunement à intervenir dans ces considérations (Le Règne de la quantité et les signes des temps, op. cit., p. 236).
    52) Point n'est besoin d'être marxiste pour comprendre ces choses. Mais le problème de ceux qui se réclament de la Tradition, y compris dans sa dimension politique de Droite, est souvent leur hostilité, certes compréhensible mais trop aisément bornée, au collectivisme, hostilité qui les empêche de distinguer le véritable ennemi. C'est ce qui conduit un certain nombre de personnes, par ailleurs correctement orientées sur le plan principiel, à adopter à l'encontre des victimes de la « démonie de l'économie » (pour nous exprimer à la manière évolienne) une attitude empreinte de la sécheresse de Cœur dont a toujours fait preuve la bourgeoisie, et donc à rejoindre d'une certaine façon les positions du monde moderne qu'elles prétendent combattre. Or, si la Tradition mène à défendre, au niveau politique, des valeurs qui appellent le qualificatif d'“aristocratiques”, cet aristocratisme ne peut être que social.
    53) Mircea Eliade, Le chamanisme et les techniques archaïques de l'extase, 1951, Payot, 1996, p. 220.
    54) Le surhumanisme de la métaphysique Traditionnelle est tout autre chose que celui dont Zarathoustra se fait le héraut. Pour dissiper les malentendus, mieux vaut parler de “suprahumanisme”.
    55) Op. cit., p. 23.
    56) C'est en ce sens que René Guénon peut parler de « métaphysique intégrale » et Frithjof Schuon reprendre cette expression pour en faire le titre de l'un de ses ouvrages (Résumé de métaphysique intégrale, op. cit.).
    57) Comment discriminer le spectateur du spectacle ? (Drg - drçya - viveka), traduction par Michel Sauton d'après la version anglaise du swâmi Nikhilânanda, éd. Adrien Maisonneuve, coll. Vandé Mâtram, Paris, 1945.
    58) « Il Problema di Oriente et Occidente » (Le Problème d'Orient et Occident), recension de René Guénon, Orient et Occident, in : Ultra, 1925, traduit de l'italien par Philippe Baillet et reproduit in : Guido De Giorgio, L'Instant et l'Éternité et autres textes sur la Tradition, éd. Archè, Milan, 1987, pp. 259-260, cit. p. 260, souligné dans le texte (il faut lire ce dernier en faisant abstraction du ton inutilement polémique adopté par un homme alors encore très jeune).
    59) Cf. notre ouvrage Julius Evola, métaphysicien et penseur politique : Essai d'analyse structurale, L'Âge d Homme, coll. Les études H, Lausanne, 1998, ainsi que notre entretien dans le n°14 de la présente revue, équinoxe de printemps 1999, pp. 76-86.
    60) Nous pourrions tout aussi bien écrire « les diverses Réalités », puisque, pour n'importe quel être, son Monde est le Monde. C'est en ce sens qu' il faut entendre la formule conclusive du Règne de la quantité et les Signes des temps (op. cit., p. 272) : « Et c'est ainsi que, si l'on veut aller jusqu'à la réalité de l'ordre le plus profond, on peut dire en toute rigueur que la “fin d'un monde” n'est jamais et ne peut jamais être autre chose que la fin d une illusion ».
    61) Le yoga tantrique hindou et tibétain, 4° éd. revue et augmentée, Archè, Milan, 1979, Introduction, p. XVII. C'est cette même conception, qui détermine la doctrine Traditionnelle en tant que monisme émanationniste, que Frithjof Schuon, dans le cadre d'une réflexion sur le problème du mal, rend par l'image du « rayonnement » qui émane du Centre Primordial, en précisant que si ce rayonnement est une nécessité, il n'en demeure pas moins que « qui dit rayonnement, dit éloignement, donc aliénation ou appauvrissement » (Résumé de métaphysique intégrale, op. cit., p. 16).
    62) Évangile selon Jean, I, 1, traduction Louis Segond d'après le texte grec.
    63) Walpurgisnacht, 1917, traduit de l'allemand par A. D. Sampiéri : La nuit de Walpurgis, Bibliothèque Marabout, 1973, pp. 90-91, souligné dans le texte. Précisons que nous sommes tout à fait conscient des réticences que suscite souvent la mention du nom d'un auteur que beaucoup de traditionnistes, à commencer par René Guénon lui-même, ont condamné dans les termes les plus sévères. Mais les zones d'ombre du personnage ne doivent pas interdire de reconnaître l'intérêt majeur que son œuvre présente.
    64) C'est ce qu'Arthur Avalon (Sir John Woodroffe) exprime en disant du Mantra, qu'il définit comme « en un mot, une puissance (Shakti), la puissance sous la forme du son », que celui-ci « se prête impartialement à tout usage ». The Serpent Power, traduit de l'anglais par Charles Vachot d'après la 4° édition de 1950 : La puissance du Serpent : Introduction au tantrisme, Dervy-Livres, coll. Mystiques et Religions, 1990, pp. 88 et 87.

  • L'invention de l'Occident et les racines de l'Europe

     

    L'invention de l'Occident (Attali et Salfati)Homère et la Bible seraient donc les deux «mamelles nourricières» de notre civilisation ?

    Cette idée émise par Jacques Attali et Pierre-Henry Salfati relève de toute évidence d'une volonté de «dé-christianiser» l'Histoire de l'Europe. En cela, elle est conforme à l'esprit du temps mais en aucune façon à la démarche d'un véritable historien qui se doit de respecter les faits et de leur conserver leur cohérence, indépendamment de ses croyances personnelles.

    Saisissons cette occasion pour nous interroger sur les racines de notre civilisation européenne ; judéo-grecques ? judéo-chrétiennes ? autres ? Interrogeons-nous aussi sur les racines de l'Europe en devenir...

    Proposons pour commencer cette définition des «racines» : l'ensemble des facteurs culturels, spirituels, matériels, institutionnels... qui concourent à la construction d'une civilisation et la distinguent des autres civilisations.  

    André Larané

    Nos racines sont-elles judéo-grecques ?

    Les concepteurs de l'émission L'invention de l'Occident usent des outils habituels aux négationnistes et autres «complotistes» pour exposer leur thèse :

    -1/ Ils sacrifient la réflexion à l'émotion :

    La télévision leur permet d'instiller leur propos de façon subliminale en agrégeant des phrases de différents érudits sorties de leur contexte, sans laisser aux spectateurs le temps de s'arrêter sur l'une ou l'autre, d'y réfléchir et de revenir en arrière pour la vérifier.

    Ainsi, à la différence de ce qui se passe à la lecture d'un livre, l'émotion et l'immédiateté prennent le pas sur la réflexion et l'intelligence.

    - 2/ Ils exploitent à fond les coïncidences et les similitudes :

    Les réalisateurs observent ainsi que les Hébreux ont eu l'occasion de côtoyer les Grecs au cours de leurs pérégrinations autour de la Méditerranée, qu'Homère et la rédaction de la Bible sont à peu près contemporains, que cette dernière a été traduite en grec, que les Juifs étaient nombreux à Alexandrie, capitale de l'hellénisme, que c'est au pied du mont Sinaï que l'empereur Justinien a établi le monastère Sainte-Catherine etc.

    Autant d'assertions vraies mais qui ne démontrent rien.

    - 3/ Ils écartent soigneusement toutes les objections :

    La première d'entre elles, qui me paraît évidente, c'est que les Arabo-musulmans, qui ont subjugué au VIIIe siècle les vieilles terres de culture hellénistique et judaïque, peuvent tout autant que les Européens se réclamer de l'héritage judéo-grec.

    Or, leur civilisation n'a pas connu les mêmes développements que la civilisation occidentale ; ils n'ont trouvé dans cet héritage ni la démocratie, ni la promotion de la femme, ni la laïcité, ni l'État de droit (à la racine du développement économique)...

    Dès lors que l'héritage judéo-grec a pu aboutir à des résultats aussi différents que la civilisation européenne et la civilisation islamique, il faut chercher ailleurs les facteurs qui ont permis à la chrétienté occidentale de se démarquer du reste du monde au cours du deuxième millénaire de notre ère.

    Bien entendu, nous reconnaissons la grandeur et le caractère innovant de la pensée et des institutions grecques. Nous constatons aussi l'immense intérêt intellectuel qu'elles ont suscité chez les élites de l'Occident chrétien (comme de l'Orient sous domination musulmane).

    Mais force est de constater qu'elles n'ont eu aucune incidence sur les pratiques de notre civilisation. À aucun moment, au cours du Moyen Âge et des Temps modernes, dans le domaine civique, nos aïeux n'ont imité en quoi que ce soit les pratiques des Grecs du Ve siècle av. J.-C. On serait bien en peine, par exemple, d'identifier une quelconque filiation entre la démocratie athénienne et notre démocratie représentative. 

    Tout au plus note-t-on une résurgence du droit romain tardif à la Renaissance (avec pour première conséquence une régression du statut de la femme !) et une pâle imitation des institutions romaines sous la Révolution, dont on retrouve la trace dans notre vocabulaire administratif (préfets, consuls, légion...). 

    Nos racines sont-elles judéo-chrétiennes ?

    Si nos racines ne sont pas judéo-grecques, sont-elles pour autant «judéo-chrétiennes» comme on nous le serine par ailleurs? Cela n'est pas plus évident si nous prenons la peine d'y réfléchir.

    En effet, la chrétienté orthodoxe et les chrétientés moyen-orientales ont été au moins autant pénétrées de ces racines judéo-chrétiennes (et grecques) que la chrétienté occidentale.

    Au cours du premier millénaire, grâce à cet héritage antique, elles ont même connu un développement bien plus éclatant que l'Occident, tout comme d'ailleurs l'empire arabo-musulman. Mais le deuxième millénaire leur a été fatal tandis qu'il a permis à l'Occident d'engendrer une civilisation en rupture totale avec le passé.

    Où sont donc nos racines ?

    Dans ces conditions, qu'a retenu l'Occident des enseignements de l'Antiquité, qu'ils fussent hébraïques, grecs ou latins?

    - L'art :

    Pour faire bref, convenons que les artistes occidentaux, dès le haut Moyen Âge, ont puisé leurs sources d'inspiration dans l'Ancien et le Nouveau Testament puis, à partir de la Renaissance, dans la mythologie gréco-latine. Mais leurs techniques et leurs modes d'expression n'appartiennent qu'à eux. Roman, gothique, baroque... Toutes ces formes d'art ne doivent rien aux artistes grecs, encore moins aux Hébreux. Tout au plus y retrouve-t-on une lointaine filiation avec les modèles architecturaux romains (basilique, voûte, colonnades, coupole...).

    - La langue :

    Il en va de même des langues que nous parlons.

    À l'époque carolingienne (VIIIe siècle), les langues pratiquées en Occident n'avaient plus guère de rapport avec le latin de Cicéron, tant dans la grammaire (absence de déclinaisons) que dans le vocabulaire.

    Nous les disons «latines» parce qu'elles fourmillent de racines empruntées au latin mais il s'agit en l'occurrence du latin médiéval, qui est une langue pratiquement réinventée par les clercs, sans filiation directe avec l'Antiquité, un peu comme l'hébreu moderne.

    Les clercs de l'entourage de Charlemagne, en premier lieu Alcuin, ne se sont pas contentés de pratiquer entre eux un latin à leur mesure. Ils ont méthodiquement réintroduit dans les langue usuelles des racines empruntées au latin. Ainsi, le mot d'usage courant «eau», dans lequel il est impossible de reconnaître la racine latine «aqua», a été complété par des qualificatifs savants, comme «aquatique» ou «aqueux».

    De la même façon, à l'époque moderne, les savants ont emprunté au grec des mots pour désigner les nouveautés (psychologie, téléphone...). Cela ne fait pas pour autant de nos langues des filles du grec ancien.

    - La philosophie :

    On peut dire la même chose de la philosophie. Si les clercs médiévaux et les humanistes de la Renaissance ont cultivé une admiration sans bornes pour Aristote puis Platon, on est en peine de trouver dans leurs œuvres une quelconque parenté avec la pensée antique.

    Au contraire, ils n'ont eu de cesse de développer une pensée autonome en essayant, pour les premiers - tel saint Thomas d'Aquin - de concilier la raison et la foi, pour les seconds - tel Érasme - de révéler l'individu à lui-même.

    - Le statut de la femme :

    S'il y a bien un point sur lequel la chrétienté occidentale a innové par rapport à l'Antiquité comme à toutes les autres civilisations du deuxième millénaire de notre ère, c'est le statut de la femme.

    Chez les Grecs de l'époque de Périclès, celle-ci est confinée dans le gynécée, avec les esclaves et les concubines. Son statut n'est pas très différent de ce qu'il est aujourd'hui dans les sociétés islamiques traditionnelles. Chez les Hébreux, son sort n'est guère plus enviable.

    Le changement s'amorce au Moyen Âge, en particulier avec le mariage chrétien qui proscrit la polygamie, les mariages arrangés et la répudiation (y compris en cas d'adultère de la femme !). La femme hérite, même si le droit d'aînesse revient au garçon en priorité sur la fille. Il lui arrive aussi de diriger des États et même des abbayes d'hommes (Fontevraud).

    Au sein de l'Église, principale institution médiévale, la femme n'a toutefois pas accès au sacerdoce et à la prêtrise. C'est la seule concession faite à la tradition antique. 

    Ainsi que nous l'avons rappelé plus haut, la Renaissance, en s'éloignant de la tradition médiévale et en redécouvrant béatement la tradition antique, va entraîner un net recul du statut de la femme. Il va se poursuivre et s'intensifier avec l'avènement de la bourgeoisie d'affaires au XIXe siècle, sans toutefois revenir sur l'essentiel des acquis médiévaux.

    - La démocratie et le travail :

    L'Occident a aussi développé, pas à pas, dans ses monastères puis dans la cité, une pratique démocratique nouvelle («un homme, une voix»), parfaitement étrangère au monde antique, lequel distingue soigneusement les hommes libres des esclaves.

    Dans le droit fil de cette invention, la chrétienté médiévale a honoré le travail, alors qu'il était dans le monde antique, à Athènes comme à Rome, le lot des esclaves et des femmes.

    On peut s'étonner à ce propos du vieux malentendu qui nous fait attribuer à Athènes l'invention de la démocratie. Tout au plus les Grecs ont-ils forgé le mot. Quant à leur pratique, elle n'a guère à voir avec la démocratie représentative moderne qui puise son origine dans la Grande Charte anglaise, ni surtout avec l'État de droit, sans lequel il n'est pas de liberté individuelle.

    - L'État de droit :

    Cet État de droit, caractéristique de la chrétienté occidentale, est né aux alentours de l'An Mil, comme le rappelle l'historien et essayiste Claude Fouquet (Nouvelle Histoire de l'Europe, 2013).

    Dans les villages de cette époque, les coutumes ont, au fil des générations, acquis force de loi et il est devenu impossible à quiconque, y compris aux puissants, de les enfreindre. Un guerrier ou un évêque ne pouvait par exemple user de son autorité pour enlever à un paysan la terre qu'il avait reçue de ses aïeux.

    Ainsi s'est forgé le droit, que les Anglais nomment fort justement «common law» (loi commune), pour rappeler qu'il est issu de la coutume. Ce droit est devenu un obstacle rédhibitoire à l'arbitraire et à la tyrannie. Dès l'époque médiévale, les sociétés occidentales apparaissent de ce fait comme peu ou prou «démocratiques» en ce sens qu'une multitude de contre-pouvoirs limitent l'arbitraire du souverain.

    On peut voir l'origine de cette miraculeuse naissance de l'État de droit dans le fait que l'Europe occidentale, de l'Èbre (Espagne) à l'Elbe (Allemagne), a été du Xe siècle à nos jours épargnée par les invasions.

    C'est une particularité qui la distingue de toutes les autres régions du monde, victimes à un moment ou un autre d'envahisseurs venus d'ailleurs, qu'il s'agisse des nomades mongols et turcs en Eurasie ou... des Européens dans le Nouveau Monde. Elle a permis au droit coutumier occidental de se renforcer de génération en génération, sans risque d'être anéanti. 

    L'Europe en construction a-t-elle des racines ?

    De cette rapide recension des fondements de la civilisation occidentale, on voit que ceux-ci ont peu à voir avec l'Antiquité et même avec le christianisme, lequel est une religion à vocation universelle, aussi à son aise en Occident qu'en Afrique tropicale, en Orient ou en Extrême-Orient.

    Si nos sociétés ont des racines, celles-ci sont à chercher dans le bouillon médiéval de l'An Mil, dans lequel se sont agglomérés les apports les plus divers (y compris bien entendu le christianisme, nourri par la Tradition et les théologiens).

    Que dire alors de l'Europe en construction? L'idée européenne a été portée sur les fonts baptismaux, il y a un demi-siècle, par des élites désireuses de renforcer le camp occidental pro-américain face à la menace soviétique.

    Cette motivation ayant disparu avec la fin de la guerre froide, on lui a substitué une autre motivation : réaliser l'économie de marché dont rêvent les théoriciens néolibéraux.

    Ce rêve-là, qui a débouché sur la monnaie unique et la crise actuelle, est en radicale contradiction avec les traditions européennes que nous avons recensées plus haut. Il est en train, méthodiquement, de ruiner la démocratie et l'État de droit.

    Dans l'Europe qui se profile, les assemblées législatives nationales ont désormais pour principale fonction d'enregistrer les directives émises par des Conseils supranationaux sans lien direct avec les citoyens. Les membres de ces conseils sont cooptés ou agréés par les chefs de gouvernement sur des critères généralement inavouables (rarement celui de la compétence). Ils n'ont pas de compte à rendre aux citoyens mais se doivent de satisfaire les influents lobbyistes qui hantent leurs couloirs...

    Le droit est quant à lui chamboulé par des changements incessants, de sorte qu'il perd ce qui fait sa force : la stabilité. C'est une conséquence indirecte du processus européen : d'une part le droit social s'adapte aux normes édictées par les bureaux de Bruxelles ; d'autre part, les parlements nationaux n'ayant plus la maîtrise des grands enjeux politiques et économiques se rabattent sur le reste, droit civil et droit pénal.

    Le travail est en voie de se dissoudre dans une économie financière qui donne la primauté à la spéculation et à la recherche du profit immédiat, fut-ce en ruinant les industries nationales. Il y a deux siècles, le protestant François Guizot, ministre de Louis-Philippe 1er, exhortait ses compatriotes : «Enrichissez-vous par le travail, par l'épargne et la probité». Ces mots sont aujourd'hui devenus inintelligibles à nos élites qui, au lieu de travail, épargne et probité, pensent délocalisation et spéculation.

    Ainsi sommes-nous en train de construire pour le meilleur et pour le pire une Europe en rupture totale avec son passé, une Europe hors-sol et sans racines.

    http://www.herodote.net

  • Arrestations arbitraires : l'étau se resserre sur Manuel Valls

    Les drôles de consignes anti-Manif pour tous

    Dans un PV que Le Figaro a consulté, un gendarme assure qu’il devait interpeller toute personne qui tenait en mains un drapeau.

    Le Défenseur des droits recevra ce jeudi deux jeunes sympathisants de la Manif pour tous : il s’agit de la première audition, par les services de Dominique Baudis, qui « veillent au respect de la déontologie par les personnes exerçant des activités de sécurité », d’opposants au mariage gay s’estimant victimes d’« arrestations arbitraires ». Une vingtaine de réclamations individuelles ont déjà été adressées au Défenseur des droits. Mais la Manif pour tous « pense pouvoir lui en envoyer bientôt au moins une centaine d’autres ».

    Celle de Jean et d’Aurélien est particulière : l’ensemble de la procédure (trois gardes à vue en mai dernier, deux en deux jours pour le premier, une pour le second) a été annulé en juillet par le tribunal correctionnel, pour défaut de base légale. « Tellement les faits étaient ahurissants », souligne leur avocat, Me Grégoire Etrillard. Sa réclamation auprès du Défenseur des droits a pour objet de faire constater les manquements déontolo­giques ayant eu lieu au cours de cette procédure, et notamment de déterminer l’origine des ordres donnés aux gendarmes et policiers ayant procédé aux interpellations litigieuses. [...]

    La suite sur le site du Figaro
    http://www.actionfrancaise.net

  • Serge Ayoub : « Arrêtons ce discours de pleureuse, les Français veulent des gens fiers »

    Serge Ayoub est le chef de file du « courant solidariste » en France. Lors de la mort de Clément Méric, il a été propulsé sur le devant de la scène médiatique. Cette affaire avait conduit à la dissolution de ses deux mouvements, Troisième Voie et les Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires.
    Quel constat, aussi bien politique que médiatique, avez-vous pu tirer de « l’affaire Méric » ?
    Au niveau médiatique, on ne peut qu’être effaré par l’ampleur que prend ce fait divers. 3 ans auparavant, la mort de Yann Lorence, lynché à mort par un groupe d’antifas d’Auteuil en marge d’un PSG-OM n’avait pas suscité le millième de cet emballement.
    Mais ce sont évidemment les politiques qui ont donné le ton. J’ai surtout été surpris par l’incapacité du gouvernement à garder la tête froide. La position de tout ministre aurait due être de condamner la violence en attendant les premiers éléments de l’enquête. Je crois qu’il a dans leur réaction à la fois énormément de cynisme, consistant à récupérer immédiatement un mort pour nuire, par amalgames successifs, au FN montant, et aussi un effroi sincère : ils ont perçu la mort de Clément Méric comme celle de l’un des leurs, car que ce soit socialement ou idéologiquement, Méric avait tout du futur cadre de la gauche morale, multi-culturaliste et mondialiste. C’est ce qui explique aussi l’intensité de leur haine contre moi et Troisième Voie.
    Enfin, je crois que si la décision de dissoudre est prise sous le coup de l’émotion et pour donner l’impression d’agir, l’opiniâtreté dans la procédure de dissolution contre le JNR, puis Troisième Voie, le Local, et les pressions exercées sur le Conseil d’État sont l’indice qu’ils avaient parfaitement identifié que les idées de Troisième Voie était dangereuses pour eux. Il y a une volonté de casser cette vague populiste, ce courant très social du patriotisme français dont Troisième Voie faisait partie. D’ailleurs, Valls qui singe ce même populisme depuis des semaines a récemment dit que « République rimait avec, laïcité, Nation, autorité de l’État ». Il aurait pu le sortir d’un de nos textes, d’ailleurs, rien ne dit qu’il ne l’est pas fait en même temps qu’il « instruisait » notre dissolution !
    Comment expliquez-vous l’intérêt des médias pour votre personne après l’annonce de la mort de Clément Méric ?
    Les médias sont un théâtre, qui à la mort Méric ont fait jouer la pièce de l’antifascisme. Ils ont certainement cherché un client pour jouer le rôle du méchant, et ils ont certainement cru que je jouerais ce rôle. Cela m’a permis d’y avoir accès et de défendre les personnes inculpées, ainsi que mes idées que l’on caricaturait à tout bout de champ. Évidemment cela n’a pas duré, dès qu’ils ont compris que je ne jouais pas le rôle du grand méchant facho, et sur demande de la porte-parole du gouvernement, je n’ai plus eu aucun direct. D’ailleurs les médias eux-mêmes ont enterré l’histoire après le coup de la vidéo SNCF sortie par RTL.
    Finalement, avez-vous vu cela comme une chance pour vous de vous exprimer ?
    Ni, sur le moment, ni avec du recul, on ne peut parler de chance. Ce n’est pas une chance pour Esteban et Samuel, qui sont en prison. Pas une chance pour Méric, qui y a laissé sa peau sans gloire. Quant à moi, mon mouvement a été dissout et mon local fermé, on peut difficilement parler de tribune. En revanche, le point positif est que beaucoup de Français ont compris à quel point leur gouvernement était capable de manipulation et de mensonge. Beaucoup de gens dans la rue me serrent la main en me disant que, même s’ils ne sont pas toujours d’accord avec moi, j’ai été la première personne à se comporter dignement dans cette affaire.
    Comment réagissez-vous au sort qui est aujourd’hui réservé à Esteban ?
    Je pense toujours qu’il s’agit d’une nouvelle affaire Dreyfus. Deux gamins qui n’ont fait que se défendre sont jetés en prison, pas pour ce qu’ils ont fait, car on est dans un cadre de légitime défense, avec un coup rendu (mortel certes) pour un coup donné, par derrière en plus ; mais pour leurs opinions. Écoutez la gauche, écoutez ces gros neuneus d’experts, vous entendrez toujours cette idée que l’extrême-droite mène à la violence. Leurs fantasmes et leurs préjugés sont tellement enracinés dans leur esprit qu’ils ont été incapables de regarder le déroulement détaillé des faits.
    Comment avez-vous vécu votre rencontre avec Dieudonné et quelles ont été les retombées ?
    Je connaissais déjà Dieudonné, c’est un homme ouvert qui prend la liberté d’expression au sérieux. C’est dans cet esprit qu’il m’a proposé cette interview, et j’ai accepté. En ce qui concerne les réactions, elles ont été globalement positives.
    En quoi consiste votre activité actuellement ? Quels sont vos projets ?
    Je suis en train d’écrire un livre sur l’affaire Méric, qui devrait sortir le 14 septembre, à l’occasion de la manifestation contre la dictature socialiste, le même jour. Je suis en train de mettre sur pied un nouveau site, solidarisme.fr qui rassemblera revue de presse et textes théoriques, et qui nous permettra également de mettre en œuvre l’action la plus pertinente pour servir nos idées.
    À l’époque, par vos sulfureuses actions, ne pensez-vous pas avoir discrédité votre cause ; et marquez-vous, aujourd’hui, une rupture avec ce passé ?
    Je ne me souviens pas d’actions sulfureuses et encore discréditantes pour moi ou mes idées lorsque je défendais la liberté de pensée en général et d’expression du FN en particulier en assurant la sécurité de leurs meetings. À l’époque nous étions peu à risquer de prendre des coups pour défendre non pas le parti, dont je n’étais pas membre et à qui je ne devais rien, mais la libre expression.
    À propos de « souffre », je vais vous raconter une anecdote : en 92, lorsque sur le plateau de Bilalian, j’ai dit qu’une figurine de soldat de la seconde guerre mondiale ne tuait pas, mais que par contre le socialisme, le gouvernement, et Jean Marie Le Guen (qui était en face de moi), tuaient des hommes en bombardant l’Irak. Ils ont tous regardé leurs chaussures et le caméraman m’a montré son pouce en signe d’approbation.
    Il faut arrêter ce discours de pleureuse qui consiste à nous excuser pour des T-Shirts ou des propos tenus il y a 20 ou 30 ans. Il faut arrêter de se faire mettre à l’amende quand on nous parle de nos « écarts de conduite » ou de ceux d’un pote qu’on aurait pu connaître il y a 20 piges. Réveillez-vous ! En face de nous on a des criminels ! Des gens qui désindustrialisent le territoire français et jettent des centaines de milliers de gens au chômage ! Des gens qui insultent nos traditions, nos valeurs, qui rognent sur les libertés publiques, qui mentent, qui manipulent l’opinion, qui planquent de l’argent en Suisse et deviennent ministre ; on a un DSK qui a déshonoré la France et qui se permet de donner des cours d’économie au Sénat, un BHL qui nous fait faire des guerres parce qu’ « il le vaut bien », un Hollande qui couvre tous les pourris du PS depuis 15 ans et qui devient Président, des socialistes qui disent un jour « le nationalisme c’est la guerre » et qui décident de bombarder la Syrie le lendemain !
    Ce qui me discréditerait vraiment, ce serait de commencer à m’expliquer sur mon passé auprès de mes ennemis. Ça ce serait me discréditer, parce que ce serait le début de la défaite, d’accepter le système de valeurs, les petits amalgames et les points Godwin de ceux que je combats.
    Où vous situez-vous politiquement ?
    Pour mon pays, et avec mon peuple.
    Quelle est votre position à propos du monarchisme et du bonapartisme ?
    Je ne crois pas à un retour de l’Ancien Régime, ni à une résurgence du bonapartisme, qui pour moi a muté en gaullisme. J’en retiens surtout la réduction des intermédiaires entre la volonté du peuple et leurs dirigeants. Quand à la monarchie parlementaire, je ne crois pas qu’elle puisse protéger la nation. Regardez l’Angleterre, la famille Royale ne peut ni ne veut rien faire contre l’immigration de masse, la destruction du mariage et les écarts de richesses qui explosent avec la mondialisation. Je crois davantage à une République refondée sur l’intérêt du peuple et au recours à la démocratie directe. C’est pour moi le moyen le plus simple d’exercer un contrôle permanent sur les élites gouvernantes, et de les virer au besoin.
    Et concernant les forces républicaines patriotes comme, par exemple, Debout la République ou le Front National ?
    DLR ce n’est rien, c’est le machin d’un député qui est prisonnier de son mandat. Tant qu’il a son mandat et peur de le perdre, il ne peut faire d’alliance avec le FN et donc fait beaucoup pour s’en distinguer. Sa sortie sur l’obsession identitaire du FN était grotesque. Pourtant, les positions du FN sur cette question sont à la gauche du gaullisme dont il se revendique. DLR c’est le gaullisme sans les couilles, désolé mais je le pense.
    Quant au Front, la ligne est globalement bonne, même s’il lui manque un vrai sens de l’État pour proposer une réforme institutionnelle efficace. Les institutions de la Vème sont obsolètes, l’oligarchie en connait trop les rouages et elles n’imposent plus le même respect qu’à leur création. Il faut une refondation de la République, pas seulement une réorientation patriotique de celle-ci. Troisième Voie proposait par exemple de transformer le sénat en chambre représentative des travailleurs. Même sur la démocratie directe, les FN ne va pas assez loin. Nous proposions des mandats impératifs et révocables par l’initiative populaire. Nous avons proposé une refondation de la Nation sur un principe moral : la solidarité. Le FN, lui, n’a pas élaboré de principe philosophique sur lequel il appuie son patriotisme.
    Ensuite, je trouve le FN de Marine trop prisonnier de sa logique de dédiabolisation. Je vais me répéter, mais vraiment, arrêtons de nous excuser, les Français s’en foutent. Ils veulent des gens fiers. En plus c’est une erreur tactique : car c’est avouer une faiblesse. Du coup, à chaque élection, le système part dénicher son lot de maladroits étiquetés FN pour contraindre Marine à parasiter son discours en explications, dénégations, excuses, qui sont d’ailleurs systématiquement perçues par les militants comme des trahisons, et nuisent à l’action du Front. Il faut balayer ces amalgames d’un revers de main, car pour les Français, ça ne compte pas au regard de la situation de leur pays.
     On vous a accusé récemment de demander la tête du journaliste Frédéric Haziza et d’être à l’origine d’une « campagne antisémite » ; qu’en est-il ?
    Haziza représente tout ce qu’un patriote peut détester : journaliste partisan du système, dur avec les faibles comme Jacques Cheminade, flagorneur avec les puissants comme Valls ou Harlem Désir.
    Il s’agit en fait une campagne d’autovictimisation organisée par Haziza lui-même pour faire se faire mousser sur les réseaux sociaux : provoquer la colère des patriotes par des accusations outrancières et un chantage odieux à l’antisémitisme, puis crier à l’antisémitisme lorsque ceux-ci protestent.
    Il m’avait déjà provoqué sur Twitter au moment du décret de dissolution des JNR. Il a réitéré ses insultes suite à l’interview que j’ai donnée à Dieudonné. Demander sa démission en relayant une pétition, qui n’avait rien d’antisémite, au motif qu’un tel manque de professionnalisme et de neutralité n’a pas sa place sur une chaîne du service public comme LCP, me semblait parfaitement justifier. D’ailleurs nos échanges sont accessibles publiquement sur Twitter, et aucun de mes messages ne relève de l’incitation à la haine. En réalité Haziza, c’est un peu l’histoire du garçon qui criait au loup.
    Selon vous, pourquoi l’État français fait-il tout pour intervenir en Syrie ?
    Il y a depuis longtemps une volonté de l’Occident de nuire à Assad, comme à tous les régimes laïcs du Moyen Orient qui s’appuient sur une classe moyenne éclairée, et dont la tendance naturelle et légitime au patriotisme est un obstacle à l’acquisition par les multinationales du contrôle total de la région. Il y a également une volonté atlantiste manifeste de nuire aux intérêts stratégiques de la Russie dont la Syrie est l’alliée et de retarder l’émergence d’un monde multipolaire.
    En ce qui concerne l’élan belliciste soudain de notre gouvernement, je pense que l’on a simplement affaire à une bande d’incapables qui surréagissent à un attentat chimique qui, s’il est avéré, est très probablement imputable aux rebelles, dont Carla del Ponte, enquêtrice de l’ONU, avait affirmé qu’ils possédaient et avaient utilisé du gaz sarin en mai. Je ne crois pas qu’il s’agisse d’une grande manœuvre coordonnée, car à part la Hollande, personne n’a l’air d’être motivé.
    Quelles sont vos solutions vis-à-vis du « grand remplacement » de population ? Croyez-vous à une « réconciliation nationale » ?
    Tout d’abord, je dirais que cette discussion est oiseuse tant qu’on n’a pas pris le pouvoir. Intégrer le problème de l’immigration dans un programme plus vaste visant à refonder cette nation et à permettre à son peuple d’être heureux et prospère, très bien. Mais faire de cette question du grand remplacement un point de passage obligé pour tout programme, c’est idiot : tout d’abord parce que la prise du pouvoir changera déjà la donne. La suppression des pompes aspirantes non seulement réduira considérablement les entrées, mais provoquera aussi énormément de départs. Énormément de gens vivent de la générosité et du laxisme de ce pays, cessons, d’être laxistes, la France cessera d’être un eldorado pour le reste du Tiers-monde.
    Dans un deuxième temps, la lutte contre l’oligarchie mondialiste doit évidemment se faire en partenariat avec les autres pays du monde, et en l’occurrence, les pays d’émigration qui se vident de leurs forces vives avec le système actuel. Une coopération économique plus juste rendra certainement ces pays plus attractif pour les immigrés originaires de ces pays. Mais je suis confiant, si nous prenons le pouvoir, tout sera beaucoup plus facile. Ces minorités dont la croissance démographiques inquiètent tant certains de nos concitoyens verront leurs effectifs se réduire et se stabiliseront d’elles-mêmes en adoptant des mœurs françaises. Elles cesseront alors d’être un objet d’anxiété pour le reste de la communauté nationale, leur présence ne posera alors plus de problème au sentiment identitaire des Français.
    Peut-on encore sauver la France ?
    Pour moi ça ne fait aucun doute.
    Propos recueillis par Christopher Lings
    http://www.lebreviairedespatriotes.fr/10/09/2013/politique/serge-ayoub-arretons-ce-discours-de-pleureuse-les-francais-veulent-des-gens-fiers/

  • Les bons conseils du Père Ubu : Une étonnante nuit d’été (11)

    Ce soir-là, tu t'étais donné quartier libre à toi-même. Valérie était loin. Tu avais décidé de t'offrir une expérience inédite. Après un trajet discret, tu demandas à ton chauffeur de t'arrêter à proximité de la plage de Saint-Pantaleon-les-Embruns (Charente-Atlantique). Tes deux gardes du corps spécialement choisis pour cette soirée, tu leur fis signe de te suivre à distance, sans rouler des mécaniques ni prendre des airs de héros stressés.

    La veillée avait déjà commencé. Retrouvant tout à coup ta souplesse d'antan, tu t'assis en tailleur sans te faire remarquer. En jouant de tes bras et de tes genoux, tu t'appliquas à dissimuler à peu près ton visage, non sans redouter de te faire repérer par ton front. Tu te mis à écouter, à écouter vraiment, à écouter comme tu en avais depuis longtemps perdu l'habitude. N'avais tu pas opté pour une soirée exceptionnelle?

    Tu observais aussi, sans en avoir l'air. Les jeunes hommes ne te parurent pas très impressionnants. Ils ne ressemblaient guère aux activistes d'innommables groupuscules que, dans tes jeunes années, tu détestais en les craignant un peu. Et puis, en vérité, la position assise ne se rencontre pas très souvent chez les fachos. Quant aux jeunes filles, tu essayas un instant de te les imaginer avec des tresses blondes et des bouquets dans les mains, faisant les yeux doux à l'oncle Adolf dans sa Mercedes de parade. Mais tu ne parvins pas à te convaincre toi-même. Tu sentis en toi un sursaut de tes neurones, et tu n'en fus pas mécontent.

    Et puis, il y avait les textes. Une page que spontanément tu n'aurais pas attribuée à Proudhon. Du Bernanos qui ne te donna pas l'urticaire que tu prévoyais. Et surtout, surtout, une de ces proses contemplatives et somptueuses que certains de tes amis ne pardonnent pas à Jaurès d'avoir commises et jamais reniées.

    Alors se produisit l'improbable. Saisi par les couleurs du couchant, intrigué par tous ces visages, emporté par les rythmes jauressiens qui s'alliaient à la rumeur des vagues, bercé par les voix des jeunes filles qui près de toi chantaient plutôt juste, tu te dis soudain que l'idée de transcendance valait bien, après tout, la danse en transes ou les trans en danse.

    À la fin de la veillée, tu te dirigeas vers Gaultier, lui serras la main, ne lui laissas pas le temps de dire un mot et lui susurras : "La reprise, elle est là. Je veux dire : la reprise du dialogue. Une fois rentré à Paris, téléphonez à l'Elysée. Il faut qu'on parle, vous et moi."

    Tu t'éclipsas. Personne ne put surmonter sa stupeur pour faire un geste ou dire un mot. Toi, tu venais de t'étonner toi-même. Tu ressentais une impression curieuse, pas désagréable mais curieuse. Tu n'avais agi ni par intérêt ni par peur ni pour que Valérie te fichât la paix. Tu te dis à toi-même : " Moi, Président", et ces deux mots n'avaient pas besoin d'être répétés pour te procurer une satisfaction d'un type tout nouveau.

    Ah, ah, ah ! Non, mon François, ne panique pas, Cornegidouille ! C'est juste un cauchemar que j'ai fait pendant mes vacances. Le cauchemar d'une nuit d'été, si tu vois ce que je veux dire, Cornefinance! Ça m'amusait de te le raconter.

    Allez, on se rassure, on revient à la réalité. Courage, Tyrannichou, ça peut prendre du temps, tout de même, de déconstruire un vieux pays comme la France, bougre de merdre! Mais tu tiens le bon bout. Bonne rentrée, Dictatounet! Et ne me déçois pas, Cornephysique !

    Le Père Ubu http://www.printempsfrancais.fr/3624/une-etonnante-nuit-dete-11/

  • Liberté de conscience : déclaration des adjoints au maire de Bollène

    Déclaration :

    B"Nous, adjoints au maire de Bollène, et en tant que tels, officiers d'état-civil, avons souhaité faire cette déclaration, pour plusieurs raisons.

    1/ En portant plainte contre Marie-Claude Bompard, mesdames Gilles et Leroux ont déclenché un mécanisme visant à la priver de son droit à la liberté d'expression, donc à sa liberté d'opinion. En conséquence, le maire de Bollène ne s'exprimera plus sur ce sujet que dans le cadre de la procédure judiciaire, si toutefois le parquet estime justifié et opportun de la poursuivre.

    2/ Nous sommes réunis pour assurer Marie-Claude Bompard de notre entier et indéfectible soutien dans cette affaire.

    Il y a presque trois semaines, le 23 août, madame le maire de Bollène a souhaité recevoir ces deux personnes, pour leur faire part des raisons qui la conduisaient à refuser d'assurer elle-même cette cérémonie ou de déléguer son pouvoir à un conseiller municipal, fut-il d'opposition, pour le faire à sa place. Ce rendez-vous n'était en aucun cas public.

    A la sortie de cette réunion, Mme Gilles et Mme Leroux sont allées dans la minute contacter la presse (Vaucluse matin). Elles ont posé pour les photographes. Elles ont donné leurs noms, montré leurs visages. Ce sont elles qui ont décidé de médiatiser cette affaire. Elles en portent l'entière responsabilité.

    De ce fait, et depuis lors, le maire de Bollène a été en butte à des pressions administratives, des pressions politiques, notamment de la part du parti socialiste, des pressions médiatiques et, pour finir, puisque celles-ci ne suffisaient pas, des pressions judiciaires.

    C'est donc pour éviter toute éventuelle condamnation pénale à Marie-Claude Bompard que notre collègue Jacqueline Morel a décidé, de sa propre initiative, de procéder à la cérémonie d'aujourd'hui.

    Cet acte ne constitue nullement une approbation de notre part de la loi Taubira. D'ailleurs, il y a un peu moins d'un an, le conseil municipal votait une motion demandant le retrait de cette loi, et, en cas de vote de cette loi, l'instauration d'une clause de conscience pour les officiers d'Etat-civil. Cette motion est plus que jamais d'actualité.

    3/ En effet, nous réclamons la liberté de conscience pour les officiers d'état-civil, comme François Hollande lui-même l'avait proposé, devant les maires de France en novembre 2012, déclarant : « et il y a toujours la liberté de conscience ».

    Nous réclamons cette liberté de conscience, droit prévu dans notre Constitution.

    C'est d'ailleurs en ce sens que Marie-Claude Bompard avait écrit à Manuel Valls, le 27 août dernier, sans réponse à ce jour.

    C'est pour cela aussi que nous ne pouvons que nous féliciter des récentes conclusions du rapporteur public au Conseil d'Etat, qui estime que la question de l''absence de liberté de conscience dans la loi Taubira et dans la circulaire Valls, n'est pas dépourvue de tout caractère "sérieux". Nous attendons donc, avec espoir, la décision du Conseil d'Etat, quant à la transmission de cette question au conseil constitutionnel.

    4/ Pour conclure : nous assurons Marie-Claude Bompard de tout notre soutien et nous poursuivons notre combat pour que notre liberté de conscience soit reconnue."

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  • Pierre Vial « Assurer la survie des nôtres »

    Pierre Vial est depuis longtemps dans l'action politique et idéologique. Militant à quinze ans dans les rangs de Jeune Nation, puis de la Fédération des Etudiants Nationalistes (FEN) et d'Europe Action, il a été, en 1968, un des fondateurs du GRECE, dont il a été le secrétaire général de 1978 à 1984, tout en dirigeant la revue Eléments. Il a adhéré en 1987 au Front National, où il est devenu membre du Bureau Politique, et qu'il a représenté, en tant qu'élu, au conseil municipal de Villeurbanne et au conseil régional de Rhône-Alpes. Il a participé au MNR de Bruno Mégret, avant de s'en séparer rapidement pour incompatibilité de ligne politique. Fondateur du mouvement Terre et Peuple en 1995, il en est le président.
    RIVAROL : Comment analysez-vous la situation politique actuelle ?
    Pierre VIAL : Si l'on s'en tient aux épi-phénomènes, les gesticulations gouvernementales n'empêchent en rien que les Français soient de moins en moins dupes, en comprenant qu'il n'y a pas de pilote dans l'avion. Les indices de popularité du pitoyable Hollande sont, à juste raison, en chute libre, Ayrault essaye désespérément de faire croire qu'il existe, l'étrange créature censée être garde des sceaux se bouffe le nez avec un Valls qui est la risée de ces racailles contre lesquelles il n'ose pas sévir, de peur d'être traité de raciste, Moscovici nie l'évidence en criant sur les toits que la relance est pour demain matin... J'en passe, et des meilleurs. La France est la risée des observateurs internationaux (la lecture de la presse étrangère, en particulier allemande et anglo-saxonne, est édifiante) mais à part ça tout va très bien madame la marquise.
    En fait - et pour parler sérieusement, au-delà des points de détail (aïe !) que je viens d'évoquer - le fond du problème est que le Système en place est en crise profonde, ce qui évidemment me réjouit. Un Système dont droite et gauche institutionnelles sont parties prenantes et sont, de fait, au-delà du verbiage destiné à amuser les gogos, solidaires car elles profitent grassement l'une et l'autre de la grande escroquerie réinstallée en 1945 mais dont les racines plongent bien en deçà puisque c'est l'idéologie des « droits de l'homme » qui en est responsable, avec ses conséquences mortifères dont la plus grave est, sous nos yeux, l'invasion raciale de l'Europe que l'on appelle pudiquement immigration.
    R. : Mais alors, quelles solutions ?
    P. V. : Elles vont s'imposer d'elles-mêmes mais il faut préparer la voie et accélérer le processus de décomposition du Système par tous les moyens. La destruction du Système, cela s'appelle une révolution. Mais il faut procéder par étapes, méthodiquement, comme ont su le faire nos ennemis. Tout d'abord, prendre conscience et faire prendre conscience à d'autres, autour de soi, de la réalité. Cette prise de conscience est en route et il nous appartient, à nous, révolutionnaires identitaires, de l'accélérer, malgré l'anesthésie de nos peuples que le Système développe et qui est sa seule chance de survie. En sachant que la route sera longue. Mais nous en avons l'habitude et des signes récents, qu'avait salués Dominique Venner dans son dernier éditorial de la Nouvelle Revue d'Histoire, montrent qu'une évolution positive est en cours, qui confirme que, selon la parole de Rivarol, « Quand les peuples cessent d'estimer, ils cessent d'obéir ». En l'occurrence, le Système a commis - et c'est tant mieux - une faute majeure en voulant faire passer en force l'officialisation du mariage homosexuel.
    R. : Précisément, comment interprétez-vous cette officialisation du mariage homosexuel et des réactions qu'elle a provoquée ?
    P. V. : Le régime en place a pris la lourde responsabilité de devenir la République des invertis, qui plastronnent en prétendant tenir le haut du pavé et imposer leur déviance comme nouvelle norme. Ce qui - soit dit en passant - accentue le mépris, déjà grand, qu'ont les Maghrébins et les Noirs pour des Blancs qui se conduisent comme des flottes, jusqu'au plus haut niveau des responsabilités politiques. Et qui se disent : le fruit est mûr, il va tomber. Comment leur donner tort ? Mais, comme le disait Bernard Antony, lorsque je partageais avec lui cassoulets et verres d'Armagnac sur son stand des BBR, il arrive que le diable porte pierre... En l'occurrence, le mariage des invertis a provoqué un salutaire éveil chez nombre de braves gens qui ne s'étaient jamais mobilisés pour grand-chose mais qui, là, on trouvé que la coupe était pleine. D'où ces formidables manifestations, regroupant des centaines de milliers de femmes, d'enfants et d'hommes de tous âges, venus exprimer leur ras le bol de l'ignominie. Ce fut, en somme, le début du réveil du pays réel, à la grande surprise d'un pays légal persuadé qu'il pouvait en toute impunité faire tout et n'importe quoi. Les hiérarques du Système, ébahis, découvraient que le peuple pouvait leur dire non. Bien entendu, cette hirondelle qui annonçait le printemps doit ouvrir la porte à une contestation en profondeur, organisée et cohérente, du Système en place. Mais tout est devenu possible, avec des garçons et des filles qui ont découvert que la rue appartient à ceux et celles qui y descendent, comme dit un vieux chant de combat... Comme l'a souvent dit Dominique Venner, l'Histoire est ouverte, tout reste toujours possible. Il faut avoir l'espérance, toujours, au fond du cœur.
    R. : On voit que les régimistes sont prêts a tout pour essayer d'endiguer les forces saines du pays, en interdisant des mouvements (Troisième Voie, Jeunesses Nationalistes, l'Œuvre française) et en essayant de tuer financièrement RIVAROL par des amendes et des procédures judiciaires nuques.
    P. V. : La bête est aux abois... L'interdiction des mouvements que vous citez est scandaleuse et stupide. Scandaleuse, parce que ces gens qui se drapent dans de grands principes et qui n ont que le mot de liberté à la bouche exercent en fait une véritable dictature Mais cela ne peut étonner ceux qui connaissent un peu d histoire, car les jacobins qui gouvernent aujourd'hui sont les héritiers de ceux qui déclenchèrent la Terreur de 1793  Ils devraient pourtant réfléchir : la plupart de ceux qui ont fait fonctionner la guillotine exterminé Vendéens et Lyonnais insurgés ont fini de misérable façon.   
    Cette interdiction est par ailleurs stupide car on peut interdire une organisation mais on ne peut tuer des convictions et faire disparaître des militants aguerris, bien décidés à continuer leur combat et moralement renforcés par l'injustice dont ils sont victimes. Certes, nous ne sommes pas d'accord, sur certains points, avec les mouvements interdits. Mais cela ne nous empêche pas d'affirmer la nécessité d'une totale solidarité avec eux. Quand on est en guerre - et nous sommes en guerre, pour la survie de nos peuples - il faut choisir son camp. Nous avons choisi le nôtre. Sans état d'âme.
    C'est pourquoi, aussi, nous affirmons notre totale solidarité avec RIVAROL. J'ai découvert ce journal, alors que j'étais tout gamin, quand mon père l'apportait à la maison. J'y ai lu, avec passion, Pierre-Antoine Cousteau, Rebatet, Pierre Dominique et d'autres grandes plumes. Ils m'ont ouvert les yeux sur bien des sujets et contribué à ma vocation de soldat politique. Depuis, RIVAROL a continué son combat, difficile, tenace. En étant un carrefour de sensibilités auxquelles il apporte une liberté d'expression devenue rare, donc précieuse, de nos jours. Sa survie est un enjeu vital.
    R. : Au plan de la situation internationale, comment juger les évolutions récentes ?
    P. V. : Quelques grandes tendances s'affirment. Tout d'abord, contrairement à ce que croient ceux qui ont une vision trop simpliste de l'islam, celui-ci affiche ses divisions, en Syrie, en Irak, en Egypte, en Tunisie... en attendant d'autres explosions. Les enjeux de ces affrontements échappent bien souvent aux Occidentaux et les Yankees, comme toujours, ne voient que trop tard qu'ils ont joué les apprentis sorciers, eux qui se considèrent comme maîtres du monde mais qui sont d'une myopie politique effarante. Les Russes observent tout cela avec un certain sourire, en bons joueurs d'échecs qu'ils sont. La Chine, sans faire de bruit, développe vite et fort son potentiel économique et n'a pas fini de nous réserver des surprises. En Afrique noire les tensions ethniques démentent tous les jours la vision irénique des benêts de l'humanisme bêlant, tandis que la Réalpolitique impose sa loi, comme le démontre, dans ses ouvrages, mon ami Bernard Lugan. Quant à l'Europe de Bruxelles elle fait de plus en plus la preuve de sa nocivité. Contre elle, il faut lutter avec vigueur pour le droit des peuples. Là aussi une prise de conscience est en marche. Ainsi les Grecs ont compris quel plan d'étranglement ont mijoté contre eux le FMI, la BCE et les réseaux du mondialisme capitaliste animés par des gens comme ceux issus de Lehman Brothers, qui sont parmi les plus nocifs. D'où la naissance et le succès d'un mouvement nationaliste-révolutionnaire comme l'Aube dorée, dont l'expérience va servir à d'autres mouvements-frères à travers l'Europe. Les peuples d'Europe doivent se libérer du carcan capitaliste, du social-libéralisme, du culte de l'argent-roi dans lequel communient gauche et droite, qui ne veulent surtout pas la fin d'un Système dont elles vivent.
    R. : Nous voilà au seuil des questions économiques et sociales ?
    P. V. : Elles ont trop souvent été négligées par ce qu'il est convenu d'appeler la droite (un mot qui recouvre à vrai dire tout et n'importe quoi, mais passons...). Or les questions économiques et sociales jouent un rôle déterminant tout simplement parce qu'elles conditionnent la vie quotidienne des gens. Ignorer ou minimiser cela est totalement irresponsable. Quant à nous, nous plaçons ces questions en première ligne de nos préoccupations et nous incitons nos camarades à s'engager dans le cadre du syndicalisme.
    J'appartiens à une famille de pensée où le national et le social ont toujours été indissolublement liés. Ce qu'avaient compris, dans la première moitié du XXe siècle, des hommes comme Déat, Doriot et quelques autres, aujourd'hui diabolisés (mais je n'en ai rien à faire). Ces hommes prenaient d'ailleurs en compte un héritage datant du XIXe siècle, avec des hommes comme Proudhon, Blanqui, Sorel, Toussenel. Et des exemples de mouvements insurrectionnels dont je célèbre le souvenir, comme ceux des Canuts lyonnais de 1831 et 1834 et des Communards parisiens.  Certains diront peut-être que tout cela est bien ancien. Pour moi, c'est une mémoire vivante, qui est source d'inspiration.
    Bien entendu cet héritage doit être actualisé, mais certains thèmes proudhoniens comme le localisme, le mutuellisme, la subsidiarité sont d'une totale actualité. Tout comme la définition de l'entreprise comme communauté de travail, avec une claire répartition, entre les acteurs économiques, des droits, des devoirs et des bénéfices issus de la production.
    Aujourd'hui la révolution identitaire que nous voulons doit fixer des priorités économiques et sociales et nous publierons dans les mois qui viennent une série de propositions à cet égard.
    R. : Et l'immigration, dans tout cela ?
    P.V. : Précisément, l'immigration est une arme du capital, comme le disent nos camarades du MAS et de la revue Réfléchir et Agir. Elle est utilisée comme un moyen de chantage pour faire baisser les salaires des travailleurs d'origine européenne, les patrons misant par ailleurs sur le fait que des immigrés accepteraient plus facilement, contraints et forcés, des conditions de vie et de travail misérables. Ils doivent maintenant déchanter mais ils ont joué les apprentis-sorciers. Un mot sur l'islam : il sert de justification, de caution religieuse pour couvrir, en fait, un phénomène de conquête territoriale et de remplacement d'une population européenne par une population africaine, qu'elle vienne du Maghreb ou d'Afrique noire. C'est d'une invasion ethnique qu'il s'agit. Ceux qui en ont pris la responsabilité, qu'ils aient un rôle politique, économique ou culturel, sont des traîtres, en tant que collaborateurs des envahisseurs. La résistance identitaire leur demandera des comptes. Mais de toute façon ils seront victimes, eux aussi, de la guerre raciale qui s'annonce. S'ils croient sauver leur peau en se soumettant aux envahisseurs ils se font des illusions.
    R. : En fin de compte, quels sont le rôle et l'ambition de Terre et Peuple ?
    P. V. : C'est d'être en première ligne de la résistance identitaire qui s'organise partout en Europe (j'ai été le premier à utiliser, il y a dix-huit ans, le mot "identitaire" et je me félicite de son succès car il résume parfaitement notre combat). Avec des objectifs très concrets : 1) assurer la formation idéologique de nos amis, afin qu'ils aient une claire conscience des enjeux de notre combat et qu'ils sachent en faire prendre conscience autour d'eux, dans leur famille, auprès de leurs voisins, de leurs collègues de travail, etc. Sur le thème : « Ouvrez les yeux ! ». Ce travail se fait dans le cadre de journées de formation et par la diffusion de notre revue Terre et Peuple Magazine 2) Constituer une communauté de travail, de combat et de foi (telle est la définition que nous donnons de Terre et Peuple) dont le premier souci est d'assurer la survie des nôtres au sein des événements tragiques qui se préparent et qu'il faut appeler par leur nom : la guerre raciale. Ceux qui trouvent que je dramatise et négligent l'avertissement auront un jour à pleurer des larmes de sang (les hommes de terrain, policiers, pompiers, professions de santé, gardiens d'immeubles et d'autres savent que j'ai raison).
    Nous rappellerons cela lors du grand rendez-vous annuel qu'est notre Table Ronde, qui se tiendra le 1er décembre à Rungis sur le thème : « Sommes-nous en 1788 ? Vivement la révolution ! ».
    R. : Une dernière question : vous êtes engagé depuis longtemps dans l'action. Quelle est votre principale motivation ?
    P.V. : Effectivement, j'essaye d'apporter ma pierre depuis cinquante-cinq ans. C'est un long chemin, dont le bout n'est peut-être pas loin. Mais peu importe. Ma motivation ? C'est une certaine conception du monde, de la vie, de l'homme, de l'Histoire qui se résume par un mot : Fidélité. Je ne suis pas le premier à avoir fait ce choix et je sais que je ne serai pas le dernier, ce qui m'apporte une totale paix de l'âme, car je suis ainsi en communion avec une Grande Armée dont les siècles à venir se souviendront.
    Propos recueillis par Robert SPIELER. Rivarol du 5 septembre 2013
    Pour tous renseignements : Terre et Peuple BP 38 
04300 Forcalquier et www.terreetpeuple.com
 et contact@ terreetpeuple.com.

  • Cellules de base de la société, les familles forgent l'avenir d'un pays

    Editorial de Jeanne-Emmanuelle Hutin dans Ouest-France :

    "Cellules de base de la société, les familles jouent un rôle irremplaçable : ce sont elles qui forgent l'avenir d'un pays, par le renouvellement et l'éducation des adultes de demain. Certains pays l'ont bien compris et, par exemple, assurent aux femmes un niveau de retraite qui prend en compte, de manière conséquente, le nombre d'enfants qu'elles ont élevés.

    Mais en France, à l'inverse, la politique familiale actuelle fragilise les familles en les imposant davantage en pleine crise économique. Une pluie de hausses d'impôts continue de s'abattre sur elles : après une nouvelle baisse du plafonnement du quotient familial, on parle aujourd'hui de supprimer la réduction d'impôts pour frais de scolarité dans le secondaire et pour les étudiants.

    L'Union Nationale des Associations familiales (UNAF) s'insurge : « Ces mesures sont injustes car plus les enfants sont grands, plus les dépenses relatives aux études augmentent. Et plus les familles ont d'enfants, plus elles seront sanctionnées par ces mesures. ».

    « Comment expliquer que pour équilibrer les retraites, on touche aux avantages accordés aux familles et pas à ceux des régimes spéciaux ? » - interroge Laurent Clévenot, responsable de l'UNAF.

    Pour beaucoup, c'est d'autant plus injuste, que la branche famille a été mise à contribution pour financer les retraites. Les Associations familiales dénoncent « le tour de passe-passe » car « on transfère 4,4 milliards de majoration de pensions pour charge d'enfants de la branche vieillesse sur la branche famille ».

    Mais, en plus, a-t-on mesuré les conséquences de ces mesures conjuguées à la crise ? Sur la natalité par exemple ? Si elle diminuait, le financement des retraites n'en serait-il pas encore plus difficile ? Ne regrettera-t-on pas de ne pas avoir assez protégé les familles pendant la crise ?

    Et puis, cette recherche de recettes à court terme, est-elle de nature à sortir de la dangereuse impasse actuelle ? « Il ne suffit pas de grignoter des économies ministérielles, d'amender le droit du travail, de taxer les riches, pour borner les inégalités... » explique Eric Le Bouchee pour qui « les réformes ne sont pas des remèdes pour corriger et remettre en ordre le modèle cassé du XXe siècle, elles doivent être des outils de transformation profonde de ce modèle. L'État n'a pas seulement besoin d'être allégé et simplifié, il faut le repenser non pas pour redistribuer mais pour enrichir les dynamismes. » De cette manière et en protégeant les familles, il sera possible d'assurer demain la solidarité entre les générations, l'indépendance du pays et la liberté de ses citoyens."

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  • Le bel hommage rendu à Dominique Venner par Bastien VALORGUES

    Le 21 mai dernier disparaissait volontairement dans la cathédrale Notre-Dame de Paris l’historien Dominique Venner. Quelques semaines plus tard, à l’initiative de l’éditeur militant Roland Hélie, Lionel Muresan sollicitait un certain nombre de personnes afin d’évoquer Dominique Venner et de saluer la mémoire de ce grand Européen de France.

    En dépit de la brièveté des délais imposés, quinze personnes ont accepté de donner soit des articles, soit des entretiens, soit parfois les deux… Le recueil s’achève par une note de lecture de Robert Spieler d’Un samouraï d’Occident. Le Bréviaire des insoumis.

    Quitte à bousculer sa modestie habituelle, signalons la grande part prise par Georges Feltin-Tracol dans ce volume. En plus de son texte, « Dominique Venner ou la fondation de l’avenir », déjà mis en ligne le 23 mai, le « guide suprême » d’Europe Maxima ouvre l’ouvrage par un excellent essai biographique et propose au lecteur « Une introduction bibliographique » qui n’est nullement une bibliographie générale exhaustive. Ce n’est qu’une simple esquisse avec des oublis. Francis Bergeron signale par exemple l’existence d’une publication des Éditions Saint-Just écrite par Dominique Venner sous un pseudonyme qui, par conséquent, ne figure pas dans cette liste.

    Certains rédacteurs sont chrétiens. S’ils ne cachent pas l’effroi que leur a inspiré la mort volontaire de Dominique Venner, au contraire de tant de détracteurs pathétiques et pitoyables, ils la respectent sans toutefois nier leurs désaccords. Pour Francis Bergeron, « c’est la contradiction majeure du geste de Venner et des valeurs qu’il entend souligner. Le réveil des peuples d’Europe ne peut passer que par une vision conquérante, optimiste, entrepreneuriale de notre communauté de destin. Ce que semble contredire un suicide ». L’abbé de Tanoüarn pense que « son acte n’est pas médiatique, il est symbolique. […] Je crois que ce suicide – avertissement, que Dominique a voulu comme une sorte d’analogie frappante avec le suicide de notre civilisation, était aussi, pour lui, la seule manière qu’il ait trouvée de passer par l’Église une dernière fois sans se renier ». En païen conséquent, Dominique Venner savait que le catholicisme médiéval n’était pas judéo-chrétien, mais plutôt pagano-chrétien, ce qui le singularise par rapport aux formes postérieures de catholicisme, tridentine, puis conciliaire. Ces états suivants ont éliminé leur propre tradition si bien que le catholicisme actuel, y compris dans sa version « traditionaliste », ne correspond pas au catholicisme médiéval d’esprit européen.

    Alors pourquoi ce suicide ? Guillaume Faye estime que « pour nous faire comprendre la mort possible de l’Europe millénaire, il s’est donné la mort, en victime exemplaire ». « Il n’est pas exagéré de dire que, si Dominique Venner s’est donné la mort, relève Alain de Benoist, c’est parce qu’il voyait sa propre culture se suicider sous ses yeux. Il ne supportait plus de voir l’Europe sortie de l’histoire, vidée de son énergie, oublieuse d’elle-même. » Quant à Renaud Camus, il s’agit d’une ultime protestation contre « le faussel, ce règne du faux, [qui] est percé, troué, déchiré, tous les jours un peu avantage par la crise, par la violence, par la guerre ethnique… ».

    En fin connaisseur de la civilisation nipponne, Bruno Gollnisch explique la signification du seppuku, de la mort volontaire des samouraï, dans le Japon ancien. Ce geste peut être, « de la part d’un vassal, la volonté de suivre un suzerain dans la mort. […] [ou bien être] un mode “ honorable ” de condamnation à mort. […] [Ou encore un] suicide “ de protestation ” ». Dominique Venner a ainsi souhaité par cet acte s’élever contre le déclin de l’Europe en se donnant la mort. « Dominique Venner s’est donné ce pouvoir en quittant un monde qu’il ne sentait pas sien, écrit Bruno Favrit, le pouvoir par son sacrifice d’édifier les consciences, d’inspirer une conduite en accord avec un formidable héritage, mais aussi de bonnes pensées, des actes justes aux femmes et aux hommes de bonne et grande volonté. » Ancien président de Jeune Nation et vieux compagnon de combat de Dominique Venner, François Sidos, considère que « son geste correspond à son caractère. Il avait l’habitude des ruptures brutales ». On pourrait continuer les citations des divers contributeurs qui sont en revanche unanimes sur la nécessité de poursuivre et d’approfondir le combat d’abord mystique avant d’être politique de Dominique Venner.

    D’autres intervenants qui l’ont connu à son époque militante, préfèrent témoigner du personnage. Nicolas Tandler rappelle que « dans les actions de rue, son courage entraînait. Il ne reculait jamais, malgré les coups et les risques ». Gilbert Sincyr garde, lui, de cette période intense le souvenir d’avoir rencontré « des hommes de haut niveau qui, tels Dominique Venner, vivaient au quotidien les règles éthiques qu’ils rappelaient dans leurs écrits ». Le militant nationaliste anonyme rapporte qu’à l’occasion d’une pause d’une session de formation, il fume quand Dominique Venner lui lance : « – Ami, fumer est oriental ! ». Il est vrai qu’il ne fumait pas ou, plutôt, ne fumait plus. Or, en couverture du Livre des armes, pistolets et revolvers, on peut voir une photographie de l’auteur en train de nettoyer une arme de poing, la cigarette à la bouche !

    Que faire de cette fin ? Avec un regard extérieur nationaliste-révolutionnaire italien influencé par Julius Evola, Gabriele Adinolfi en prend acte, juge que nous vivons au milieu des ruines et se trouve au sol brisée en mille morceaux la tradition chère à Dominique Venner. C’est la raison pour laquelle « la réponse, déclare-t-il, tient plus dans le défi de briser des cycles, c’est-à-dire que la lutte contre cette subversion est plus dans la révolution que dans la tradition ». Il importe donc de « faire son devoir, conclut François-Philippe Galvane, militer contre l’invasion et le grand remplacement, pour l’indépendance face aux différentes oligarchies mondialistes et pour le maintien de notre identité ethno-culturelle, c’est s’inscrire dans la continuité de l’acte fondateur de Dominique Venner ».

    L’ancien chef d’Europe-Action a montré une voie qui n’est pas celle du nihilisme suicidaire, mais plus sûrement d’une insurrection totale des esprits contre l’abrutissement symbolique, l’ahurissement mental, la colonisation spirituelle et la submersion migratoire démographique afin de préparer « ce qui est notre espérance : une révolution sociale-identitaire, détruisant le système capitaliste-mondialiste (Pierre Vial) ».

    Bastien Valorgues http://www.europemaxima.com/

    • Lionel Muresan présente, Dominique Venner. Présent ! Un parcours militant. Un ultime message d’espoir pour l’Europe, Les Bouquins de Synthèse nationale, 2013, 161 p., 18 € (à commander au 116, rue de Charenton 75012 Paris).