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tradition - Page 271

  • Julius Evola : "Métaphysique de la Guerre" partie 2

    Puis il faudrait ensuite spiritualiser le principe guerrier. Le point de départ pourrait être le développement virtuel d’une expérience héroïque dans le sens de la plus haute des trois possibilités que nous avons envisagées.
    Montrer comment cette possibilité plus haute, spirituelle, a été pleinement vécue dans les plus grandes civilisations qui nous ont précédées, illustrant ainsi son aspect constant et universel, ne relève pas de la simple érudition. C’est ce que nous nous proposons de faire, à partir des traditions propres à la romanité antique et médiévale.
    Nous venons de voir comment le phénomène de l’héroïsme guerrier a pu revêtir plusieurs formes et obéir à différentes significations qui, quand on veut en fixer les valeurs d’authentique spiritualité, le différencient profondément.
    C’est pourquoi nous allons commencer par examiner certaines conceptions relatives aux anciennes traditions romaines.
    On n’a, en général, qu’un concept laïc de la valeur du Romain de l’antiquité. Le Romain n’aurait été qu’un soldat au sens le plus étroit du mot, et, grâce à ses vertus militaires unies à un heureux concours de circonstances, il aurait conquis le monde. Fallacieuse opinion, s’il en fut.
    Avant tout, le Romain nourrissait l’intime conviction que l’imperium et son aeternitas étaient dus à des forces divines. Pour considérer cette conviction romaine sous un angle uniquement "positif", il suffit de substituer à cette croyance un mystère: mystère, qu’une poignée d’hommes, sans aucune nécessité, de "terre" ou de "patrie", sans être poussés par un de ces mythes ou une de ces passions auxquels recourent si volontiers les modernes pour justifier une guerre et soulever l’héroïsme, mais sous une impulsion étrange et irrésistible aient été entraînés, toujours plus loin, de pays en pays, en pliant tout à une "ascèse de la puissance". D’après les témoignages de tous les classiques, les premiers Romains étaient très religieux – nostri maiores religiosissimi mortales – rappelle Salluste et répètent Cicéron et Aulu-Gelle – mais cette religiosité ne restait pas dans une sphère abstraite et isolée, elle débordait dans la pratique, dans le monde de l’action et par conséquent dans celui de l’expérience guerrière.
    Un collège sacré formé par les Fétiaux présidait à Rome à un système bien déterminé de rites, servant de contrepartie mystique à toute guerre, de sa déclaration jusqu’à sa conclusion. D’une manière plus générale, il est certain que l’un des principes de l’art militaire des Romains était d’éviter de livrer bataille avant que des signes mystiques n’en aient, pour ainsi dire, indiqué le "moment".
    Avec les déformations et les préjugés de l’éducation moderne, on ne voudra voir en cela qu’une superstructure extrinsèque faite de superstitions. Quant aux bienveillants, ils n’y verront qu’un fatalisme extravagant. Ce n’est ni l’un ni l’autre. L’essence de l’art augural pratiqué par le patriciat romain, comme d’autres disciplines analogues, aux caractères plus ou moins identiques dans le cycle des plus grandes civilisations indo-européennes, n’était pas de découvrir des "destins" à suivre avec une superstitieuse passivité. Il s’agissait davantage de découvrir les points de jonction avec des influences invisibles, pour y greffer les forces des hommes afin de les rendre puissantes, de les multiplier et les engager à agir également sur un plan supérieur dans le but de balayer – quand la concordance était parfaite – tous les obstacles et toutes les résistances sur le plan à la fois matériel et spirituel. Il est donc difficile, à partir de cela, de douter que la valeur romaine, l’ascèse romaine de la puissance n’ait eu sa contrepartie spirituelle et sacrée, instrument de sa grandeur militaire et temporelle, mais aussi contact et lien avec les forces supérieures.
    Si c’en était le lieu ici, nous pourrions citer une nombreuse documentation pour confirmer cette thèse. Nous nous limiterons à rappeler que la cérémonie du triomphe eut à Rome un caractère beaucoup plus religieux que laïco-militaire, et que de nombreux éléments permettent de déduire que le Romain attribuait la victoire de ses duces davantage à une force transcendante qui se manifestait réellement et efficacement à travers eux, leur héroïsme et parfois même leur sacrifice (comme dans le rite de la devotio où les chefs s’immolaient) qu’à leurs qualités simplement humaines. Ainsi le vainqueur, en revêtant les insignes du Dieu capitolin suprême, lors du triomphe, s’assimilait à lui, en était une image, et allait déposer dans les mains de ce Dieu le laurier de sa victoire, hommage au véritable vainqueur.
    Enfin, l’une des origines de l’apothéose impériale, le sentiment que sous l’apparence de l’Empereur se cachait un numen immortel, est incontestablement dérivé de l’expérience guerrière: l’imperator, originellement, était le Chef militaire acclamé sur le champ de bataille au moment de la victoire: mais à cet instant, il apparaissait aussi comme transfiguré par une force venue du haut, terrible et merveilleuse, qui donnait l’impression du numen. Cette conception d’ailleurs n’est pas seulement romaine, on la trouve dans toute l’antiquité classico-méditerranéenne, et elle ne se limitait pas aux généraux vainqueurs, mais s’étendait prfois aux champions des jeux olympique et des sanglants jeux du cirque. Dans l’Hellade le mythe des Héros se confond avec des doctrines mystiques comme l’Orphisme, identifiant le guerrier vainqueur à l’initié, vainqueur de la mort.
    Témoignages précis sur un héroïsme et une valeur qui deviennent plus ou moins consciemment des voies spirituelles, bénies non seulement par la conquête matérielle et glorieuse où elles conduisent, mais aussi par leur aspect d’évocation rituelle et de conquête matérielle.
    Passons à d’autres témoignages de cette tradition qui, par sa nature, est métaphysique, et où, par conséquent, l’élément "race" ne peut avoir qu’une part secondaire et contingente. Nous disons cela, car plus avant, nous traiterons de la "guerre sainte" qui fut pratiquée dans le monde guerrier du Saint Empire Romain Germanique. Cette civilisation se présentait comme un point de confluence créatrice de plusieurs éléments : un romain, un chrétien et un nordique.
    Au sujet du premier, nous y avons déjà fait allusion dans le cadre qui nous intéresse. L’élément chrétien se manifestera sous les traits d’un héroïsme chevaleresque supranational avec les croisades. Reste l’élément nordique. Afin que nul ne s’allarme à ce sujet, nous tenons à souligner que celui dont il s’agit à un caractère essentiellement supraracial, donc incapable de valoriser ou dénigrer un peuple par rapport un peuple par rappor à un autre (…).
    Ceci dit, il est intéressant de reproduire cette significative formule d’exhortation guerrière de l’antique tradition celte : "Combattez pour votre terre et acceptez la mort s’il le faut: car la mort est une victoire et une libération de l’âme". C’est le même concept qui correspond dans nos traditions classiques à l’expression: mors triumphalis. Quant à la tradition réellement nordique, nul n’ignore la part que le Walhalla, lieu d’immortalité céleste réservé, non seulement aux "hommes libres" de souche divine, mais aussi aux Héros morts au champ d’honneur (Walhalla signifie littéralement: "le royaume des élus"). Le Seigneur de ce lieu symbolique, Odhin-Wodan, nous apparaît, d’après la Ynglingasaga, comme celui qui, par son sacrifice smbolique à "l’arbre du monde", aurait indiqué aux Héros comment atteindre le divin séjour où l’on vit éternellement sur une cime lumineuse et resplendissante, au-delà des nuées. Selon cette tradition aucun sacrifice, aucun culte n’étaient autant agréables au Dieu suprême, ni plus riches de récompenses dans l’autre monde, que celui accompli par le guerrier qui combat et meurt en combattant. Mais il y a quelque chose de plus. L’armée des Héros morts sur le champ de bataille doit renforcer la phalange des "héros célestes" qui lutte contre le Ragna-rökkr, c’est-à-dire contre le destin "d’obscurcissment du divin" qui selon ces enseignements, comme d’ailleurs selon les Grecs (Hésiode), pèse sur le monde depuis les âges les plus reculés.
    Nous retrouvons ce thème sous une forme différente dans les légendes moyenâgeuses concernant la "dernière bataille" que livrera l’empereur jamais mort. Ici, pour préciser l’élément universel, nous tenons à mettre en lumière la concordance des antiques conceptions nordiques (que, disons-le en passant, Wagner a rendu méconnaissable par son romantisme fumeux, boursouflé et teutonique) avec les antiques conceptions iraniennes et perses. Certaine s’étonneront peut-être d’apprendre que les fameuses Walkyries qui choisissent les âmes des guerriers destinés au Walhalla ne sont que la personnification de la part transcendantale de ces guerriers, dont l’équivalent exact sont les fravashi qui, dans les traditions irano-perses, sont représentées comme femmes de lumières et vierges emportées des batailles. Elles personnifient plus ou moins les forces surnaturelles en qui les forces surnaturelles en qui les forces humaines des guerriers "fidèles au Dieu de Lumière" peuvent se transfigurer et produire un effet terrible et bouleversant dans les actions sanglantes. La tradition iranienne a également la conception symbolique d’une figure divine – Mithra conçu comme "le guerrier sans sommeil" – qui, à la tête des favrashi de ses fidèles, combat contre les émissaires du dieu des ténèbres, jusqu’à l’apparition de Saoshyant, seigneur d’un règne à venir de paix "triomphale".
    Déjà ces éléments des antiques traditions indo-européennes, où reviennent toujours les mêmes thèmes de la sacralité de la guerre et du héros qui ne meurt pas réellement, mais devient soldat de l’armée mystique dans une lutte cosmique, interfèrent visiblement avec des éléments du christianisme: du moins de ce christianisme qui put assumer concrètement la devise Vita est militia super terram et reconnaître que non seulement avec l’humilité, la charité, l’espérance et le reste, mais aussi avec une sorte de violence – l’affirmation héroïque, ici – il est possible d’accéder au "Royaume des Cieux". C’est précisément de cette confluence de thèmes que naquit la conception spirituelle de la "Grande Guerre" propre au Moyen Age des Croisades, et que nous allons analyser en nous penchant davantage sur l’aspect intérieur individuel toujours actuel de ces enseignements.
    Examinons à nouveau les formes de la tradition héroïque, qui permettent à la guerre d’assumer la valeur d’une voie de réalisation spirituelle, au sens le plus rigoureux du terme,donc aussi d’une justification et d’une finalité transcendante. Nous avons déjà parlé des conceptions qui, à cet égard, furent celles du monde romain antique. Nous avons ensuite jeté un coup d’oeil sur les traditions nordiques et le caractère immortalisant de toute mort réellement héroïque sur le champ de bataille. Nous devions nous référer à ces conceptions, pour arriver au monde médiéval, au Moyen Age comme civilisation résultant de la synthèse des trois éléments: d’abord romain, ensuite nordique, et enfin chrétien.
    Nous nous proposons maintenant d’examiner l’idée de la "sacralité de la guerre", telle que la connut et la cultiva le Moyen Age. Evidemment nous devrons nous référer aux Croisades, prises dans leur signification la plus profonde, sans les réduire à des déterminismes économiques et ethniques, comme le font les historiens matérialistes, et encore moins à un phénomène de superstition et d’exaltation religieuse, comme le veulent les esprits "avancés", enfin, pas davantage à un phénomène simplement chrétien. Sur ce dernier point, il ne faut perdre de vue le juste rapport de moyen et de fin. On dit: dans les Croisades, la foi chrétienne se servit de l’esprit heroïque de la chevalerie occidentale. C’est plutôt le contraire qui est vrai. La foi chrétienne et ses buts relatifs et contingents de la lutte religieuse contre "l’infidèle", de "libération du Temple" et de la "Terre Sainte", ne furent que les moyens qui permirent à l’esprit héroïque de se manifester, de s’affirmer, de se réaliser dans une sorte d’ascése, distincte de la contemplation, mais non moins riche de fruits spirituels. La majeure partie des chevaliers qui donnèrent leurs forces et leur sang pour la "guerre sainte" n’avaient qu’une idée et une connaissance théologale des plus vagues de la doctrine pour laquelle ils se battaient.
    D’autre part, le cadre des Croisades était riche d’éléments susceptibles de leur conférer une signification symbolique spirituelle supérieure. A travers les voies du subconscient, des mythes transcendentaux réaffleuraient dans l’âme de la chevalerie médiévale: la conquète de la "Terre Sainte" située "au-delà des mers" présenta en effet infiniment plus de rapports réels que ne pouvaient le supposer les historiens avec l’antique saga selon laquelle "dans le lointain Orient, où se lève le Soleil, se trouve la ville sacrée où la mort ne règne pas mais les bienheureux héros qui savent l’atteindre jouissent d’une céleste sérénité et d’une vie éternelle". Par ailleurs, la lutte de l’Islam eut, de par sa nature, dès le début, la signification d’une épreuve ascétique. "Il ne s’agissait pas de combattre pour les royaumes de la terre – écrivait Kugler, le célèbre historien des Croisades – mais pour le royaume de cieux: les Croisades n’étaient pas du ressort des hommes, mais de Dieu – on ne devait donc point les considérer comme les autres évènements humains". La guerre sainte devait, selon l’expression d’un ancien chroniqueur, se comparer "au baptême semblable au feu du purgatoire avant la mort". Les Papes et les prédicateurs comparaient symboliquement ceux qui étaient morts à de "l’or trois fois essayé et sept fois purifié par le feu", et pouvant conduire au Dieu Suprême. "N’oubliez jamais cet oracle – écrivait Saint Bernard – que nous vivions ou que nous mourrions, nous appartenons au Seigneur. Quelle gloire pour vous de sortir de la mêlée tous couverts de lauriers. Mais quelle joie plus grande pour vous est celle de gagner sur le champ de bataille une couronne immortelle… O condition fortunée, où se peut affronter la mort sans crainte, même la désirer avec impatience et le recevoir d’un coeur ferme!". La gloire absolue était promise au Croisé – glorie asolue, en provençal – donc, en dehors de la figuration religieuse, la conquête de la supravie, de l’état surnaturel de l’existence. Ainsi, Jérusalem, but convoité de la conquête, se présentait-elle sous le double aspect d’une ville terrestre et d’une ville symbolique, céleste et immatérielle, et la Croisade prenait une valeur intérieure, indépendante de tous ses apparats, ses supports, et de toutes motivations apparentes.
    Du reste, ce furent les ordres de chevalerie qui fournirent le plus grand tribut aux Croisades, comme ceux des Templiers et des Chevaliers de Saint Jean, composés d’hommes qui, comme le moine ou l’ascète chrétien, "avaient appris à mépriser la vanité de cette vie; dans ces ordres se retrouvaient guerriers fatigués par le monde, qui avaient tout vu et goûté à tout", prêts à une action totale, que soutenait aucun des intérêts de la vie temporelle et de la politique ordinaire, au sens le plus strict. Urbain II s’adressa à la chevalerie comme à la communauté supranationale de ceux "prêts à accourir partout où éclatait une guerre pour y porter la terreur de leurs armes afin de défendre l’honneur et la justice", à plus forte raison devaient-ils entendre l’appel à la "guerre sainte"; guerre qui, d’après l’un des écrivains de l’époque, n’a pas pour récompense un fief terrestre, toujours révocable et contingent, mais un "fief céleste".
    Mais le déroulement même des Croisades, en couches plus vastes et sur le plan d’idéologie générale, provoqua une purification et une intériorisation de l’esprit de l’initiative. Après la conviction initiale que la guerre pour la "vraie" foi ne pouvait avoir qu’une issue victorieuse, les premiers revers militaires essuyés par les armées des croisés furent une source de surprise et d’étonnement, mais à la fin ils servirent cependant à mettre en lumière l’aspect le plus haut de la "guerre sainte". Le sort désastreux d’une Croisade fut comparée par les clercs de Rome à celui de la vertu malheureuse qui n’est jugée et récompensée qu’en vertu d’une autre vie. Et cela annonçait la reconnaissance de quelque chose de supérieur aussi bien à la victoire qu’à la défaite, à la mise au premier plan de l’aspect propre à l’action héroïque accomplie indépendemment des fruits visibles et matériels, presque comme une offrande transformant l’holocauste viril de toute la partie humaine en "gloire absolue" immortalisante.
    Il est évident qu’ainsi on devait finir par ateindre un plan, pour ainsi dire, supratraditionnel, je prends le mot "tradition" dans son sens le plus étroit, le plus historique et religieux. La foi religieuse particulière, les buts immédiats, l’esprit antagoniste devenaient donc des éléments aussi contingents que l’est la nature variable d’un combustible destiné seulement à produire et à alimenter une flamme. Le point central restait la valeur sainte de la guerre. Mais il se préfigurait également la possibilité de reconnaître ceux qui, adversaires du moment, semblaient attribuer au combat la même signification traditionnelle.
    C’est un des éléments grâce auquel les Croisades servirent, malgré tout, à faciliter un échange culturel entre l’Occident gibelin et l’Orient arabe (point de rencontre, à son tour, d’éléments traditionnels plus antiques) dont la portée va bien plus loin que la plupart des historiens ne l’ont vu jusqu’à présent. De même que les ordres de chevalerie des croisés se trouvèrent devant des ordres de chevalerie arabe, qui leur étaient presque analogues sur le plan de l’éthique, des moeurs, parfois même des symboles, de même la "guerre sainte" qui avait dressé les deux civilisations l’une contre l’autre au nom de leurs religions respevtives, permit également leur rencontre et que, tout en partant de deux croyances différentes, chacune finit par donner à la guerre une valeur de spiritualité, analogue et indépendante. C’est d’ailleurs ce qu’il ressortira quand nous étudierons comment, fort de sa foi, l’antique chevalier arabe s’éleva au même point supratraditionnel, que le chevalier-croisé par son ascétisme héroïque.
    Ici, c’est un autre point que nous voudrions effleurer. Ceux qui jugent les Croisades de haut, les ramenant à un des épisodes les plus extravagants du "sombre" Moyen-Age, ne soupçonnent pas que ce qu’ils appellent "fanatisme religieux" est la preuve tangible de la présence et de l’efficacité d’une sensibilité et d’un type de décision dont l’absence caractérise la barbarie authentique. Car, enfin, l’homme des Croisades savait encore se dresser, combattre et mourir pour un motif qui, dans son essence, était suprapolitique et suprahumain. Il adhérait ainsi à une union basée non plus sur le particulier mais sur l’universel. Et ceci reste une valeur, un point de repère inébranlable.
    Naturellement il ne faut pas se méprendre, et penser que la motivation transcendante puisse être une excuse pour rendre le guerrier indifférent, pour lui faire négliger les devoirs inhérents à son appartenance à une race et à une patrie. Il ne s’agit pas de cela. Il s’agit au contraire, essentiellement, de significations profondément différentes selon lesquelles actions et sacrifices peuvent être vécus et qui, vus de l’extérieur, peuvent être absolument les mêmes. Il y a une différence radicale entre qui fait simplement la guerre et qui, par contre, dans la guerre fait aussi la "guerre sainte", en vivant une expérience supérieure, désirée et désirable pour l’esprit.
    Julius Evola, (extraits – 1935) http://la-dissidence.org/

  • Julius Evola : "Métaphysique de la Guerre" partie 1

    Le principe général, auquel il serait possible d’en appeler pour justifier la guerre sur le plan de l’humain, c’est "l’héroïsme". La guerre – dit-on – offre à l’homme l’occasion de réveiller le héros qui sommeille en lui. Elle casse la routine de la vie commode, et, à travers les épreuves les plus dures, favorise une connaissance transfigurante de la vie en fonction de la mort. L’instant où l’individu doit se comporter en héros, fut-il le dernier de sa vie terrestre, pèse, infiniment plus dans la balance que toute sa vie vécue monotonement dans l’agitation des villes. C’est ce qui compense, en termes spirituels, les aspects négatifs et destructifs de la guerre que le matérialisme pacifiste met, unilatéralement et tendancieusement, en évidence. La guerre, en posant et faisant réaliser le droit d’un "plus que la vie", a toujours une valeur anti-matérialiste et spirituelle.
    Ces considérations ont un poids indiscutable et coupent court à tous les bavardages de l’humanitarisme, aux pleurnicheries sentimentales et aux protestations des paladins des "principes immortels" et de l’Internationale des héros de la plume. Cependant il faut reconnaître que pour bien définir les conditions par quoi la guerre se présente réellement comme un phénomène spirituel, il faut procéder à un examen ultérieur, esquisser une sorte de "phénoménologie de l’expérience guerrière", en distinguer les différentes formes et les hiérarchiser ensuite pour donner tout son relief au point absolu qui servira de référence à l’expérience héroïque.
    Pour cela, il faut rappeler une doctrine qui n’a pas la portée d’une construction philosophique particulière et personnelle, mais qui est à sa manière une donnée de fait positive et objective. Il s’agit de la doctrine de la quadripartition hiérarchique et de l’histoire actuelle comme descente involutive de l’un à l’autre des quatres grades hiérarchiques. La quadripartition, dans toutes les civilisations traditionnelles – ne l’oublions pas – donna naissance à quatre castes distinctes : serfs, bourgeois, aristocratie guerrière et détenteurs de l’autorité spirituelle. Ici, il ne faut pas entendre par caste – comme le font la plupart – une division artificielle et arbitraire, mais le "lieu" qui rassemblait les individus ayant une même nature, un type d’intérêt et de vocation identique, une qualification originelle identique. Normalement, une "vérité" et une fonction déterminée définissent chaque caste, et non le contraire. Il ne s’agit pas de privilèges et de modes de vie érigés en monopole et basés sur une constitution sociale maintenue plus ou moins artificiellement. Le véritable principe d’où procédèrent ces institutions, sous formes historiques plus ou moins parfaites, est qu’il n’existe pas un mode unique et générique de vivre sa propre vie, mais un mode spirituel, c’est-à-dire de guerrier, de bourgeois, de serf e, quand les fonctions et les répartitions sociales correspondent vraiment à cette articulation, on se trouve – selon l’expression classique – devant une organisation "procédant de la vérité et de la justice".
    Cette organisation devient "hiérarchique" quand elle implique une dépendance naturelle – et avec la dépendance, la participation – des modes inférieurs de vie à ceux qui sont supérieurs, étant considérés comme supérieure toute expression ou personnalisation d’un point de vue purement spirituel. Seulement dans ce cas, existent des rapports clairs et normaux de participation et de subordination, comme l’illustre l’analogie offerte par le corps humain: là où il n’y a pas de conditions saines et normales, quand d’aventure l’élément physique (serf) ou la vie végétative (bourgeoisie) ou la volonté impulsive et non contrôlée (guerriers) assume la direction ou la décision dans la vie de l’homme, mais quand l’esprit constitue le point central et ultime de référence des facultés restantes auxquelles il n’est pas pour autant dénié une autonomie partielle, une vie propre et un droit afférent dans l’ensemble de l’unité.
    Si l’on ne doit pas génériquement parler de hiérarchie, mais il s’agit de la "véritable" hiérarchie, où celui qui est en haut et qui dirige est réellement supérieur, il faut se référer à des systèmes de civilisation basée sur une élite spirituelle et où le mode de vivre du serf, du bourgeois et du guerrier finit par s’inspirer de ce principe pour la justification suprême des activités où il se manifeste matériellement. Par contre on se trouve dans un état anormal quand le centre se déplace et que le point de référence, n’est plus le principe spirituel, mais celui de la classe servile, ou bourgeoise, ou simplement guerrière. Dans chacun de ces cas, s’il y a également hiérarchie et participation, elle n’est plus naturelle. Elle devient déformante, subversive et finit par excéder les limites, se transformant en un système où la division de la vie, propre à un serf, oriente et compénètre tous les autres éléments de l’ensemble social.
    Sur le plan politique, ce processus involutif est particulièrement sensible dans l’histoire de l’Occident jusqu’à nos jours. Les Etats de type aristocratico-sacral ont été remplacés par des Etats monarchico-guerriers largement sécularisés, eux-mêmes supplantés par des Etats reposant sur des oligarchies capitalistes (castes de bourgeois ou des marchands) et finalement par des tendances socialistes, collectivistes et prolétaires qui ont trouvé leur épanouissement dans le bolchevisme russe (caste des serfs).
    Ce processus est parallèle au passage d’un type de civilisation à un autre, d’une signification fondamentale de l’existence à une autre, si bien que dans chaque phase particulière de ces concepts, chaque principe, chaque institution prend un sens différent, conforme à la note prédominante.

    C’est également valable pour la "guerre". Et voici comment nous allons pouvoir aborder positivement la tâche que nous proposions au début de cet essai: spécifier les diverses significations que peuvent assumer le combat et la mort héroïque. Selon qu’elle se déclenche sous le signe de l’une ou l’autre caste, la guerre a un visage différent. Alors que dans le cycle de la première caste, la guerre se justifiait par des motifs spirituels et mettait en valeur une voie de réalisation surnaturelle et d’immortalisation pour le héros (c’est le thème de la "guerre sainte"), dans celui des aristocraties guerrières on se battait pour l’honneur et pour le principe avec un loyalisme qui s’associait volontiers au plaisir de la guerre pour la guerre. Avec le passage du pouvoir aux mains de la bourgeoisie, on a une profonde transformation. Le concept même de nation se matérialise et se démocratise; il se crée une conception anti-aristocratique et naturelle de la patrie, et le guerrier donne naissance au soldat et au "citoyen" qui se bat simplement pour défendre ou pour conquérir une terre; les guerres n’étant plus, en général, que frauduleusement guidées par des raisons ou des primautés d’ordre économique et industriel. Enfin, là où le dernier stade a pu se réaliser ouvertement – nous avons encore une autre signification de la guerre, parfaitement exprimée par les mots de Lénine: "La guerre entre les nations est un jeu puéril, une survivance bourgeoise qui ne nous regarde pas. La véritable guerre c’est la révolution mondiale pour la destruction de la bourgeoisie et pour le triomphe du prolétariat".
    Ceci établi, il est évident que le "héros" peut être un dénominateur commun, embrassant les types de significations les plus divers. Mourir, sacrifier sa vie, peut être valable seulement sur le plan technique et collectif, mais sur le plan de ce que l’on appelle aujourd’hui, un peu brutalement, le "matériel humain". Evidemment, ce n’est pas sur ce plan que la guerre peut revendiquer une authentique valeur spirituelle pour l’individu, quand celui-ci se présente non comme "matériel" – à la manière romaine – mais comme personnalité. Cela ne peut se produire que s’il existe un double rapport de moyen et de fin, quand l’individu, occasion ou voie ayant pour fin sa réalisation spirituelle, favorisée par l’expérience héroïque. Alors il y a synthèse, énergie et maximum d’efficacité.
    Si l’on entre dans cet ordre d’idée et en fonction de ce que nous avons dit plus haut, il est évident que toutes les guerres n’offrent pas les mêmes possibilités. Et ceci en raison d’analogies, nullement abstraites mais positivement actives, selon des voies, invisibles pour la plupart, qui existent entre le caractère collectif prédominant dans les différents cycles de civilisation et l’élément qui correspond à ce caractère dans le tout de l’entité humaine. Si l’ère des marchands et des serfs est celle où prédominent des forces correspondantes aux énergies qui définnissent dans l’homme l’élément pré-personnel, physique, instinctif, "tellurique" et simplement organo-vitale, dans l’ère des guerriers et celle des chefs spirituels s’expriment des forces qui correspondent, respectivement, dans l’homme au caractère de la personnalité, spiritualisée, réalisée selon sa destination surnaturelle. Selon tout ce qu’elle déchaîne de transcendant chez l’individu, il est évident que dans une guerre la majorité ne peut que subir collectivement le réveil correspondant, plus ou moins, à l’influence prédominante dont par ailleurs dépendent les causes qui pesèrent dans la déclaration de cette guerre. En fonction de chaque cas, l’expérience héroïque aboutit à des points divers, et surtout de "trois" sortes.
    Au fond, ils correspondent aux trois types possibles de rapport qui peuvent se vérifier pour la caste guerrière et son principe, par rapport aux autres articulations déjà examinées. Il peut se vérifier l’état normal d’une subordination au principe spirituel, d’où l’héroïsme comme déchaînement conduisant à la super-vie et à la super-personnalité. Mais le principe guerrier peut être une fin en soi, se refusant à reconnaître quoique ce soit de supérieur à lui, l’expérience héroïque donnera alors un type "tragique", arrogant, trempé comme l’acier, mais sans lumière. La personnalité reste, est même renforcée, comme sera la limite de son coté naturaliste et humain. Toutefois ce type de "héros" offre une certaine grandeur et, naturellement, pour les types hiérarchiquement inférieurs, "bourgeois" ou "serfs", cet héroïsme et cette guerre signifient dépassement, élévation, réalisation. Le troisième cas se réfère au principe guerrier dégradé, au service d’éléments hiérarchiquement inférieurs (dernière caste). Ici, l’expérience héroïque s’allie fatalement à une évocation, un déchainement des forces instinctives, personnelles, collectivistes, irrationnelles, provoquant finalement une lésion et une régression de la personnalité de l’individu, qui ravalé à un tel niveau, est conditionné à vivre l’évènement d’une manière passive ou sous la suggestion de mythes et d’impulsions passionnelles. Par exemple, les célèbres romans d’Erich Maria Remarque ne reflètent que des possibilités de ce genre: gens poussés à la guerre par de faux idéalismes et qui constatent que la réalité est tout autre chose. Ils ne deviennent pas déserteurs ou lâches, mais au coeur de leurs terribles épreuves, ils ne sont soutenus que par des forces élémentaires, impulsions, instincts, réactions à peine humaines, sans plus connaître un instant de lumière.
    Pour préparer une guerre sur le plan matériel, mais aussi spirituel, il faut voir clairement et fermement tout cela, afin de pouvoir orienter âmes et énergies vers la solution la plus haute, la seule qui convienne aux idéaux traditionnels.

    Julius Evola, (extraits – 1935) http://la-dissidence.org

  • Création du Collectif Familles 94

    Le Collectif Familles 94 est une association nouvellement créée qui entend poursuivre au niveau local, les combats initiés par La Manif Pour Tous : défense du mariage Homme/Femme, refus de tout droit à l’enfant, défense de la primauté des parents dans l’éducation de leurs enfants, …

     

    Rassemblement de parents du Val de Marne, le Collectif Familles 94 a pour objectif, entre autres, d’informer les parents mais aussi les professionnels de l’Enfance et de la Santé sur le développement de l’idéologie du genre dans de nombreux domaines de notre vie et de celle de nos enfants, en particulier à l’école. Le Collectif Familles 94 veut alerter sur les dangers de cette idéologie.

     

    Les parents d’élèves de notre département doivent savoir que l’Académie de Créteil est retenue dès cette année par le ministère de l’Education Nationale, en collaboration avec le ministère des Droits des Femmes, comme région pilote pour mettre en place le « programme ABCD de l’égalité » qui  a pour fondement cette idéologie.                                           

     

    Pour comprendre l’idéologie du genre et ses implications dans la vie de nos enfants, nous organisons une conférence donnée par M. Patrice André, ancien magistrat, spécialiste de cette idéologie, le jeudi 17 octobre à 20H30 à La Maison des Associations de Saint Maur des Fossés (2 avenue du Mal Lyautey).

     

    Pour communiquer autour de cette conférence, nous allons envoyer un document d'explications sur cette "théorie" à tous les professionnels de l'Enfance et de la Santé de notre ville, mais aussi aux juristes et aux élus. Nous allons distribuer des tracts devant toutes les écoles publiques et privées, en espérant que les écoles privées voudront bien relayer notre message et notre invitation dans leur bulletin scolaire.

     

    Pour mener à bien nos actions, nous avons besoin de votre soutien : adhérez et faites adhérer au Collectif Familles 94, « likez » la page Facebook du Collectif et/ ou proposez nous votre aide pour la distribution des tracts, par exemple.

     

    • Pour mieux connaître le Collectif Familles 94, connectez-vous au site 
    • et sur la page Facebook
    • Contactez nous à l’adresse suivante : collectif.familles94@gmail.com

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  • Fethi Gharbi : “Les civilisations meurent-elles par suicide ?”

    « Quand une civilisation arrive à relever des défis, elle croît. Sinon elle décline. Les civilisations meurent par suicide, non par meurtre. » Arnold Joseph Toynbee

    Si l’on s’en tient à la vision de Toynbee, l’histoire se présente comme l’essor et la chute des civilisations et non comme les péripéties vécues par des État-nations ou des groupes ethniques. Pour définir une civilisation, le culturel l’emporte sur tous les autres critères. Toynbee considère que la « civilisation occidentale » embrasse toute l’ Europe occidentale et se distingue à la fois de la « civilisation orthodoxe » de Russie et des Balkans et de la civilisation gréco-romaine qui a précédé.

    Cet historien se dissocie de la représentation que se font les idéologues de la modernité inscrivant la civilisation occidentale née à la renaissance et la civilisation gréco-romaine dans un même continuum historique et culturel. Toynbee réfute cet accolement factice qui depuis cinq siècles n’arrête pas d’amalgamer pensée grecque et modernité. L’Europe de la modernité a toujours voulu puiser dans le passé du continent ce qui pouvait cautionner sa nouvelle position dans le monde, se souciant peu de confondre géographie et histoire.

    Une telle confusion se reflète d’ailleurs de nos jours dans la construction de l’Union Européenne. Cette dernière prend en effet l’allure d’un lit de Procuste géographique tentant vainement de passer dans le même moule néolibéral un ensemble de cultures hétérogènes.
    La modernité, en tant que concept philosophique imposant la raison comme norme transcendantale, s’est empressée de prêter à la Grèce antique cette même vision du monde. Dans son élan conquérant, l’Occident s’invente ainsi une lignée détentrice exclusive de la rationalité. L’idée d’une supériorité épistémique combinée à l’idée d’une supériorité raciale de l’homme blanc européen vont constituer le ferment idéologique de cette civilisation et mettront en branle toute une dynamique de conquêtes et d’exploitation du reste du monde. Cet élan ne semble malheureusement pas s’essouffler et continue de bouleverser la planète.

    Si selon Toynbee les civilisations surgissent en réponse à certains défis d’une extrême difficulté, quelle réponse saurions-nous trouver aux défis actuels ?

    Il faut cependant rappeler que bien avant la modernité, l’Occident a du faire face à un défi de taille, celui du désordre provoqué par la déchéance de l’empire romain. C’est la naissance sur plusieurs siècles de l’église catholique qui a résolu le chaos de l’Europe post-romaine en rassemblant l’ensemble des royaumes de l’Europe occidentale dans une communauté religieuse unique.

    Le catholicisme a constitué ainsi une réponse à ce chaos en échafaudant une nouvelle civilisation. Le dogme de l’incarnation ou la divinisation du Christ va donc être la question centrale autour de laquelle se construiront, lentement, douloureusement, les référents de la civilisation occidentale. L’homme devenu Dieu va constituer le référent fondateur de l’Occident chrétien.

    Au VIIème siècle, s’inspirant de la divinisation de Jésus, Charlemagne, soutenu par l’église, imposera à la société l’idéologie du droit divin. A l’image du Christ, l’empereur devient l’expression visible, sur terre, de la volonté divine. A partir de ce moment, l’alliance de l’église et de la monarchie dirigera d’une main de fer, pendant plusieurs siècles la société. Le dogme de l’incarnation marquera alors de son empreinte l’horizon éthique, culturel, social et esthétique de cette civilisation.

    En réalité, cette divinisation de l’humain imprègnera non seulement les monarques mais toute la classe dominante avec tout un cortège de privilèges au profit du haut clergé et de la noblesse d’épée. Toutefois, les rivalités entre monarchies ainsi que les dissensions à l’intérieur de l’église plongeront pendant le XVIème et XVIIème siècle l’Europe dans le chaos le plus total.

    L’atrocité de ces guerres de religion nous rappelle l’assertion de Toynbee lorsqu’il affirme que les guerres les plus violentes ont été fratricides, contredisant la thèse de Huntington qui considère que les conflits les plus longs et les plus violents ont été causés par des différences entre civilisations. Les contradictions internes de l’Occident chrétien ont fini par ébranler le dogme et pousser les minorités agissantes à relever le défi en tentant d’élaborer des réponses adéquates.

    En plein milieu du XVIIème siècle, le cogito de Descartes, faisant fi de la scolastique, vient alors opérer une vraie révolution en plaçant le sujet pensant à l’origine de la connaissance. Ainsi, après la divinisation du Christ, puis celle des monarques, voilà que l’homme ordinaire se trouve élevé de la manière la plus démocratique au rang de démiurge.

    De l’Homme-Dieu aux hommes divinisés, l’anthropomorphisme atteint son degré ultime d’exacerbation. Cependant, il faut reconnaître que c’est au cogito cartésien que revient le mérite d’avoir remis en question l’idéologie du droit divin. Désormais aucun individu ni aucune caste ne bénéficie plus du privilège de la transcendance. La monarchie, la noblesse et l’église de moins en moins crédibles, de plus en plus contestées seront progressivement mais irrémédiablement balayées par les vents violents de la Modernité.

    Le « je » cartésien, après avoir renversé les dogmes de la scolastique, va progressivement verser dans le solipsisme [1] et finira par nier tout ce qui est externe à lui, tout ce qui n’est pas une évidence de son point de vue, de sa subjectivité propre. Cette explosion de l’égo en détruisant la verticalité des transcendances a brisé en même temps l’horizontalité des liens sociaux. le sujet n’a plus le sentiment d’appartenir à un tissu social. Insensible aux solidarités traditionnelles, il ne reconnaît plus la réalité extérieure et s’enferme dans une posture narcissique.

    Le Moi, disait Lacan ne peut être source de connaissance, mais au contraire source de méconnaissance de l’autre. Cette indifférence à l’égard de l’altérité bascule dans l’impassibilité la plus totale.

    Cet individualisme exacerbé propice à la mobilité de la force de travail s’accompagnera depuis le XIXème siècle d’un universalisme dont le rôle est d’imposer à la planète une pensée unique organisant l’économie mondiale. L’homme nouveau, sans attaches, insensible à toute forme de solidarité mais habité par l’illusion de la liberté et de l’égalité formera le support idéal de l’idéologie du progrès, une conception unilinéaire de l’histoire ou plus précisément une réinterprétation profane de la pensée chrétienne, substituant l’avenir à l’au-delà et le bonheur au salut.

    Le progrès se présente comme une nécessité historique portée vers le meilleur. C’est dans ce contexte que l’homme-dieu, réduit à sa stricte individualité mais maître de son destin, ira de l’avant vers des lendemains qui chantent. Cependant, cette marche vers le progrès s’inscrit dans un ordre universel hiérarchisant les sociétés selon une linéarité spatio-temporelle.

    Les civilisations les plus « avancés »( entendez par là, blanches européennes) imposeront ainsi leur modèle aux civilisations les plus « attardées » fût-ce par la coercition. Depuis le XIXème siècle, courants libéraux et courants de gauche, piégés par leur égo, adhéreront chacun à sa manière au mythe du progrès. L’eurocentrisme ethnique et épistémologique, instrument idéologique privilégié de l’hégémonie impérialiste, s’impose alors à toute la planète justifiant racisme, colonialisme, spoliations et massacres. Même les modèles clé en main de lutte anti-coloniale et de révolutions prolétariennes n’échappent pas à la domination de l’épistémè occidentale.

    Or, cette pseudo-philosophie de l’histoire n’aurait pu fonctionner sans une transformation psychologique radicale de la société. Dès le XIXème siècle, l’idéologie change de stratégie en s’interdisant de défendre ouvertement les privilèges d’une caste. L’art du camouflage de l’idéologie bourgeoise réussit alors à masquer toute hiérarchie sociale.

    Ce raffinement rhétorique fera dire à Kwame Nkrumah [2] que le capitalisme n’étant qu’une réforme de la féodalité, son seul « apport » est d’avoir permis à l’exploitation d’atteindre un niveau supérieur de subtilité. « Comme fait économique, écrit Roland Barthes, la bourgeoisie est nommée sans difficulté, le capitalisme se professe. Comme fait politique elle se reconnaît mal, il n’y a pas de parti explicitement « bourgeois » à la chambre. Comme fait idéologique elle disparaît totalement. » [3].

    A l’opposé de la noblesse, exhibitionniste, (l’étalage de son faste créditant sa position sociale), la bourgeoisie opte pour la discrétion, préférant ainsi occulter sa domination. Cette stratégie constituera le trait essentiel de son masque idéologique. Dans cette atmosphère d’apparente homogénéité, un nouveau culte prend forme. En effet, l’énorme béance laissée par la disparition de toutes formes de transcendance sera comblée par une sorte de « religion » désenchantée, où les marchandises seront élevées (à leur tour) au rang de divinités.

    Elles se transforment magiquement en fétiches nous ramenant aux formes primitives d’idolâtrie. Il semblerait que Dieu, courroucé par la révolte des humains s’est empressé de les transformer en esclaves de leurs propres créatures : les marchandises. Dominé par le marché, l’individu subit la loi de l’échange. Cette régression qu’opère le capitalisme par rapport aux modes de productions qui l’ont précédé rabaisse l’homme à tel point qu’il ne signifie plus que par ce qu’il possède, par ce qu’il vaut sur le marché.

    L’avoir remplace l’être et la réification s’installe, éliminant toutes valeur authentique et inaliénable au profit de la seule valeur d’échange. On assiste à la naissance d’une nouvelle transcendance, celle du marché. Cette nouvelle divinité impitoyable, aux pieds de laquelle se prosterne toute l’humanité, accumulant sans trop savoir pourquoi mais ne sachant point s’arrêter, a fini par subjuguer l’ensemble de la planète.

    Une folie productiviste s’empare alors du monde générant ipso facto un délire consumériste généralisé. Pour la première fois dans l’histoire, la production n’est plus déterminée par le besoin, c’est plutôt elle qui stimule et crée de nouveaux faux besoins par le biais de la mode, la publicité et par un tas d’autres moyens. Cette irrationalité frisant l’absurde conduit à des crises périodiques de surproduction au moment même où la majorité de la population manque du nécessaire.

    Le mythe du progrès, une temporalité désavouant le passé et situant le bonheur dans une sorte d’ailleurs toujours fuyant emporte à pas de course le monde vers l’inconnu. Une mobilité frénétique du capital, de la main d’œuvre, des transports et de l’information s’empare de la société. Cette accélération n’aurait pu voir le jour sans l’émergence de nouvelles techniques.

    En effet, le hasard a voulu qu’à l’aube du XIXème siècle énergie fossile et capitalisme se rencontrent. Ils n’arrêteront pas depuis de faire bon ménage. Pourtant à l’époque de la machine à vapeur et des débuts de la locomotive l’énergie hydraulique et éolienne existaient bel et bien et ne demandaient qu’à bénéficier des nouveautés techniques pour aller de l’avant. Le développement de ces énergies renouvelables non thermiques aurait certainement entraîné un capitalisme d’implantation locale, moins conquérant et plus respectueux de l’environnement.

    Or, le capitalisme opte pour la seule énergie qui soit en harmonie avec sa logique propre. L’énergie fossile s’avère la mieux appropriée à la liberté de mouvement propice à la mobilité du capital. L’essor du chemin de fer en est l’illustration, annonçant ainsi le début de la délocalisation.

    Charbon, pétrole, nucléaire se superposent et se succèdent pour donner le ton à cette folle chevauchée qu’exige le « progrès ». Ce « choix du feu » comme le dit si bien Alain Gras [4], ces manipulations de forces mal maîtrisées et contre-nature s’imposent sans réticence à une humanité obnubilée par sa quête enfiévrée d’un bonheur futur, toujours insaisissable.

    L’énergie fossile s’insinue dans tous les coins et recoins et formera avec l’accumulation du capital un mélange explosif. Productivisme et puissance thermodynamique se prêtent main forte et poursuivent leur course aveugle dédaignant le danger mortel qu’ils font encourir à la planète.

    Tout dernièrement la catastrophe de la centrale nucléaire de Fukushima, après avoir occupé les médias pendants quelques semaines, est en train de passer aux oubliettes ; une banalité somme toute aux yeux d’un chef d’État de l’envergure de Sarkozy qui imperturbable, continue son business et parvient malgré tout à fourguer une centrale à la Tunisie, un petit pays pourvu de vent et de soleil et certainement incapable de faire face à une catastrophe nucléaire. Cette soif du feu au service du superflu nous laisse à la fois dubitatif et rageur, maudissant Promethée d’avoir offert ce cadeau empoisonné aux mortels.

    La déferlante néolibérale après avoir eu raison de l’URSS se rue goulûment sur la planète. La barbarie du capital s’en donne à cœur joie, faisant voler en éclats tout ce qui est sensé contenir sa poussée. Après la destruction des empires, c’est aux États-nations d’exploser à leur tour. En Occident, l’État-providence est mort de sa belle mort.

    Un état rabougri, réduit au stricte rôle sécuritaire et répressif lâche la bride aux multinationales et aux finances internationales. Dans le Tiers-monde, les États ayant une valeur stratégique sont agressés puis fractionnés selon une logique ethnique ou confessionnelle. C’est bien le cas de l’Irak et du Soudan et bientôt celui de La Libye et de la Syrie en attendant le reste.

    Libre de toute contrainte, l’ultralibéralisme découvre son visage hideux. Pris par la fièvre spéculative il s’en prend aux acquis des travailleurs, nivelant les salaire par le bas, délocalisant, détruisant l’environnement, épuisant les ressources, incitant à la discorde, fomentant les guerres, mettant la planète à feu et à sang. Le rythme de plus en plus endiablé de cette danse macabre est en train d’emporter l’humanité vers une catastrophe assurée.

    Quelle réponse au défi que représente la modernité ? Faut-il attendre que cette civilisation atteigne ses ultimes contradictions avec le risque d’entraîner avec elle l’humanité et peut-être même la planète vers le néant ?

    Il faut admettre que malgré les crises structurelles qui l’ont secoué, malgré sa fragilité, le capitalisme s’est toujours remis en selle grâce à l’impact de son système idéologique. Tant que le mythe du progrès avec sa vision linéaire de l’histoire, son universalisme et son eurocentrisme ethnique et épistémique imprégnera l’imaginaire des individus, le capitalisme trouvera toujours le moyen de résister à toutes les secousses.

    L’ idéologie du progrès, en situant le bonheur dans un avenir toujours fuyant stimule une angoisse existentielle à laquelle le marché répond sans jamais l’apaiser totalement. On s’enfonce alors dans les abysses du consumérisme, à la recherche d’une spiritualité perdue que le fétiche marchandise miroite sans jamais permettre d’atteindre.

    De son coté, l’universalisme présenté depuis le XIXème siècle comme une symbiose ne peut être dissocié de l’eurocentrisme, cet autre aspect du mythe du progrès. Il s’agit en fait de hiérarchiser les peuples et les cultures justifiant ainsi la domination militaire et économique de la planète en vertu d’une pseudo supériorité raciale et épistémique de l’homme blanc occidental grimé selon l’époque en civilisateur, en humanitaire ou en démocrate.

    Depuis des décennies la gauche européenne fait du surplace. Même l’écologisme et la décroissance en tant que mouvements réformistes n’auront aucune chance de s’imposer tant que le néolibéralisme gèrera l’économie mondiale. Il s’agit donc de l’affaiblir de l’extérieur en étranglant en premier l’universalisme et l’hégémonie eurocentrique.

    Un penseur comme Wallerstein [5] considère en effet que « le racisme est le support culturel du capitalisme historique et l’universalisme est sa clé de voûte » et ajoute que « le capitalisme historique a changé la signification du racisme, il ne s’agit plus de xénophobie mais de la création d’une relation durable entre ethnicité et division du travail ». C’est donc aux peuples du Tiers-monde qu’il incombe au premier chef de démanteler cette idéologie pour la simple raison qu’ils en sont les principales victimes.

    L’apparente disparition du colonialisme n’a pas mis fin à la hiérarchie de pouvoir et de savoir qui devient d’autant plus subtile et d’autant plus dévastatrice qu’elle se camoufle derrière les pseudo-indépendances. Cette colonialité devient selon Quijano [6] encore plus virulente avec la globalisation, en affectant tous les aspects de l’existence sociale partout dans le monde.

    L’ancien colonisé continue à se déprécier à travers le prisme hiérarchisant de son ancien maître, méprisant sa culture et son ethnie et acceptant son sort comme une fatalité. L’attitude d’une bonne partie de la bourgeoisie et de la classe moyenne dans le Tiers-monde faite de mimétisme, de mépris de soi et des siens confirme une telle aliénation.

    C’est ce type d’intériorisation qui a permis et permet encore à l’hégémonie impériale de durer. Il s’agit donc avant toute chose de décoloniser les esprits en déconstruisant le mythe du progrès. Il s’avère nécessaire alors de faire obstacle à la division du travail sur des bases ethniques et de mettre fin à toute forme d’universalisme même s’il se prétend de gauche.

    Par ailleurs, la rationalité occidentale, postulée comme l’unique épistémè valide, reléguant toutes les autres épistémès dans le domaine de la doxa et allant jusqu’à les considérer comme un « obstacle épistémologique » doit être détrônée au bénéfice d’une pluralité épistémique. Ceci ne signifie nullement l’établissement d’une sorte de démocratisation des cultures. Il s’agit plutôt de réhabiliter le savoir et la sagesse de civilisations millénaires qui ont su gérer avec harmonie et sur de longs siècles l’économique et le spirituel.

    Ces épistémès se dresseront tel un rempart face à cette boulimie accumulative, réductrice de l’humain et destructrice de la nature. L’extraordinaire est qu’il n’a suffi que d’un peu plus d’un siècle à la modernité pour imprimer au monde ce rythme fou et absurde.

    S’inspirant chacun de son épistémè propre, les peuples coopèreront en favorisant le surgissement de nouveaux pôles de développement régionaux capables de mieux résister aux oligarchies. En Amérique latine, Le Venezuela a opportunément pris l’initiative de créer l’Alba, un projet d’intégration économique et politique, ainsi que la Banque du Sud (Bancosur), censée promouvoir un autre type de « développement ».

    En Afrique, la Libye a joué un rôle primordial dans la création de la Banque cen­trale afri­caine, de la Banque afri­caine d’in­ves­tis­se­ments et du Fonds Mo­né­taire Afri­cain dans le but de mettre fin à la politique dévastatrice de la Banque Mondiale et du FMI et visant en même temps la création d’un marché commun africain. Il est clair donc que si l’OTAN continue depuis des mois à massacrer les civils libyens ce n’est certainement pas pour mieux les défendre mais pour arrêter net ce processus d’intégration économique.

    Face à ces vents salvateurs qui nous viennent de Sud, la gauche occidentale, bien que radicalement opposée à la prédation néolibérale a du mal à se départir de son épistémocentrisme. Si des cosmologies amérindiennes ou bouddhistes sont applaudies avec un soupçon d’exotisme d’autres épistémès sont décriées et renvoyées aux tréfonds de la barbarie. Il est vrai qu’une bonne partie de cette gauche, encore prisonnière du mythe du progrès, se retrouve sans le vouloir en position d’allié objectif de l’Empire.

    Notes :

    1) Le solipsisme (du latin solus, seul et ipse, soi-même) est une théorie philosophique selon laquelle l’esprit est la seule chose qui existe réellement et le monde extérieur n’est, selon cette conception, qu’une représentation.

    2) Kwame Nkrumah, “Le Consciencisme”, éd. Présence Africaine, 1976

    3) Roland Barthes, “Mythologies”, Editions du Seuil Paris, 1957

    4) Alain Gras, “Le choix du feu, aux origines de la crise climatique”, Fayard 2007

    5) Wallerstein, Immanuel, 1991, “The invention of time-space realities : towards an understanding of our historical systems”

    6) Anibal Quijano , 1997, “The colonial nature of power in Latin America”.

    Le Grand Soir – 13 août 2011

  • « Soyons des rêveurs éveillés, ces hommes dangereux » par Daniel COLOGNE

     

    Ainsi s’achève Requiem pour la Contre-Révolution (1), dont l’auteur Rodolphe Badinand (2) me fait l’honneur d’être le co-dédicataire. Il ne m’en voudra donc pas si j’inverse l’adjectif indéfini et l’adjectif démonstratif. L’appel clôturant ce remarquable recueil d’« essais impérieux » est en réalité rédigé comme suit : « Pour le Système et ses sbires, nous incarnons le plus grand des périls parce que nous croyons en nos rêves ». Rodolphe Badinand cite alors Thomas Edgar Lawrence : « Les rêveurs de jour sont des hommes dangereux, car ils peuvent jouer leur rêve les yeux ouverts et le rendre possible ». L’auteur conclut : « Soyons ces rêveurs éveillés… » (p. 163).

    Qui sommes-nous donc et quel est ce « Système » que Rodolphe Badinand nous invite à faire trembler ? Disons d’abord ce que nous ne sommes pas. Nous ne sommes pas des « anti-Lumières », comme nous désignent nos ennemis. Nous ne sommes pas les nostalgiques d’un temps révolu, les passéistes assoupis dans la langueur des regrets éternels. Nous coupons le cordon ombilical avec la Contre-Révolution, dont nous saluons néanmoins le double mérite : son courage d’être entré en résistance contre des « valeurs mortifères », et notamment les « idéologies égalitaires », mais aussi la « valeur didactique » de « son échec » (p. 42).

    Nous sommes les partisans d’une recomposition du monde fondée, non sur l’abstraction droit-de-l’hommiste, mais sur le socle concret du « droit des hommes (c’est moi qui souligne) à s’enraciner dans leur terroir et leurs communautés d’appartenance multiples et variées » (p. 163).

    Cette refondation planétaire postule une reconstruction de l’Europe selon un « principe fédérateur d’essence supérieure » (p. 162), dont l’absence pertinemment épinglée par un monarque polynésien fut le cause de la Première Guerre mondiale. En citant Tupon IV, roi des Tonga, Rodolphe Badinand témoigne de ce qu’est la véritable ouverture à l’Autre, la capacité d’être authentiquement à l’écoute de la sagesse, d’où qu’elle vienne : tout le contraire de la mensongère « tolérance » du Système, où l’égalitarisme de façade masque l’impitoyable volonté d’épuiser les hommes et les peuples dans une course infernale le long de « la ligne droite individu – État jacobin – État mondial – humanité » (p. 163).

    Un exemple de « principe fédérateur » est l’idée impériale telle que la concrétise l’institution pluriséculaire du Saint-Empire romain germanique. « Au Moyen Âge, l’empire sacré et sanctifié ne pouvait que promouvoir l’idéal chrétien. Il aurait été inconcevable qu’il s’édifiât contre la majorité religieuse du moment » (p. 119). À notre époque de déchristianisation, il ne faut évidemment pas aspirer à reproduire la structure médiévale, mais il convient de lui substituer un symbolisme cosmique où l’Empire serait une image du Soleil central autour duquel tourneraient, à des vitesses différentes, comme les planètes du système solaire astronomique, les nations (patries historiques) et les régions (patries charnelles). Ainsi l’Europe pourrait-elle revendiquer le titre de « patrie idéale », répondre à l’exigence d’universalité inscrite au cœur de toute pensée métapolitique.

    Rodolphe Badinand distingue judicieusement l’impérialité et les impérialismes. « Contrairement au Saint-Empire, les Premier et Second Empires français n’ont reposé que sur les épaules d’une personnalité charismatique » (p. 116). Son procès des bonapartistes n’a d’égal que son rejet de l’hitlérisme, « version teutonne du jacobinisme français » (p. 121).

    Dans la ligne d’Alain de Benoist, Rodophe Badinand considère aussi comme de « faux empires » les empires coloniaux anglais, français, hollandais, portugais ou espagnol. Il tient « le mal colonial » (p. 127) pour une des étapes importantes de la « décomposition de la France » (p. 125).

    Érudit français, Rodophe Badinand consacre tout naturellement de nombreuses pages à l’histoire de son pays. Recensant l’ouvrage d’un historien de l’Université de Jérusalem, il rappelle « les prétentions capétiennes à la Couronne du Saint-Empire romain germanique » (p. 95), qui aurait pu devenir, entre les règnes de François Ier et Louis XIV, un « Saint-Empire romain de la Nation Française » (p. 96). C’est l’un des textes courts du recueil, qui alternent avec des essais plus longs, de même que se succèdent, dans un ensemble ipso facto de lecture agréable, de brefs comptes-rendus de livres, de vigoureuses interventions conférencières et de profonds essais où la réflexion toujours nuancée se déploie dans un style souvent chatoyant.

    La coutume gastronomique encadre le plat de résistance de hors-d’œuvre et de desserts. Ici, l’essai le plus consistant, qui donne d’ailleurs son titre au florilège, est opportunément placé en tête. Une quarantaine de pages d’une rare densité intellectuelle nous convie ainsi à réfléchir sur la Contre-Révolution « impasse intellectuelle majeure » (p. 13).

    L’Église catholique fut la première à s’opposer à la révolution de 1789 et elle le fit avec d’autant plus de force qu’un an à peine après la prise de la Bastille, fut votée la Constitution civile du clergé (1790), la « plus grave erreur » (p. 19) de la révolution suivant l’auteur.

    Celui-ci examine, tout au long des deux siècles écoulés, la « lente translation vers la Modernité » (p. 24) qui affecte la catholicisme et dont Jacques Maritain (1882 – 1973) offre un exemple symbolique.

    Le royalisme également a succombé, au fil des décennies, à la contagion de l’esprit moderniste. Ce dernier « contamina les doctrines monarchiques avec la même vigueur qu’il se développait au sein du catholicisme » (p. 28). Des mouvements royalistes de gauche naquirent ainsi dans toute l’Europe méridionale : le Parti populaire monarchique portugais, le carlisme espagnol qui « se transforma en un mouvement socialiste autogestionnaire » (p. 30), et en France les « maurrassiens » de la Nouvelle Action Française de Bertrand Renouvin.

    « Avec ces trois exemples, écrit Rodolphe Badinand, nous devons nous interroger si la Contre-Révolution et la Révolution ne seraient pas l’avers et le revers d’une même médaille appelée la Modernité » (Ibid.).

    Avant de revenir sur cette importante citation, où l’on voit émerger sous la plume de l’auteur le questionnement fondamental, épinglons encore cette vision non conformiste des régimes de Salazar, Franco et Pétain, où Rodolphe Badinand voit les germes de l’élan économique-industriel d’après-guerre, via l’arrivée au pouvoir des technocrates. Le phénomène lui semble particulièrement sensible dans la France de Vichy, après « la nomination de l’amiral Darlan à la vice-présidence du Conseil des ministres » (p. 31).

    Y aurait-il eu donc un « apport contre-révolutionnaire au libéralisme » (p. 32) ? Oui, répond sans hésitation l’auteur qui va jusqu’à établir un parallélisme entre la « main invisible » du marché et les « voies insondables » de la Providence. Les fondements chrétiens de la Contre-Révolution sont ici mis en cause et il en découle que la dérive potentielle des contre-révolutionnaires était prévisible dès la fin du XVIIIe siècle.

    Rodolphe Badinand rappelle opportunément que « les trois futures sommités de la contre-révolution intellectuelle étaient vus par leurs contemporains comme des libéraux : Edmund Burke était un parlementaire Whig, défenseur des droits du Parlement anglais et de la Révolution américaine; Joseph de Maistre était, à la cour de Savoie, jugé comme un franc-maçon francophile et Louis de Bonald fut, en 1789-1790, le maire libéral de Millau » (p. 41).

    Quant à la Révolution conservatrice, que ses adversaires ont baptisée « Nouvelle Droite », elle intègre certes un héritage contre-révolutionnaire, mais elle se réfère aussi au socialisme proudhonien, aux non-conformistes des années Trente si bien étudiés par Pierre Loubet del Bayle, et au situationnisme de Guy Debord dénonçant « la société du spectacle ». Rodophe Badinand conclut son analyse de ce courant par cette hypothèse de recherche que les historiens des idées politiques devraient creuser : « Ce syncrétisme semblerait marquer la fin historique de la Contre-Révolution en tant que mouvement de pensée » (p. 36).

    Rodolphe Badinand s’interroge de manière inattendue : « L’écologie : le dernier surgeon contre-révolutionnaire ? » (p. 38). L’auteur fait un rapprochement insoupçonné entre, d’une part les écrits d’un Edouard Goldsmith ou d’un Bernard Charbonneau, et d’autre part, le roman balzacien Le Médecin de Campagne, sorte d’Arcadie où «chacun mène une existence équilibrée et où la nature maîtrisée, mais non agressée par le machinisme, donne des fruits à tous les villageois » (p. 39). Au même titre que la Nouvelle Droite et la Révolution conservatrice, l’écologie dépasse « les vieux clivages, devenus obsolètes » (voir le slogan « Ni Droite, ni Gauche » d’Antoine Waechter) et ne se laisse pas enfermer dans le binôme Révolution – Contre-Révolution. Sa vision du monde dynamique rompt avec le passéisme ruraliste exaltant une société champêtre « stable, immuable et édénique » (Ibid.).

    Partageant avec les écologistes certaines légitimes préoccupations environnementales, Rodolphe Badinand avertit : « Si le réchauffement planétaire se poursuit et s’accentue, dans quelques centaines d’années, la banquise aura peut-être disparu, faisant de l’océan polaire un domaine maritime de première importance » (p. 123). La maîtrise de l’Arctique s’impose à l’auteur comme une des plus impérieuses nécessités pour le futur Empire européen. Cet enjeu tant stratégique que symbolique est d’autant moins négligeable que les anciennes mythologies indo-européennes, y compris celle de l’Hellade méditerranéenne et celle de l’Inde védique, mentionnent le Septentrion comme l’origine, sinon de l’humanité, du moins d’une de ses plus importants rameaux. L’Europe se devra donc d’être présente sur tout le pourtour de l’océan Arctique comportant aussi des rivages asiatiques et nord-américains.

    « Face à la marée montante des peuples du Sud, le regroupement intercontinental des descendants de Boréens ne se justifie que par le désir de survivre au XXIe siècle. Cela mérite au moins un débat que seul l’avenir tranchera » (p. 73).

    Rodolphe Badinand nous convie à effectuer deux démarches simultanées : retrouver le chemin de notre « plus longue mémoire »’ et imaginer notre futur lointain.

    « Les contre-révolutionnaires souhaitaient conserver intact le passé. Leur démarche les obligea souvent à faire de l’avenir table rase. Entre la négation du passé, propagée par la Modernité, et le refus du futur, pratiqué par la Contre-Révolution, existe une troisième voie : l’archéo-futurisme » (p. 44). L’auteur se réfère à Guillaume Faye, qui a longtemps partagé avec Alain de Benoist, quoique dans un autre registre, le magistère intellectuel de notre famille de pensée. Né vers 1972, issu de la génération suivante, Rodolphe Badinand peut prétendre à la succession de ces deux maîtres à penser, selon l’expression consacrée et en l’occurrence toute relative si l’on pense à ces figures hors normes que sont René Guénon (1886 – 1951) et Julius Evola (1898 – 1974).

    À propos de ces deux immenses éveilleurs, il est temps de se demander dans quelle mesure ils ont été piégés par le binôme Révolution – Contre-Révolution. C’est à force de critiquer le progressisme moderne rectilinéaire que l’on dérive peu à peu, au départ d’une conception cyclique de l’histoire, vers un décadentisme « traditionnel » tout aussi rectilinéaire.

    Progressisme et décadentisme apparaissent alors comme les deux faces de la même médaille, de même que s’impose la nécessité, pour la Nouvelle Droite et la Révolution conservatrice, de faire venir leurs adversaires sur leur terrain (c’est Rodolphe Badinand qui souligne). « Qu’elles cessent donc de débattre des idées adverses pour imposer la discussion sur leurs idées » (p. 43). Qu’elles arrêtent de disserter sur les inconvénients du progressisme et sur l’absurdité d’un « sens de l’Histoire », et qu’elles valorisent les avantages et la solidité de leur conception cyclique du devenir humain, qui est une respiration à plusieurs vitesses, et qui ne peut en aucun cas dégénérer en un décadentisme vertigineux.

    Osons nous dresser avec Rodolphe Badinand contre l’exorbitante prétention de la démocratie moderne à être le point oméga de l’aventure humaine. Adoptée le 26 août 1789, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen comporte en son article XI une restriction à la liberté d’expression que l’auteur reprend in extenso : « sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi » (p. 18).Rodolphe Badinand commente : il s’agit d’« une phrase si vague qu’elle  permet toutes les interprétations possibles et justifie toutes les polices de la pensée. Or le totalitarisme commence quand on empêche certaines opinions de s’exprimer sur la place publique… » (Ibid.). La Modernité est donc bien la « matrice des totalitarismes ». Sous le couvert de la démocratie et du « droit-de-l’hommisme » sévit un terrorisme intellectuel s’appuyant sur des lois liberticides et rétablissant le délit d’opinion, dont sont passibles tous ceux qui contestent les fondements du Système. Un de ces fondements concerne les origines de l’espèce humaine. C’est la thèse africano-centriste selon laquelle l’Afrique serait l’unique berceau de l’humanité, le seul foyer primordial à partir duquel le primate se serait transformé en homo sapiens.

    En optant pour une vision « boréocentrique » de l’histoire, Rodolphe Badinand ne craint pas de s’exposer à la vindicte de la « bien-pensance » qui pourrait lui faire grief « d’une supercherie scientifique à relent raciste » (p. 69).

    Pourtant, ses « Notes dissidentes sur la nation de tradition Primordiale », autre chapitre très fouillé et hyper-documenté, révèle une approche pluraliste du problème. Logique et conséquent, Rodolphe Badinand se refuse à trancher la question de l’antériorité en faveur de l’un ou l’autre « ensemble ethnique ». « N’y aurait-il pas finalement une succession aléatoire de Traditions primordiales pour chaque entité ethnique matricielle ? Et si c’était le cas, qui bénéficierait de l’antériorité ? On le voit : ce type de questionnement débouche sur une absence de réponse d’ordre humain. Cependant, s’interroger sans cesse est le meilleur moyen de maintenir son esprit libre et éveillé. L’interrogation permanente produit des antidotes aux toxines du conformisme médiatique » (p.71).

    Nous voici aux antipodes du dogmatisme des traditionalistes qui, même lorsqu’ils se définissent comme « intégraux » et se réclament d’Evola ou de Guénon, demeurent fréquemment incapables d’auto-critique, inaptes à soulever eux-mêmes des objections à leur discours, fascinés par « le pessimisme foncier de la doctrine des âges, souvent porteur de désespoir ou d’inaction totale » (p. 59).

    Rodolphe Badinand est un authentique « penseur libre » aussi éloigné de la fallacieuse « libre-pensée » que de son primaire retournement traditionaliste, aussi étranger à la linéarité évolutive qu’à la descente sans frein de l’Âge d’or à l’Âge de fer. La « spiritualité primordiale » ne serait-elle pas plutôt d’inspiration astrologique, c’est-à-dire fondée sur l’alternance de courbes ascendantes et descendantes, tributaires des angles tantôt harmonieux tantôt dissonants formés entre eux par les astres ?

    Diverses formes d’astrologie caractérisent en tout cas les aires culturelles où Rodolphe Badinand discerne, en s’appuyant sur de récentes recherches anthropologiques, paléontologiques et archéologiques, l’empreinte des Boréens, ancêtres des Indo-Européens, grand peuple migrateur de la plus haute préhistoire « ne rechignant jamais les rencontres avec les tribus indigènes » (p. 68).

    Celles-ci possèdent peut-être leur propre foyer d’irradiation culturelle, leur « tradition primordiale » indissociable de leur « spécificités ethno-spirituelles » (p. 71). Dans la Grèce antique, parallèlement à l’exaltation mythologique du « séjour des dieux » localisé au Nord et gardé à l’Occident par les Hespérides, à l’entrée du fameux jardin aux « pommes d’or » que cueillit Héraklès et qui subjuguèrent la farouche Atalante, le scrupuleux Hérodote évoquait la possibilité de l’existence d’Hypernotiens, équivalents de nos Hyperboréens, matrice des peuple du Sud avec lesquelles nous sommes appelés à fonder une « fraternité qualitative » (p. 60).

    En effet, « la tradition risque d’avoir sa signification détournée et de devenir à son corps défendant un auxiliaire du fraternitarisme mondial » (c’est Rodolphe Badinand qui souligne) assimilable à « un oecuménisme pervers » (Ibid.). Sous le couvert de celui-ci peut de développer une forme spirituelle d’impérialisme et de domination mondiale à laquelle les Boréens étaient totalement réfractaires lorsqu’ils quittèrent leurs terres arctiques d’origine pour essaimer sur d’autres continents et fonder peut-être les cultures méso-américaines, l’Égypte pharaonique, la Chine du Céleste Empire.

    Les historiens de notre famille de pensée saluent en Dominique Venner un guide incontournable dont Rodolphe Badinand se solidarise dans la critique de « la conception guénonienne d’une seule tradition hermétique et universelle, qui serait commune à tous les peuples et à tous les temps, ayant pour origine une révélation provenant d’un “ ultramonde ” non identifié » (p. 60). À la suite du directeur de la Nouvelle Revue d’Histoire, l’auteur subodore dans le « traditionalisme intégral » un « syncrétisme équivoque » et une critique de la modernité ne débouchant « que sur un constat d’impuissance » (Ibid.), « l’attente millénariste de la catastrophe » (p. 61).

    Par delà les fausses alternatives Tradition – Modernité et Révolution – Contre-Révolution, la brillante anthologie de Rodophe Badinand, compilant des textes écrits ces dix dernières années dans L’Âtre, Cartouches, Roquefavour, Éléments et L’Esprit européen, suggère de remonter aux sources vives de cet « esprit européen » et de réfléchir à son adaptation au monde de demain et d’après-demain. « Il y a du travail pour cent ans », écrivit un jour Robert Steuckers. Rodolphe Badinand est un des pionniers de ce siècle de renouveau de l’intelligence européenne, de cette ère de rayonnement retrouvé et de renaissance métapolitique, de cette nouvelle étape de l’aventure humaine où les Européens et fiers de l’être sauront être à l’écoute des sagesses fleuries sous d’autres latitudes, pour construire enfin une Terre harmonieuse et pacifiée.

    Daniel Cologne http://www.europemaxima.com/?p=1047

    Notes

    1 : Rodolphe Badinand, Requiem pour la Contre-Révolution et autres essais impérieux, Éditions Alexipharmaque, coll. « Les Réflexives », 2008.

    2 : Rodolphe Badinand, est un journaliste proche de la Nouvelle Droite. Il a été secrétaire de rédaction de la revue Roquefavour. Il a également tenu la rubrique trimestrielle « Les Chronique païennes » dans L’Âtre. Il a aussi écrit pour Cartouches, Rivarol, Éléments et L’Esprit Européen (la revue, puis le site). Il collabore aujourd’hui au site européaniste non-conformiste d’expression française Europe Maxima.

  • Vous pouvez désormais adhérer à la Manif pour tous

    Sur le site de la MPT où l'on peut adhérer en ligne

    "Après une année de mobilisation historique, La Manif Pour Tous vous propose de devenir adhérent.

    A quoi cela sert et pourquoi faire ?

    En devenant adhérent vous recevrez des informations privilégiées sur les actions menées par La Manif Pour Tous, serez prévenus en priorité de nos événements et actions, recevrez des outils et supports de formation nécessaires au déploiement de nos actions.

    En devenant adhérent, vous nous permettez de nous structurer pour devenir une véritable force d’influence en France. A ce titre, vous pouvez voir que le bulletin d’adhésion contient un onglet « commune où vous votez », afin de permettre la réalisation d’un vrai travail d’influence et de dialogue auprès de vos élus, par vos responsables locaux et nationaux.

    Enfin, en devenant adhérent, vous contribuez en plus de votre engagement militant, à ce que La Manif Pour Tous bénéficie de moyens financiers permettant de conduire à bien ses missions. Sans moyens financiers, aucune action n’est possible pour la défense de nos valeurs que sont, entre autre, le mariage homme/femme, la filiation Père/Mère/Enfant, le refus de la PMA pour tous, de la GPA, le refus de la théorie du genre à l’école, l’objection de conscience pour les officiers d’état civil, etc.

    La tâche est immense et cette année II de La Manif Pour Tous s’annonce très riche en enjeux.

    Merci pour votre engagement

    On ne lâche rien. Jamais !

    Ludovine de La Rochère"

    http://www.lesalonbeige.blogs.com/

  • Le mariage de l'homme et de la femme : un bien pour tous

    Lu sur le blog de L'Homme Nouveau :

    "Dans une lettre adressée au cardinal Bagnasco, président de la Conférence épiscopale italienne, à l'occasion de la 47ème Semaine sociale des catholiques italiens, le Pape François a réaffirmé la nécessité de défendre la famille dans la perspective du bien commun. Il souhaite ainsi que soit mis « en évidence le lien unissant le bien commun à la promotion de la famille fondée sur le mariage, au-delà des préjugés et des idéologies ». Le Saint-Père a réaffirmé la vérité catholique sur l'institution familiale : « En tant qu'Eglise, nous proposons une conception de la famille qui est celle du Livre de la Genèse, de l'unité dans la différence entre homme et femme. Dans cette réalité, nous reconnaissons un bien pour tous, la première société naturelle, comme elle est aussi reconnue dans la Constitution de la République italienne ». De ce fait, écrit le pape la famille « ainsi conçue » reste le « premier et le principal sujet qui construit la société et une économie à mesure d'homme, et, comme telle, mérite d'être effectivement soutenue». [...]

    Le pape rappelle également dans cette lettre au cardinal Bagnasco que « les conséquences, positives ou négatives, des choix de caractère culturel et politique concernant la famille touchent à divers pans de la société ». Il évoque le problème démographique qui est « grave pour tout le continent européen et en particulier pour l'Italie », sans oublier d’autres questions celle de l’économie et du travail, de la croissance des enfants et même la « vision anthropologique à la base de notre civilisation ». Une allusion très claire au unions civiles homosexuelles. Dans ce sens, « Soutenir et défendre la famille, valoriser son rôle fondamental et central, c’est œuvrer pour un développement équitable et solidaire ». [...]"

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  • "Aux veilleurs assis et aux veilleurs debout, nous voudrions associer des veilleurs à genoux"

    En effet, "Nos mouvements de protestation ne deviendront vraiment féconds que s’ils sont portés par la prière". De l'abbé Eric Iborra

    "Face à la volonté inflexible du gouvernement d’imposer sa loi dénaturant le mariage et la filiation, nous avons assisté, étonnés, auréveil d’une France qui semblait depuis longtemps endormie. Invité par nous à s’exprimer le 12 juin dernier sur les suites politiques que pourrait revêtir ce mouvement de protestation à bien des égards multiforme,M. Sellier, ancien sénateur, resituait le problème à son juste niveau, théologal, en reprenant l’exemple de Ste Jeanne d’Arc. Et l’une de nos paroissiennes nous confiait alors qu’il faudrait soutenir ce mouvement dans toutes les paroisses de France par une mobilisation sans précédent autour de l’adoration eucharistique car l’enjeu du combat est avant tout d’ordre spirituel.

    Cela m’a rappelé ce qu’avait dit en 1937 le futur Pie XII à Notre-Dame de Paris dans un sermon mémorable et à bien des égards prophétique : « Le courant qui insensiblement a entraîné les générations d’hier se précipite aujourd’hui et l’aboutissement de toutes ces déviations des esprits, des volontés, des activités humaines, c’est l’état actuel, dont nous sommes les témoins, non pas découragés, certes, mais épouvantés ».
    L’été, vous le savez, a en effet ajouté aux turpitudes du printemps la loi instrumentalisant les embryons à des fins soi-disant thérapeutiques mais en fait mercantiles, ainsi que la manipulation de l’esprit des jeunes qui se dissimule sous la prétendue charte de la laïcité qui va se mettre en place à l’automne dans les écoles. Nos mouvements de protestation ne deviendront vraiment féconds que s’ils sont portés par la prière. Souvenons-nous de Moïse priant sur la montagne tandis que Josué combattait dans la plaine (Exode, ch. 17) !

    C’est pourquoi, à partir de vendredi prochain, 20 septembre, nous proposons que l’adoration eucharistique hebdomadaire ait lieu désormais après la messe, de 19h45 à 20h30, pour permettre au plus grand nombre d’y participer et qu’elle ait pour intention principale le salut spirituel et temporel de la FranceAux veilleurs assis et aux veilleurs debout, nous voudrions associer des veilleurs à genoux. Ne manqueront pas même des textes sur la France pour orienter notre prière…

    « Vigilate ! » s’était écrié le cardinal Pacelli, nous mettant en garde, prophétiquement, contre l’activisme, « Priez, sinon vous ne feriez qu’œuvre humaine et, à l’heure présente, en face des forces adverses, l’œuvre purement humaine est vouée à la stérilité, c’est-à-dire à la défaite : ce serait la faillite de votre vocation ».

    « Veillez et priez ! ». C’était la parole du Seigneur à ses disciples au moment d’entrer dans sa Passion, scène que représente l’un des vitraux du chœur ! Soyons nombreux,chaque vendredi, à répondre à son invitation, pour la France et pour toutes les nations qui souffrent des mêmes maux. »

     

    Relèverons-nous ce nécessaire défi seulement à Paris ?

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  • La Manif pour Tous veut être une force de propositions pour les politiques

    Lors de l'université d'été de La Manif pour Tous, Ludovine de La Rochère a fait plusieurs annonces :

    L"Avec le plan Vigigender, nous invitons les parents à créer des comités pour rencontrer les éducateurs et les associations"

    "L'organisation d'un Grenelle de la famille débouchera sur la rédaction d'un projet de loi Famille"

    "Nous demanderons à des parlementaires de déposer une proposition de loi Famille"

    "La Manif Pour Tous ne présentera aucun candidat sur le territoire national mais s'adressera à tous les candidats". "Ceux qui se présenteront comme candidats le feront à titre personnel"

    "La Manif Pour Tous se réserve le droit de présenter des listes aux élections européennes si elle n'est pas entendue par les candidats".

    "LMPT restera totalement libre et indépendante de tout parti politique."

     

    La Manif Pour Tous communique :

     

    "Salles pleines, 1100 participants, 70 intervenants, 4 séances plénières, 48 forums, 2 jours de débats et d'échanges… : la 1ère université de La Manif Pour Tous est un succès. L'occasion pour les volontaires et sympathisants du mouvement venus des quatre coins de France de faire le point sur une année de mobilisation historique et atypique et de lancer l'année 2013-2014.

    « Nous continuons d'affirmer que la loi Taubira n'est pas juste (…). Le mariage, c'est la filiation. Or le mariage Taubira institue une filiation fictive. » Les mots de Ludovine de la Rochère confirment la volonté du mouvement de rester fidèle à sa promesse de ne rien lâcher : La Manif Pour Tous poursuit ses actions pour le retrait (sans rétroactivité) de la loi Taubira, contre le fondement de la loi Taubira - l'identité de genre - et sur ses conséquences logiques, l'ouverture de la PMA aux couples de même sexe et la GPA (mères porteuses). Au cœur de ces enjeux, le droit de l'enfant à connaître son père et sa mère et, dans la mesure du possible, d'être élevé par eux (article 7 de la Convention internationale des droits de l'enfant). Avec l'enfant et ses parents, c'est bien-sûr la famille qui est en jeu.

    C'est pourquoi « le projet de loi Famille » est dans tous les esprits des volontaires et sympathisants de La Manif Pour Tous, sa présentation en conseil des ministres étant annoncée d'ici la fin de l'année.Ce projet provoque de vives inquiétudes malgré les hésitations et les rétropédalages du gouvernement sur l'ouverture de la PMA aux couples de même sexe. La Manif Pour Tous rappelle qu'elle n'a cessé pendant des mois de demander l'ouverture d'Etats généraux de la famille et de la filiation sans recevoir d'autres réponses que le mépris de M. Hollande et de son gouvernement. Pas davantage de succès avec la demande de rendez-vous auprès de Dominique Bertinotti, Ministre déléguée à la famille…

    La Manif Pour Tous lance donc un Grenelle de la Famille. Objectif : préparer une proposition de loi-cadre sur la famille. Ouvert à tous, ce Grenelle de la Famille se tiendra partout en France et réunira toutes les parties prenantes au sein de multiples collèges : Etat et administrations, collectivités, associations, entreprises (employeurs et salariés), associations, sans oublier les familles !

    D'autres actions de grande ampleur ont été annoncées : la mise en place du Plan Vigi-gender, avec un appel à tous les parents d'élève à se constituer en « comités de parents vigilance gender ». Il s'agit, en lien avec le corps enseignant, de veiller à ce que l'identité sexuelle homme/femme ne soit pas remise en cause auprès des enfants, et d'éviter que la question des pratiques sexuelles ne soit évoquée à l'école, c'est-à-dire à un âge bien trop précoce. La Manif Pour Tous souhaite éviter l'intervention malvenue de l'Etat dans un domaine intime, la déconstruction de repères élémentaires. Elle vise aussi à aider les parents à exercer pleinement leur rôle de premiers et principaux éducateurs de leurs enfants.

    La Manif Pour Tous reste totalement libre et indépendante de tout parti politique, confession ou toute autre instance. A l'approche des échéances électorales, elle demandera à tous les candidats la nature de leur engagement sur les questions qui la préoccupent : l'altérité sexuelle".

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