La surabondance d’information, la pollution visuelle et sonore, l’émergence des nouveaux moyens de communication, en particulier Internet, entre autres, doivent nous conduire à reconsidérer nos moyens d’action, dans une perspective uniquement formelle donc indépendante de tout contenu déterminé.
Trois principes fondamentaux sont ici proposés.
1/ Contrairement au XIXème et au XXème siècle, l’information est surabondante. Cela veut dire qu’il s’agit ici de créer une saillance et non pas seulement d’occuper le terrain. Dans ce monde, l’information est polarisée ; la simple présence d’une parole équivaut donc à une absence.
Cette considération apparemment triviale nous conduit à des réformes profondes dans nos méthodes :
-abandon des affiches : les affiches sont présentes partout, tout le temps, et personne ne les regarde ;
-abandon du tractage : les gens reçoivent des tracts tous les jours, à longueur de journée, qui pour une ONG, qui pour une discothèque ; les gens sont pressés et ne prennent pas le temps de discuter ;
-si un site n’est pas lu par au moins un millier de personne (et qu’il n’est pas destiné à un tout petit milieu), il faut le supprimer.
Il faut donc adopter une méthode situationniste, souvent citée, très peu adoptée : créer une situation, c’est-à-dire créer une tranche de temps, un espace unique, et ainsi briser la sidération du quotidien (le MP3 vissé aux oreilles, le regard baissé ou vagabond, l’anxiété généralisée…) par un effet de surprise radical. Le happening, le choc…doivent générer de l’inattendu, qui va directement concerner l’individu.
2/ Occuper les medias. Il ne s’agit pas de créer de l’information, mais de polariser l’information. Pour cela deux méthodes sont à adopter :
-Sur Internet, très peu de sites sont lus réellement, car la population n’a pas le temps d’errer sur une dizaine de sites par jour. Ces sites doivent relayer les informations pertinentes, et s’il le faut, l’information doit être calibrée pour ces sites, afin que le lecteur puisse de loin en loin s’intéresser à la source primaire de l’information elle-même.
A ce jour, le blog le plus lu est Egalité et Réconciliation. D’autres sites (Boulevard Voltaire, RageMag…) doivent être exploités.
-Atteindre un effet de seuil. Un effet de seuil est atteint quand une information ne peut plus être niée par l’ensemble des medias, ce qui advient quand l’information est reprise par au moins un grand media national. Quand RTL a sorti la vidéo montrant Meric attaquant Esteban dans le dos, l’information a été reprise par tous les grands journaux, car aucun journal ne peut ignorer cette information sous peine d’être accusé de vouloir la mettre sous le tapis.
Il faut donc, en cas d’action, orienter la presse nationale vers cette action. Une action non relayée est nuisible, car elle est non seulement inutile, mais coûte du temps, de l’énergie et éventuellement de l’argent.
3/ La BAD est un principe de survie, pas de militantisme. Le principe de militantisme au XXIème siècle est la TAZ (Temporary Autonomous Zone). Nous devons passer du lieu au réseau, de la substance à l’événement. Cela se traduit par deux principes simples :
-abandonner les locaux fixes, du moins tant que l’organisation ne sera pas particulièrement aisée ;
-générer des situations et investir du temps et de l’argent dans ces situations et des collectifs.
Les situations sont polymorphes : manifestations immenses (LMPT ; note : des manifestations surviennent tous les jours, donc si une manifestation n’est pas immense ou menaçante, elle ne sert à rien, selon le premier principe) ; concerts ; soupes populaires… Mais aussi création d’espaces de discussions, de débats, de conférences…qui remplaceront efficacement les sempiternels tractages.
Les collectifs sont mobiles, ils sont constitués de citoyens concernés, en fonction de projets ou de sujets pertinents. Souples et mobiles, ils peuvent apparaître, disparaître et surtout se faire entendre.
Ces propositions sont évidemment sujettes à débat, car si elles renversent les méthodes militantes traditionnelles, elles tendent aussi à mettre en question l’importation en France de certains usages en cours chez l’une de nos figures d’inspiration principales, à savoir CasaPound. En effet, si son symbole est la tortue, qui fait signe vers l’idée de foyer, donc de lieu fixe, la méthode que nous proposons s’appuie plutôt sur le flux, le mouvement et l’événement, non le lieu et l’enracinement (comme méthode de combat).
Ces méthodes peuvent néanmoins s’articuler à des Occupations Non Conformes. Reste à savoir, dans une situation de pauvreté en argent et en hommes, si une articulation telle ne doit pas laisser place à une hiérarchisation urgente des moyens mis en œuvre.
Ulysse Girard