Hollande, acculé par les résultats catastrophiques des municipales à changer de premier ministre, a donc choisi le candidat des sondages. Ce que Mitterrand n’avait pas fait à la suite des municipales perdues de 1983, conservant encore Pierre Mauroy une année, Hollande a été contraint de s’y résigner,...
...en raison non seulement de l’ampleur de la débâcle électorale mais surtout de la personnalité de Jean-Marc Ayrault qui, contrairement à Mauroy, n’a jamais su revêtir les oripeaux de sa fonction. Son incapacité à obtenir la solidarité au sein de son équipe en était le signe le plus révélateur. Manuel Valls saura-t-il faire régner la discipline à l’intérieur de son « gouvernement de combat » ?
Il ne fallait évidemment pas s’attendre de la part du président de la république à un choix original, même si la gauche de la gauche ne peut que critiquer une nomination qui confirme l’orientation sociale libérale du quinquennat, alors que la claque électorale reçue par la majorité légale est due moins à une vague bleue qu’à l’abstention des électeurs les plus à gauche de Hollande, ce que confirment les relativement bons scores des communistes, mélenchonistes et autres écologistes. Le risque politique pour Hollande n’est pas nul, le parti socialiste ayant vu sa faible majorité parlementaire fondre comme neige au soleil, depuis deux ans, au gré des législatives partielles. Et il n’est pas interdit de penser que Valls pourrait être, sous la Ve république, le deuxième premier ministre à voir, à plus ou moins long terme, son gouvernement censuré par le parlement. Mais Hollande, coincé entre les exigences de Bruxelles et les mauvais chiffres du déficit public et du chômage, en proie, de plus, à une chute de confiance historique qui fragilise sa légitimité, veut rassurer les marchés tout en stabilisant son impopularité. Ayant, semble-t-il, fait son deuil, au moins temporairement, de son électorat le plus à gauche, il pense faire coup double, voire triple ou quadruple, en nommant à Matignon Valls, déjà comparé à Michel Rocard, ou Gerhard Schröder : rassurer Bruxelles sur l’orientation libérale du quinquennat — le « choc de solidarité » n’ayant été annoncé par Hollande que pour la perspective en pendant du « choc de compétitivité » —, donner des gages au Medef — Valls était favorable à l’assouplissement des 35 heures et à la TVA sociale —, satisfaire les Etats-Unis et Tel Aviv sur la politique étrangère du nouveau gouvernement — le tropisme atlantiste et sioniste de Hollande étant une constante partagée par le nouveau premier ministre –, plaire, enfin, à l’électorat de droite, auprès duquel la popularité de Valls, qui repose sur un malentendu, risque d’être de courte durée.
Certes, le fait que ses dents rayent le parquet n’est pas pour déplaire au militant moyen de l’UMP, toujours à la recherche de l’homme fort et qui appréciait chez Sarkozy cette ambition à nue comme le signe d’un caractère viril gage d’efficacité, ce qui, évidemment — le précédent quinquennat l’a montré —, est aller un peu vite en besogne. En réalité, Valls et Sarkozy ont en commun d’être passés maîtres dans l’art de l’esbroufe. Avec, chez Valls, une brutalité assumée et un mépris cynique des libertés publiques qui font, paradoxalement, de ce réputé social-libéral un commissaire politique accompli ...tendance IIIe internationale. Spécialisé dans la répression arbitraire des opposants politiques, surtout pacifiques, d’une incompétence rare, voire d’une mauvaise volonté manifeste dans la lutte contre l’insécurité, d’un zèle funeste, en revanche, pour brader une nationalité française que la république, bonne fille, lui a pourtant généreusement octroyée à l’âge de vingt ans, et d’une totale servilité envers Bruxelles dans la politique immigrationniste, Manuel Valls n’a à présenter aux Français qu’un bilan catastrophique, que dissimulent mal ses rodomontades sur les Roms à destination du gogo de droite ...et des écologistes qui voient en lui la réincarnation de la Bête immonde. La seule chose qui pourrait réjouir ses ennemis au sein de la majorité présidentielle : qu’il se brûle les ailes dans ses nouvelles fonctions. On sait que jamais un premier ministre en exercice n’a accédé à la présidence de la république — Pompidou et Chirac ne l’étaient plus lorsqu’ils ont été élus.
De toute façon, quelle que soit la personnalité du nouveau fusible de l‘Elysée, l’amélioration de la situation ne saurait dépendre d’un changement à Matignon, tant que le chef de l’Etat lui-même continuera de prendre ses ordres à Bruxelles ou à Washington et que notre économie sera soumise à des règles édictées par une oligarchie mondialisée et peu soucieuse de la prospérité nationale. C’est ce que les plus lucides des Français ont signifié au pays légal en votant, lorsqu’ils en avaient l’occasion, pour des candidats n’appartenant ni à la majorité actuelle ni à l’UMP-UDI, c’est-à-dire au système à bout de souffle qui conduit le pays à sa ruine. On ne peut en ce sens que se féliciter de l’élection de Robert Ménard, candidat du pays réel à Béziers, ou de la réélection, au premier tour, de Jacques Bompard à Orange. Quant à la progression du Front national, si elle confirme son ancrage électoral et le passage à un vrai vote d’adhésion, elle ne saurait toutefois dissimuler les limites, voire les faiblesses de la ligne stratégique « tout populiste » du parti de Marine Le Pen, que ce soit en matière sociale, européenne ou laïcarde. Certes, le FN sera désormais à la tête de dix municipalités et de la mairie du septième secteur de Marseille — l’équivalant d’une grande ville —, mais le parti est encore loin d’avoir lissé sa présence sur le territoire et, surtout, d’avoir réussi à délégitimer la droite parlementaire aux yeux d’un électorat qu’il n’a cessé de mépriser, notamment l’année dernière, alors qu’il devra l’attirer, lui aussi, s’il veut devenir un vrai parti de gouvernement. Si Louis Aliot, à Perpignan, a progressé de quelque dix points entre les deux tours — le candidat FN, Philippe Lottiaux progressant quant à lui de cinq points à Avignon — , il n’en est pas de même de Florian Philippot, parachuté à Forbach, qui aurait dû, dans cette cité industrielle en déshérence, être le premier à recueillir les fruits de sa propre stratégie. Or son score au second tour a baissé par rapport au premier, signe que l’électorat de gauche est resté majoritairement fidèle aux imposteurs socialistes tandis que celui de droite, en avalisant par son vote une quadrangulaire, a encore préféré la réélection d’un socialiste à l’élection du numéro 2 du FN. Nous l’avons dit et répété : la défense de la société et de la famille françaises et celle de l’industrie et de l’ouvrier français, loin d’être antinomiques, sont complémentaires puisque les attaques subies ont même origine — l’oligarchie mondialisée — et même objectif — la marchandisation de l’homme et l’éradication de la solidarité nationale. Or le FN aurait pu, l’année dernière, par l’affirmation claire de quelque convictions simples, détacher un électorat sensible à la préservation de la société d’une UMP particulièrement désunie, voire veule sur le dossier. Il a malheureusement raté cette occasion historique, semblant indifférent à des questions essentielles. Même s’il progresse encore aux européennes — des élections qui servent traditionnellement de défouloir en raison de leur absence d’impact direct sur la politique intérieure —, il n’en reste pas moins que c’est toute sa stratégie que le FN doit repenser s’il veut passer à l’étape supérieure. Mais le veut-il vraiment ?
François Marcilhac - L’AF 2883
http://www.actionfrancaise.net/craf/?Edito-Un-nouveau-premier-ministre