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  • 2016 : la droitisation du paysage politique

    Pour Guillaume Bernard, l'année 2016 a été marquée par la poussée des idées d'une droite qui ne cache pas son anti-modernisme. Voici sa tribune dans Le Figarovox :

    "En 2016, plusieurs scrutins, élections et référendums, ont marqué l'actualité ; y s'est manifestée une incontestable droitisation du paysage politique des démocraties «occidentales» tant les plus anciennes que d'autres plus récentes. Les deux événements majeurs sont venus du monde anglo-américain: le Brexit au Royaume-Uni en juin et l'élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis en novembre. Il n'est pas anodin que les élites anglo-américaines qui ont été le moteur de la globalisation se soient vues rembarrées par le peuple qui a comme enclenché un processus de dé-mondialisation. Il ne faut cependant oublier la présidentielle autrichienne (tenue en mai, annulée en juillet et reportée d'abord en octobre puis en décembre) et le référendum hongrois. En Autiche, le candidat de la droite nationale a failli l'emporter seul contre tous les autres partis. En Hongrie, le référendum d'octobre a rassemblé une écrasante majorité des votants hostiles à la relocalisation des migrants dans le cadre de l'Union européenne, sans qu'il y ait suffisamment de suffrages exprimés pour que la votation ait force légale. 

    De tous ces scrutins, il est possible de tirer un certain nombre d'enseignements. Les idées s'affichant sans complexe de droite ne font pas à elles-seules la victoire (dans un référendum des courants disparates peuvent converger) ; de même, elles ne rassemblent pas encore une majorité absolue de suffrages (d'où l'échec du FPÖ en Autriche tandis que la victoire du ticket Trump-Pence, avec une minorité de suffrage populaires s'explique par la structure fédérale des États-Unis). Mais, ce sont bien les idées de la droite ontologique (et non seulement situationnelle), d'une droite qui ne cache pas son anti-modernisme, qui progressent et repoussent vers la gauche du spectre politique les idées qui occupaient son espace électoral ; ce que j'ai proposé d'appeler le «mouvement dextrogyre» (ou «dextrisme»). 

    Qu'elle l'emporte ou échoue in extremis, 2016 a vu se concrétiser la déferlante «dextriste». Son ressort électoral est le populisme. Avec des caractéristiques propres à chaque pays, celui-ci consiste dans la valorisation de ce qui vient du peuple (angle social) et de ce que fait le peuple (angle démocratique). Il dénonce la distorsion entre le peuple et les élites ; il revendique donc l'exercice de la démocratie directe contre celle représentative. Politiquement, le populisme entend agir pour la protection de celui qui, dans une relation d'altérité, est le plus faible (défense de la main d'œuvre nationale contre la concurrence déloyale, sauvegarde de la dignité de la personne contre sa chosification). Doctrinalement, il se fait le défenseur de l'identité du corps social en tant qu'il est un tout (la nation) contre la juxtaposition d'identités partielles (les communautarismes) ; il affirme que les corps sociaux (comme la famille) existent en eux-mêmes et donc que la volonté des personnes (le mariage, par exemple) serve à s'y inscrire et non à les créer artificiellement. Il existe donc, dans le vote populiste, un double aspect patrimonial portant sur le niveau de vie (aspect matériel) mais surtout sur le mode de vie (aspect culturel). Le vote populiste, c'est la révolte des classes populaires oubliées et des classes moyennes qui se paupérisent (la «France périphérique» ou l' «Amérique du milieu») contre les métropoles mondialisées et multiculturelles. Au final, le populisme est un anxiolytique: il est l'anti-syndrome de Stockholm. 

    Outre qu'elle est susceptible de varier en fonction des circonstances nationales, l'idéologie politique portée par le «mouvement dextrogyre» n'est sans doute pas encore parfaitement explicite et homogène. Mais, plusieurs traits caractéristiques peuvent être dégagés. Elle est une combinaison des facteurs suivants: 

    - l'idenditarisme (par opposition au multiculturalisme): hostilité envers l'immigration considérée comme un facteur de déstabilisation culturelle et de désagrégation sociale, affirmation des racines chrétiennes des nations occidentales vis-à-vis de l'islamisme mais aussi du laïcisme ; 

    - le souverainisme (par opposition au mondialisme): revendication de pouvoir disposer de son destin (contrôle des frontières), de déterminer son avenir (contrôle du pouvoir normatif) ; «Take back control» fut le slogan des partisans du Brexit ; 

    - le subsidiarisme (par opposition tant au libéralisme qu'au socialisme): rejet tant de la loi de la jungle libérale (travail du dimanche) que de l'égalitarisme socialiste (assistanat) ; préconisation d'un État fort (susceptible d'exercer un protectionnisme douanier) mais limité dans ses domaines d'intervention (baisse des prélèvements obligatoires pesant sur les familles et les entreprises, défense des libertés pour les corps sociaux comme les institutions scolaires et universitaires) ; acceptation d'une société avec marché (où seuls certains biens sont échangeables) et non d'une société de marché (où celui-ci devient la méthode d'analyse de l'ensemble des phénomènes sociaux) ; 

    - le conservatisme (par opposition au progressisme): affirmation de l'enracinement des personnes individuelles et collectives dans une histoire et des traditions ; il ne consiste donc pas en une simple volonté de maintenir l'ordre établi et en un frein au progressisme mais en une réaction aux différentes manifestations de la modernité, aussi bien l'individualisme que le matérialisme (d'où son insistance dans le combat pro-vie). 

    La France n'échappe pas au «mouvement dextrogyre». Les sondages annoncent un nouveau «21-avril» opposant François Fillon à Marie Le Pen tandis que toute une partie des ténors de la gauche s'affiche désormais social-libérale (Manuel Valls, Emmanuel Macron). Cependant, les partis font encore de la résistance: la recomposition du spectre politique tarde encore et aucun des actuels candidats à la présidentielle ne semble avoir compris le contenu idéologique porté par le «dextrisme». Marine Le Pen cultive le souverainisme mais bascule vers une forme d'étatisme. François Fillon préconise les libertés économiques mais néglige la question identitaire. Tous deux s'adonnent au libéralisme sociétal même s'ils essaient de le mâtiner de marqueurs conservateurs (uniforme à l'école pour l'un, abrogation de la loi Taubira remplacée par un PACS amélioré pour l'autre). Faisant preuve d'une incohérence doctrinale (sous prétexte d'attirer à eux différents segments électoraux), ils ne satisfont donc pas entièrement leur électorat «droitier» qui est, en partie, susceptible de basculer de l'un à l'autre. À moins, chose possible mais difficilement réalisable dans l'état actuel des choses, qu'une meilleure offre politique ne se présente à lui…"

    Michel Janva

    http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html

  • Vanessa Beeley (journaliste britannique) - Alep - L'intox monstrueuse dénoncée

  • Richelieu, Marine Le Pen : remettre la France en ordre

    Marine Le Pen a offert ses vœux de combat aux Français devant le portrait du cardinal de Richelieu. Richelieu qui n’eut de cesse, toute sa vie, que le souverain soit « empereur en son royaume », pour reprendre la formule traditionnelle des légistes français. Quoi de plus cohérent, en somme, avec ce que Marine Le Pen veut pour la France !

    « Je veux remettre la France en ordre, en cinq ans », déclarait-elle le 7 décembre 2016 sur le plateau de TF1. « Je veux remettre en ordre la Justice… Je veux remettre l’École en ordre. Je veux remettre la diplomatie en ordre. Je veux remettre l’économie en ordre… Je veux remettre en ordre l’organisation territoriale. Je veux remettre en ordre la laïcité. »

    On est loin, en tout cas, des pleurnicheries que François Hollande nous a infligées le 31 décembre au soir, un François Hollande cravaté de gris-noir, ordonnateur de sa propre pompe funèbre, un François Hollande à qui, jusqu’au bout, cela aura arraché la gueule d’appeler un chat un chat et un islamiste un islamiste.

    Des vœux de combat, donc, sous le portrait du principal ministre de Louis XIII, botté et cuirassé et néanmoins drapé de sa pourpre cardinalice, au siège de La Rochelle : le symbole ne plaira peut-être pas à tout le monde mais, cependant, il est clair. Il s’agit de remettre le bien commun au centre du débat politique.

    Dans son Testament politique, Richelieu n’écrivait-il pas : « Les intérêts publics doivent être l’unique fin du prince et de ses conseillers ou, du moins, les uns et les autres sont obligés de les avoir en si singulière recommandation qu’ils les préfèrent à tous les particuliers. » On est loin des lois pour faire plaisir à certains, comme celle en faveur du mariage homosexuel, votée sous le « règne » de François Hollande… 

    Richelieu, c’est un « programme », un projet pour la France et son roi, en trois points.

    Premièrement, assurer l’unité du royaume en réduisant les privilèges acquis par le protestantisme qui s’était constitué en véritable État dans l’État depuis l’édit de Nantes. Un protestantisme soutenu, en outre, par l’étranger : l’Angleterre. D’où le siège de La Rochelle en 1627-1628.

    Deuxièmement, mettre les « Grands » au pas. La décapitation, place des Terreaux à Lyon en 1642, du jeune marquis de Cinq-Mars, soupçonné de conspiration, fut un exemple. Le Cardinal n’estima pas que la « personnalité » du grand écuyer de France, « sa réputation nationale et internationale », comme on a pu lire récemment dans le verdict du procès d’une autre « Grande », méritassent un quelconque passe-droit.

    Troisièmement, rabaisser la puissance des Habsbourg dont les deux branches, l’autrichienne et l’espagnole, prenaient alors la France en tenaille.

    Aujourd’hui, le programme pour la France et son souverain – le peuple – pourrait, de la même manière, tenir en trois points, assez similaires à ceux du programme du fondateur de l’Académie française.

    Premièrement, mettre fin au communautarisme islamiste qui dispose de véritables places fortes en ce pays, où l’ordre républicain ne règne plus et, qui plus est, bénéficie d’appuis à l’étranger dont les troupes sont sans doute plus redoutables que celles du roi d’Angleterre.

    Deuxièmement, rabaisser la puissance de ces « élites », notamment politiques, qui depuis quarante ans conduisent notre pays là où il en est aujourd’hui et n’ont de cesse de livrer la France au « parti de l’étranger ».

    Troisièmement, enfin, supprimer l’emprise de l’Union européenne, cette espèce de Saint Empire romain germanique des temps modernes. Un empire qui n’est ni saint ni romain mais seulement germanique, et encore, pour combien de temps…

    Remettre la France en ordre, c’est bien de cela qu’il s’agit.

    « L’Ordre », ce beau mot devenu un gros mot pour ceux qui, en 68, se juchaient sur la statue de Richelieu à La Sorbonne afin d’écouter Sartre et qui, aujourd’hui, Dieu merci, crachent leurs dernières dents.

    Georges Michel

    http://www.bvoltaire.fr/georgesmichel/richelieu-marine-le-pen-remettre-la-france-en-ordre,303627

  • NSA : «D'un point de vue technologique, la France est une colonie américaine»

    Mediapart et Libération ont révélé ce mardi soir que les trois derniers présidents français ont été mis sur écoute par la NSA au moins de 2006 à 2012. Que vous inspire cette surveillance ? Est-elle inédite ?
    Tout cela n'a rien de nouveau, et ce n'est pas la première fois qu'il est révélé que la NSA écoute des dirigeants Européens. La fois précédente, il s'agissait d'Angela Merkel. Qui pouvait s'imaginer un instant à l'époque que la Chancelière Allemande avait droit à un traitement privilégié par rapport aux présidents Français ?
    De nos jours, du simple citoyen au plus haut dirigeant, la confiance a totalement disparu. Chez les politiques, cela se traduit par une explosion de la mise sous surveillance de tous -du Français lambda aux dirigeants politique (de son propre pays ou d'un pays étranger)-, chez les citoyens, cela se traduit par une explosion du phénomène des lanceurs d'alerte, dont Wikileaks est un symbole. La confiance est un phénomène réciproque. Si vous ne vous fiez pas à quelqu'un, il n'y a que peu de chance d'établir une relation de confiance réciproque avec lui. Si, en tant qu'État, vous espionnez vos alliés, la confiance va être difficile à établir. Si vous surveillez vos citoyens, il en sera de même, et si vous êtes dans un régime démocratique, rester au pouvoir sans avoir la confiance du peuple peut s'avérer délicat.
    Edward Snowden avait déjà révélé les techniques de surveillance de la NSA en 2013. Les services de renseignement en ont-ils réellement tenu compte ?
    Les services de renseignement étaient effectivement déjà largement au courant des pratiques de la NSA, et il est plus que certain qu'ils ont adapté leur approche au regard des détails fournis par Edward Snowden. Leur problème tient sans doute plus dans la difficulté qu'il y a pour les dirigeants français à adopter de “bonnes pratiques” les mettant à l'abri des écoutes. On voit régulièrement des ministres ou des présidents utiliser un smartphone, et cela fait rire de façon systématique tous les hackers. Maintenant, vous savez pourquoi
    Une partie non négligeable des téléphones, et dans une moindre mesure des ordinateurs, vendus dans le commerces sont livrés avec des systèmes de surveillance pré installés -vouloir les utiliser pour échanger de façon confidentielle des informations est parfaitement idiot. Dans un autre ordre d'idée, si vous avez accès aux recherches Google issues du minsitère de l'écologie dans les mois qui précèdent un rendez vous comme COP21, vous avez des renseignements de premier plan sur les préoccupations de votre adversaire. 
    Si cette difficulté des hommes politiques à adopter des bonnes pratiques est à mettre en cause, n'y-a-t-il pas également des failles de sécurité au sein du gouvernement français ?
    Il n'y a que ça, et il est difficile d'en vouloir au gouvernement. Les technologies que nous utilisons pour construire nos infrastructures -celles utilisées par le gouvernement comme les autres- ne sont pas souveraines, et celles qui sont d'origine américaine (et elles sont nombreuses) sont presque systématiquement pensées pour permettre à la NSA d'en prendre le contrôle à des fins de surveillance. Nous n'avons pas, ou peu, de technologies souveraines. C'est une réalité avec laquelle il nous faut composer. Le fait d'être, d'un point de vue technologique, une colonie américaine est l'une des conséquences facheuse de ce manque de souveraineté. Les dirigeants politiques en sont souvent réduits à faire du face à face pour les discussions les plus confidentielles. Cela revient à s'éclairer à la bougie, et on s'imagine le manque de performance qui en découle de l'appareil qu'est le plus haut sommet de l'État.
    Ajoutez à cela qu'à ce niveau de pouvoir, la compréhension de la chose technologique est proche du zéro absolu. Et pour cause : on a laissé cette chose aux techniciens, jusqu'au jour où l'on s'est aperçu que Facebook et Google -tous deux inventés par des techniciens- parlaient d'égal a égal avec les chefs d'État de la planète.
    Comment donc assurer la confidentialité de nos communications en France?
    Comme partout ailleurs, en diffusant au sein des entreprises un ensemble de bonnes pratiques qui, au fur et à mesure que les technologies de surveillance deviennent sophistiquées, doivent être revues et mises à jour. Il faut ensuite s'assurer que ces pratiques sont suivies scrupuleusement et établir un dialogue entre des spécialistes en sécurité et les utilisateurs de technologie, ce qui peut être très complexe.
    L'écrasante majorité des dirigeants -qu'il s'agisse de l'État ou des grandes entreprises- ne comprend strictement rien à la chose technologique. On leur a vendu la technologie par petit bout, année après année: après celle du “search engine marketing” est arrivé l'année des réseaux sociaux, puis du mobile, de l'objet connecté, etc, jusqu'au moment où l'uberisation de l'économie leur a fait comprendre qu'ils n'avaient rien vu venir (tout comme avec la surveillance) et que du coup, il n'y comprennaient vraisemblablement pas grand chose.
    «C'est l'arroseur arrosé. Voilà un gouvernement qui vient de faire voter une loi sur les écoutes et qui se plaint d'être écouté» a déclaré le sénateur UDI Yves Pozzo di Borgo. La loi sur le renseignement devrait en effet être adoptée définitivement ce mercredi. Ces révélations peuvent-elles avoir un impact sur ce vote ?
    Je doute que les révélations de Wikileaks affectent le vote. La loi française sur le renseignement est le reproduction presque à l'identique du Patriot Act américain; Tout, y compris son timming post attentat, a été fait pour la faire adopter dans l'émotion plus que dans la raison, car si les députés avaient la moindre idée des perspectives que cela ouvre à l'évolution du régime politique en France, ils en seraient effrayés.
    Est-ce un hasard que ces informations d'espionnage soient rendue publiques la veille de ce vote?
    Je doute qu'il s'agisse du fruit du hasard. C'est une piqûre de rappel salutaire: au-delà de ce vote, il ne faut plus s'attendre à vivre encore longtemps dans un régime démocratique.
    Sommes-nous déjà dans une société de surveillance généralisée?
    Oui, nous sommes depuis quelques années dans une société de la surveillance, ou tout le monde est potentiellement surveillé par une autorité supérieure qui le fait dant la plus parfaite impunité et sans le moindre contrôle. Vous, moi, les journalistes, les avocats, les parlementaires, mais également les ministres et le président. 
    La France est, dans cette période étrange de l'histoire de l'humanité qui débute, une des grandes puissances mondiales de la surveillance. En fournissant une aide logistique et un savoir-faire indéniable en matière de surveillance à de nombreuses dictatures étrangères, notamment en Afrique et au Moyen-Orient, la France surveille non seulement toute cette partie du monde qui reste obscure aux grandes oreilles américaines, mais elle appuie la continuité et l'expansion de la “france-afrique” sur de nouvelle bases, solidement ancrées et, j'en ai peur, durables. 
    Sur le plan intérieur, la remise en question des élites dirigeantes par le peuple et la perte des illusions démocratiques ouvre une ère d'instabilité des institutions qu'il semble réaliste de contrer par un renforcement de l'autorité de l'État. Un État panoptique, omniscient et omniprésent à travers les technologies de notre quotidien, est perçu, sans doute à raison, comme une solution plus douce qu'un régime autoritaire. Mais d'une façon ou d'une autre, la classe dirigeante ne peut plus espérer longtemps faire reposer son pouvoir sur une quelconque légitimité, et il lui faut envisager un relais vers autre chose si elle veut continuer de diriger le pays. La surveillance de masse de tout citoyen est une forme de pression qui pourrait permettre demain de résoudre sans violence excessive de nombreux conflits. De récents documents mis à jour par Edward Snowden montrent comment les services anglais, en plus d'opérations de surveillance classiques, infiltrent les réseaux sociaux pour déstabiliser une opposition politique, discréditer un adversaire ou perturber le bon fonctionnement d'un groupe suceptible d'accéder au pouvoir. Ce type de comportement de la part d'un service de renseignement n'a rien de nouveau, mais les moyens techniques utilisés changent la donne de façon radicale.
    En entrant de plein pied dans la société de la surveillance, nous avons profondément altéré les règles de bases des société démocratiques -là où les dictatures n'ont fait que moderniser un dispositif de surveillance plus ou moins passif et pré-existant. Nous sommes entrés dans l'ère du soupçon, une ère où la norme est de ne pas faire confiance. Ne pas faire confiance aux politiques est un réflexe adopté par près de 80% des français, mais cette défiance se généralise bien au delà du politique et des institutions. Ne perdons jamais de vue que la confiance est également la base de l'économie, et que cette dernière finira elle aussi par être affectée.
    La loi sur le renseignement va-t-elle accentuer le phénomène ou peut-elle être un élément de lutte, comme l'estime le député François de Rugy: «La publication de ces écoutes montre justement qu'il faut une loi qui dit ce qui est autorisé ou pas pour les services de renseignement» ?
    Il faut s'attendre à voir nos politique nous débiter dans les jours qui viennent un festival de stupidités. Celle de François de Rugy est assez pitoresque. Cette loi n'a jamais été pensée pour lutter contre les grandes oreilles américaines, car comme le sait parfaitement Mr de Rugy, la France a signé un accord de coopération et d'échange des données issues de la surveillance avec les USA en 2010. Ces accords portent le nom d'”accord Lustre”. Ce fait est connu de tous nos politiques qui prétendent, pour le moment, l'ignorer, quitte à se ridiculiser lors d'une prochaine fuite d'information.
    Là où Mr de Rugy fait très fort, c'est qu'il y a fort à parier que les termes -et donc l'existence officielle- des accords Lustre fassent partie de ce que Wikileaks s'apprête à révéler dans les jours qui viennent. Il pourrait donc se voir taxer de menteur dans moins de 48h, ce qui, en toute logique, ne devrait en rien affecter sa carrière politique, car de toute façon, qui aujourd'hui peut croire ce que raconte un homme politique sur de tels sujets ?
     

  • Vœux 2017 de Jean-Marie Le Pen : « Seul un grand changement peut nous épargner un grand remplacement »

    Des vœux pour la survie de la France et de sa civilisation !

    Francesca de Villasmundo

    http://www.medias-presse.info/voeux-2017-de-jean-marie-le-pen-seul-un-grand-changement-peut-nous-epargner-un-grand-remplacement/67180/

  • Sur la liste des grands événements politiques de 2016 : la multiplication et la banalisation des attentats islamistes

    Mathieu Bock-Côté retrace l'année 2016 avec FigaroVox. Extraits :

    "[...] À la liste des grands événements politiques de 2016, on me permettra d'ajouter la multiplication et la banalisation des attentats islamistes - on pourrait parler aussi plus largement de l'agression contre la civilisation européenne. L'année 2016 a commencé à Cologne et s'est terminée à Berlin. Les agressions sexuelles massives de Cologne nous ont rappelé qu'il existe une telle chose qu'un choc des cultures et l'asservissement des femmes représente une forme archaïque de prise de possession d'un territoire par une bande qui se sent animée par un esprit conquérant. Il y a eu autour de ces agressions un effrayant déni: on a tout fait pour en nier la signification politique. Certaines féministes, souvent occupées à traquer l'intention la plus malveillante qui soit dans un compliment masculin un peu insistant ou maladroit, ont décidé de détourner le regard. De peur de stigmatiser les réfugiés ou les musulmans, elles ont fait semblant de ne rien voir. Elles se sont déshonorées.

    Mais je le disais, les attentats se sont multipliés et banalisés cette année. Nice, Bruxelles, Saint-Étienne-du-Rouvray, Orlando, Berlin. Chaque fois, c'est un carnage, mais c'est un carnage auquel nous nous habituons. Qu'est-ce qu'un mois sans attentat? Une anomalie. Au fond d'eux-mêmes, bien des Occidentaux ont accepté la normalité des attentats les plus sordides. Nous avons intériorisé la présence dans nos vies de la violence islamiste, même si nous ne savons toujours pas quelles conséquences en tirer. Nous ne savons pas non plus ce que voudrait dire gagner cette guerre contre l'islam radical. Alors nous la menons dans la confusion: on parle avec raison d'une nouvelle époque, mais les repères nous manquent pour nous y orienter. Cela prend du temps, prendre pied dans un nouveau monde.

    Et sur le plan intellectuel et culturel?

    Un événement intellectuel, me demandez-vous? Je vous parlerais alors franchement, et avec admiration, du renouveau conservateur de la pensée politique française. Je suis impressionné par la qualité des ouvrages qui d'une manière ou d'une autre, la construisent, la déploient ou la rendent possible: ils ne se réclament pas tous de la même vision des choses mais ils témoignent pour la plupart d'une commune sensibilité par rapport à l'époque. Et ces ouvrages viennent à la fois d'intellectuels bien installés dans la vie publique et de nouvelles figures qui impressionnent par leur vigueur et leur intelligence. J'en nomme quelques-uns, tous parus en 2016: Un quinquennat pour rien, d'Éric Zemmour, L'âme française, de Denis Tillinac, La cause du peuple, de Patrick Buisson, Les cloches sonneront-elles encore demain?, de Philippe de Villiers, Écrits historiques de combat, de Jean Sévillia, Malaise dans la démocratie, de Jean-Pierre Le Goff, La haine du monde, de Chantal Delsol, Le retour du peuple, de Vincent Coussedière, La compagnie des ombres, de Michel de Jaeghere, Chrétien et moderne, de Philippe d'Iribarne, Vous avez dit conservateur, de Laetitia Strauch-Bonart, Éloge de la pensée de droite, de Marc Crapez, La guerre à droite aura bien lieu, de Guillaume Bernard, Bienvenue dans le pire des mondes, de Natacha Polony et du Comité Orwell, Adieu mademoiselle, d'Eugénie Bastié, sans oublier votre excellent ouvrage Les nouveaux enfants du siècle, cher Alexandre Devecchio! Et j'attends avec impatience le livre à venir de Guillaume Perrault sur le conservatisme français! Il ne s'agit pas de mettre tous ces ouvrages dans le même sac, loin de là, mais chacun à sa manière décrypte l'idéologie dominante et contribue à la réhabilitation d'une anthropologie de la finitude et d'une philosophie politique plus classique. J'étudie depuis plusieurs année le conservatisme dans ses différents visages en Occident, et ce renouveau conservateur français me semble d'une formidable fécondité philosophique. [...]

    Les nations ont une trajectoire propre, elles ne se laissent pas réduire au rôle que le système de la mondialisation leur avait réservé: le cas de la Russie est ici fascinant. [...] Avec le Brexit, les Britanniques ont cherché à restaurer leur souveraineté nationale. [...] Maintenant, les autres nations d'Europe se demandent aussi comment restaurer leur souveraineté sans jeter tout simplement aux poubelles un cadre politique commun à la civilisation européenne. Reste à voir qui pourra porter cela politiquement. Cela ne va pas de soi, et les candidats ne sont pas si nombreux. Dans le cas de Trump, nous avons surtout assisté à un grand référendum antisystème. [...] Mais le vote pour Trump était aussi un vote politique: sa candidature se serait épuisée si elle n'avait aucune dimension programmatique. Même s'il ne l'a pas dit ainsi, il s'est emparé de grands pans du vieux programme paléoconservateur de Pat Buchanan [photo]. Il tenait en deux points: nationalisme culturel et nationalisme économique. Autrement dit, critique de l'immigration et protectionnisme économique. L'enjeu de l'immigration qui lui a permis de décoller dans les sondages. Le protectionnisme économique lui a permis de mobiliser un vote ouvrier et populaire que l'on considérait généralement acquis aux démocrates. [...]

    Comment analysez-vous le déroulement et le résultat de la primaire à droite? La victoire de François Fillon traduit-elle une percée conservatrice ou un grand soir libéral? 

    Dans le texte qu'il consacre à la mort de Caton dans Le treizième César, Montherlant écrit une phrase terrible: «Il regarde à droite, il regarde à gauche, il regarde en haut, il regarde en bas, et il ne trouve que l'horrible. C'est quelquefois la tragédie d'un peuple, à un moment donné: il n'y a personne». [...]

    On se doute bien que Fillon ne se lancera pas dans de nouvelles innovations sociétales à la Taubira, mais suffit-il de ralentir la catastrophe ou de prendre une pause dans la marche vers le paradis postmoderne pour devenir le héraut des conservateurs? Une bonne partie de la droite a finalement des espérances assez limitées: elle veut accueillir les innovations sociétales à son rythme, sans qu'on la brusque, mais ne s'imagine pas renverser le sens de l'histoire. Est-ce qu'il y a chez François Fillon quelque chose comme un programme de reconquête culturelle? Dans quelle mesure croit-il pouvoir regagner du terrain sur la gauche, sur les grandes questions sociétales ou identitaires? Quel avenir pour la droite conservatrice avec Fillon? Sera-t-il celui qui traduira politiquement ses idées ou sera-t-il plutôt celui qui emploiera la rhétorique conservatrice sans jamais aller au-delà des mots? [...]

    L'année 2017 sera une année d'élection présidentielle en France. Quels en seront les enjeux?

    La question identitaire sera présente, on n'y échappera pas, car c'est à travers elle que l'époque pose celle des nations. Elle se décline autour de nombreux thèmes: immigration, frontières, Europe, laïcité, place de l'islam, assimilation. Comment y échapper? On s'entête, dans certains milieux qui semblent incapables de sortir d'un matérialisme à courte vue, à ne pas prendre au sérieux la question identitaire, qui serait secondaire par rapport aux enjeux économiques. Pourtant, à travers elle, l'individu redevient un animal politique. Il ne s'agit plus, aujourd'hui, de gérer raisonnablement une société qui ne va pas trop mal, mais de défendre l'existence même de la nation française et de la civilisation française. Par temps calmes, la politique gère des intérêts potentiellement réconciliables et consensuels: dans les temps tragiques, elle canalise aussi les passions et des visions du monde.

    La question de la réforme libérale du modèle social français se posera aussi, quoi qu'on en pense. Car François Fillon a beau ne pas avoir été élu à cause de son programme libéral, il ne l'a pas empêché de gagner la primaire non plus. Peut-être est-ce qu'une partie de la France croit aux vertus d'une thérapie de choc libérale? Chose certaine, ce morceau de programme pourrait contribuer à reconstituer, au moins partiellement, le temps de l'élection, le clivage gauche-droite dans sa forme la plus classique: la gauche présentera Fillon comme le candidat de l'argent et des privilégiés, et se présentera comme la seule capable de défendre les droits sociaux. Ce sera du théâtre, mais rien ne dit que cette pièce ne s'imposera pas aux Français. Mais la gauche est tellement éclatée qu'on ne sait trop qui, finalement, parviendra à porter ce programme. À l'heure où on se parle, on ne sait pas trop qui portera on étendard, au-delà de la seule question des primaires de la gauche. 

    Cela nous conduit à la question du FN, qui voudrait bien occuper le créneau du national-républicanisme, contre le libéral-conservatisme présumé de Fillon. En gros, le FN aimerait représenter la gauche national-chevènementiste contre la droite balladurienne. Le programme du FN mariniste ressemble de temps en temps à celui du défunt CERES auquel on ajouterait la lutte contre l'immigration. Le FN fait un souhait: que l'avenir de la gauche nationale soit la droite populiste. On verra d'ici quelques mois si ce pari était tenable. On sait qu'il n'est pas sans créer des tensions dans ses rangs. 

    [...] Les conservateurs français, comme ceux de partout en Occident, devront accepter une réalité pénible: la reconstruction du monde ne prendra pas qu'un mandat présidentiel, ni deux, ni même trois. C'est une tâche qui dépasse l'horizon politique à court et moyen terme. Ce qui ne nous dispense pas d'y œuvrer. Chaque génération doit savoir qu'elle n'est qu'un maillon dans la longue histoire d'un peuple, même si elle doit jouer chaque fois son rôle comme si l'avenir du pays dépendait d'elle. Car les conservateurs travaillent, pour emprunter les mots du poète québécois Pierre Perrault, pour la suite du monde."

    Michel Janva

    http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html

  • Avec des amis de droite pareils, pas besoin d’ennemis socialistes

    Si les Républicains souhaitent gagner l’élection suprême, il serait pertinent qu’un discours de droite affirmé et solide prédomine.

    Tout a été dit ou presque à propos de la victoire, inattendue selon les médias mais attendue par les électeurs de la France réelle, de François Fillon à la primaire de la droite et du centre. Les mêmes oracles qui prédisaient un succès foudroyant d’Alain Juppé vous expliquaient doctement à la lumière des résultats que l’édile sarthois avait réussi à convaincre le peuple de droite par un discours libéral en économie doublé d’un discours conservateur sur les valeurs. La réalité est plus nuancée que cette approche primaire pour une primaire.

    La vérité est que François Fillon n’a jamais amendé son discours au gré des modes médiatiques, louvoyant çà et là comme ses congénères encartés pour complaire à la dizaine d’éditorialistes subventionnés qui font l’opinion. Poutine, Syrie, avortement, adoption plénière par les couples homosexuels, islam fondamentaliste, pression fiscale, autant de thèmes hétéroclites à propos desquels l’ancien Premier ministre a enfoncé le clou, mine renfrognée sous le sourcil broussailleux. Les circonvolutions juppéesques du deuxième tour n’y ont rien fait, notre champion a triomphé droit dans ses bottes, comme aurait déclaré le maire de Bordeaux.

    Cette victoire implacable n’a pas empêché François Fillon de restructurer l’organigramme des Républicains avec élégance, nommant à des postes stratégiques d’anciens adversaires internes, faisant la synthèse nécessaire au rassemblement de sa famille politique.

    Mais là où le bât blesse, c’est que ces nouveaux opportunistes, passant sans ciller du rôle de procureur à celui d’avocat, conservent leur idéologie de perdant.

    Le roi des équilibristes à retournement de veste est sans conteste Benoist Apparu, nommé porte-parole du nouveau candidat, qui fait surtout profession de porte-parole de lui-même. Ainsi peut-on noter ces formidables allégations tenues ces derniers jours qui font état, suite à l’attentat terrible de Berlin, que « le lien entre attentats et politique migratoire n’a jamais été établi » (sic). Nous sommes là dans la même veine que les propos hors sol tenus par un supporter de Manuel Vals déclarant que « lla plupart des actes terroristes que nous avons dû affronter en France ne venaient pas de migrants mais bien de Français de souche » (sic). Faut-il rappeler que notre girouette prônait également la construction de mosquées avec des fonds publics tandis qu’il votait avec la gauche, comme un seul homme, la loi Taubira. Dans son sillage, Yves Jégo, fort de ses millions de militants de l’UDI, ex-soutien de Bruno-le-renouveau, s’est soudainement réveillé fillonniste mais ne souhaite pas qu’on touche à cette loi.

    Si les Républicains souhaitent gagner l’élection suprême, il serait pertinent qu’un discours de droite affirmé et solide prédomine, conformément au mandat voté lors des primaires, à rebours des éternelles compromissions et soumissions à l’endroit de la tyrannie de la bien-pensance. Cela étant, souvenons-nous du discours musclé de Sarkozy en 2007 s’illustrant quelques mois après avec les très droitiers Bernard Kouchner, Martin Hirsch, Jean Pierre Jouyet, Rama Yade et Roseline Bachelot au gouvernement…

    http://www.bvoltaire.fr/stanislaslepic/avec-des-amis-de-droite-pareils-pas-besoin-dennemis-socialistes,303087

  • Le renouveau de la pensée d’Ernest Renan

    À l’heure où les passions religieuses, de nature irrationnelle et parfois mortifère, s’imposent dans le débat politique quotidien, pourquoi ne pas lire Ernest Renan ?

    Breton, né en 1823 à Tréguier (Côtes d’Armor), dans une famille à la fois terrienne et maritime et descendant d’émigrés gallois, Ernest Renan, destiné à l’Église catholique romaine, développa, plutôt que d’entrer en religion, la libido sciendi, c’est-à-dire la soif de connaître.

    Entre foi et raison, entre dogme et logos, Ernest Renan entreprend une histoire des religions. L’analyse du prophète chrétien dans La vie de Jésus (1863), premier tome d’une Histoire des origines du christianisme qui comprend sept volumes, lui vaut les foudres de Rome. Malgré les qualités recensées de Jésus, qu’il considère plus comme un homme divin qu’un dieu fait homme, La vie de Jésus soulève les passions. Pour Renan, la biographie de Jésus doit être comprise comme celle de n’importe quel autre homme, et la Bible doit être soumise à un examen critique comme n’importe quel autre document historique.

    L’abbé Lambert, qui a personnellement connu Renan lors de son séminaire à Saint-Sulpice, à Paris, déclare s’être lavé les mains après avoir mis le livre au feu… Le pape Pie IX lui-même le déclare « blasphémateur européen ». Le mouvement anti-Renan est puissant mais la diffusion de son ouvrage prend de l’ampleur.

    Entre l’Orient, où est né le christianisme, où il a longuement voyagé et l’Occident européen, Renan retrouve la paix intérieure devant l’Acropole d’Athènes l’année suivante, en 1864. Il adresse une prière au « souverain Jupiter » dont parlait Dante. La Prière sur l’Acropole paraîtra en 1876.

    Profondément européen, il prôna l’alliance de la France avec l’Angleterre et l’Allemagne, anticipant le temps des empires.

    Honni par les cléricaux et les républicains, ce « conservateur libéral » donna à la fin de sa vie (1882, Qu’est-ce qu’une nation ? ), cette célèbre définition de la « nation », véritable « plébiscite de tous les jours » sans oublier le lien entre le peuple qui la compose : « Ce qui constitue une nation, c’est d’avoir fait de grandes choses dans le passé, et de vouloir en faire encore dans l’avenir », affirma-t-il.

    En mai 1892, ce régionaliste avant l’heure (il a publié L’Âme bretonne dès 1854), préside un « dîner celtique » tout en se préparant à la mort. Il quitta son écorce terrestre sans les derniers sacrements.

    Ce membre de l’Académie française (1873), candidat malheureux aux élections législatives de Meaux en 1869, biographe de Jésus-Christ (!) ne mériterait-il pas d’être (re) découvert ?

    Théoricien du nationalisme comme ciment patriotique plébiscitaire, européen avant les guerres civiles européennes du XXe siècle, homme enraciné dans sa Terre dont le discours repose plus sur la raison que la foi, Ernest Renan est à la croisée de l’ensemble de nos questionnements contemporains.

    En 1949, Prosper Alfaric fonda le Cercle Ernest Renan. Cet ancien prêtre, historien spécialiste des religions, fut excommunié en 1933 après avoir publié son ouvrage Le Problème de Jésus et les origines du christianisme pour ses thèses sur l’inexistence historique de Jésus de Nazareth et de Marie. L’œuvre de cet érudit, à l’origine de la plupart des théories mythistes (thèse de l’inexistence historique de Jésus) a été remise à l’ordre du jour par le philosophe normand Michel Onfray qui a préfacé en 2005 la publication d’un regroupement des articles d’Alfaric sous le titre Jésus-Christ a-t-il existé ?

    Depuis sa fondation, le Cercle, sans reprendre la thèse mythiste, poursuit la mémoire, au moins littéraire, du philologue et philosophe breton. Il s’évertue à approcher le religieux de la manière la plus large possible, y compris au niveau géopolitique.

    Les Cahiers d’Ernest Renan viennent de faire place aux « Nouveaux cahiers ». Dans la première livraison (été 2016) des « Nouveaux cahiers », le président du Cercle Renan, Dominique Vibrac, qui vient de succéder à Guy Rachet, nous livre la deuxième partie de sa réflexion sur le thème de Transcendance et immanence dont la première partie est parue dans le dernier numéro des anciens cahiers (le n°273 tout de même…). Roger Warin revient, quant à lui, sur le séjour des Hébreux en Égypte avant la formation des royaumes d’Israël et de Juda et tente de rapporter la preuve de cette présence, condition sine qua non de l’exil emmené par Moïse et de la descente d’Abraham sur cette même terre. Enfin, Terry Bismuth évoque La religion dans le royaume de Juda. Ces deux derniers travaux illustrent la nécessaire étude du phénomène religieux à travers l’histoire, l’archéologie, les sciences…

    Les prochains numéros des Nouveaux cahiers du Cercle Ernest Renan se donnent pour mission l’étude des religions à travers la rationalité scientifique.

    Bien entendu, cet aspect n’aura pas un caractère exhaustif, Ernest Renan fut aussi un homme politique, un défenseur de l’identité celtique, un véritable patriote et un précurseur de l’ensemble européen.

    Les Nouveaux cahiers ne feront donc aucune impasse sur l’homme Renan, qui avait fait de l’Acropole le centre de notre monde.

    Un numéro de la première livraison des Nouveaux cahiers sera adressé sous format pdf pour toute demande à l’auteur de ces lignes : Mail

    http://www.voxnr.com/7334/le-renouveau-de-la-pensee-dernest-renan

  • Livres • Boutang, arpenteur de l’être, un essai de Rémi Soulié

    Christopher Gérard a donné dans Causeur [24.12] une excellente recension du livre de Remi Soulié « Pour saluer Boutang ». Ainsi, après le gros volume que Stéphane Giocanti vient de publier sur Pierre Boutang chez Flammarion, après le numéro spécial de la Revue Universelle, qui a eu un notable succès, et maints articles parus dans de nombreux médias, l'on redécouvre avec un certain émerveillement, étonnement, admiration, celui qui, à la suite de Maurras, fut l'un des plus brillants esprits de la mouvance maurrassienne. Même si son œuvre philosophique et littéraire ne s'y résume pas. Cet article est, de plus, assorti d'une vidéo qui reprend une causerie de Remi Soulié : on l'écoute avec plaisir.   LFAR  

    « Arpenteur de l’être » (Mattéi) ou «prophète d’une âge recommencé des saints et des héros » (Colosimo) ? Deux Jean-François de taille s’accordent pour définir Pierre Boutang (1916-1998) comme un géant. Dans ses Carnets noirs, Gabriel Matzneff a dit la terreur que le bretteur royaliste pouvait inspirer à ses contradicteurs en raison de sa double carrure, musculaire et cérébrale. Fut-il un autre Platon… dans un genre obscur ? Telle est la question qu’évoque un de ses disciples, le Provençal Rémi Soulié, dans un recueil de textes d’une piété quasi filiale. Vers 1990, khâgneux à peine guéri d’une méchante fièvre marxiste (inoculée, il est vrai, par un poète), le jeune Cathare de Toulouse tourne catholique contre-révolutionnaire – d’une chapelle l’autre. Des Rouges aux Blancs, avec le même panache. Soulié peut donc rencontrer Boutang, sur qui il livre aujourd’hui une somme de réflexions parfois profuses, notamment sur sa dette à l’égard de Joseph de Maistre (dont on sait l’influence sur Baudelaire) ou sur son admiration pour Bernanos, qu’il plaçait très haut. Soulié montre bien que l’un des multiples paradoxes du personnage est que, quoique fidèle à Maurras, dont il fut le plus brillant disciple avec Thierry Maulnier, Boutang ne partageait en rien le positivisme maurrassien : l’homme était avant tout théologien.

    La partie la plus personnelle et la plus passionnante du recueil regroupe des fragments de journal de Rémi Soulié, qui fréquenta le maître jusqu’à sa mort. Et quel maître, capable de réciter le Parménide en grec, et Toulet, et Poe, et Scève, tout en ingurgitant des litres de vin (« Le vin, voilà quelque chose que le diable ne peut avoir créé », s’exclame ce drôle de paroissien) et en enguirlandant son disciple à propos de ponctuation, de Guénon (« lointain disciple de Maurras ») ou de l’Eglise, sa « mère ». Ce Grec qui avait trop lu l’Ancien Testament (d’où une prose un tantinet talmudique, bien éloignée de la clarté hellénique), cet inspiré (cet illuminé ?) fascine et laisse perplexe. Un génie, cet obsédé de transcendance absolue qui, paradoxe, trempa dans toutes sortes de complots (le Débarquement allié en Afrique du Nord, l’assassinat de l’amiral Darlan, le gaullisme révolutionnaire) ? Un fumiste ? Mais l’homme créa La Nation française, l’un des (rares) feux d’artifice de l’après-guerre littéraire ; mais il écrivit ce La Fontaine politique, mais il eut l’oreille du vieux Maurras. En vérité, Soulié ne tranche pas ; il rend grâce et hommage – avec une magnifique ferveur.

    Une citation pour la route, à méditer, notamment par les professeurs tentés par le désespoir. A de jeunes royalistes qui l’interrogent sur la « fin » de la France, Boutang répond : « La France finie ! On la connaît depuis longtemps, cette petite histoire. On l’a dit au moment de Jeanne d’Arc, au moment de la Ligue. Lisez le “Procès de Jeanne d’Arc”, lisez “La Satire Ménippée” ! Chaque fois qu’un petit enfant naît, tout recommence. Chaque fois que le langage est présent, tout reprend. Chaque fois que l’on parle français, nous retournons aux sources. »  Vive Pierre Boutang !  

    Pour saluer Pierre Boutang, Rémi Soulié, éd. Pierre-Guillaume de Roux, 140 pages, 21€ 

    Christopher Gérard écrivain

    http://lafautearousseau.hautetfort.com/archive/2016/12/30/livres-boutang-arpenteur-de-l-etre-un-essai-de-remi-soulie-5892673.html