Quand le président algérien réclame à la France dès excuses pour son passé colonial, les libéraux au pouvoir à Paris ne se sentent pas concernés. Ils renvoient cette page de notre histoire à la droite, au prétexte que l'invasion de l'Algérie eut lieu sous le règne du très réactionnaire Charles X. Ils ont bien tort.
Le superbe travail de Jennifer Pitts, à l'érudition parfaite et au style limpide, ne justifie pas pleinement son titre, The Rise of Impérial Liberalism in Britain and France, car elle concentre les deux tiers de son étude à une poignée d'intellectuels anglais et survole le cas français en s'attardant sur Tocqueville, probablement parce qu'il est le Français de cette époque le mieux connu aux Etats-Unis. Le lecteur français aurait aimé un traitement plus équilibré entre les deux nations et une analyse synthétique plus développée. Il n'empêche que Jennifer Pitts, qui enseigne l'histoire des idées politiques à l'université Princeton, dans le New Jersey, démontre bien que la mise sous tutelle par notre continent d'une grande partie du monde non européen n'aurait probablement pas eu lieu si les intellectuels libéraux du début du XIXe siècle ne l'avaient pas appelée de leurs vœux.