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élections - Page 390

  • Faut-il des « Représentants du peuple » ?

    Bernard Plouvier

    Il aura fallu plus de deux millénaires pour que soit, en apparence, mise en application la phrase d’Aristote : « La peuple des citoyens est seul détenteur de la puissance légitime » (in Politique).

    Auparavant, de délicieux roublards usurpaient l’autorité au nom de l’excellence de leur lignée, de leur fortune ou d’un prétendu ordre divin, ou encore par la merveilleuse légitimité d’élections truquées, comme ce fut le cas dans ces « démocraties grecques » ou cette République romaine, qui enchantent les historiens universitaires, oublieux d’un petit détail, minime on en conviendra volontiers. En Athènes, à Corinthe, à Thèbes ou à Rome etc., le bon peuple des citoyens, assemblés par classes de richesse, n’avait que le droit de choisir entre quelques candidats présélectionnés par un Sénat ou tirés au sort par un collège de pontifes… et, comme par hasard, le sort ou la sélection n’amenaient jamais que des noms de riches ou de très riches.  

    Au XIIIe siècle, l’aristocratie, le haut-clergé, l’Université, les municipalités d’Angleterre et du Pays de Galles imposèrent à Jean Sans-Terre une assemblée décidant la levée, l’assiette et la répartition des impôts et disputant au monarque la souveraineté. Ces Communes, composées de riches ou de leurs porte-parole, n’ont jamais prétendu représenter le menu peuple, dont l’avis n’intéressait personne.  

    Manifestement, sur ce dernier point, rien n’est changé dans la plupart des pays dits de « démocratie ». Quelques professionnels de la politique – 600 petits rois-députés et autant de chenus sénateurs, pour l’exemple français ; nettement moins pour l’exemple allemand – tranchent souverainement de problèmes aussi graves que la peine de mort, l’avortement de complaisance, l’immigration d’origine extracontinentale, la destruction du tissu industriel du pays, la défense et le risque d’introduction d’ennemis potentiels au sein des forces armées etc., sans prendre le moins du monde l’avis du souverain légitime : la Nation.

    Alors que l’on ne vienne pas nous dire qu’il est sans importance d’opiner sur le sujet de la représentation du peuple souverain et sur les conditions de sa désignation.

    Dans un monde idéal, la Nation - composée des seuls autochtones et de quelques individus naturalisés après quelques décennies de bons et loyaux services rendus à la Nation souveraine et à l’État – n’aurait qu’à remettre, pour une durée limitée, l’ensemble des pouvoirs à un homme jugé exceptionnel, un être digne de confiance du fait de sa probité et de sa compétence. Dans une telle Utopie, la notion de contrepouvoir ou de surveillance ne se poserait pas : le potentat prendrait l’avis de la Nation pour chacun des grands choix de société. Les rares lecteurs qui ont davantage de connaissances historiques que ceux, innombrables, qui sont intoxiqués par un dogme politico-sociologique ont reconnu la théorie du populisme.

    En pratique, il est fort rare que l’homme providentiel ne devienne pas mégalomaniaque ou ne soit plus ou moins vite exclu du Pouvoir par des rivaux jaloux ou par l’intervention occulte d’une grande puissance prédatrice. Mustafa Kemal fut un populiste très bienfaisant jusqu’à sa mort, étant juste un peu rude avec les allogènes et les fanatiques religieux trop remuants ; Juan Perón et Getulio Vargas furent des exemples de populistes très efficaces, chassés du Pouvoir par les services secrets made in USA.

    Il est évident que les riches et les super-riches n’aiment pas trop les populistes et préfèrent les régimes où les représentants du peuple sont nombreux et influents, capables de plaider la cause des hommes et des femmes d’affaires auprès des nombreux relais administratifs. Comme les media qui comptent sont aux mains des riches, très logiquement, le bon peuple hurle qu’il veut des représentants.

    Longtemps, on décida que seuls les riches étaient intelligents, sages et avisés. En conséquence, ils étaient seuls dignes d’élire ces merveilleux représentants. Ce fut le système censitaire, qu’au XXe siècle, certains techniciens voulurent réactualiser par un système corporatiste de représentation nationale, qui avait au moins en sa faveur la légitimité du travail, d’autant que nombre de ses partisans réclamaient le droit de vote pour les mères de famille élevant leur(s) enfant(s).  

    La mode contemporaine est au suffrage universel, simplement limité par l’âge de la majorité, variable selon les pays. Se pose de ce fait un énorme problème : toutes les voix doivent-elles compter ?

    Dans le cas d’une réponse positive, le bon sens, la logique veulent que l’on tranche en faveur du régime électoral à la proportionnelle intégrale… ce qui fait hurler les sceptiques, qui prétendent que cela multiplie inutilement les partis et n’entraîne que des gouvernements de coalition. À ceux-là, il est simple de répondre qu’en cas de crise majeure de société, l’unité se fait autour d’un seul thème : la survie de la Nation. Hors crise, les avis divergent et c’est naturel. La Ve République française n’a pratiquement eu que des gouvernements de coalition, où une part était presque toujours faite au marécage centriste.

    L’unique différence entre des scrutins à la proportionnelle et des scrutins d’arrondissement, tient à la féodalité qu’entretient ce dernier mode d’élection… et, la nature humaine étant ce qu’elle est, la corruption est d’autant plus grande que les agents corrupteurs peuvent compter sur l’assise de l’élu, soit son emprise sur « son secteur » et sa longévité.         

    Si l’on veut absolument d’une représentation du peuple, il faut déterminer son rôle avec précision : législatif, budgétaire ou surveillance intégrale de l’exécutif, en se souvenant que plus une assemblée joue de rôles différents, plus l’exécutif est faible : c’est le véritable sens du mot jacobinisme. Item, il faut procéder de la façon la plus démocratique qui soit pour sa désignation. Il faut, enfin, limiter la durée d’éligibilité des candidats et décider de ce que doivent être leurs qualifications, en répondant à cette épineuse question : comment un individu qui n’a jamais travaillé efficacement pour la société pourrait-il lui rendre le moindre service ?

    Le système français est indéniablement très mauvais : corrompu, inefficace et inexpert, parce qu’il est composé de professionnels de la politique, de causeurs, d’esbroufeurs et non de citoyens qui ont fait leurs preuves dans le monde du travail. Après tout, si l’on ne veut que du théâtre, il existe de bons professionnels, assurément meilleurs comédiens que les clowns qui s’agitent dans les assemblées et les coulisses.  

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  • Le peuple souverain tranchera!

    Nous l’avons souvent écrit sur ce blogue, Bruno Gollnisch l’a répété à de nombreuses reprises, il convient toujours de lire les enquêtes d’opinion avec le recul nécessaire, ne jamais oublier que le sondage le plus sérieux n’est jamais que la photographie,  à l’instant t,  d’une opinion publique par définition mouvante et instable. La victoire du Brexit, celle de Trump aux Etats-Unis, vécues comme un traumatisme par un microcosme qui n’avait pas su, pas pu ou  pas voulu les voir,  sont à cet égard lourdes de signification. Reste qu’à moins de 80 jours d’un premier tour de la présidentielle plus ouvert que jamais, il est cependant loisible d’apporter quelques crédits aux enquêtes qui enregistrent les contrecoups des révélations du Canard Enchaîné sur la candidature Fillon.

    Le sondage Elabe pour Les Echos  et Radio Classique réalisé lundi et mardi, c’est-à-dire avant la seconde fournée des nouveaux éléments divulgués par l’hebdomadaire satirique,  enregistre un sérieux dévissage pour le candidat de LR et du centre. François Fillon n’est plus crédité que de de 19 % ou 20% (une chute de 5 et 6 points en moins d’un mois), derrière Emmanuel Macron (22-23%) et Marine Le  Pen (26 à 27%) . Benoit Hamon progresserait  fortement (16-17%) au détriment de Jean-Luc Mélenchon (10%).

    Une autre enquête portant sur la présidentielle (Ifop-Fiducial pour Paris Match, iTélé et Sud-Radio)  publiée mercredi indique également une première place du podium pour Marine (24 %), mais François Fillon sauverait sa présence au second tour  (21 %),  talonné par Emmanuel Macron (20 %). Benoît Hamon (18 %) bénéficierait de la plus forte dynamique là aussi, apparemment et cela peut tout de même surprendre, au détriment du chevronné, affûté, bien préparé et aguerri Jean-Luc Mélenchon (9 %) qui avait l’antériorité de la révolte à gauche contre les sociaux-réformistes du PS...

    Rachida Dati, invitée ce matin sur l’antenne de BFMTV,  comme d’autres personnalités de LR ne cessent de le répéter, affirmait que  si François Fillon devait jeter l’éponge, il n’y a pas de plan B. A savoir pas  de candidats de substitution (désignés comment ?, par qui ? le Conseil de LR ? une primaire fermée des adhérents ?) faisant l’unanimité pour remplacer celui qui avait été désigné clairement par la primaire ouverte. Sauf à voir LR imploser, M. Fillon serait condamné à rester dans la course, à moins qu’une mise en examen, ou la  pression de son entourage et des médias se faisant trop forte, il finisse par renoncer comme l’a fait avant lui François Hollande. Un sondage Odoxa pour France Info et Harris Active pour RMC publiés ces dernières quarante-huit heures, indiquent respectivement que 6 à 7 personnes interrogées sur dix pensent que M. Fillon doit se retirer de l’élection présidentielle.

    Pendant ce temps, note Bruno Rayski sur le site Atlantico,  Marine a écrit au CSA « pour demander un peu de rattrapage sur le temps de parole accordé à son mouvement » puisque « la droite et la gauche ont quasiment monopolisé les écrans ces dernières semaines. Primaires obligent, les Républicains et les socialistes se sont goinfrés jusqu’à l’indigestion (la nôtre). Le Front National est, élection après élection, le premier parti de France. Et tous les sondages concordent à dire qu’il en sera de même lors du premier tour de la présidentielle. Cela ne mérite ni amour ni tendresse. Mais au moins le respect élémentaire de la démocratie. Le Front National, que l’on sache, n’est pas interdit. Et c’est librement qu‘il concourt aux suffrages des Français… Le CSA pense autrement. Il a envoyé promener Marine Le Pen en brandissant son mode d’emploi de fonctionnement. La décision du CSA est une décision imbécile. C’est la meilleure façon de montrer aux électeurs du FN qu’ils sont ostracisés, qu’on les tient pour des citoyens de seconde zone. »

    Citoyens Français dont la défiance à l’égard des médias ne se dément pas et atteint même un sommet depuis 1987 si l’on en croit le  dernier baromètre annuel de la confiance des Français dans les médias réalisé pour La Croix par Kantar Public. Seulement  52% des personnes sondées  estiment que les choses se sont passées vraiment ou à peu près (comme la radio)  les raconte (-3 points). Le journal et la télévision accusent, eux, une baisse importante de leur crédibilité, à 44% (-7 points) et 41% (-9 points) : pour plus d’un Français sur deux (55%), il y a des différences ou les choses ne se sont pas passées du tout comme la télévision les raconte. Quant à Internet, 26% seulement des Français font confiance à l’information qu’il relaye, contre une majorité (52%) qui ne la juge pas crédible, retrouvant son niveau de 2006. »

    Pour autant, « Internet progresse malgré la méfiance à son égard » tandis que « l’utilisation de la télévision pour s’informer sur l’actualité baisse : elle concerne moins d’un Français sur deux (48%), 6 points de moins qu’en 2016. (…). Alors que près des trois quarts des Français (73%) n’ont pas confiance dans les informations qui circulent sur les réseaux sociaux et que 83% des utilisateurs des réseaux sociaux disent y avoir déjà repéré des fausses nouvelles ou des rumeurs, certaines  intox» sont vraies pour une grande partie des Français. Parmi elles, celles liées à l’immigration et créées par la fachosphère (sic) sont les plus ancrées.» Peut-être tout simplement parce que les dites intox, ou cataloguées comme telles par Kantar, correspondent  d’assez près au vécu, à la perception , au quotidien de nos compatriotes. En dernier ressort, en démocratie, c’est le peuple souverain, dont les préoccupations, les aspirations seront au cœur de la convention présidentielle de Marine cette fin de semaine à Lyon, qui  tranchera!

    https://gollnisch.com/2017/02/03/peuple-souverain-tranchera/

  • Marine Le Pen très à l’aise face à la presse le 1er février 2017, répondait à « Questions d’Info »

    Marine Le Pen qui caracole en tête des sondages face aux autres candidats de la présidentielle, s’est montrée très sûre d’elle et détendue face à la presse en dépit de questions insidieuses. 

    Elle donne son avis sur l’affaire Fillon et met les points sur les « i » concernant les accusations du Parlement européen contre lequel elle a porté plainte récusant tout amalgame avec l’affaire Pénélope Fillon, dénonçant les manœuvres de l’allemand Schultz, Manuel Valls et Christiane Taubira qui, selon elle, sont derrière cette mauvaise manœuvre.

    Elle est interrogée par ailleurs, en un large tour d’horizon sur tous les sujets de l’actualité:  référendum promis sur la sortie de l’UE dans les six mois après son élection, référendum sur une modification de la Constitution pour intégrer les référendums d’initiative populaire sur tous les sujets à partir de 500 000 signatures. Elle brocarde Macron qu’elle aimerait trouver au second tour face à elle, tant il est caricatural de la gauche mondialiste et immigrationniste, et « les vieux tromblons » qui le soutiennent, comme Jacques Attali et dénonce l’affaire Draghi que Manuel Macron a avaliser « 8 jours seulement après que Montebourg qui s’y était opposé, ait du démissionner ». Elle annonce ses 144 propositions de candidate à la Présidence, qu’elle prend le temps de détailler. Elle présentera son programme prochainement à Lyon. Elle n’omet pas de brosser un tableau du nouvel ordre mondial multipolaire qui est en train de chasser l’ancien, avec un retour au patriotisme, et à la souveraineté des nations, le retour des frontières, le contrôle de l’immigration, Etc.

    emiliedefresne@medias-presse.info

    http://www.medias-presse.info/marine-le-pen-tres-a-laise-face-a-la-presse-le-1er-fevrier-2017-repondait-a-questions-dinfo/68686/

  • Boris Le Lay - Scandale Fillon - Vers le chaos politique en France

  • Emmanuel Macron : la revanche de l’Upper class?

    Nous reproduisons ici l’entretien politique que Jean-Yves Le Gallou a accordé à Alain Hasso de Monde et Vie de février 2017.

    C’est l’occasion de faire un point sur le candidat Macron que les médias veulent imposer à l’opinion dans une démarche à double détente : avant le premier tour démolir François Fillon, après le premier tour diaboliser Marine Le Pen.
    Polémia

    Vous pensez que la montée dans les sondages d’Emmanuel Macron est un phénomène extraordinaire ?

    Je dirais que c’est un paradoxe. Si l’on regarde les grands événements qui ont jalonné l’année dernière, le Brexit en Grande-Bretagne, l’élection de Donald Trump aux Etats-Unis et même, en France, la défaite d’Alain (« Ali ») Juppé à la primaire de la droite, on découvre très vite un point commun : les opinions soutenues par les grands médias ont été défaites par des campagnes en provenance des réseaux alternatifs. Face à ces trois faits, le succès de la candidature de Macron ressemble à un démenti, qui signifierait une sorte de revanche pour l’Upper class mondialisée, dont les grands médias dépendent financièrement. Au lieu d’assister au duel attendu pour le deuxième tour entre Marine Le Pen et le candidat républicain (François Fillon en la circonstance), on va assister dès le premier tour à une polarisation sur trois candidats : Fillon (ou son remplaçant), Macron et Le Pen. Les autres candidats seront d’emblée victimes du « vote utile », que ce soient Dupont-Aignan, Bayrou s’il se présentait, mais aussi, dans une moindre mesure, Mélenchon et même le candidat socialiste issu de la primaire de la gauche, Hamon. Il y a fort à parier que ce dernier sera pressé par les médias de se retirer, pour laisser gagner Macron. Si, ensuite, le choix est donné entre un candidat réactionnaire et « chrétien » (Fillon) et le candidat Front national, Macron voit ses chances se multiplier encore dans ce contexte.

    Qui sont les électeurs potentiels d’Emmanuel Macron ?

    Il peut recueillir des majorités en centre-ville, dans les banlieues, les minorités, et du côté d’une sorte de Marais idéologique rassuré par la perspective du statu quo. D’une certaine façon, c’est le retour de Terra nova, mais avec un homme nouveau, et c’est le point fondamental. Bernard Accoyer a sans doute bien compris cela lorsqu’il a lancé, en comparant Macron au candidat populiste italien : « C’est Beppe Grillo en costume Armani ». Effectivement, cette image est plutôt nouvelle. Elle fait l’unanimité aussi bien de ceux qui veulent un changement de personnel que de ceux qui ne veulent pas courir le risque de mesures fortes, voire radicales.

    Et pourtant Emmanuel Macron n’a pas de programme précis ?

    Il n’a pas de programme mais il est programmé. Je veux dire que son discours est programmé. Il emploie des formules qui sont tout sauf spontanées. Il utilise les méthodes d’analyse et de stratégie politiques encore inédites en France. Grâce au porte-à-porte, il a obtenu des milliers de témoignages sur les grands sujets de notre société et la machine analyse ce corpus, qui fait des dizaines de milliers de pages. Il y avait 4000 volontaires (?)« en marche » dans 6200 quartiers présélectionnés, avec une appli qui recueillait les réponses à des questions simples : « Qu’est-ce qui marche en France ? », « Qu’est-ce qui ne marche pas ? ». Ces méthodes ont été testées aux Etats-Unis lors des campagnes d’Obama. Elles arrivent en France et permettent au candidat qui les utilise de dire… ce que les gens ont envie d’entendre. Il suffit d’un moteur de recherche qui isole et compte les sujets, la manière (positive ou négative) de les aborder, les formules qui reviennent, etc. Le nombre de témoignages (25.000 environ) est beaucoup plus important que dans un sondage ordinaire et les dépositions sont beaucoup plus précises et plus libres. Avec cela, on a comme une sismographie précise de l’opinion, et quand, comme le candidat Macron, on n’a pas de programme, c’est commode, tout est à disposition dans la machine pour que les électeurs puissent entendre ce qu’ils ont envie d’entendre.

    Vous avez raison : Macron n’a pas de programme, mais il a mieux : des formules qui sont tout sauf spontanées car elles sont issues, si basiques soient-elles souvent, des méthodes de stratégie et d’analyse politique qu’une petite start-up française est allée chercher aux Etats-Unis. C’est la politique par algorithmes.

    Vous employez ce terme de « basique ». Si Macron prend leur discours aux électeurs, le résultat ne doit quand même pas être folichon, excusez ce mot…

    C’est pour ça qu’il est bon, Macron ! « Folichon », intelligent, ingénieux, novateur, il n’a pas besoin de l’être : regardez le discours de Quimper, le 16 janvier dernier. Ce sont des truismes, des évidences à la portée de tous. Quand Macron évoque « la France qui se lève tôt au port de Le Guilvinec », il fait du Sarkozy. Et il continue à enfiler des perles, en penchant plutôt du côté de la rhétorique gaullienne : « Imagine-t-on Le Guilvinec ou Lorient sans leurs bateaux de pêche et leurs pêcheurs ? ». C’est De Gaulle s’écriant « Fécamp, port de mer et qui entend le rester ! ».

    Qu’apporte le candidat Macron ? Des solutions ? Jamais. La compréhension de son public : « Les agriculteurs ne demandent pas des aides. Ils disent une chose : on veut pouvoir vivre dignement de notre travail ». Merci aux algorithmes et à la start-up prestataire : voilà une formule empruntée aux électeurs et qu’on sait leur resservir toute chaude. Dans le même registre d’une complicité affichée mais qui n’engage à rien de concret : « C’est un beau mot, “paysan” : les paysans font notre pays ». La vraie question est surtout : Comment peuvent-ils en vivre ? Elle n’est pas posée. Et on se contentera pour finir d’une formule ronflante… et qui me plaît plutôt : « On peut être à la fois profondément breton, puissamment français et sincèrement européen ». Tout le monde a compris ? Tout le monde est content…

    Mais il n’y a pas que cela…

    Il y a aussi un opportunisme souple comme la jeunesse de Macron. Regardez, quand Marine Le Pen enterrait gentiment le 1er mai en en faisant un banquet républicain pour les militants, Macron est à Orléans, la ville de la Pucelle et il dit, lui, ce que Marine aurait dû dire : « Jeanne d’Arc a fendu le Système et rassemblé la France ». Avec, bien sûr, ce message subliminal : Jeanne d’Arc, c’est moi… Dans le même registre, il vient, en ministre de l’Economie, au Puy du Fou, chez Philippe de Villiers. Pas Marine Le Pen…

    On peut multiplier les exemples, et pas seulement à propos de Marine Le Pen. Il plaît, comme je vous l’ai dit, aux bobos, aux banlieues et au Marais impressionné par sa puissance médiatique. Mais il sait avoir, sinon tout un discours, du moins des attitudes adaptées aux Français enracinés voire aux conservateurs et aux identitaires. En France, dans une campagne électorale présidentielle il faut aussi savoir se placer sous la protection tutélaire de hauts lieux. A croire que le banquier Macron a lu Buisson !

    Quelle est sa feuille de route ?

    Le 24 janvier, depuis le Liban, il a déclaré qu’il obtiendrait « plus de 50% » dès le premier tour. En réalité il lui suffit de 25% pour être en deuxième position et, accédant au second tour, pour l’emporter sur Marine Le Pen.

    A vous entendre, Macron est inarrêtable ?

    Face à une telle campagne, la seule campagne possible, celle que les Français attendent, est une campagne à la Trump. Des mots crus et vrais. Pour cela, Fillon est un peu éteint. Marine souffre de la pasteurisation qu’elle s’impose à elle-même. Elle minore trop le sujet central sur lequel le FN a fait son succès : l’immigration et l’identité. Elle veut nous servir une identité light ? Qu’elle n’oublie pas que le créneau est déjà pris, par des gens qui participent à l’establishment, qui en ont le prestige, qu’elle n’a pas.

    Par ailleurs, vous employez le mot : inarrêtable. Il faut préciser que le personnage d’Emmanuel Macron n’est pas au-dessus de tout reproche. Il est tout de même curieux – cela tient du conflit d’intérêts – que l’homme avec lequel il a négocié la vente de SFR au groupe Drahi, Bernard Mourad, soit devenu l’animateur de sa campagne présidentielle. Par ailleurs, les études de stratégie politique que nous évoquions et qu’il a commanditées ne font pas partie de ses frais de campagne. Je hasarderais une question : après Bigmalion, Bigmacron ?

    Si l’on met de côté ces questions financières, comment voyez-vous le jeu électoral de la présidentielle qui vient ?

    C’est l’échiquier de Machiavel qu’on nous prépare, un jeu qui n’est pas à deux mais à trois partis, avec, pour chacun, un intérêt différent. Macron permet d’éviter le choix (vraiment cornélien pour les « Républicains ») entre un catholique affiché (si Fillon surnage) et la candidate du Front national. Il se tient officiellement sur une ligne libéralo-libertaire et immigrationniste et, pour l’instant, il a donc le soutien des grands groupes de médias, le groupe Drahi bien sûr, avec BFM TV, RMC, l’Express et Libération, le groupe Lagardère avec Match, Europe 1 et le JDD, et le consortium Pigasse-Niel-Bergé avec Le Monde, L’Obs et aussi La Vie… Je ne parle même pas du service public, qui soutient Macron. Pour l’instant, ses principaux adversaires lui font la part belle : Fillon fait marche arrière et met en avant comme son propre porte-parole le porte-parole d’Alain Juppé, Benoist Apparu, l’homme qui a fait perdre la primaire à son favori. Quant à Marine Le Pen, elle représente une ligne identitaire et anti-immigration, alors qu’elle n’est ni conservatrice ni identitaire au fond. Elle devrait mettre Philippot à l’ombre et Marion au balcon, mais le voudra-t-elle ? Quant à la gauche socialiste, elle pourrait bien sortir au-dessous du seuil des 5% qui permet le remboursement des frais de campagne. Entre Mélenchon et Macron, il n’y aura plus d’espace.

    Que doit faire chacun des trois membres de cet échiquier machiavélien ?

    Macron a intérêt à mobiliser ses électeurs tout de suite sur une thématique anti-Front. On voit déjà ressurgir les supplétifs stipendiés de Ras-le-Front et des « antifas », qui manifestement reprennent du service. Quant à Fillon (ou son remplaçant), il a intérêt à mobiliser son électorat contre Macron, qui représente « les habits neufs du président Hollande », comme dit Henri de Castries, ou plus simplement : « Hollande en pire ».

    Et Marine a-t-elle une chance de l’emporter ?

    Il faudrait des événements majeurs (attentats ?) auxquels elle apporte une réponse historique et pas « des éléments de langage ». Mais, en tout cas, elle a intérêt, elle, à cibler Fillon, qui prétend être « le seul à pouvoir battre la gauche », parce qu’il lui faut éviter le « vote utile » de la part de ses électeurs de droite ou, tout simplement, anti-socialistes, anti-Hollande.

    Jean-Yves Le Gallou  Janvier 2017

    Propos recueillis par Alain Hasso 31/01/2017

    Source : Monde et Vie, n° 935, février 2017, p. 5 et 6.

    Notes :
    (1) L’échiquier de Machiavel : Macron, Fillon, Le Pen, la triangulaire qu’on nous prépare
    (2) Pourquoi Macron peut gagner
    (3) Le phénomène Macron entre marche triomphale et bulle médiatique

    A lire aussi dans le numéro de février de Monde et Vie le dossier consacré à :

    « Identité : Le bon génie du christianisme », entretien avec Laurent Dandrieu et Erwan Le Morhedec.

    http://www.polemia.com/emmanuel-macron-la-revanche-de-lupper-class/

  • L'anti-parlementarisme en roue libre

    Le scandale Fillon met au net le conflit d'intérêts permanent au sein des assemblées qui sont maîtresses de leur budget en votant les impôts forcés dont elles consommeront les rentrées pour abonder au tonneau de leurs prodigalités. Que l'épouse de M. Fillon ait pu servir de prétexte pour ramasser 831440 euros d'allocations parlementaires au râteau de croupier afin d'acheter un château du XIIè siècle bordé de terres et équipé d'une écurie, laisse les gens sans voix dès lors qu'ils ont compris l'embrouille.
    Le parlement français est typique de ces institutions irréformables qui disent n'en répondre qu'au peuple qui les élit sans imaginer toujours qu'il les nourrit grassement. C'est au sens premier une pourriture de la démocratie, une gangrène gazeuse et puante de la domination d'une caste sur les hommes de bonne volonté qui se lèvent chaque matin pour créer de la valeur ajoutée que l'Etat de ces messieurs confisquera ensuite à hauteur de 57% ! Ce n'est pas être méchant que de dire ça, mais simplement clinique. Les exemples sont si nombreux dans tous les rangs de l'hémicycle que personne n'en demande plus le décompte.

    M. Fillon est un politique moyen, grimpé sur les épaules de Joël Le Theule (un ami du notaire Fillon) qui eut la bonne idée de vite casser sa pipe, et qui a navigué dans la facilité jusqu'à Matignon où le nouveau président hongrois de la République avait besoin d'un collaborateur zélé et obéissant. A preuve, au sortir du quinquennat perdu, il se parachutait de lui-même sur la circonscription la plus facile du royaume où peut être élu un cheval s'il est blanc ! Nathalie Kosciusco Morizet aura bien du mal à conserver l'investiture sur la Deuxième de Paris maintenant que son mentor a rejoint les greniers de l'histoire de France. Elle mérite mieux qu'une prébende hippiatrique. N'oublions jamais que M. Fillon est mort politiquement de n'avoir pas compris l'amoralité de sa situation, se réfugiant dans un déni ridicule aboyant au complot institutionnel derrière le mince paravent de la légalité de ses appétits démesurés. Que nos princes en prennent de la graine et recentrent leurs soucis sur le Bien commun de la nation, leur propre image, l'insoupçonnabilité de leurs mœurs et n'en sortent pas, quelles que soient leurs tentations et les conseils indulgents de l'entourage. Nous aurons eu un mal de chien à restaurer une monarchie et nous n'accepterons pas de voir le projet ruiné par légèreté, inconséquence, courte-vue ou la chasse à l'éléphant.

    S'il y avait eu coup d'Etat instutionnel, ce serait à coup sûr contre le parlement et ses dérives tribales, sa gabegie, ses satrapies. Elle est bien oubliée la nuit du 4 août 1789. Les privilèges ont été augmentés régulièrement par le système d'autonomie incontrôlable des assemblées, jusqu'à devenir de la corruption pure et simple... mais légalisée par les règles internes du conclave. Certains programmes pour la présidentielle prévoient de réduire le nombre de députés. D'aucuns jugent le bicamérisme hexagonal dépassé par l'assemblée européenne et les institutions d'éthique que sont la Cour européeene des droits de l'homme de Strasbourg et La Cour de justice de l'Union européenne de Luxembourg. Beaucoup demandent qu'on fasse l'économie symbolique du cimetière des amis d'amis et autres seconds couteaux ou nécessiteux en supprimant carrément le CESE. Royal-Artillerie a fait la démonstration en son temps que 300 députés (contre 577 aujourd'hui) suffiraient amplement à voter le budget de la nation et à légiférer. Si nous sortions complètement des institutions européennes par le Frexit, une chambre haute de réflexion que l'on pourrait appeler encore Sénat servirait de miroir à la chambre basse, avec un maximum de 90 sénateurs (contre 348 aujourd'hui) pour bien représenter l'outremer et les expatriés. Notre représentation parlementaire ramenée à 390 élus serait encore supérieure proportionnellement à celle des Etats Unis d'Amérique. Mais que de temps gagné, de paperasse et d'argent économisé ! Maupéou taperait dans sa boîte.

    On me dit dans l'oreillette que la destination des palais nationaux est à prévoir en queue de trajectoire de la grande purge parlementaire. Laissons de côté le Palais Bourbon et ses 300 cabinets d'élus, ils auront un peu plus de place. Quant au palais du Luxembourg, il deviendra la résidence de la famille royale revenue à Paris et son hémicycle un grand théâtre de Guignol & Gnafron que l'on transfèrera du jardin où il manque de place. Quant au Sénat, si nous le remontons à 90, il emménagera dans les locaux du CESE au palais d'Iéna après en avoir rénové la cantine. Ne se sent-on pas déjà mieux ?
    Reste à abattre la République ! Les Républicains s'y emploient. Que du bonheur !

    L'in-cauda du lendemain

    Si on développe l'hypothèse (non-vérifiée) que Pénélope Fillon ne savait rien des contrats d'attache parlementaire sur lesquels elle figurait, tout s'accorde, y compris son air parfaitement innocent au meeting du Zénith à Paris, où elle nous montre un visage grave et les yeux humides qui semblent dire :
    « Mais que nous arrive-t-il, mon Dieu ?»

    A Sablé-sur-Sarthe, elle s'occupe des chevaux, des cookies, du vide-grenier, croise des paroissiens qui peuvent lui demander de passer le bonjour ou une sollicitation à son mari. Elle ne semble pas savoir non plus que le maire de Sablé-sur-Sarthe est taxé de 10000 euros pour occuper le siège de député laissé vacant par son mari. Qu'elle ait rédigé sous pseudonyme deux petites notes de lecture pour la Revue des Deux Mondes d'un ami de François n'ajoute et n'enlève rien pour ce qui la concerne ; elle y est inconnue. On comprend à la fin son "je ne savais pas".

    Mais c'est une autre histoire pour François Fillon dont les opérations de syphonnage avoisinent le million d'euros, en sus de ses traitements tous frais payés de parlementaire ou ministre selon les époques.
    Le château était-il si délabré ?
    Les yeux dans les yeux ?
    [02.02.2017-13:42]

    http://royalartillerie.blogspot.fr/

  • Les « anti Trump » hystériques : républicains et démocrates, mais pas trop !...

    Certes, ce n'est nullement un argument « politique » en soi, ni même une réaction qui monte très haut ou va très loin : il n'empêche, nous nous permettrons, ici, de trouver jubilatoire, dès qu'on évoque Donald Trump, la rage froide, qui confine à l'hystérie, de tous ces journaleux, ces bobos, ces hommes politiques de gôche (évidemment), ces soi-disant artistes (chanteurs ou autres) qui viennent clamer leur « consternation » et leur « peur » devant les micros tendus par des mains qui tremblent, d'effroi ou de rage, on ne sait.

    Evidemment, il faut leur reconnaître une excuse, à ces politiciens et journaleux du Système français, gangrené jusqu'à la moelle : voir un président élu sur un programme qui applique ce programme, cela ne leur est pas arrivé depuis longtemps. Au point de les choquer à l'extrême. Comment ça, vous faites ce que vous avez dit ? Mais, quelle horreur ! C'est pas du jeu ! Ah, non, ça ne va pas du tout ! Pour un peu ils nous sortiraient que ce n'est pas... démocratique !

    Souvenez-vous : c'était, il n'y a pas si longtemps, en 2007. Sarkozy venait de se faire élire brillamment sur un programme résolument « de droite ». Aussi sec, il nous colle six « ministres d'ouverture » de gauche, dont l'un - Bernard Kouchner - au poste prestigieux et importantissime des Affaires étrangères !...

    Souvenez-vous : c'était, il y a encore moins longtemps, en 2012. Hollande se fait élire en disant que son ennemi, c'est la Finance et qu'il fera « payer les riches ». Les classes moyennes et les centaines de milliers de foyers qui ne payaient pas d'impôt sur le revenu, avant, et le payèrent en 2013 se souviennent encore du matraquage fiscal de l'année suivante. Et les élus socialistes se souviennent encore du quinquennat fort peu « socialiste » pour eux qui s'ensuivit : un grand nombre d'entre eux en devinrent... « frondeurs » ! 

    Alors, vous pensez, un président élu pour faire quelque chose et qui le fait, avouons-le, ça surprend ! En tout cas, ça les surprend, eux, les journaleux, bobos, gauchos et compagnie.

    Parmi tous les décrets abominables (pour eux) qu'a osé signer le nouveau président des Etats-Unis, c'est le dernier qui a le plus fait hurler : interdire l'entrée aux Etats-Unis des ressortissants de sept pays musulmans (Syrie, Irak, Iran, Yémen...), entrée par ailleurs permise, si ces ressortissants sont chrétiens. 

    A juste titre, Trump déclare vouloir d'abord être pleinement renseigné sur la personnalité de ceux qui demandent l'asile : on ne voit pas, là, quoi que ce soit de déraisonnable; encore moins de critiquable et, a fortiori, condamnable.

    Qu'à cela ne tienne : la logique, le bon sens, la prudence la plus élémentaire, le politiquement correct qui règne quasi en maître chez nous n'en a cure. Il perd du terrain, malgré tout, et cela l'inquiète, d'où sa rage, mais il continue, imperturbable, à décréter le bien et le mal, à dire où se trouve l'un, où est l'autre. Et, donc, il critique, il condamne...

    Ainsi, Hollande le mou, le nain politique, a même osé demander au Président des Etats-Unis (dont la puissance est tout de même un petit peu supérieure à la sienne, non ?) d'abroger ce décret !

    Que dirait-on - chez les bobos, gauchos et autres trotskos de service - si le chef d'un Etat musulman demandait à la France d'abroger la loi sur le mariage pour tous, au motif que, dans la plupart des pays musulmans, l'homosexualité est réprimée, parfois punie de mort ? 

    http://lafautearousseau.hautetfort.com/

  • Pour que la droite retrouve sa liberté, elle doit réduire les interdits édictés par la gauche

    Suite de notre entretien avec François Bousquet sur son ouvrage, La Droite buissonnière (première partie à retrouver ici) :

    6a00d83451619c69e201b7c8d12e68970b-250wi.jpg4) Patrick Buisson est l'un des penseurs de la fameuse droite HLM (hors les murs). Mais, depuis les primaires LR, on peine à voir l'espace politique de cette droite HLM. N'est-elle qu'un concept culturel ou peut-elle aussi avoir une existence politique et même électorale ?

    Sur le papier, le scénario était séduisant, manquait seulement une tête d’affiche électorale pour lui donner corps dans cet espace politiquement inoccupé qui va de Laurent Wauquiez à Marion Maréchal Le Pen. La droite hors les murs a vécu, faute de personnalité susceptible d’en porter le projet. Il s’agissait dans l’esprit de Buisson de conjurer le spectre du régime des partis et de créer les conditions d’une candidature hors les murs. Lui et d’autres ont pu imaginer un temps qu’une initiative portée par les réseaux sociaux pourrait accoucher de ce candidat. Mais si l’initiative populaire ne manque pas de vertus, elle n’a pas celle de créer ex nihilo un homme providentiel. Si politiquement parlant la droite hors les murs a été un échec, il en va différemment métapolitiquement. La troïka, Zemmour, Villiers, Buisson, collectionne les succès de librairie et les « unes » de magazine. Faute de mieux, tous les trois œuvrent seulement dans le champ culturel, mais avec une force de frappe médiatique et éditoriale redoutable.

    5) Le positionnement de Patrick Buisson est étrange : il semble plongé dans la politique électorale et déclare, dans le même temps, que le seul combat qui l'intéresse est le combat culturel. Comment concilier ces deux axes stratégiques ?

    Les deux ne sont pas incompatibles. Une des singularités de Buisson, c’est d’être à la croisée de plusieurs disciplines habituellement étanches les unes aux autres : le monde des idées, le journalisme, le conseil politique, l’ingénierie des sondages. Cette rencontre, à l’interface de la pratique et de la théorie, fait son originalité. Il aurait pu se contenter d’être un spécialiste de la carte électorale, mais il y ajoute sa connaissance du temps long et l’éclairage de l’histoire des mentalités, ce qui donne à ses analyses une profondeur de champ qui fait généralement défaut aux commentateurs de la vie politique. Cela étant dit, l’essentiel demeure pour lui le combat culturel. Il a repris à la Nouvelle Droite et à Alain de Benoist l’idée d’un gramscisme de droite, du nom du théoricien italien marxiste qui a théorisé le concept d’hégémonie culturelle, préalable à la prise du pouvoir politique. C’est cette perspective du combat des idées qui est prédominante chez lui et c’est dans une dynamique typiquement gramscienne qu’il a inscrit son action auprès de Sarkozy. Si d’un mot on doit résumer les enjeux de la ligne Buisson, c’est de s’être donné pour mission de réduire le périmètre de l’interdit. En clair : est souverain celui qui maîtrise le champ symbolique des interdits, celui qui a le pouvoir de dire le licite et l’illicite. La souveraineté politique procède de cette souveraineté symbolique, pour l’heure propriété exclusive de la gauche morale, culturelle et institutionnelle. Tout le travail de Buisson auprès de Sarkozy aura consisté à réduire cet avantage moral et à délester la droite de son « surmoi » gauchiste.

    6) Il est beaucoup question de « droitisation » de la vie politique ou de mouvement « dextrogyre ». Pourtant, la gauche paraît toujours très forte et la droite très éloignée de ses valeurs traditionnelles (même François Fillon qui a manifestement séduit l'électorat « conservateur » tient à manifester qu'il est prudemment éloigné…). Cette droitisation n'est-elle pas un fantasme ?

    La droitisation est agitée comme un épouvantail par la gauche pour dénoncer les « paniques morales » qui affecteraient les droites. Il n’empêche : difficile de contester ce mouvement dextrogyre. C’est Guillaume Bernard qui a lancé l’expression. Buisson préfère parler de dextrisme, image renversée du fameux sinistrisme observé par Albert Thibaudet et qui, depuis la Révolution, décrit le glissement à gauche de la vie intellectuelle. À la droite, le style (et lui seul), disait Thibaudet. À la gauche, tout le reste, qui se réduit aujourd’hui à peau de chagrin. De toute évidence, la gauche touche à la fin d’un cycle historique. Dans tous les cas, la promesse d’égalité dont elle était porteuse n’a plus lieu d’être. La gauche articulait l’idée de justice sociale et celle de progrès. Deux mythes, celui de l’égalité et celui du progrès, l’un et l’autre en crise. Il s’est peut-être produit en politique ce qui se produit à intervalles réguliers, mais très lointains, au niveau du champ magnétique terrestre : une inversion des pôles. On n’en voit pas les effets immédiats, sinon à travers la poussée des populismes, parce que ses effets se déploient dans le temps long et se heurtent à une fin de non-recevoir de la part du pays légal, où l’emprise de la gauche et sa rente de monopole dans les médias, la culture et l’enseignement sont pour ainsi dire totales. C’est elle qui sermonne et qui exclut suivant un processus de raidissement idéologique connu. Quand le temps des théologiens est révolu, vient inévitablement celui des exorcistes. D’où les rituels de conjuration collective, les procédés d’hystérisation, les épurations sémantiques.

    7) À beaucoup d'égards, le phénomène Macron est une sorte d'antithèse de la « ligne Buisson ». Comment interpréter ce phénomène qui, d'une part récuse le clivage droite-gauche si important dans les analyses de Patrick Buisson, et d'autre part semble totalement « hors-sol », aussi éloigné que possible du peuple français ?

    Macron apparaît comme la réponse du système à la montée des populismes, sur le modèle des coalitions à l’allemande, dont il aimerait incarner la version hexagonale, renvoyant les populismes dos à dos dans un isolement sans issue. Ce à quoi on assiste, bien plus qu’au dépassement du clivage droite-gauche, c’est à la reconstitution de l’unité philosophique des deux libéralismes, l’économique et le culturel, dont l’œuvre de Michéa retrace depuis vingt ans la généalogie. Macron en est incontestablement la déclinaison française. Il répond à la nouvelle sociologie électorale des grandes métropoles, une population intégrée à la mondialisation, qui a tourné le dos à la France déclassée et majoritaire pour épouser la cause des minorités et imposer son agenda politique sorti tout droit des Femmes savantes et des Précieuses ridicules, où Bélise, Philaminte et Trissotin (le trois fois sot) dissertent du sexe des genres. Il ne faut pas désespérer : si Molière a triomphé des pédants, le sens commun devrait pouvoir retrouver droit de cité dans les années qui viennent.

    http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/2017/02/pour-que-la-droite-retrouve-sa-libert%C3%A9-elle-doit-r%C3%A9duire-les-interdits-%C3%A9dict%C3%A9s-par-la-gauche.html

  • Il n’y aura pas de victoire électorale sans alliance des conservateurs et des populistes

    A l'occasion de la sortie de son ouvrage, La Droite buissonnière, François Bousquet a bien voulu répondre à nos questions.

    6a00d83451619c69e201b7c8d12e68970b-250wi.jpg1) Vous venez de publier « La droite buissonnière ». Mais, avec la défaite de 2012, la « ligne Buisson » n'est-elle pas définitivement enterrée ?

    Les circonstances et le choix des hommes font que cette « ligne Buisson » n’est plus aujourd’hui à l’ordre du jour, du moins si on ne retient d’elle que son efficience électorale. Cette ligne reposait sur une stratégie de désenclavement sociologique de la droite, en faisant le pari d’agréger au bloc conservateur traditionnel, principalement catholique, le vote populaire, celui de la France périphérique décrite par le géographe Christophe Guilluy. Les précédents historiques ? La création du RPF en 1947 et de Gaulle en 1958. François Fillon a fait un autre choix, ce qui n’est sans poser problème sur la crédibilité de sa candidature, dont il n’est pas dit qu’elle aille à son terme, et sur ses chances de succès. Il fut un bon candidat à la primaire, il est d’ores et déjà ce mauvais candidat à la présidentielle qui menace de ramener la droite de gouvernement à son étiage chiraquien, autour de 20 %, là où la « ligne Buisson » avait porté Sarkozy en 2007 à plus de 30 %. On verra ce qu’il adviendra au printemps 2017. Mais il est probable qu’il n’y aura pas à l’avenir de victoire électorale sans alliance des conservateurs et des populistes, ce dont Sarkozy avait fini par se laisser convaincre pour des raisons d’opportunité (ou d’opportunisme) électorale, sans jamais songer à donner à cette ligne la moindre réalité politique. La Cause des peuples est suffisamment éloquente sur le sujet.

    2) La droite française semble orpheline. En 2017, elle semble devoir choisir entre un vote populaire FN, qui rejette de nombreux fondamentaux de droite, et un vote LR, assez éloigné des préoccupations populaires. Dans ce contexte, comment comprendre la permanence de la « ligne Buisson » ?

    Il faut croire que cette ligne est majoritaire dans le pays et c’est tout le paradoxe de la présidentielle de 2017 : rarement l’offre politique aura aussi peu coïncidé avec la demande du corps électoral. À lire les enquêtes d’opinion, dont le baromètre annuel Kantar TNS-Sofres sur l’image du FN, près de deux tiers des Français plébiscitent les questions culturelles, identitaires et sécuritaires, mais sans le FN pour presque deux tiers d’entre eux. Autrement dit, les Français veulent bien du message, pas du médium. C’est dans ce hiatus que s’est glissée la « ligne Buisson ». Jusqu’à quand un électorat orphelin acceptera-t-il de ne pas être représenté ou sous-représenté ? Ou inversement jusqu’à quand des partis politiques pourront-ils survivre sans s’adresser à une majorité susceptible de les porter au pouvoir et de les y reconduire ? Révolte des élites contre le peuple d’un côté, révolte du peuple contre les élites de l’autre. Ce fossé, dont le populisme n’est qu’une des traductions, se retrouve au sein même des partis politiques, entre des appareils recentrés et des bases radicalisées. Une telle situation n’est pas appelée à perdurer, la nature politique ayant elle aussi horreur du vide, mais c’est présentement la nôtre. Il n’y a pas à l’heure actuelle d’homme ou de femme politique en situation d’incarner cette France à la fois conservatrice et populiste.

    3) Le quinquennat Hollande a notamment été marqué par les grandes manifestations contre la loi Taubira, dont Patrick Buisson a pu dire qu'il s'agissait d'un mouvement « populiste chrétien ». Les deux termes ne sont-ils pas antinomiques ?

    L’expression est en effet venue dans la bouche de Buisson à l’occasion de la Manif pour tous. Il s’agissait à ses yeux de donner un prolongement politique au mouvement – Buisson évoquait une « phase que décrivait Lénine de politisation de catégories jusque-là réfractaires ou indifférentes à l'égard de la chose publique » – de façon à ce qu’il ne reste pas cantonné aux seules manifestations, comme le mouvement en faveur de l’école libre en 1984. À l’époque, la « rue » catholique avait certes eu raison de la loi Savary, mais sans droit de suite ni donner lieu à une réflexion de fond sur le type de société à envisager. C’est tout l’inverse qui s’est produit avec la Manif pour tous. Gaël Brustier a pu parler de Mai 68 conservateur. Défaits au Parlement, les manifestants ont peut-être enclenché un processus au long cours, en ouvrant une réflexion sur l’écologie humaine, le principe de la limite, la durabilité de notre modèle économique, la marchandisation des rapports humains. Tel est du moins le vœu de Buisson, qui guette le retour d’une droite porteuse d’une critique de l’anthropologie du libéralisme, anthropologie qui repose sur l’octroi quasi indéfini de droits aux uns et aux autres, du mariage gay à l’homoparentalité. Cela dit, l’expression « populisme chrétien » peut surprendre. Buisson semble y avoir renoncé depuis. Du populisme, la Manif pour tous avait surtout le spontanéisme initial, en mouvement issu de la société civile, rejoint par un épiscopat en ordre dispersé et des politiques qui n’avaient pas l’imprimatur de leur parti. Dans La Cause du peuple, Buisson préfère plutôt parler d’une politique de civilisation adossée au christianisme, élément central de l’identité européenne.

    A suivre

    http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/2017/02/il-ny-aura-pas-de-victoire-%C3%A9lectorale-sans-alliance-des-conservateurs-et-des-populistes.html