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Europe et Union européenne - Page 1049

  • Recensement : la société britannique est plus diversifiée

    Quelques chiffres issus du « recensement le plus rigoureux » jamais établi en Angleterre et au Pays de Galles ont été dévoilés mardi (infographies du Guardian). Cet inventaire, que produit l'Office national des statistiques tous les dix ans, a été envoyé à plus de 26 millions de foyers anglais et gallois le 27 mars 2011.

    Il montre notamment que la part des personnes nées hors du Royaume-Uni et y résidant a augmenté de plus de 50 % par rapport à 2001, portant le nombre d'immigrés à 7,5 millions, soit 13,4 % de la population (Daily Telegraph). La communauté indienne est désormais la plus représentée, suivi des Polonais (+ 500 000 par rapport à 2001) et des Pakistanais (BBC).

    Blancs minoritaires à Londres

    Si 91,3 % de la population britannique était blanche en 2001, 86 % l'est dix ans plus tard, et The Independent note que 44,9 % des Londoniens sont blancs, passant de 4,3 à 3,7 millions en dix ans, ce qui fait de la capitale britannique la première région du pays où les Blancs sont minoritaires.

    Outre l'amélioration de l'éducation (les diplômés universitaires sont désormais plus nombreux que les personnes n'ayant aucun diplôme), et le déclin du nombre de personnes propriétaires de leur logement (en chute pour la première fois depuis le lancement des recensements, il y a soixante ans), les résultats les plus frappants sont du côté de la foi.

    Même si le christianisme demeure la première religion, avec 33,2 millions de fidèles (59 % de la population), le Financial Time note que c'est le seul culte à avoir perdu des adeptes (près de 4 millions). L'islam a 2,7 millions de représentants (un million de fidèles supplémentaires), et les athées sont 6 millions de plus qu'en 2001, soit un quart de la population (Washington Post). Le Guardian rapporte que les chrétiens devraient être minoritaires en 2018.

    Le Monde.fr
    12/12/2012

    Voir aussi : Le Chiffre : Un enfant britannique sur quatre naît de mère étrangère.

    15/11/2012 http://www.polemia.com

  • Bloc identitaire, Riposte Laique, Myriam Picard, Lionel Lucas

  • Un Nobel de la paix bizarre

    Du discours d'Herman Van Rompuy à Oslo aujourd'hui je n'ai retenu que cet aphorisme choc : « En paix, les fils enterrent leurs pères. En guerre, les pères enterrent leurs fils ! » Hérodote d'Halicarnasse (484-420). Tout le discours que j'ai suivi sur Euronews magnifiait la pacification européenne par ses institutions communes. L'exercice était un peu convenu en remerciement du prix Nobel de la Paix attribué à l'Union européenne. Disons en passant, que le discours était de haute tenue et que le président Van Rompuy le délivra sans lire ses notes, ce qui pour nous Français est un véritable exploit, habitué que nous sommes à regarder nos politiciens de rencontre lire leur papelard pour juste nous dire bonjour. Le dernier en date fut M. Fillon, infoutu de dire sa colère de mémoire à la sortie de la Cocohée ; laissons ces bafouilleurs ! Beaucoup ont découvert leur Rompuy ce lundi (Van Rompuy à Oslo en version intégrale).

    R. Schuman

    L'Union est-elle la paix par elle-même, ou bien fut-elle créée par la paix ? Celle des cimetières. La question mérite débat. On rappellera avec profit que la collaboration franco-allemande était dans les cartons dès l'entre-deux-guerres mais que la grande dépression et le revanchardisme allemand en vinrent vite à bout. D'où l'idée de Robert Schuman après-guerre de ne pas en avoir. Marcher avant de penser ; et on construisit la CECA (Communauté européenne du charbon et de l'acier) qui ne se superposait pas aux offices mercantiles nationaux mais les remplaçait pour tout ce qui était commercialisation de ces produits, bases d'armement n'oublions pas. Génial, mais si quand même !
    C'est aussi ce qui se passa au départ de De Gaulle en 1969, alors que la relation franco-allemande était quasiment évaporée dans nos rêves de grandeur (comme beaucoup de projets grandioses de l'époque) : Pompidou, l'auvergnat pragmatique, lança l'Airbus et un réseau de satellites de télécommunications européens laissant à d'autres plus tard les envolées lyriques. On notera d'expérience que plus on célèbre le "couple" franco-allemand moins on en fait. Nous sommes en phase de basse conjoncture, la RFA équilibre tous ses comptes publics à la fin de l'année quand la France des trois déficits entre en récession au même moment. Berlin rééquilibre donc la relation à son profit (EADS) avant de passer à autre chose...

    Camp Bondsteel - huile sur toile de Céline Germès

    Si la paix a créé l'Europe-institution, il est difficile de prétendre que celle-ci ait renvoyé l'ascenseur. La guerre de désintégration en Yougoslavie a démontré que le Soft Power tant vanté avait l'esprit très venté. A quoi nous servaient ces magnifiques corps d'armée couleur "vert et boue" si nous ne savions pas forcer la paix sur nos marches ? Nous sommes repartis comme en 1916 chercher les Sammies pour y mettre bon ordre, alors que nous avions tout sous la main... sauf la cohésion mentale. Et de nous plaindre ensuite qu'ils n'en aient fait qu'à leur tête, en dépeçant la Serbie pour sécuriser leur camp retranché Bondsteel au Kosovo. Cette pusillanimité bruxelloise et les antagonismes rémanents entre anciennes puissances, en dépit des grands principes proclamés à jet continu urbi et orbi, a conduit les nouveaux pays libérés à se jeter immédiatement dans le dépôt de candidature à l'Alliance atlantique, seule garantie sérieuse d'avenir à leur yeux. De bons esprits un peu seuls plaident pour une défense européenne dont aucun des nouveaux venus ne veut !
    Si demain, pour une raison imprévisible, mais de celles qu'engendrent les états de forte tension sociale, la Grèce et la Turquie se prenaient à la gorge, on peut parier que l'Union européenne ne proposerait rien de plus qu'une séance de pré-conciliation, doublonnant (même pas) avec les discussions musclées qui auraient lieu au siège de l'Alliance à Bruxelles. L'Union ne "fabrique" pas la paix, désolé, Mister Président.

    http://royalartillerie.blogspot.fr

  • Florange : quand la République trahit les travailleurs.

    La lamentable affaire de Florange est révélatrice des risques et des conséquences d’une mondialisation bien ordonnée quoique l’on en dise (en particulier dans le désarmement du politique face à l’économique – ou prétendu tel…) et fort peu sociale (ce n’est pas son problème, pourrait-on dire ironiquement !), et de l’impuissance, voire pire, d’une République qui, désormais, n’est plus que la gestionnaire zélée et « réaliste » du « désordre établi », selon l’expression d’Emmanuel Mounier, personnaliste chrétien qu’il serait sûrement bon de relire au-delà de ses engagements circonstanciels et, parfois, opportunistes.

    En effet, la mondialisation n’est pas que le simple échange apparemment neutre de biens matériels ou virtuels, et la libre circulation de personnes sur toute la planète désormais accessible en tous ses lieux, mais aussi, surtout peut-être, la mise en concurrence des producteurs et, en particulier, des travailleurs, dans la recherche du meilleur profit pour l’industriel ou l’actionnaire de l’entreprise : à ce jeu-là et suivant ses règles qui ne sont guère au bénéfice des faibles ou des « petits », les ouvriers français sont, aujourd’hui, forcément perdants… Ils sont considérés comme des « privilégiés » (sic !) en termes de rémunération et de protection sociale au regard de leurs collègues chinois, roumains ou indiens, et, de ce fait, si peu compétitifs aux yeux des experts autoproclamés de l’économie, et donc, condamnés à plus ou moins court terme au chômage qui sanctionnerait leur absence de flexibilité et leur coût trop élevé. Cette mondialisation-là (mais il n’y en a pas d’autre à ce jour !), c’est le moins-disant social maître du jeu et légitimé par cette fameuse « liberté du travail » qui, depuis 1791 en France, empoisonne les rapports sociaux et « opprime les ouvriers », selon l’expression des catholiques sociaux du XIXe siècle qui dénonçaient le libéralisme économique à la base de cette mondialisation comme « le renard libre dans le poulailler libre ».

    Face à la mondialisation qui est, en fait aussi, une véritable idéologie et non seulement une réalité économique (qui, comme toute réalité, préexiste à sa possible remise en cause et éventuellement « mise au pas »…), la République semble impuissante, et les derniers événements de Florange, socialement dramatiques, le prouvent à l’envi, de façon presque caricaturale même. Impuissante, vraiment ? Non, soyons juste, pas autant que cela ! M. Montebourg, tout aussi isolé soit-il dans ce gouvernement de M. Ayrault, a montré qu’il n’y avait pas de fatalité mais plutôt des renoncements, voire des reniements qui, il faut le reconnaître, ne sont pas de son fait mais bien de ceux qui l’ont désavoué pour satisfaire aux féodalités financières et économiques mondialisées. L’idée d’une nationalisation temporaire que le ministre du Redressement productif avait émise n’était pas absurde ni irréalisable et aurait, en définitive, coûté moins cher que la crise sociale qui s’annonce et la désindustrialisation qui, elle, est déjà bien là, conquérante et dévastatrice.

    La République, aujourd’hui, trahit les travailleurs et, au-delà, le Travail français, s’abandonnant à une mondialisation qui n’est heureuse que pour ceux qui en ont les moyens et en acceptent les principes au détriment des réalités et des enracinements nationaux et sociaux. Les réalités, ce sont ces hommes de Florange qui, les poings serrés, entendent le Premier ministre s’en remettre à la bonne volonté de M. Mittal, sinistre oiseau de mort et charognard tout à la fois qui rachète les entreprises pour mieux les dépecer sans égard pour ceux qui y travaillent et en vivent. M. Ayrault, mais aussi MM. Moscovici et Sapin, sont de bons petits soldats d’une mondialisation dont ils savent pourtant le coût pour ce pays et ses ouvriers : mais ils croient en la mondialisation libérale-libertaire comme d’autres (ou eux-mêmes, hier…) croyaient en l’advenue du paradis socialiste en d’autres temps ! Leur foi est plus forte que les cris de colère des sidérurgistes de Florange, plus vive que la douleur des familles sacrifiées sur l’autel de la compétitivité, plus terrible que les larmes de ce syndicaliste furieux de la trahison de ce gouvernement si peu politique de M. Ayrault…

    Ce n’est pas de moyens dont manque ce gouvernement mais de courage, d’ambition : l’impression qu’il dégage est celle d’une certaine indifférence à la France, comme si celle-ci était condamnée à n’être plus qu’une pièce du puzzle de la mondialisation entre les mains de financiers et de technocrates qui se voudraient les maîtres d’une « gouvernance » si peu politique.

    Ce renoncement de la République à porter une parole originale française dans le monde et face à la « fortune anonyme et vagabonde » (qui, pourtant, n’est pas si anonyme que cela quand elle porte le nom de Mittal), ce n’est que la confirmation de ce que les royalistes français disent, parfois maladroitement mais néanmoins à juste titre : la République ne mérite pas la France et la France mérite mieux que la République…

    http://www.nouvelle-chouannerie.com

  • Robert Steuckers : Entretien pour le journal Hrvatsko Slovo

    Propos recueillis par Tomislav Sunic
    1. Quelle est votre carte d'identité?
    Je suis né en 1956 à Uccle près de Bruxelles. J'ai été à l'école de 1961 à 1974 et à l'Université et à l'école de traducteurs-inter­prètes de 1974 à 1980. Dans ma jeunesse, j'ai été fasciné par le roman historique an­glais, par la dimension épique de l'Ivanhoe  de Walter Scott, de la légende de Robin des Bois, par l'aventure de Quentin Durward, par les thématiques de la Table Ronde. Le cadre médiéval et la profondeur mythique ont très tôt constitué chez moi des réfé­rentiels importants, que j'ai complété avec notre propre héritage littéraire épique flamand, avec le Lion des Flandres  de Hendrik Conscience, et par les thèmes bretons, dé­couverts dans Le Loup Blanc de Paul Féval. Certes, j'ai lu à l'époque de nombreuses édi­tions vulgarisées, parfois imagées, de ces thématiques, mais elles n'ont cessé de me fasciner. Des films comme Excalibur ou Braveheart  prouvent que ce filon reste malgré tout bien ancré dans l'imaginaire eu­ropéen. En dépit des progrès techniques, du désen­chantement comme résultat de plusieurs décennies de rationalisme bureaucratique, les peuples ont un besoin vital de cette veine épique, il est donc néces­saire que la trame de ces lé­gendes ou que ces figures héroïsées de­meurent des réferentiels im­pas­sables. Sur le plan philosophique, avant l'université, dans l'adolescence de 12 à 18 ans qui reste la pé­riode où s'acquièrent les bases éthiques et philosophiques essen­tielles du futur adulte, j'ai abordé Nietzsche, mais surtout Spengler parce qu'il met l'histoire en perspective. Pour un adolescent, Spengler est difficile à digé­rer, c'est évident et on n'en retient qu'une caricature quand on est un trop jeune lecteur de cet Allemand à la culture immense, qui nous a légué une vision synoptique de l'histoire mondiale. Toute­fois, j'ai retenu de cette lec­ture, jusqu'à aujourd'hui, la vo­lonté de mettre l'histoire en perspec­tive, de ne jamais soustraire la pensée du drame planétaire qui se joue chaque jour et partout. Juste avant d'en­trer à l'université, pen­dant la dernière année de l'école secondaire, j'ai découvert Toynbee, A Study of History, sa classification des civilisations, son étude des ressorts de celles-ci, sa dynamique de “chal­len­ge-and-response”; ensuite, pour la Noël 1973, il y avait pour moi dans la hotte des ca­deaux Révolte con­tre le monde moderne  de Julius Evola et une anthologie de textes de Gottfried Benn, où celui-ci insistait sur la notion de “forme”. J'avais également lu mes premiers ouvrages d'Ernst Jünger. A l'école, j'avais lu no­tamment le Testament espagnol  de Koestler et La puissance et la gloire  de Graham Greene, éveillant en moi un intérêt durable pour la littérature carcérale et surtout, avec le prêtre alcoolique admi­rablement mis en scène par Greene, les notions de péché, de perfectibilité, etc. que transcende malgré tout l'homme tel qu'il est, imparfait mais sublime en dépit de cette imperfection. Dès la première année à l'Université, je découvre la veine faustienne à partir de Goethe, les deux chefs-d'œuvre d'Or­well (La ferme des animaux et 1984), Darkness at Noon de Koe­st­ler (autre merveille de la littérature car­cérale!). Im­mé­dia­te­ment dans la foulée, je me suis plongé dans son ouvrage philoso­phi­que The Ghost in the Machine, qui m'a fait dé­cou­vrir le com­bat philosophique, à mon avis central, contre le ré­ductionnisme qui a ruiné le continent eu­ro­péen et la pensée occi­dentale en ce siècle et dont nous tentons péniblement de sortir au­jourd'hui. Depuis ma sortie de l'université, j'ai évi­demment travaillé comme traducteur, mais j'ai aussi fondé mes revues Orien­tations (1982-1992), Vouloir (depuis 1983), et co-édité avec mes amis suisses et français, le bulletin Nou­velles de Synergies Européennes (depuis 1994). Entre 1990 et 1992, j'ai travaillé avec le Prof. Jean-Fran­çois Mattéi à l'Encyclopédie des Œuvres philosophiques des Presses Univ­er­si­tai­res de France. 
    2. Dans les milieux politico-littéraires, on vous colle souvent l'étiquette de “droitier”. Etes-vous de droite ou de gauche. Qu'est-ce que cela signifie aujourd'hui?
    Dans l'espace linguistique francophone, cela a été une véritable manie de coller à tout constestataire l'étiquette de “droite”, parce que la droite, depuis le libéralisme le plus modéré jusqu'à l'affirmation natio­naliste la plus intransigeante, en passant par toutes les variantes non progressistes du catholicisme, ont été re­jetées sans ménagement dans la géhenne des pensées interdites, considé­rées arbitrairement comme droitières voire comme crypto-fascistes ou carrément fascistes. Cette manie de juger toutes les pensées à l'aune d'un schéma binaire provient en droite ligne de la propagande communiste française, très puissante dans les médias et le monde des lettres à Paris, qui tentait d'assimiler tous les adversaires du PCF et de ses satellites au fas­cisme et à l'occupant allemand de 1940-44. Or, au-delà de cette polé­mique  —que je ne reprendrai pas parce que je suis né après la guerre—  je constate, comme doivent le constater tous les observa­teurs lucides, que les cultures dans le monde, que les filons cultu­rels au sein de chaque culture, sont l'expression d'une pluralité inépuisable, où tout se compose, se décompose et se recompose à l'infini. Dans ce grouillement fécond, il est impossible d'opérer un tri au départ d'un schéma simplement binaire! La démarche binaire est toujours mutilante. Ceci dit, je vois essentiellement trois pistes pour échapper au schéma binaire gauche/droite.
    - La première vient de la définition que donnait le grand économiste français François Perroux du rôle de l'homme dans l'histoire de l'humanité et dans l'histoire de la communauté où il est né par le hasard des circonstances. L'homme selon Perroux est une personne qui joue un rôle pour le bénéfice de sa communauté et non pas un individu qui s'isole du reste du monde et ne donne rien ni aux siens ni aux autres. En jouant ce rôle, l'homme tente au mieux d'incarner les valeurs impassables de sa communauté nationale ou religieuse. Cette définition a été classé à droite, précisément parce qu'elle insistait sur le caractère impassable des grandes valeurs traditionnelles, mais bon nombre d'hommes de gauche, qu'ils soient chrétiens, musulmans, agnostiques ou athées, en recon­naîtront la pertinence.
    - La deuxième piste, très actuelle, est celle que nous indique le communauta­risme américain, avec des auteurs comme Sandel, Taylor, McIntyre, Martha Nussbaum, Bellah, Barber,Walzer, etc. Au cours du XXième siècle, les grandes idéologies politiques dominantes ont tenté de mettre les valeurs entre paren­thè­ses, de procéder à une neutralisation des valeurs, au bénéfice d'une approche purement techno­cra­ti­que des hommes et des choses. Dans les années 50 et 60, l'idéologie dominante de l'Occident, aux Etats-Unis et en Europe de l'Ouest, a été ce technocratisme, partagé par le libéralisme, la sociale-dé­mo­cra­tie et un conservatisme qui se dégageait des valeurs traditionnelles du ca­tholicisme ou du pro­testantisme (en Allemagne: de l'éthique prussienne du service à l'Etat). Les ques­tions soulevées par les valeurs, dans l'optique d'une certaine philosophie empirique, néo-logique, étaient des questions vides de sens. Ce refus occidental des valeurs a généré un hyper-individualisme, une anomie générale qui se tra­duit par un incivisme global et une criminalité débridée en croissance continue. Le questionnement sou­le­vé aujourd'hui par l'école communautarienne américaine est une réponse à l'anomie occidentale (dont on n'est pas toujours fort conscient dans les pays européens qui ont connu le communisme) et cette ré­ponse transcende évidemment le clivage gauche/droite.
    - La troisième piste est celle des populismes. Sous le titre significatif de Beyond Left and Right. Insur­gency and the Establishment,  une figure de proue de la gauche radicale américaine, David A. Horowitz, a publié récem­ment un ouvrage qui fait sensation aux Etats-Unis depuis quelques mois. Horowitz recence toutes les ré­voltes populaires américaines contre l'établissement au pouvoir à Washington, depuis 1880 à nos jours. Délibérément, Horowitz choisit à gauche comme à droite ses multiples exemples de révoltes du peuple contre ces oligarchies qui ne répondent plus aux nécessités cruelles qui frappent la population dans sa vie quotidienne. Horowitz brise un tabou tenace aux Etats-Unis, notamment en s'attaquant au caractère quelque peu coercitif des gauches, depuis le New Deal de Roosevelt jusqu'à nos jours. Une coercition subtile, bien camouflée derrière des paroles moralisantes... C'est à dessein que j'ai choisis ici des exemples américains, car les idéologèmes américains sont indépendants, finalement, des clivages eu­ro­péens nés de la seconde guerre mondiale. Même des propagandistes chevronnés ne pourront ac­cuser de “fascisme” des filons idéologiques nés en plein centre ou en marge des traditions “républi­caines” ou “démocrates”. Ce qui importe, c'est de défendre un continuum dans lequel on s'inscrit avec sa lignée.
    3. Dans vos écrits sur la géopolitique, on perçoit une très nette influence des grands géopolitologues comme Kjellén, Mackinder, Haushofer et Jordis von Lohausen; vous semblez aussi vous intéresser aux travaux du Croate Radovan Pavic. De votre point de vue d'Européen du Nord-Ouest, comment percevez-vous la Mitteleuropa, plus particulièrement la Croatie?
    C'est certain, j'ai été fasciné par les travaux des classiques de la géopolitique. J'ai rédigé des notes sur les géopolitologues dans l'Encyclopédie des Œuvres philosophiques, éditée par le Prof. Jean-François Mattéi (Paris, 1992). Le dernier numéro de ma revue Vouloir   (n°9/1997) est consacré à ces pionniers de la pensée géopolitique. En ce qui concerne votre compatriote Pavic, c'est, avec le Français Michel Fou­cher (Lyon), le meilleur dessinateur de cartes expressives, parlantes, suggestives en Europe au­jourd'hui. L'art de la géopolitique, c'est avant tout l'art de savoir dessiner des cartes qui résument à elles seules, en un seul coup d'oeil, toute une problématique historique et géographique complexe. Pavic et Klemencic (avec son atlas de l'Europe, paru cette année à Zagreb) perpétuent une méthode, lancée par la géopo­litique allemande au début de ce siècle, mais dont les racines remontent à ce pionnier de la géogra­phie et de la cartographie que fut Carl Ritter (1779-1859). Quant à ma vision de la Mitteleuropa, elle est quelque peu différente de celle qu'avait envisagée Friedrich Naumann en 1916. Au beau milieu de la pre­mière guer­re mondiale, Naumann percevait sa Mitteleuropa comme l'alliance du Reich allemand avec l'Autriche-Hon­grie, flanquée éventuellement d'une nouvelle confédération balkanique faisant fonction d'Ergänzungs­raum pour la machine industrielle allemande, autrichienne et tchèque. Cette alliance articu­lée en trois vo­lets aurait eu son prolonge­ment semi-colonial dans l'empire ottoman, jusqu'aux côtes de la Mer Rouge, du Golfe Persique et de l'Océan Indien. Aujourd'hui, un élément nouveau s'est ajouté et son importance est ca­pitale: le Rhin et le Main sont désormais reliés au Danube par un canal à gros gabarit, assurant un tran­sit direct entre la Mer du Nord et l'espace pontique (Fleuves ukrainiens, Crimée, Mer Noire, Cau­case, Ana­to­lie, Caspienne). Cette liaison est un événment extra­ordinaire, une nouvelle donne importante dans l'Eu­ro­pe en voie de formation. La vision du géopolitologue Artur Dix, malheu­reu­sement tombé dans l'oubli au­jourd'hui, peut se réaliser. Dix, dans son ouvrage principal (Politische Geographie. Weltpolitisches Hand­buch, 1923), a publié une carte montrant quelles dynami­ques seraient possibles dès le creusement défi­nitif du canal Main/Danube, un projet qu'avait déjà envisagé Charlemagne, il y a plus de mille ans! Aujour­d'hui le Rhin est lié à la Meuse et pourrait être lié au Rhône (si les gauches françaises et les nationalistes é­triqués de ce pays ne faisaient pas le jeu des adversaires extra-européens de l'unité de l'Europe et du rayonnement de sa cul­tu­re). Les trafics sur route sont saturés en Europe et le transport de marchandises par camions s'avèrent trop cher. L'avenir appar­tient aux péniches, aux barges et aux gros-pousseurs fluviaux. Ainsi qu'aux oléoducs transcaucasiens. Fin décembre 1997, l'ar­mée belge en poste en Slavonie orientale a plié bagages et a ache­miné tout son charroi et ses blindés par pousseurs jusqu'à Liège, prou­vant de la sorte l'importance militaire et stratégique du sy­stème fluvial intérieur de la Mitteleuropa. La mise en valeur de ce réseau diminue ipso facto l'importance de la Méditerranée, contrô­lée par les flottes amé­ri­cai­ne et britannique, appuyées par leur allié turc. Les Etats d'Europe centrale peuvent contrôler aisé­ment, par leurs propres forces terrestres la principale voie de passage à travers le con­ti­nent. La liaison Rot­terdam/Constantza devient l'épine dorsale de l'Europe.  Quant à la Croatie, elle est une pièce impor­tante dans cette dynamique, puisqu'elle est à la fois riveraine du Danube en Slavonie et de l'Adriatique, partie de la Méditerranée qui s'enfon­ce le plus profondément à l'intérieur du continent européen et qui revêt dès lors une importance stratégique considérable. Au cours de l'histoire, quand la Croatie apparte­nait à la double mo­narchie austro-hongroise et était liée au Saint-Empire, dont le territoire belge d'aujour­d'hui faisait partie intégrante,  elle offrait à cet ensemble complexe mais mal unifié une façade méditerra­néen­ne, que l'empire ottoman et la France ont toujours voulu confis­quer à l'Autriche, l'Allemagne et la Hon­grie pour les as­phy­xier, les en­claver, leur couper la route du large. Rappelons tout de même que la misère de l'Europe, que la ruine de la civilisation européen­ne en ce siècle, vient essen­tiellement de l'al­lian­ce perverse et pluriséculaire de la France monarchique et de la Turquie ot­tomane, où la France reniait la civilisation européenne, mobilisait ses forces pour la détruire. La Mitteleuropa a été prise en tenaille et ra­vagée par cette alliance: en 1526, le Roi de France François Ier marche sur Milan qu'il veut arracher au Saint-Empire; il est battu à Pavie et pris prisonnier. Ses alliés ot­tomans profitent de sa trahison et de sa di­version et s'emparent de votre pays pen­dant longtemps en le ra­vageant totalement. Au XVIIième siècle, la collusion franco-ottomane fonctionne à nouveau, le Saint-Em­pire est attaqué à l'Ouest, le Palatinat est ra­vagé, la Franche-Comté est annexée par la France, la Lorraine impériale est en­va­hie, l'Alsace est elle aus­si définitivement arrachée à l'Empire: cette guerre inique a été menée pour soulager les Turcs pen­dant la grande guerre de 1684 à 1699, où la Sainte-Alliance des puissances européennes (Autriche-Hongrie, Po­logne, Russie) con­jugue ses efforts pour libérer les Balkans. En 1695, Louis XIV ra­vage les Pays-Bas et incendie Bruxelles en inaugurant le bom­bardement de pure terreur, tandis que les Ottomans reprennent pied en Serbie et en Roumanie. En 1699, le Prince Eugène, adver­sai­re tenace de Louis XIV et brillant serviteur de l'Empire, impose aux Turcs le Traité de Carlowitz: la Sublime Porte doit céder 400.000 km2 de territoires à la Sainte-Alliance, mais au prix de tous les glacis de l'Ouest (Lorraine, Alsace, Franche-Comté, Bresse). La Répu­bli­que sera tout aussi rénégate à l'égard de l'Europe que la monar­chie française, tout en introduisant le fanatisme idéologique dans les guerres entre Etats, ruinant ainsi les principes civilisateurs du jus publicum europæum:  en 1791, alors qu'Autrichiens, Hon­grois et Russes s'apprêtaient à lancer une offensive définitive dans les Balkans, la France, fidèle à son anti-européisme foncier, oblige les troupes impériales à se porter à l'Ouest car elle lance les hordes révolu­tion­naires, récrutées dans les bas-fonds de Paris, contre les Pays-Bas et la Lorraine. Le premier souci de Napoléon a été de fabriquer des “départements illyriens” pour couper la côte dalmate de son “hinterland mittel­europäisch” et pour pri­ver ce dernier de toute façade méditerra­néenne. L'indépendance de la Croatie met un terme à cette logi­que de l'asphyxie, redonne à la Mitteleuropa une façade adriati­que/méditerranéenne.
    4. A votre avis, quelles seront les forces géopolitiques qui auront un impact sur le destin croate dans l'avenir?
    Le destin croate est lié au processus d'unification européenne et à la rentabilisation du nouvel axe central de l'Europe, la liaison par fleuves et canaux entre la Mer du Nord et la Mer Noire. Mais il reste à savoir si la “diagonale verte”, le verrou d'Etats plus ou moins liés à la Turquie et s'étendant de l'Albanie à la Macédoine, prendra for­me ou non, ou si une zone de turbulences durables y empêchera l'émergence de dynamiques fécondes. Ensuite, l'af­frontement croato-serbe en Slavonie pour la maîtrise d'une fe­nê­tre sur le Da­nube pose une question de principe à Belgrade: la Serbie se sou­vient-elle du temps de la Sainte-Alliance où Austro-Hongrois ca­tholiques et Russes orthodoxes joignaient frater­nel­lement leurs efforts pour libérer les Balkans? Se faire l'allié in­conditionnel de la France, comme en 1914, n'est-ce pas jouer le rôle dévolu par la monarchie et la république françaises à l'Em­pire ottoman de 1526 à 1792? Ce rôle d'ersatz  de l'empire otto­man moribond est-il compatible avec le rôle qu'entendent se don­ner certains na­tionalistes serbes: celui de bou­clier européen con­tre tout nouveau déferlement turc? La nou­velle Serbie déyougo­slavisée a intérêt à participer à la dyna­mi­que danubien­ne et à trouver une liaison fluviale avec la Russie. Toute autre politique serait de l'aberration. Et serait contraire au principe de la Sainte-Alliance de 1684-1699, qu'il s'agit de restaurer après la chute du Rideau de fer et des régimes communistes. Par ail­leurs, l'intérêt de la France (ou du moins de la population française) serait de joindre à la dynamique Rhin/Danube le complexe fluvial Saô­ne/Rhône débouchant sur le bassin occidental de la Méditerra­née, zone hautement stratégique pour l'ensemble européen, dont Mackinder, dans son livre Democratic Ideals and Reality  (1919), avait bien montré l'importance, de César aux Vandales et aux Byzantins, et de ceux-ci aux Sarrazins et à Nelson.
    5. En vue de la proximité balkanique, quelles seront les synergies convergentes?
    Favoriser le transit inter-continental Rotterdam/Mer Noire et faire de la région pontique le tremplin vers les matières premières caucasiennes, caspiennes et centre-asiatiques, est une nécessité économique vitale pour tous les riverains de ce grand axe fluvial et de cette mer intérieure. D'office, dans un tel contexte, une symphonie adviendra inéluctablement, si les peu­ples ont la force de se dégager des influences étrangères qui veu­lent freiner ce processus. Les adversaires d'un consensus harmo­nieux en Europe, de tout retour au jus publicum euro­pæum  (dont l'OSCE est un embryon), placent leurs espoirs dans la ligne de fracture qui sépare l'Europe catholique et protestante d'une part, de l'Europe orthodoxe-byzantine d'autre part. Ils spéculent sur la classification récente des civilisations du globe par l'Amé­ricain Samuel Huntington, où la sphère occidentale euro-amé­ricaine (“The West”) serait séparée de la sphère orthodoxe par un fossé trop profond, à hauteur de Belgrade ou de Vukovar, soit exactement au milieu de la ligne Rotterdam/Constantza. Cette césure rendrait inopérante la nouvelle dynamique potentielle, couperait l'Europe industrielle des pétroles et des gaz caucasiens et l'Europe orientale, plus rurale, des produits in­dustriels alle­mands. De même, la coupure sur le Danube à Belgrade a son é­quivalent au Nord du Caucase, avec la coupure tchétchène sur le parcours de l'oléoduc transcaucasien, qui aboutit à Novorossisk en Russie, sur les rives de la Mer Noire. La guerre tchétchène profite aux oléoducs turcs qui aboutissent en Méditerranée orientale contrôlée par les Etats-Unis, tout comme le blocage du transit danubien profite aux armateurs qui assurent le transport transméditerranéen et non pas aux peuples européens qui ont intérêt à raccourcir les voies de communication et à les contrôler directement. La raison d'être du nouvel Etat croate, aux yeux des Européens du Nord-Ouest et des Allemands, du moins s'ils sont conscients du des­tin du continent, se lit spontanément sur la carte: la configuration géographique de la Croatie, en forme de fer à cheval, donne à l'Ouest et au Centre de l'Europe une fenêtre adriatique et une fenêtre danubienne. La fenêtre adriatique don­ne un accès direct à la Méditerranée orientale (comme jadis la République de Venise), à condition que l'Adriatique ne soit pas blo­quée à hauteur de l'Albanie et de l'Epire par une éven­tuelle barrière d'Etats satellites de la Turquie, qui verrouilleraient le cas échéant le Détroit d'Otrante ou y géneraient le transit. La fenêtre danubienne donne accès à la Mer Noire et au Caucase, à condi­tion qu'elle ne soit pas bloquée par une entité serbe ou néo-you­go­slave qui jouerait le même rôle de verrou que l'Empire ottoman jadis et oublierait la Sainte-Alliance de 1684 à 1699, prélude d'une symphonie efficace des forces en présence dans les Balkans et en Mer Noire. L'Europe comme puissance ne peut naître que d'une telle symphonie où le nouvel Etat croate à un rôle-clé à jouer, no­tamment en reprenant partiellement à son compte les anciennes dynamiques déployées par la République de Venise, dont Ragu­se/Dubrovnik était un superbe fleuron.
    6. Vous semblez être assez critique à l'égard de l'Etat pluri-ethnique belge? Quel se­ra son rôle?
    L'Etat et le peuple belges sont des victimes de la logique partito­cra­tique. Les peuples de l'Ostmitteleu­ropa  savent ce qu'est une logi­que partisane absolue, parce qu'ils ont vécu le communisme. A l'Ouest la logique partisane existe également: certes, dans la sphè­re privée, on peut dire ou proclamer ce que l'on veut, mais dans un Etat comme la Belgique, où les postes sont répartis entre trois formations politiques au pro rata des voix obtenues, on est obligé de s'aligner sur la politique et sur l'idéologie étri­quée de l'un de ces trois partis (démocrates-chrétiens, socialistes, libéraux), sinon on est marginalisé ou exclu: la libre parole dérange, la volonté d'aller de l'avant est considérée comme “impie”. On m'objectera que la démocratie de modèle occidental permet l'alternance politique par le jeu des élections: or cette possibilité d'alter­nan­ce a été éli­minée en Belgique par le prolongement et la succession ad infini­tum de “grandes coalitions” entre démocrates-chrétiens et socia­listes. A l'exception de quelques années dans les “Eigh­ties”, où les libéraux ont participé aux affaires. Ce type de “grandes coali­tions” ne porte au pou­voir que l'aile gauche de la démocratie-chré­tienne, dont l'arme principale est une démagogie dangereuse sur le long terme et dont la caractéristique majeure est l'absence de principes politiques. Cette absence de prin­ci­pes conduit à des bricolages politiques abracadabrants que les Belges appellent ironiquement de la “plom­berie”. L'aile plus conservatrice de cette démocratie-chrétienne a été progressivement marginali­sée en Flandre, pour faire place à des politiciens prêts à toutes les combines pour gouverner avec les socia­listes. Or, les socialistes sont relativement minoritaires en Flandre mais majoritaires en Wallonie. Dans cet­te partie du pays, qui est francophone, ils ont mis le patrimoine régional en coupe réglée et ils y rè­gnent com­me la mafia en Sicile, avec des méthodes et des pratiques qui rap­pellent les grands réseaux ita­liens de criminalité. Les scandales qui n'ont cessé d'émailler la chronique quotidienne en Belgique vien­nent essentiellement de ce parti socialiste wallon. La Belgique fonctionne donc avec l'alliance de so­cia­listes wallons majoritaires dans leur région, de socialistes flamands minoritaires dans leur région, de dé­mo­crates-chrétiens wallons minoritaires et de dé­mo­crates-chrétiens flamands majoritaires, mais dont la ma­jorité est aujourd'hui contestée par les libéraux néo-thatché­riens et les ultra-nationalistes. Une très for­te minorité flamande conserva­tri­ce (mais divisée en plusieurs pôles antagonistes) est hors jeu, de mê­me que les classes moyennes et les entrepreneurs dynamiques en Wallonie, qui font face à un socia­lisme ar­chaïque, vindicatif, corrompu et inefficace. La solution réside dans une fédéralisation toujours plus pous­sée, de façon à ce que les Flamands plus conservateurs n'aient pas à subir le mafia-socialisme wal­lon et les Wallons socialistes n'aient pas à abandonner leurs acquis sociaux sous la pression de néo-tha­tché­riens flamands. Mais la pire tare de la Belgique actuelle reste la nomination politique des magis­trats, éga­lement au pro rata des voix obtenues par les partis. Cette pratique scandaleuse élimine l'indé­pen­dan­ce de la magistrature et ruine le principe de la séparation des pouvoirs, dont l'Occident est pour­tant si fier. Ce principe est lettre morte en Belgique et la cassure entre la population et les institutions judi­ciai­res est dé­sormais préoccupant et gros de complications. L'a­venir de la Belgique s'avère précaire dans de telles con­ditions, d'autant plus que la France essaie d'avancer ses pions partout dans l'économie du pays, de le co­loniser financièrement, avec l'ac­cord tacite de Kohl  —il faut bien le dire—  qui achète de la sorte l'ac­cep­tation par la France de la réunification allemande. Le pays implosera si son personnel poli­tique con­ti­nue à ne pas avoir de vision géopolitique cohérente, s'il ne reprend pas cons­cience de son destin et de sa mis­sion mitteleuropäisch,  qui le con­duiront de surcroît à retrouver les intérêts considé­rables qu'il avait dans la Mer Noire avant 1914, surtout les entreprises wallonnes! Non seulement l'Etat belge implosera s'il ne retrouve pas une vision géopolitique cohérente, mais chacune de ses compo­san­tes imploseront à leur tour, entraînant une catastrophe sans précédent pour la population et créant un vi­de au Nord-Ouest de l'Eu­rope, dans une région hautement stratégique: le delta du Rhin, de la Meuse et de l'Es­caut, avec tous les canaux qui les relient (Canal Albert, Canal Juliana, Canal Wilhelmina, Willems­vaart, etc.).
    7. Le peuple flamand en Belgique a joué un rôle non négligeable lors de la guerre en ex-Yougoslavie, en apportant son aide au peuple croate. Qu'est-ce qui les unit?
    Les nationalistes flamands s'identifient toujours aux peuples qui veulent s'affranchir ou se détacher de structures étatiques jugées oppressantes ou obsolètes. En Flandre, il existe un véritable engouement pour les Basques, les Bretons et les Corses: c'est dû partiellement à un ressentiment atavique à l'égard de la France et de l'Espagne. La Croatie a bénéficié elle aussi de ce sentiment de solidarité pour les peuples concrets contre les Etats abstraits. Pour la Croatie, il y a encore d'autres motifs de sympathie: il y a au fond de la culture flamande des éléments baroques comme en Autriche et en Bavière, mais mar­qués d'une truculence et d'une jovialité que l'on retrouve surtout dans la peinture de Rubens et de Jor­daens. Ensuite, il y a évidemment le catholicisme, partagé par les Flamands et les Croates, et un Kultur­na­tionalismus  hé­rité de Herder qui est commun aux revendications nationalistes de nos deux peuples. Mais ce Kulturnationalismus  n'est pas pur repli sur soi: il est toujours accompagné du sentiment d'ap­partenir à une entité plus grande que l'Etat contesté  —l'Etat belge ici, l'Etat yougoslave chez vous—  et cette en­tité est l'Europe comme espace de civilisation ou la Mitteleuropa comme communauté de destin histo­rique. Certes, dans la partie flamande de la Belgique, le souvenir de l'Autriche habsbourgeoise est plus ancien, plus diffus et plus estompé. Mais il n'a pas laissé de mauvais souvenirs et l'Impératrice Ma­rie-Thérèse, par exemple, demeure une personnalité historique respectée.

  • Monti crise de la gouvernance et de la démocratie


    Pas facile de mesurer, même pour un pays aussi proche que l'Italie, les conditions politiques locales. Ainsi la menace de démission de Mario Monti, formulée le 9 décembre, si elle devait se confirmer est ressentie comme une formidable menace pour la gouvernance européenne. Le motif de cette crise réside dans l'annonce d'un retour de son prédécesseur sur la scène électorale.

    Or les choses qui paraissent simples au départ, se compliquent souvent à l'usage. Les organes de la désinformation parisienne nous apprenaient ainsi, le 12 décembre, que Silvio Berlusconi change son fusil d'épaule. Il se dit prêt à se retirer en cas de candidature du chef du gouvernement, aux élections législatives anticipées (1)⇓ "J'ai proposé à Monti d'être candidat en tant que chef de file du centre modéré et il a dit qu'il ne le voulait pas. Si sa position change, je n'aurai aucun problème à m'écarter (...) Je n'ai pas d'ambition personnelle", déclare maintenant l'ancien président du Conseil.

    Observons aussi que tout ceci pose en fait la question de la démocratie dans chacun de nos pays que nous croyons encore des États souverains.

    Ce n'est pas en effet dans le cadre des débats internes, que fut décidée la chute de deux gouvernements, celui de Silvio Berlusconi à Rome et celui de Georges Papandréou à Athènes. Ils furent éliminés en fait lors de la réunion de Cannes du 3 novembre 2011 en marge du G20.

    Les deux personnages n'incarnaient à vrai dire, dans leurs pays respectifs, ni les mêmes idées, ni les mêmes pratiques, ni les mêmes configurations psychologiques

    Mais l'un comme l'autre se trouvaient confrontés à la même situation financière inextricable. Celles-ci résultent de pratiques budgétaires désormais incompatibles avec l'Union monétaire.

    Il se trouve cependant que l'un comme l'autre disposait de majorités parlementaires. Assurant leur légitimité au regard des règles démocratiques celles-ci les avaient soutenus jusque-là.

    On jugeait alors inadmissible le cas du chef de gouvernement grec, président de l'Internationale socialiste. Mais on ne lui reprochait pas la suite d'erreurs d'orientations économiques, pourtant impardonnables, et démagogiques, infligées à son pays à partir de sa victoire électorale de l'automne 2009.

    On n'acceptait simplement pas l'idée qu'il pût soumettre à référendum l'accord financier de sauvetage conclu avec ses partenaires européens et avec les bailleurs de fonds. Cette procédure aurait pu sembler pourtant la moindre manifestation de politesse à l'égard du peuple souverain.

    Quant à son homologue de Rome on avait laissé passer toutes ses frasques et incongruités : on n'acceptait pas son esquisse, tant soit peu bâclée, en quelques jours, de rétablissement des comptes publics. Or, rappelons-le, les finances de l'État italien dégagent ce qu'on appelle des "excédents primaires", c'est-à-dire des amorces de remboursement de la dette. En revanche, depuis plusieurs années les nouveaux emprunts contractés par le Trésor Public hexagonal servent à financer les échéances des prêts antérieurs. (2)⇓

    La manière dont les deux hommes furent alors débarqués a fait l'objet d'un témoignage, pour une fois recevable, venant d'un témoin direct, le petit ministre parisien des finances Baroin. Il n'hésite pas d'ailleurs à contredire aujourd'hui, dans son livre (3)⇓ les déclarations qu'il diffusait à l'époque pour convaincre le monde de la solidité de la Zone Euro.

    Et donc, sous la pression du Directoire de fait au sein de l'Union européenne, et Berlusconi et Papandréou ont dû laisser la place. Celui-ci s'est retiré au profit d'un gouvernement provisoire constitué, pour quelques mois, autour du respectable banquier central Loukas Papadimos. Celui-là s'est démis au profit d'un ministère technique dirigé par Mario Monti, honnête transfuge de la Commission.

    Certains ont cru pouvoir monter en épingle les liens réels ou supposés avec la finance internationale et plus précisément avec la firme Goldman Sachs. Ils auraient sans doute gagné en crédibilité en pointant d'autres ramifications : le malaise est le même, on l'exorcise comme on veut, ou comme on peut.

    Ainsi tout le monde cite cette fameuse banque, presque comme on pourrait parler des clients de la SNCF, mais on omet soigneusement de rappeler le rôle néfaste de Strauss-Kahn aux côtés de Papandréou, ou la réunion du groupe de Bilderberg à Vouliagmeni en 2009, à laquelle participait le gentil fonctionnaire de l'OCDE Papakostantinou qui allait deviendra ministre [socialiste] des Finances du calamiteux gouvernement.

    La réalité cependant n'est pas aussi "journalistique" ; elle ne correspond pas nécessairement à un "complot" : elle résulte en effet d'une contradiction mécanique.

    Ainsi lorsque Mario Monti annonce sa décision à la fois "irrévocable", mais "à terme", et quoique soumise à condition suspensive... lorsqu'il dit qu'il déclare qu'il se retirera "après le vote sur la loi d'orientation budgétaire" ... supposée répondre en décembre 2012 à des objectifs posés en novembre 2011... il paraît logique de se poser certaines questions subsidiaires.

    L'Italie va de toute manière vers des élections. Anticipées ou non, la différence ne semble pas considérable. Le parti "démocrate" ex-démocrate sinistre, et ex-communiste, est présenté comme bénéficiant d'un fort vent en poupe. Que se passera-t-il dès lors si le nouveau gouvernement remet en cause, comme le suffrage universel pourrait bien l'y inviter, les conséquences monétaires des accords européens ?

    Conservant pour ma part une certaine sympathie pour Gianfranco Fini, considéré comme un traître par les inconditionnels berlusconiens, et actuellement président de la chambre des députés italiens, je consulte toujours ses commentaires et je lis celui du 9 : à propos de la démission [annoncée] du chef du gouvernement, il trouve qu'elle "fait honneur à son sens des responsabilités". Certes : mais comment compte-t-on s'y prendre pour faire face aux pressions qui vont, immanquablement s'exercer sur l'état italien et sur sa Trésorerie du fait de cette hypothétique décision.

    Nous disposons, avec la Grèce, hélas pour ce pays, d'un laboratoire expérimental particulièrement riche en enseignements depuis 2009.

    On doit mettre en cause la lucidité de tous ceux qui, depuis, ont répété successivement "l'Espagne c'est pas pareil", "l'Italie c'est pas pareil". Ils diront bientôt que "la France c'est pas pareil", comme les chips et les chipsters, alors qu'en réalité ce sera pareil, les mêmes causes [le surendettement] provoquant les mêmes effets [la ruine].

    Qu'avons-nous pu observer en Grèce :

    1° Ne perdons pas de vue le malheur d'une partie du pays. À ce jour le chômage atteint officiellement un taux de 24,8 % et les jeunes prennent comme aux pires heures de l'Histoire, chemin de l'exil. Tous les journaux de l'Hexagone en parlent. On peut regretter cependant qu'ils en profitent pour distiller un sous-entendu permanent... celui dont nous ont toujours intoxiqués les républiques successives "tout va mieux en France"... comme s'il fallait remercier notre classe politique de lambeaux de prospérité que l'État central parisien n'a pas encore gâchés.

    2° Les manifestations de masse contre l'austérité se sont soldées par des échecs. Elles ne servent à rien sinon à renforcer la méfiance des investisseurs, et même à encourager la sortie, légale ou non, des capitaux : pourquoi détenir un compte bancaire local susceptible de changer de devise de référence du jour ou lendemain ?

    3° la sympathie des Étrangers ne produit pas grand-chose. Elle s'émousse très rapidement, dans le meilleur des cas, quand elle ne se transforme pas en suspicion et hostilité.

    4° l'incompréhension des médiats, des observateurs et même des décideurs les amène à confondre la classe politique et le pays en général, à assimiler les discours des imprécateurs et de l'opposition aux actes réels du gouvernement, etc.

    Au total les réponses technocratiques à la crise, opérées par d'irresponsables et molles synarchies n'ont fait dans un premier temps que renforcer les courants d’opinions protestataires. Fort heureusement, les baudruches apparues depuis plusieurs mois commencent à se dégonfler.

    Car, quelle que soit l'aide extérieure, un pays ne peut s'en sortir que par lui-même.

    La simple "gouvernance", ce mot horrible réduisant les choses à leur dimension administrative, cela ne suffit jamais. Les mesures les plus arithmétiquement évidentes requièrent l'adhésion des hommes.

    Plus tard l'opinion prend conscience de l'obligation de ne pas dépenser l'argent dont on ne dispose pas, plus le rétablissement se révèle douloureux.

    Il était bien tard à Athènes en juin 2012 lorsque fut enfin constitué le gouvernement d'Antonis Samaras.

    Et, en France l'heure tourne, au point que le soir tombe, quand chaque semaine le gouvernement Ayrault annonce de nouvelles dépenses non financées.

    JG Malliarakis http://www.insolent.fr/

    Apostilles :

    1. cf. AFP du 12/12/2012 à 18:42
    2. cf. "Pour une libération fiscale" chapitre "L'Etau budgétaire de 2012"
    3. cf "Journal de crise" JC Lattès, 2012, 220 pages.
  • « Une révolution sous nos yeux - Comment l'islam va transformer la France et l'Europe » de Christopher Caldwell (2/2)

    Polémia poursuit la publication de la présentation du livre de Christopher Caldwell, avec les troisième et quatrième partie où l’on découvrira d’une part les « écueils et incompatibilités » opposant les deux grandes entités que sont l’Occident et l’Islam et, d’autre part, en forme de conclusion, une hypothétique ouverture vers l’avenir.
    A la fin de ce texte, un commentaire reçu d’un essayiste anglo-saxon, résidant en Europe, qu’il connaît tout autant que les Etats-Unis, fournit un éclairage presqu’inattendu sur les véritables motivations de l’auteur.

    III - Ecueils et incompatibilités

    Avec sa franchise de marbre, Caldwell introduit la deuxième partie de son livre, titrée L’Islam, par ces mots : « Si les Européens avaient compris, quand l’immigration en provenance de Turquie, du Maroc, d’Algérie et d’ailleurs débuta dans les années 1950 et 1960, que des milliers de mosquées seraient disséminées d’un bout à l’autre de l’Europe un demi-siècle plus tard, jamais ils ne l’auraient autorisée. »

    Ici, l’auteur égrène écueils et incompatibilités de culture et de comportement qui ne peuvent, le pense-t-il, que faire obstacle à une intégration. Nous nous limiterons à n’en citer que quelques-uns sans omettre les deux les plus fondamentaux : la religion et le sexe.

    – La protection sociale. Comme souvent, Caldwell procède par aphorisme : « Les économies complexes des Etats Providence comme celles qui se sont développées en Europe ces soixante dernières années ne naissent généralement pas dans les sociétés multiethniques. »
    – La mobilité. « Les migrations déclenchent des migrations secondaires, ce que le sociologue Rogers Brubaker appelait les “migrations sans mélange ethnique”. »
    – La diversité et le mépris de soi. « La diversité décrit à la fois une réalité sociologique (…) et une idéologie. Cette idéologie était en parfait accord avec la neutralité entre cultures adoptées par les bâtisseurs de l’idéal européen. Et pourtant, la diversité n’a jamais réellement pu devenir un idéal stable ou neutre, car les Européens n’en savaient pas assez sur les autres cultures pour la faire advenir. »
    – Antagonisme entre Occident et Islam. Cet antagonisme est très ancien. Citant l’historien Henri Pirenne : « Les deux puissances – l’Europe en tant qu’Occident et l’Islam en tant que civilisation – sont apparues dans l’histoire ensemble et ont représenté un défi l’une pour l’autre. »
    – Les populations musulmanes. « La nouvelle immigration, essentiellement musulmane, était moins gérable et moins soluble que les précédentes. »
    – Régénération de quartiers en déshérence. Le résultat escompté s’est produit un peu partout en Europe. Mais cette vision de l’immigration, celle des élites qui habitent les beaux quartiers, était trompeuse. Il y a plus de ghettos que des Kreuzberg [à Berlin].
    – Les zones de non-droit. Caldwell connaît bien le cas de Chanteloup-les-Vignes. Il est typique et le lecteur comprendra bien comment on passe, « d’un pas de somnambule », de la tentative d’intégration à la ségrégation pure et simple.
    – Violence, délinquance et émeutes. « La violence relative des quartiers musulmans est un obstacle de taille à la mixité sociale et à l’intégration. »
    – Les espaces de la Charia. « Dès qu’il devint évident que certains émigrés proposaient d’instaurer des cultures étrangères dans des pays européens, l’immigration (…) apparut sous un jour différent. » Par ailleurs, la propension au développement des lieux de culte répond à une certaine résurgence religieuse. Caldwell donne, par exemple sur l’appartenance des jeunes immigrés, étudiants et autres, à la religion islamique, des chiffres surprenants. Un long chapitre est consacré à La crise de la foi en Europe, et tente de placer les deux cultes, chrétien et musulman, l’un par rapport à l’autre. Jusqu’à aujourd’hui le dialogue interreligieux tiendrait du vœu pieux. Une chose est certaine : les musulmans restent fidèles à leur religion, les chrétiens s’en écartent. Le jour où le rapport de forces sera inversé, que se passera-t-il ?
    – Le sexe. « Les musulmans d’Europe viennent de cultures où les femmes sont strictement subordonnées à leur mari et aux hommes en général. (…) C’est un fait sociologique universel. » (…) « Adopter le style européen de sexualité et de relations entre sexes est la seule exigence non négociable que l’Europe impose. »

    IV - Quel avenir se réserve l’Europe ?

    Pour Caldwell, qui ne croit pas à l’intégration en Europe, l’immigration, c’est l’américanisation. Les Etats-Unis seraient le modèle du genre. Donc devant « les problèmes abyssaux » que l’Europe va rencontrer, la solution serait qu’elle devienne davantage comme l’Amérique. Mais on a vu que Caldwell rejetait la comparaison entre Europe et Amérique. Le melting-pot américain fonctionnerait-il avec des musulmans ? On ne connaît aucune expérience en la matière.

    Un second modèle d’immigration serait peut-être plus adapté : le système du millet de l’Empire ottoman qui a fonctionné pendant plusieurs siècles avec des populations de différentes religions, mais qui a disparu au début du XXe siècle du fait de l’appétit expansionniste de ses voisins européens.

    Comme nous l’avons déjà dit, Caldwell ne croit pas à l’intégration de masse. Néanmoins, il termine son puissant ouvrage par une légère pointe d’optimisme : « Les Européens ne peuvent qu’espérer que les nouveaux venus, surtout musulmans, s’assimileront pacifiquement », phrase rapidement compensée par un retour à la réalité crue : « Quand une culture peu sûre d’elle, malléable et relativiste rencontre une culture ancrée, confiante et renforcée par des doctrines communes, c’est généralement la première qui change pour s’adapter à la seconde. »

    « Il est sûr que l’Europe sortira changée de sa confrontation avec l’Islam. » Quel verdict !

    Un livre à lire, qui force à la réflexion.

    René Schleiter Polémia

    Titre original : Reflections on the Revolution in Europe, Doubleday, 2009.

    Le commentaire d’un Anglo-Saxon :

    Polémia a confié le livre de Christopher Caldwell, en sa version originale, à un ami anglo-saxon qui connaît bien la politique américaine. Nous voulions savoir ce qu’il en pensait et surtout comment il interprétait la démarche de ce journaliste américain néo-conservateur bien en cour. Il faut lire cette note avec détachement, en se rappelant que l’auteur du livre est américain, proche des néo-conservateurs et en oubliant tout préjugé français et européen.
    Le 28 octobre dernier, Polémia avait publié une interview que Christopher Caldwell avait recueillie auprès de Marine Le Pen. (6)
    Voici la note que notre ami nous a fait parvenir (il a demandé à conserver l’anonymat).

    Je suis en train de le relire – et je suis surpris, et troublé, par le nombre de noms d’amis, d’auteurs et de publications NEO-CONS qu’il mentionne comme étant des gens qui ont lu et vérifié le manuscrit et visiblement l’ont approuvé. La question est POURQUOI ?

    Celui qui domine entre tous est le « Tsar » des néo-cons, Leon William Kristol, qui pendant des années a écrit dans l’organe des néo-cons, The Weekly Standard. Il a aussi écrit pour le New York Time Magazine, The Financial Times, etc. !!! Toutes ces publications étant des publications grand public.

    Lisez la liste des noms de la page 365 [533, version française] sous le titre de « Remerciements ». C’était le 18 février 2009, tout à fait à la fin de l’ère Bush/néo-cons !!!

    A mon avis, ce livre essaie, d’une manière très sophistiquée, d’adopter un parti pris antimusulman acceptable au sein de l’élite europeo-américaine. Une politique néo-con.

    Je continue de penser que c’est l’un des livres les plus remarquables et le plus documenté et rempli de statistiques utiles que je connaisse. Je ne connais pas d’autre livre comme celui-là sur le marché.

    Les statistiques sont révélatrices – et choquantes – et utiles pour les auteurs et penseurs dits de droite – pour nous aider à clarifier et étayer nos arguments à propos de cette « crise de la culture européenne » !

    Mais il nous faut prendre conscience que Caldwell a bénéficié d’un accès privilégié à des banques de données auprès de ces grands médias que sont The Financial Times, The New York Times, The Weekly Standard – appartenant tous à l’Etablissement.

    Par conséquent, il faut être PRUDENT mais, comme toujours, il faut s’appuyer sur les informations réunies et distribuées par l’Etablissement quand on ne dispose pas de réseaux propres. Donc il faut évaluer avec soin les arguments de Caldwell – ainsi que leur portée – qui sont là pour étayer un parti pris essentiellement antimusulman ; non pas de manière brutale, « raciste » ou « sectaire », mais simplement en jouant de manière subliminale sur les cerveaux intoxiqués par le système d’éducation « maçonnique » en vigueur en Europe en général et dans les cercles de l’élite franco-anglaise en particulier : l’endoctrinement fondé sur le concept « Liberté, Egalité, Fraternité » a poussé les néoconservateurs à cette immigration désordonnée et aujourd’hui ils s’inquiètent de ce monstre qu’ils ont laissé échapper !

    Ce livre est très utile mais ce n’est qu’un outil, un outil non pas pour la libération de l’Europe, mais pour les propres objectifs des disciples de William Kristol…

    (En Europe, décembre 2011)

    (Traduction de l’anglais pour Polémia – RS)

    Note :

    (6) Madame Le Pen expliquée par un conservateur américain

    Voir aussi (précédent) :

    « Une révolution sous nos yeux – Comment l’islam va transformer la France et l’Europe » de Christopher Caldwell (1/2)

    Christopher Caldwell, Une révolution sous nos yeux, préface de Michèle Tribalat, Traduction de l’anglais par Johan Frederik Hel Guedj, édition du Toucan, collection Adultes, 5 octobre 2011, 600 pages.

  • Triste Noël pour 25 millions d’Européens – par Pieter Kerstens

    … Ces travailleurs sans emploi, souvent licenciés pour cause de « délocalisation », ces victimes du mondialisme, réel prédateur de nos secteurs économiques, ce mondialisme auquel les marchands du temple vouent un réel culte  fanatique.
    Souvenons-nous de la fermeture de l’usine General Motors d’Anvers (OPEL) qui ferma définitivement ses portes le 23 décembre 2010. Cette usine, la plus ancienne de G.M. en Europe, occupait plus de 12.000 ouvriers il y a 25 ans et durant son activité (l’une des plus productives du groupe) avait construit plus de 13 millions de voitures. Après Renault à Vilvorde en 1997, ce fut un second coup dur pour le secteur automobile belge… avant l’annonce de l’arrêt de l’usine Ford à Genk il y a quelques semaines.
    Mais ce n’est pas terminé, car l’industrie automobile et l’économie de notre continent vont être confrontées aux dures réalités de la concurrence  en 2013, du fait de la surcapacité de production automobiles dans 40 usines sur la centaine installée en Europe.
    Plus de 60.000 entreprises françaises auront mis la clef sous le paillasson en 2012 et ce sont des centaines de milliers de travailleurs qui auront grossi les rangs d’un chômage structurel qui, loin de se dégonfler, ne fait que croître malgré les déclarations lénifiantes des gouvernants.
    Partout en Europe les difficultés s’accroissent pour l’industrie (et l’activité économique en général) mais personne ne veut stopper l’immigration sauvage qui, au grand bonheur des marchands de soupe, exerce un dumping sur le coût de la main d’œuvre et éjecte nos travailleurs du marché de l’emploi ! 
    L’OMC, l’UE et les diverses organisations internationales instrumentalisées par les mondialistes ont ouvert nos frontières et livré nos économies européennes à la concurrence débridée des pays « émergents », depuis 40 ans. C’est totalement suicidaire.
    Les eurocrates, de Sicco MANSHOLT à Viviane REDING, en passant par Raymond BARRE, Henri SIMONET, Claude CHEYSSON, Etienne DAVIGNON, Edgard PISANI, Jacques DELORS, Abel MATUTES, Karel VAN MIERT,  José Manuel BARROSO ou encore  Pascal LAMY (directeur de l’OMC), sont les véritables responsables de ce désastre économique et du cataclysme social qui, décennies après décennies, engendrent  des coûts sociaux  gigantesques, dont les « capitaines d’industries » se lavent les mains, mais qui sont effectivement supportés par les contribuables nationaux.                          
    Face à l’invasion de pneus chinois, les USA ont adopté des mesures de protection du secteur concerné, par crainte de voir encore des dizaines de milliers d’emplois supprimés.
    Pourquoi ne pas défendre nos fabricants chez nous ? Pourquoi ne pas rapatrier nos industries ?
    Est-il impératif que Jean Vacherot règle son réveille-matin (fabriqué au Japon) à 6h ? Qu’il se rase avec des lames (made in Israël) pendant que son café coule dans une machine (produite aux Philippines) ? Qu’il s’habille avec une chemise (made in Bengladesh), un jean (fabriqué en Indonésie) et porte des chaussures (fabriquées au Viêt-Nam) ? Après avoir préparé son jus d’oranges (cultivées en Afrique du Sud), cuit ses œufs dans une poêle (made in India), croqué des fraises (importation Thaïlandaise) et préparé une banane (du Costa Rica) pour le « petit creux » de 11h, il prend sa calculette (fabriquée au Mexique) pour établir son budget de Noël. En consultant sa montre (produite à Taïwan), il ouvre sa radio (made in China) et démarre sa petite auto (fabriquée à Tanger) pour se rendre chez un nouvel employeur, entre deux fermetures d’usine…A la fin d’une triste journée, il se verse un verre de vin (produit au Chili) pour accompagner sa viande (élevée en Nouvelle-Zélande) et ses pommes de terre (cultivées en Turquie). Ayant chaussé ses pantoufles (fabriquées au Brésil) il allume sa télé (L.G ou SAMSUNG) et se demande bien  pourquoi  il n’arrive pas à trouver un boulot près de chez lui …

    Exigeons de connaître l’origine de nos achats. Partout et toujours, préférons les fabrications locales et nationales ou, à défaut, achetons des produits européens, fabriqués par des européens, pour des européens !

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  • Pourquoi les battististes sont-ils devenus muets ?

    Les éditions Stock viennent de publier un livre d’enquête sous la plume du journaliste Karl Laske, La mémoire de plomb, consacré à Césare Battisti, membre du Pac (Prolétaires armés pour le communisme) condamné en Italie par contumace pour assassinats et réfugié en France, puis au Brésil. Cet ouvrage est intéressant à plus d’un titre. Outre le fait que son auteur dévoile de nouveaux éléments sur les soutiens dont aurait bénéficié Battisti en France – François Hollande, patron du Parti socialiste à l’époque, cité pour avoir rendu visite au criminel dans sa prison et s’être opposé à son extradition, n’est pas des moindres ! – il permet à Eric Conan, dans un article paru dans Marianne.net le 8 décembre 2012, de s’interroger sur la question : « Pourquoi les battististes sont-ils devenus muets ? »
    Polémia

    L’actualité, ce sont aussi les silences.

    L’absence de réactions, chez ceux qui ont plutôt l’habitude d’être prolixes, en en dit parfois autant que les tirades qu’ils aiment nous infliger. Ainsi en est-il du mutisme de quelques-uns des anciens défenseurs de Cesare Battisti depuis la parution, il y a quelques semaines, du livre du journaliste Karl Laske, La mémoire du plomb (Stock), consacré à l’itinéraire du terroriste italien reconverti en auteur de romans policier. Recherché par la justice de son pays qui l’a condamné à la réclusion criminelle à perpétuité par contumace pour assassinats, il fut un temps hébergé par la France avec le soutien tapageur de belles personnes germanopratines avant de prendre la fuite au Brésil.

    La lecture de ce bon livre d’enquête est révélatrice d’une double tradition française : la faible appétence pour la réalité d’une partie de l’élite politico-intellectuelle française et l’importance de l’identité politique du messager de la vérité. Car, si cet ouvrage apporte de nouveaux éléments sur le parcours de Battisti et les soutiens aveugles dont il a bénéficié - de Fred Vargas à Bernard-Henri Lévy et de Carla Bruni à François Hollande (qu’un entourage coupable aura poussé à le visiter en prison) - l’important réside dans l’identité de son auteur : Karl Laske, ancien de Libération et présentement enquêteur au site Médiapart. Le fait que cette mise au point définitive sur les mensonges de Battisti vienne d’un journaliste classé à gauche a soudainement laissé sans voix ses défenseurs alors que six ans plus tôt le très bon livre d’enquête d’un journaliste du Figaro, Guillaume Perrault, Génération Battisti. Ils ne voulaient pas savoir (Plon), n’avait pas eu les mêmes conséquences.

    L’on peut donc tirer de cet assourdissant silence qui suit la parution du livre de Karl Laske deux conclusions. Une même vérité ne produira pas le même embarras selon qu’elle est apportée par un supposé « camp ennemi » ou un supposé « camp ami ». Et une partie de l’intelligentsia préférera toujours la dénégation à la reconnaissance de ses erreurs. Une vieille tradition. L'on considère souvent avec une condescendance amusée la compromission, hier, de tant de beaux esprits avec les mensonges du stalinisme et du maoïsme réels. Comment ont-ils pu se tromper à ce point? se demande le contemporain, sûr d'échapper à un aveuglement aussi exotique. L’affaire Battisti montre qu’une même volonté de ne pas voir a produit plus près de nous un résultat similaire: l'invraisemblable défense de ce terroriste a engendré des insanités comparables à celles déversées lors des affaires Kravtchenko ou Lin Piao. En reprenant, à froid, ce qui s'est dit et écrit pour transformer en victime à protéger un tueur sans remords, Guillaume Perrault et Karl Lake montrent à quel point le déni de la réalité a pu enrôler une multitude de complices. Il y a eu les vrais malhonnêtes, allant jusqu'à caviarder des décisions de justice, mais aussi beaucoup d’« idiots utiles » qui, pour être dans le coup, se sont contentés de signer les habituelles pétitions sans regarder.

    La mobilisation en faveur de Cesare Battisti a fait resurgir une logorrhée que d'aucuns pensaient hors d'usage. Certes, la mise en scène change, cédant au corporatisme (des « auteurs de polars reconnus » se mobilisant pour un « auteur de polars reconnu » comme les chauffeurs de taxi ou les inspecteurs des finances se défendent entre eux) et aux luttes people: les saltimbanques du show-biz (Bedos, Lio, Sollers, etc.) remplaçant Sartre et Foucault. Mais le scénario n'évolue guère. Tout ce qui a été dit par les défenseurs de Battisti, repris par la presse (et même des documentaires hagiographiques financés par l'argent public) ou par des politiques de premier plan se révèle erroné. Qu'il s'agisse des preuves contre Battisti, des engagements de François Mitterrand ou du rôle de la justice italienne, tout a été caché ou travesti pour la grande Cause.

    Ce consentement au mensonge a été d'autant plus coupable que, cette fois-ci, pour ne pas être abusé, il suffisait d'écouter la gauche transalpine, qui, des socialistes à l'extrême gauche et à Attac Italie, s'indignait des délires des pétitionnaires français, lesquels, pour la plupart, se réclament pourtant d'une Europe sans frontières. Car le détour par l'Italie permet d'apprécier la grossièreté des contrevérités déversées à propos de sa justice et de comprendre la blessure infligée à nos voisins de la péninsule par ce mépris pour le consensus transalpin sur le cas Battisti, qualifié de « racisme anti-italien mal dissimulé » par La Repubblica. « Il fallait un gars comme Battisti pour se rendre compte que les gauchistes italiens sont plus réalistes que les socialistes parisiens », conclura ainsi La Stampa.

    Il faut cependant distinguer de ce désastre germanopratin quelques caractères lucides qui ont, dès le début, tenté d'éviter au Parti socialiste de se compromettre dans cette pitoyable affaire : notamment Robert Badinter, Manuel Valls, Bernard Kouchner et Gilles Martinet (qui préfaça le livre de Guillaume Perrault). Tout comme il faut relever le courageux remords de Bertrand Delanoë, qui, abusé, avait fait voter par son Conseil municipal une délibération plaçant l'ancien terroriste « sous la protection de la Ville de Paris ». Le maire de la capitale a eu l’honnêteté de reconnaître « avoir manqué de vigilance et d'autorité », ce qui lui d’ailleurs valu, de la part du comité Battisti, la délicate appréciation d'avoir « baissé la culotte ».

    Eric Conan
    Marianne.net
    8/12/2012  http://www.polemia.com

    Karl Laske, La mémoire de plomb, Stock, novembre 2012, 480 pages.