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géopolitique - Page 874

  • Groenland: un nouveau marché pour les ressources énergétiques

    Au Groenland, les élections récentes ont été remportées par la sociale-démocrate Aleqa Hammond et elles pourraient fort bien modifier le visage de l’île autonome, sous souveraineté danoise;

    Quelques milliers d’électeurs ont choisi la sociale-démocrate Aleqa Hammond pour diriger le nouveau gouvernement du Groenland, une île de dimensions continentales mais qui n’a que la population d’un gros bourg (plus ou moins 57.000 habitants). L’opposition sociale-démocrate du “Siumut” (ce qui signifie “En Avant!”, comme le journal socialiste italien d’antan, “Avanti”, ou son équivalent allemand “Vorwärts!”) a battu le premier ministre sortant Kuupik Kleist et son parti socialiste “Inuit Ataqatigiit” (“Hommes et Solidarité”). Aleqa Hammond a obtenu 42,8% des voix et Kuupik Kleist, 34,4%. Le parti de Madame Hammond a obtenu quatorze sièges et une majorité relative sur les 31 sièges que compte le Parlement du Groenland. Elle devra former une coalition pour s’assurer une majorité absolue. Elle s’est d’ores et déjà affirmée prête à donner vie à une vaste coalition avec tous ceux qui sont disposés à en faire partie.

    L’intérêt politique et géographique que suscite aujourd’hui le Groenland est en grande partie dû aux changements climatiques en cours. Le dégel du permafrost en zone arctique a ouvert de nouvelles routes de navigation et a rendu plus facile l’accès aux ressources naturelles, que l’on trouve en abondance sur le “continent blanc” au Nord de l’Europe. Les investisseurs se bousculent pour obtenir une licence et exploiter au maximum les réserves de pétrole, de gaz, de minerais comme le fer, l’aluminium et les terres rares. “Il y a là-bas une quantité énormes de ressources de grande valeur qui attendent d’être exploitées”, a observé Jan Fritz Hansen, vice-directeur de l’association qui regroupe les armateurs danois. L’intérêt que portent les sociétés étrangères coïncide avec les aspirations des Groenlandais à devenir complètement indépendants du Danemark mais pour y arriver, ils doivent disposer de suffisamment de fonds propres; alors seulement, ils pourront satisfaire cette volonté fébrile de s’autonomiser par rapport à Copenhague. “Il sera bien intéressant de voir le résultat des élections”, avait souligné Damien Degeorges, un spécialiste du Groenland, fondateur de l’ “Arctic Policy and Economic Forum”, qui ajoutait que le Groenland avait toujours été jusqu’ici sous-évalué dans les projets de développement futur de la région arctique. Jusqu’à présent, une seule mine fonctionne au Groenland mais les autorités viennent d’augmenter considérablement le nombre de licences octroyées pour exploiter des minerais: le nombre de ces licences atteint désormais le chiffre de 150 unités. Il y a une dizaine d’années, les licences octroyées étaient moins de 10! L’exploitation potentielle des ressources pourrait apporter des richesses considérables aux citoyens du Groenland mais aussi leur faire courir des dangers nouveaux, surtout sur les plans écologique et social: pollutions à grande échelle et bouleversements dans l’ordre social pourraient en résulter.

    On prévoit l’exploitation d’une mine de fer près d’Issua, à quelques kilomètres seulement de la capitale, où des milliers de tonnes de ce minerais seraient disponibles pour être envoyées chaque année en Chine. Pour sa part, le géant américain ALCOA cherche depuis plusieurs années à installer un complexe de fusion de l’aluminium à Maniitsoq où des milliers de travailleurs chinois seraient embauchés à des prix nettement inférieur aux salaires locaux.

    Les élections qui viennent de se dérouler au Groenland, province autonome du Danemark, ont donc porté aux affaires le parti social-démocrate de Madame Hammond, favorable à l’exploitation des vastes ressources minérales de l’île, tout comme l’était d’ailleurs son rival politique, le leader socialiste Kleist. Les gisements d’uranium au Groenland, s’ils étaient exploités, pourraient redimensionner le marché mondial de l’énergie nucléaire. L’île, de par sa position géographique, forme également la porte d’accès à l’Arctique où la fonte progressive des glaces permet d’envisager l’ouverture de nouvelles routes de navigation maritime dans cette zone que l’on considère de plus en plus comme économiquement rentable et exploitable. Certains analystes estiment que l’intérêt que porte la Chine au Groenland est de nature plus économique que géopolitique. En effet, les puissances qui ont, au Groenland, des intérêts géostratégiques évidents sont surtout les Etats-Unis, le Canada, l’Union Européenne et les pays d’Europe septentrionale, sans oublier, bien entendu, la Russie. Tous ces Etats se contentent pour l’instant de sonder les fonds marins et de redéfinir le tracé des frontières maritimes dans l’Arctique. Le réchauffement du Groenland a déjà révélé bien des ressources du sous-sol de l’île, notamment les terres rares, c’est-à-dire les métaux utilisés comme ingrédients principaux dans la fabrication de téléphones cellulaires, d’armes et de technologies ultramodernes. C’est aujourd’hui la Chine qui contrôle environ 90% de la production globale de ces terres rares donc l’exploitation des gisements groenlandais pourrait mettre un terme au monopole chinois en ce domaine.

    Les villages de l’île qui jusqu’ici n’ont vécu que de la pêche s’inquiètent bien entendu des changements climatiques, dont l’effet premier est la fonte des glaces. L’uranium dans ce cas pourrait être l’occasion d’acquérir davantage d’indépendance et d’obtenir un travail plus sûr. Tout cela n’est pas sans danger pour la santé et pour l’environnement. Mais il n’y a pas que cela. Le quotidien danois “Politiken” estime que l’exploitation de ces gisements ne fera qu’augmenter le népotisme et la corruption, déjà solidement implantés dans les milieux politiques de l’île. A ce danger, il convient aussi d’évoquer une possible polarisation sociale déstabilisante pour la société groenlandaise: celle qui opposera les centres urbains proches des mines aux villages isolés. Tous ces éléments doivent nous induire à poser des questions quant à l’avenir du Groenland, victime prédestinée des grands consortiums américains et européens sans oublier ceux des pays émergents comme la Chine, la Russie et la Corée du Sud en toute première ligne.

    Andrea PERRONE.
    (article paru sur le site de la revue romaine “Rinascita”, 15 mars 2013, http://www.rinascita.eu/ ).

  • La lutte pour l’Afrique

    Au Mali comme au Soudan, les Etats-Unis tirent les ficelles et veulent chasser les Chinois du continent noir

    Des troupes françaises ont récemment chassé les islamistes des villes du Nord du Mali. Ainsi, le but officiel des opérations militaires est atteint: le gouvernement dans la capitale Bamako devrait retrouver sa pleine souveraineté sur l’ensemble du territoire malien. Mais le deuxième but de guerre n’est pas atteint: assurer pour le long terme les richesses du sol malien pour le bénéfice exclusif de la “communauté des Etats occidentaux”, surtout des Etats-Unis. On oublie trop souvent que le Mali est le troisième producteur d’or d’Afrique et dispose de grandes réserves d’uranium, de cuivre et de bauxite; de plus, les indices se multiplient qui permettent de supposer qu’il y a également des réserves de pétrole sous le sable du désert. On pense que ce pétrole se trouve dans le bassin de Taoudeni dans le Nord du pays; quatre consortiums étrangers —parmi lesquels la “China National Petroleum Corporation” (CNPC), dépendant entièrement de l’Etat chinois— procèdent à des missions d’exploration.

    Les rapports sino-africains

    Déjà en novembre 2011, le premier ministre malien Cisé Mariam Kaïdama Sidibé, alors encore en poste, estimait que l’étude de certaines données sismiques permettait “d’espérer”. Ensuite, cet Etat très pauvre voudrait aussi trouver une vocation de pays de transit pour l’énergie. “Le Mali pourrait offrir une route stratégique de transit pour l’exportation de pétrole et de gaz naturel en provenance de la région du Sud du Sahara en direction du monde occidental, et relier le bassin de Taoudeni au marché européen via l’Algérie”. Pourtant, la Chine pourrait s’interposer et freiner l’élan des Américains et des Européens, surtout si l’on se rappelle que l’Empire du Milieu va chercher en Afrique un tiers de ses besoins énergétiques, ainsi que de grandes quantités de cuivre et de fer.

    En bout de course, force est de constater que les Chinois disposent de quelques avantages par rapport aux Occidentaux: d’une part, ils ne bassinent pas les oreilles des Africains en leur tenant des discours hypocrites sur les “droits de l’homme” et sur la “démocratie”; d’autre part, il est plus aisé, pour les Chinois, qui détiennent des masses considérables de devises, de faire des “emplettes” en Afrique, en se montrant très généreux. La Chine a renoncé aux dettes de plus de trente pays africains et, au printemps de l’année 2006, pour ne citer qu’un seul exemple, le Président Hu Jintao a signé au Nigéria un accord qui permet à une entreprise chinoise d’exploiter à 45% un champ pétrolifère pour une compensation d’environ 1,8 millard d’euro; la Chine s’est ainsi incrustée dans le pays le plus riche en pétrole du continent noir.

    Les objectifs américains sur le long terme

    En tenant compte de cette présence chinoise en Afrique, on peut conclure que le Président français François Hollande n’a donné son feu vert pour l’opération militaire qu’avec l’assentiment des Américains. En effet, les Etats-Unis, comme la France, ancienne puissance coloniale, ont des intérêts stratégiques au Mali, comme l’atteste un rapport publié le 16 août 2012 par le CRS (“Congressional Research Service”), une agence d’études et de recherches du Congrès américain. Dans ce rapport, les auteurs constatent que la crise de longue durée qui affecte le Mali, “défie les objectifs politiques à long terme des Etats-Unis” et donc “l’efficacité des efforts américains déjà présents dans la région”.

    Il s’agit tout simplement des efforts que fournissent depuis quelques temps déjà les Etats-Unis pour asseoir leur hégémonie en Afrique, efforts auxquels nous n’avons pas prêté toute l’attention voulue en Europe. Boris Volkhonski, de “l’Institut Russe pour les Etudes Stratégiques” rappelle que l’ancien Président des Etats-Unis, George W. Bush, avait déjà concentré le gros de ses efforts à établir une domination américaine sur le “plus grand Moyen Orient”, ce qui avait obligé les Américains à “négliger manifestement” d’autres régions comme l’Afrique. Bush avait pourtant, de son propre chef, tenté en 2007 de rendre caduque cette erreur en créant l’AFRICOM, une structure régionale de commandement englobant tout le continent noir à l’exception de l’Egypte.

    Entretemps, l’AFRICOM est devenue le fer de lance des efforts hégémoniques américains en Afrique. Les Etats-Unis tentent de lier à eux leurs partenaires africains en leur envoyant des instructeurs militaires, en fournissant des armes ou en organisant des manoeuvres communes: tout cela se passe dans le cadre officiel de la “lutte contre le terrorisme”. Mais dans le fond, les Etats-Unis ont une toute autre idée derrière la tête, comme l’explique Maximilian C. Forte de l’Université Concordia de Montréal: “Les intérêts chinois sont considérés comme rivaux de ceux de l’Occident aux niveaux de l’accès aux ressources et de l’influence politique. L’AFRICOM et une série d’autres initiatives du gouvernement américain doivent être perçus dans la seule optique de cette rivalité”.

    Même la Commission européenne concluait il y a quelques années dans l’un de ses rapports, que les Etats-Unis déployaient en Afrique “une nouvelle stratégie”, s’orientant sur les directives de la Doctrine Carter. Cette dernière considérait, à la suite de l’entrée des troupes soviétiques en Afghanistan en décembre 1979, que toutes les activités développées par des puissances étrangères dans la zone du Golfe Persique étaient des actions hostiles aux Etats-Unis qui devaient être contrées de manière appropriée. Walter Kansteiner, un ancien sous-secrétaire d’Etat américain, qui avait été naguère un responsable des affaires africaines, justifiait la nécessité d’adapter la Doctrine Carter de la manière suivante: “Le pétrole d’Afrique relève pour nous d’un intérêt national et stratégique croissant et le deviendra toujours davantage”.

    L’exemple du Soudan

    Quand il s’agit d’imposer leurs intérêts stratégiques, les Etats-Unis n’hésitent jamais à s’immiscer dans les affaires intérieures d’autres Etats, comme le démontre le cas du Soudan, où, le 9 juillet 2011, le Sud chrétien et animiste s’est détaché du Nord islamique après une consultation populaire. Washington a soutenu massivement le mouvement sécessionniste du Sud-Soudan, non pas par souci humanitaire mais parce qu’il y avait des raisons stratégiques à ce soutien. En effet, les réserves de pétrole de l’ensemble du Soudan avaient été estimées à quelque cinq milliards de barils (= 159 litres), dont environ 85% se trouvaient dans le Sud aujourd’hui indépendant, grâce à la bienveillance de Washington. Qui plus est, le régime islamiste de Khartoum est depuis de nombreuses années un partenaire important de la Chine qui avait pris la place des Etats-Unis dans l’exploitation de l’or noir. Après que le consortium pétrolier américain Chevron se soit retiré du Soudan dans les années 80 à cause de la guerre civile qui ravageait le pays, la CNPC chinoise avait pris sa place et avait fini par détenir 40% des parts de la société pétrolière soudanaise “Greater Nile Petroleum Operating Company”.

    Khartoum a dû payer le prix fort pour sa coopération avec les Chinois. A ce propos, on trouve ce texte dans le “Washington Post” du 23 décembre 2004: “Les relations sino-soudanaises sont devenues très étroites, ce qui démontre que les liens économiques qu’entretient la Chine dans le monde éveillent des soucis quant aux droits de l’homme et commencent à contrarier les intérêts des Etats-Unis”. En décembre 2005, les instances américaines s’occupant d’aide au développement publiaient un “papier” de teneur stratégique dans lequel on pouvait lire que le Soudan relevait, pour les Etats-Unis, “de la plus haute priorité” vu son importance dans la lutte contre le terrorisme et pour la stabilité régionale. Cette importance, les chiffres sonnants et trébuchants la révèleront aussi.

    Une attention toute particulière

    Pour l’année financière 2009, les Etats-Unis ont versé quelque 420 millions de dollars en “aide humanitaire” au Soudan, avec bien entendu une attention toute particulière pour les provinces du Sud du pays. Il ne s’agissait pas vraiment de distribuer des vivres aux affamés, de construire ou de réparer des infrastructures mais surtout de mettre sur pied un appareil d’Etat. L’USAID, l’instance américaine qui s’occupe du développement à l’échelle mondiale, voyait, dans cette aide au Soudan, “une opportunité extraordinaire de travailler avec de nouvelles unités gouvernementales, pour soutenir avec elles un plan de réformes, qui, s’il réussit, consolidera les intérêts américains en politique étrangère dans la région, en contribuant à y asseoir la stabilité, non seulement en Iran mais dans toute la Corne de l’Afrique”.

    En conséquence de quoi Washington n’a rien omis pour affaiblir le Nord du Soudan et, par ricochet, la Chine. Sur le plan politique, cela s’est traduit par un soutien au “Mouvement de Libération Populaire du Sud-Soudan” (SPLM ou “Sudan People’s Liberation Movement”), la principale force politique dans le Sud du pays. Sur le plan de la propagande, le projet “Enough” a joué un rôle primordial. En théorie, et selon la définition qu’il donne de lui-même, ce projet milite pour “mettre un terme aux génocides et aux crimes contre l’humanité”. Son objectif réel était de créer un état d’esprit favorable à l’accession du Sud-Soudan à l’indépendance dans les médias occidentaux.

    “Enough” est indissolublement lié à deux noms: ceux de George Clooney et de John Pendergast. Clooney est un acteur connu d’Hollywood, dont on a utilisé la renommée pour garantir le succès de shows médiatiques ad hoc, tandis que Pendergast était un expert ès-questions africaines auprès du “Conseil de sécurité nationale” de l’ex-Président américain Bill Clinton; c’est lui qui avait conçu et mené la campagne médiatique et diplomatique contre le Soudan. Ensuite, les liens entre “Enough” et le “think tank” du parti démocrate “Center for American Progress” sont fort étroits. Ce centre, par ailleurs, bénéficie du soutien du spéculateur en bourse, le milliardaire George Soros.

    Dr. Bernhard TOMASCHITZ.
    (article paru dans “DNZ”, Munich, n°8/2013).
    merci R. Steuckers

  • La Turquie: plaque tournante des trafics de chair humaine

    Les réseaux criminels de la mafia turque et les “Kacakci”

    La Bulgarie et la Roumanie, qui sont les deux pays qui ont adhéré le plus récemment à l’UE, insistent depuis un an, avec force véhémence, pour être inclus dans l’ “espace Schengen”, demande qui a été refusée jusqu’ici grâce au veto qu’opposent les Pays-Bas. L’Autriche, comme un brave petit chien, ne s’y est pas opposée. L’adhésion de ces deux pays à l’espace Schengen, où les frontières sont abolies, pourrait augmenter considérablement le nombre de migrants illégaux en Europe. Déjà actuellement de plus en plus de personnes, venues de Turquie, entrent dans l’UE via le territoire bulgare, considéré comme le pays de transit idéal. Dès que ces migrants arrivent en Bulgarie, ils empruntent une route qui les mène en Macédoine puis en Serbie; depuis le territoire serbe, ils débarquent en Hongrie et se retrouvent dans l’espace Schengen. Une autre route les amène de Serbie au Monténégro et, de là, via la Bosnie en Croatie puis en Slovénie, donc dans l’espace Schengen.

    Les autorités bulgares ont constaté un doublement du nombre des migrants ayant franchi la frontière en octobre et en novembre 2012, mais elles ne peuvent rien entreprendre contre les bandes de passeurs, apparemment bien organisées. Tout cela se passe alors que dans les cercles bien pensants de l’eurocratie on répète à satiété que la Bulgarie est presque prête à faire partie de l’espace Schengen. Vu les chiffres et les faits, cette adhésion ne devrait même pas être envisagée. Reste à espérer que la Bulgarie et la Roumanie, derniers pays arrivés au sein de l’UE, ne seront reçus que le plus tard possible dans l’espace sans frontières et que les passeurs devront abandonner leurs routes balkaniques, circonstancielles et difficiles, vu les nombreuses frontières à franchir, et seront dès lors plus facilement démasqués.

    La politique la plus efficace et la plus intelligente à mener serait évidemment de combattre les passeurs et de les neutraliser dès leur point de départ. Les autorités turques pourraient, à ce niveau, avoir un champ d’action idéal pour prouver qu’elles sont mûres pour entrer dans l’UE et qu’elles utilisent de manière appropriée les milliards d’euro qu’elles perçoivent grâce à la générosité de l’UE, qui vise encore et toujours une politique d’intégration de la Turquie dans l’orbite européenne. Mais au lieu d’agir, les autorités turques pratiquent la politique de l’autruche, plongent la tête dans le sable et observent la contrebande de chair humaine sans lever le petit doigt.

    Les passeurs, installés dans la métropole turque du Bosphore, sont désignés par les candidats à l’immigration dans l’UE sous le nom de “kacakci”. Chaque groupe ethnique parmi les migrants a ses propres réseaux de “kacakci”. Les plus puissants d’entre eux disposent de cellules à l’intérieur de l’UE. Dans la plupart des cas, ils sont éparpillés en plusieurs domaines d’activités, constate un diplomate de l’UE: ils ne confondent pas narco-trafic et trafic d’êtres humains.

    Il semble qu’il n’existe pas d’organisation générale chapeautant le travail des passeurs, impliqués dans la contrebande d’êtres humains au départ de la Turquie et à destination de l’UE, c’est-à-dire une organisation qui règlerait l’ensemble du voyage des candidats à l’immigration, par exemple depuis l’Afghanistan jusqu’à l’Autriche. Mais il existe assurément en Turquie un solide réseau mafieux coordonnant les activités des passeurs. Ces réseaux ne sont pas directement impliqués mais fournissent aux passeurs des contacts, des informations sur les données locales et sur les infrastructures, de même que tout autre renseignement utile. Pour les “kacakci”, ces réseaux sont bien entendu indispensables pour corrompre les fonctionnaires turcs.

    Chaque démarche entreprise par les passeurs est bien organisée et planifiée. Ils savent toujours parfaitement qui sont les migrants qui arrivent et surtout combien d’argent ils ont sur eux. Sur base de ce savoir relatif aux personnes candidates à l’immigration dans l’UE, les “kacakci” programment individuellement l’entrée des migrants en Europe. Les “kacakci” sont répartis en différentes cellules qui, chacune pour elle-même, encadrent une portion du voyage. Les candidats à l’immigration doivent au départ de chaque portion de route payer immédiatement 50% des frais de transit aux passeurs, le reste étant payé à l’issue de la partie effectuée du voyage.

    Pour un Afghan, le passage d’Istanbul en Grèce coûtait environ 1500 euro en novembre 2012. L’ensemble du trajet de Kaboul à Athènes coûte actuellement entre 5000 et 8500 euro, selon la qualité des services offerts par les passeurs et selon les difficultés qui se présentent. Nous examinerons les politiques envisagées par l’UE dans un prochain article.

    Dietmar HOLZFEIND.
    (article paru dans “zur Zeit”, Vienne, n°11/2013; http://www.zurzeit.at/ ).
    Merci R.Steuckers

  • Submergés par l’hypocrisie et la prétention, Obama et son parti se dirigent vers la dictature

    Ex: http://www.horizons-et-debats.ch/

    Joseph Staline est connu pour avoir dit quelque chose allant dans le sens de : « Un mort c’est une tragédie, 25 000 morts sont une statistique. » Depuis les fusillades au Connecticut, le président Obama a démontré presque chaque jour que l’oncle Joe avait raison.
    Vous rappelez-vous de la prise de position «touchante» et larmoyante du président après cette fusillade ? Il a versé des larmes de crocodile au sujet de la mort de ces 20 enfants et a fait une représentation de la qualité et la sincérité d’un acteur. Il nous fait presque oublier qu’il dirige un parti qui a protégé un «droit» des femmes américaines – et leurs bourreaux affairistes de l’American Medical Association –, qui depuis 1973 a provoqué la mort de plus de 50 millions d’enfants américains. La mort de ces enfants du Connecticut n’est rien d’autre qu’une catastrophe humaine; face à cela la mort de ces 50 millions d’autres enfants est un holocauste humain, qui fait ressembler Hitler à un assassin-amateur et qui fait apparaître Obama, Clinton, Carter et leur parti, avec Staline et Mao, à la pointe de la liste des plus grands tueurs de l’histoire.
    Le zèle d’Obama d’utiliser la mort des enfants de Connecticut pour mieux pouvoir abolir le deuxième amendement [de la Constitution des Etats-Unis] n’est pas son unique utilisation d’Américains tués afin de faire avancer ses buts idéologiques et sa passion du pouvoir. Chaque membre du Corps des marines américain et chaque soldat qui est mort après l’annonce du gouvernement Obama que les Forces armées des Etats-Unis quitteraient le pays en 2014, est mort absolument pour rien. Leur vie a été gaspillée pour promouvoir la carrière politique de Barack Obama. En annonçant cette décision, Obama et son parti on déclaré la défaite des Etats-Unis et pendant que les Américains sans connaissances d’histoire ont applaudi à cette décision, les ennemis des Etats-Unis – notamment les Talibans, Al-Qaïda, l’Arabie saoudite – ont exactement compris cet homme. Ils ont réalisé qu’Obama avait hissé le drapeau blanc pour leur dire : « C’est vous qui gagnez, nous nous retirerons aussi­tôt que j’aurais été réélu. » Obama va terminer le retrait américain d’Afghanistan et chaque vie que l’armée américaine va perdre jusqu’à la fin du retrait, sera une vie gaspillée. Et que va-t-il se passer avec les Afghans qui se sont mis au service des Etats-Unis et de l’OTAN ? Eh bien, ils mourront, ils seront tués par des groupes d’islamistes militants, qui désignent l’Administration Obama – sur ordre du Committee on American Islamic Relations (CAIR) – d’organisation d’extrémistes non islamique et violente. Prochainement les Américains réaliseront que ces groupes – favorisés par les démocrates et le CAIR – mèneront la guerre à l’intérieur des Etats-Unis.
    Le travail bâclé d’Obama concernant l’utilité personnelle et politique de meurtres sans raison n’apparaît nulle part plus clairement que dans les relations confidentielles que lui et le parti démocrate ont avec les vendeurs de la mort, qui dominent l’industrie américaine de divertissement. Lors de la dernière campagne présidentielle nous avons pu observer qu’Obama n’a laissé passer aucune occasion de se montrer en compagnie avec des acteurs et des metteurs en scène qui produisent des films et des programmes de télévision, qui conditionnent les enfants américains à accepter le meurtre et les mutilations à grande échelle en tant que normal et de considérer les femmes principalement comme putes. Il s’est aussi montré avec des chanteurs, qui utilisent des textes qui célèbrent le meurtre ou plaident même en sa faveur et dans lesquels les femmes sont représentées en sous-hommes qui ne servent qu’à remplir les désirs des hommes. On l’a aussi vu entouré de génies de l’informatique, spécialistes de la production de jeux vidéo qui permettent aux enfants de tuer quotidiennement pendant plusieurs heures un énorme nombre d’êtres humains. Précisément ce mois (janvier 2013), lorsque Obama, le vice-président Biden et le gouverneur de New York, Cuomo, ont propagés l’abolition du deuxième amendement, leurs copains et sponsors de Hollywood ont rafflé plus de 40 millions de dollars par semaine avec leurs derniers films qui propagent des « tueries pour s’amuser » : « Texas Chainsaw – 3-D » et « Django Unchained ».
    Obama et son parti radotent sans fin sur l’éducation, mais en la restreignant soigneusement à l’éducation en classe, le milieu, dans lequel eux et leurs amis du syndicat des enseignants ont enseigné à plusieurs générations de lycéens et de collégiens, de se méprendre des Etats-Unis et d’haïr leur pays, de refuser la religion en tant que superstition ou maladie mentale, d’attendre du gouvernement fédéral de l’aide à vie et ainsi d’éviter tout travail sérieux et dur et de croire fanatiquement à des conceptions fantaisistes et socialement destructrices de diversité et de multiculturalisme.
    Mais tant la substance de l’enseignement des lycéens et des collégiens est actuellement pitoyable et tordue aux Etats-Unis, tant l’éducation pénétrante, puissante, insidieuse et motivant à la violence qu’on inculque à nos enfants est l’expression des convictions principales, orientées vers la mort, d’Obama et de son part i:
    Le «droit» des citoyennes américaines, de faire tuer leurs enfants selon leurs désirs, par des bourreaux à louer, faisant partie de l’American Medical Association qui se trouve sous protection du gouvernement fédéral.
    Le «droit» de l’exécutif du gouvernement fédéral d’appliquer uniquement les lois qui lui plaisent; de vouloir éliminer de manière agressive la croyance religieuse de la place publique; de détruire la sécurité nationale des Etats-Unis suite au refus de contrôler les frontières; et d’envoyer à l’étranger nos soldats et nos membres du Corps des marines pour lutter dans des guerres, qu’on ne prévoit même pas de gagner, et continuer à les y faire tuer, jusqu’à ce qu’il soit politiquement opportun à les rapatrier.
    Le «droit» de l’industrie de divertissement, de réaliser des bénéfices énormes avec des produits, qui réduisent nos enfants à un système de valeurs correspondant à des barbares tuant à discrétion, tout en leur inculquant que la misogynie, les perversions sexuelles et toute variété d’immoralité humaine ne sont que des formes alternatives de la «normalité» et qu’il ne faut pas seulement les tolérer, mais aussi les solenniser en tant que preuve de leur loyauté envers la diversité.
    Le «droit» de l’establishment éducatif américain, de supprimer l’éducation des enfants, afin de mieux pouvoir servir d’agents de recrutement dans les écoles pour le parti démocrate, qui fait auprès des enfants de la propagande pour qu’ils deviennent dépendants du gouvernement fédéral; diaboliser les fondateurs de l’Amérique en tant que négriers morts, blancs et masculins et de dénigrer tous ce qu’ils ont fait; soutenir de manière irréfléchie une politique extérieure interventionniste, qui résulte en une guerre interminable avec l’islam – ou, si vous préférez être politiquement correct, avec des organisations extrémistes violentes (Violent Extremist Organisations) –, suite à laquelle les Etats-Unis vont mourir d’une hémorragie suite à la perte de vies humaines, de finances et de stabilité politique interne.
    Dans l’ensemble l’Amérique, qui a été créée au cours de 60 dernières années, lorsque le pouvoir était en main d’Obama et de ses prédécesseurs démocrates et leur parti – secondé par les alliés de Hollywood, Silicon Valley et des syndicats d’enseignants –, une Amérique, qui est plus que jamais, depuis la veille de la guerre civile américaine, divisée dans un grand nombre de questions fondamentales. En outre, c’est un pays, dont la Constitution est attaquée de front par l’administration Obama. Premièrement, les réglementations d’Obama concernant le contrôle des naissances/l’avortement violent les droits de l’église catholique américaine garantis au premier amendement [First Amendment], de même que ceux d’une partie des paroisses protestantes, musulmanes et juives. Et hier [le 9 janvier 2013] Biden a communiqué à ses alliés des médias hurlants, mous et opposés aux armes à feu, qu’Obama pense à restreindre les droits du deuxième amendement à l’aide d’une ordonnance.
    C’est justement à cause de la possibilité d’attaques arbitraires de l’exécutif du gouvernement fédéral contre la Constitution et/ou le Bill of Rights que les fondateurs du pays ont garanti le droit des Américains de s’armer autant qu’ils l’estiment nécessaire. La Constitution et le Bill of Rights peuvent être révisés par un processus constitutionnel officiel, mais ils ne peuvent pas être changés uniquement par un acte législatif du Congrès ou par une ordonnance de l’exécutif. Une révision selon les directives fixées dans la Constitution est légale si elle a le soutien de la population, mais un amendement uniquement par voie législative ou par un diktat présidentiel n’est rien d’autre qu’une dictature pure et simple – dont les fondateurs du pays auraient approuvés l’anéantissement à qu’ils voulaient justement favoriser avec le deuxième amendement.•
    Michael Scheuer

    Source : non-intervention.com du 10/1/13
    (Traduction Horizons et débats)

    * Michael Scheuer, 1952, historien et analyste politique. Jusqu’en 2004, Scheuer a été collaborateur de la CIA pendant 22 ans, où il a dirigé de 1996 à 1999 l’unité «Usama-bin-Ladin». Après avoir quitté la CIA, il a travaillé comme journaliste pour CBS News et The Jamestown Foundation. Actuellement, il enseigne à l’Université Georgetown de Washington. En outre, il est spécialiste en sécurité auprès de diverses chaines de télévision et écrit des livres. Il est devenu célèbre notamment suite à son livre «Imperial Hybris: Why the West is Losing the War on Terror.» [Hybris impériale: Pourquoi l’Occident va perdre la guerre contre le terrorisme] qu’il a, à la demande de la CIA, d’abord publié anonymement. En 2012, il a soutenu la candidature de Ron Paul à cause de ses positions dans le domaine de la politique extérieure.

    http://euro-synergies.hautetfort.com/

  • Irak, l’ombre de la guerre

    Anne Nivat, grand reporter de guerre indépendante, nous plonge au cœur de la société irakienne. Auteur de nombreux livres sur la question, elle est retournée en Irak cette fois avec une caméra pour retrouver certains de ses amis. Pendant dix ans, elle avait appris à les connaître en partageant leur quotidien, même au plus fort de la guerre. Toujours seule, sans autre protection que celle des familles qui l’accueillaient, Anne Nivat est restée volontairement discrète, par respect pour ses hôtes et pour ne pas devenir une cible.

    Une mère, un pharmacien, un prêtre, un ancien amiral déchu de l’armée de Saddam Hussein, osent pudiquement témoigner. Dix ans après l’entrée en guerre des Américains, un an et demi après le départ des derniers soldats étrangers, on se rend compte que la guerre en Irak n’est pas vraiment terminée.

    http://theatrum-belli.org/

  • “Irak : dix ans après l’invasion, le risque d’une guerre civile”

    Dix ans après l’invasion de l’Irak par les Américains et les Anglais, le point sur la situation dans le pays, où stabilité et sécurité sont loin d’être acquis.

    Dix ans après la mission Iraqi Freedom, menée par les Américains et les Anglais, pour renverser Saddam Hussein, l’Irak est toujours un pays d’une grande instabilité, déchiré par des tensions entre communautés et secoué par des attentats terroristes.

    Pourquoi, alors que le pays s’est doté d’une constitution et est redevenu un grand pays exportateur de pétrole, la situation est-elle toujours aussi instable d’un point de vue politique et communautaire ?

    Karim Pakzad, chercheur à l’Iris, spécialiste de l’Irak, analyse pour BFMTV.com une situation complexe aux sources de tension multiformes.

    Quelle est la situation politique en Irak aujourd’hui ?

    L’Irak connait une crise politique multiforme. Malgré les élections législatives et la formation d’un parlement, il y a de nombreuses tensions, d’une part entre la communauté chiite qui gouverne l’Irak et qui compose la majorité de la population, et les sunnites, mais aussi entre les Kurdes et le gouvernement. Après la chute de Saddam Hussein, les Irakiens se sont dotés d’une constitution qui leur a permis d’organiser des élections dans des conditions assez satisfaisantes, à laquelle l’ensemble des communautés ont eu accès.

    Mais c’est la communauté chiite, majoritaire en Irak, qui gouverne. Entre sunnites et chiites, le conflit date de l’intervention américaine, qui a privé les arabes sunnites du pouvoir. Jusqu’à 2003, les sunnites gouvernaient. Ils ont perdu le pouvoir à la suite des élections.

    Quelles sont les critiques émises à l’encontre du gouvernement irakien ?

    Les sunnites accusent le Premier ministre d’autoritarisme et de monopoliser le pouvoir. Nouri al-Maliki, en place depuis 2006, est à la fois Premier ministre, ministre de la Défense, de l’Intérieur et de la Sécurité nationale.

    De leur côté, les Kurdes accusent le gouvernement de Maliki de ne pas appliquer la constitution. Celle-ci prévoit un système fédéral en Irak. Les Kurdes ont appliqué ce principe, dès le lendemain de l’adoption de la constitution. Ils ont leur propre gouvernement, leur propre président et leur propre parlement. Mais les chiites et les sunnites n’ont pas encore appliqué ce système.

    Les chiites qui détiennent le pouvoir central, et les ressources pétrolières, n’y ont pas intérêt. Les sunnites n’y ont pas intérêt non plus, parce que les régions qu’ils occupent sont dépourvues de ressources pétrolières.

    Y a-t-il un risque de guerre civile en Irak ?

    Tous les éléments d’une guerre civile sont réunis en Irak, si la crise politique continue. Les sunnites n’ont jamais accepté d’avoir perdu le pouvoir et les chiites ne sont pas disposés à partager ce pouvoir de façon équitable.

    En outre, la région occupée par les Kurdes apparaît presque comme un état indépendant. C’est une région qui connait un développement économique foudroyant. Les Kurdes revendiquent la ville de Kirkouk, qu’ils considèrent comme leur capitale historique. Mais ni les chiites ni les sunnites ne sont disposés à leurs céder. Et la constitution, qui prévoit un référendum sur le sort de Kirkouk, n’est pas appliquée.

    La guerre civile peut-elle être évitée ?

    L’influence des Ayatollah chiites, qui commencent à critiquer et prendre leurs distances vis-à-vis de Maliki, pourrait être déterminante. Les Ayatollah chiites ont en effet une influence extraordinaire sur les chiites irakiens, le gouvernement irakien, mais aussi sur les chiites du monde entier.

    Plusieurs conditions sont nécessaires pour installer en Irak une certaine stabilité. Il faudrait d’une part que les prochaines élections, qui auront lieu dans un an, se déroulent d’une manière satisfaisante, et qu’une autre alliance autour des chiites et des Kurdes arrive à former un gouvernement plus acceptable pour les sunnites. D’autre part, il faudrait que ce gouvernement arrive à limiter l’influence des pays étrangers comme l’Iran et Arabie saoudite.

    L’Irak a les moyens suffisants pour se développer. Les revenus pétroliers irakiens s’élevaient ainsi à 100 milliards de dollars en 2012.

    Quels sont les autres facteurs de déstabilisation du pays?

    Avec le renversement de Saddam Hussein, l’Irak n’est plus aujourd’hui un pays uniquement arabe. La constitution irakienne définit l’Irak comme un pays composé de différentes communautés. Ainsi le président de la République, Jalal Talabani, est-il kurde, et le Premier ministre chiite. Or, l’Arabie saoudite et les pays du Golfe persique (peuplés de sunnites) n’ont jamais accepté le pouvoir chiite. A mesure que les rivalités dans la région entre l’Iran (chiite) et l’Arabie saoudite, les Emirats et le Qatar (tous trois sunnites) augmentent, cela déstabilise un peu plus la situation en Irak.

    Depuis dix ans, les attentats ont principalement visé la communauté chiite. La branche irakienne d’Al-Qaïda, mais aussi les anciens du parti Baas (le parti de Saddam Hussein), ou encore les islamistes irakiens, tentent de déstabiliser l’Irak pour revenir au pouvoir, aidés en cela par l’Arabie saoudite. Ils tablent sur la marginalisation de l’Iran, menacé par certaines puissances étrangères, qui ne pourrait pas intervenir en cas de guerre civile. C’est aussi l’analyse des nationalistes sunnites du parti Baas et des partis islamistes sunnites. Voilà pourquoi les attentats anti-chiites continuent.

    Enfin, la situation en Syrie envenime la crise politique en Irak. Le gouvernement irakien craint que le remplacement de Bachar al-Assad (qui est soutenu par l’Iran chiite) ne permette l’arrivée au pouvoir des sunnites en Syrie. En renforçant la communauté arabe sunnite cela renforcerait la crise politique en Irak. Voilà pourquoi le pouvoir irakien est l’un des gouvernements arabes qui n’est pas tout à fait favorable à l’opposition syrienne.

    BFMTV  http://fortune.fdesouche.com

  • Jean-Michel Quatrepoint Le budget militaire : touché, coulé

    L’intervention au Mali sera-t-elle le chant du cygne de l’armée française ? C’est fort possible, au regard des coupes budgétaires qui se préparent.

  • « A vouloir se faire, l'Europe se défait. »

    « Qu'est-il possible, alors ? »

    « Ce qui serait possible, c'est le développement des souverainetés nationales et leur entente par mise en évidence de leur intérêt commun sur un très petit nombre de thèmes. Par exemple, leur sécurité intérieure et extérieure, mais qui n'irait pas jusqu'à supposer une défense commune...

    « Vous ne sauvez même pas le projet de défense européenne? »

    « Bien sûr que non. Soyons réalistes. Le mot « défense » suppose d'abord qu'il y ait un adversaire contre lequel on se défend. Pour l'instant, personne ne sait où il est. Deuxièmement, il faudrait que cet adversaire soit reconnu communément par un ensemble de peuples qui se croient menacés par lui. Je vois mal comment un adversaire pourrait aujourd'hui menacer simultanément le Portugal, la Suède, la Grèce, l'Irlande. Ce n'est pas imaginable. Troisièmement, je ne vois pas pourquoi des peuples aussi différents que les Anglais, les Portugais ou les Italiens trouveraient des raisons communes pour envoyer leurs militaires se faire tuer là ou les intérêts français seraient menacés. Ce n'est pas tenable.
    La seule chose qui est immuable sur cette terre, c'est le temps. Tout peut être modifié sauf le passage du temps. On ne peut pas revenir en arrière. C'est un mystère peut-être, mais c'est comme ça. Or la création politique dont nous rêvons suppose la suppression du passage du temps, donc quelque chose
    d'inhumain, de suprahumain, d'étranger. »

    « C'est donc voué à l'échec? »

    « A l'échec ou pour le moins à la sortie de l'Europe hors de l'histoire. L'Europe n'aura plus d'autre solution que de se mettre dans la mouvance américaine, ou bien dans la mouvance du tiers-monde, mais elle ne le fera pas parce qu'elle appartient au camp des riches. Du fait de son association avec le clan des riches, elle aura à subir la vengeance des 4 milliards de sacrifiés actuels, alors que traditionnellement, de par son histoire, rien ne la désignait à un tel destin. »

    « Voulez-vous dire que l'Europe faussement unie sera incapable de faire face à l'immigration et à la pauvreté, qu'elle ne pourra endiguer la fracture économique entre les nantis conduits par les États-Unis et les déshérités de la planète? »

    « Effectivement. L'Europe unie est un mythe. La fracture, la fissure s'accroît entre le monde nanti et environ 4 milliards d'êtres humains installés dans la zone Asie Pacifique pour la plupart (la Chine, l'Inde, le Pakistan, l'Indonésie, la presqu'île du Sud-Est asiatique), notamment par les différences de niveau de vie, elles-mêmes conséquences de la « marchandisation » du monde dont les États-Unis sont le fer de lance.

    Avant la dislocation de l'URSS, l'humanité vivait avec deux perspectives: celle de l'économie de marché à l'américaine, avec son brio, ses succès mais ses difficultés aussi, et la perspective socialiste, marxiste-léniniste. Les peuples avaient le choix entre une perspective ou une autre, mais les plus miséreux pouvaient patienter en ayant l'espoir de pouvoir, un jour, s'associer soit à l'une soit à l'autre de ces deux options. La destruction de l'Union soviétique, la disparition de l'espérance marxiste-léniniste ne laisse plus comme seule hypothèse que celle de l'économie de marché et de l'économie libérale. Aussitôt, le monde a commencé à regarder cette économie libérale et à la scruter avec un intérêt redoublé parce qu'elle était devenue son seul avenir, en essayant de distinguer ce qu'elle a de bien et ce qu'elle a de mal. Les réalisations de l'économie de marché sont certaines, évidentes, mais la fracture socio-économique s'est considérablement agrandie depuis trente ans, depuis qu'il n'y a plus compétition entre les deux systèmes, depuis que celui qui l'a emporté peut agir avec plus de liberté, plus d'arrogance, plus de fermeté et pousser son système à bout sans avoir à redouter la compétition d'un autre système. Le résultat se résume par quelques chiffres : environ 1,2 à 1,3 milliard d'individus vivent actuellement dans le monde avec moins d'un dollar à dépenser par jour.

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    Il y a quarante ans environ, les 20% des plus riches dans le monde avaient un revenu 30 fois supérieur à celui des 20% les plus pauvres. Aujourd'hui, l'écart n'est plus de 30 mais de 85. Les plus riches sont 85 fois plus riches que les plus pauvres. Le fossé s'est multiplié par trois. Au regard de ce bilan, on est en droit de se poser la question de savoir si le système ne bénéficie qu'à une minorité en laissant les autres dans la misère. Cette minorité étant justement celle dont nous parlions précédemment, c'est-à-dire celle qui, en se référant aux lois de la nature, s'estime être la plus forte, la plus intelligente, la plus habile, la plus travailleuse au détriment de l'autre qui se trouve délibérément marginalisée. Comme les dons humains sont inégalement répartis, cette sélection s'opère d'une manière de plus en plus étroite, sur une pointe de plus en plus aiguë alors que la base, misérable, s'accroît. Autres chiffres: actuellement, à peu près un habitant sur trois de la planète n'a pratiquement pas accès à l'énergie. Les pays les plus riches consomment environ 25 fois plus d'énergie que les pays les plus pauvres, et les pays les plus riches comptent à peu près 1 à 1,2 milliard d'habitant sur les 6 milliards de la planète.

    L'énergie étant un facteur de développement, les 4,5 milliards restant commencent à se rendre compte qu'ils son condamnés à la médiocrité, sinon à la misère.

    Le phénomène qui semble nouveau, c'est qu'on commence à scruter avec avidité le développement de l'économie de marché et à élever des critiques contre ce qu'elle entraîne: on conteste le privilège d'une minorité - les gens que la nature aurait favorisés - et on souligne les appétits de tous les autres de plus en plus nombreux. Car, en plus, il faut tenir compte de l'accroissement de la population, du fait qu'on va passer de 5 à 6 milliards à 7,5 milliards dans vingt ans. Ce milliard et demi de plus, à 90%, appartiendra à la partie pauvre. Le nombre de « revendicateurs » sera de plus en plus grand et la minorité de plus en plus étroite, et, donc, les conditions d'existence seront de plus en plus difficiles.

    C'est pourquoi si l'Europe veut équilibrer cette fuite en avant, elle ne peut le faire qu'en tenant compte de son histoire, et non en s'alignant sur le modèle américain qui, à tout prendre, est trop élitiste, marginalisant trop d'êtres humains. »

    « Comment expliquez-vous que le ministre des Affaires étrangères, Hubert Védrine, affirme que la France dispose de plusieurs atouts pour affermir sa position dans le monde, le conseil de sécurité de l'Onu, la force de dissuasion, ses alliances, l'appartenance au G8, l'influence diplomatique, la force économique et la vitalité de ses entreprises ? Comment expliquez-vous cette réponse ? »

    « La réalité est tout autre. Hubert Védrine est membre du gouvernement et il a été le conseiller de François Mitterrand pendant des années. Il est au courant de tout ce qui s'est fait en France, mais les résultats sont décevants. Dans le domaine de la dissuasion nucléaire, il oublie que nous avons parié sur la « simulation » (alors que les États-Unis ne lui font pas confiance et entendent poursuivre leurs expérimentations atomiques) et commis l'irrémédiable.
    Nous avons détruit notre centre d'essai du Pacifique et dispersé ses équipes de scientifiques; nous avons fermé Pierrelatte, centre de fabrication d'uranium enrichi; nous avons fermé Marcoule; nous venons de renoncer à Super-Phénix; nous avons fermé l'un des arsenaux fabriquant des sous-marins nucléaires.
    Maintenant nous ne sommes plus capables de fabriquer qu'un sous-marin nucléaire tous les dix ans à peu près, nous avons une force de dissuasion réduite au minimum. Nous avons abandonné le plateau d'Albion qui était notre seule possibilité d'installer des missiles capables en trente minutes de dissuader, demain, les missiles chinois, par exemple. Toute l'Europe est donc devenue ouverte aux futures menaces dont les Américains se protègent le plus.
    On l'a vu récemment lorsqu'il s'est agi du bouclier spatial du président Bush, invoquant notre propre protection nous nous mettrons sous la coupe américaine.

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    Comme nous l'avons déjà fait pendant la guerre du Golfe en menant une guerre où nous avions tout à perdre et rien à gagner et comme nous l'avons fait en acceptant la destruction des Balkans à quoi nous n'avions absolument rien à gagner non plus. »

    « La politique de défense européenne est donc un leurre? »

    « Oui. Elle est un leurre parce que, pour qu'il y ait une politique de défense européenne, il faudrait d'abord qu'il y ait une politique européenne, une stratégie européenne, un gouvernement européen, un état-major européen. Tout cela n'existe pas.
    Ensuite, cette politique, si elle veut être effective ne peut avoir que des visées universelles, comme la politique américaine. Depuis un siècle l'Amérique combat sur des lignes extérieures. Elle combat au-delà des océans. Elle a combattu en Indochine, elle a combattu en Europe. Elle a un concept d'emploi des forces à distance. Nous, nous avons combattu sur ce qu'on appelle, dans notre métier, des lignes intérieures, c'est-à-dire que nous combattons sur 300 ou 400 kilomètres, eux, sur 4 000. Pendant un siècle, leur mentalité, leurs armements, leurs études ont été orientées vers la projection de la force à distance. Parce qu'ils ont craint la Russie, ils ont dépensé des milliards pour créer l'instrument d'intervention à distance qu'ils possèdent aujourd'hui, ce que  l'Europe n'a pas fait. Nous sommes à un quart de siècle d'écart, au moins, Par rapport à eux. »

    « Mais alors quels sont aujourd'hui les atouts de l'armée française? C'est une armée fantoche ? »

    « Une guerre intereuropéenne paraît monstrueuse, et envisager la force à distance comme le voulait Léotard dans sa programmation de 1994, en projetant des dizaines de milliers d'hommes jusqu'à des milliers de kilomètres de distance, est une ambition démesurée. Pour cela, il faut des cargos aériens et maritimes dont nous ne disposons pas.
    Au moment où il formulait ce projet, la France était riche de 22 avions « Transall ».

    Or, il faut des cargos maritimes - que les Américains appellent des
    RO-RO (roll in roll out) - pour l'embarquement et le débarquement, il faut aussi des bateaux rapides qui emportent des milliers de tonnes de ravitaillement, il faut des avions de protection du point où l'on débarque, donc avec un long rayon d'action, il faut des batteries d'engins balistiques mobiles de manière que l'adversaire ne commence pas à vous détruire balistiquement à l'endroit où vous débarquez. Nous avions des engins balistiques modernes, c'était l'Hadès, on l'a arrêté. »

     

    « Et le porte-avions, le Charles-de-Gaulle? »

    « Le « Charles-de-Gaulle » fait hélas partie des fiascos de la Ve République à côté du sang contaminé, de l'alimentation carnée des herbivores, de l'hépatite B, de l'hôpital Pompidou... Ils sont nombreux et tous ont pour origine l'inadéquation entre l'ambition et les moyens. Il aurait fallu ne pas lancer la construction d'un porte-avions sans s'être assuré d'avoir assez de moyens pour le construire dans un délai normal. Comme sa construction s'est étalée sur quatorze ans, bien évidemment, les ingénieurs qui ont eu la possibilité d'être embauchés ailleurs sont partis. »

    « L'autre phénomène du même genre, c'est le Rafale. »

    « Bien immérité est cet autre fiasco, assez exemplaire. En voilà l'histoire. Au départ, il s'agit d'une réalité technique incomprise. Depuis 1960, date à partir de laquelle on vole à deux fois la vitesse du son, soit à Mach 2, on se heurte au mur de la chaleur. Non plus au mur du son que l'on franchit, mais au mur de la chaleur que l'on ne franchit pas, parce que les métaux de revêtement des avions résistent mal à la chaleur. Tous les avions au monde piétinent devant le mur de la chaleur. Ils font tous Mach 2, Mach 2.2, Mach 2.3, Mach 2.4, etc. Or pourquoi auparavant un avion se démodait-il?
    C'était à cause de la vitesse. Il y a cinquante ans on gagnait 20 ou 30 kilomètres par an. Au début de la guerre de 1939-1945, les chasseurs volaient à 450 kilomètres à l'heure, ils étaient démodés par rapport à un avion qui atteignait 600 kilomètres à l'heure, et puis 700... Quand on est arrivé à 1 200 kilomètres à l'heure, la vitesse du son, on a piétiné un petit peu, puis on a franchi le mur du son. (Dans l'air aux températures habituelles, elle vaut environ 340 m.s ou 1 224 km/h. Cette vitesse varie cependant en fonction de l'altitude et de la température.)

    On est arrivé à 2000, 2400 kilomètres l'heure. Là, c'est l'arrêt. La conséquence, c'est que les avions ne se démodent plus : leur cellule n'a plus qu’à être transformée puisqu'elle se heurtera de toute façon au mur de la chaleur.

    Autrement dit, le même avion demeure opérationnel, aux équipements électroniques près qui peuvent être adaptés pendant quarante à cinquante ans.

    Par exemple, le premier Mirage III qui a volé en novembre 1956 est encore perfectionné et en service, soit plus de quarante ans après. Il faut généralement, à un bureau d'études, cinq ans pour mettre au point un nouvel avion: cinq ans pour étudier le prototype et le construire, puis pour construire l'outillage et démarrer la construction en série. Pour alimenter les bureaux d'études, il faudrait lancer un avion tous les cinq ou dix ans. Mais une telle cadence est devenue inutile. En revanche, si on lance un nouvel avion tous les quarante ans, alors le bureau d'études meurt. »

    « Comment peut-on sortir de ce dilemme ? L'industrie aéronautique est florissante ? »

    « Ce dilemme s'est manifesté dans les années soixante-dix. C'est ainsi qu'en décembre 1976 Marcel Dassault s'est rendu auprès de Valéry Giscard d'Estaing. Marcel Dassault lui apportait deux projets d'avions: un bimoteur destiné aux grandes distances et un autre avion dérivé de la famille des « Mirage III » que Dassault avait appelé le Mirage 2000 et qui était un avion en delta certes perfectionné, mais dérivé du Mirage ordinaire. Voilà ce qu'il proposait à Giscard d'Estaing: si vous financez le bimoteur, sur mes petites économies, je financerai le mono. Mais Valéry Giscard d'Estaing qui n'était pas auvergnat pour rien lui a proposé l'inverse: le financement par l'État du monoréacteur, lui laissant le financement du biréacteur. Dassault s'est incliné mais en sortant de l'Élysée il savait que le Mirage 4000 ne pourrait être mené à bien parce qu'il n'avait pas les moyens de développer cet avion: c'est-à-dire de l'étudier, de construire le prototype, de l'essayer et d'élaborer l'outillage correspondant. On avait encore un espoir, c'est que l'Irak l'achète, mais on tombait en pleine guerre lrak-Iran.

    Donc le Mirage 4000 a été abandonné et l'on s'est tourné vers le Mirage 2000. C'était donc en décembre 1976. On se met au travail, cinq années s'écoulent, l'avion prend forme. A ce moment-là, arrivent au pouvoir François Mitterrand et, au ministère de la Défense, Charles Hernu, qui a voulu attacher son nom à un avion nouveau. Il a donc décidé de lancer un nouvel avion dont il a voulu qu'il soit européen. Nous avons commencé à prendre contact avec les Allemands, les Anglais, les Espagnols, les Italiens...

    Les Allemands et les Anglais ont donné leur accord à condition que cet avion soit construit autour d'un moteur qu'ils avaient financé et qui est monté sur les avions « Tornado ».

    Mais dans ces conditions, c'était la mort de la Snecma qui, justement pour ce nouvel avion, avait passé licence d'un moteur américain. »

    « L'accord ne s'est pas conclu. Le Rafale est un avion français. »

    « Oui et nous pouvons en être fiers parce que c'est une réussite remarquable. Mais là intervient la nouvelle donne: tout remarquable soit-il, il y a très peu de commandes. Comme l'argent était rare et que l'on entretenait déjà le 2000 lancé cinq ans plus tôt, et que la coopération avec les Anglais et les Allemands avait échoué, la fabrication du Rafale s'est faite à la petite semaine. Cet avion, qui a été voulu en 1983, entrera en service en 2004 ou 2005, c'est-à-dire un quart de siècle après sa conception.
    C'est d'autant plus absurde que les Allemands et les Anglais se sont empressés d'adjoindre à leur projet les Italiens et les Espagnols, si bien qu'aujourd'hui près de 400 de leur avion leur ont été commandés, alors que nous n'avons reçu commande que d'une quarantaine du nôtre.

    Or, comme pour tout objet de série, le prix d'un avion diminue avec le nombre. Les 30 premiers coûtent trois fois plus chers que le 300e. Les Allemands et les Anglais ont déjà dépassé la barre du 300e alors que nous nous trouvons avec un avion beaucoup trop cher et, donc, inexportable.
    Pour parachever le tout, le gouvernement actuel a pratiquement cédé la société Aérospatiale aux Allemands pour former la société EADS qui naturellement va promouvoir l'avion germano-anglais.
    Ainsi, une firme française va promouvoir la vente d'un avion rival.
    Voilà une série d'erreurs dont le contribuable fait les frais car on a dépensé des milliards pour ce Rafale et la France perd un de ses joyaux avec l'un des meilleurs bureaux d'études d'avions de combat. Domaine où elle a excellé. »

    « Et le service militaire ? »

    « Encore un exemple d'une politique militaire française discutable. Pendant toute la période de la guerre froide, au moment où nous avions à faire face à 230 divisions russes, ainsi qu'à des dizaines de milliers d'avions et à 54 000 chars d'assaut, que nous ayons en France une armée classique ou non ne servait pas à grand chose. Notre apport à l'alliance Atlantique, 300 ou 400 chars d'assaut, était modeste. A cette époque, nous aurions pu faire l'impasse sur le service militaire avec seulement une petite armée hautement spécialisée mettant en œuvre une force nucléaire qui, elle seule, avait un véritable pouvoir égalisateur et permettait d'écarter toute tentative d'agression soviétique. Nous ne l'avons pas fait. Au contraire, nous avons consacré, pendant quarante ans, 80% des dépenses militaires à des forces classiques.
    Aujourd'hui que la puissance soviétique a disparu- nous considérons qu'elle a disparu puisque nous avons stoppé tout effort nucléaire -, nous supprimons le service militaire, oubliant qu'il avait deux avantages.

    Le premier est son rôle égalitaire. Puisque nous sommes un pays que nous voulons multiethnique et  multiconfessionnel, un pays devant se préparer à des chocs de civilisations, le service militaire aurait pu être pendant douze ou dix-huit mois un creuset permettant de donner aux nouveaux venus l'assurance d'être traités en égaux avec les  citoyens français, en créant la possibilité d'un  travail en équipe quelle que soit leur origine. Et puis, il remédierait à l'individualisme congénital des Français en leur apprenant à travailler en commun et en complétant leur formation de citoyens. »

    « Il ne reste plus que le football? »

    « Reste effectivement le football mais pour bien peu de joueurs. L'autre avantage du service militaire était de permettre d'avoir des effectifs suffisamment importants pour quadriller le territoire et maintenir cet ordre qu'implique la multiethnicité dont je parlais tout à l'heure, par une simple politique de présence que l'on demande maintenant à la police.
    Au fond, on demande à la police de reconstituer une armée parallèle intérieure. Les propos d'Hubert Védrine correspondent à ce qu'il aurait aimé que fût la situation, mais non à ce qu'elle est. »

    « Il n'y a donc pas d'autres manières, selon vous, de faire l'histoire et de s'accomplir dans le temps en dehors de ce trépied que constituent la souveraineté, la puissance et l'indépendance? »

    « Tout est lié. L'indépendance d'un État lui permet de mener sa politique financière, sa politique économique, sa politique militaire, sa diplomatie, sa politique sociale. Dès que vous touchez à l'un de ces facteurs, vous mettez tout le système par terre.
    Avec l'euro, la France est entrée dans un carcan financier qui avantage certainement les grosses entreprises qui n'ont plus de problèmes de change, mais en contrepartie elle ne peut plus jouer sur la dévaluation de sa  monnaie pour remédier au problèmes de productivité.
    En conséquence, si par un miracle quelconque la productivité d'un pays concurrent devenait plus grande, elle serait obligée de baisser les salaires, pour compenser la difficulté de productivité. Cela peut créer des problèmes sociaux, car les répercussions seront bien évidemment sociales. Il est incohérent par exemple d'imposer les trente-cinq heures et en même temps de vouloir un régime libéral.

    Si vous êtes libéral à l'américaine, alors vous défendez la liberté du travail, « que le plus fort l'emporte, que le plus faible soit marginalisé », avec une compensation morale consistant à dire que l'enrichissement des plus riches  aidera les plus pauvres à sortir de leurs difficultés s'ils le peuvent. Nous prétendons, à la suite de Maastricht, adopter ces mêmes méthodes du libéralisme tout en mettant un frein sur le travail, ce qui n'est pas très cohérent. Notre idéal devrait être l'égalité des chances. Or le système libéral actuel est
    inégalitaire. Nous n'avons pas vécu deux siècles de luttes sociales pour, maintenant, nous rallier à l'ultralibéralisme.
    Entre le système américain, inégalitaire, et le système soviétique, irréalisable, l'Europe avait trouvé le juste chemin. Or voici qu'on est sur le point de l'abandonner. »

    http://www.lesmanantsduroi.com

  • De charybde en scylla

     

     

     

    La consultation de Google Analytics nous signale une forte hausse des visiteurs provenant d'Afrique du Nord qui, lorsqu'on les additionne, sont en troisième position entre Canada et Belgique. Que l'on ait recherché l'avis de Royal-Artillerie serait flatteur mais il est probable qu'à l'exception de la Tunisie où la moyenne du temps passé est de 1min 36s, - ces lecteurs avaient été accrochés au train des équipages par un billet monarchiste de septembre 2006 : Le Roi de Carthage - les autres ont fait le tour des blogues royco pour savoir ce que nous pensions de la "révolution en marche". Temps passé et taux de rebond nous l'indiquent. Allons-y donc.
    La démocratie réelle résoudra-t-elle les problèmes causés par la dictature ? Bien sûr, dès que l'on expulse la dictature ! à la réserve près qu'ils n'en sont pas tous issus mais résultent aussi des fondamentaux de chaque pays et de la pertinence du régime économique choisi, parfois il y a longtemps.
    Quand on creuse, on s'aperçoit que les gens réclament d'abord la justice au sens large et le minimum vital, pas la lune ! La captation de la valeur ajoutée produite dans le pays par une caste de vampires leur est donc insupportable, bien avant qu'ils ne s'indignent de l'insuffisance de cette valeur ajoutée globale et n'en comprennent les raisons.
    Au Mahgreb, le cas de l'Algérie est à part. C'est un pays riche et prometteur colonisé par les familles issues des leaders de la guerre d'indépendance qui se sont réparti entre elles les flux de biens et matières. Le gouvernement est chargé d'agiter le tapis pour les maintenir dans leurs rentes respectives. Elles ne libèreront le pays que gavées à en crever, et ce ne semble pas être pour demain, les jeunes générations comptant bien prendre la suite.
    Le cas du Maroc est spécifique mais pas autant qu'on l'analyse. Le Makhzen marocain n'est pas une aristocratie éclairée mais une grille féodale qui régente tout le royaume, sous le regard d'un roi entravé qui a beaucoup déçu, du moins ceux qui ne le connaissaient pas avant.
    Les révoltes spontanées que nous observons dans le monde arabe ne sont plus mises à feu par le nationalisme, la lutte contre l'Occident, la défense des ethnies ou cultures minoritaires, ou même la faim. Elles sont déclenchées par le gap entre le monde libre et le monde arabe, l'insupportable défi de libertés en tous genres que leur vendent sur l'écran d'ordinateur les "pourrisseurs" anglo-saxons et leurs affidés européens. C'est CocaCola et les jeans Levi's 504 qui ont sappé le communisme. Aujourd'hui, Yahoo, Google, Facebook, Twitter ont pris la rélève de la subversion douce.
    Les fondamentalistes musulmans le savent qui poussent à élargir le gap pour retourner à la charia et à la civilisation de piété et grandeur d'un passé lointain, mais de toutes les fermentations qu'ils ont semées, aucune n'a eu l'effet déclencheur spontané. Toutes leurs manifestations bruyantes sont organisées et soigneusement encadrées, ce sont des défilés. Ils rament maintenant partout derrière les "libéraux" en Jordanie, en Egypte. Ailleurs ils sont carrément dépassés.
    Revenons à la Tunisie qui est le "pays sympa" d'Afrique du Nord. Time Magazine avait fait un article en novembre 2007 que nous complétions d'une entame enthousiaste : Ce pays démuni de tout sauf de courage a émergé jusqu'à devenir un petit dragon arabe sur le modèle asiatique. Et nous y combattions la rage démocraciste des Américains qui voulaient y forcer (déjà) leur modèle, par moult exemples de peuples prospères sans démocratie, en commençant par une question qui fâche, toujours la même : A quoi cela sert-il de promouvoir urbi (à l'ONU) et au monde les déclarations des droits de l'homme et du citoyen, si au final il s'en tape, ne s'intéresse qu'à la paix des villes et des champs, à l'éducation de ses gosses, à mettre un peu d'argent à la banque ? S'est-on posé la question de savoir si le citoyen veut l'être ? Des agitateurs "contre-révolutionnaires" mettent le ver dans la pastèque cérébrale en démontant la manipulation des puissants ou des riches sous les yeux incrédules des électeurs, en leur suggérant de laisser la stratégie entre les mains de professionnels honnêtes débranchés de la machine à fric. Hurlements des idéologues de l'égalitarisme pour qui c'est de la pornographie. Or les familles dynastiques de qualité peuvent jouer ce rôle désintéressé. Et les peuples ne s'y trompent pas qui naturellement privilégient aux affaires publiques les familles qu'ils connaissent.
    C'est une définition de l'aristocratie comme régime politique, et les peuples qui lui préfèreront l'égalistarisme français seront malheureux, éternels insatisfaits, puisque le ressort de ce système est la promesse de satisfaire des envies réputées toutes légitimes. On sait bien que ce n'est pas possible sur terre, mais quel slogan mobilisateur !
    Pour le moment, tout laisse accroire que l'Opinion recherche un homme providentiel - Ben Ali le fut en son temps quand il débrancha le géronte Bourguiba -, homme fort en pays de caïds qui va s'entourer des rois-mages pour redonner du travail à tous, après avoir fait des élections à la proportionnelle pour inaugurer le grand cirque des tribuns télévisuels. C'est tout vu.
    De bonne foi, si le peuple tunisien est en quête d'un Etat juste qui favorisera la croissance économique pour assécher les poches de misère et donnera à chacun sa chance - attention, courage ! - il aurait intérêt à étudier une restauration monarchique qui est le mode représentatif le moins cher et le plus sûr en termes d'image extérieure, d'unité nationale et d'incarnation d'une vrai souveraineté. La dignité retrouvée de la fonction déteindra sur les étages subalternes où travaillera le nouveau gouvernement démocratiquement élu par un processus adapté aux moeurs du pays.
    Evidemment que les tuteurs imposés (Etats-Unis, France, UE) déconseilleront ce choix qui en creux dénonce leur illégitimité, puisqu'ils sont les purs produits éphémères de la démocratie retravaillée à dessein et n'entendent pas laisser à autrui un avantage de temps long qui leur est inaccessible. Dès fois que ce petit pays deviendrait un Hong Kong à la charnière de la Méditerranée occidentale et orientale ! Vous n'y pensez pas !
    Que le peuple tunisien se tienne à distance aussi de cette machine à normaliser tous les comportements que sera l'Union Pour la Méditerranée. Qu'il choisisse le grand large, sa position géographique s'y prête.
    Finissons par les armes de la maison des Bey de Tunis.
    Qu'elles vous donnent envie, amis de Carthage.
    http://royalartillerie.blogspot.fr
    Sites tunisiens parlant de monarchie :
    - Royaume de Carthage
    - Réveil tunisien
    - Nawaat
    Les deux billets de Royal-Artillerie cités dans celui-ci sont :
    - Le Roi de Carthage
    - La rage démocratique