En demandant à l'ONU de reconnaître l'État palestinien, Mahmoud Abbas a mis les grandes puissances au pied du mur.
Le 16 septembre, à New-York, Mahmoud Abbas, Président de l'Autorité palestinienne, a demandé aux Nations-Unies de reconnaître l'État palestinien et de l'admettre au sein de l'ONU comme un membre à part entière. Cette revendication est soutenue par des nations musulmanes d'envergure, comme la Turquie, l'Egypte ou l'Arabie Saoudite où le prince Turki al-Faisal, frère et possible successeur du ministre des Affaires étrangères, a affirmé que la collaboration avec les États-Unis ne peut continuer sous sa forme actuelle.
Elle se heurte en revanche à l'opposition d'Israël (qui a condamné une « initiative unilatérale » - mais comment pourrait-elle être autrement ?) et des États-Unis. Du côté européen, Catherine Ashton, chargée des Affaires étrangères pour l'Union européenne (UE), a travaillé d'arrache-pied à un compromis avec les Palestiniens, afin qu'ils renoncent au droit de poursuivre les politiciens israéliens devant la cour pénale internationale. Nicolas Sarkozy, quant à lui, a suggéré à Mahmoud Abbas de formuler sa demande auprès de l'Assemblée générale de l'ONU - plutôt qu'auprès du Conseil de sécurité, comme le Président de l'autorité palestinienne l'avait annoncé - afin d'obtenir un statut d'État associé.
Abbas s'en est pourtant tenu à ce qu'il avait annoncé : le 23 septembre, c'est au Conseil de sécurité qu'il a adressé sa requête - ce qui obligera les puissances à se prononcer et les États-Unis à mettre leur veto si une majorité se dessine en faveur des Palestiniens, qui peuvent déjà compter sur le soutien de la Chine, du Brésil, de la Russie, du Liban et de l'Afrique du Sud.
« C'est l'heure de vérité, a déclaré Mahmoud Abbas devant l'Assemblée générale de l'ONU. Les Palestiniens attendent de connaître la réponse du monde. L'heure a sonné pour le printemps palestinien, c 'est le moment de l'indépendance. »
Les Israéliens ont eux aussi cherché des soutiens : début juillet, le Premier-ministre israélien Benjamin Netanyahu s'était rendu à Sofia et à Bucarest, où il avait reçu l'engagement des gouvernements bulgare et roumain que ces pays ne voteraient pas à l'ONU en faveur de la création d'un État palestinien. Le ministre israélien des Affaires étrangères, Avigdor Lieberman, fondateur du parti d'extrême droite Israël Beytenou, s'était pour sa part rendu en Albanie.
En attendant la réponse de l'ONU, le Quartette des médiateurs sur le Proche-Orient - dirigé par l'ancien premier-ministre britannique Tony Blair et qui réunit les États-Unis, l'Union européenne, la Russie et les Nations-Unies - a proposé le 23 septembre aux Israéliens et aux Palestiniens de reprendre les négociations de paix, gelées depuis un an, avec l'objectif d'aboutir à un accord final fin 2012. Dès le 1er octobre, le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, affirmait cependant que l'initiative du Quartette n'avait « pas réussi ». Les négociations de paix butent notamment sur la question des colonies israéliennes. Une jeune Palestinienne expliquait récemment : « Je suis contre la création de deux États car cette perspective nous accorderait seulement 22 % du territoire palestinien, où sont déjà implantées des colonies israéliennes ».
La « plus mauvaise situation diplomatique »
Dans ce contexte le feu vert donné par Tel Aviv à la construction de 1100 nouveaux logements dans un quartier de colonisation juive à Jérusalem Est apparaît comme une provocation, en tout cas une fin de non-recevoir à la demande de reconnaissance d'un État palestinien.(1)
Tel Aviv semblait pourtant avoir baissé le ton ces derniers temps, surtout depuis l'assaut donné par la population égyptienne de son ambassade au Caire, le 10 septembre dernier : les diplomates israéliens avaient dû fuir par l'arrière du bâtiment - Benjamin Nétanyahou a d'ailleurs remercié la police égyptienne pour son intervention, qui sauva la vie de l'ambassadeur israélien. Avigdor Lieberman, qui menaçait jadis de bombarder le barrage d'Assouan si l'Égypte participait à une guerre contre Israël, a estimé que les liens avec l'Égypte devait être renforcés. Et Dan Meridor, vice-premier ministre et ministre des services de renseignement, a souligné la nécessité d' « infléchir la tendance qui s'est emparée de l'Égypte et qui commence à poindre en Turquie ».
Les services de renseignement israéliens et le journal Haaretz ont d'ailleurs averti que la sécurité d'Israël passe par une entente au Proche-Orient. La dirigeante du parti d'opposition Kadima, Tzipi Livni, reproche à Nétanyahou d'avoir placé le pays dans sa « plus mauvaise situation diplomatique ». Et le ministre de la Défense, Ehud Barak, prévient : « Si nous accentuons les tensions avec les Palestiniens, nous contribuerons à isoler Israël ».
L'ensemble de la communauté internationale a d'ailleurs vivement réagi à l'annonce des nouvelles constructions - y compris Barack Obama, pourtant plus mal jugé qu' aucun président américain ne le fut jamais par les Palestiniens, qui n'ont pas oublié qu'en septembre 2010, il avait promis la création d'un État palestinien dans un délai d'un an. Depuis, Obama est entré dans la campagne pour l'élection présidentielle de 2012, pour laquelle il aura besoin de l'électorat juif-américain...
On peut prévoir qu'un rejet par l'ONU de la demande palestinienne se traduira par un accroissement des tensions au Proche-Orient et une nouvelle flambée de violence. Il n'est pas certain qu'Israël le redoute : l'État hébreu pourrait alors imputer au Hamas la multiplication des actions terroristes, et en tirer argument pour ne rien céder. Mais à terme, cette politique du pire pourrait être la pire des politiques.
Laurent Glauzy monde & vie 8 octobre 2011
(1) Rappelons que la communauté internationale n'a jamais reconnu l'annexion par l'État hébreu de Jérusalem Est en 1967.
géopolitique - Page 877
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Le « printemps palestinien » sous haute tension diplomatique
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La France veut armer les rebelles syriens le plus vite possible !
La France et l’Angleterre ont décidé de faire un pas supplémentaire dans l’ingérence concernant la Syrie. Persuadées que leur grille de lecture idéologique doit s’imposer au monde entier, et sans considération poussée plus avant sur les enjeux géopolitiques et géostratégiques en présence, ni sur la fragile stabilité du Moyen Orient, Paris et Londres veulent armer les rebelles syriens contre l’État de droit d’un pays souverain et reconnu comme tel.
C’est ainsi que ces deux pays se sont accordés pour solliciter l’avancée de la prochaine réunion de l’Union européenne, afin de discuter de la levée de l’embargo sur les armes destinées la Syrie. Mais qu’à cela ne tienne, si l’Union européenne n’abondait pas dans leur sens, chacune des deux nations prendrait sur elle de livrer, à titre national, des armes aux rebelles. C’est ce qu’a annoncé en effet hier matin Laurent Fabius, chef de la diplomatie française -qui nourrit vraisemblablement une idée très singulière de la diplomatie.
La France et la Grande-Bretagne demandent « aux Européens, maintenant, de lever l’embargo pour que les résistants aient la possibilité de se défendre« , a ainsi déclaré le ministre français sur France Info. Et pour justifier la livraison d’armes, avec ou sans l’accord de l’Union, Laurent Fabius de déclarer que la France, de toute façon, « est une nation souveraine« . Grosse blague. Quand on sait que la quasi totalité de ses prérogatives régaliennes, expression de sa souveraineté, ont été abdiquées à Bruxelles.
« On ne peut pas accepter qu’il y ait ce déséquilibre actuel avec d’un côté l’Iran et la Russie qui livrent des armes à Bachar et de l’autre des résistants qui ne peuvent pas se défendre« , s’est défendu Laurent Fabius. « Lever l’embargo c’est un des seuls moyens qui restent pour faire bouger politiquement la situation« , a-t-il estimé. Il reste que l’idéologie, fut-elle couverte des meilleurs sentiments, est un critère de discernement un peu fragile dans le cas d’une déclaration de guerre : à quelle alternative aboutirait la victoire des rebelles ? Cette question a-t-elle seulement été posée ? Ont-ils donc déjà oublié l’épisode de la Libye ? N’ont-ils donc aucun écho, à Paris, sur la nature religieuse de la rébellion, sur ces massacres perpétrés par les islamistes armés par l’Occident contre les chrétiens ?
A l’idéologue, nous préférerons toujours l’homme prudent.
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Mali : la France partie, la septicémie islamiste reprendra
Entretien réalisé par Timothée Macé Dubois
Alors que certains dans l’opposition craignent un enlisement de la France dans le conflit malien, un retrait partiel des troupes vient d’être annoncé pour le mois d’avril. L’historien Bernard Lugan, éminent spécialiste de l’Afrique, décrypte et analyse l’opération Serval.
En réponse aux doutes de Nicolas Sarkozy quant à l’utilité de l’intervention au Mali, François Hollande l’a justifiée par la nécessaire action de la France pour sauver des femmes victimes de la barbarie et de l’oppression islamistes…
Si l’attitude de Nicolas Sarkozy me paraît très insolite, dans la mesure où il a officiellement déclenché la campagne libyenne pour des raisons « humanitaires » qui n’ont jamais tenu la route, l’opération Serval au Mali me semble beaucoup plus licite. Il était en effet impératif d’y intervenir rapidement, au risque de laisser Bamako tomber sous les feux islamistes et d’abandonner à leur sort d’otages près de 3 000 Français ou binationaux. [...]
La suite sur Boulevard Voltaire
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Ne pas faire une croix sur les Chrétiens d'orient
Il faudrait parler des Touaregs. L'affaire du Mali est entièrement saharienne au sens où on l'y circonscrit totalement. Les "Huns" seront exterminés sur place par les uns et les autres ; c'est ouvertement dit¹. La conférence des bailleurs de fonds qui va s'ouvrir pour 500 millions de dollars le 29 janvier à Addis Abeba va régler la question d'intendance des troupes africaines engagées, pourquoi dès lors faudrait-il en parler aussi à Davos ?
une messe à Damas
Tarek Aziz condamné à mort
En Syrie même, le Parti Social-Nationaliste fut fondé par le grec orthodoxe Antoun Saadé en 1932. Dans le cas de l'Irak et de la Syrie baassistes, elles ont participé plus directement au projet de laïcisation des institutions affiché par les fondateurs du Parti Baas, dont le plus éminent, Michel Aflak (1910-1989), était un damascène grec orthodoxe. Dans ce courant et à titre d'illustration, on trouve le chaldéen Tarek Aziz, ministre des Affaires étrangères de Saddam Hussein de 1983 à 1991 et le ministre de la Défense de Bachar el-Assad, l'orthodoxe Daoud Rahja, tué par une bombe le 18 juillet dernier. Un extrait de ses obsèques en pied de page.
Daoud Rahja explosé à Damas
Quelle puissance activera une menace suffisamment convaincante pour protéger les communautés chrétiennes de la nouvelle Syrie ? A voir ce qui s'est passé en Irak, ce qui se passe en Egypte, voire même en Turquie où elles sont couramment inquiétées à tous motifs, il n'y a que la Russie à faire le poids. La France, certes étant dans le jeu depuis longtemps - depuis Baudouin IV de Jérusalem en fait - il lui revient d'approcher l'escadre des Echelles et d'en charger les canons. Mais en rêve même pas ! Et ce ne sont pas les mémorandums, pétitions, suppliques déposés ci et là qui vont faire le travail. Dans une guerre civile arabe, seuls la force joue, des palabres ils s'en chargent eux-mêmes.
A ce stade, il ne faut rien attendre des francs-maçons français qui trustent les allées du pouvoir parisien pour y dicter l'esprit de bonne gouvernance à leur façon, aussi serait-il approprié de la part des chefs des églises locales d'en appeler ouvertement et officiellement au Kremlin et au Patriarcat de Moscou, seules garanties qui puissent être actionnées. Que le Vatican perde pied en Syrie est moins important que d'assurer la survie de ces communautés d'Asie mineure qui vivent leur foi au coeur du Nouveau testament depuis si longtemps. A défaut, elles seront éradiquées comme en Irak et nous rangerons leur souvenir sur l'étagère de nos défaites déjà chargée.
[À suivre, une approche de la problématique chrétienne au Proche et Moyen Orient]
(1) «Nous sommes en guerre et on va casser le plus possible de ces connards"» (à l'Hôtel de Brienne, jeudi 24)
(2) la Chine et la Russie bloquent toujours l'aggravation de la réplique internationale -
Les racines et les pièges du virage américain vers l’Asie
Le président Obama a décidé un mouvement de bascule vers l’Asie-Pacifique. Mais ce « pivot » se heurte aujourd’hui à de complexes considérations budgétaires et géostratégiques.
Le constat a l’apparence de la simplicité : le centre de gravité de la politique étrangère des Etats-Unis, de leur sécurité nationale et de leurs intérêts économiques bascule vers l’Asie. Un mouvement « pivot », selon la terminologie officielle, qui devait, aux yeux du président Barack Obama, s’accompagner d’une modification de la stratégie de l’Amérique, laquelle se considère depuis longtemps comme une puissance du Pacifique tournée vers l’Asie.
Le virage vers l’Asie se justifie d’autant plus que l’Amérique perçoit une montée de la puissance militaire et de l’agressivité de Pékin à l’égard de ses alliés traditionnels en mer de Chine méridionale et orientale. Une Chine qui, en augmentant régulièrement son budget militaire de plus de 10 % par an depuis deux décennies (10,7 % prévu pour 2013), peut un jour devenir un inquiétant rival. Sans oublier la menace que fait peser la Corée du Nord sur la Corée du Sud.Le « pivot » est aujourd’hui facilité par deux éléments de nature différente, qui doivent permettre aux Etats-Unis d’alléger leur présence dans ce que George W. Bush avait appelé le « Grand Moyen-Orient », cette zone allant du Maghreb jusqu’à l’Afghanistan-Pakistan. Tout d’abord, l’armée américaine a pu effectuer son retrait d’Irak en décembre 2011 et se prépare à faire de même, d’ici à la fin de 2014, en Afghanistan. De plus, l’Amérique entrevoit la perspective d’une réduction de sa dépendance énergétique à l’égard des importations pétrolières du Moyen-Orient grâce au gaz de schiste. La fin de la guerre froide a permis en outre un désengagement progressif en Europe. Un mouvement qui devrait se poursuivre avec une diminution supplémentaire des troupes basées en Allemagne.
Le « pivot » s’appuie ainsi sur deux grands axes. D’une part, l’Amérique d’Obama souhaite parvenir à une meilleure intégration économique et commerciale avec l’Asie en participant notamment pour la première fois aux « sommets de l’Asie orientale » et en proclamant sa volonté de négocier un accord de libre-échange au sein du Partenariat économique transpacifique (TPP).
D’autre part, cet engagement vers l’Asie-Pacifique s’accompagne d’un mouvement de repositionnement militaire. Comme en témoigne l’annonce de l’envoi progressif depuis avril 2012 de 2.500 Marines en Australie sur la nouvelle base de Darwin. L’Amérique a également resserré ses liens avec Singapour grâce au stationnement de navires de combat en zone littorale, et avec les Philippines en y positionnant des avions de surveillance et en effectuant des rotations de troupes plus fréquentes. L’objectif est ainsi de parvenir à une plus grande flexibilité des rotations militaires dans la région en se reposant moins sur les bases militaires américaines permanentes au Japon et en Corée du Sud. D’après le Service de recherche du Congrès (CRS), quelque 4.500 soldats américains du Japon pourraient être ainsi envoyés à Guam, qui en accueille déjà autant.
Autre élément : en dépit des coupes prévues dans son budget militaire, l’Amérique souhaite maintenir les crédits pour sa marine de guerre, au détriment des autres corps de l’armée.
Pourtant, aussi simple qu’il paraît, cet ajustement stratégique pourrait aller contre l’objectif recherché : celui de mieux stabiliser et intégrer la région Asie-Pacifique avec l’Amérique, et de rassurer ses alliés asiatiques, en premier lieu le Japon. Car la Chine se considère toujours inférieure et pourrait prendre ombrage du renforcement de la présence américaine. Face aux 11 porte-avions américains, la Chine a lancé en 2011 son premier porte-avions, un bâtiment relativement petit acheté à la Russie et rénové. Plutôt que de contribuer à une détente, d’après des analystes, le pivot risque au contraire de pousser les autorités militaires chinoises à durcir le ton. Pékin parle désormais d’un retour à une « mentalité de guerre froide ».
Dans un article intitulé « Le problème avec le pivot » et publié dans « Foreign Affairs », Robert Ross, professeur à Harvard, souligne que « la nouvelle politique américaine a inutilement aggravé le sentiment d’insécurité et ne peut que nourrir l’agressivité de la Chine. Elle risque de saper la stabilité régionale et ne peut que réduire les possibilités de coopération entre Washington et Pékin ». Cette politique est fondée « sur une erreur de jugement » : le durcissement diplomatique de Pékin ne vient pas d’une trop grande confiance mais plutôt d’un sentiment d’insécurité après plusieurs années de crise financière et de troubles sociaux.
La question est aussi de savoir si l’Amérique a aujourd’hui les moyens budgétaires de ses ambitions asiatiques. D’après la firme de renseignement Stratfor, les coupes automatiques, appliquées depuis la semaine dernière, réduiront le budget militaire d’au moins 8 %, soit 500 milliards de dollars sur dix ans, répartis sur tous les corps de l’armée. De plus, l’indépendance énergétique à l’égard du Moyen-Orient est encore une perspective lointaine. En outre, à la différence d’Hillary Clinton, son successeur, John F. Kerry, a effectué sa première tournée officielle de secrétaire d’Etat en Europe et au Moyen-Orient, et non pas en Asie. Signe que Washington n’a pas encore tourné le dos à ses « vieux » alliés. Certes, il n’y aura pas de marche en arrière tant le mouvement vers l’Asie est enclenché depuis longtemps. Mais le balancier ouest-est des Etats-Unis est loin de s’être stabilisé.
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Grandeur et décadence. Discours de clôture IHEDN (31 janvier 2013)
Voilà un général qui a, peut-être, la tête dans les étoiles et des étoiles sur le képi, mais les pieds bien sur terre !
Le discours que nous reproduisons ci-dessous a été prononcé par le Général (2°S) Lalanne-Berdouticq, (ancien commandant du 3ème régiment étranger d’infanterie et ancien chef du bureau de liaison de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban FINUL 2), lors de la clôture d’une récente session de l’IHEDN.
L’IHEDN est l’Institut des Hautes Études de la Défense Nationale.
C’est intelligent, plein de bon sens, brillamment construit et d’une limpide clairvoyance. C’est la vision d’un stratège éclairé, libre de tout dogme et de toute entrave intellectuelle, raisonnablement optimiste mais terriblement inquiet aussi de la lente dérive de son pays.
Le monde est complexe et dangereux
Il est loin des « blocs » que nous avons connus des décennies durant, aussi bien que de la « fin de histoire » que l’on nous annonçait voici vingt ans, et encore plus loin de la « paix définitive » qui aurait permis « d’engranger les dividendes de la paix » chers à des hommes à la courte vue. Ce monde, notre monde, reste dangereux. Comme les "prophètes" que personne n’écoutait dans les années 1930, je ne cesse de dire que le décuplement des dépenses militaires en Extrême-Orient depuis dix ans devrait nous inciter à mieux surveiller les diminutions insensées que subissent les nôtres. Dans l’Histoire en effet les mêmes causes produisent les mêmes effets et il y a donc tout à craindre des abandons qui se produisent chez nous. Mais encore faudrait-il voir le monde comme il est et non comme beaucoup voudraient qu’il soit.
Méfions-nous du « prêt à penser »
Il est presque toujours faux et ordonné à des fins peu recommandables. Non le Kosovo n’est pas meilleur après la campagne qu’ont conduite les alliés en 1999, montée suite à une incroyable guerre d’intoxication médiatique diabolisant les Serbes et présentant les Albanophones comme des anges persécutés… Il en résulta la fondation du premier pays (1) presque totalement mafieux du continent européen, dont la population originelle, serbe, a été sans pitié chassée de chez elle dans le silence des médias ; ses monastères détruits et ses maisons incendiées.
Non l’Afrique d’aujourd’hui ne vit pas mieux que du temps de la colonisation, à commencer parce que l’esclavage (personne ne le dit) et les massacres ethniques sont repartis de plus belle et que bien des États officiellement constitués sont en faillite aussi bien financière que politique.
Non la Libye d’aujourd’hui n’est pas meilleure que celle d’hier, puisque au demeurant elle n’existe tout simplement plus, et que son tyran a été remplacé par d’autres, en plus grand nombre. Non la démocratie occidentale n’est pas applicable à tous les continents et à tous les pays. D’abord parce que ce n’est pas un système unique (voyez comme la nôtre est différente de celle des États-Unis ou d’Israël, ou bien encore de la Grande-Bretagne) ; ensuite parce que ce système politique ne peut s’épanouir qu'au sein de peuples voyant la personne comme un individu et non comme une partie d’un tout (société personnalistes contre sociétés holistiques) …
Dans les grandes questions du monde...
N’oublions jamais de considérer le paramètre démographique. Il est capital et le silence des médias et des analystes sur ces sujets en dit long sur l’aveuglement, qui ne peut qu’être volontaire, de nos élites autoproclamées. Ainsi, quel est l’avenir de l’Allemagne, qui aura perdu sept millions d’habitants en 2030 et se verra peuplée en grande partie de ressortissants d’origine turque ? Sera-t-elle-la même ? On sait que l’islam confond la sphère publique et la sphère privée en refusant absolument de distinguer « Dieu » et « César ». Or, cette distinction est à la base même des systèmes démocratiques. Enfin, oublie-t-on qu’une population peut être chassée de chez elle, ou se voir remplacée par une autre, les autochtones se retrouvant alors comme étrangers sur leur propre sol ?
Sans remonter à la diaspora juive du premier siècle, pensons aux Coptes d’Égypte, aux chrétiens de Turquie et d’Asie (20% de la population en 1900 alors qu’ils sont aujourd’hui hui 0,02%, soit mille fois moins) ou bien encore aux Serbes du Kosovo, déjà cités (90% de la population en 1900 et moins de 10% aujourd’hui) ! Hors les idéologues, qui peut être assuré qu’en France, nous sommes à labri de tels phénomènes ? Refuser d’examiner la question sous couvert de mots en « Ime » est singulièrement irresponsable. Or, entendons-nous que l’on pose cette question ? Non. Considérons aussi l’incroyable effondrement démographique de nos voisins Italiens et Espagnols et tentons d’imaginer ces deux pays dans trente ans ! « Il n’est de richesse que hommes », dit le proverbe. Que sera la civilisation occidentale si, dans trois siècles, des touristes visitent nos cathédrales sans que personne ne puisse leur expliquer le sens Dun Christus pentocrator dont ils contempleront la sculpture sur le tympan, ainsi que cela se passe pour les églises de Cappadoce, alors que plus aucun chrétien ne vit aux alentours ?
Rien n’est définitif dans histoire des hommes, pas plus le tracé des frontières que les peuples qui s’abandonnent et doutent eux-mêmes.
Enfin, cessons de nous croire à l’abri des menaces militaires...
Au motif que nous possédons d’admirables sous-marins nucléaires. La guerre est bien de retour et le fracas des combats des Balkans, maintenant assourdi, nous rappelle qu’elle peut s’inviter dans des contrées européennes très proches, et pourquoi pas chez nous ? Qui peut ignorer que si tout le monde (tout le monde, sauf nous !) réarme sur la planète, c’est bien pour quelque raison ! Et l’Europe, direz-vous ! Fort bien, mais l’Europe n’est sur le plan militaire qu’une addition de faiblesses, vous le savez. Ajouter des faiblesses à d’autres faiblesses n’a jamais constitué une force mais bien une faiblesse plus grande encore[2] !
Comme le disait, je crois, Roosevelt au moment de la Grande dépression, puis au début de l’engagement américain dans la 2e guerre mondiale, « Ce que nous devons craindre le plus au monde, c’est la peur elle-même ». Or, l’histoire nous enseigne que les populations qui ont peur de la mort sont celles qui disparaissent de la surface du globe. Notre manière « d’évacuer » la mort de la vie sociale est effrayante en elle-même, car un jour ou l’autre nous devrons combattre pour notre vie, et donc la risquer. Ne pas s’y préparer c’est nous assurer de perdre cette vie à coup sûr. Cela s’appelle la lâcheté, qui n’a jamais attendri aucun adversaire déterminé ; jamais, bien au contraire. Rappelons-nous avec honte que certaines erreurs peuvent être commises puis recommencées : la République naissante déclara la guerre illégale en 1791 et se trouva en conflit avec l’ensemble de ses voisins deux ans plus tard. En 1928, à la Société des Nations, cet ancêtre de l’ONU, le « Pacte Briand-Kellog » déclara la guerre « criminelle » à la face du monde. Onze ans plus tard, aussi bien la France que la Grande-Bretagne étaient acculées à une mobilisation générale dans des conditions désastreuses, pour aboutir à ce que l’on sait : l’occupation de toute l’Europe sauf la Suisse, et aussi les camps de concentration. Nous n’avions pas voulu lire Mein Kampf, non plus que méditer les pensées de Lénine et voir les camps soviétiques, qui mèneraient l’un à Katyn et l’autre à Treblinka ou Sobibor.
« Le droit sans la force n’est rien, la force sans le droit c’est la tyrannie » disait à peu près Pascal. Souvenons-nous-en.
Enfin, je voudrais insister sur le sens des mots. Discutant avec plusieurs d’entre vous pendant la session j’ai une nouvelle fois constaté que les mots n’avaient souvent pas le même sens pour l’un et pour l’autre. Je pense à un échange récent sur le mot République dont mon partenaire me disait que « Pour lui la république c’était… ». Or, là est le danger : nous n’avons pas à dire que « Pour nous » un mot veut dire telle chose ; nous devons au contraire nous référer à sa définition exacte sinon plus aucun échange n’est possible. Reprenant l’exemple de la République, je lui disais que celle-ci se définit par trois critères et seulement trois : Un gouvernement collégial, qui obéit à des lois, et dont le mode de succession n’est pas dynastique.
Un point c’est tout. La république romaine était-elle démocratique ? Non, mais c’était tout de même une république. Donc, ne confondons pas les mots les uns avec les autres. Ainsi de la démocratie[3], qui peut parfaitement trouver sa place dans un système monarchique comme en Grande-Bretagne et ainsi de suite. À notre époque où le dialogue semble érigé à la hauteur de vertu et de principe cardinal des relations sociales, travaillons donc à ce qu’il soit possible au travers de mots employés dans leur juste sens. Nous aurons alors fait un grand pas vers la clarté et de saines relations interpersonnelles. J’insiste : cette question de la précision du vocabulaire est absolument essentielle si l’on y réfléchit bien.
En conclusion :
Il nous faut chasser l’idéologie, quelle quelle soit ; de « droite » ou de « gauche ». C’est une maladie mortelle de l’esprit car elle fait voir la réalité au travers de systèmes d’idées, qui sont autant de lunettes déformantes. A l’idéologie il faut opposer le principe de réalité qui veut que les choses soient ce qu’elles sont, que cela nous plaise ou non. Alors on peut agir en espérant ne pas trop se tromper. Il n’y a pas de bons camps de concentration (cubains, nord-coréens, chinois) dont on ne parle jamais, et de mauvais, les nazis, dont il faut sans cesse se souvenir. Il y a eu et il y a des camps de concentration où des innocents sont morts et meurent encore dans des conditions atroces. Il n’y a pas l’antisémitisme, évidemment condamnable des « néonazis », et sa variété excusable ?, celle des « islamistes », qui est passée sous silence. Il y a l’antisémitisme (qui d’ailleurs est un antijudaïsme), un point c’est tout. Au nom de quoi devrait-on condamner « l’islamophobie » si l’on ne le fait pas de la « papophobie » ou de la « christianophobie » ? A-t-on vu un chrétien Chaldéen ou un Melchite se faire sauter dans une mosquée d’Irak ? Un seul ? Dès lors, comment mettre sur le même pied « les » intégrismes ? Il existe quand même une différence de nature entre un zélateur d’Al Quaida et un Mormon, je crois. Distinguer souverainement le bien du mal, ne pas mettre à égalité le bon et le mauvais s’appelle aussi : Liberté. Il nous faut être convaincu que la France est et reste une grande puissance. Du moins si elle continue de le décider.
Aujourd’hui, combien de pays ont-ils une représentation diplomatique dans le monde comparable à la nôtre ? Un seul. Combien de pays disposent-ils de sous-marins lanceurs d’engins totalement c.nçus, fabriqués, maîtrisés par leur gouvernement national dans le monde ? Trois, et pas la Grande-Bretagne. Combien de pays disposent-ils de porte-avions de premier rang à catapulte avec une flotte aérienne adaptée, moderne et entrainée ? Deux. La France est au premier rang de toutes les grandes négociations mondiales, elle dispose Dun siège de membre permanent au Conseil de sécurité de l’ONU, ses avions volent dans tous les cieux de la planète. Elle est au premier rang de la technique, de l’art, de la littérature.
Elle est au premier rang des pays possédant un patrimoine multiséculaire, admirable et entretenu. Elle est au premier rang de certains travaux de recherche, elle inonde une partie du monde de son rayonnement culturel, artistique, commercial, d’influence, et ce depuis neuf siècles sans discontinuer !
Quand la France parle, on l’écoute, parfois on la jalouse et on la brocarde de temps en temps, mais on l’écoute et son message est souvent reçu. C’est un fait.
Cependant… restons modestes et cessons de donner des leçons au monde entier, car, comme d’autres, nous n’avons pas que des qualités. Le blanc de notre drapeau n’est hélas pas immaculé. Nous avons aussi de graves défauts : nous sommes souvent arrogants, légers, hâbleurs, désunis, insupportables. Nous voulons répandre les Droits de l’Homme sur le monde, mais nous avons inventé le génocide sous le terme de populicide, puis l’avons mis en œuvre en Vendée en 1793. Nous sommes (avec raison) pour la tolérance religieuse, mais… des Dragonnades de Louis XIV [4] aux « baptêmes républicains » de Carrier à Nantes ou aux lois d’Emile Combes en 1905[5], nous savons aussi persécuter nos concitoyens pour leurs convictions religieuses. Cependant et tout bien considéré, soyons fiers de ce que nous sommes, mais avec mesure. Soyons fiers de notre héritage multiséculaire, en ayant conscience de ce que nous sommes les « débiteurs insolvables » des richesses léguées par nos ancêtres. Nous ne pourrons jamais rembourser cette dette, qui nous oblige. Mais soyons aussi convaincus que cet héritage est fragile et peut s’effondrer en quelques années, voire quelques mois si des événements dramatiques venaient à se produire et auxquels nous n’aurions pas fait face à cause de notre impréparation, de notre inconscience, ou par inconsistance ou imprévoyance. Voyez comme s’est écroulé l’ancien régime en quelques semaines[6], ou encore le tsarisme, le communisme, la Vienne impériale, sans parler des empires romain, moghol, khmer ou aztèque. Ce formidable patrimoine, notre patrimoine (matériel et immatériel) est fragile et se trouve entre nos mains.
Alors restons vigilants et combattons les idées dangereuses pour l’avenir, tout en travaillant d’arrache-pied à l’unité de notre nation, qui en a de jour en jour plus besoin. Nous savons de mémoire séculaire, depuis Bouvines pour le moins, que la France unie est victorieuse des défis. Désunie elle se dissout et, qui sait, pourrait disparaître. Cela ne se doit pas.
Alexandre Lalanne-Berdouticq
NOTES : - [1] Grand comme un département de chez nous : 10 000 km2 et un million habitants…
[2] Dix estropiés au départ d’un cent mètres olympique ne feront pas un champion !
[3] Dont la caractéristique essentielle est que le siège de la souveraineté se tient « dans la personne du peuple », qui délègue ou non son autorité à des mandataires (démocratie directe ou indirecte).
[4] Contre les Protestants
[5] Contre les Catholiques
[6] Il a succombé à des crises multiples et simultanées : économique avec des dettes abyssales et une fiscalité inopérante et injuste, une défiance du peuple dans ses élites qui ne le représentaient plus, un pouvoir devenu impuissant. Comparaison avec aujourd’hui.....
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La solidarité palestinienne est-elle une zone occupée ?
Une fois impliqué dans la solidarité palestinienne, il faut accepter que les Juifs, ainsi que leur souffrance, sont spéciaux ; les Juifs ne sont pas comme les autres, leur Holocauste ne ressemble à aucun autre génocide et l’antisémitisme est la forme de racisme la plus horrible que le monde ait jamais connu et ainsi de suite.
Mais quand il s’agit des Palestiniens, c’est le contraire qui devient le cas. Pour une raison ou pour une autre, nous sommes censés croire que les Palestiniens ne sont pas spéciaux du tout - ils sont comme tout le monde. Les Palestiniens ne sont pas soumis à un mouvement nationaliste juif raciste et expansionniste unique, au contraire, nous devons tous convenir que, tout comme les indiens et les Africains, le calvaire palestinien est le résultat du colonialisme ordinaire du 19ème siècle – simplement encore ce même apartheid barbant.
Ainsi, les Juifs, les sionistes et les Israéliens sont exceptionnels, comme personne d’autre, alors que les palestiniens sont toujours en quelque sorte, ordinaires, font toujours partie d’un plus grand récit politique, et sont toujours comme tout le monde. Leur souffrance n’est jamais due à la particularité du nationalisme juif, du racisme juif, ou même de l’AIPAC qui domine la politique étrangère américaine ; ainsi, le Palestinien est toujours victime d’une dynamique terne et sans intérêt : générale, abstraite et totalement dépourvue de particularité.
Cela soulève de sérieuses questions.
Pouvez-vous penser à un autre mouvement de libération ou de solidarité qui se targue d’être ennuyeux, ordinaire et sans intérêt ? Pouvez-vous penser à un mouvement de solidarité qui rétrograde son sujet simplement en une exposition de plus dans un musée d’histoire d’événements matérialistes ? Je ne le crois pas ! Est-ce que les noirs sud-africains se considéraient comme étant comme tout le monde ? Est-ce que Martin Luther King croyait que ses frères et sœurs étaient intrinsèquement indiscernables ?
Je ne le pense pas. Alors comment se fait-il que la solidarité palestinienne a réussi à tomber si bas que leurs porte-parole et défenseurs se concurrencent les uns contre les autres pour voir qui peut le mieux éliminer la singularité de la lutte du peuple palestinien vers un simple rôle de tendances historiques générales tels que l’apartheid ou le colonialisme ?
La réponse est simple. La solidarité palestinienne est une zone occupée et, comme toutes les zones occupées elle doit se consacrer à la lutte contre « l’antisémitisme ». Unis avec dévouement contre le racisme, entièrement en prise avec les questions relatives au LGBT en Palestine et dans le mouvement lui-même, mais pour une raison ou une autre, le mouvement est presque indifférent à l’égard du sort de millions de Palestiniens vivant dans les camps de réfugiés ainsi que leur droit au retour dans leur patrie.
Mais tout cela peut changer. Les Palestiniens et leurs partisans pourraient commencer à voir leur cause pour ce qu’elle est, c’est-à-dire unique et distinctive. Cela n’a pas besoin non plus d’être tellement difficile. Après tout, si le nationalisme juif est par nature exceptionnel comme le proclament les sionistes, n’est-il pas naturel que les victimes d’une telle démarche raciste distinctive soient au moins, elles-mêmes, tout aussi distinctives ?
Jusqu’à présent, la solidarité avec la Palestine n’a pas réussi à libérer la Palestine, mais elle a réussi au-delà de ses rêves les plus fous à créer une industrie de solidarité avec la Palestine, et cette industrie est largement financée par les sionistes libéraux. Nous avons été très productifs dans le trimballage de militants à travers le monde afin de promouvoir le « boycott » et les « sanctions » pendant que le commerce entre Israël et la Grande-Bretagne est en plein essor et que l’Humus Tzabar est clairement apparent dans chaque épicerie britannique.
Toutes ces tentatives pour réduire le calvaire palestinien en un récit matérialiste généralisé, daté et sans intérêt doivent être exposées pour ce qu’elles sont : une tentative pour apaiser les sionistes libéraux. La souffrance des Palestiniens est en fait unique dans l’histoire, au moins aussi unique que le projet sioniste.
Hier, je suis tombé sur ceci du ministre sud-africain Ronnie Kasrils. Dans un commentaire sur l’apartheid israélien, il dit :
« C’est bien pire que l’apartheid. Les mesures israéliennes, la brutalité, font ressembler l’apartheid à un pique-nique. Nous n’avons jamais eu de Jets qui attaquaient nos cantons, nous n’avons jamais eu de sièges qui duraient mois après mois. Nous n’avons jamais eu de tanks qui détruisaient les maisons. »
Kasrils a totalement raison. C’est bien pire que l’apartheid et beaucoup plus sophistiqué que le colonialisme. Et pourquoi ? Parce que ce que les sionistes ont fait et font n’est ni un apartheid ni du colonialisme. L’apartheid voulait exploiter les Africains, Israël veut que les Palestiniens s’en aillent. Le colonialisme est le remplacement d’une mère patrie par un État colonial. Israël n’a jamais eu de mère patrie, bien qu’elle puisse avoir eu quelques « mères patries de substitution ».
C’est maintenant le temps de regarder le calvaire unique du peuple palestinien. De même, il est maintenant temps de regarder les crimes sionistes à la lumière de la culture juive et de la politique identitaire.
Le mouvement de solidarité peut-il relever ce défi ? Sans doute, mais comme la Palestine, il faut d’abord, qu’il se libère lui-même.
Retrouvez Gilad Atzmon chez Kontre Kulture :
par Gilad Atzmon, une traduction E&R http://www.egaliteetreconciliation.fr
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TERRE & PEUPLE Magazine n°54
Communiqué de Terre & Peuple-Wallonie - 12 mars 2013
Le numéro 54 de TERRE & PEUPLE Magazine est centré autour du thème de l’Empire. Dans son éditorial, Pierre Vial épingle la mobilisation ethnique à laquelle Obama doit sa victoire : 93% des Noirs et 71% des Latinos ont voté pour lui, contre 25% des Blancs, lesquels sont moins conditionnés par les ligues de vertu que les Blancs européens. Dans les sociétés multiculturelles, la logique ethnique reste la clé du monde de demain. Sous le titre ‘Le vase déborde’, il remarque à la suite que les grands hebdomadaires L’Express et Le Point ont traité en couverture de l’immigration. L’Epress pour s’obstiner à y voir un atout économique, niant malgré la multiplication par 6 de l’aide médicale les conclusions de l’étude solide des Contribuables Associés sur son coût réel. Le Point dénonce pour sa part la tactique du grignotage des islamistes et leurs provocations pour tester la résistance des autochtones : la porte est ouverte aux revendications sans fin.
Jean-Louis Roumégace situe la pensée du MAS sur la quête d’identité dans une France où les communautés organiques sont malmenées depuis plus de deux siècles. L’identité se nourrit d’un imaginaire où se mêlent histoire, culture, religion, tradition populaire. La tradition, c’est ce qui ne passe pas. Elle nous permet d’évoluer en restant nous-mêmes. Ce qui est fondamental, c’est d’entretenir la conscience commune. Lénine parlait de ‘conscience de classe’.
Le même explique ensuite les affinités du MAS avec Casa Pound Italia et Pierre Vial enchaîne en rapportant l’heureuse expérience de sa visite à la Casa Pound romaine, car on sait que Casa Pound a essaimé dans toute l’Italie et, outre dans la solidarité avec les Italiens sinistrés, sur tous les terrains, clubs sportifs, syndicats étudiants, groupes musicaux, etc.
Pour introduire le dossier sur l'Empire, Pierre Vial souligne combien le concept évoque la grandeur. Celle-ci n’effraie que ceux qui la confondent avec les prétentions impérialistes des Anglo-Saxons sur le monde. Pour nos patries charnelles européennes, l’idée d’empire ouvre la perspective d’une confédération euro-sibérienne des peuples.
Jean Haudry rappelle que, dans notre tradition, le roi de France, régnant aussi sur des Allemands, des Flamands, des Bretons, des Catalans, des Provençaux, était devenu ‘empereur en son royaume’. L’Empire se définit alors comme une monarchie multinationale. L’institution du ‘Roi des Rois’ est une réalité ancienne, apparue dès le quatrième millénaire AJC en Egypte et en Orient. C’est Alexandre qui la transmettra aux Romains. Dans ses origines, l’Empire n’a pas de limites : il porte jusqu’où s’étend le pouvoir. L’empereur perse Cyrus II est Roi du monde; Rome est édifiée autour du ‘mundus’. Toutefois, la défaite de Varus devant Arminius arrête la conquête du monde au ‘limes’ et contraint l’Empire romain à la défensive. Chez les Indo-Européens, les notions de roi du monde et d’empire universel sont anciennes, mais plus on remonte et plus la notion se limite à la part qu’on connaît du monde. Cela légitime les razzias. A la période des migrations, Celtes et Germains n’ont jamais formé que des confédérations occasionnelles. La conquête de matières premières des grands empires asiatiques, avec un pouvoir central fort et une langue véhiculaire qui se superpose aux langues particulières, tout cela est étranger aux peuples indo-européens.
Pierre Vial évoque la nostalgie des clercs médiévaux pour la paix romaine garantie par les légions, mythifiée comme toute ‘belle époque’. Le couronnement de Charlemagne à Rome par le Pape Léon III est ressenti à Constantinople, la Seconde Rome, comme un camouflet pour l’Impératrice Irène. Si Charlemagne donne des gages à l’Eglise (il impose par force le christianisme aux Saxons et aux Frisons), il ordonne dans le même temps de recueillir la littérature épique païenne. Son fils le Débonnaire en fera brûler le recueil, mais les textes seront ensuite portés par une tradition orale, les ‘vulgares cantilenae’. Réaliste, l’Empereur permet à chaque région de ‘vivre du sien’, avec son droit particulier, avec ses assemblées générales annuelles des hommes libres. Othon, élu roi par les cinq peuples, germain, lorrain, souabe, bavarois, franconien et saxon, forces d’équilibre d’un pouvoir souverain, tint à se faire couronner à Aix-la-Chapelle, et pas à Rome. Conrad II a réintégré la Bourgogne dans l’empire, mais sous son fils Henri IV le Pape réussit à échapper au contrôle de l’empereur. Le conflit du césaro-papisme et de la théocratie, qui va les dresser l’un contre l’autre pendant deux siècles, rebondit avec Frédéric Barberousse et avec son petit-fils, Frédéric II. Avec les Hohenstaufen, ‘race de vipères’ que le pape n’eut de cesse d’exterminer, l’empire semblait condamné. Les Habsbourg lui permettront de survivre.
Gilles Gaillez, qui passe toute leur lignée en revue, rappelle leur sage souci, sous la constante menace de l’anarchie, d’équilibrer la composante germanique par les composantes magyare et slave et de refaire l’unité en rempart contre la perpétuelle menace turque. C’est par d’astucieux mariages qu’ils établiront leur dynastie et par le principe de la primogéniture qu’ils parviendront à la faire durer trois quarts de millénaire, installée sur les domaines impériaux héréditaires. Lorsque l’impératrice Marie-Thérèse épouse le duc François de Lorraine, la puissance de l’empire est à son apogée et les Turcs en passe d’être reconduits au Bosphore. C’est la révolution libérale et bourgeoise qui aura raison de lui, bien plus que la Prusse, qui l’écrase militairement en 1866, à Sadowa. A la surprise de l’Europe, le reliquat de leur empire, l’ensemble hétéroclite austro-hongrois, va conserver une cohésion inattendue et c’est la première guerre qui va permettre au projet mondialiste d’étouffer dans l’œuf le projet trop prometteur des Habsbourg d’une triple monarchie austro-slavo-hongroise.
Pour Gabriele Adinolfi, la contradiction n’est qu’apparente entre la Res Publica, le bien commun communautaire de la Ville, et l’empire. Mais, si le fascisme italien a épousé le mythe de l’Empire romain, c’est dans le sens de la mystique fasciste, qui oppose Rome à Carthage, en ensuite à Londres et Jérusalem. Au contraire de la pulsion impérialiste à tout soumettre à un modèle unique, l’idée impériale fasciste, c’est le respect dans la participation directe, anticolonialiste.
Pour Willy Freson, l’Union européenne n’est que le décombre impuissant de l’Empire éclaté, dominion le moins problématique des Etats-Unis. Et le demi-siècle de paix prétendue qu’on affiche à présent à son crédit n’a rien à voir avec la Pax Romana, produit d’une puissance décisive. Prophétique, Krouchtchev parlait à l’époque avec dédain d’un « mariage d’homosexuels », infécond. Divisée en une poussière d’entités instables dont les nations actuelles sont les héritières, l’Europe révèle par contre une identité fondée sur sa géographie et plus encore sur des racines communes. L’ « équilibre européen » n’est pas l’aboutissement d’une convergence d’entités étrangères, mais la résultante d’un mode politique et d’un moule historique communs. C’est l’héritage d’Alexandre le Grand et d’un autre visionnaire inégalé, César. Celui-ci avait préféré s’assurer de l’hinterland gaulois de l’Italie, plutôt que céder au mirage de l’orient. Son héritier politique, Auguste, parachèvera la tâche en Europe centrale et orientale. C’est Tibère qui va ordonner le repli sur la ligne Rhin-Danube, pour de simples motifs de politique intérieure et non de contrainte extérieure. Eut-il tenu le front, le choc des grandes migrations s’en serait trouvé dévié et le noyau de la vigueur germanique aurait désormais agi en faveur de l’Empire. « Et il aurait rendu improbable qu’un suppôt de guerre civile comme Constantin fît du messianisme chrétien l’idéologie dominante du monde romain, et improbable de même la survie du judaïsme et l’émergence de l’islam. » Tacite rapporte, avec mépris, que quand le feu sacrilège a été mis au Capitole, en 69, des Gaulois avaient alors présagé que la souveraineté du monde irait aux Transalpins. La prophétie ne s’est réalisée qu’en 800, autour du noyau continental Meuse-Oder-Tibre, que s’ingénieront à maintenir les empereurs germaniques et auquel fera obstacle la prétention française. Mais quand reviendront les temps où les Chinois nous désigneront à nouveau par ‘Ta Tsin’, la Grande Chine ?
Llorenc Pierre Albanell est un Catalan pénétré de la légitimité que peut conférer à un mouvement indépendantiste un million et demi de manifestants qui se pressaient dans les rues de Barcelone le 11 septembre dernier. Pour lui autant que pour nous, l’ordre nouveau européen doit y aller fort : les états-nations doivent disparaître. Ils ne sont plus adaptés. Ils viennent contrecarrer les collaborations inter-régionales, fécondes pour la gestion politique, économique, écologique. Le système à trois bases Europe-Nation-Région génère lenteurs et coût inutiles. Le principe de base doit être la subsidiarité et, dans l’ordre nouveau, l’Europe n’a à intervenir que pour ce qui excède les capacités régionales, notamment pour la défense et la politique étrangère. Comme le recommandait le prix Nobel d’économie Maurice Allais, l’Europe doit pratiquer un protectionnisme continental, préserver son indépendance énergétique et alimentaire et garder le contrôle des produits médicaux et d’intérêt stratégique. Notamment par la nationalisation des productions nécessaires à la survie (eau, gaz, électricité, transports) et par le contrôle des banques, de manière à éliminer toute mainmise de cartels politico-financiers. Enfin, les terres arables ne doivent appartenir qu’aux allochtones.
Alain Cagnat fait la chronique du cynisme machiavélique de la politique pétrolière des Anglo-saxons au Moyen-Orient. Ils ont commencé avec la Guerre de Crimée, dans laquelle ils sont parvenus, sous prétexte de défendre les Turcs contre les Russes, à entraîner les Français (qui y perdront 95.000 hommes, contre 25.000 Anglais !). Il s’agissait d’empêcher les Russes de libérer les populations slaves opprimées et surtout de développer leur puissance en obtenant un accès aux ‘mers chaudes’. Avec l’invention du moteur Diesel, en 1885, il était devenu urgent pour la Royal Navy de contrôler les champs de pétrole du Moyen-Orient, car, sur la Mer Caspienne, les navires russes fonctionnaient déjà au mazout depuis 1870 ! Les Anglais commenceront par s’installer en Egypte, avant de conquérir progressivement la péninsule arabique et l’Irak. Mais, pendant ce temps, l’Allemagne, alliée des Turcs, est devenue une menace dans la région, car elle construit une ligne ferroviaire Bagdad-Berlin. La première guerre mondiale se dessine alors que les Anglais envahissent le Koweit en 1912 et que la Deutsche Bank acquiert pour la Bagdad Rail les droits de passage pour les pétroles de la très riche région de Mossoul : c’est le casus belli. Le premier prétexte suffira. C’est à ce moment que T.E.Lawrence va promettre l’indépendance à l’émir de La Mecque, son ‘ami’ Hussein ibn Ali, qu’il trahira. C’est dès cette époque que les Anglais vont déployer 1,4 millions d’hommes au Moyen-Orient, au détriment de leurs alliés français ! Cela n’empêchera pas Clémenceau d’offrir ensuite Mossoul à l’Angleterre « au nom de l’amitié franco-britannique » ! Les Anglais, qui ne veulent en aucun cas des embarras d’une unité arabe, vont jouer ensuite les Saoudiens contre les Hachémites (lesquels se feront massacrer). Lorsqu’Ibn Saoud va reprendre à son compte l’unification de la péninsule, les Anglais fractionneront celle-ci entre l’Arabie saoudite, l’Irak, le Koweït le Yémen et la Jordanie. Jusqu’à ce que les Américains jouent à leur tour Ibn Saoud contre leurs alliés anglais. C’est ainsi que s’explique le mariage contre nature de la Première Démocratie du Monde avec des Bédouins pillards et esclavagistes, fanatiques religieux fondamentalistes et commanditaires de terroristes, « gardiens légitimes des Lieux Saints ».
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Syrie : Les chrétiens s’organisent face aux rebelles islamistes
Le million et demi de chrétiens syriens, catholiques ou, dans leur majorité, orthodoxes, s’efforcent de se tenir à l’écart du conflit, craignant d’être identifiés au régime de Bachar Al-Assad, qui leur a toujours accordé sa protection.
Martine Laroche-Joubert et Christophe Kenck, reporters à France 2, sont allés à leur rencontre à Qashmili, une ville à majorité kurde dans le nord du pays et dans le village de Sérekaniyé.
Les chrétiens de Syrie ne comptent plus que sur eux-mêmes. Ils tentent de s’organiser, avec des armes rudimentaires, contre les groupes extrémistes, islamistes et radicaux, qui mènent la rébellion. Beaucoup d’entre eux ont fui :
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Peut-on éviter la famine mondiale ? (arch 2008)
La campagne médiatique sur les « révoltes de la faim » qui s' étendent dans le monde vise-t-elle à culpabiliser encore plus les « pays riches » ? Directeur de la FAO, organisation de l'ONU pour l'Alimentation et l'Agriculture, le Sénégalais Jacques Diouf ne celait pas le 10 avril à New Delhi, en présence du ministre indien de l'Agriculture Sharad Pawar, la gravité de la situation alimentaire globale : « Face à l'offre et à la demande, les prix de l'alimentation ne sont pas près de s'améliorer. » Les stocks mondiaux de céréales, réduits à 4/5 millions de T, ne couvriraient plus, affirme-t-il, que de 8 à 12 semaines, alors que nous ne cessons de le dire ici : il y a des mois que la sécurité de 65 jours a été pulvérisée. « Avec les émeutes d’Égypte, du Cameroun, d'Haïti, du Burkina Faso, du Sénégal, ajoute-t-il, la situation alimentaire du monde est dramatique. » Dans ces pays, 50 à 60 % des revenus sont consacrés à la nourriture. 65 % au Vietnam. 73 % au Nigeria. Contre 14 % en France. Aux USA, les 20 % les plus pauvres n'y consacrent pas plus de 16 %.
Du 3 au 6 juin, une conférence mondiale débattra au siège de la FAO à Rome de la nécessaire croissance de la productivité dans les pays pauvres, de l'augmentation de la consommation dans ceux en développement et de l'impact du climat sur la production mondiale. Mais le directeur de la FAO, évoquant les « raisons structurelles » responsables de la situation, met d'abord en cause l'extension des cultures agro-énergétiques. Sans citer les États-Unis, il dénonce le pays qui consacre 100 millions de tonnes de céréales aux agro-carburants et entend « multiplier ce chiffre par 12 d'ici 2017 ». Cette course effrénée à la « chimie verte », alimentée par le spectre du C0₂ anthropique, est imputée avec agressivité aux pays industrialisés. Ainsi ce paysan désespéré du Bangladesh qui, dans un reportage récent d'Arte, maudissait l'Occident responsable à ses yeux du réchauffement climatique et de sa terre inondée.
HARO SUR LES BLANCS !
Il commence à avoir le dos large, l'Occident ! À la même tribune, le ministre de l'Agriculture indien se félicitait de ce que son pays, deuxième producteur mondial de blé après la Chine (96 millions de T), ait su protéger son 1,15 milliard d'habitants de la famine : au 1er avril 2008, l'Inde disposait d'une réserve de 5,5 millions de T de blé, alors que quatre suffiraient. Avec 75 millions de T en 2008, proche de l'autosuffisance grâce à la révolution agrochimique imposée au Pendjab et dans l'Aryana, elle n'en a pas moins raflé en 2005/06 quelque 5,5 millions de T sur le marché mondial. 1,8 million en 2006/2007. 2 millions en 2007/2008. Aggravant ainsi, comme la Chine, l'envolée des prix agricoles. « En tant que ministre de l'Alimentation, se justifie Sharad Pawar, je dois maintenir des stocks de sécurité afin de faire face à toute éventualité. » De même ses achats massifs de viande sur le marché mondial sont-ils autre chose que des importations déguisées de céréales, quand il faut 8 kg de maïs pour faire 1 kg de viande ?
Quant au riz, en pleine ascension, on ne saurait montrer les Bourses occidentales du doigt. Les transactions en effet sont entre les mains du négoce chinois qui ne connaît que la loi de l'offre et de la demande. De 200 $ la tonne il y a cinq ans, le riz est passé à 400 en décembre 2007 et à 500 début avril. Mais il peut atteindre 1 200 $ et l'Inde n'exporte plus, y compris vers le misérable Bangladesh, à moins de 1000 $.
Pour ne rien dire du tsunami démographique tiers-mondiste quand, depuis un demi-siècle, les pays blancs se stérilisent. Ou des dégradations environnementales dont la plupart des pays du Sud ainsi que l'Inde, la Chine, les Philippines, l'Indonésie sont les premiers fautifs.
De toutes parts - Strauss-Kahn au FMI, Zoellnick à la Banque Mondiale, Diouf à la FAO -, on pointe un doigt accusateur vers les nations blanches dont l'égoïsme, en faisant monter le prix des céréales, naufragerait 33 pays dont le néo-con Zoellnick larmoie qu'il « ne leur reste plus de marge de survie ». Pour le FMI, au cours des trois dernières années, la moitié de l'augmentation du prix mondial du maïs serait imputable à l'éthanol américain. Et l'Union européenne ne détaxe-t-elle pas ses agro-carburants, distrayant de plus en plus de surfaces à vocation alimentaire vers les cultures énergétiques ? Ils sont cependant plus discrets sur le très gourmand Brésil de Lula Da Silva qui, dans l'imagerie globale, passe toujours pour une nation de couleur.
Le Programme Alimentaire Mondial (WFP) déplore un trou de 500 millions de $ dans son budget. Il y a situation d'urgence, proclame encore Zoellnick qui reproche aux nations blanches d'avoir en 2006 réduit leur aide de 8,4 % alors que, pour réaliser les promesses faites en 2005, elles devraient l'augmenter de 35 % au cours des trois prochaines années. Qui paie ?
PLUS QUE JAMAIS L'OMBRE DE MALTHUS
L'Europe, l'Amérique du Nord et l'Australie sont sommées de financer le développement d'une agriculture moderne dans le Tiers-Monde, notamment en Afrique : « On ne voit pas, proteste Diouf, pourquoi ['Afrique n'aurait pas droit aux mêmes équipements qui existent en Europe. Aux mêmes réseaux d'irrigation, autoroutes, infrastructures agrochimiques qui ont permis l'éminence de l'agriculture européenne. » Outre que, avant d'exiger de tels droits, les élites africaines devraient faire la preuve de leurs capacités inventives, il faut aller au bout du raisonnement. Le prix payé par l'Occident pour cette agriculture a été terrible. 0,2 % seulement des Américains en vivent encore. 1 % des Français et des Australiens. La modernisation agro-industrielle chinoise jette 300 millions de paysans à la rue. C'est pourtant ce qui attend l'Afrique si on écoute les malfrats du productivisme agraire. Irriguer plus quand 3 % des eaux africaines servent à l'agriculture ? Après un demi-siècle de siphonnage et de pollution des nappes phréatiques, les États-Unis et l'Europe réduisent leurs surfaces irriguées. Promouvoir une seconde « révolution verte » dans le Tiers-Monde ? Des millions d'hectares, gorgés de pesticides, ont été stérilisés par les premiers. Étendre partout la mécanisation et la technologie quand le coût des énergies menace de paralyser tout le système?
Notre ministre de l'Agriculture Michel Barnier et ses pairs prétendent remettre en culture toutes les terres disponibles et ne consacrer que 8 % d'entre elles aux agro-carburants. Mais les friches industrielles et les jachères avaient été repoussées dans les sols les plus pauvres, les landes et les coteaux. Chaque année, 60 000 hectares de terres limoneuses sont avalés par le bétonnage péri-urbain imposé par la croissance de l'immigration et les infrastructures commerciales, autoroutières, aéroportuaires. L'augmentation des prix, en bonifiant les revenus des agriculteurs, les encouragerait à produire plus ? Faux : après un demi siècle d'agrochimie la productivité ne cesse de décliner. Le renchérissement des intrants issus de la chimie pétrolière, l'accroissement des charges et l'inflation du prix des matériels ont largement neutralisé la récente augmentation des marges. Enfin, les contrôleurs garde-chiourmes de Bruxelles sont avec les virus tropicaux les plus efficaces artisans de la désertification rurale européenne.
D'ailleurs, selon les experts de Merril Lynch, en 2006 la production alimentaire a augmenté à un moindre rythme que la croissance démographique. Menace terrifiante pour tous ceux qui, depuis des générations, calomnient Thomas Malthus, refusant d'écouter le vieux prophète. Mais à cet instant d'évolution, seule la famine peut rétablir le point d'équilibre. Ne cessant de biaiser, ils se sont persuadés qu'en dépouillant les pays "riches" au profit du Tiers-Monde, ils résoudront l'angoissante question de la faim. Plus le temps passe pourtant, plus la démographie mondiale enfle. Et plus la catastrophe sera gigantesque.
Petrus AGRICOLA Rivarol du 2 mai 2008
L'Égypte, cas d'école
L'un des premiers pays frappés par des révoltes de la faim a été l’Égypte : 80 millions d'habitants entassés sur 40 000 km², 1/10e de la France, 33,8 % ont moins de 15 ans, Moyenne d'âge, 22 ans. Avec trois enfants et demi par femme, 160 millions d'habitants prévus en 2050, 4 000 au km² dans le delta du Nil. Comment imaginer doubler la production agricole en cinquante ans ? Alors l'ONU, GIEC en tête, plutôt que d'affronter la tragédie de la surpopulation, préfère convaincre qu'en faisant monter la Méditerranée de un mètre, c'est le réchauffement climatique, provoqué par les « pays riches », qui condamne ces gens.