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tradition - Page 128

  • Jean Raspail et les peuples disparus. Mythe du fixisme historique ou récit désolé de la marche du monde vers sa fin ?

    Avant de s'essayer au roman, Jean Raspail consacra la première partie de sa vie active à poursuivre les peuples en voie d'extinction, notamment en Amérique.

    Raspail aux Antilles

    De ces périples naquirent plusieurs recueils, notamment Secouons le cocotier, récit paradoxal de son séjour dans les îles des Caraïbes, Antilles françaises, îles néerlandaises et britanniques, îles indépendantes. Raspail s'y fit observateur et conteur d'une réalité souvent éteinte ou subsistant dans une forme dégénérée, comme chez les peuples blancs de ces îlots de la Guadeloupe, descendants des plus vieilles familles de France, vivant entre eux, reclus, pauvres parmi les pauvres depuis deux siècles. Cette évocation douloureuse prend aussi une coloration toute spéciale sous sa plume, celle de la fixité d'un temps arrêté au milieu de la course du monde. Tout en décrivant à plaisir l'irruption de la modernité aux Antilles, avec les premiers postes de télévision ou les retombées de « l'argent braguette » sur les modes de vie, il s'arrête sur ces survivances, ces témoignages de temps éteints, d'Antilles blanches révolues. C'est avec la même affection pleine d'amertume qu'il conclut son essai avec Haïti, seul pays des Caraïbes resté à peu près pur face à l'américanisation (rappelons que ce témoignage date du début des années 1960), pur face à l'occidentalisation, pur dans son africanité libérée depuis cent-soixante-dix ans alors. Mais comme cette pureté conduit l'île dans le mur, on ne peut s'empêcher de soupirer. Le temps mental des hommes de l'île s'est arrêté, pas le temps biologique, et la démographie galopante autant que la dégradation de l'habitat laissent songeur. En lisant le Raspail d'il y a cinquante ans, on se rend compte que Haïti n'a pas changé. Ici, la confrontation entre l'immobilité de l'esprit national haïtien et la marche du monde matériel haïtien rendent un résultat explosif.

    Raspail et la Patagonie

    Ce souci de rendre témoignage de peuples lointains a trouvé, bien sûr, sa pleine expression en Patagonie. Dans Qui se souvient des Hommes ? Nous suivons pas à pas la destinée du peuple des Alakalufs, qui eux-mêmes s'appelaient les Kaweskars, les Hommes, car ils n'en connurent longtemps pas d'autres qu'eux-mêmes, dans cet univers liquide et glacé du détroit de Magellan.  Les Kaweskars, Raspail en rencontra lui-même une famille dans un canot, alors qu'il naviguait sur un bateau de guerre chilien. Il est peut-être le dernier blanc à en avoir vu. Ce peuple, authentiquement disparu, non par extermination, mais par digestion au sein des autres peuples, n'a pas laissé de traces, que quelques photos, de rares vestiges archéologiques, une poussière. Digéré va bien pour qualifier la disparition de ce peuple, plus que l'assimilation, car il s'agit de tout un processus de dégradation et de déliquescence qui a frappé ces familles au fur et à mesure qu'elles rejoignirent les civilisés en Argentine et au Chili. Certains tombèrent en telle décadence physique et morale qu'ils en moururent de langueur au milieu des prévenances empressées de toutes les charités des missionnaires, généreux en médicaments, en nourriture, en bons lits et en cabanes chauffées mais qui n'avaient plus la saveur du pays. Les Alakalufs vivaient encore à l'âge de pierre lorsqu'ils furent brutalement projetés dans la modernité occidentale qui les maltraita d'abord avant de les protéger.

    Tout cela, Raspail en rendit compte, dans ce roman historique patagon, mais en l'élargissant à l'histoire même de la création, Dieu étant acteur passif de l'aventure. Ainsi, l'arrivée de ces Indiens sur le continent américain correspondait-elle au matin du monde, tandis que la mort du dernier Alakaluf sonnait le temps de l'apocalypse et l'entrée dans la gloire du dernier des Hommes.

    Le fixisme historique et la nécessaire frontière entre les peuples

    L'histoire des Kaweskars est éloquente ; ils sont en équilibre avec leur univers et paisibles tant que le monde les ignore et que leur société demeure statique. Mais que vienne le progrès et tout s'effondre. Raspail ne fait que constater. Mais ce constat amer de la confrontation malheureuse entre des civilisations par trop dissemblables il le transposa dans des œuvres, elles, de pure fiction ; Les Royaumes de Borée et Le Camp des saints. Dans le premier cas il s'agit de l'homme du petit peuple à la peau couleur d'écorce, vivant toujours comme au paléolithique, fuyant tout contact avec les hommes blancs, dont il connaît fort bien pourtant les agissements et dont il protège certains êtres choisis, les maîtres du bâton loup, des Pikkendorff. La raison de la protection se comprend bien d'ailleurs ; Pikkendorff respecte le petit homme et ne cherche pas à forcer ses retraites ou son territoire. Lorsqu'un des membres de la famille le tenta, il en mourut, mais d'épuisement, car cet univers n'était pas fait pour lui, et le petit homme lui donna sépulture. C'est la confrontation avec la modernité, le déboisement dans la principauté de Ragusa, puis la débandade des peuples baltiques devant les armées soviétiques en 1945 qui provoquèrent la disparition par annihilation silencieuse du petit peuple. Le dernier membre, à la recherche de ses origines, devait mourir incompris, laissant une descendance métisse ignorante des traditions que lui-même avait oubliées. Cette disparition des peuples fragiles confrontés à la modernité occidentale est un point effleuré également dans Septentrion et Le Son des tambours sur la neige.

    Mais ce que Raspail a vu et lu sur les peuples animistes primitifs de l'Asie et de l'Amérique, il le craint également pour l'Europe. Ainsi le montre-t-il dans Le Camp des saints, où l'Europe disparaît littéralement, s'écroule sur elle-même au contact de la masse des migrants pauvres, malheureux et dont la simple présence si contraire au mode de vie européen, entraîne la disparition de la civilisation de ces derniers.

    Les dernières cartouches des hussards de Bercheny sur les plages ou dans le réduit du mas provençal du narrateur sont aussi dérisoires, devant l'invasion, que les flèches de bois taillé des petits hommes, les javelots des Oumiates ou les harpons des Kaweskars. Le thème de la disparition de l'Occident confronté à sa propre décadence et à l'invasion extérieure est aussi évoqué dans Sept cavaliers qui n'est autre qu'un conte de la fin du monde européen. Les compagnons d'infortune, par leurs patronymes, leurs attitudes, leurs familles, leurs grades et leurs rangs militaires sont un condensé de l'Europe aristocratique. Leur monde s'écroule de l'intérieur, touché par un venin de mort, mais aussi de l'extérieur avec les invasions tchétchènes. Comme chez les Alakaloufs, ce qui a disparu ne laisse plus aucune trace derrière lui, sinon la sauvagerie inhumaine ; c'est la digestion d'une civilisation.

    Un monde idéal ?

    En parallèle, le monde européen idéal évoqué par Raspail est un univers de hiérarchies sociales strictes, d'honneurs chevaleresques, de discipline militaire, d'uniformes rutilants, de princes servis et obéis sans discuter, de vaillance conquérante, de traditions gaillardes, de cultes ancestraux païens perpétués par le truchement d'un catholicisme impeccable dans ses ornements liturgiques et son grégorien. C'est le monde de la principauté de Septentrion avant que ne commence la révolution, c'est l'univers idéal de l'enfance de Frédéric et Salvator dans Les Yeux d'Irène, c'est le panache du combat de Benoît dans L'Anneau du Pêcheur, c'est la dynastie des Pikkendorff dans Hurrah Zara !

    Mais à y regarder de plus près ce monde est figé ; figé dans des séparations civilisationnelles strictes qu'il est bon de maintenir pour la survie des peuples auxquels la rencontre serait insupportable ; figé aussi dans des époques. Si les Kaweskars sont bien dans leur paléolithique, les Européens des romans de Raspail ne semblent jamais aussi bien que dans une belle époque fin XIXe siècle, ultime avatar d'un grand et bel occident avant le chambardement suicidaire de la première guerre mondiale. Regardez le détail des uniformes des cavaliers, celui de la décoration des trains, des salles d'apparat, de la vaisselle, des voitures, tout cela est à mi-chemin entre les derniers feux du XIXe siècle et l'extrême limite du début des années 1950. Là, nous sommes dans un idéal, figé, et pour lequel la modernité est une catastrophe engendrant la disparition sous forme de mort lente.

    Sous la forme du roman et pour les peuples indiens d'Amérique ou de Sibérie, Raspail a un peu tenu le même rôle que Georges Dumézil dans le domaine de l'essai historique pour les peuples indo-européens, celui d'un passeur de mémoires, de chroniqueur ultime de races éteintes ou de civilisations amnésiques.

    Mais ces récits doivent être pris pour ce qu'ils sont, des contes, des méditations littéraires et non des manifestes ou des pamphlets comme le font parfois hardiment certains lecteurs de Raspail. Prendre ces histoires pour des manifestes et non des témoignages littéraires nous amènerait à rêver d'un monde mensonger, qui n'a jamais existé, celui de divisions fixes entre des peuples bloqués dans leur évolution. Au temps de la cité grecque, où chaque peuple avait son propre culte et par cette barrière sacrée était radicalement différent de son voisin, les passerelles et les unions existaient déjà, la confrontation ou l'alliance se fit souvent et l'évolution ne cessa jamais. Il n'en est pas différent aujourd'hui.

    Jean Raspail, romancier de génie, s'il se désole de ces disparitions, les sait inéluctables et n'en est que le témoin navré. Avec lui pleurons sur les peuples éteints comme on pleurerait sur les premiers morts d'une innombrable fratrie. Mais sachons-le, c'est un phénomène inévitable de la vie du monde.

    Gabriel Privat

    Du même auteur :

    -          Publié le 20 septembre 2016 : Jean Raspail. A la découverte d'un univers litteraire

    http://www.vexilla-galliae.fr/civilisation/litterature-cinema/2221-jean-raspail-et-les-peuples-disparus-mythe-du-fixisme-historique-ou-recit-desole-de-la-marche-du-monde-vers-sa-fin

  • Chronique de livre : Bruno Favrit "Vitalisme et vitalité"

    Bruno Favrit, Vitalisme et vitalité

    (Editions du Lore, 2006)

    Il est parfois bon de parcourir les bibliothèques d’autrui. Ainsi, c’est en explorant une bibliothèque où le paganisme et les traditions d’Europe ont bonne place que je tombai par « hasard » sur une brochure du nom de Présence Païenne. Son auteur, Bruno Favrit, sans jouir (hélas) de la renommé d’un Jean Mabire ou d’un Christopher Gérard, n’est pas un inconnu et encore moins un débutant.

    Collaborateur à la décapante revue non-conforme Réfléchir & Agir, Bruno Favrit compte une quinzaine d’ouvrages à son actif, principalement des essais sur le paganisme et des romans. En fin connaisseur de la Grèce antique – particulièrement de l’œuvre de Platon – et de la philosophie de Friedrich Nietzsche, l’auteur synthétisait dans la brochure susnommée une vision solaire du paganisme traversée par un vitalisme bienvenu en ces temps moroses d’apathie existentielle et de nihilisme. Quelle ne fut pas ma surprise et ma joie lorsque je découvris que Bruno Favrit avait précisément consacré un ouvrage à la question du vitalisme, et pas n’importe lequel: celui de la Grèce antique. Vitalisme et Vitalité, c’est donc son nom, est un essai dont la lecture devenait par conséquent indispensable…

    « La Grèce comme creuset de la civilisation occidentale est un fait avéré […] Son vitalisme se tient là, dans le champs de tous les possible. C’est ce que nous proposons de méditer à une époque où la sclérose, la limitation, la législation n’ont jamais été aussi pesantes ». Redécouvrir des racines enfouies au plus profond de nous-mêmes à une heure où, justement, plus rien ne doit avoir de racines, ni de sens, où l’existence de chacun se résume à un parcours linéaire allant d’un point A à un point B. Nous autres Européens avons la chance de pouvoir puiser le vitalisme nécessaire quant à notre sauvegarde dans nos nombreuses traditions et cultures : c’est pourquoi nous incarnons la diversité dans l’unité. Néanmoins, la racine prépondérante de notre civilisation Européenne est incontestablement la Grèce antique (« Tout est parti de la Grèce ») qui fut un point de départ pour des domaines tels que l’Art, la Philosophie (qu'elle soit tournée vers la métaphysique ou le politique), la Religiosité et le Sacré, la Science, etc. C’est ce que propose d’étudier la première partie de cet essai.

    Il y aurait énormément de chose à dire sur ce berceau civilisationnel que fut la Grèce antique. Nous l’avons dit plus haut : son influence est prépondérante. Or, il s’agit ici d’un essai et non d’une étude universitaire, l’excellente connaissance du sujet conjugué à un esprit de synthèse s’imposent donc. Heureusement, Bruno Favrit manie les deux parfaitement et la lecture de Vitalisme et Vitalité n'en est que plus agréable. Dans la sous-partie « La tradition et les idées » l’auteur développe les thèmes des dieux, des mythes et des différentes écoles de philosophie présocratique avec des figures telles Pythagore, Anaxagore, Parménide, Héraclite et post-Socratique en la figure de Platon. Bien que cité de nombreuses fois, on regrettera cependant l’absence d’une partie consacrée à Aristote, philosophe, au coté de son maître Platon, d’une importance et d’une influence pourtant capitale…

    La mythologie et la religiosité des anciens grecs sont bien entendu à l’honneur. En bon nietzschéen, Bruno Favrit nous gratifie même d’une partie dédiée à Dionysos, expression d’une autre facette du vitalisme européen, celui là-même que le christianisme, poison de l’âme européenne, n’a cessé de diaboliser. D’autres grands thèmes sont pareillement étudiés lors de cette première partie (à savoir les mœurs et l’éducation à Sparte, l’expérience de la guerre et l’expérience métaphysique) dont nous pourrions en résumer la quintessence via la citation suivante : « L’union et la volonté comme moteur de l’action, c’est donc la leçon que nous donne la Grèce. Elle n’appelle pas seulement à ce que l’homme tende à s’identifier aux dieux, mais à ce que la société toute entière s’organise autour de cette idée, davantage du reste qu’une idée : une interprétation du monde. »

    La deuxième partie de l’ouvrage, « De l’homme empêché à l’homme vitalisé », se veut être « le constat d’une déréliction, ses causes et ses effets, et une relecture du monde à travers le prisme vitaliste ». Sont désignés par l’essayiste comme ennemis de l’être et, en ce qui nous intéresse, de l’être européen: l’idéologie du progrès, les monothéismes, l’eudémonisme, le règne de l’Opinion, l’irénisme et l’égalitarisme. L'auteur revient également sur la notion capitale à ses yeux (et nous souscrivons entièrement à son point de vue): le Mythe. Mythos qu’il oppose au Logos. Les mythes, les légendes, et les contes font partie intégrale de notre identité d’Européens, un auteur comme Robert Dun s’attachait particulièrement à ces derniers. Nous avons ici matière à inspirer nos vies et la jeunesse. Plutôt Siegfried et Héraclès qu’Iron Man et Captain America !

    Vitalisme et Vitalité de Bruno Favrit est un essai roboratif, loin de la lourdeur des écrits académiques et de celle du « dernier homme », emprunt de poésie parfois, chose normale pour ce lecteur de Nietzsche ! Ils sont d’ailleurs nombreux aujourd’hui à remettre au goût du jour cette philosophie vitaliste (voir Rémi Soulié et son Nietzsche ou la sagesse dionysiaque). Le renouveau vitaliste sera une étape majeure quant aux retrouvailles avec notre être européen, cette fameuse « âme européenne ». Notre imago mundi est certes politique mais elle est aussi métaphysique, et cette métaphysique se doit d'être vitaliste, c’est à dire « plus que vie ». L’essai de Bruno Favrit est un appel. Espérons qu’il sera entendu !

    Donatien/C.N.C.

    http://cerclenonconforme.hautetfort.com/le-cercle-non-conforme/

  • « Moralistes et moralisateurs »

     
    3172475277.jpgRien n’incline davantage à la passion que les questions morales. Ce glissement du principe vers la passion n’est pas sans dangers : tous les fanatismes naissent de cette conviction ardente en la justesse universelle de nos principes. Il semblerait que nous devenions dévastateurs et cruels à mesure que nous nous persuadons de l’excellence de nos bons sentiments et du bon droit que des bons sentiments nous confèrent à juger du Bien et du Mal. Le mal que nous infligeons à autrui est d’autant plus terrible qu’il s’inflige au nom du Bien. Il y a dans la morale des moralisateurs, dans la « moraline », pour reprendre le mot de Nietzsche, un élan à la fois vil et prédateur que la volonté de puissance la plus soutenue n’atteint que rarement.
    La déchéance de la morale, loin d’être ce « déclin de la moralité » que déplorent les prudes et les tartuffes, loin de se caractériser par un étiolement des questions morales, par une sorte de quiétisme de l’amoralité, ou par un laxisme plus ou moins « décadent », semble au contraire s’exprimer désormais par une hybris de la morale, une démesure du Bien qui confère à ceux qui en sont possédés un extraordinaire sentiment de puissance.
    Gagnée par l’ivresse de cette hybrispuritaine qui s’étend à des domaines politiques, esthétiques ou métaphysique où elle n’a que faire, cette morale débordante, cette griserie narcissique du Bien abstrait, envahit et subjugue les consciences et les entendements humains au point de les aveugler sur le beau et sur le vrai qui, par essence, ne sont jamais acquis mais toujours à conquérir et appartiennent tout autant aux réalités sensibles, au frémissement de l’immanence, qu’aux réalités intelligibles.
    Il n’est pas un débat littéraire, artistique, politique ou scientifique qui ne soit d’emblée tenu sous le joug d’un jugement moral d’autant plus arbitraire qu’il se fonde sur le refus symétrique des faits et des raisonnements. Ce qui s’oppose au moralisateur, ce n’est point l’immoralité (qui, par la mode de la « transgression » subventionnée, est devenue elle-même moralisatrice) mais bien la morale des Moralistes dont la tradition, pour être devenue plus ou moins clandestine, perdure jusqu’à nous. Cioran dans l’ensemble de son œuvre, Montherlant dans ses « solstices » et dans ses « cahiers », Philippe Muray, avec ses « exorcismes spirituels », qui tiennent à la fois de Pascal et de Voltaire, et plus en amont, le génial Joseph Joubert, contemporain et ami de Chateaubriand, furent les héritiers et les continuateurs, parfois même plus profonds que leurs maîtres, de La Rochefoucauld, de Fénelon, de Saint-Cyran, de Madame de Sablé, de La Bruyère ou d’Etienne-François de Vernage.
    En ces temps qu’il faut bien qualifier d’obscurantistes, en ces temps aveuglés et déprimés, pontifiants et moroses, relire les Moralistes est une façon de se désembourber l’âme, de lui donner, avec le surcroît de la lucidité, cette allégresse, cette joie printanière qui ne s’en laisse pas conter, ces vertus discrètes mais persistantes qui élaguent, allègent et disposent heureusement au combat contre le nihilisme, autrement dit au combat contre la mauvaise-foi. Car tel fut bien le souci majeur des Moralistes : cheminer droit en évitant le mensonge et cette mauvaise foi qui veut élever au rang de vertu sacrée et universelle les données simples de notre amour-propre individuel ou de notre vanité collective.
    Ce qui distingue les Moralistes des moralisateurs est à la fois d’une grande évidence et d’une infinie subtilité. Le Moraliste pense avec et selon ses semblables, à l’intérieur d’une société, par l’affinement du goût et de l’intelligence, par le perfectionnement d’une politesse qui n’est pas seulement la crainte de la susceptibilité d’autrui. La morale, pour lui, n’est pas détachée des mœurs, des coutumes, des habitudes, elle s’exerce à l’intérieur d’un faisceau de conditions, d’influences et de savoirs tout en laissant à l’individu le pouvoir de juger par lui-même. On pourrait dire que le Moraliste est un individu libre qui ne croit pas outre mesure en la réalité de l’individu, alors que le moralisateur est un grégaire qui croit absolument en l’individu, ─ d’où l’individualisme de masse dont sa morale est l’illustration. Le moralisateur ne peut penser qu’en accord préalable avec son groupe : il ne pense pas ce qu’il pense, il pense ce qu’il faut penser, en obéissant à l’argument d’autorité des spécialistes. Un journal comme Le Monde exerça ces dernières années avec diligence, puis avec maladresse, cet office particulier de substituer à la pensée tâtonnante du moralisateur un discours en apparence étayé. Le moralisateur cherche le réconfort, le « développement personnel », l’approbation générale alors que le Moraliste cherche le combat, et d’abord le combat avec lui-même, fût-ce au détriment de ses propres valeurs ou certitudes.
    Le Moraliste fait profession de courage et d’esprit critique contre le « bien » lui-même. Sa suspicion ne disperse point les forces mais les décante et les rassemble en une énergie nouvelle, plus claire, plus affûtée, mieux résolue à se déprendre des trop promptes auto-satisfactions. Souvent excellent écrivain, le Moraliste n’est pas moins sourcilleux à l’égard de sa propre bonté qu’à l’endroit de son style. Il ne lui suffit pas d’être lui-même, il veut être au mieux, par estime pour ceux qu’il fréquente. S’il ne veut point être dupe des « bons sentiments », ce n’est point pour s’abandonner à un relativisme où tout vaudrait n’importe quoi mais pour ressaisir la fine pointe de l’intelligence lorsque celle-ci se confond avec une certaine idée de l’équité et de la justesse.
    Savoir, avec La Rochefoucauld, que « le nom de la vertu sert à l’intérêt aussi utilement que le vice », c’est aussi ne pas oublier « qu’il n’appartient qu’aux grands hommes d’avoir de grands défauts ». Les Moralistes interrogent ainsi leur propre morale à l’épreuve de leur commerce avec leurs égaux : « Notre repentir n’est pas tant un regret du mal que nous avons fait qu’une crainte de celui qui nous en peut arriver ». Toute la logique d’Humain, trop humain, et du Voyageur et son ombre de Nietzsche s’ensuit, ainsi que La généalogie de la morale : « Nous avouons nos défauts pour réparer par notre sincérité le tort qu’ils nous font dans l’esprit des autres. » A la différence de la morale du moralisateur, la morale du Moraliste est une morale expérimentale, une morale vérifiée ; elle ne dissipe point l’exigence du bien, mais la précise en l’éloignant : être bon n’est point si facile que l’on croit. « Quand les vices nous quittent, nous nous flattons de la créance que c’est nous qui les quittons ». Ce qui, sans doute, eût fait horreur aux Moralistes du dix-septième siècle, si par quelque paradoxe temporel ils eussent être confrontés à nos modernes moralisateurs, c’est précisément cette indécente et perpétuelle flatterie que le moralisateur s’adresse à lui-même et dont il se gonfle pour imposer aux autres ses propres abandons, son propre dédain pour les êtres et les choses que désirent des natures plus fortes et moins lasses. « L’homme qui se méprise se prise encore de se mépriser » écrivait Nietzsche. Moraliste, Sade le fut aussi à sa façon, en cette phrase admirablement resserrée : « Le passé m’encourage, le présent me galvanise, je crains peu l’avenir ». Véritable devise et cri de guerre contre le nihilisme moderne qui déprécie le passé, s’ennuie dans le présent et se laisse terroriser par l’avenir.

    Luc-Olivier d'Algange

    http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2016/10/22/moralistes-et-moralisateurs.html

  • L’Action française étudiante [Le Mans] Rentrée militante

    Mercredi soir l’Action française étudiante du Mans a fait sa rentrée. Ce fut une réussite !!!

  • Maurrassisme et Catholicisme : Grand Texte XXXVIII

    Maurras s'explique ici, avec une hauteur de vue incomparable et dans une langue superbe  sur le grand respect, la sourde tendresse, la profonde affection qu'il voue - et avec lui toute l'Action française, croyants ou non - à l'Eglise catholique. Au temps où Maurras publie ce vrai grand texte, comme au nôtre, cet attachement a toujours suscité une sorte de critique catholique venue de milieux bien déterminés - suspectant sa sincérité ou mettant en cause ses motivations supposées. Cette même mouvance s'employait par ailleurs, à combattre tout ce qui, dans l'Eglise pouvait relever de la Tradition. Nous partageons aujourd'hui encore les analyses et les sentiments de Maurras envers le Catholicisme - ce qui est pourtant devenu parfois fort difficile du fait de tels des revirements, évolutions, ou prises de position actuelles de l'Eglise. Mais nous n'ajouterons pas à la longueur de ce superbe texte.   Lafautearousseau 

    I

    3350972466.pngOn se trompe souvent sur le sens et sur la nature des raisons pour lesquelles certains esprits irréligieux ou sans croyance religieuse ont voué au Catholicisme un grand respect mêlé d'une sourde tendresse et d'une profonde affection. — C'est de la politique, dit-on souvent. Et l'on ajoute : — Simple goût de l'autorité. On poursuit quelquefois : — Vous désirez une religion pour le peuple… Sans souscrire à d'aussi sommaires inepties, les plus modérés se souviennent d'un propos de M. Brunetière : « L'Église catholique est un gouvernement », et concluent : vous aimez ce gouvernement fort.

    Tout cela est frivole, pour ne pas dire plus. Quelque étendue que l'on accorde au terme de gouvernement, en quelque sens extrême qu'on le reçoive, il sera toujours débordé par la plénitude du grand être moral auquel s'élève la pensée quand la bouche prononce le nom de l'Église de Rome. Elle est sans doute un gouvernement, elle est aussi mille autres choses. Le vieillard en vêtements blancs qui siège au sommet du système catholique peut ressembler aux princes du sceptre et de l'épée quand il tranche et sépare, quand il rejette ou qu'il fulmine ; mais la plupart du temps son autorité participe de la fonction pacifique du chef de chœur quand il bat la mesure d'un chant que ses choristes conçoivent comme lui, en même temps que lui. La règle extérieure n'épuise pas la notion du Catholicisme, et c'est lui qui passe infiniment cette règle. Mais où la règle cesse, l'harmonie est loin de cesser. Elle s'amplifie au contraire. Sans consister toujours en une obédience, le Catholicisme est partout un ordre. C'est à la notion la plus générale de l'ordre que cette essence religieuse correspond pour ses admirateurs du dehors.

    Il ne faut donc pas s'arrêter à la seule hiérarchie visible des personnes et des fonctions. Ces gradins successifs sur lesquels s'échelonne la majestueuse série des juridictions font déjà pressentir les distinctions et les classements que le Catholicisme a su introduire ou raffermir dans la vie de l'esprit et l'intelligence du monde. Les constantes maximes qui distribuent les rangs dans sa propre organisation se retrouvent dans la rigueur des choix critiques, des préférences raisonnées que la logique de son dogme suggère aux plus libres fidèles. Tout ce que pense l'homme reçoit, du jugement et du sentiment de l'Église, place proportionnelle au degré d'importance, d'utilité ou de bonté. Le nombre de ces désignations électives est trop élevé, leur qualification est trop minutieuse, motivée trop subtilement, pour qu'il ne semble pas toujours assez facile d'y contester, avec une apparence de raison, quelque point de détail. Où l'Église prend sa revanche, où tous ses avantages reconquièrent leur force, c'est lorsqu'on en revient à considérer les ensembles. Rien au monde n'est comparable à ce corps de principes si généraux, de coutumes si souples, soumis à la même pensée, et tel enfin que ceux qui consentirent à l'admettre n'ont jamais pu se plaindre sérieusement d'avoir erré par ignorance et faute de savoir au juste ce qu'ils devaient. La conscience humaine, dont le plus grand malheur est peut-être l'incertitude, salue ici le temple des définitions du devoir.

    Cet ordre intellectuel n'a rien de stérile. Ses bienfaits rejoignent la vie pratique. Son génie prévoyant guide et soutient la volonté, l'ayant pressentie avant l'acte, dès l'intention en germe, et même au premier jet naissant du vœu et du désir. Par d'insinuantes manœuvres ou des exercices violents répétés d'âge en âge pour assouplir ou pour dompter, la vie morale est prise à sa source, captée, orientée et même conduite, comme par la main d'un artiste supérieur.

    Pareille discipline des puissances du cœur doit descendre au delà du cœur. Quiconque se prévaut de l'origine catholique en a gardé un corps ondoyé et trempé d'habitudes profondes qui sont symbolisées par l'action de l'encens, du sel ou du chrême sacrés, mais qui déterminent des influences et des modifications radicales. De là est née cette sensibilité catholique, la plus étendue et la plus vibrante du monde moderne, parce qu'elle provient de l'idée d'un ordre imposé à tout. Qui dit ordre dit accumulation et distribution de richesses : moralement, réserve de puissance et de sympathie.

    II

    On pourrait expliquer l'insigne merveille de la sensibilité catholique par les seules vertus d'une prédication de fraternité et d'amour, si la fraternité et l'amour n'avaient produit des résultats assez contraires quand on les a prêchés hors du catholicisme. N'oublions pas que plus d'une fois dans l'histoire il arriva de proposer « la fraternité ou la mort » et que le catholicisme a toujours imposé la fraternité sans l'armer de la plus légère menace : lorsqu'il s'est montré rigoureux ou sévère jusqu'à la mort, c'est de justice ou de salut social qu'il s'est prévalu, non d'amour. Le trait le plus marquant de la prédication catholique est d'avoir préservé la philanthropie de ses propres vertiges, et défendu l'amour contre la logique de son excès. Dans l'intérêt d'une passion qui tend bien au sublime, mais dont la nature est aussi de s'aigrir et de se tourner en haine aussitôt qu'on lui permet d'être la maîtresse, le catholicisme a forgé à l'amour les plus nobles freins, sans l'altérer ni l'opprimer.

    Par une opération comparable aux chefs-d'œuvre de la plus haute poésie, les sentiments furent pliés aux divisions et aux nombres de la Pensée ; ce qui était aveugle en reçut des yeux vigilants ; le cœur humain, qui est aussi prompt aux artifices du sophisme qu'à la brutalité du simple état sauvage, se trouva redressé en même temps qu'éclairé.

    Un pareil travail d'ennoblissement opéré sur l'âme sensible par l'âme raisonnable était d'une nécessité d'autant plus vive que la puissance de sentir semble avoir redoublé depuis l'ère moderne. « Dieu est tout amour », disait-on. Que serait devenu le monde si, retournant les termes de ce principe, on eût tiré de là que « tout amour est Dieu » ? Bien des âmes que la tendresse de l'évangile touche, inclinent à la flatteuse erreur de ce panthéisme qui, égalisant tous les actes, confondant tous les êtres, légitime et avilit tout. Si elle eût triomphé, un peu de temps aurait suffi pour détruire l'épargne des plus belles générations de l'humanité. Mais elle a été combattue par l'enseignement et l'éducation que donnait l'Église : — Tout amour n'est pas Dieu, tout amour est « DE DIEU ». Les croyants durent formuler, sous peine de retranchement, cette distinction vénérable, qui sauve encore l'Occident de ceux que Macaulay appelle les barbares d'en bas.

    Aux plus beaux mouvements de l'âme, l'Église répéta comme un dogme de foi : « Vous n'êtes pas des dieux ». À la plus belle âme elle-même : « Vous n'êtes pas un Dieu non plus ». En rappelant le membre à la notion du corps, la partie à l'idée et à l'observance du tout, les avis de l'Église éloignèrent l'individu de l'autel qu'un fol amour-propre lui proposait tout bas de s'édifier à lui-même ; ils lui représentèrent combien d'êtres et d'hommes, existant près de lui, méritaient d'être considérés avec lui : — n'étant pas seul au monde, tu ne fais pas la loi du monde, ni seulement ta propre loi. Ce sage et dur rappel à la vue des choses réelles ne fut tant écouté que parce qu'il venait de l'Église même. La meilleure amie de chaque homme, la bienfaitrice commune du genre humain, sans cesse inclinée sur les âmes pour les cultiver, les polir et les perfectionner, pouvait leur interdire de se choisir pour centre.

    Elle leur montrait ce point dangereux de tous les progrès obtenus ou désirés par elle. L'apothéose de l'individu abstrait se trouvait ainsi réprouvée par l'institution la plus secourable à tout individu vivant. L'individualisme était exclu au nom du plus large amour des personnes, et ceux-là mêmes qu'entre tous les hommes elle appelait, avec une dilection profonde, les humbles, recevaient d'elle un traitement de privilège, à la condition très précise de ne point tirer de leur humilité un orgueil, ni de la sujétion le principe de la révolte.
    La douce main qu'elle leur tend n'est point destinée à leur bander les yeux. Elle peut s'efforcer de corriger l'effet d'une vérité âpre. Elle ne cherche pas à la nier ni à la remplacer par de vides fictions. Ce qui est : voilà le principe de toute charitable sagesse. On peut désirer autre chose. Il faut d'abord savoir cela. Puisque le système du monde veut que les plus sérieuses garanties de tous les « droits des humbles » ou leurs plus sûres chances de bien et de salut soient liées au salut et au bien des puissants, l'Église n'encombre pas cette vérité de contestations superflues. S'il y a des puissants féroces, elle les adoucit, pour que le bien de la puissance qui est en eux donne tous ses fruits ; s'ils sont bons, elle fortifie leur autorité en l'utilisant pour ses vues, loin d'en relâcher la précieuse consistance. Il faudrait se conduire tout autrement si notre univers était construit d'autre sorte et si l'on pouvait y obtenir des progrès d'une autre façon. Mais tel est l'ordre. Il faut le connaître si l'on veut utiliser un seul de ses éléments. Se conformer à l'ordre abrège et facilite l'œuvre. Contredire ou discuter l'ordre est perdre son temps. Le catholicisme n'a jamais usé ses puissances contre des statuts éternels ; il a renouvelé la face de la terre par un effort d'enthousiasme soutenu et mis en valeur au moyen d'un parfait bon sens. Les réformateurs radicaux et les amateurs de révolution n'ont pas manqué de lui conseiller une autre conduite, en le raillant amèrement de tant de précautions. Mais il les a tranquillement excommuniés un par un.

    III

    L'Église catholique, l'Église de l'Ordre, c'étaient pour beaucoup d'entre nous deux termes si évidemment synonymes qu'il arrivait de dire : « un livre catholique » pour désigner un beau livre, classique, composé en conformité avec la raison universelle et la coutume séculaire du monde civilisé ; au lieu qu'un « livre protestant » nous désignait tout au contraire des sauvageons sans race, dont les auteurs, non dépourvus de tout génie personnel, apparaissaient des révoltés ou des incultes. Un peu de réflexion nous avait aisément délivrés des contradictions possibles établies par l'histoire et la philosophie romantiques entre le catholicisme du Moyen-Âge et celui de la Renaissance. Nous cessions d'opposer ces deux périodes, ne pouvant raisonnablement reconnaître de différences bien profondes entre le génie religieux qui s'était montré accueillant pour Aristote et pour Virgile et celui qui reçut un peu plus tard, dans une mesure à peine plus forte, les influences d'Homère et de Phidias. Nous admirions quelle inimitié ardente, austère, implacable, ont montrée aux œuvres de l'art et aux signes de la beauté les plus résolus ennemis de l'organisation catholique. Luther est iconoclaste comme Tolstoï, comme Rousseau. Leur commun rêve est de briser les formes et de diviser les esprits. C'est un rêve anti-catholique. Au contraire, le rêve d'assembler et de composer, la volonté de réunir, sans être des aspirations nécessairement catholiques, sont nécessairement les amis du catholicisme. À tous les points de vue, dans tous les domaines et sous tous les rapports, ce qui construit est pour, ce qui détruit est contre ; quel esprit noble ou quel esprit juste peut hésiter ?

    Chez quelques-uns, que je connais, on n'hésita guère. Plus encore que par sa structure extérieure, d'ailleurs admirable, plus que par ses vertus politiques, d'ailleurs infiniment précieuses, le catholicisme faisait leur admiration pour sa nature intime, pour son esprit. Mais ce n'était pas l'offenser que de l'avoir considéré aussi comme l'arche du salut des sociétés. S'il inspire le respect de la propriété ou le culte de l'autorité paternelle ou l'amour de la concorde publique, comment ceux qui ont songé particulièrement à l'utilité de ces biens seraient-ils blâmables d'en avoir témoigné gratitude au catholicisme ? Il y a presque du courage à louer aujourd'hui une doctrine religieuse qui affaiblit la révolution et resserre le lien de discipline et de concorde publique, je l'avouerai sans embarras. Dans un milieu de politiques positivistes que je connais bien, c'est d'un Êtes vous catholiques ? que l'on a toujours salué les nouveaux arrivants qui témoignaient de quelque sentiment religieux. Une profession catholique rassurait instantanément et, bien qu'on n'ait jamais exclu personne pour ses croyances, la pleine confiance, l'entente parfaite n'a jamais existé qu'à titre exceptionnel hors de cette condition.

    La raison en est simple en effet, dès qu'on s'en tient à ce point de vue social. Le croyant qui n'est pas catholique dissimule dans les replis inaccessibles du for intérieur un monde obscur et vague de pensées ou de volontés que la moindre ébullition, morale ou immorale, peut lui présenter aisément comme la voix, l'inspiration et l'opération de Dieu même.

    Aucun contrôle extérieur de ce qui est ainsi cru le bien et le mal absolus. Point de juge, point de conseil à opposer au jugement et au conseil de ce divin arbitre intérieur. Les plus malfaisantes erreurs peuvent être affectées et multipliées, de ce fait, par un infini. Effrénée comme une passion et consacrée comme une idole, cette conscience privée peut se déclarer, s'il lui plaît, pour peu que l'illusion s'en mêle, maîtresse d'elle-même et loi plénière de tout : ce métaphysique instrument de révolte n'est pas un élément sociable, on en conviendra, mais un caprice et un mystère toujours menaçant pour autrui.

    Il faut définir les lois de la conscience pour poser la question des rapports de l'homme et de la société ; pour la résoudre, il faut constituer des autorités vivantes chargées d'interpréter les cas conformément aux lois. Ces deux conditions ne se trouvent réunies que dans le catholicisme. Là et là seulement, l'homme obtient ses garanties, mais la société conserve les siennes : l'homme n'ignore pas à quel tribunal ouvrir son cœur sur un scrupule ou se plaindre d'un froissement, et la société trouve devant elle un grand corps, une société complète avec qui régler les litiges survenus entre deux juridictions semblablement quoique inégalement compétentes. L'Église incarne, représente l'homme intérieur tout entier ; l'unité des personnes est rassemblée magiquement dans son unité organique. L'État, un lui aussi, peut conférer, traiter, discuter et négocier avec elle. Que peut-il contre une poussière de consciences individuelles, que les asservir à ses lois ou flotter à la merci de leur tourbillon ? 

    Charles MAURRAS 

    L'on peut aussi lire intégralement ...

    La Démocratie religieuse 

    Le Dilemme de Marc Sangnier (1906)

    http://lafautearousseau.hautetfort.com/archive/2016/10/26/grands-textes-xxxviii-5865894.html

  • Faire de notre jeunesse une race de guerriers et de maîtres

    Un communiqué de Breiz Atao cliquez ici :

    Que voulons-nous ? C’est la question qui se pose logiquement une fois que nous avons énoncé ce dont nous ne voulons pas et, plus précisément encore, ceux dont nous ne voulons pas.

    Pour le peuple breton, le moment est venu d’en finir avec les résidus de socialisme post-chrétien qui, mâtinés de spasmes ovariens, tiennent lieu d’idéologie dominante à la bourgeoisie sénile qui milite activement pour notre destruction raciale.

    Nous ne devons plus tolérer de compromis avec la vieillerie dégénérée qui chie son indignation compassionnelle dans les cerveaux frais de notre jeunesse. Notre tâche, notre mission historique face à l’invasion africaine et musulmane, consiste à dresser la jeunesse bretonne dans l’esprit guerrier, éveiller son instinct de conservation face aux ennemis de l’intérieur et de l’extérieur qui œuvrent activement à son anéantissement.

    L’avenir de tout peuple repose sur les épaules de sa jeunesse. De celle-ci dépend la continuité d’une longue chaîne de transmission.

    Des empoisonneurs conspirent actuellement pour l’assassiner par procuration. Les noms de cette fin de race au regard bovin sont connus : ce sont tous ces curés de l’humanitarisme à faces diarrhéiques qui se bousculent sur les ondes ou qui se répandent dans les colonnes de la presse humanitaro-marxiste pour lui ordonner de consentir au suicide ou à la mort lente.

    Nous devons en finir avec les cagots armoricains du socialisme pourrissant dans la marmite de l’égalitarisme. La seule présence, au sein du corps national, de ces gardiens de vaches faisant dans leurs couches à la seule vue d’une manifestation de virilité confine à l’obscénité.

    Pour nous et notre jeunesse, nous ne voulons pas nous déféquer dessus tout en pleurant afin de communier avec les masses inaptes du tiers-monde. Nous sommes des athées de cette religion de l’échec.

    Nous voulons forger une race de maîtres, donc d’hommes libres. Nous ne voulons pas de la grande partouze négrificatrice que nous promet la curaille rouge de l’église antiraciste crépusculaire. Ce serait la fin de la civilisation et de la culture européennes.

    La rage, la colère, la furie doivent se lever dans les cœurs de la jeunesse celtique. C’est cette colère primitive que nous devons réveiller, sursaut vital indispensable au salut de notre peuple. Notre objectif consiste à doter celle-ci d’une volonté d’acier et d’une haute conscience d’elle-même et de sa tâche. Nos conceptions doivent progressivement refonder son imaginaire afin qu’elle remette en mouvement notre peuple, fort de sa mémoire profonde.

    Si nous voulons affranchir notre peuple, il nous faut dissiper les ferments de mort qui stagnent dans les marais puants qui nous entourent et qui conduisent actuellement nos enfants à l’abîme.

    Et pour cela nous devons imposer l’élitisme et la culture de la guerre. Ce qui suppose une claire identification de l’ennemi.

    http://synthesenationale.hautetfort.com/

  • Nous ne laisserons pas l’âme et l’honneur de la France disparaître

    Nos ancêtres ne sont plus les Gaulois ? Ils l’étaient autrefois, mais les chefs des tribus d’aujourd’hui en décident autrement ! Et pourtant, jusqu’alors, je me sentais bien Gaulois, peut être pas de pure souche, mais au moins par l’esprit gaulois et le goût des gauloiseries… Je l’ai toujours revendiqué et mes ancêtres aussi. Pour le reste, j’étais aussi un peu Barbare, un peu Vandale et à l’occasion, Franc quand je le pouvais ! 

    Grâce à Cloclo (Clovis/Clotilde), je suis devenu catholique, un peu Romain, mais pas de trop quand même ! Sujet royaliste de nos bons rois jusqu’en 1789 ; pas trop ébloui par les Lumières. Moi non plus je ne chantais pas La Marseillaise. (Peut-être plus PSG qu’OM !) Plutôt Textile que Sans-culotte, en restant Chouan, je me suis fait génocider. Le Royaume de France a disparu, d’abord le Royaume et la France ensuite. Il n’est resté que la République ! De Dames et Messieurs, nous sommes devenus Citoyens, Citoyennes et bientôt de genre indéfini ! A cette époque, nos ancêtres étaient encore gaulois. Et puis, tout c’est accéléré, la grande France de Dunkerque à Tamanrasset s’est mis à rétrécir. Le climat change et s’humidifie, la jungle progresse et envahit Calais, transformant notre Jardin à la Française en Brousse, puis en Bled…

    D’accord il ne faut pas être catastrophiste et voir le mal partout, et pourtant « Rien ne va plus », si la France n’est pas morte, elle a déjà la rigidité cadavérique. Pour demain, il ne s’agira plus de guérir mais de ressusciter ! L’on peut garder un peu d’espoir en étant croyant, très croyant même…En espérant en La Divine Providence et en attendant le miracle ! Car nous en sommes bien là ! Il y eut un temps où l’on a pu dire : « Tout est perdu, fors l’honneur » ; aujourd’hui c’est bien pire, l’honneur est en passe de sombrer avec le reste ! Nous ne serons pas nombreux pour livrer le dernier baroud d’honneur. Et c’est bien l’Honneur qui nous sauvera, plus rien d’autre n’est envisageable, que la Fierté et l’Honneur ! Notre drapeau, nos idées, sont sacrés, nous tâcherons de rester debout jusqu’à la fin en affichant crânement notre devise : « S’en fout la Mort » ! [....]

    Guy Adain

    La suite sur la Couronne

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?Nous-ne-laisserons-pas-l-ame-et-l

  • La Semaine de Magistro, une tribune d'information civique et politique

    La  Semaine de MAGISTRO Adossée à des fondamentaux politiques avérés, Magistro, une tribune critique de bon sens, raisonnée et libre, d'information civique et politique. [23.10]69

    A tout un chacun

    • Ivan RIOUFOL   Journaliste politique  La vraie France insoumise !

    • Chantal DELSOL    Membre de l'Institut   Trump vulgaire et sexiste : on ne civilise pas par décret 

    Du côté des élites     

    • Maxime TANDONNET   Haut fonctionnaire, ancien conseiller pour les affaires intérieures et l’immigration au cabinet du Président de la République     Primaires, débat, ... et l'Europe ?

    • Jacques BICHOT   Economiste, démographe, Professeur émérite à l'Université Lyon 3 - Ancien président de Familles de France  Quotient familial : ils n’ont rien compris !

    • Eric ZEMMOUR   Journaliste politique   May et Poutine, ces dirigeants qui écoutent leur peuple et défendent leur pays

    En France

    • Philippe BILGER   Magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole  ... comme un parfum de révolution !

    • Ivan RIOUFOL   Journaliste politique   Combler le vide

    Avec l'Europe

    • Renaud GIRARD   Journaliste, reporter de guerre, géopoliticien   Ramenons la Russie dans la famille européenne !

    • Françoise THIBAUT   Professeur des Universités, Essayiste, historienne - Membre correspondant de l'Institut de France   BREXIT - MAY, ne fait pas ce qu'il te plait

    De par le monde

    • Henri HUDE   Philosophe - Directeur du Pôle d’éthique au Centre de recherches des Ecoles de Saint-Cyr Coëtquidan   Où va le monde ? Et nous, Français, que choisir ?

    • Charles GAVE   Economiste, financier     Une bien curieuse élection  (élections américaines)

    Faites suivre à vos amis, dans votre famille et partagez ...  MAGISTRO vous invite aussi à vous rendre sur son site et y (re)lire tous les écrits depuis son origine (2008).  MERCI. 

    http://lafautearousseau.hautetfort.com/archive/2016/10/24/la-semaine-de-magistro-une-tribune-d-information-civique-et-5865230.html

  • Le fondamentalisme chrétien ne conduit pas à la violence mais à la sainteté

    Dans son numéro d'octobre de In Altum, la Famille Missionnaire de Notre-Dame propose une synthèse à destination des plus jeunes du Texte de la Commission Théologique Internationale (2014) intitulé Dieu Trinité, Unité des Hommes – Le monothéisme chrétien contre la violence :

    "Si on en croit nos médias et nos « têtes pensantes », le monothéisme est source de violence : il s’oppose à tout progrès humain et, en voulant imposer SA vérité, il génère fondamentalisme et intolérance, ennemis de notre liberté…

    En comparaison, le polythéisme est jugé tolérant et l’athéisme mieux encore : avec lui, pas de Dieu qui nous divise ! Il suffit pourtant de voir où nous ont conduits les 2 grands systèmes athées du siècle dernier, le nazisme et le communisme, et aujourd’hui la dictature du relativisme… Si celle-ci est plus confortable (j’ai raison, tu as raison, nous avons tous raison !) elle ne nous mènera jamais à la paix : on justifie ainsi l’indifférence, voire la défiance réciproque et cela décourage en tous cas de s’engager pour la vérité puisqu’on prétend qu’elle n’existe pas…

    Derrière le terme générique de « monothéisme », c’est bien souvent le christianisme qui est visé. C’est pourquoi la CTI a voulu clarifier la théorie selon laquelle il existe un lien nécessaire entre monothéisme et guerre de religion, en montrant combien la violence au Nom de Dieu est au contraire la plus grande perversion de la foi en Dieu. Comme le disait récemment le Pape François : « Tuer au nom de Dieu est satanique  ».

    En parcourant l’Histoire du Salut, on découvre que Dieu, à travers un peuple choisi, cherche à faire alliance avec tous les hommes. Sans tomber dans un dualisme « Dieu de l’Ancien Testament = Dieu de violence »/ « Dieu du Nouveau Testament = Dieu d’amour », les pages les plus dures de l’AT – châtiments divins, ordres d’extermination … – doivent être relues en comprenant :

    d’une part la pédagogie divine qui « affine » peu à peu son peuple en tenant compte de la logique des peuples du moment, de leurs conditionnements humains (et on peut admirer la force de l’éducation divine qui permet peu à peu de dépasser la violence et de purifier la foi !). On perçoit alors la grande miséricorde de Dieu qui accepte et désire faire de l’homme son interlocuteur.

    d’autre part du style littéraire propre aux auteurs de l’Ancien Testament, plus libre que celui de nos récits proprement historiques, visant à accentuer l’intervention divine dans l’histoire. On attribue à Dieu des événements qui peuvent être le simple fait des hommes.

    Avec Jésus, Dieu manifeste pleinement sa réponse à la violence : Il livre sa vie en sacrifice… Au jardin des Oliviers, Jésus interdit à ses disciples toute violence ; Il se livre Lui-même mais demande que ses disciples soient épargnés… Cela ne l’empêche pas d’être ferme dans le témoignage rendu à la Vérité mais Il interdit le conflit sanglant avec le parti hostile en remettant sa vie entre les mains de Dieu et en intercédant même pour ses bourreaux.

    Il nous montre l’exemple : si la Révélation ne se défend pas par la violence, elle ne doit pas non plus être reniée  !

    Alors NON, le christianisme n’est pas violent : regardons l’exemple de nos martyrs (vitrail du martyre des carmélites de Compiègne) ! C’est même l’unique chemin pour vaincre la tentation de la domination grâce au double commandement qui le fonde : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu et tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Le fondamentalisme chrétien ne conduit pas à la violence mais à la SAINTETÉ"

    Philippe Carhon http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html