L’orbe du soleil s’étalait sur l’horizon d’un ciel bas et les nuages s’emparaient du mordoré qui s’épandait de l’astre pour le baigner dans le cramoisi d’une aube incertaine. Quelques coups de griffes du temps et la colline au loin était coiffée de lourds nuages sombres, une ombre épaisse se dressait dans le ciel, planant au-dessus des hommes. Les cris des femmes perçaient le cœur de leurs enfants. Une symphonie de douleur entonnait son chant dans les entrailles de la terre. Au plus profond des abysses régnaient d’étranges créatures, aux formes changeantes. De vieilles légendes contaient leurs lugubres desseins, les surnommaient « reines des métamorphoses ». Selon les sentiments qu’elles cherchaient à susciter, elles arboraient un physique délicat, des manières avenantes, ou bien au contraire se drapaient dans des oripeaux tératologiques et effrayants. On disait qu’elles avaient creusé des grottes si profondes dans les fonds marins, qu’elles avaient atteint l’empire des morts, où elles se fournissaient en vivres, se nourrissant d’âmes damnées. Tour à tour, elles psalmodiaient des chants suaves, pareils à des prières, puis vociféraient des incantations inaudibles, qui avaient la force de désintégrer des troupeaux innombrables d’hommes.