Le besoin d'ennemi ou le besoin de haine chez l'homme est aussi nécessaire que le besoin d'amour et d'amitié. L'homme pour définir son action a besoin d'ennemi. Hegel l'avait compris. Dans le débat politique actuel on présente actuellement (souvent de façon inconsciente) deux alternatives. Pour la gauche, l'image de l'homme blanc exploiteur, oppresseur, triste, perverti intellectuellement par sa propre culture, inférieur physiquement, sexuellement, dansant moins bien que le noir qui lui a le sens de la fête, coupable de tous les maux existant sur la planète.
De l'homme blanc tout en acceptant sa culpabilité on nie jusqu'à son existence. Le mieux qu'il puisse lui arriver étant son anéantissement dans le grand métissage. D'ailleurs s'il n'existe pas pourquoi vouloir à tout prix l'anéantir. La pensée de gauche se vautre dans un masochisme qui est l'aboutissement ultime de son humanisme et de son égalitarisme. Quand il n'y a plus rien à haïr ou à mépriser, haïssons nous nous mêmes ou méprisons nous nous mêmes.
Le paroxysme est atteint dans cette phrase de Sartre qui fut à la fois le chantre de la gauche française et l'incarnation physique de la haine de soi « Quand un noir tue un blanc, il fait d'une pierre deux coups, il tue un oppresseur et libère un opprimé ».
A l'inverse, le schéma de la droite (ou extrême droite) le blanc étant le summum de l'évolution humaine, esthétiquement plus beau, intellectuellement supérieur, plus créatif, alliage harmonieux du corps et de l'esprit.
Ayant développé au cours de l'Histoire (son Histoire) une culture extraordinaire qui s'est répandue sur la terre entière. Fierté de soi, exaltation de soi. Sentiment qui s'est développé jusqu'à l'hystérie nazie.
L'autre, au passage étant qualifie de termes gracieux «nègre», «métèque» «guenille levantine» (dixit Beraud). Les formes de danse de l'autre étant assimilées à des contorsions animales.
Lorsque la gauche était dans l'opposition, les schémas fonctionnaient aussi de cette façon. Elle offrait de la haine sociale. Le patron méprisait l'ouvrier, l'ouvrier haïssait le patron. La gauche au pouvoir n'a maintenant plus rien à offrir sinon la haine de soi. Refusons tout sentiment de fierté. L'autre (le noir, l'arabe), devient omniprésent dans les medias. Sa louange perpétuelle devient une obligation morale. Or, comme Goethe l'expliquait, louer l'autre (est aussi s'abaisser soi-même.
On ne peut sortir de ce débat. Quel courant dominera l'autre ? La vérité historique naît dans l'affrontement. Les hommes ne peuvent que choisir (souvent de façon instinctive) entre des schémas qui deviennent actuellement de plus en plus radicaux. La France, après avoir été une ou la grande puissance dominante en Europe, ensuite le centre d'un empire colonial se trouve maintenant confrontée à une dialectique morbide : haine de soi: amour de soi ; amour de l'autre; haine de l'autre. Le pouvoir politique actuel ne fait qu'exacerber ces tensions en créant une véritable poudrière ethnico-religio-culturelle qui ne se résoudront hélas et comme toujours que dans la violence à moyen ou long terme.
Patrice Gros-Suaudeau
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492 : Clovis épousait Clotilde
Le païen Clovis, vingt-six ans, épouse en l'église de Soissons la ravissante princesse burgonde et chrétienne Clotilde, vingt-sept ans, avec la bénédiction de Remi, évêque de Reims.
Cette année-là, la onzième de son règne sur les Francs saliens, le païen Clovis, vingt-six ans, épousait la ravissante princesse burgonde et chrétienne Clotilde, vingt-sept ans, avec la bénédiction de Remi, évêque de Reims. Nous avons vu dans notre dernier article combien le roi Childéric, grand admirateur de Rome et ami de Geneviève, était pressé, dans la grande débâcle de l'empire romain, de se rapprocher de l'Église catholique pour, avec son appui, peut-être réunifier la Gaule... Il mourut trop tôt : son fils, Clovis, lui succédant à quinze ans, intelligent et ambitieux, réaliserait-il ce grand rêve ?
Agrandir le royaume
Remi lui écrivit pour le féliciter : « Montre-toi plein de déférence pour tes évêques et recours toujours à leur avis. [...] Si tu t'entends avec eux, ton pays s'en trouvera bien. » C'était tout un programme, mais, toujours fidèle à ses dieux, Wotan, Baldur et les Walkyries, il se montra d'abord soucieux d'agrandir son royaume, car être seulement roi des Francs saliens et ne posséder que la Belgique seconde, autour de Tournay, ne lui suffisait pas : il n'hésita pas à occire les chefs des Francs rhénans et des Francs de Cambrai qui le gênaient, il alla jusqu'à épouser une Franque rhénane pour renforcer ses positions vers l'est.
Au sud il avait un rival en la personne de Syagrius, résidant à Soissons et se disant encore chef de la milice romaine, mais bien peu le prenaient au sérieux. Pour en venir à bout, Clovis demanda et obtint le titre de patrice de la seule légitimité romaine encore debout après l'effondrement de Rome, celle de l'empereur byzantin Zénon. Syagrius ne l'admit pas, Clovis le défia sur le champ de bataille en 486, cet homme indigne alla alors se réfugier chez les Wisigoths dans la région de Toulouse, mais le roi Alaric le réexpédia chez Clovis qui lui réserva le sort des traitres. Puis en 491, Clovis entreprit de soumettre d'autres cousins francs, ceux de Thuringe. Tant et si bien que le roi de Francs parvint à ce moment-là à contrôler tout le Nord de la Gaule.
La belle Burgonde
Remi observait avec intérêt la montée en puissance du jeune roi, qui avait l'air de se souvenir de sa lettre de recommandations, comme en témoigna l'affaire bien connue du vase de Soissons dans laquelle il vengea l'Église. D'ailleurs ses tentatives d'entrer dans Lutèce se heurteraient toutes au refus de Geneviève, vierge mi-franque mi-gallo-romaine, tant qu'il resterait païen, mais à ce moment-là Clovis semblait plutôt enclin à ménager les Wisigoths champions de l'arianisme ; il avait même consenti au mariage de sa soeur Aldoflède avec Théodoric, roi des Ostrogoths. Or l'épouse de Clovis mourut soudain, après avoir donné le jour à Thierry. Il devenait urgent de tenter de lui faire épouser une princesse réellement chrétienne, qui pût avoir une certaine influence sur lui...
Avit, évêque de Vienne, écrivit alors à Remi et lui parla de la nièce de Gondebaud, roi des Burgondes. qui régnait en gros sur les terres aujourd'hui savoyardes et dauphinoises. Le père de la jeune fille, Chilpéric, et sa mère, une gallo-romaine, avaient été noyés dans le Rhône par Gondebaud qui voulait régner seul et ne pas être occis par ses frères – telles étaient les moeurs dynastiques barbares... -, mais leurs deux filles Chrona et Clotilde furent épargnées et élevés dans un monastère catholique où elles échappèrent à l'arianisme se répandant à la cour burgonde. Chrona prit l'habit, alors que Clotilde fut rappelée à la cour du roi Gondebaud... pour y apprendre qu'on voulait la marier. Les choses allèrent très vite : Clovis, mis au courant par Remi était impatient de connaître une jeune fille que l'on disait aussi adorable et Gondebaud ne pouvait rien refuser à Clovis qui était plus qu'un roi, un patrice ! La paix en Gaule semblait aussi devoir être un des fruits diplomatiques de cette belle histoire d'amour.
Clotilde pose ses conditions
Le mariage fut célébré en grandes pompes en l'église de Soissons en 492. Clotilde n'avait posé qu'une condition : que les enfants nés de cette union fussent baptisés catholiques. Clovis avait accepté sans réfléchir, mais quand leur premier enfant, Ingomer, naquit et mourut une semaine après, il se lança dans des blasphèmes sur le Dieu des chrétiens qui ne valait pas Wotan et sa religion virile... Clotilde lui parla de sacrifice et d'espérance. Vrai dialogue de sourds. Drame déchirant qu'imagine avec talent Anne Bernet dans son Clovis (éditions Clovis). En 495, nouvelle grossesse : le petit Clodomir fut très malade, mais il en guérit, sans que son père fût pour autant guéri de la confiance en ses idoles « de bois et de pierre ». Il faudrait encore des mois pour que son âme arrivât à maturité. Pendant ce temps les périls s'amoncelaient : déjà les Alamans, plus ou moins alliés aux Burgondes, inquiétaient le roi de Cologne Sigebert, parent de Clovis... Par ailleurs l'arianisme s'incrustait en pays wisigoth et burgonde... Mais Clotilde priait et Remi gardait l'espérance.
Michel Fromentoux L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2809 – Du 20 janvier au 2 février 2011 -
Bruno Gollnisch était l’invité politique d’Olivier Galzi sur iTélé
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La bataille des ardennes
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DE LA CONTRE-CULTURE AMÉRICAINE AUX NÉO-CONSERVATEURS
Sans l'avoir voulu, les néo-conservateurs américains ont une fois de plus les honneurs des gazettes. Mike Jagger s'en prend à eux dans l'une de ses chansons du prochain album des Rolling Stones, groupe dont il est le chanteur depuis plus d'un demi-siècle, tandis que Dennis Hopper, jadis figure hippie emblématique, avec le film Easy Rider, revendique aujourd'hui son amitié d'avec Donald Rumsfeld, boîte à penser néo-conservatrice de George W. Bush, à l'occasion de la sortie du film Land Of The Dead, réalisé par Georges Romero, anarcho-gauchiste toujours vaillant. Chassé croisé.
Quelques précisions, pour commencer. Les néo-conservateurs ne sont pas de droite. Il s'agit juste « d'anciens gauchistes braqués par la réalité », pour reprendre les propres termes de certains de leurs penseurs, tels Irvin Kristoll ou Karl Rove. Pour être plus précis, les néo-conservateurs ont tous en commun d'avoir été trotskistes. Aux USA, ces derniers ont toujours été choyés par la frange la plus conservatrice - et surtout anticommuniste - du Parti républicain. Etonnant ? Non : logique. Les trotskistes vouaient alors à l'URSS «stalinienne» une haine totale. Il y a ainsi des coups de pics à glace qui ne s'oublient pas. Et surtout pas celui planté dans le corps du grand Léon - Trotski et non point Degrelle - en son exil mexicain, par les agents du KGB d'alors. De leur passé marxiste-léniniste, les néo-conservateurs ont conservé l'esprit de système et le mépris des nuances. Soit l'exact contraire de la droite américaine traditionnelle, celle des Barry Goldwater, des Richard Nixon, des Ronald Reagan ou des Pat Buchanan qui, lucides sur la marche du monde, se sont toujours gardés d'éventuelles tentations messianiques au profit d'une realpolitik intelligente après tout, Reagan a eu la peau de l'URSS, tandis que W. Bush court toujours après celle de l'Irak ... Nonobstant, le monde sans frontières que ces trotskistes à peine repentis appelaient de leurs vœux, la Quatrième internationale ne pouvait le leur offrir. Pragmatiques, tels que le sont souvent les indigènes d'origine anglo-saxonne, ils comprirent bien vite qu'un néocapitalisme mondialisé était le seul système susceptible de leur permettre d'arriver à leurs fins. Trotskistes un jour, trotskistes toujours, ils pratiquèrent donc l'entrisme, avec quelques longueurs d'avance sur leurs homologues d'ici, les Julien Dray, Jean-Christophe Cambadélis et consort qui, au milieu des années 80, prirent d'assaut le vénérable mouvement fondé par le défunt François Mitterrand. Que choisir ? Le Parti démocrate ? Non. La gauche à cheveux longs, hilare et hédoniste, née des happenings littéraires d'un Jack Kerouac, père des beatniks, ou musicaux, lors du festival de Woodstock, ne rêvait que de joints et de partouzes, idéal assez peu compatible avec celui, collectiviste, prôné par ces révolutionnaires de l'espèce austère. Le Parti républicain, alors ? Oui, pourquoi pas.
Oui, pourquoi pas, car avec ces enragés de Dieu, persuadés que le Christ aurait dû voir le jour au Texas plutôt qu'en Palestine et que quiconque n'est pas avec eux est forcément contre eux, il y avait comme une communauté d'esprit évidente. Soit le «bien» contre le «mal». Manichéisme mal digéré, certes, mais dont l'insigne avantage leur a néanmoins permis, malgré ce changement de veste, de toujours demeurer dans le camp du «bien» et de toujours désigner «l'autre» - soit l'Arabe et le Français, le musulman et le catholique - comme éternelle incarnation du «mal». Pratique, en effet... Dennis Hopper, nous y voilà, quoique acteur hors du commun, est une illustration pour le moins symbolique de ce transfert d'idées. A la fin des années 60, ce dernier conspuait, en un seul bloc, la droite américaine, le président américain de droite Richard Nixon, à l'époque - ainsi que son propre pays. Depuis qu'il a arrêté la came, les putes et la picole, notre homme vomit maintenant sur quiconque en viendrait à contredire sa droite américaine, son président américain de droite et son pays, américain évidemment et de droite, il va sans dire. Conclusion : Dennis Hopper est toujours un acteur aussi exceptionnel, mais il est toujours aussi exceptionnellement nigaud. Il nous faisait déjà rire en «freak» déjanté; il nous donnerait désormais envie de pleurer, une fois la défroque du réactionnaire endossée ...
Mick Jagger, lui, n'est pas américain; mais anglais. Ce qui fait peut-être toute la différence,sachant que de longue date, l'Anglais a toujours été un brin plus finaud que l'Américain. Si, si : on peut l'affirmer sans trop risquer de sombrer dans le cliché. Déjà, en 1990, lors de la première guerre du Golfe, le leader des Rolling Stones signait, avec Keith Richards, Son flamboyant jumeau, la chanson Highwire (*) illico censurée par la BBC, dans laquelle il fustigeait l'hypocrisie occidentale voulant qu'après avoir été le meilleur allié de l'Occident dans la guerre menée contre l'Iran au chiisme pour le moins envahissant, le président Saddam Hussein ait ensuite été considéré comme tout juste bon à jeter aux chiens. Dans la même veine sarcastique, il récidive désormais avec un titre intitulé Sweet Neo Con, soir Cher néo-conservateur ; chanson qui lui permet de s'en prendre aux pharisiens de la Maison Blanche. Malin, disions-nous, car Mick Jagger n'attaque pas directement George W. Bush, sachant bien que ce n'est pas parce que ce pauvre garçon, un lendemain de cuite, a vu le petit Jésus au fond d'une bouteille de whisky, qu'il faut forcément le tenir pour chrétien de choc ou tête pensante de la révolution néo-conservatrice. Là, en effet, c'est plutôt vers ceux qui réfléchissent à sa place que ses traits sont réservés. A savoir, ceux qui exploitent un légitime sentiment religieux pour le détourner de ses fins. A savoir, les Richard Pearle, les Daniel Wolfowitz, les Donald Rumsfeld : soit l'infernale trilogie des faux prophètes de « l'empire du bien ». De là à voir en Mick Jagger la voix de la majorité silencieuse du peuple anglais, il y a un pas que l'on peut aisément franchir. Sa Très Gracieuse Majesté, la reine d'Angleterre, l'a probablement déjà fait, en anoblissant le principal intéressé, car c'est de «Sir» Mick Jagger qu'il faut désormais parler. En cette occasion, la fille de la défunte «Queen Mom» aura eu plus d'acuité intellectuelle que tous les cerveaux réunis du MlS, du Ml6 et de Scotland Yard réunis ; services qui, il n'y a pas si longtemps, qualifiaient ce chanteur de « raclure», dans des correspondances confidentielles, équivalents locaux des « blancs» de nos Renseignements généraux. « raclure » pour « raclure », qu'il nous soit autorisé de préférer Sir Mick Jagger à « ces tyrans qui sont fauteurs des guerres et ne meurent jamais, car on n'y tue que des innocents ». Cités de mémoire, ces vers sont issus d'une vieille et honorable chanson, La butte rouge, écrite dans les tranchées, à l'occasion de l'historique boucherie de 14-18, dans laquelle étaient déjà stigmatisés les errements des Puissants. D'accord, Mick Jagger, qu'il soit «Sir» ou non, ne sera jamais rien d'autre qu'un bouffon de talent. Mais, de l'ancienne tradition, qu'était-ce qu'un bouffon, si ce n'est celui qui disait la vérité au roi ? En l'occurrence, jamais le titre de «Sir» n'aura été si bien mérité.
Béatrice PEREIRE National Hebdo du 18 au 24 août 2005
(*) Uniquement disponible sur l'album Flashpoint, assez difficile à dénicher comme il se doit... -
"Aux sources du mondialisme" - Conférence de Pierre Hillard - Décembre 2012
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Que signifie vraiment « Capitale verte » pour la ville de Nantes ?
NANTES (NOVOpress Breizh) – Nantes a obtenu pour 2013 le titre de « Capitale verte de l’Europe ». Ici, l’adjectif « verte » signifie en principe « amie de la nature ». Mais le maire socialiste de Nantes pourrait envisager de lui donner une toute autre coloration…
Le prix « Capitale verte de l’Europe » fait partie des opérations promotionnelles – et budgétivores – lancées par la Commission européenne. Créé en 2008, il est décerné sur concours à une ville de plus de 200.000 habitants qui mène une politique exemplaire en faveur de l’environnement. Avant Nantes, Stockholm, Hambourg et Vitoria-Gasteiz ont porté le titre de « Capitale verte de l’Europe ».
Ce n’est pas un titre qu’on s’arrache. Dix-sept villes seulement ont candidaté à l’un des titres de 2012 et 2013. Mais pourquoi Nantes a-t-elle été retenue ? Avant tout pour sa politique de transports en commun. Le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes n’a pas été pris en considération car, malgré le militantisme de Jean-Marc Ayrault en sa faveur, c’est un projet d’État et non un projet nantais !
Les élus verts/écologistes de Nantes Métropole assurent avoir joué un grand rôle dans l’obtention du titre et n’apprécient pas que les socialistes prétendent le récupérer au profit d’un discours pro-aéroport. La discorde entre les deux camps est telle qu’un divorce prochain paraît très envisageable. La bagarre entre anciens amants pourrait être féroce autour du titre de « Capitale verte ».
Mais Nantes semble avoir décidé de couper l’herbe sous le pied des écologistes. « Happy Green Year! » (« Bonne année verte ! » en tout petit) proclament ses panneaux d’affichage signés par Patrick Rimbert, nouveau maire socialiste de Nantes. L’utilisation de la langue anglaise cache cependant un message subliminal : la jeune personne qui figure sur l’une des affiches est apparemment d’origine maghrébine et porte un vêtements aux motifs arabes traditionnels.
Le vert est la couleur de l’islam. Et dans certains pays arabes comme la Syrie, pour se souhaiter une bonne année, on se souhaite une « année verte ». Les socialistes nantais multiplient depuis des années les égards à l’attention des communautés musulmanes et favorisent la construction d’impressionnantes mosquées. De là à imaginer qu’ils comptent donner au titre de « Capitale verte de l’Europe » un sens que ses promoteurs n’avaient pas prévu…
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De la Croatie par défaut à l’Occident par excès par Georges FELTIN-TRACOL
Ancien enseignant en sciences politiques aux États-Unis, ex-diplomate croate, maîtrisant parfaitement l’anglais, l’allemand et le français, auteur d’articles remarquables dans Éléments ou Catholica, Tomislav Sunic vient de publier aux Éditions Avatar son premier ouvrage rédigé dans la langue de son cher Céline, La Croatie : un pays par défaut ?. Il faut se réjouir de cette sortie qui, prenant prétexte du cas croate, ausculte avec attention le monde contemporain occidental. Précisons tout de suite que ce livre bénéficie d’une brillante préface de Jure Vujic, responsable par ailleurs d’un exceptionnel article « Vers une nouvelle “ epistémè ” des guerres contemporaines » dans le n° 34 de la revue Krisis sur la guerre.
La Croatie : un pays par défaut ? est un ouvrage essentiel qui ne se limite pas aux seuls événements historiques liés à l’indépendance croate des années 1990. Avec le regard aigu du sociologue, du linguiste, du philosophe et du géopoliticien, Tomislav Sunic examine l’Occident-monde postmoderniste en se référant à son vécu d’ancien dissident qui a grandi dans la Babel rouge de Joseph Tito. L’auteur a ainsi acquis une expérience inestimable que ne peuvent avoir les chercheurs occidentaux sur le communisme.
De ce fait et à travers maints détails, il constate que l’Occident ressemble étonnamment au monde communiste en général et à la Yougoslavie en particulier. Il lui paraît d’ailleurs dès lors évident que « l’échec de la Yougoslavie multiculturelle fut également celui de l’architecture internationale édifiée à Versailles en 1919, à Potsdam en 1945 et à Maastricht en 1992 (p. 188) ». C’est la raison fondamentale pour laquelle les grandes puissances occidentales firent le maximum pour que n’éclate pas l’ensemble yougoslave. À la fin de la décennie 1980, les États occidentaux témoignaient d’une sympathie indéniable envers l’U.R.S.S., la Yougoslavie et la Tchécoslovaquie avec le secret espoir d’empêcher des désintégrations qui risqueraient de perturber durablement les flux marchands mondiaux.
En ces temps d’amnésie historique, Tomislav Sunic revient sur la tragédie méconnue des Volksdeutsche, des Allemands des Balkans, massacrés en 1944 – 1945 par les partisans titistes au point que « le favori de longue date des Occidentaux, l’ex-dirigeant communiste yougoslave et défunt maréchal Josip Broz, avait un passé bien plus chargé d’épurations ethniques et de meurtres de masse (p. 187) ». Il aurait pu aussi rappeler ce qu’on sait peu et que savait certainement Charles de Gaulle qui n’a jamais apprécié l’imposteur. « Natif d’Odessa où son patronyme était Wais, signale Jean-Gilles Malliarakis, il usurpe l’identité de Josip Broz, révolutionnaire communiste croate et son pseudonyme de résistant correspondait au sigle T.I.T.O. de Tajna Internationalna Terroricka Organizatia en serbe (1). » En note, il précisait qu’« après guerre, la mère de Josip Broz ne reconnaîtra pas Tito (2) ». Ces omissions de première importance démontrent que, loin de l’idéal autogestionnaire de la Deuxième Gauche hexagonale, la « Titoslavie » n’était pas le paradis terrestre en édification, mais un banal système communiste soumis à la terreur diffuse et implacable de la police politique secrète.
Si on peut déplorer que Tomislav Sunic donne une interprétation banale et convenue de l’œuvre européenne du cardinal Richelieu (3), il insiste, en revanche, sur l’importance géopolitique des Balkans tant en stratégie que dans la mise en place des futurs réseaux de transports d’énergie (oléoducs et gazoducs). Depuis la fin de la Yougoslavie s’est manifesté le « cheval de Troie des États-Unis » avec le soutien total de Washington envers des entités fantoches comme la Bosnie-Herzégovine et le Kossovo, ou mafieuses tel le Monténégro.
La Yougoslavie, anticipation de l’Occident !
Pour Tomislav Sunic, cet appui occidental n’est pas seulement utilitariste ou à visée géopolitique, il est aussi et surtout idéologique parce que, pour le Système occidental, la fédération de Tito « à bien des égards, représentait une version miniature de leur propre melting pot (p. 81) ». La comparaison n’est pas anodine, ni fortuite.
L’auteur discerne dans les sociétés multiraciales post-industrielles d’Occident des facteurs d’explosion similaires aux premiers ferments destructeurs de la Yougoslavie. En effet, « la société multiculturelle moderne, comme l’ex-Yougoslavie l’a bien montré, est profondément fragile et risque d’éclater à tout instant. Ce qui fut le cas en ex-Yougoslavie peut se produire au niveau interethnique et interracial à tout instant, en Europe comme aux États-Unis (pp. 60 – 61) ». De plus, pensé et voulu comme une amitié forcée et fictive entre les peuples, « le multiculturalisme, quoique étant un idéal-cadre de l’Union européenne, peut facilement aboutir à des conflits intra-européens mais également à des conflits entre Européens de souche et allogènes du Tiers-Monde (p. 210) ». Enfin, « l’ex-Yougoslavie fut un pays du simulacre par excellence : ses peuples n’ont-ils pas simulé pendant cinquante ans l’unité et la fraternité ? (p. 206) ». Le projet européen n’est-il pas une nouvelle illusion ?
L’auteur développe éclaircit ce rapprochement osé : l’Occident serait donc une Yougoslavie planétaire en voie de délitement. Il s’inquiète par exemple de l’incroyable place prise dans les soi-disant « démocraties libérales de marché » des lois liberticides en histoire (conduisant à l’embastillement scandaleux de Vincent Reynouard), du « politiquement correct », de la novlangue cotonneuse et de l’éconolâtrie. Pour lui, ces cas d’entrave patents prouvent que « l’Union se trouve déjà devant un scénario semblable à celui de l’ex-Yougoslavie, où elle est obligée de modifier ses dispositifs juridiques pour donner un semblant de vraisemblance à sa réalité surréaliste (p. 126) ».
La multiplication des actions contre les opinions hérétiques en France, en Allemagne, en Grande-Bretagne, témoignent de la volonté des oligarchies transnationales et de leurs relais politiques à exiger par la coercition plus ou moins douce une mixité mortifère et ultra-marchande. « Le rouleau compresseur du globalisme triomphant entend détruire les identités substantialistes (nationales, locales, généalogiques) et les identités “ par héritage ” qui font du citoyen le membre d’une communauté définie par l’histoire, par la continuité de l’effort de générations sur le même sol – pour leur substituer le nouveau mythe de la citoyenneté postmoderne, une sorte de bric-à-brac constructiviste, à savoir la citoyenneté “ par scrupules ” qui ne reconnaît le citoyen qu’en tant que simple redevable à la communauté dont il est membre et à laquelle il oppose l’humanité sans frontière des droits de l’homme immanents et sa propre individualité (p. 70) ». Une puissante pression psychologique s’impose à tous, sans la contrainte nécessaire, et « à l’instar de la Yougoslavie défunte, les sociétés multiculturelles ne réussissent jamais à accommoder les identités de tous les groupes ethniques (p. 68) ».
Naissance archétypale de l’homme occidental soviétique
En fin observateur, Tomislav Sunic avance aussi que les formules venues d’outre-Atlantique ne conviennent finalement pas aux attentes matérielles (ou matérialistes) des peuples de l’ancien bloc communiste pétris par des années de bolchevisme triomphant. Ces peuples – désemparés de ne pas bénéficier d’un autre culte du Cargo – « vont vite se rendre compte que l’identité de l’homo americanus ne diffère pas beaucoup de celle de son homologue, l’homo jugoslavensis (p. 114) ». Il relève plus loin que « le mimétisme de l’homo sovieticus a trouvé son double dans le mimétisme de l’homo occidentalis (p. 239) » et considère qu’une « identité paléo-communiste subsiste toujours dans les structures mentales de la population post-yougoslave, partout dans les Balkans (p. 34) ». Le communisme comme le libéralisme a a tué les peuples ! Il en découle chez les Européens de l’Est une immense déception à l’égard des « nouvelles élites […] issues, pour la plupart, de l’ancienne nomenklatura communiste, habilement reconvertie au modèle libéral, directement issue du système de structuration soviétique (p. 53) ». Auraient-ils compris que l’ultra-libéralisme mondialiste serait le stade suprême du communisme ?
Comme Guy Debord qui, prenant acte de la fin des blocs, annonçait dans ses Commentaires sur la société du spectacle l’émergence d’un spectaculaire intégré dépassant les spectaculaires diffus et concentré, Tomislav Sunic entrevoit un processus de fusion en cours entre les types occidental et communiste afin de créer un homme occidental soviétique. Celui-ci aurait « une existence combinant le charme et le glamour de l’homo americanus, comme dans les films américains, tout en jouissant de la sécurité sociale et psychologique offerte par l’homo jugoslavensis ! (p. 115) ». Ainsi apparaît la figure rêvée de la social-démocratie, du gauchisme et du libéralisme social… Stade final du bourgeois, l’homme occidental soviétique est le Travailleur postmoderniste de l’ère mondialiste. Il s’épanouit dans la fluidité globalitaire marchande. « La globalisation de l’économie n’est nullement une simple extension des échanges commerciaux et financiers, comme le capitalisme l’a connue depuis deux siècles. À la différence de l’internationalisation qui tend à accroître l’ouverture des économies nationales (chacune conservant en principe son autonomie), la globalisation ou mondialisation tend à accroître l’intégration des économies. Elle affecte les marchés, les opérations financières et les processus de production, réduit le rôle de l’État et la référence à l’économie nationale (p. 42). » Les ravages torrentiels de la mondialisation atteignent tous les pays, y compris les États les plus récents. Ainsi, « le folklorisme de masse qui fut l’unique manifestation de l’identité croate à l’époque yougoslave et communiste, fut après l’éclatement de la Yougoslavie, vite suivie par la coca-colisation des esprits au point que la symbolique nationaliste croate est devenue une marchandise – au grand plaisir des classes régnantes en Occident (p. 58) ». Après une période d’exaltation nationale, voire nationaliste, correspondant à la présidence de Franjo Tudjman, les responsables croates actuels ont tout fait pour l’évacuer, l’oublier et accentuer au contraire une occidentalisation/mondialisation qui flatte leur internationalisme d’antan… Pis, « les élites post-néo-communistes croates […] n’ont jamais aspiré à l’indépendance de la Croatie et n’ont jamais eu, il faut le dire clairement, une quelconque vision d’une identité croate matricielle et fondatrice (p. 238) ». On retrouve ce manque de volonté nationale en Ukraine. Les nouvelles oligarchies, croate ou ukrainienne, salue le produit du Mur de Berlin et de Wall Street : l’homme occidental soviétique.
Victimes, histoire et mémoire
Tomislav Sunic retrace l’historique de la fin du modèle yougoslave. Avant d’être le père de la Croatie indépendante, Franjo Tudjman fut un compagnon de route de Tito et un responsable communiste. Puis, écarté des cénacles dirigeants, il se passionna pour l’histoire, en particulier pour la Seconde Guerre mondiale, au risque de se faire accuser par certains cénacles mi-officieux et demi-mondains de « révisionniste »… Dans sa belle préface, Jure Vujic considère que l’identité nationale croate « qui à bien des égards, se trouve bousculée par les défis du globalisme, les processus intégrationnistes régionaux et supranationaux, à bien du mal à se stabiliser dans un espace-temps exsangue et à mûrir autour d’un projet politique commun, libéré des réminiscences et du trop-plein d’histoire fratricide hérités de la Deuxième Guerre mondiale (p. 12) ». Bien avant le déchaînement titanesque des violences nationales et étatiques, les antagonismes ne se cachaient pas et s’exposaient plutôt par l’intermédiaire d’une « guerre des mots » et de revendications mémorielles perceptibles lors des compétitions de football. En estimant avec raison que « dans le monde vidéosphérique d’aujourd’hui, l’image de guerre incite fatalement au narcissisme et à l’individualisme extrême (p. 207) », Tomislav Sunic ponte le rôle belligène des médias qui se sont substitués à l’intelligentsia. « De même qu’il n’y a pas de guerre sans morts, il ne peut plus aujourd’hui y avoir de guerre sans mots d’ordre, donc sans communication (p. 197) », d’où la montée en puissance dans les coulisses du pouvoir des spin doctors, ces agents d’influence très grands communicants. Pour parvenir à leurs fins, ils pratiquent « tout d’abord, les actions “ pédagogiques ” à long terme, ensuite le conditionnement des esprits et le modelage des mentalités (p. 198) ». Ils portent ainsi jusqu’à l’incandescence les opinions publiques facilement manipulables.
Les médias accaparent la thématique victimaire. Dorénavant, toute mémoire, identité ou communauté soucieuse d’acquérir une légitimité se pose avant tout en victime. Or « toute identité victimaire est par définition portée à la négation ou au moins à la trivialisation de la victimologie de l’Autre (p. 213) ». Pourtant, rappelle Tomislav Sunic, « l’esprit victimaire découle directement de l’idéologie des droits de l’homme. Les droits de l’homme et leur pendant, le multiculturalisme, sont les principaux facteurs qui expliquent la résurgence de l’esprit victimaire (p. 219) ». Loin d’être les ultimes exemples d’antagonismes nationalitaires meurtriers propres aux XIXe et XXe siècles, les conflits yougoslaves ont préfiguré les guerres postmodernistes. La Post-Modernité qui met au cœur de sa logique l’identité. Au risque de se mettre à dos tous les néo-kantiens, l’auteur croît que « toute identité, qu’elle soit étatique, idéologique, nationale ou religieuse, est à la fois la victime et le vecteur d’un engrenage qui aboutit souvent à la violence et à la guerre (p. 37) ». L’identité est donc l’inévitable corollaire du politique.
Il faut néanmoins prendre ici le terme « identité » dans son acception d’identique, de similitude, parce que « souvent, ce sont les ressemblances et non les différences qui provoquent les conflits, surtout lorsque ces conflits prennent la forme d’une rivalité mimétique (p. 70) ». Autrement dit et dans le contexte croate, « peut-on être Croate aujourd’hui sans être antiserbe ? (p. 37) ». La réponse serait affirmative si n’entraient pas en ligne de compte d’autres paramètres. « De l’affirmation d’une identité patriotique fondée sur l’ethnos et le mythos, écrit Jure Vujic, la Croatie d’aujourd’hui est à la recherche d’un “ piémontisme axiologique ” qui n’est autre qu’une identité de valeurs communes (p. 16) ». Et puis, « dans notre postmodernité, poursuit Tomislav Sunic, c’est l’Union européenne et l’Amérique qui décident, dans une large mesure, de l’identité d’État croate et même de l’identité supra-étatique de la Croatie dans un monde futur (p. 74) ». Par ailleurs, « avec et dans l’Union européenne, les valeurs marchandes imposent une hiérarchie des valeurs qui va directement à l’encontre de la survie des petits peuples (p. 57) ». Le postmodernisme multiculturaliste et ultra-individualiste s’apparente à une broyeuse de cultures enracinées. Il détient pourtant en lui ses propres objections.
Les paradoxes explosifs de la postmodernité multiculturelle
Oui, la postmodernité (ou plus exactement selon nous, l’ultra-modernité) creuse sa propre tombe en suscitant des contradictions insurmontables. Pour Tomislav Sunic, « le multiculturalisme est […] une constellation de politiques et de pratiques qui cherche à concilier l’identité et la différence, à déconstruire et à relativiser la métaculture des sociétés post-industrielles (p. 47) ». Puisque « le problème de l’identité en tant qu’altérité est devenu essentiel dans l’Occident postmoderne (p. 211) », la seule réponse « politiquement correcte » apte est l’acceptation du fait multiculturel (l’empilement individualiste et chaotique de communautés de nature ou de choix) et le rejet du corps social homogène. « Le pluralisme classificatoire qu’induisent les droits positifs en faveur de populations stigmatisées ou discriminées en fonction de l’âge et du sexe est interprété, notamment en Europe, comme une déstructuration de l’homogénéité sociale et culturelle de la nation et du concept de citoyenneté (pp. 41 – 42). » Il appert que « le choix d’un style de vie individuel, la tribalisation et l’atomisation de la société moderne ainsi que la multiculturalisation de la société européenne, rendent l’analyse de l’identité nationale croate encore plus compliquée. Même les Croates modernes, qui sont bien en retard en matière d’identité d’État, doivent faire face à une multitude de nouvelles identités. Leur identité nationale varie au gré des circonstances internationales, ces changements se juxtaposent quotidiennement et ils remettent en cause leur ancien concept d’identité nationale. On pourrait facilement qualifier ces nouvelles identités juxtaposées d’identités apprises ou acquises, par rapport aux anciennes identités qui relevaient de la naissance et de l’héritage culturel (pp. 49 – 50) ». Dans ces conditions, doit-on vraiment s’étonner qu’« à défaut d’une diplomatie cohérente, les eurocrates préfèrent tabler sur une identité croate consumériste et culinaire, et miser sur une classe politique locale aussi corrompue que criminogène (p. 232) » ? L’identité subit une pseudomorphose : « peu à peu, l’ancienne identité nationale, voire nationaliste, qui sous-entendait l’appartenance à un terroir historique bien délimité, est supplantée par le phénomène du communautarisme sans terroir – surtout dans les pays occidentaux qui ont subi une profonde mutation raciale (p. 38) ».
Malgré l’affirmation répétitive et incantatoire des valeurs fondatrices de l’actuelle entreprise européenne, à savoir un antifascisme obsessionnel et fantasmatique pitoyable, la multiplication des contentieux mémoriels résultant du fait multiculturaliste renforce une « rivalité des récits victimaires [qui] rend les sociétés multiculturelles extrêmement fragiles. Par essence, tout esprit victimaire est conflictuel et discriminatoire. Le langage victimaire est autrement plus belligène que l’ancienne langue de bois communiste et il mène fatalement à la guerre civile globale (p. 220) ». Extraordinaire paradoxe ou hétérotélie selon les points de vue ! Surtout que « dans une société pluri-ethnique et multiculturelle, l’identité des différents groupes ethniques est incompatible avec l’individualisme du système libéral postmoderne (pp. 37 – 38) ». Tomislav Sunic ajoute que « la schizophrénie du monde postmoderne consiste, d’une part, dans la vénération absolue de l’atomisation individualiste qui met en exergue l’identité individuelle et consumériste, et d’autre part, dans le fait qu’on est tous devenu témoin du repli communautaire et de la solidarité raciale (p. 39) ».
Certes, si Jure Vujic craint que « la Croatie comme toutes les “ démocraties tardives ”, ainsi qu’aime à le dire la communauté internationale, se doit de transposer de manière paradigmatique le sacro-saint modèle libéral, politique et économique, sans prendre en considération les prédispositions psychologiques, historiques et sociales spécifiques du pays (p. 13) », « pour l’instant, lui répond Sunic, les Croates, comme tous les peuples est-européens, ignorent complètement le danger de la fragmentation communautaire. La société croate, au début du IIIe millénaire, du point de vue racial est parfaitement homogène, n’ayant comme obsession identitaire que le “ mauvais ” Serbe. Pourtant, il ne faut pas nourrir l’illusion que la Croatie va rester éternellement un pays homogène. Le repli communautaire dont témoignent chaque jour la France et l’Amérique, avec le surgissement de myriades de groupes ethniques et raciaux et d’une foule de “ styles de vie ” divers, deviendra vite la réalité, une fois la Croatie devenue membre à part entière du monde globalisé (p. 38) ». La Croatie parviendra-t-elle enfin au Paradis occidental ? Rien n’est certain. En observant les pesanteurs de l’idéologie victimaire sur l’opinion et constatant que « souvent, la perception d’un groupe ira jusqu’à se considérer comme la victime principale d’un autre groupe ethnique (p. 68) », Tomislav Sunic y devine l’amorce de futurs conflits.
Des guerres communautaires à venir
« On a beau critiquer le communautarisme et l’identité nationale et en faire des concepts rétrogrades, relève l’auteur, force est de constater que le globalisme apatride n’a fait qu’exacerber la quête d’identité de tous les peuples du monde (p. 61). » Bonne nouvelle ! La vision morbide et totalitaire d’une humanité homogène ne se réalisera jamais. Ses adeptes chercheront quand même à la faire en se servant de cette idéologie moderne par excellence qu’est le nationalisme. « À l’instar des nationalistes classiques, le trait caractéristique des nationalistes croates est la recherche de la légitimité négative, à savoir la justification de soi-même par le rejet de l’autre. Impossible d’être un bon Croate sans être au préalable un bon antiserbe ! Ceux qui en profitent le plus sont les puissances non-européennes : jadis les Turcs, aujourd’hui l’Amérique ploutocratique et ses vassaux européens. Ce genre de nationalisme jacobin, qu’on appelle faussement et par euphémisme, en France, le souverainisme, ne peut mener nulle part, sauf vers davantage de haine et de guerres civiles européennes (p. 53). »
Un regain ou une résurgence du nationalisme étatique moderne n’empêchera pas la « contagion postmoderniste » de la Croatie, ni d’aucun autre État post-communiste. Bien au contraire ! « Les mêmes stigmates de la décomposition identitaire occidentale sont visibles en Croatie, qui subit les assauts conjugués d’une dénationalisation politique et institutionnelle ainsi qu’un raz-de-marée de réseaux “ identitaires ” relevant de la postmodernité. Université, presse, politique, syndicat, on pourrait poursuivre la liste : administration, clubs, formation, travail social, patronat, Églises, etc., le processus néo-tribal a contaminé l’ensemble des institutions sociales. Et c’est en fonction des goûts sexuels, des solidarités d’écoles, des relations amicales, des préférences philosophiques ou religieuses que vont se mettre en place les nouveaux réseaux d’influence, les copinages et autres formes d’entraide qui constituent le tissu social. “ Réseau des réseaux ”, où l’affect, le sentiment, l’émotion sous leurs diverses modulations jouent le rôle essentiel. Hétérogénéisation, polythéisme des valeurs, structure “ hologrammatique ”, logique “ contradictionnelle ”, organisation fractale (p. 50). »
On le voit : Tomislav Sunic « dévoile “ au scalpel ” les dispositifs subversifs, psychologiques et sociopolitiques, qui sont actuellement à l’œuvre dans une matrice identitaire croate qui reste très vulnérable face aux processus pathogènes de l’occidentalisation, assène Jure Vujic (p. 21) ». Les Croates ont obtenu un État-nation et une identité politique au moment où ceux-ci se délitent, dévalorisés et concurrencés par un foisonnement d’ensembles potentiellement porteurs d’identités tant continentales que vernaculaires ou locales (4). Le décalage n’en demeure pas moins patent entre l’Ouest et le reste de l’Europe ! « La petite Estonie, la Croatie et la Slovaquie vont bientôt réaliser que dans l’Europe transparente d’aujourd’hui, on ne peut plus se référer aux nationalismes du XXe siècle. Après avoir refusé le jacobinisme des Grands, ils se voient paradoxalement obligés de pratiquer leur propre forme de petit jacobinisme qui se heurte fatalement aux particularismes de leurs nouveaux pays. Sans nul doute, affirme alors Sunic, la phase de l’État-nation est en train de se terminer dans toute l’Europe et elle sera suivie par un régime supranational. Peu importe que ce régime s’appelle l’Union européenne ou le IVe Reich (p. 57). » Et si c’était plutôt l’Alliance occidentale-atlantique ou le califat universel ?
Dans sa riche préface, Jure Vujic s’élève avec vigueur contre le supposé « retour en Europe » des anciens satellites soviétiques. En appelant à une « réappropriation de l’identité grand-européenne » de la croacité, il appelle à une réflexion majeure sur l’Europe de demain, celle qui surmontera les tempêtes de l’histoire.
Seule une prise de conscience générale de leur européanité intrinsèque permettra aux peuples autochtones du Vieux Continent de contrer le travail corrosif de l’Occident moderne, du multiculturalisme et du postmodernisme. La transition des sociétés pré-migratoires et migratoires (Croatie et Ukraine par exemple) vers des sociétés post-migratoires (Europe occidentale) risque de provoquer une riposte identitaire virulente de la part de peuples européens (ou de certaines couches sociales) les moins séniles. « Une guerre larvée et intercommunautaire entre des bandes turcophones et arabophones vivant en Allemagne ou en France, et des groupes de jeunes Allemands ou Français de souche ne relèvent plus d’un scénario de science-fiction (p. 125) », avertit Tomislav Sunic. Il tient pour vraisemblable que « le nationalisme inter-européen d’antan, accompagné par la diabolisation de son proche voisin, comme ce fut le cas entre les Croates et les Serbes, peut dans un proche avenir devenir périmé et être supplanté par une guerre menée en commun par les Serbes et les Croates contre les “ intrus ” non-européens (pp. 38 – 39) ». La réalisation effective d’une identité politique et géopolitique européenne s’en trouverait grandement renforcée et annulerait le présent dilemme des populations croates par défaut et occidentalisées par excès. C’est dire, comme le remarque Jure Vujic, que « le livre de Tomislav Sunic […] constitue […] un éclairage politologique et philosophique considérable sur l’actuelle transition de l’identité croate dans la postmodernité (pp. 17 – 18) ». Une lecture indispensable en ces temps incertains et désordonnés.
Georges Feltin-Tracol http://www.europemaxima.com
Notes
1 : Jean-Gilles Malliarakis, Yalta et la naissance des blocs, Albatros, 1982, p. 152.
2 : Idem. Ajoutons en outre qu’on n’a pas de sources exactes quant à la naissance de Tito. Ce dernier parlait d’ailleurs un mauvais serbo-croate avec un accent russe, loin de sa prétendue région natale au nord de la Croatie. Sa syntaxe était également mauvaise.
3 : Tomislav Sunic reprend une erreur courante quand il qualifie « le Conseil de l’Europe […de…] corps législatif (p. 137) ». Il confond le Parlement européen et le Conseil de l’Europe qui tous deux siègent à Strasbourg. Le Conseil de l’Europe ne relève pas de l’Union européenne puisque ses membres sont tous les États du continent – sauf le Bélarus qui est un invité spécial -, la Turquie et l’Azerbaïdjan. Sont membres observateurs les États-Unis, le Canada, Israël, le Mexique et le Japon…
De ce Conseil procède la Convention européenne des droits de l’homme et sa sinistre Cour qui entérine les lois liberticides et encourage la fin des traditions européennes.
Il ne faut pas mélanger ce conseil avec le Conseil européen qui réunit les chefs d’État et de gouvernement, ni avec le Conseil de l’Union européenne rassemblant les ministres des États-membres pour des problèmes de leurs compétences.
4 : Une fois la Croatie membre de l’U.E., il se posera la question de l’adhésion à l’Union européenne des autres États ex-yougoslaves. À la demande expresse de Franjo Tudjman, la Constitution croate, par l’article 141, interdit explicitement toute reconstitution d’une union balkanique. Or l’arrivée de la Serbie, de la Bosnie-Herzégovine, du Monténégro, etc., dans l’U.E. ne sera-t-elle pas perçue comme la reformation d’un ensemble slave du sud dans le giron eurocratique et atlantiste ? Zagreb ne risquera-t-il pas de poser son veto à l’entrée de Belgrade, de Sarajevo ou de Skopje ?
• Tomislav Sunic, La Croatie : un pays par défaut ?, préface de Jure Vujic, Éditions Avatar, coll. « Heartland », 2010, 252 p., 26 €. -
“Un peuple qui n’honore pas ses morts n’a plus d’avenir”
Bruno Gollnisch évoque magnifiquement, sur son blog, “ce culte de tous les temps et de toutes les civilisations. Les morts, les pauvres morts ont de grandes douleurs disait Beaudelaire, dans l’un de ses très beaux poèmes, consacré à la tombe abandonnée d’une “servante au grand coeur” qui avait veillé sur son enfance. Car la France d’aujourd’hui maltraite ses morts. Au nom de la rentabilité, depuis quelques années, on n’a plus le droit de reserver, comme on pouvait le faire autrefois- à grand prix ! – une concession perpetuelle. Les défunts eux-mêmes sont soumis à la précarité. Tout au plus peut-on les héberger 30 ans au maximum. Passé cette date, il faut renouveller ce que j’appellerai, en quelque sorte, le loyer de la concession… si les héritiers y pensent, s’ils le peuvent et s’ils sont toujours là ! Dans un village des Ardennes où j’ai quelques origines familiales, on m’a parlé de la tombe du fils unique de l’ancien forgeron. Il avait forgé lui-même la grille qui entourait l’emplacement où reposait son fils unique, tué à 20 ans à la guerre de 1914-18. C’était, dit-on, une très belle grille, avec un beau crucifix. Le forgeron est mort aussi et sa famille s’est éteinte après lui. Récemment, on a “repris” la tombe ; la grille et la croix sont parties à la décharge”. Et Bruno Gollnisch de poursuivre par cette très belle réflexion, digne de Barrès : Ainsi, rien n’échappe, dans notre société moderne, pas même les morts, à la loi de l’apparente rationalité marchande et la précarité qu’elle engendre. Non pas la précarité inhérente au temps qui passe dans un monde où rien n’est éternel, non pas l’impermanence des choses telle que la conçoit la sensibilité extrême-orientale, mais la rotation forcée, voulue, fruit du matérialisme et de l’impiété de notre génération. “Quelle importance ?” diront beaucoup. “Pourquoi se soucier des restes inertes de ceux qui nous ont précédés, et qui n’éprouvent plus rien ?” Ceux qui pensent ainsi ont tort. Un pays n’est pas seulement la propriété de ceux qui y vivent ; mais aussi de ceux qui y ont vécu. Effacez leur souvenir, et vous déclarez la terre ouverte à tous. Vita mortuorum in mémoria est posita vivorum ; la vie des morts est de survivre dans l’esprit des vivants disait Cicéron et, plus près de nous, Chateaubriand : les vivants ne peuvent rien apprendre aux morts : les morts, au contraire, instruisent les vivants. Disons-le tout net : un peuple qui n’honore pas ses morts n’a plus d’avenir. D’autres viendront, qui progressivement prendront la place des amnésiques, et ne coloniseront pas que ses cimetières. Car tout se tient.
Barrès avait bien compris le lien charnel qui existe entre la terre et les morts. C’est que la terre de France n’est pas seulement la propriété des soixante millions de personnes qui y vivent aujourd’hui, et dont on ne sait trop s’il faut les qualifier d’habitants ou de nationaux. Elle appartient aussi au milliard d’êtres humains qui, depuis l’aube des temps historiques y ont vécu, travaillé, souffert, aimé, et qui, si souvent, ont donné leur vie pour elle.
En honorant nos morts, en respectant la dernière et intangible demeure, à laquelle ils ont droit, nous nous relions à eux, qu’ils fussent riches ou pauvres, glorieux ou humbles : Dona eis, Domine, requiem sempiternam.”
source: Rivarol
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Mondialisation : comment le gaz de schiste américain a ruiné des paysans indiens
JAIPUR (NOVOpress) – Cela aurait presque pu passer pour un conte de fées : tout à coup les paysans pauvres d’une région semi-désertique de l’Inde (le Rajasthan au nord-ouest du sous-continent) abandonnent leurs huttes en pisé pour des maisons en dur, achètent des voitures et travaillent avec des tracteurs neufs… Mais les contes liée à la mondialisation finissent rarement bien.
Cet enrichissement subit était dû à la culture du haricot de guar qui sert là bas (photo) traditionnellement de fourrage, mais entre aussi à de très petites proportions dans la fabrication de dentifrices et sert comme émulsifiant dans l’industrie alimentaire (glaces, pâtisseries). Mais la gomme qu’on en tire est pour le moment aussi indispensable à la fracturation hydraulique des roches (fracking), préalable à l’exploitation des gaz de schiste (1). Une production qui doit permettre d’ici quelques années aux USA de bénéficier de tous les avantages d’un pays producteur et exportateur.
Cette exploitation industrielle nécessite évidemment des quantités colossales de gomme, ce qui a fait exploser les cours du haricot de guar et enrichi du jour au lendemain nombre de petits exploitants qui, espérant continuer à profiter de cette subite manne n’ont pas hésité à faire très ample provision de semences, quitte à les payer à des prix prohibitifs.
Las ! Un an plus tard, nombre de concurrents, du Pakistan voisin jusqu’au Texas, ont également voulu leur part du gâteau. Et l’industrie, contrariée de devoir investir jusqu’à 30% du prix d’un forage dans la seule gomme de guar, a accéléré la recherche sur les produits de substitution. En l’absence de pénurie, le cours du haricot s’est effondré, sans espoir d’une amélioration.
Nombre des 200 000 fermiers ruinés par l’achat de semences désormais sans valeur, pris dans un tourbillon éphémère sur lequel ils n’ont eu aucun pouvoir de décision, pourraient bien être tenté de se joindre au flux continu de migrants rêvant d’une vie confortable à l’occidentale…
Note
(1) Il s’agit de prospections souvent à plusieurs milliers de mètres de profondeur. Pour simplifier beaucoup, le procédé consiste à injecter sous très haute pression un mélange d’eau et de sables de quartz ou de céramique (et de produits chimiques, voire d’antibiotiques), pour fissurer des roches très fortement comprimées et permettre ainsi au gaz emprisonné depuis des millénaires de passer. La gomme de guar permet une bonne homogénéisation du mélange injecté, et se laisse ensuite aisément dissoudre pour ne laisser que les sables en guise de calage poreux entre les roches.