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Une lettre de Georges Soros au président Porochenko et au premier ministre Iatseniouk, daté du 23 décembre 2014, créé par Douglas York, assistant personnel de Georges Soros
Kiev -UKRAINE
Son Excellence Arseniy Yatsenyuk
Premier Ministre de l’Ukraine
Kiev – UKRAINE
M. le Président, M. le Premier ministre, Mes chers amis,
Je veux vous appeler à vous rassembler derrière les réformateurs au sein de votre gouvernement pour apporter votre soutien enthousiaste à une approche du type “big bang”. Ce qui signifie une approche où les contrôles administratifs seraient supprimés et où l’économie passerait au “prix de marché” rapidement plutôt que graduellement.
Comme vous le savez, je n’ai pas ménagé ma peine, lors du dîner du sommet européen du 18 décembre, pour susciter un soutien à une aide financière plus importante. Vous avez vu dans le communiqué final que je n’ai guère eu de succès, même si les présidents Tusk et Juncker ont été de bonne volonté. Le sentiment le plus répandu était que le gouvernement ukrainien manque de coordination et n’est pas vraiment décidé en faveur de réformes radicales. Hier matin, j’ai parlé à Christine Lagarde, qui a clairement soutenu mes arguments, et elle a exprimé une opinion similaire.
Voilà qui met en péril la “nouvelle” Ukraine qui s’oppose avec vigueur à la “vieille” Ukraine avec sa corruption endémique et son gouvernement impotent. Les gens sont prêts à s’accommoder d’un certain niveau de sacrifices pour une Ukraine nouvelle, mais il lui faut un soutien financier plus important que les 15 milliards de dollars actuellement envisagés pour contenir la baisse du niveau de vie à un niveau tolérable. Et pour justifier un soutien plus important, il faut que le gouvernement présente un budget convaincant avec des économies significatives. Le nombre de fonctionnaires doit être réduit de bien plus de 10% ; et Naftogaz doit être réorganisé avec un “big bang” qui remplace les subventions cachées fournies par Naftogaz par des aides directes pour les plus faibles. Comme Youri Vitrenko me l’a expliqué, cela pourrait fonctionner en assurant aux gens que leurs demandes d’aide seraient garanties la première année, qu’ils y aient droit ou pas (en utilisant la pression sociale pour décourager les demandes abusives) et en ne leur demandant pas de payer plus que l’année précédente. Cela donnerait une année aux autorités pour organiser une transition ordonnée des subventions cachées aux aides explicites. Voilà pourquoi je vous exhorte à adopter l’approche “big bang”.
Vous avez la chance d’avoir nommé trois “nouveaux Ukrainiens” ministres et plusieurs locaux qui s’investissent dans cette approche. Ils pourraient réorganiser leurs ministères, y réduire les effectifs à une fraction de leurs tailles actuelles tout en augmentant les salaires des fonctionnaires restants. Ce qui pourrait constituer un exemple à suivre pour les autres ministères. Les ministres qui ont entrepris des réformes radicales pourraient être tenus responsables en cas d’échec, mais on doit leur donner leur chance de réussite en les laissant choisir leurs adjoints.
Quand j’ai demandé au conseiller diplomatique du président Juncker ce qu’il avait en tête en évoquant le manque de progrès, étonnamment il a souligné les réformes constitutionnelles. De fait, l’Ukraine connaît un moment unique où le public s’intéresse passionnément aux problèmes constitutionnels et il ne faut pas laisser passer ce moment. La société civile doit être effectivement engagée dans ces discussions. Ce qui soulève la question du rôle du Conseil National de la Réforme que j’espère vous clarifierez entre vous deux.
Comme vous le savez, j’ai demandé à Andrès Velasco, un éminent économiste qui a très bien réussi comme ministre des finances du Chili de 2006 à 2010, de visiter Kiev où il a rencontré le Premier ministre ; le Président étant à Varsovie à ce moment-là. Velasco en est revenu avec une vision très sombre de la situation financière. La Banque Nationale d’Ukraine n’a pratiquement plus de réserves en devises. Ce qui signifie que la hryvnia n’a plus d’ancrage. En cas de panique et d’effondrement de la monnaie, comme il y en a eu en Russie, la Banque Nationale d’Ukraine ne pourrait pas stabiliser le taux de change, même temporairement comme l’a fait la Russie en injectant 90 milliards de dollars.
Votre première priorité doit être de reprendre le contrôle sur les marchés financiers – dépôts bancaires et taux de change. Sinon vous n’aurez aucun moyen de vous lancer dans des réformes plus profondes. Je crois que la situation pourrait être stabilisée en obtenant du Conseil Européen qu’il s’engage sur le principe d’accorder ce nouveau paquet de 15 milliards de dollars que le FMI exige pour libérer la prochaine tranche du paquet d’origine à la fin de janvier 2015. Sur la base de cet engagement, on pourrait demander à la Réserve Fédérale de prolonger pour trois mois son accord de swap de 15 milliards de dollars avec la Banque Nationale d’Ukraine. Ce qui rassurerait les marchés et éviterait la panique.
Je crois que le communiqué de Bruxelles et les commentaires des présidents Tusk et Juncker ont un effet apaisant pour les marchés. C’est à vous de décider si vous considérez le danger de panique financière suffisamment réel pour prendre des mesures préventives. Si c’est le cas, vous devriez appeler la Chancelière Merkel pour lui demander un engagement sur le principe du paquet de 15 milliards de dollars. Je suis prêt à appeler le secrétaire d’état au Trésor US, Jack Lew, pour essayer de connaître ses intentions sur cet accord de swap.
Je dois partir en Asie le 27 décembre et j’aimerais discuter avec vous de cette question par téléphone, ou mieux par Skype, avant de partir. Je vais devoir réduire l’intensité de mon implication en Ukraine pour les trois prochaines semaines. Je prévois de passer à Kiev après Davos. Mon adjoint Chris Canavan est prêt à venir plus tôt si nécessaire.
En vous renouvelant nos vœux de succès
Un document d’assistance militaire à Kiev, non daté, rédigé par Yasin Yaqubie de l’International Crisis Group
Nous partageons la vision du Président Obama sur ce qui se joue en Ukraine, mais nous pensons que la situation nécessite que les États-Unis en fassent davantage. Le Président a dit la chose suivante à Tallinn :
Malgré cela, aujourd’hui même où nous nous retrouvons, nous savons que cette vision est menacée par l’agression russe contre l’Ukraine. C’est une attaque éhontée contre l’intégrité territoriale de l’Ukraine – une nation européenne souveraine et indépendante. Cette attaque remet en cause le plus fondamental des principes de notre système international : que l’on ne redessine pas les frontières aux canons des fusils ; que les nations ont le droit de décider de leur propre avenir. Elle ébranle un ordre international dans lequel les droits des peuples et nations sont respectés et dont ils ne peuvent tout simplement pas être privés par la force brute. Voilà ce qui se joue en Ukraine. Voilà pourquoi nous nous tenons aux côtés du peuple ukrainien aujourd’hui.
A la lumière de ces faits, il faut empêcher la Russie d’user de force militaire et de menaces militaires pour imposer davantage de changements en Ukraine. Nous apprécions qu’un cessez-le-feu soit en place. Malgré tout, nous demeurons sceptiques sur le maintien du cessez-le-feu sur le long terme par les Russes et leur marionnettes séparatistes, ou sur leur consentement à un règlement politique qui préserverait l’intégrité territoriale et politique de l’Ukraine.
Pour dissuader les Russes de reprendre le combat ou d’exiger que Kiev ne donne son accord à des conditions inacceptables, il faut plus que des sanctions et autres actions directes des États-Unis et de leurs alliés de l’OTAN. Il faut également former et équiper en matériel les forces militaires ukrainiennes, afin qu’elles puissent neutraliser les séparatistes soutenus et renforcés par des forces russes clandestines. Le Président Obama devrait maintenant faire clairement comprendre à Poutine la détermination des États-Unis à engager des actions dans ce sens. Cela encouragerait Poutine à prolonger le cessez-le-feu et à ne pas reprendre l’escalade car la Russie sait qu’elle ne peut surenchérir sur les États-Unis en matière de sophistication des armements.
Ainsi donc :
- L’Ukraine devrait bénéficier d’une dotation militaire en armes létales, ce qui lui permettrait de résister à la puissance militaire écrasante de la Russie. Sinon Poutine atteindra ses objectifs par l’usage de la force armée.
- Les États-Unis devraient doter l’Ukraine d’armes défensives aussi sophistiquées que les forces adverses. En termes de poker, les États-Unis doivent “suivre, non pas surenchérir”.
- Les forces ukrainiennes devraient être entraînées hors de l’Ukraine, par exemple en Roumanie, ainsi les militaires américains ne seraient pas visibles et il n’y aurait pas de force de l’OTAN en Ukraine.
Un projet de “stratégie globale à court et moyen terme pour la nouvelle Ukraine”, daté du 12 mars 2015, créé par Tamiko Bolton, troisième épouse de Georges Soros
Draft Non-Paper / v14
Stratégie globale à court et moyen terme pour la nouvelle Ukraine
Court terme : les trois à cinq prochains mois
Moyen terme : les trois à cinq prochaines années