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culture et histoire - Page 1878

  • 11 avril 1713 : la paix d'Utrecht

    Le 11 avril 1713, après quatorze mois de négociations pénibles entrecoupées de rebondissements militaires, les diplomates européens signent à Utrecht le traité qui met fin à la guerre de la Succession d'Espagne.

    Fin d'une guerre européenne

    En 1700, le roi d'Espagne Charles II, sans enfant, avait légué son royaume au duc Philippe d'Anjou, petit-fils du roi de France Louis XIV. Craignant une union de la France et de l'Espagne, plusieurs États européens, dont l'Angleterre et l'Autriche, s'étaient coalisés contre les Bourbons.

    Après de sévères revers militaires, la France écarte le danger d'invasion grâce à la victoire du vieux maréchal Villars à Denain. Louis XIV peut enfin négocier la paix dans des conditions à peu près honorables.

    À Utrecht, ses diplomates et ceux de l'Espagne font face aux représentants de l'Angleterre, de la Hollande, du Portugal, de la Savoie et de la Prusse.

    La signature du traité donne lieu à une vaste redistribution des cartes en Europe... Elle nous fait penser a posteriori à une avant-première des traités de Vienne (1815) et de Versailles (1919).

    Négociations européennes à grande échelle

    La France doit céder l'île de Terre-Neuve à l'Angleterre, le territoire de la baie d'Hudson et l'Acadie au Canada, ainsi que l'île Saint-Christophe aux Antilles. Elle lâche aussi plusieurs villes allemandes : Brisach, Fribourg, Kehl, sur la rive droite du Rhin, et s'engage à détruire ses fortifications du bord du Rhin.

    A la frontière du nord de la France, la Hollande obtient d'installer des garnisons dans huit forteresses : Furnes, Ypres, Menin, Tournai, Mons, Charleroi, Namur et Gand. Humiliante pour la France, cette «barrière» vise à prévenir toute nouvelle agression contre la Hollande.

    La France reconnaît par ailleurs les droits de la dynastie de Hanovre sur le trône anglais et renonce à soutenir les droits des Stuart. Elle s'engage à détruire les fortifications érigées à Dunkerque par Vauban.

    En contrepartie, le petit-fils de Louis XIV est confirmé comme roi d'Espagne sous le nom de Philippe V, tout en renonçant à ses droits sur le trône de France.

    La Savoie se voit confirmer la possession d'une partie du Milanais. Elle recouvre la possession de la... Savoie, occupée par les troupes françaises. Le duc de Savoie cède à la France la vallée alpine de Barcelonnette en échange de Fenestrelle et d'Exiles. Il reçoit également le titre de roi ainsi que la Sicile (mais échange peu après cette dernière contre la Sardaigne).

    L'Électeur de Brandebourg, Frédéric Ier de Hohenzollern, se voit reconnaître le titre de roi en Prusse (sans arriver à convaincre l'empereur d'Allemagne de lui reconnaître le titre plus honorable de roi de Prusse). Il reçoit la haute Gueldre, près de la Hollande, ainsi que la principauté de Neuchâtel. Il cède d'autre part à la France la principauté d'Orange (en Provence).

    L'empereur Charles VI de Habsbourg reçoit la plupart des possessions espagnoles en Europe : Milan, Mantoue, Naples, la Sardaigne (qu'il échangera ensuite contre la Sicile), ainsi que les Pays-Bas du sud (l'actuelle Belgique).

    L'Europe à la mort de Louis XIV

    Cliquer pour agrandir la carte
    L'Europe à la mort de Louis XIV (carte : Alain Houot, Herodote.net)
    La France apparaît en 1715, à la mort de Louis XIV, comme le royaume le plus peuplé, le plus puissant et le plus prospère d'Europe, avec une vingtaine de millions d'habitants et une population en progression. La «ceinture de fer» de Vauban la protège durablement contre les risques d'invasion...

    Conclusions

    Le traité d'Utrecht consacre l'effacement de l'Espagne de l'avant-scène européenne et inaugure l'extraordinaire ascension de l'Angleterre.

    – Les Anglais acquièrent les colonies françaises du Canada ainsi que l'île de Minorque, dans l'archipel des Baléares, et la presqu'île de Gibraltar, enlevée à l'Espagne en 1704. Ils obtiennent aussi pour 30 ans le monopole de la traite des Noirs (l'asiento) dans l'Amérique espagnole.

    – Les Provinces-Unies, bien que victorieuses, cèdent à leurs rivaux anglais la primauté maritime et commerciale.

    – L'Allemagne et l'Italie restent divisées, malgré la montée en puissance de la Prusse et de la Savoie.

    – La France conserve de «beaux restes». Ses frontières, puissamment fortifiées par Vauban, la tiendront à l'abri de l'invasion pendant près d'un siècle, jusqu'en 1792.

    La France  au plus haut

    Au terme du règne long et glorieux de Louis XIV, la France garde un immense prestige en Europe, malgré ses difficultés dans la Guerre de Succession d'Espagne. Cela lui vaut de rester pendant un siècle encore à l'avant-garde de la civilisation européenne. D'ailleurs, c'est en français qu'est rédigé le traité d'Utrecht. C'est une première car tous les actes diplomatiques étaient précédemment rédigés en latin. Le français devient pour deux siècles, jusqu'au traité de Versailles, la langue de la diplomatie.

    Les traités signés à Utrecht sont complétés quelques mois plus tard par le traité de Rastatt. Celui-ci est signé le 6 mars 1714 par le maréchal de Villars, qui représente Louis XIV, et le prince Eugène, qui représente l'empereur d'Allemagne.

    Le traité de Bade du 7 septembre 1714 étend les clauses du précédent traité à toutes les principautés allemandes. Enfin, le traité d'Anvers (15 novembre 1715), ou traité de la «barrière», définit les rapports entre la Hollande (ou Provinces-Unies) et les Pays-Bas autrichiens.

    Camille Vignolle http://www.herodote.net
  • La patrie en danger

     Le contraste entre les propos lénifiants du Président de la République et la croissante capacité de mobilisation populaire que révèle le succès éclatant de "la Manif pour tous" annonce sans grand doute de graves troubles dans les mois à venir.

    De toutes parts, surgissent des signes de tension sociale que la situation du pays ne fera qu’aggraver : déficits inégalés du commerce extérieur, augmentation du chômage, qui semble désormais hors de tout contrôle, dégradation inexorable du pouvoir d’achat ; déséquilibre croissant d’une zone euro (qui, depuis l’affaire chypriote, compte désormais deux euros à valeurs distinctes…) ; dette publique approchant 90 % au point qu’au premier jour de chaque année sa charge obère plus du tiers d’un budget dont les fixités interdisent tout gouvernement véritable des affaires de l’Etat ; déconvenue des mesurettes visant à redresser des comptes sociaux en perdition ; délabrement des principaux services publics, tels celui de "l’Education" qui n’est même plus au niveau d’une garderie nationale, la Justice, la Police, l’Armée ; désespoir rampant d’une population dont les plus jeunes n’attendent de salut que dans la fuite à l’étranger, décomposition sociale accrue par des violences multiples, des tensions communautaires désormais omniprésentes et la croissance multiforme de l’insécurité, tout montre alentour que la France est en danger. Mais il y a pire : le danger est d’autant plus grand que, face à tant d’alarmes, le Président de la République donne l’impression de bricoler, inconscient des réalités, obnubilé par des recettes misérables ("faire payer les riches", ou s’en prendre à l’intéressement, dernier reste du projet gaulliste de participation), tandis qu’un gouvernement brouillon, à la fois bavard et mondain semble perdre jusqu’au sens du mot gouverner, laissant le pays glisser au chaos comme si, cette France qu’au fond d’eux-mêmes ces petits sires ne connaissent ni n’affectionnent, il importait peu qu’elle soit demain une nation ou un terrain vague livré aux bandes.

    François Mitterrand, dont s’inspire paraît-il François Hollande, avait su prendre la mesure des réalités en décrétant "le tournant de la rigueur de 1983" et en retirant l’année suivante le projet de loi sur le Service unique de l’Education qui avait jeté plus d’un million de personnes dans les rues. Aujourd’hui, son pâle épigone s’entête dans un projet de loi sur le mariage homosexuel qui à l’évidence devient l’abcès de fixation d’une population que son autisme ne peut manquer de révolter de plus belle. Aveugle et sourd aux cris des citoyens, il prend la responsabilité d’amplifier un mouvement de contestation qui a trouvé sa cause, ses porte-parole et sa dynamique et qui ne peut qu’aller s’amplifiant, les échauffourées du 24 mars dégénérant probablement en émeutes lors de la prochaine mobilisation de mai, qu’il nous importe de préparer d’ores et déjà. La situation de M. Hollande serait vite intenable si la "Manif pour Tous" devenait universelle, englobant toutes les contestations sociales autour d’une cause qui est en train de redonner à la droite française une parole et une capacité d’initiative qu’elle avait perdues depuis longtemps - et qui, retrouvant son passé archaïque, ce que l’on nommera les "valeurs" (valeurs morales, valeurs politiques, valeurs de gouvernement) se reconstitue à vue d’oeil sur les décombres d’une gauche futile, radoteuse et presque hébétée.

    Pour un gouvernement de Salut Public

    Le scandale Cahuzac, révélant le degré de cynisme et de corruption des affairistes de la gauche ou de la "droite" institutionnelle qui depuis plus de trente ans gouvernent la France sans avoir le souci de la servir et qu’un peuple étourdi reconduit comme si nulle autre perspective politique ne s’offrait, disqualifie toute une génération politique. Une nouvelle relève s’impose. Dans une telle conjoncture, le jeu des partis est dérisoire, déplorable et dépassé : l’urgence de l’heure est à la constitution d’un vaste front d’opposition à une gauche disqualifiée aux yeux de presque tous. L’obsolescence des clivages que les logiques partisanes entretiennent à droite au-delà de toute raison, l’élargissement constant de l’audience de Marine Le Pen, la radicalisation d’une partie de l’UMP, la résurgence d’une mobilisation chrétienne quelquefois radicale, mais féconde et prometteuse, que l’état-major de la "Manif pour Tous" se gardera de marginaliser pour maintenir l’unité du mouvement, tout montre que la droite française est à la croisée des chemins. Il se pourrait même envisager désormais de poser les bases d’un programme commun des droites lors des prochaines élections, et pour commencer lors des municipales de 2014. C’est dans cette perspective que s’inscrit le forum national que le SIEL organise les 12, 13 et 14 avril prochain à DOURDAN à l’occasion duquel se réuniront les patriotes de toutes sensibilités, souverainistes, gaullistes, membres de l’UMP ou du Front National, du MPF ou de DLR décidés a créer les conditions d’un Gouvernement de Salut Public, dernière chance de sortir la France des ornières où elle s’enfonce jour après jour sous nos yeux.

    - Paul-Marie COUTEAUX Président-fondateur du SIEL Administrateur du RBM
    - Karim OUCHIKH Président exécutif du SIEL Administrateur du RBM

    Voir sur le site sur SIEL

    http://www.actionfrancaise.net

  • Quand on pouvait s’exprimer librement en public

    Un lecteur de Contre-info a déterré un extrait d’une émission oubliée, passée sur Europe 1 le 17 mai 1990, et le met à notre disposition.

    Le thème de l’émission était « les historiens face au révisionnisme » avec comme invité principal le lamentable Vidal-Naquet. Il y a des interventions téléphoniques du Pr. Faurisson et de Monsieur Roques (dans l’extrait ici).

    En comparant avec la chape de plomb qui règne actuellement, on mesure la restriction des libertés qui a été opérée en quelques années…

    http://www.contre-info.com/

  • L’idéologie du genre : une anthropologie destructrice de l’identité

    « On ne naît pas femme, on le devient ».
    Ce postulat édicté, dès 1949, par Simone de Beauvoir, véritable symbole de la féminisation extrémiste, est devenu la pierre d’angle de l’idéologie du genre (gender, pour les Américains).
    En 2012, Polémia a publié plusieurs articles condamnant bien évidemment ce « lyssenkisme pédagogique » introduit dans les manuels scolaires. On trouvera les titres renvoyant auxdits articles en bas de page.
    La polémique, ouverte au moment de la rentrée scolaire de septembre dernier, s’est quelque peu apaisée, mais le « mariage pour tous », invention diabolique du gouvernement socialiste, a relancé la diatribe, avec les contre-manifestations que l’on sait de janvier et de mars.
    Abbon, contributeur, hélas irrégulier, de Polémia revient sur cette « théorie » qui, associée au « mariage pour tous », au mondialisme, à l’avortement, à l’homosexualité, à la PMA et à l’adoption mode socialo-homosexuelle, contribue à cette offensive d’humiliation de l’homme. polemia
    On sait que le mariage homosexuel, présenté par le gouvernement comme « le mariage pour tous » émane de l’idéologie du genre, concoctée dans le dernier tiers du XXe siècle par les universités américaines sous le nom de gender et importée chez nous par les instances de l’Union européenne dont elle inspire largement les directives. Mais connaissons-nous toutes les implications de cet ensemble de représentations collectives, inspiratrices des lois plus ou moins récentes sur la contraception, l’avortement ou la répression de l’homophobie ? Il vaut la peine d’étudier de près les origines et la doctrine constitutive d’une idéologie dont les implications transforment peu à peu nos existences sans que nous en soyons toujours pleinement conscients.

    Une anthropologie révolutionnaire
    À la base, l’idéologie du genre se présente comme une anthropologie révolutionnaire niant l’altérité sexuelle.Tirant la conséquence des conquêtes du féminisme qui ont ouvert aux femmes des possibilités de promotion jusque-là réservées aux hommes, Judith Butler et ses émules en déduisent  l’identité entre hommes et femmes, prétendant que les sexes sont de simples « constructions sociales » n’ayant d’autre fin que de justifier la domination des mâles. La notion d’égalité en droit qui inspirait le féminisme traditionnel est ici sublimée en revendication de similitude, sous prétexte que la différence des sexes a trop longtemps servi d’argument pour justifier la discrimination et l’assujettissement des femmes. Ainsi peut-on lire dans l’ouvrage phare de ce néo-féminisme radical : « Homme et masculin pourraient aussi bien désigner un corps féminin qu’un corps masculin ; femme et féminin autant un corps masculin qu’un corps féminin » (1). La division immémoriale de l’humanité entre hommes et femmes ne devrait donc rien à la nature mais tout à la culture et pourrait être éradiquée par l’action révolutionnaire. S’inspirant de la célèbre citation de Simone de Beauvoir : « On ne naît pas femme, on le devient », les néo-féministes radicales soutiennent que chacun peut s’inventer lui-même homme ou femme selon le rôle social ou l’orientation sexuelle de son choix, en dehors de tout déterminisme physique .D’après Monica Wittig, « Il s’agit de détruire le sexe pour accéder au statut d’homme universel » (2). Aussi devrait-on rejeter le terme de sexe pour le remplacer par celui de genre, plus neutre, désignant l’homme nouveau d’un ordre nouveau.
    On perçoit ici la nature idéologique de cette doctrine qui, poussant jusqu’à l’absurde la logique de l’idée, aboutit au déni du réel, ne laissant d’autre issue qu’un constructivisme abusif, au nom d’un messianisme délirant. Elle partage avec la gnose antique une haine de la création conduisant à un progressisme prométhéen, plus radical que le communisme dont le programme visait la suppression de la propriété privée : il est question, dans l’idéologie du genre, de rien moins que de transformer l’homme.

    L’ennemie de la famille et de la religion
    Contrairement aux idéologies qui ont assombri le XXe siècle, le genre ne se réclame pas de la science, dont les récentes découvertes touchant les chromosomes XX féminins et XY masculins, ou les hormones mâles et femelles, ou encore le phénotype déterminant les organes de la reproduction n’apporteraient qu’un démenti à son propos. L’idéologie de la désexualisation de l’humain procède d’une démarche purement philosophique apparentée à l’école de la déconstruction popularisée par Derrida et Michel Foucaud. Ces penseurs spéculaient sur un réel social fluide, sujet à perpétuelle contestation car toujours soupçonné de compromission avec le pouvoir, qui serait maléfique par définition. Ainsi la famille patriarcale, théoriquement conçue chez saint Paul comme un foyer d’amour dans une perspective chrétienne, se voit contestée en tant que matrice de toutes les oppressions, le pouvoir du mari préfigurant celui du patron. La lutte des sexes serait le prélude à la lutte des classes : thèse formulée par Engels en 1884.
    S’attaquant à la famille, comme tous les totalitarismes qui l’ont précédée, l’idéologie du genre prend nécessairement pour cible la religion, fondatrice de l’institution du mariage et garante de la pérennité familiale. L’Eglise catholique est particulièrement visée sous l’accusation de propager une morale sexuelle : sacrilège pour des genderistes concevant la liberté sexuelle comme le paradigme de toute liberté ! Leur acharnement ne vient pas seulement de ce que les prêtres valorisent la vertu de chasteté, il est peut-être plus motivé encore par la condamnation de l’homosexualité que le catéchisme qualifie de comportement intrinsèquement désordonné.
    Nous touchons là un point nodal de l’idéologie du genre : puisqu’il n’existe ni dualité des sexes ni tabou sexuel, l’idéologie du genre en déduit l’équivalence des orientations sexuelles. Aussi le nouveau féminisme radical, qui n’a plus beaucoup de rapport avec le féminisme d’autrefois, uniquement préoccupé d’égalité entre hommes et femmes, cible-t-il prioritairement son action revendicative sur la parité des hétérosexuels et des homosexuels. Cette croisade d’un type nouveau suscite des raffinements de distinctions sexologiques portant le nombre de pratiques sexuelles à cinq, toutes aussi légitimes les unes que les autres, si bien que la bonne vieille hétérosexualité de nos ancêtres en vient à paraître bien minoritaire face aux homosexuels féminins, aux homosexuels masculins, aux bisexuels et aux transsexuels. Bravant l’étonnement du vulgaire face à une théorie focalisée sur les intérêts d’infimes minorités de l’espèce humaine, les tenants de l’idéologie du genre lui ont accolé le terme de « queer theory ». Ces revendications portent sur les moyens de normaliser l’homosexualité : par la répression de l’homophobie, la reconnaissance légale du mariage des couples invertis, enfin, l’encouragement aux techniques destinées à pallier la stérilité des couples de même sexe (procréation assistée comportant fécondation in vitro grâce aux donneurs de sperme et d’ovule, gestation pour autrui, en attendant l’utérus artificiel qui n’est pas encore au point). Ces pratiques, hasardeuses et coûteuses, génèrent une nouvelle forme de prostitution et de marchandisation du sexe avec le recours à des mères porteuses payées et les ventes de sperme ou d’ovule. La légalisation du mariage homosexuel entraîne par ailleurs un bouleversement du Code civil du fait qu’il brouille la filiation en raison de la banalisation des familles à deux mères et un père virtuel, ou à deux pères et une ou deux mères, ces termes devant désormais être remplacés par celui de parent.

    Les paradoxes du genre
    On ne peut manquer d’être frappé par l’attitude paradoxale des tenants de l’idéologie du genre qui, d’une part, se mobilisent pour assurer la fécondité des paires homosexuelles, et, d’autre part, militent pour la contraception et l’avortement quand il s’agit de couples hétérosexuels. Les idéologues du genre s’efforcent de déconstruire la maternité, comme ils s’efforcent de déconstruire le mariage, niant l’existence de l’instinct maternel à l’instar de Madame Badinter, laquelle prétend que l’amour maternel est d’invention récente. La grossesse et l’allaitement, en effet, singularisent outrageusement les femmes dans une humanité que les genderistes rêvent uniforme et homogène. Leur propagande, présentant l’avortement comme un droit au nom d’un individualisme confinant au nihilisme, s’est peu à peu imposée à l’Union européenne dont les 27 Etats ont presque tous adopté des lois autorisant le meurtre des enfants à naître « dépourvus de projet parental », en dépit des dégâts psychiques et physiques induits sur la mère.
    Autre paradoxe : les genderistes n’ont pas de mots assez durs pour stigmatiser l’Eglise, accusée de discriminer et d’asservir les femmes, alors que nulle religion au monde n’a porté à un aussi haut degré la dignité des femmes dans leur spécificité, notamment par le culte de la Vierge Marie, mais elles restent muettes devant le traitement que l’islam inflige aux femmes ainsi, d’ailleurs, qu’aux homosexuels, férocement réprimés en pays de chariah. L’infériorité de la femme est pour le musulman un dogme incontournable inscrit dans le Coran (Sourate IV, verset 34) et dans de nombreux hadiths ; il figure même dans la Déclaration des droits de l’homme musulman rédigée au Caire en 1990 sous l’égide de la Conférence islamique, ce qui laisse peu augurer d’une évolution du monde musulman sur ce point. Cette base théologique justifie la condition d’éternelle mineure de la musulmane, laquelle n’échappe jamais à la tutelle masculine, qu’il s’agisse de son père – lequel la marie autoritairement, à un âge précoce – ou qu’il s’agisse de son époux, voire de son fils en cas de veuvage. La polygamie, catastrophique pour l’éducation des enfants, la répudiation arbitraire par le mari, la lapidation des femmes accusées d’adultère qui ne peuvent guère se justifier devant des cadis attachant à leur témoignage une valeur deux fois moindre qu’à celui des hommes, figurent parmi les innombrables brimades infligées à la musulmane dont l’infériorité est symbolisée par le port du voile, « cette étoile jaune de la condition féminine », selon l’expression de l’Iranienne Djavat Tchadortt. En définitive, la femme musulmane, frappée d’impureté à partir de la puberté, n’est valorisée que par la maternité que l’islam instrumentalise en vue du djihad. La déclaration adressée à l’ONU de Boumedienne aux diplomates occidentaux est sans équivoque : « Nous vous conquérerons par les ventres de nos femmes. » Cette menace s’inscrit dans une longue tradition dont un hadith fait foi : « Epousez des femmes aimantes et fécondes : je veux par vous dépasser les nations en nombre. »

    Idéologie du genre et mondialisme : même combat
    L’indulgence des néo-féministes radicales pour l’islam n’est paradoxale qu’en apparence. Si l’on creuse l’analyse, on s’aperçoit que le genre s’intègre dans un complexe idéologique où l’antiracisme joue un rôle déterminant ; il obéit à une métapolitique de la diversité qui interdit la discrimination entre hommes et femmes, entre hétérosexuels et homosexuels, entre immigrés et autochtones. Le drapeau arc-en-ciel symbolise le nouvel idéal qui veut juxtaposer sans exclusive les communautés, s’interdisant de les unifier autoritairement dans le cadre d’une nation ou d’un Etat. Cette métapolitique aboutit au cosmopolitisme assignant à tout individu les mêmes droits, où qu’il soit, quelle que soit son origine ethnique et son orientation sexuelle, dans un monde abolissant la distinction entre l’étranger et le citoyen de souche, où, à terme, les Etats seraient abolis. On désigne aussi cette nébuleuse idéologique du mot de « mondialisme » défini par le Robert comme « une approche des problèmes  politiques, économiques, sociaux dans une optique mondiale et non nationale ». Telle est bien, en définitive, la logique de l’idéologie post-féministe du genre qui favorise la stérilité des Occidentaux mais ferme les yeux sur le natalisme des immigrés : elle apparaît ainsi comme le meilleur agent du « grand remplacement », terme par lequel Renaud Camus désigne l’entreprise mondialiste de destruction des nations par l’immigration-invasion de manière à faciliter la gouvernance de l’hyperclasse mondiale sur des populations réduites à l’état de consommateurs interchangeables, esseulés, privés d’identité, d’histoire, de repères moraux et donc d’ambition politique. Un « meilleur des mondes » dont Aldous Huxley nous a offert la terrifiante anticipation. Nous avons bien des raisons de contester la politique de l’Union européenne, laboratoire du mondialisme, dont une directive concerne, pour la France, le mariage homosexuel : aujourd’hui comme dans un passé qui n’est pas si lointain, l’UE prétend nous imposer la pseudo-éthique du genre dont les conséquences pourraient conduire à des lendemains qui déchantent, car, selon l’avertissement de Roland Hureaux, « l’idéologie est la plus grave maladie qui puisse affecter le politique » (3).
     Abbon 3/04/2013 http://www.polemia.com
    Notes:
    1)      Judith Butler, Gender Trouble and the Subversion of Identity, New York, 1991.
    2)      Monica Wittig, La Pensée straight, Paris, 2001.
    3)      Roland Hureaux, Les hauteurs béantes de l’Europe, 1999.

    Voir aussi :

     Luc Chatel, Judith Butler et Eric Fassin, prix Lyssenko 2012 pour la promotion de la théorie du genre
    Théorie du genre : Différence sexuée et orientation sexuelle, ne pas tout confondre
    Contre la théorie du genre au baccalauréat
    Rentrée des classes : histoire, morale, shoah, théorie du genre, le point sur les problèmes de fond
    Théorie du genre : destituer l’homme de son humanité
    Quand le marché sacralise les déviances
    Mariage homo et déconstruction de l’homme
    Mais où sont passés les garçons? 

  • Le billet du Prince : LA FRANCE SOUVERAINE ?

    Cet après midi, nous avons écoute, la Princesse et moi, sur Radio Classique, la Passion selon Saint Jean de Jean Sébastien Bach. A l’image de ceux qui ont su exprimer cette Passion, la France conserve le souvenir de ce qu’elle fut, souveraine, belle. Elle rayonnait par sa culture et ses arts.

    Son industrie et son agriculture étaient enviées ou citées en exemple et le bras armé de sa diplomatie était respecté. La langue diplomatique était alors le français.

    Aujourd’hui, la France oubliée dans les limbes, la France moquée par la presse internationale, ne provoque aucune réaction de la part du "château" qui s’entoure d’une "barbe à papa" au centre de laquelle il a fait son cocon. Il ne peut ni ne veut entendre, voir ou dire. Et une grande majorité de la France commence à percevoir sa honte, sinon sa peur.

    Pourtant notre pays peut et doit, tel le phoenix, renaître de ses cendres. Si l’on ne peut compter sur ceux qui tiennent les commandes du bateau ivre, encore, toujours et trop occultés derrière un rideau de fumées, du moins, nous Français pouvons, nous devons compter sur nous même, sur nous seuls.

    En dépit du pouvoir de ceux qui pourraient le souhaiter pour eux même, en dépit des chiffres, en dépit des prédictions des Cassandre, notre pays est encore riche. il peut redevenir puissant et briller de toute sa souveraineté retrouvée grâce aux peuples de France, aimé et respecté de nos amis dans le monde, car ils existent. Certes les Français sont riches en projets politiques, culturels, scientifiques et technologiques, témoignage de la pluralité de cette belle terre et porteurs de leurs espérances. Ne laissons pas ces trésors disparaître dans les égouts de l’Histoire. Ne laissons pas l’Histoire se répéter comme en 1789, lorsqu’il s’était agît de faire évoluer une société bloquée par les normes et les privilèges, pour accomplir les mutations nécessaires et urgentes et permettre à la société d’évoluer, de croître et de vivre. Le redressement d’une société se bâtit par la base et sur des fondements : l’éducation, l’instruction, la culture et le sens de la solidarité. Habilement, les "grands ordonnateurs" tentent d’enfermer l’enseignement dans une caserne dont ils auraient obstrué fenêtres et portes. Sans contact avec l’extérieur, avec la vie. Chaque individu risquerait d’être, à son insu, formaté idéologiquement, et plus il est jeune, fragile et malléable, plus cela deviendrait sans retour.

    Interrogeons-nous sur les raisons des échecs scolaires croissants. Inconsciemment les jeunes attendent sans doute autre chose. Ils voudraient peut être, sans encore le savoir, que l’enseignement mobilise en eux les fondements archétypiels du monde intérieur de l’être, trop souvent rejetés par leurs "mentors". L’âme se nourrit de l’Esprit, mais également du monde extérieur. Celui-ci cultive l’image dans la beauté. Celle-ci épouse l’infini variété des rythmes naturels en les combinant selon les lois de la création.

    En parallèle nous subissons une révolution culturelle sans précédent, mais révolution sans réflexion profonde qui nous permet d’abolir le temps et l’espace et qui peut, de ce fait perturber, bouleverser celui qui n’y prend garde et se croit sans souci. La "toile" peut devenir outil merveilleux de créativité, de libération des contraintes ressenties obsolètes. Mais n’oublions jamais que la machine est faite pour l’Homme et non l’inverse. Comme il est facile de considérer passéiste tout ce qui, par un passé encore récent, indiquait des socles fondamentaux à notre société.

    Pourtant cet environnement ne saurait être que provisoire, passager. Et après ? Quel avenir ? Le rôle fondamental du pouvoir devrait être d’agir afin que l’avenir puisse s’ouvrir à la vie, et que l’être humain, "animal social" et s’il s’en donne la peine, sociable, puisse exercer sa responsabilité dans la vie de la cité et que chacun redevienne Seigneur en son domaine, dans les compétences qui lui sont siennes. Le pouvoir devrait avoir pour mission première de maintenir l’unité du pays et que chaque citoyen retrouve une pleine confiance en la justice. L’Etat n’a pas à s’impliquer dans les questions sociétales, alors qu’il ne fait pas ce pour quoi il existe : rétablir l’équilibre dans les finances publiques, faire baisser le chômage, relancer la croissance et veiller à la sécurité intérieure et extérieure de notre pays.

    Tous nous sommes conscients que les dépenses engendrées par le pouvoir sont en constante inflation et alourdissent la dette publique. Mais quel homme politique aurait le courage de supprimer ce que Napoléon avait instauré, l’inamovibilité des fonctionnaires, car le clientélisme politique s’effarouche lorsqu’on touche à l’obésité de la fonction publique, pour lui substituer des employés d’entreprises privées comme au Canada. Il faut, certes, du courage et du temps pour surmonter la déficience des forces de Sisyphe qui poussait son rocher jusqu’au sommet de la montagne (d’après la mythologie grecque). Si l’Etat nous montrait l’exemple et la voie à suivre,je ne doute pas que nous serions nombreux à l’aider pour supprimer les freins et les privilèges afin que le bateau France poursuive droit son cap. Par ailleurs la France terre d’asile, terre des droits de l’Homme est, tout comme l’Europe, prise actuellement en tenaille, entre son hospitalité, son respect de la liberté d’autrui et la nécessité urgente de ne pas mettre son identité propre en péril. On demeure stupéfait de constater l’importance accordée à l’islam eu Europe, terre de civilisation chrétienne, alors que l’on connait les paroles d’un Emir qui déclare haut et fort que l’Europe sera bientôt convertie à l’islam, toute l’Europe... L’implacable décision d’éliminer toute religion en France, d’obliger tout un chacun au nihilisme qu’implique la laïcité, serait-elle d’ouvrir grandes les portes à une seule religion, la charia ?, car la nature a horreur du vide.

    Louis XIV écrivait : "Délibérer à loisir sur toutes choses importantes et en prendre conseil de différentes gens n’est pas, comme les sots se l’imaginent, un témoignage de faiblesse ou de dépendance, mais plutôt de prudence et de solidité. C’est pourquoi je déterminerai un jour de chaque semaine, auquel ceux qui auraient pu me parler ou me donner des mémoires, auraient la liberté de venir dans mon cabinet et m’y trouveraient précisément appliqué à écouter ce qu’ils désireraient me dire."Je souhaiterais que ceux qui nous gouvernent puissent prendre exemple sur ce Roi qui a su donner tant de lustre à La France.

    Aujourd’hui on finit par reconnaître que ce Roi tant décrié a au moins donné à la France, ce qui lui permet de survivre : des palais dénommés furtivement et étrangement, les "ors de la République" et les musées de Versailles et du Louvre visités par les touristes du monde entier... Nul n’est parfait, c’est pourquoi "sans cesse sur le métier remettez votre ouvrage".

    Henri Comte de Paris Duc de France - IMRF

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  • Écrire contre la modernité (entretien avec Pierre Le Vigan)

    Plusieurs lecteurs m’ont posé des questions à propos de mon dernier livre Écrire contre la modernité, oralement ou par écrit. J’ai regroupé ces questions (ou remarques) sous  un nom collectif : les lecteurs curieux (ou L.L.C.).

     

    L.L.C. : Dans votre dernier livre, vous relativisez la continuité entre les Lumières et la Révolution française. Vous êtes ainsi au rebours d’une analyse qui, généralement située à droite, souligne la continuité entre les deux. Cela mérite quelques explications.

     

    Pierre Le Vigan : Je souligne effectivement que les hommes des Lumières qui étaient encore vivants en 1789 ont été généralement hostiles à la Révolution, à l’exception de Condorcet, qui en sera toutefois victime comme Girondin. La plupart des hommes des Lumières encore vivants ont été hostiles non seulement au moment 1793 – 94 de la Révolution mais aussi dès 1789. Dès ce moment, la violence est le moteur de la Révolution, ce qu’ils refusent, qu’il s’agisse de la « prise de la Bastille » qui fut en fait le massacre de ses défenseurs (malgré la parole donnée), ou des journées des 5 et 6 octobre 89, où le roi est ramené de force à Paris. En ce sens, la Révolution est un bloc comme le disait Clémenceau. Or, l’esprit des Lumières ne se reconnaît pas dans cette rupture avec l’ordre ancien alors qu’il aspire de son côté à un bien s’instaurant progressivement, à une sorte d’ordre naturel fondé sur la raison qui déploierait son harmonie, ce qui est incompatible avec les soubresauts sanglants qui constituent le rythme de la Révolution française.

     

    En réalité, le principal lien qui existe entre la Révolution française et les Lumières se fait à travers Rousseau. Mais on le sait : Rousseau occupe une place à part dans les Lumières. C’est l’un des sujets que j’aborde dans le livre. L’idéologie sommaire dite des Lumières n’a pas grand-chose à voir avec la réalité complexe et multiforme de penseurs trop importants pour être réductibles à un courant idéologique comme Rousseau, Diderot ou  Voltaire.

     

    S’il y a continuité entre un homme rattaché aux Lumières et la Révolution, c’est donc de Rousseau qu’il s’agit. La continuité existe dans la mesure où Rousseau ne croît pas à la possibilité d’un mouvement continu de progrès mais croît dans le constructivisme. En ce sens, sans préjuger de l’attitude qui aurait été la sienne, il est en phase avec l’esprit de la Révolution qui prétend tout reconstruire, et là, il y a continuité entre 1789 et 1794, les  principales différences entre la phase 1789 et la phase robespierriste de 1794 étant le passage d’une Terreur spontanée et « populaire » (au pire sens du terme, c’est-à-dire populacier) à une Terreur d’État, mais aussi le passage de la  souveraineté nationale au projet d’une souveraineté populaire. L’autre lien très fort entre Rousseau et la Révolution française est l’exaltation de l’esprit antique et tout particulièrement de la notion de vertu civique. La Révolution française se veut exemplaire et romaine. Ici, il y a continuité entre l’« antiquo-futurisme » de Rousseau et la Révolution française.

     

    La continuité s’établit donc pour des raisons que l’on peut trouver « sympathiques » telles l’esprit civique et le culte du citoyens et pour des raisons très contestables à savoir l’aspiration non seulement à une société bonne mais à une société totalement bonne, absolument bonne, ce qui conduit inévitablement au totalitarisme, comme tous les rêves d’absolu. En ce sens, Marcel Déat n’avait sans doute pas complètement tort de voir une continuité entre Rousseau, la Révolution française, Robespierre (qu’il admirait et approuvait), et le national-socialisme allemand (dont Déat voyait bien les aspects modernistes – la « Révolution brune » – mais sous-estimait sans doute les aspects réactionnaires, eux aussi présents). Il aurait pu ajouter le bolchevisme. Rousseau est donc l’exception qui confirme la règle : il est le seul penseur des Lumières en continuité d’idées avec la Révolution française. Mais il l’est en partie pour des raisons contestables comme la volonté d’une table rase et d’un retour artificiel  à un passé antique mythifié. À ce sujet, il faut noter qu’il serait difficile de défendre Rousseau et de voir avec sympathie les mouvements localistes et anticentralistes comme la Fronde ou la révolte vendéenne.

     

    L.L.C. : À vous lire, vous paraissez beaucoup plus proche des auteurs républicains tels Alain Finkielkraut et Éric Zemmour que des révolutionnaires-conservateurs de la « Nouvelle Droite ». Vous paraissez éloigné des communautariens et proche des assimilationnistes. En d’autres termes, vous semblez un défenseur de l’idée stato-nationale. Qu’en est-il ?

     

    P.L.V. : Dans la notion d’État-nation, c’est la nation qui doit être essentielle. L’État doit être un outil au service de la nation. Je ne crois pas que l’on puisse se passer de l’État. Attention : moins d’État, ce peut être plus de bureaucratie. C’est justement d’ailleurs ce qui se passe où nous souffrons d’une impuissance de l’État sur les grandes questions, impuissance mêlée à une omniprésence des pouvoirs publics dans nombre de domaines où ils ne devraient pas être présents tel la sécurité routière où s’impose une réglementation tatillonne attentatoire aux libertés les plus élémentaires. Dans la construction européenne d’aujourd’hui, la nation est la grande perdante car le lien entre l’État et la nation est perdu. Pseudo-régionalisme de féodalités locales d’une part, bureaucratie bruxelloise de l’autre, la nation s’affaisse au milieu de cela. L’État français n’est plus apte qu’à appliquer des réglementations européennes.

     

    Il est tout à fait exact que je suis hostile à la déconstruction des nations. Qu’il y ait des identités locales, en Catalogne, en Bretagne, ailleurs, cela ne doit pas se traduire par un monolinguisme régional, ni même par l’obligation administrative d’un bilinguisme. Le niveau national est le moyen de peser plus lourd dans la mondialisation que le niveau régional. Il faut préserver ce « niveau » (le terme n’est pas élégant mais a le mérite d’être clair) national.  En ce sens, je salue le grand travail unificateur de la République, à la fois la Ire République et la IIIe République, ou celui réalisé en Turquie par Mustapha Kemal. Ce n’est d’ailleurs pas l’école républicaine de Jules Ferry qui a fait disparaître les particularismes locaux, c’est la modernité technicienne et c’est pourquoi les particularismes n’ont vraiment disparu qu’après 1945. Il faut lire sur ce sujet Jean-Pierre Le Goff, La fin du village. Une histoire française (Gallimard, 2012). De même, dans les pays de l’Est de l’Europe, la modernité capitaliste a plus détruit les cultures locales en vingt ans que ne l’a fait le communisme, pourtant dévastateur et meurtrier, en quarante-cinq ans.

     

    Si je défends la nation, c’est aussi parce que c’est encore le cadre le mieux adapté à l’exercice de la démocratie. C’est pourquoi je rends hommage à  des figures républicaines classiques bien qu’oubliées tel Jean Prévost. Pour ses positions politiques tout comme pour ses qualités littéraires. « Il ne faut pas considérer l’auteur des Frères Bouquinquant, écrivait justement Roger Nimier, comme un écrivain mort trop jeune, qui n’a pas trouvé toute son audience, mais comme un prix Nobel en puissance et le maître d’une génération. » Je crois d’ailleurs beaucoup à la valeur d’exemplarité des esprits que l’on pourrait appeler « fermement modérés », dont Montaigne ou Jean Prévost sont  des exemples.

     

    La modernité est pernicieuse : c’est le refus des limites du réel, et c’est en même temps le rêve d’une fin de l’histoire. La modernité refuse la dialectique de l’histoire. Cela peut prendre la forme du rêve d’une société sans classes, ou d’une société sans races. Au fond, le projet du communisme et celui du libéralisme ont des points communs, à ceci près que dans l’homogénéisation du monde, le libéralisme est plus efficace que le communisme. Du reste, le communisme n’a eu qu’un temps, tandis que le libéralisme se porte bien. En outre, compte tenu de sa dimension idéologique, le communisme est (était) en effet obligé de faire des pauses, tandis que le libéralisme peut mener son projet sans obstacles, avec pragmatisme, en jouant à la fois des aspirations à l’égalité et des aspirations à cultiver les différences. Il s’agit bien entendu toujours de petites différences anecdotiques compatibles avec le grand marché mondial. Ainsi, le libéralisme est à la fois égalitaire – il n’accepte pas les reproductions de castes fermées – et communautariste – il souhaite des niches de consommateurs pourvu que celles-ci ne soient pas fondées sur des valeurs durables.

     

    Ce qui fait le caractère déraisonnable de la modernité, c’est donc la croyance au Progrès, et non simplement à des progrès. De là vient aussi l’idée qu’il n’y a pas de nature de l’homme, que l’on peut donc tout faire de l’homme et avec l’homme, que l’homme est totalement malléable. Cette idée est très dangereuse et nie tout ce que nous apprend l’éthologie humaine. L’homme n’est pas un animal, mais il reste un animal. Tout n’est pas possible avec l’homme, sauf à le rendre fou et malheureux. « Nous n’avons pas envie de légitimer des sociétés qui font n’importe quoi avec l’homme » écrit justement Chantal Delsol.

     

    L.L.C. : Y a-t-il des auteurs que vous regrettez de ne pas avoir évoqué ?

     

    P.L.V. : À chaque jour devrait suffire sa peine. Vieille sagesse que nous avons souvent du mal – moi le premier – à accepter. On rêve toujours d’un livre meilleur, plus complet, mieux équilibré, plus abouti. Les ouvrages totalement réussis sont rares. Sur le seul plan des auteurs dont je n’ai pas parlé, il y a bien entendu des manques qui – si je puis dire – me manquent. Il est ainsi bien évident que Hannah Arendt me paraît un auteur contre-moderne fondamental, qu’Heidegger est très présent dans la problématique moderne/contre-moderne sans qu’il fasse l’objet d’un de mes chapitres, que Günther Anders lui aussi me paraît important, et est en outre très attachant – il faut le dire car nous sommes tous aussi des êtres de subjectivité. J’apprends aussi toujours beaucoup à la lecture de Massimo Cacciari. Je sais bien aussi que Drieu la Rochelle, sans être philosophe, était passionné par les questions de la modernité, et que sous divers angles, il les a abordées, non sans cruauté (d’abord avec lui-même). Je ne méconnais pas que Frédéric Schiffter est à l’origine d’une critique absolument radicale des arrières-mondes – et l’idéologie du progrès en fait partie, tout comme Clément Rosset (sur lequel j’ai écrit dans Éléments) a pu démontrer – ou tout simplement rappeler – que Platon avait inventé le moyen de penser à autre chose qu’au réel. Bref, la contre-modernité est vivante et ne cesse de s’alimenter de nouvelles figures. Car au vrai elle relève de l’insurrection de la vie contre le machinal. De la chair contre l’intellect, de l’âme contre l’esprit. C’est dire aussi que la contre-modernité ne se débarrassera jamais de la modernité.

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  • La condamnation politique du colonel Bastien-Thiry

    Voilà 50 ans, le colonel Bastien-Thiry, condamné à mort par un tribunal d'exception, était fusillé au fort d'Ivry.
    Le 11 mars 1963, vers 6h30 du matin, au fort d'Ivry où souffle un fort vent d'hiver, un homme vêtu d'un uniforme de l'armée de l'Air marche, chapelet à la main, vers un poteau d'exécution. Un soldat s'approche pour lui lier les mains, mais le lieutenant-colonel Jean-Marie Bastien-Thiry refuse de se laisser bander les yeux. Il regardera la mort en face, comme il l'a fait au long de son procès en prenant sur lui l'entière responsabilité de l'attentat commis contre le général De Gaulle au Petit-Clamart, le 22 août 1962(1). Le peloton d'exécution tire. Coup de grâce. À 6h42, le dernier fusillé de l'Algérie française est mort, laissant derrière lui une veuve et trois fillettes.
    « Nous ne sommes ni des fascistes ni des factieux mais des Français nationaux, Français de souche ou Français de cœur, et ce sont les malheurs de la Patrie qui nous ont conduits sur ces bancs », avait-il affirmé dans la déclaration faite devant la Cour militaire de justice, le 2 février 1963, en exposant les motifs qui poussèrent à agir les conjurés du Petit-Clamart.
    Dans cette déclaration, le colonel rappelle, entre autres, comment après s'être solennellement engagé à maintenir la présence française en Algérie, le général De Gaulle s'est parjuré en abandonnant le territoire et les populations au FLN. Il dénonce l'inaction des autorités devant les enlèvements et meurtres de Français et le « véritable génocide, perpétré contre des Musulmans qui avaient cru en la France », accuse le Chef de l’État d'avoir saboté la « paix des braves » en livrant Si Salah, et d'avoir employé « tous les moyens pour briser la résistance nationale en Algérie », en particulier la toiture, « selon des méthodes analogues à celles de la Gestapo nazie ». L'inculpé s'érige ainsi en procureur face aux juges du tribunal instauré par celui qu'il accuse et qui, maître du pouvoir, a déjà montré que le sang d'autrui ne l'émeut pas.
    Cette Cour de justice militaire qui va condamner le colonel Bastien-Thiry illustre parfaitement ce qu'est une justice d'exception - l'inverse de la justice. Créée en juin 1962 par le Garde des Sceaux, Jean Foyer, avec le concours du ministre des Armées, Pierre Messmer, elle succède au Haut- tribunal militaire, « coupable » de ne s'être pas montré assez docile en ne condamnant pas à mort le général Salan, chef de l'OAS.
    Le Conseil d'Etat condamne la justice d'exception
    Pour la présider, De Gaulle cherche un homme sûr ; son choix se porte sur le général de Larminat, l'un de ses premiers compagnons en 1940, mais celui-ci, écartelé entre l'honneur et sa fidélité gaulliste, préfère se suicider plutôt que de devenir « le Fouquier-Tinville de la Ve République », comme il le dit. On le remplace par le général Gardet.
    Les avocats, en signe de protestation, se présentent sans leur robe devant ce tribunal politique, qui ne siège pas au Palais de justice mais au Fort-neuf de Vincennes. Cela ne l'empêche pas de condamner à mort Roger Degueldre, chef des commandos Delta de l'OAS. Le 28 juin 1962, entre le feu du peloton qui le blesse sans le tuer et les six coups de grâce tirés par un sous-officier paniqué, l'ancien lieutenant du 1er REP met onze longues minutes à mourir.
    Or, le 19 octobre, coup de théâtre ! À la fureur de l’Élysée, le Conseil d’État annule l'ordonnance instituant la Cour militaire de justice, en raison de « l'importance et de la gravité des atteintes que l’ordonnance attaquée apporte aux principes généraux du droit pénal en ce qui concerne notamment la procédure qui y est prévue et l'exclusion de toute voie de recours ». Le tribunal d'exception est condamné.
    Le gouvernement imagine alors de créer une Cour de Sûreté de l’État qui se saisira désormais des affaires relevant précédemment de la Cour militaire de justice ; mais pour laisser à la nouvelle institution le temps de s'installer, un texte de loi proroge la Cour militaire pendant 40 jours(2). C'est suffisant pour que, malgré le désaveu du Conseil d'Etat, De Gaulle lui confie le procès du Petit-Clamart, au terme duquel quatre inculpés sont condamnés à mort : Lajos Mar-ton (par contumace), Jacques Prévost, Alain Bougrenet de la Tocnaye et Jean-Marie Bastien-Thiry. Ce dernier seul est fusillé, Prévost et Bougrenet de la Tocnaye ayant été graciés.
    Mais cette exécution, ordonnée pour satisfaire une vengeance et organisée, écrit alors Jérôme Gauthier dans Le Canard Enchaîné, avec un « luxe de clandestinité », ressemble jusqu'au bout à un assassinat judiciaire. « Pourquoi tant de précautions ? » demande ce journaliste. « La vraie pudeur est fière. C'est la honte qui rase les murs. Une certaine justice aussi, semble-t-il... De plus audacieux que moi croiront peut-être pouvoir en conclure qu'une justice qui tend un rideau de gendarmes entre le regard des consciences et ce qu'elle est en train de faire au pied du mur, y fait quelque chose de pas propre... »
    Hervé Bizien monde & vie 19 mars 2013
    Cf. M &V n° 864, septembre 2012.
    Cf.Jacques Isorni, Jusqu'au bout de notre peine, La Table ronde, 1965. Comble d'ignominie, au cours du procès la Cour militaire de justice condamnera M" Isorni, avocat de Jacques Prévost, à une peine de trois années de suspension.