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culture et histoire - Page 848

  • Maurras en son mystère

    Cet article comme les précédents en lien ci-dessous sont préparatoires à notre colloque Charles Maurras, l'homme de la politique, qui se tiendra à Marseille samedi 21 avril [voir plus loin].   LFAR

    Serait-il possible un jour de comprendre Maurras à sa vraie lumière ? Cette lumière dont il a dit, dès 1894, qu’il lui avait confié ses mystères, à vrai dire, son mystère. 

    Comment le comprendre ? S’intéresser à l’homme et à son œuvre seulement en passant ne suffit pas. Aujourd’hui, d’ailleurs, il en est fort peu qui peuvent prétendre en avoir une connaissance certaine. Qui, en vérité ?

    Une démonstration claire

    Et pourtant, l’œuvre est là, considérable, de même que parle, au-delà de la mort, la vie de l’homme, d’une intégrité exemplaire, totalement donnée et « sans retour », comme il le dira lui-même, au combat d’intelligence politique qu’il a mené plus de cinquante ans durant pour son pays, pour la seule France.

    1945700053.jpgQue voulait-il ? Persuader les Français du caractère néfaste des institutions dont ils étaient censés s’être dotés en libres citoyens pour, paraît-il, l’édification des peuples et l’admiration éternelle des siècles, à la suite d’une mirifique révolution qui aurait changé tous les paradigmes politiques. Voilà ce qu’il a contesté de manière continue et invariable. Il a poursuivi sans se lasser sa démonstration qu’il réitérait chaque jour dans une actualité aussi rigoureuse que parfaitement didactique et qui venait renforcer son appareil de preuves par autant d’évènements nouveaux. Son argumentaire était simple, direct, quoiqu’abondamment fourni de vues tant philosophiques et littéraires que politiques, historiques et sociales.

    L’établissement d’une République au nom de la Liberté, de l’Égalité et de la Fraternité, d’ailleurs toujours à reconstruire dans son idéal supposé parce que constamment déconstruite en raison de son inadaptation aux faits et aux nécessités du moment, relève, selon sa claire logique, d’un marché de dupes. Le pouvoir suprême, autrefois réservé et garanti par une institution permanente, historique, nationale et naturelle – ce qui n’empêchait pas les faiblesses et les désordres, mais ne les rendait pas inéluctables – est devenu, depuis, un lieu de conflits perpétuels aussi bien d’ambitions que d’idéologies dont les méfaits se répercutent à tous les autres niveaux de pouvoir et polluent la représentation du corps social. Il ne s’agit plus, partout, et à tous les degrés, que d’un pouvoir à prendre, à garder et, enfin pour tout dire, constamment à conquérir et reconquérir. Ce qui était et est encore présenté aujourd’hui comme une œuvre de libération n’a jamais été concrètement, au-delà des recompositions imaginatives en récits lyriques, qu’une lutte malsaine et souvent sordide pour le pouvoir. Toujours au détriment du peuple, malgré le discours officiel. Depuis la Constituante, les Français sont entrés dans cette lutte continuelle et institutionnalisée des partis dont ils n’échappent que par le césarisme ou par ce qui en tient lieu, la constitution d’un amas d’institutions bureaucratiques qui encadrent le citoyen de sa naissance à sa mort. Les libertés réelles, naturelles, familiales, régionales, professionnelles, éducatives, sociales ont toutes été confisquées au profit d’un État ou d’un para-État omnipotent et, en vérité, impotent. Cependant que ce même État qui s’occupe de former et de façonner l’électeur, remplit mal les hautes fonctions dont il devrait avoir en priorité la charge : la justice, l’ordre intérieur et la sécurité, la défense, la diplomatie.

    Plus qu’une raison, une sagesse

    Voilà ce que Maurras montre et démontre depuis son Enquête sur la monarchieen 1900, à l’orée du XXe siècle, jusqu’aux années 1950. Qui pourrait nier que cette dialectique reste vraie et plus que jamais d’une puissante actualité ? Le problème politique français est posé dans ses justes termes. Il convient de noter que Maurras se bat, d’abord, pour la liberté ; il préférait dire les libertés, lui le martégal, le provençal qui aurait tant voulu donner tout son essor au mouvement mistralien. L’autorité dans son esprit est la garantie effective des libertés ; elle n’a de sens que par rapport au bien commun ; l’État est le premier serviteur de la société. Bref, c’est exactement le contraire du mauvais portrait que ses adversaires – de toutes catégories – ont dressé de lui. Son nationalisme qui lui est tant reproché, ne se justifie que par le défaut de l’État qui ne remplit plus son devoir national.

    Avant guerre, il annonce la guerre qui vient, et dénonce l’impéritie d’un État républicain sans constance, livré à la démagogie, qui ne prépare pas la France à l’épreuve du feu. Après guerre, il dénonce le mauvais traité et voit se profiler une nouvelle guerre plus catastrophique encore… Des articles par milliers, des livres par centaines qui souvent reprennent les articles, le tout d’une pertinence toujours exacte et précise au point qu’elle exaspérait ses adversaires ; et dans le même temps, un combat intellectuel d’une étonnante vivacité contre les idées fausses qui détournent les esprits de l’appréhension des simples vérités politiques dont la France a un criant besoin ; car tel est son but, libérer les intelligences du carcan des idées toutes faites qui servent d’armature au régime. De L’Avenir de l’Intelligence au Dilemme de Marc Sangnier, du Voyage d’Athènes aux Amants de Venise, jusqu’aux mémoriaux de l’entre-deux guerres et de l’après-guerre, Au signe de Flore, Pour un jeune Français, c’est toujours dans ce même registre d’une limpide clarté et d’une haute tenue qu’il tente d’établir une sorte de doctrine de salut, face au triomphe « du Pire et des pires ».

    Plus qu’une sagesse, un mystère

    Parcourir cette œuvre en vérité, en comprendre le sens et la portée ne peut que susciter une profonde admiration. Et le mystère, dira-t-on ? Il réside dans le secret de cet homme qui est venu comme pour remplir une mission dans laquelle il s’est volontairement limité et comme enfermé, et qui laisse naturellement et surnaturellement un sentiment d’incomplétude et d’espérance déçue. De telle sorte que beaucoup l’en ont critiqué et certains se sont évertués à y ajouter leur synthèse ou leur correction. Ne fallait-il pas sortir de l’échec répété ? Puisque malgré le prestige de l’homme et le rayonnement de l’œuvre, une sorte de fatalité les a condamnés à ne pas réussir. À jamais ? C’est une grave question à laquelle l’homme a répondu, mais à sa manière. Étonnante, mystérieuse !

    C’est qu’un autre Maurras – autre et pourtant le même – apparaît et apparaîtra de plus en plus au fur et à mesure qu’il sera étudié et compris. En effet, à côté de son registre clair, Maurras a tenu, par ailleurs et simultanément, en registre caché, à proprement parler crypté, une « fabuleuse » partition – car il s’agit de fables – où le mystère de sa vie et de son œuvre se trouve recelé. Le commencement en fut écrit dès 1892 ; il dira dès 1889 – pour le centenaire de la révolution française – ; alors, il s’ingénie à écrire et publier des contes allégoriques, rassemblés en un premier livre Le Chemin de Paradis, dont la forme symbolique d’allure païenne répondait au christianisme dévoyé au nom duquel une certaine cléricature et tout un courant pseudo-spirituel prétendaient, à l’époque, animer la démocratie en invoquant l’esprit des évangiles, à la suite de ce qu’on appelle le ralliement à la République, ordonné par Léon XIII ; et dans ces contes dits païens, ces mythes, ces fabliaux, Maurras révéla en quelque sorte à l’avance le sort d’une telle politique et les conséquences désastreuses qu’elle entraînera pour la France et pour l’Église. Mais qui pouvait comprendre ? Il s’arrangeait même pour qu’on ne le comprît pas. Il y mit tout son art.

    Cependant, c’était bien la France catholique qu’il voulait convaincre ; c’est elle, la belle Dame de ses contes et de ses poèmes, celle qui a tout pour comprendre et qui ne comprend pas, à cause de ses mauvais conseillers qui prennent des allures doucereuses pour la leurrer et aussi parce qu’elle est mal mariée par l’État et par l’Église à un goujat qui la pille et qui la trompe, comme il est écrit dans Le Mont de Saturne.

    Alors quoi ? Il ne serait donc plus possible d’aller à Reims « en nom Dieu », au motif que ce serait interdit ? Eh bien, dira Maurras, qu’on y aille en nom « nature » et en nom « histoire » ! Autrement dit, s’il est interdit de faire le Roi en invoquant le Sacré-Cœur, faisons-le en invoquant Comte, Renan, Taine… Pourquoi pas ? Tel est le sens de ce petit conte de La Bonne Mort, publié en 1893 et republié, comme par hasard, en 1926…

    Les poèmes de Maurras, cryptés de la même façon, expriment, eux aussi, ce lancinant débat qu’il est obligé de mener avec la France bien-aimée, ses morts et ses vivants, cette France qui est faite pour réaliser le mystère de « l’intellection dans l’amour » et qui, à cause des sophismes funestes et fumeux que des perfides ont jeté sur sa vision du monde et d’elle-même, se refuse à la lumière qui lui ouvrirait le salut, le vrai Chemin de Paradis.

    « Je crois à la bonté des ombres éternelles.

    Là, les silencieux persuadent un jour

    Et, cendres du flambeau de tant d’heures fidèles,

    Dans le lit du regret font couronner l’amour. »

    Trop tard ?   

    Hilaire de Crémiers

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  • Les brigades internationales du Donbass par Georges FELTIN-TRACOL

    Chers Amis de Radio-Libertés,

    leshommeslibres-200x300.pngFrédéric Lynn est un homme de conviction à la plume talentueuse. Il a mis ses idées néo-eurasistes en pratique en ralliant vers 2014 – 2015 les forces séparatistes du Donbass. Il relate son expérience dans Les hommes libres (Éditions Bios, 2016, 416 p., 26 €).

    Ce militant nationaliste-révolutionnaire et solidariste normand profite de la dissolution de son mouvement par le trio malfaisant Hollande – Valls – Cazeneuve pour tenter l’aventure dans l’Est de l’Ukraine. Il apporte un témoignage à mille lieux des clichés partisans parisiens. Au fil des pages, on découvre effaré l’absence de filières de recrutement, l’improvisation sur place, la désorganisation permanente, la débrouillardise érigée en valeur cardinale, un pesant caporalisme contreproductif, des conceptions tactiques vieilles de 1945 sans oublier un alcoolisme très présent et quelques moments de détente cannabique. Les hommes libres est l’anti-Orages d’acier.

    L’un de ses aspects les plus intéressants porte sur la présence dans les rangs sécessionnistes du Donbass des volontaires étrangers. Officiellement, les républiques populaires de Lougansk et de Donetsk professent la nostalgie soviétique et un antifascisme conséquent. Or la réalité est bien plus complexe. Frédéric Lynn qui se bat d’abord dans les rangs d’Unité continentale, voit son groupe accueillir des « Espagnols [qui] étaient presque tous communistes. C’était ironique, relève-t-il : la plupart des Français étaient issus de milieux nationalistes ou assimilés, et les Serbes, eux, mélangeaient ultra-nationalisme, identité orthodoxe, et antifascisme titiste (p. 150) ».

    Outre l’évocation d’unités cosaques constituées « de soldats et de cadres de l’armée régulière russe, soit en congé, soit en retraite (p. 324) », l’auteur mentionne des Brésiliens, très lointains héritiers du mouvement intégraliste équatorial, et quelques improbables Étatsuniens. « Un volontaire texan chez les séparatistes pro-russes, tu dois en faire rager certains, ironise l’auteur (p. 310) ».

    Certains l’accuseront de dénigrements et verront dans cet ouvrage préfacé par Robert Steuckers une preuve supplémentaire de désinformation systématique puisque sa rédaction s’achève en mai 2016 à Los Angeles, Frédéric Lynn étant franco-étatsunien. On apprend par ailleurs qu’après une période de détention au Canada pour avoir guerroyé en Ukraine, l’auteur partit combattre les terroristes islamistes en Irak.

    Après le Katanga, le Biafra, le Liban et les Karens, des Français continuent à rechercher aux confins de l’Europe un destin dans l’un ou l’autre camp. Le romantisme politique n’est pas mort, Frédéric Lynn le prouve encore avec un détachement parfois amer.

    Bonjour chez vous !

    Georges Feltin-Tracol

    • « Chronique hebdomadaire du Village planétaire », n° 74, diffusée sur Radio-Libertés, le 13 avril2018.

    http://www.europemaxima.com/les-brigades-internationales-du-donbass-par-georges-feltin-tracol/

  • « Il y a un revival de l’Action Française »

    jeunesse-conservateur.jpg

    Image : AFP / Eric Feferberg

    Ils sont les fils spirituels d’Eric Zemmour et Elisabeth Levy. La politique, ils sont tombés dedans en manifestant, pour la toute première fois, contre le Mariage pour Tous. Depuis, ils ont lu tous les livres de Charles Mauras, fréquenté l’Action Française et pris un abonnement à Valeurs Actuelles. Dans son livre, Le vieux monde est de retour (éditions Stock), la journaliste Pascale Tournier dresse un portrait de ces « babys réacs » qui, à vingt ans à peine, parlent déjà comme des vieux. Interview.

    Vice : Qui sont ces « nouveaux conservateurs » auxquels vous consacrez votre livre ?
    Pascale Tournier : pour faire court, on pourrait dire que c’est la jeune génération qui a manifesté contre le Mariage pour Tous en 2012-2013. Battre le pavé contre la loi Taubira a représenté pour eux une école de formation politique. C’était un peu leur mai 1968 à l’envers. Puis en 2016, lors de la primaire de la droite, ils ont voté pour François Fillon – et sont d’ailleurs à l’origine de son succès. Depuis l’échec cuisant de leur candidat, et le retrait de la vie politique de Marion Maréchal-Le Pen, ils se sentent orphelins. Ils ne partagent pas tous les mêmes idées mais ont au moins deux marqueurs communs : ils sont contre l’ouverture de la PMA à toutes les femmes et défendent les Chrétiens d’Orient.
    Pour aiguiser ses armes contre le progressisme, cette génération a compris la nécessité de se structurer intellectuellement. D’où le revival observé de l’Action Française, qui depuis Charles Maurras a toujours été un lieu de formation pour les jeunes.

    La suite

    https://www.actionfrancaise.net/2018/04/14/il-y-a-un-revival-de-laction-francaise/

  • 1720 et 1763, deux dates essentielles et mal connues

    1720, ce fut la déroute de Law,, la peste de Marseille,  les premiers enlèvements d’enfants dans les rues de Paris.

    1763 c’est la victoire des jansénistes sur les jésuites, la défaite française dans la Guerre de Sept ans, les mensonges de Voltaire dans l’affaire Calas, la première expérience royale d’économie libérale.

    On le paye encore…

  • L'église soutenant les valeurs de la République est-elle Catholique ?

  • Histoire • En marge de l'affaire Maurras : Où Georges Pompidou voulait en finir avec le temps où les Français ne s'aimaient pas

    Au spectacle des manifestations de sectarisme paroxystique et de faiblesse de l'Etat qui ont abouti à l'exclusion de Charles Maurras des commémorations nationales 2018 - cent-cinquantième anniversaire de sa naissance - il nous était revenu à la mémoire les propos nobles, profonds et d'une particulière conviction, du président Pompidou, exprimant avec force sa volonté que l'on en finisse - après trente ans d'épreuves et de divisions -  avec le temps où les Français ne s'aimaient pas. On sait qu'utilisant cette expression, Georges Pompidou reprenait simplement le titre d'un ouvrage célèbre de Charles Maurras...   

    Mais le ton du président de la République d'alors, solennel et ferme, d'où se dégagent une réelle hauteur de vue et, en la circonstance, un patriotisme évident, s'apprécie d'autant plus qu'on l'écoute et qu'on le voit. Raison pour laquelle nous invitons nos lecteurs à regarder la vidéo qui suit. 

    Nous y ajoutons, au-dessous, ce que nous en avons dit.   

    « Le président Pompidou fit une sage et bonne action lorsque, répondant aux critiques de ceux qui lui reprochaient la grâce qu'il avait accordée à l'ex-milicien Paul Touvier, il déclara ceci qui devrait servir de charte aux Français d’aujourd’hui : « Notre pays depuis un peu plus de 30 ans a été de drame national en drame national. Ce fut la guerre, la défaite et ses humiliations, l'Occupation et ses horreurs, la Libération, par contre-coup l'épuration, et ses excès, reconnaissons-le. Et puis la guerre d'Indochine. Et puis l'affreux conflit d'Algérie et ses horreurs, des deux côtés, et l'exode de millions de Français chassés de leurs foyers, et du coup l'OAS, et ses attentats et ses violences et par contre-coup la répression …  Alors je me sens en droit de dire : allons-nous éternellement maintenir saignantes les plaies de nos désaccords nationaux ? Le moment n'est-t-il pas venu de jeter le voile, d'oublier ces temps où les Français ne s’aimaient pas, s'entre-déchiraient et même s'entre-tuaient ? » 

    Conférence de presse du 21 septembre 1972. 

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    Nouvelle « affaire Maurras » : Pour en finir avec le temps où les Français ne s'aimaient pas ...

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  • Livres • « L’Essence de la modernité »

    244911715.jpgAllégorie de la Révolution Française avec la déclaration des droits de l'homme de 1789

    Présentation de L’Essence de la modernité de Rémi Hugues

    En affirmant qu’ « un agnosticisme rigoureux à l’égard de l’idée de modernité est peut-être impraticable », Paul Ricœur, devenu quelques années après sa mort une figure intellectuelle éminente de la République macronienne, admet dans son essai La Mémoire, l’histoire, l’oubli que l’âge moderne ne correspond pas à un déclin du religieux proprement dit, mais plutôt à la transformation radicale de la manière d’appréhender la religion.

    Ne serait-il pas plus juste de considérer que la modernité a inauguré une époque nouvelle de flottement religieux et d’espérance en un âge d’or terrestre ? La modernité serait à cet égard une phase transitoire conduisant vers un futur que l’homme nouveau issu de la révolution de 1789 juge fort désirable. Cet ouvrage dévoile les coulisses de cet âge où l’humanité s’est mise à croire en une utopie qui avait fait peau neuve.

    Recension  

    Voilà un essai dérangeant pour la « rien-pensance » qui régit aujourd’hui tant le « politiquement correct » que le « médiatiquement formaté », les deux piliers du nouveau façonnage sociétal qui incarnent précisément, dans ce qu’elle a de visible, « la modernité ».

    Pour l’auteur, « restreindre la définition de la modernité à une attitude donnée, indépendante de toute temporalité, est un écueil à éviter lorsque l’on poursuit cette quête consistant à l’identification de son essence au sens socratique… »

    « La modernité n’est pas seulement un état d’esprit plus favorable au futur qu’au passé. Elle s’inscrit dans le temps, et secondairement dans l’espace. Ce volume a pour objet de préciser cet espace-temps, il ambitionne, on l’a dit, d’extraire l’essence de ce mot tant usité par nos contemporains. »

    Être « moderne » – le maître mot de Lionel Jospin, qui le mettait médiatiquement à toutes les sauces pour justifier ses décisions – n’est pas en fait une attitude nouvelle, spontanée, générée par un certain enthousiasme générationnel, c’est paradoxalement adhérer à un mode de pensée et d’action qui résulte d’un cheminement intellectuel précis débouchant sur un nouveau schéma sociétal où l’immédiateté reste, par nature, gage d’obsolescence.

    C’est précisément à l’analyse de ce cheminement, à la découverte de ses origines, à l’exposé de ses racines historiques, ethniques et religieuses et à l’élaboration de ses synthèses idéologiques, que nous convie l’auteur.

    Une analyse qui invite le lecteur à reconsidérer – à la lumière d’éléments judicieusement choisis et intentionnellement mis en regard – une image convenue et banalisée de la modernité où se conjuguent amélioration du confort, libertés individuelles exaltées jusqu’à la permissivité, mondialisme et démocratie…

    Un voyage dans le monde des idées qui nous transporte à travers tout le monde occidental depuis ses racines bibliques d’un judaïsme mythifié, débouchant sur le christianisme ciment de la royauté, jusqu’aux constructions messianiques du sabbataïsme et du frankisme qui influèrent directement sur les théoriciens révolutionnaires, maçons, républicains, puis marxistes ; ceux qui présideront à l’instauration de la laïcité devenue une dogmatique omniprésente dans notre idéologie politique moderne, gage de « rationalité ».

    Et Paul Ricœur s’interroge : « un agnosticisme rigoureux à l’égard de l’idée de modernité est peut-être impraticable. »

    L’auteur appuie sa démonstration sur une riche illustration bibliographique, qui s’avèrera d’autant plus dérangeante pour la bien-pensance normative actuelle qu’elle en appelle bien souvent à des « monstres sacrés » consacrés au XXe siècle comme Freud ou Marx, voire Levinas pour ne signaler que ceux-là…

    Une analyse sans concessions qui n’hésite pas à s’attaquer courageusement aux mythes fondateurs de notre épopée civilisationnelle (tel le refus de l’existence de Moïse en tant que personne physique) pour relier à nos racines religieuses les plus anciennes les excès actuels d’un fondamentalisme régénéré en réaction au nom de la mystique, politique, de la modernité.

    Certains lecteurs, peu avertis de ces questions ou déjà trop sûrs des vertus dites démocratiques, seront sceptiques à l’idée de supposer que le terrorisme islamique soit finalement favorisé par l’Atlantisme et s’avère objectivement le meilleur auxiliaire d’Israël, comme d’autres hésiteront à admettre que la révolution ukrainienne ait pu être financée par des intérêts sionistes, notamment par Soros instigateur par ailleurs de la création des femen…

    Un exemple parmi d’autres pour nous faire interroger sur les origines du féminisme, l’un des derniers avatars sociétaux de la modernité…

    Nous ne suivrons pas forcément l’auteur dans l’idée que les pyramides d’Egypte aient « survécu au déluge », ni dans l’hypothèse que le gauchisme islamique est une création iranienne émergeant sur la scène politique à travers la personnalité de l’ayatollah Khomeiny, mais force est de constater que les idéologies violentes - qui s’épanouissent aujourd’hui dans l’islam salafo-wahhabite récemment rejeté par le sunnisme - trouvent leur origine dans les groupes extrémistes juifs tels les Sicaires, comme l’enseigne très justement le professeur de criminologie Bauer, maçon, ancien Grand Maître du Grand Orient…

    (L’islam iranien est chiite et n’obéit pas à cette philosophie…)

    Sur le plan économique cette modernité s’est traduite par l’émergence du capitalisme, comme elle s’est identifiée à la démocratie sur le plan sociétal.

    Une démocratie dont on sait aujourd’hui comment elle a été détournée par le marxisme triomphant et instrumentalisée par des appareils politiques dans les « républiques libérales » où elle sert toujours aujourd’hui de caution à leur légitimité.

    Cet essai est donc une réflexion utile pour tous ceux qui voient encore, dans cette modernité qui s’avère désormais agonisante, l’espérance d’un futur qui serait plutôt… un naufrage !   

    L'Essence de la modernité, de Rémi HUGUES, Edilivre, 2018, 292 pages, 20,50 €

    Claude Timmerman
    Biologiste et environnementaliste, éditorialiste et conférencier